Et si Internet et le Libre réalisaient la société sans école d’Ivan Illitch ?

Classé dans : Éducation, Mouvement libriste | 17

Temps de lecture 2 min

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Une société sans école - Ivan Illich - Couverture PointsJe suis en train de lire Une société sans école du prêtre catholique et iconoclaste Ivan Illich.

Rédigé en 1971, c’est un ouvrage que je conseille à tous ceux qui s’intéressent de près ou de loin à la question éducative (autant dire à tout le monde).

Si j’avais lu ce livre au jour de sa sortie, je me serais certainement dit que j’étais en face d’un bel utopiste, aussi brillant soit-il.

En le découvrant quarante ans plus tard, à l’ère d’Internet et de tous ses possibles, je crois plutôt avoir à faire à un grand visionnaire.

Voici ce qu’en dit la quatrième de couverture de mon édition de poche collection Points Essais  : «  L’école obligatoire, la scolarité prolongée, la course aux diplômes, autant de faux progrès qui consistent à produire des élèves dociles, prêts à consommer des programmes tout fait préparés par les autorités et à obéir aux institutions. À cela il faut substituer des échanges entre égaux et une véritable éducation qui prépare à la vie dans la vie, qui donne le goût d’inventer et d’expérimenter.  »

Il convient de déscolariser la société pour libérer l’apprentissage de cette structure unique, standardisée et rigide qui sépare artificiellement les individus ainsi que le temps où l’on travaille et celui où l’on consomme du loisir.

Et page 128, il y a cette citation que je trouve absolument remarquable et qui a motivé la rédaction de ce court billet  :

«  Un véritable système éducatif devrait se proposer trois objectifs. À tous ceux qui veulent apprendre, il faut donner accès aux ressources existantes, et ce à n’importe quelle époque de leur existence. Il faut ensuite que ceux qui désirent partager leurs connaissances puissent rencontrer toute autre personne qui souhaite les acquérir. Enfin, il s’agit de permettre aux porteurs d’idées nouvelles, à ceux qui veulent affronter l’opinion publique, de se faire entendre.  »

À mettre en parallèle avec ce que cherchent à réaliser Le Libre et son allié Internet aujourd’hui…

17 Responses

  1. loic

    Les idées ont l’air intéressantes mais pas le style d’écriture. J’ai pas encore réussi à le finir alors que j’ai dévoré son livre « la convivialité »…

    Autre problème : le vocabulaire. Comme pour les décroissants, on prend le mot à l’exact opposé alors que ce n’est pas exactement ce qui est proposé !
    (D’où le débat « décroissants » vs « objecteurs de croissance »)

    Ah aussi, il dit prendre l’école comme exemple seulement car en fait, ce sont les institutions qu’il critique. En effet, arrivé à un certains points celles-ci imposeraient l’effet inverse de leur raison d’être.

    Bonne lecture

  2. Patrice

    Bonjour,

    Je trouve que l’article suivant d’Isabelle Stengers, Philosophe, chargée de cours à l’Université libre de Bruxelles : http://ecolesdifferentes.free.fr/SI… est une étude très intéressante du texte. Cela complète bien le présent article du framablog et la philosophie du libre.

    Bien cordialement

  3. sourinux

    La société sans école d’Illich, c’est aussi une société sans « enfants », c’est-à-dire où ceux que l’on appelle « enfants » aujourd’hui n’ont pas de statut « infantilisant » mais sont des personnes à part entière. D’où certaines visions qui peuvent choquer, comme la possibilité du travail des jeunes bien avant l’âge légal instauré dans nos sociétés. Car pour Illich, le travail, en tant qu’activité productive orientée vers la satisfaction des besoins naturels, est le lieu privilégié de l’apprentissage, de l’échange de savoirs et de savoir-faire. Ce n’est bien sûr pas le même travail que celui que la majorité de nos concitoyens subit aujourd’hui.

    Les thèses d’Illich peuvent choquer, c’est un des rares penseurs à déconstruire radicalement le dogme du « progrès ». Il ne jette pas tout, mais presque. Il garde par exemple le roulement à bille (sic) et quelques autres inventions **simples** qui, pour lui, ont un réel intérêt. Pour le reste, il s’attache à démontrer à quel point le développement nous a fait reculer. Voir par exemple sa critique de la voiture individuelle, où il semble prouver (mais est-ce une vraie démonstration ?) que l’on va plus vite à pied qu’en voiture.

    Pas sûr donc qu’il apprécierait l’internet, mais nous avons le droit d’apprécier, nous 😉

  4. Romain (Collège des Bernardins)

    Bonjour,
    Une approche intéressante en effet par rapport au mouvement du Libre et de son état d’esprit qui, il me semble, est empli d’entraide et qui fait place à l’expérimentation et à l’autodidacte.

