La préface d’Erwan Cario à notre prochain framabook « Simple comme Ubuntu »

Classé dans : Framasoft | 11

Temps de lecture 7 min

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Dans la fournaise de l’été dernier, le journaliste de Libération Erwan Cario s’est rendu célèbre pour avoir mis en ligne sur le site des Écrans son très savoureux Journal d’un novice où il racontait au jour le jour son propre « parcours initiatique d’un passage au système libre Linux », en s’appuyant pour ce faire sur la distribution Ubuntu.

Je n’avais personnellement pas manqué de le remercier tant il est important de pouvoir ainsi élargir notre audience et par un enthousiasme communicatif, qui n’en oublie ni rigueur ni objectivité, donne envie à d’autres de suivre le même chemin migratoire.

C’est donc tout naturellement que Didier Roche s’est adressé à lui pour lui demander de rédiger la préface de la prochaine mise à jour de son framabook « Simple comme Ubuntu » qu’il avait eu la délicatesse de citer dans sa chronique. Et il a très gentiment (et gracieusement) accepté, donnant au passage également son accord pour que cette préface soit sous licence libre.

Ce nouveau « Simple comme Ubuntu » sortira demain, histoire de suivre de moins de trois semaines la nouvelle version d’Ubuntu, la 8.10 Intrepid Ibex, alias le Bouquetin Intrépide. Mais nous aurons bien le temps d’en reparler, et en attendant, tel un avant-goût, je vous laisse découvrir cette préface d’Erwan Cario dont le fond et la forme sont d’une qualité similaire à son journal estival, si ce n’est même un petit peu plus ;-)

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La préface de « Simple comme Ubuntu » version 8.10

Erwan Cario – novembre 2008 – licence Creative Commons By-Sa

Quand je croise quelqu’un qui n’a pas encore vu une série comme Les Soprano ou Battlestar Gallactica, au lieu de hurler au scandale et à l’inculture crasse (je pourrais, notez), je ne peux pas m’empêcher de penser « petit(e) veinard(e) ». Parce que le plaisir de la découverte ne m’est plus accessible. Je peux les revoir, certes, mais il m’est difficile aujourd’hui de m’extasier devant tel retournement ou d’être assommé par telle révélation sur un personnage. La première fois n’arrive qu’une fois. C’est bien dommage.

Donc si vous être en train de lire cet (excellent) ouvrage parce que vous avez décidé de franchir le pas, de partir à la découverte d’Ubuntu… petits veinards. Je suis un peu jaloux. Comme pour une série ou un film, je m’en voudrais de dévoiler dès maintenant toutes les petites découvertes qui vous attendent. Je ne vais pas « spoiler » Ubuntu, rassurez-vous, mais les premiers pas dans ce système libre vous réservent quelques bonnes surprises, et quelques retournements de situation sympathiques. Mais je ne vais pas jouer au vieux sage qui regarde d’un œil malicieux le jeune disciple qui a décidé de se lancer sur la voie du shaolin, je n’en suis moi-même qu’à mes débuts. Un peu plus de trois mois à l’heure où j’écris ces lignes que j’utilise quotidiennement un ordinateur portable sous Ubuntu. Et mises à part quelques mésaventures sans grande importance que j’ai raconté ailleurs, tout roule parfaitement bien. J’ai même réussi à faire fonctionner ma souris bluetooth, c’est dire !

Ces quelques mois de pratique ne font pas de moi un gourou d’Ubuntu, loin s’en faut. Et je n’ai pas la prétention de le devenir un jour. Mais ma petite expérience m’a appris quelques petits trucs que je me permets de retranscrire sous la forme de petites règles. Rien d’impératif, comme toutes les règles, elles existent aussi pour être transgressées.

