Mémorandum Covid-19 pour du libre et de l’open en conscience : enseignements et impulsions futures

Nous publions ci-dessous un texte collectif, inititié par différents acteurs du libre et de l’Open(Source|Science|Hardware|Data), suivi des impulsions envisagées.

À Framasoft, nous signons rarement des tribunes en tant qu’organisation. Essentiellement pour trois raisons : 1) elles nous placent dans une situation d’autorité, que nous rejetons, 2) lorsqu’il s’agit d’un appel ou même d’une alerte aux pouvoirs publics, elles nous placent dans une position de soumission aux dits pouvoirs, 3) globalement, cela fait bien quelques décennies qu’aucune tribune n’a eu de réelle influence, en dehors d’un pouvoir d’informer (à relativiser avec l’accroissement important du nombre de tribunes publiées).

Pourtant, bien que n’ayant que peu d’espoir qu’il apporte un réel changement (« Qui vit en espérant meurt désespéré » dit le proverbe), nous avons co-signé le texte ci-dessous, publié ici sous la forme d’un mémorandum (« document ou autre communication qui aide la mémoire par enregistrement d’événements ou d’observations sur un sujet dans une organisation »).

La raison principale en est que ce mémo fait une bonne synthèse de la situation actuelle, et surtout qu’il pose des mesures concrètes que les signataires souhaitent voir mis en place rapidement. Cela à un double effet positif. D’abord, cela permet de garder trace de la situation du libre et de l’OpenSSHD (oui, je crois que je vais revendiquer cet acronyme pourri à base de private joke) en période de pandémie. Ensuite, au travers des objectifs fixés dans les mesures actionnables, cela permettra de constater si, oui ou non, les institutions et la société civile ont embrayé, ou si on en reste – comme souvent – à une liste d’injonctions ou de demandes au Père Noël.

Apporter notre signature à ce texte, c’est lui reconnaître la valeur intrinsèque de poser les choses.


 

Mémorandum Covid-19 pour du libre et de l’open en conscience : enseignements et impulsions futures

Le texte est mis à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International.

Le texte qui suit a été nourri de la contribution d’une trentaine de personnes œuvrant aujourd’hui en se fondant sur les principes communs de la libre circulation de l’information, de gouvernance ouverte et de modèles sociaux durables. Il est accompagné d’une série d’« impulsions » ayant germé de ces échanges, faisant apparaître 6 principaux enseignements et proposant 7 mesures politiques immédiatement planifiables.

La situation exceptionnelle provoquée par la pandémie de COVID-19 et le confinement consécutif ont redonné toute son importance au numérique en tant que technologie de communication, mais aussi d’empowerment (c’est-à-dire, permettant de redonner du pouvoir d’agir et du contrôle à tout un chacun), de création collective et de développement de solutions répondant aussi bien à des enjeux globaux que locaux. Renouant ainsi avec les origines d’Internet et du web, des courants communautaires de solidarité, complémentaires ou alternatifs aux dispositifs publics, illustrent une nette tendance en faveur de l’ouverture dans ses différentes formes : l’open science (partage des données et articles de la recherche) devient le principe, la démocratie participative une volonté collective, les logiciels libres, l’open source et l’open hardware les fondements, et le libre partage de la culture, enfin, une conséquence inéluctable.

Deux raisons peuvent certainement être avancées à cette résurgence dans la sphère politique et sociale.

D’une part, ces initiatives communautaires ont fait preuve d’une capacité à répondre concrètement, rapidement et efficacement à des enjeux sociaux inédits grâce à des pratiques expérimentées dans des réseaux d’acteurs et de tiers-lieux déjà existants, soutenues par des réflexions théoriques, des outils juridiques et des modèles économiques éprouvés. Elles conjuguent la volonté de « Penser global, et d’agir local ».