    Peut-être trouverez-vous ce commentaire trop promotionnel mais il me semble que ce j’ai à vous proposer fait sens avec cet article.
    Il s’agit d’un billet du « Blog de la Recherche » récemment ouvert par le Collège des Bernardins.
    http://recherche.collegedesbernardi

    Marcel Gauchet bénéficie actuellement de la présidence de la chaire au sein du pôle de recherche. Il y étudie notamment les questions d’éducation et de transmission.
    Si cela peut contribuer à faire avancer la réflexion, tant mieux !

    Merci Patrice pour ce lien, une lecture également pleine de sens.

    ps : tous les articles du blog sont sous un contrat CC BY-NC-SA v2 Fr. Faites-en ce que bon vous semble.

  5. Desirade

    Il est important de lire Illich dans l’édition anglaise- Deschooling Society est loin d’être Une société sans école. Il est heureux de voir enfin les travaux d’Illich retrouver un peu de notoriété en France après une éclipse essentiellement due au dédain des intellectuels de la gauche caviar.
    Tools for Conviviality, Energy and Equity, The Right to Useful Unemployment, Shadow Work, Gender, H2O and the Waters of Forgetfulness etc etc sont disponibles gratuitement sur Internet.Un groupe de lecture existe sur Wikiversity autour de Deschooling Society http://en.wikiversity.org/wiki/Ivan

  6. GdeC

    belle utopie (elle est nécessaire à ce monde qui souffre tant de son absence) mais qui ne se pose pas la question de l’humain derrière la machine. le gamin devant son ordi est seul. Et la transmission d’informations n’est pas quelque chose de simplement mécanique, mais qui nécessite un supplément d’âme. Pour el confirmer, vous souvenir des profs et instits qui vous ont le plus marqué, qui vous ont donné envie de lire, écrire, compter, vous intéresser à tel ou tel sujet…

  7. Patrice

    @GdeC
    En fait, je suis prof et pense effectivement qu’un bon prof est mieux qu’un tutoriel. Mais pour ma part, c’est la doc de SPIP et de ses boucles qui m’ont initié réellement à la programmation (pour enchaîner sur les scripts bash) ; ce sont les ouvrages scientifiques (depuis le lycée au CDI puis dans les bonnes librairies) qui m’ont fait apprécier la SVT ; ce sont les bouquins de la bibliothèque poussiéreuse familiale qui m’ont fait apprécier la lecture… je n’ai pas vraiment de souvenir de prof m’ayant marqué justement, ou uniquement par des anecdotes.

    Par contre, je pense sincèrement que l’utilisation des outils informatiques peut permettre aux enseignants de fédérer le meilleurs de leurs enseignements et, par là-même, marquer vraiment les élèves avec des cours irréprochables et intéressants.

    bien cordialement,

    Patrice

  8. Lolo le 13

    De la transmission du savoir, il n’est pas seulement question de passer uniquement par Internet. Il n’est pas utile de voir les enfants ou plus précisément les apprenants (pour gommer toute notion d’age) se coller devant un quelconque écran pour apprendre.
    La meilleure façon d’apprendre, c’est avec un professeur en cours particulier (et surtout pas à 30, 35 ou 40 par classes) à la Montaigne, si mes vieux souvenirs de collège sont encore justes.
    De là, nous voyons qu’il est nécessaire que tous les corps de métiers apprennent à faire apprendre. Mais dans la vision de monsieur Illich est-il question justement d’apprendre auprès de ceux qui savent faire apprendre.

    J’ai en tête la récente anecdote de mon beau-frère qui est professeur des écoles en reconversion et qui s’aperçoit que lorsqu’il suit un cours fait par un ancien métalo pas pédagogue qu’enseigner est réellement un métier. 🙂

  9. Antonin

    Hum, aKa, je ne suis pas persuadé que ce soit parce qu’internet existe que tu vois Illich comme un visionnaire.

    Je crois plutôt que nos structures mentales ont évolué par l’avènement et la montée en puissance de cette technologie. Admettons que l’on supprime internet demain… Va-t-on pour autant abandonner la culture que nous avons développer autour de cette représentation de l’internet ? Je ne pense pas. Internet est la technologie qui incarne le mieux ces valeurs. Il y a deux siècles c’était probablement le livre. Et comme le dit Sourinux, si tu ramenais Illith à la vie, je ne suis pas non plus certain qu’il y verrait les mêmes choses que toi.