Règle N°1 : La découverte d’Ubuntu, c’est un jeu. Non pas un jeu d’enfant (quoique…), mais un parcours ludique qu’il faut aborder l’esprit ouvert. Il y aura sans doute des obstacles, des petits (« hum… dois-je cliquer sur Appliquer ou sur Annuler ») et des plus grands (« comment puis-je faire pour utiliser cette imprimante qui date du 20e siècle ? »), mais ils ne sont pratiquement jamais insurmontables. Et si on prend la chose du côté ludique, on s’amuse plus qu’on ne rouspète. En plus, pour reprendre une expression du jeu vidéo, si la difficulté devient trop grande, les soluces sont sur Internet.

Règle N°2 : Installer Ubuntu, c’est un choix. Faire le choix de son système d’exploitation est sans doute une nouveauté pour vous. En tout cas, ça l’a été pour moi. Quinze ans sous Windows avant de franchir le pas. C’est la seule fois où, à l’achat d’un ordinateur, je me suis demandé quel système j’allais prendre. Jusqu’ici, l’alternative consistait à acheter une machine Apple livrée avec son propre système, ou un PC plus classique et donc Windows. Sans avoir de choix, car on ne se pose même pas la question. Pour passer à Linux, il faut que cette question existe. Avec ce choix, il n’y a aucune obligation en absolu. Vous l’avez peut-être fait tout simplement à cause de la gratuité du système. Mais même dans ce cas, je ne saurais trop vous conseiller de vous renseigner sur ce qui a permis que vous puissiez le faire. Logiciel libre, GNU, GPL, open-source, l’histoire de ce dernier quart de siècle est passionnante. Aussi, prendre conscience de la somme de travail qui a permis à Ubuntu et à d’autres systèmes et logiciels de voir le jour permet de relativiser ses petits soucis de souris Bluetooth (non, je ne fais pas une fixation).

Règle N°3 : Vous n’êtes pas seuls. C’est sans doute un des points les plus extraordinaires de Linux et donc d’Ubuntu : la serviabilité de ses utilisateurs. Si vous avez un problème, non seulement vous pouvez être sûr que quelqu’un l’a déjà eu et que la réponse se trouve dans un des nombreux forums de discussions et blogs existant, mais si par le plus grand des hasards ce n’était pas le cas, il suffit de poser la question pour qu’un habitué vienne à votre secours. Bon, d’accord, parfois, ils sont un peu bizarres et ils parlent un langage qui peut paraître étrange, mais croyez-moi, ils feront tout pour vous aider. Pourquoi ? Peut-être à cause des deux premières règles que j’ai énoncé. Et vous verrez, d’ici quelques mois, vous finirez peut-être par aider un débutant à se dépatouiller. C’est toujours très gratifiant.

Règle N°4 : Ubuntu, ce n’est qu’un système d’exploitation. Rien de plus. Je sais, c’est déjà énorme, mais quand vous allumez votre ordinateur, ce n’est pas pour admirer l’écran de lancement. Enfin, on peut, mais ça devient un peu lassant à la longue. Le but d’un système d’exploitation, c’est de se faire oublier. D’ici quelques semaines (quelques jours, même), vous allumerez votre ordinateur, vous lancerez votre navigateur web, vous retoucherez vos photos, vous écrirez des textes sans même vous soucier de ce qui fait tourner tout ça. Aujourd’hui, des milliers de personnes, moi le premier, utilisent Ubuntu pour une utilisation courante (Internet, bureautique, images, etc.) sans rencontrer le moindre problème. Aucune raison qu’il en soit autrement dans votre cas.

Règle N°5 : Il est interdit de parler du Fight Club. Euh… Non, ça, c’est une autre histoire.

Mais c’est vrai, faire ses premiers pas sur un nouveau système d’exploitation, c’est parfois un peu intimidant. C’est un peu comme partir en voyage dans un pays qu’on ne connaît pas et dont on ne parle pas la langue (mais on a vu des photos, il paraît que c’est très joli !). C’est là que « Simple comme Ubuntu » entre en jeu. Le livre de Didier Roche, c’est un peu le Guide du Routard d’Ubuntu. On y trouve un descriptif complet de l’endroit, des itinéraires conseillés, des bonnes adresses, les bons plans et les lieux à visiter (ne ratez pas le gestionnaire de paquets, c’est magnifique). En suivant ses indications, difficile de se perdre. Et vous êtes sûr de ne rien rater d’important. Et puis, peut-être, après avoir écorné les pages, souligné les petits trucs, cerclé les points importants (rien que pour ça, achetez le livre, en pdf, c’est plus dur), vous vous sentirez à l’aise pour partir à l’aventure sur les chemins de traverse d’Ubuntu.