D’autre part, l’insuffisance des réponses issues de l’intervention des États ou du jeu des marchés est apparue au grand jour, compte tenu de l’ampleur des événements. D’autres types d’actions réalisées sous la forme de « communs numériques » ont aussi été rendus possibles dans de nombreux domaines. Les communs numériques sont des ressources ouvertes coproduites et maintenues par une communauté qui définit elle-même ses règles de gouvernance et considère ces ressources comme génératrices de liens sociaux plutôt que comme des marchandises soumises aux lois du marché.

Penser l’« après » appelle à se placer au-delà des visions dichotomiques et d’un solutionnisme social et technique.

Les vies de ces projets et expérimentations, réussites ou échecs, invitent ainsi à en tirer quelques premiers enseignements pour laisser la fenêtre ouverte à des futurs possibles désirables, renforcer les prises de conscience actuelles d’une large population ayant expérimenté plus ou moins facilement le « numérique » pour les ancrer par la suite dans des usages numériques respectueux des individus et des milieux où ils cohabitent.

Ce document soutient la place de ces manifestations et réfléchit à leur pérennité pour une modification organisationnelle et sociale plus large. En plus d’exemples concrets pour illustrer les dynamiques en marche, et une mise en lumière des points les plus urgents à la coordination des actions, l’enjeu ici est aussi de donner un cap à suivre pour mener à moyen ou long terme des actions collectives.

Libre, ouvert et co-opératif, un modèle qui coule de source

Au cœur de la situation actuelle, un des rôles majeurs joués par la participation collective de la société civile a été d’apporter une information fiable et de qualité sur l’évolution de la pandémie et de répondre aux besoins locaux (cartographie d’entraide dans des villes, détail du suivi de la maladie par région, etc.) et globaux.

L’open data y joue un rôle prépondérant. Cette démarche est tout d’abord une nécessité politique dans un souci de « transparence » et de redevabilité sur les choix actuels (voir notamment « Le COVID19 et les données ». Ces actions le sont aussi en termes d’innovation grâce aux infrastructures et communautés existantes (voir notamment « Ça reste ouvert »). Depuis le début de la crise, de multiples projets open data ont vu le jour sur le sujet, hébergés sur data.gouv.fr ou d’autres plateformes.

Ensuite, cette démarche ne peut être possible qu’en s’appuyant sur des pratiques de science ouverte (open science) regroupant à la fois des chercheurs d’organisations internationales, des instituts de recherche publics et des data scientists de différents domaines. Le partage des données, articles scientifiques et discussions associées dans cette situation de crise s’est révélé un fonctionnement nécessaire pour comprendre et interpréter avec rapidité et souplesse la situation, et proposer des modèles de simulations et des visualisations rendant ces données intelligibles (voir notamment COMOKIT, veille-coronavirus.fr, covid19-dash, Coronavirus Country Comparator,).

La visée de ces projets est double. D’une part, il s’agit d’informer, d’aider à trouver les meilleures solutions médicamenteuses et les formes d’organisations sociales à visée sanitaire, politique, ou économique les mieux adaptées, et ce de manière ouverte et transparente. D’autre part, faciliter la participation aux débats concernant les prises de décisions actuelles et à venir (telles les initiatives Écrivons Angers et la consultation du collectif #LeJourdAprès), dans le monde entier.

Répondant aux besoins du moment avec leurs savoir-faire et compétences, les communautés des makers et de l’open hardware se sont rapidement mobilisées (voir notamment les projets listés sur covid-inititatives). Elles ont ainsi prototypé des matériels médicaux à faible coût et facilement réalisables dans des tissus locaux (via des tiers-lieux et fablabs) en France et dans le monde entier. Tout cela s’est mis en place particulièrement rapidement en collaboration avec les milieux professionnels concernés et dans le respect des règles s’imposant en matière de santé (les visières, les respirateurs MUR ou encore MakAir).