    J’ai des amis qui seraient totalement d’accord avec ce système qui est décrit mais qui voit internet comme une barrière à la mise en place d’un tel système. Ils te diraient que la virtualisation affaiblit les liens humains et empéchent la vraie rencontre. Que l’écran hypnotise et favorise la culture du zapping au détriment de la vraie étude, celle de la concentration et de l’effort long… etc

    A mon avis, ils ont tord, mais c’est simplement pour souligner qu’un objet technologique ne peut pas rendre réaliste une idée. Il y a un sens politique dans son architecture, sa pratique continue peut normer notre pensée, et au final, il est possible que notre vision change.

    Si demain on supprime internet, es-tu certain que tu changerais de point de vu sur Illith ?

    Ce qui est décrit par illith existait avant qu’il ne l’écrive. Certes, ça n’est pas généralisé, mais ça existe. Même sans internet, c’est un mode de partage du savoir qui peut être généralisé si suffisamment de personnes sont convaincues de son intérêt.

    Et pour construire cette utopie, pourquoi pas un annuaire des rencontres d’apprentissage libre ?
    Les critères ? libre accès, libre partage…

    Tiens regarde, ça existe déjà:
    http://www.onpeutlefaire.com/les-re
    Et à la tête du site internet, j’ai l’impression que cela manque de vivacité. Peut-être qu’en réactualisant un peu l’imaginaire politique, avec un Gnou ou deux, ces réseaux se raviveraient, qui sait ?

  10. saiasaka

    J’ai envie de mettre un court extrait d’un bouquin que j’ai lut et qui me faisait aussi beaucoup pensé au combat du libre et qui colle un peu au sujet: C’est un extrait du « meilleur des mondes » d’Aldous Huxley

    Edition pocket p69:  » – Le retour à la culture. Oui, vraiment, à la culture. On ne peut pas consommer grand-chose si l’on reste tranquillement assis à lire des libres. »

  11. korbe

    @GdeC: Il est vraie que ce sont certains profs qui m’ont donné envie de lire des romans, d’écrire des histoires courtes, de voir la physique comme un sujet intéressant, etc…

    Mais ça reste dans les livres que j’ai le plus appris et le choix du libre je l’ai fais seul.

  12. tetatutelle

    Entièrement d’accord avec ce qu’affirme Sourinux ! « La société sans école » d’Ilitch est « l’une des références des anarchistes anticapitalistes » (drapeaux noirs), c’est à dire des « plus fervents défenseurs de la décroissance », il n’est donc pas certainement pas une référence pour qui considère la croissance économique et le progrès « indispensables à son bien être » ou en tout cas ne se sent pas la force psychologique de pouvoir s’en passer !

    Le problème n’est pas tant celui de l’enfant : on peut tout à fait lui donner du travail « adapté à son âge et au projet éducatif » tout en demandant parallèlement « aux adultes de poursuivre leur propre travail productif » ! Oui le système éducatif a besoin de changer (bien qu’il ait quand même déjà « énormément évolué ces dernières années » !) mais cette évolution n’a pas à être « imposée dans un sens idéologique quelconque » (par ex décroissant), l’idéal serait sans conteste une « cohabitation de systèmes éducatifs différents sur un même territoire », chaque établissement choisissant librement d’appliquer son propre système et ses propres méthodes (entendons-nous bien : cela n’empêche en rien toutes formes « d’échanges inter-établissements et projets communs » si ceux-ci sont mis en place « librement » et dans des objectifs intelligents, je ne ne suis pas en train de prêcher « l’autarcie éducative » absolue !)

  13. l

    Merci pour ces citations d’Ivan Illich, ça donne envie de partager son savoir-faire IRL et d’organiser des ateliers !

  14. sebseb24

    Une association à but non lucratif qui propose des cours de tous niveaux sur divers sujets (maths, histoire – révolution Française –, géométrie, physique, etc…).
    C’est essentiellement en Anglais, certaines vidéos sont VOST d’autres plus rares sont traduites en Français.
    Il y a plus de 2000 vidéos. Ces vidéos sont accessibles en direct download mais aussi en bittorrent.

    http://www.khanacademy.org/

    Je n’ai pas vu de licence sur leur site, mais c’est au moins gratuit.
    Et pour l’équipe de Framalang quand il n’y a plus rien à traduire (en admettant que cela puisse arriver) ils recherchent des gens pour traduire leurs vidéos dans toutes les langues.

  15. K.

    A ce propos

    Voila ou en la khan academy
    http://singularityhub.com/2011/02/1

    Permet un suivie détaillé pour le professeur qui devient un tuteur ( il ne professe plus, il n’est plus celui qui dicte : il prend tout son vraie role ) pour aider SEULEMENT certains éléve qui bloquent: car les éléves sont autonomes