Mais n’allons pas trop vite. Chaque chose en son temps. Je ne veux pas vous retarder, la séance va commencer. Prenez vos places, installez-vous confortablement.

Il était une fois un bouquetin intrépide…

11 Responses

  1. Jean

    Excellent :-)))

    Linux, le logiciel libre, c’est vraiment une autre manière de faire de l’informatique, moins solitaire et plus solidaire.

    Erwan Cario a beaucoup reçu de la communauté à l’occasion de ses articles de cet été. Et il donne à son tour ici en acceptant de rédiger non seulement gratuitement mais aussi librement la préface du bouquin.

    Et en plus le moins que l’on puisse dire c’est qu’il n’a pas bâclé !

  2. Maz

    Erwan, n’oubliez donc pas qu’une souris BlueTooth, c’est quand même mieux quand le portable fait BlueTooth ^^. Je comprends bien maintenant pourquoi vous faites une fixation! Merci à vous.

  3. Samuel

    Erwan Cario : le "newbie" le plus célèbre de France ! … C’est une idée originale de choisir un débutant pour parler aux débutants. Son côté candide combiné à un vrai talent d’écriture en fait un excelent ambassadeur ! J’espère juste que le "guide du routard" dont il parle ne servira pas à faire du tourisme mais qu’il permettra de devenir un vrai "immigré" ! Surtout que avec les logiciels libres, les immigrés ont le droit de vote grace à la liberté n°3 (droit de modification du code)…

  4. Pierre

    Juste une remarque: Ubuntu n’est pas un système d’exploitation mais une distribution basée sur le système d’exploitation GNU/Linux et composé de logiciels libres, tels que Gnome, OpenOffice, The Gimp, …

  5. glopglop

    @ Pierre

    Certes, mais il faut savoir simplifier pour enseigner. Quitte à être à la limite de l’exactitude, voire même au-delà de cette limite. Il est toujours temps de rectifier et de préciser ensuite.
    Ubuntu, et surtout ce livre, s’adresse aux débutants. la distinction noyau/système/distribution n’a guère d’importance *pour le moment*

    Sans rancune néanmoins 😉

  6. plf

    D’autant que cette distinction n’a (à ma connaissance) jamais été faite pour les "distributions" Microsoft® Windows® dites grand public… Ensuite, la distinction libre/privateur est sans doute plus intéressante et accessible, non ?

    Ubuntu = Windows 😉

  7. pierre

    Justement, lorsqu’on installe Windows, on n’installe qu’un strict minimum ( le SE et quelques applis ) alors que lorsqu’on installe une distribution GNU/Linux, on installe toute une palette de logiciels en plus: bureautique, multimedia, internet, … chose que vous devez installer séparément sur Windows.
    Et ne parlons pas de la facilité de mise à jour ou de recherche et d’installations de nouveaux logiciels ( en particulier avec Ubuntu ).
    Une distribution GNU/Linux, c’est beaucoup plus que Windows seul, en terme de logiciels installés.
    A mon avis, la nuance est de taille et doit être exposée aux personnes débutantes.

  8. plf

    "Une distribution GNU/Linux, c’est beaucoup plus que Windows seul, en terme de logiciels installés."

    Ben voilà : inutile de la jouer geek pour le dire.

    Ubuntu ? Windows 😉

  9. malademental

    "Une distribution GNU/Linux, c’est beaucoup plus que Windows seul, en terme de logiciels installés."