L’aspect solidaire sous-tendant ces communautés est aussi majeur pour assurer des services quotidiens, trouver des solutions afin de continuer les activités quotidiennes dans les milieux professionnels et éducatifs, mais aussi de retisser du lien. Il s’agit en effet d’éviter une amplification des inégalités par le numérique grâce à des initiatives de médiation numérique et de continuité (Continuité Pédagogique, Solidarité Numérique ou Droit-Covid19). À ce titre, les entités permanentes (sur le modèle des Fabriques ou d’autres) ont prouvé leur capacité à fédérer pour initier, financer, faire grandir des communs dans les domaines clefs en s’appuyant sur les réseaux de tiers-lieux et Fablabs. Individus, sociétés, administrations et collectivités, tous sont solidaires devant la crise sanitaire, économique et démocratique.

Côté grand public, beaucoup ont franchi le pas de l’utilisation d’outils de visioconférence et d’autres applications en ligne pour échanger ou dialoguer avec leurs proches (lien social et familial), et soutenir leurs activités quotidiennes les plus diverses (travail, loisirs, logistique, etc.). Une fois passée la découverte des solutions anciennes comme nouvelles, les personnes utilisant ces services subissent souvent de plein fouet le modèle traditionnel qui transforme les usagers en client : un propriétaire de la technologie qui reste le seul décisionnaire des conditions d’accès (très souvent onéreuses) et qui a tout intérêt à limiter la compatibilité avec d’autres solutions. L’expérience même des difficultés propres au « numérique » n’a jamais été autant partagée et rendue palpable par des personnes d’habitude peu sensibilisées à ces enjeux (sécurité, vie privée, économie de plateforme). La plateforme Zoom découverte par beaucoup à cette occasion est une illustration actuelle de cette problématique de par la révélation de ses failles de sécurité ou de sa politique d’utilisation contestée des données personnelles des utilisateurs.

De tous les services offerts, les plus éthiques, solidaires et équitables sont ceux qui ont implémenté des logiciels libres (qui font de la liberté de leurs utilisateurs et utilisatrices un principe clef). L’orientation éthique y est intégrée by design, car ils sont conçus et pensés pour et par leurs utilisateurs et utilisatrices, et s’adaptent en continu grâce aux remontées de quiconque y contribuant. Ainsi, devant l’urgence de se tourner vers des outils de communication et d’organisation, les logiciels libres et open source développés par une communauté (pour une communauté encore plus grande) sont en capacité de répondre à plusieurs enjeux. Il s’agit en premier lieu d’enjeux de confiance (nul espionnage ou monétisation peu éthiques), mais aussi de décentralisation (les canaux traditionnels étant bien insuffisants au regard des demandes massives et simultanées), ainsi que de gratuité avec un modèle économique de base fondé sur l’ouverture des ressources.

Autre point, la fermeture de l’accès aux lieux d’exercice habituels des activités professionnelles, scolaires et culturelles a rappelé la nécessité de savoirs ouverts, amenant à un large mouvement de mise à disposition de ressources culturelles et de connaissances (livres, articles, expositions, contenus multimédias, journaux scientifiques, spectacles, etc.). Cela nous rappelle que la valeur de la culture et de la connaissance pour la société repose sur son accès partagé.

Open sans pérennité (& fondement juridique) n’est que ruine de l’âme

La situation actuelle rappelle en effet que les principes du libre et de la collaboration ouverte ne sont souvent pas assez compris en dehors des cercles d’initié.e.s.

En premier lieu, la différence entre libre et gratuit n’est pas forcément claire, et il en va de même pour les modèles économiques sous-jacents (« si c’est gratuit, vous êtes le produit »). Pour beaucoup, la mise à disposition gratuite de ressources est considérée comme suffisante, sans forcément saisir les bases juridiques et économiques alternatives proposées par les ressources libres.

Les choix juridiques ont pour intérêt de prévenir un affaiblissement des projets, ainsi qu’une augmentation des risques d’enclosure (c’est-à-dire de réappropriation et d’accaparement de la valeur par un seul). Ainsi, les éléments de gouvernance sont déterminants dans la construction de communs et la pérennité des projets. Ces règles de gouvernance et de rétribution juste permettent en effet d’éviter un affaiblissement des projets et leur essoufflement. En la matière, la longue et complexe histoire de l’économie sociale et solidaire (ESS) peut servir de repères pour (re)construire des modèles de développement a-capitalistes. Les ressources organisationnelles qui font son originalité (coopératives, mutuelles, associations essentiellement) ont été récemment renforcées par les coopératives d’activité et d’emploi et les SCIC qui s’attachent à promouvoir des nouvelles gouvernances et dynamiques de partage des richesses et, dans le cas des SCIC, de productions de biens et de services d’utilité sociale.

L’urgence est ainsi d’assurer l’ouverture des ressources, y compris leur gouvernance, tout en veillant à ce que les projets financés par de l’argent public dans le cadre de cette crise soient ouverts par défaut. Dans cet esprit, le Directeur Général de l’OMS appelle tous les pays à soutenir les démarches d’open science, d’open data et d’open collaboration. De la même manière, aujourd’hui face à la situation d’urgence, plusieurs acteurs (éditeurs, industriels, etc.) mettent gratuitement à disposition leurs ressources et biens immatériels. En ce sens, l’initiative Open Covid Pledge regroupe un ensemble d’initiatives privées et publiques s’engageant à garder leurs contenus et connaissances ouverts pour mettre un terme à la pandémie COVID-19 et minimiser ses effets. Néanmoins, au-delà des annonces ou des ouvertures temporaires en temps de crise, l’enjeu est plus vaste et implique un changement de modèle.

Partout où est le numérique, cela induit que l’ouverture devient la base de modèles économiques et sociaux respectueux des acteurs et utilisateurs y participant, pour assurer une vision à long terme inclusive et ouverte. Un appel fait par exemple par la tribune « crise ou pas crise, nous avons besoin tout le temps d’un savoir ouvert » invite au développement d’un plan national pour la culture et l’éducation ouverte par les ministères à l’image du Plan national pour la science ouverte. À ce titre, le Ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation (MESRI) a, sous l’impulsion du Comité pour la science ouverte, ainsi demandé l’ouverture complète et immédiate des résultats de recherche, toutes disciplines confondues, liés à l’épidémie de Covid-19.

Ce positionnement soulève l’enjeu même des cadres d’interaction entre puissances publiques et initiatives communautaires. La question de l’accompagnement et de la protection de ces initiatives par le gouvernement et les instituts publics est majeure. Elle se doit d’être renforcée par un ensemble de jalons juridiques et structurels pour protéger de telles initiatives aux formes peu communes, qui ne doivent pas rester éphémères. Pour reprendre une citation tirée du documentaire « Nom de code : Linux » : « Ce serait peut-être l’une des plus grandes opportunités manquées de notre époque si le logiciel libre ne libérait rien d’autre que du code ». Ainsi, il s’agit de continuer à œuvrer à une transformation du rôle des membres du secteur public pour les faire sortir de leur dépendance vis-à-vis d’un secteur privé organisé selon des priorités de rentabilité, pour soutenir et s’appuyer sur un tissu d’initiatives proposant des modalités de développement pérennes.

Dans l’esprit des partenariats public-privé (PPP) pensés comme partenariats publics-communs, donner corps à ces projets implique d’associer des infrastructures à la fois techniques, juridiques et sociales et de faciliter un changement de culture pour préparer un numérique s’intégrant dans des projets de société durables (tendances qui existent déjà, comme l’initiative Numérique en Commun[s], Science avec et pour la Société).