    Pfffff… Une distribution gnu/linux debian tu peut choisir d’installer seulement le systeme de base, je ne supporte pas cette initiative du "simple comme ubuntu", sans rentrer dans un débat sur canonical, mark shuttleworth, et les modules propriétaires ajoutés dans le kernel linux, avec ubuntu, j’ai l’impression qu’on rentre dans l’ère de l’ultra simplification du libre et par la même de l’ultra-abrutissement de l’utilisateur de base… Je ne croyais pas, il y a 2 ans, lorsque je l’ai installé sur ma machine, qu’ubuntu marchait dans cette optique d’ultra simplicité qui fait passer l’initiative "se mettre a linux" à "se mettre a ubuntu", je suis vraiment fâché des abus de langages sur les mots kernel, distribution, ou OS, les mots libre, opensource, les licenses GPL, sont utilisés à tord et à travers par des gens qui n’ont pas conscient de la diversité du logiciel libre! Debian est aussi simple qu’ubuntu à installer sur une machine contrairement à ce que pensent la majorité des gens, je dis non aux dépôts non-free, je dis non a canonical!
    De jolis graphismes à l’installation ne font pas un système d’exploitation de qualité!

    ubuntu = moyen de faire de gros profits sur le dos du libre?
    Essayez de demander à un utilisateur lambda d’ubuntu ce qu’est la "GNU General Public License", s’il ne sait pas, alors le jour ou ubuntu ne sera plus sous gpl car il contiendra à l’installation des logiciels propriétaires, les personnes qui ne savent pas ce qu’est la GPL ne verront même pas la différence…

  10. plf

    "avec ubuntu, j’ai l’impression qu’on rentre dans l’ère de l’ultra simplification du libre et par la même de l’ultra-abrutissement de l’utilisateur de base"

    C’est clair, Canonical Ltd. est le mal absolu… bien pire que Microsoft Corporation ; que dire alors de la Mozilla Foundation et de son Firefox même pas 100 % libre ?

    Heureusement pour nous, certains détenteurs d’un morceau de la vraie croix sont là pour dénoncer les agissements de tous ces hypocrites !

  11. xilun

    Je détiens moi aussi un morceau de la vrai croix (signé par Stallman et tout 😉 ) et voudrais témoigner sur l’importance d’un point que beaucoup (trop) jugent trivial : Linux est un noyau, c’est tout. Vraiment ! Parler de Linux pour désigner un ooffice ou autre lancé sous Gnome est au moins aussi aberrant que (attention analogie foireuse en vue) de désigner une voiture avant tout par la marque de ses pneumatiques. On pourrait remplacer Linux et les couches basse du système de 99% des utilisateurs principalement bureautique de disons Ubuntu (puisque c’est le sujet de l’article) par un système BSD ou Solaris sans qu’ils ne s’en rendent compte, c’est dire si désigner la distribution par un lapidaire "Linux" est hors sujet. En outre personne ne désigne un système Windows par NTOS (sauf peut-être quelques geeks chez MS).

    Le fait que Linux soit présent dans un système de permet pas en soit d’en inférer grand chose. Un des marché les plus prolifique pour ce logiciel est celui des systèmes embarqués, et quand je regarde les boites sur lesquels je travaille j’ai immédiatement la confirmation que ceux qui emploient Linux pour désigner Gnome ou KDE ont tord, tant ces deux logiciels ne sont pas présent dans mes boites :p

    Je pourrais citer encore l’exemple d’Android, système qui n’a strictement rien à voir avec un GNU/Linux habituel et pourtant contient bien un Linux.

    Parler de Linux pour désigner l’ensemble des logiciels libres et encore plus mauvais vu que pas mal de contributeurs de Linux (et en premier lieu le plus connu, son créateur) n’en ont pas grand chose à faire du logiciel libre et se réclament ouvertement du "pragmatisme", c’est-à-dire dans leur esprit le fait de ne surtout pas se soucier de ceux qui tente d’empêcher les utilisateurs d’exercer leur droits selon la licence, par des moyens détournés. Les personnes qui défendent le développement communautaire ne sont pas forcement les même que celles qui défendent le logiciel libre, et inversement.