Qui veut aller loin ménage ses infrastructures

Les solutions proposées aujourd’hui par les communautés du logiciel libre et de l’open source répondent à de nombreux besoins numériques, comme en témoigne le « succès » des solutions proposées par l’association d’éducation populaire Framasoft (visioconférence, documents partagés : pads) ou les acteurs du Collectif des Hébergeurs Alternatifs, Transparents, Ouverts, Neutres et Solidaires (CHATONS). Toutefois, les infrastructures – techniques et humaines – sur lesquelles reposent ces services ne sont pas pensées et dimensionnées pour supporter la charge nécessaire au plus grand nombre. Au premier abord, l’on pourrait être tenté de penser que l’on touche du doigt les limites de ces modèles. Or, ce qui pourrait être perçu comme un « bug » ou une preuve d’inefficacité dans le système hyperproductif dans lequel nous vivons est plutôt la preuve que les modèles ouverts réfléchissent au temps long et aux implications sociales, politiques et environnementales qu’ils entraînent.

En effet, la logique de décentralisation sous-tendant les démarches ouvertes implique que ce ne soit pas à un seul responsable de résoudre le problème de toutes les personnes, mais plutôt que se mettent en place des mécanismes d’accompagnement et d’entraide mutuels permettant à chacun de disposer des solutions utiles et nécessaires : collectivement et globalement, plutôt qu’individuellement et de manière centralisée. Pour cela, à l’image du tissu de solidarité que ces initiatives créent sur l’ensemble du territoire en ce moment, il s’agit de consolider des projets impliquant de multiples acteurs qui déploient localement des solutions libres et ouvertes. C’est l’idée même des CHATONS de fournir des instances au niveau local pour héberger des solutions libres et open source. Le maillage du territoire par un ensemble de tiers-lieux et de Fablabs vient aussi répondre à une diversité de besoins et permet de mutualiser des ressources et outils tout autant que de partager des bonnes pratiques et savoirs communs créés.

C’est dans ce même esprit que le logiciel open source Jitsi sert de brique technique commune aux services opérés par de multiples acteurs, par exemple la fondation Jitsi, le GIP renater ou Framasoft avec framatalk et l’initiative « Ensemble contre le Covid-19 » lancée par Scaleway. Plus encore, les logiciels open source peuvent aussi être interconnectés par le biais de systèmes fédérés et décentralisés(permettant aux utilisateurs et utilisatrices d’une instance du logiciel d’être connectés à ceux d’une instance du même logiciel) : tels Diaspora, PeerTube, GNU Jami.

Or ce modèle de codéveloppement de solutions libres et open source, pour « une mise à l’échelle », implique un déploiement raisonné par rapport aux systèmes assurés par les solutions clefs en main offertes aujourd’hui (des solutions de communication à distance, au stockage de dossiers, etc.). La concurrence est particulièrement inégale puisqu’il s’agit de comparer un modèle pérenne, et donc à équilibre, avec un modèle productiviste n’intégrant pas dans son équation des critères de soutenabilité forte – déjà citées, les solutions de visioconférence particulièrement rapides, fiables et performantes qui continuent à investir à perte pour s’assurer la captation de la plus grande part de marché, dans une logique du “winner takes all” classique dans le monde du numérique. Les priorités de ces systèmes se fondent sur la quête toujours plus grande d’efficacité pour répondre aux besoins des utilisateurs et utilisatrices s’adaptant aisément à des innovations technologiques toujours plus rapides et performantes. Les considérations éthiques et de vie privée, même si celles-ci sont abordées (souvent par leur manquement), ne sont pas constitutives des principes fondateurs de ces modèles. Pire encore, la gratuité qu’ils peuvent offrir est parfois seulement temporaire (Trello), conditionnée (Google Maps, Google Mail, etc.) ou encore sujette à d’autres contreparties non nécessairement éthiques (tel l’antivirus Avast qui commercialisait les données personnelles de ses utilisateurs et utilisatrices ou le réseau Facebook qui, lors du scandale Cambridge Analytica, a révélé l’usage de son pouvoir d’influence sur ses utilisateurs et utilisatrices.

Aujourd’hui, plus encore, les initiatives des communs – offrant notamment une perspective écologique sur l’impact de l’utilisation des technologies numériques sur nos sociétés – résonnent tout particulièrement pour développer des milieux numériques durables,tout autant que pour penser la gestion des déchets numériques déjà produits (notion de communs négatifs). Ce qui se dessine ainsi, à l’inverse de solutions proposées pour une « sortie de crise », c’est l’importance d’accompagner le plus grand nombre vers une appropriation de cultures numériques pérennes plus solidaires et d’accepter aussi un ralentissement ou tout au moins une prise de recul critique sur ce que nous construisons.

Ne te limite pas à m’apporter des solutions, apprends-moi à les construire

L’expérience commune à l’échelle mondiale que nous traversons est aussi une opportunité unique pour faire comprendre largement, par des illustrations concrètes, les enjeux de société numérique et plus encore à rendre les citoyen.ne.s acteurs des décisions à prendre. C’est souvent par l’expérience que les apprentissages, les prises de conscience s’opèrent. Le moment que nous vivons est un point d’inflexion possible qu’il s’agit de saisir pour que les usages numériques se fassent avec les valeurs et principes du libre et des savoirs communs et ouverts.

Pour cela, il ne suffit pas d’apporter des solutions clefs en main, quand bien même elles seraient libres et ouvertes. Il s’agit aussi d’accompagner les usages et une évolution des cultures numériques pour permettre une citoyenneté plus éclairée, plus économe et plus souveraine vis-à-vis des risques de sécurité, sociaux, environnementaux et éthiques associés à ces technologies. Le « Cloud » par exemple n’est qu’un terme cachant des réalités techniques et juridiques bien concrètes. Aujourd’hui, rendre visibles les composantes sous-jacentes à ces mondes de l’immatériel est nécessaire, tout autant que de sensibiliser aux méthodologies garantissant la soutenabilité de tels projets. L’administration centrale, qui a intégré cette logique pour ses propres besoins internes en créant par exemple l’application libre de messagerie instantanée et sécurisée de l’État Tchap, rendue disponible récemment aux pompiers, donne un exemple encourageant aujourd’hui pour faire rayonner cette infrastructure plus largement. La puissance publique conserve un rôle déterminant pour opérer de tels changements, à la fois en tant qu’actrice et qu’orchestratrice de cette dynamique.

Par nature, un contenu ou un service gratuit fourni par une plateforme propriétaire a une trajectoire bien distincte d’une ressource construite et maintenue collectivement par une communauté. Plus encore, cela induit de considérer autrement la licence qui définit les termes d’usages d’une ressource conçue collaborativement par une communauté sous forme de contrat social et économique, et les outils juridiques traditionnellement utilisés. Organisée, la communauté d’une plateforme a plus de valeur que la plateforme elle-même. Cela rappelle aussi que les ressources numériques et immatérielles que nous utilisons sont aujourd’hui conditionnées par leur financement, encore plus peut-être lorsqu’elles sont proposées gratuitement aux personnes les employant. Il en va de même pour les ressources ouvertes, qu’elles soient hébergées et maintenues par les utilisateurs et utilisatrices ou encore par celles et ceux qui y ont un intérêt (acteurs publics, constructeurs de matériels, etc.). Ces idées de bon sens, pour être mises en œuvre, reposent sur un changement collectif en articulant l’échelle globale et locale. Ainsi, c’est un moyen de permettre une « souveraineté » locale (accès aux biens immatériels) tout en développant des collaborations internationales évitant le repli nationaliste.

Cette expérience a aussi aidé à la compréhension des processus mêmes de construction des savoirs. Les dernières semaines ont montré au plus grand nombre les coulisses de la recherche scientifique et de son modèle socio-économique. La crise actuelle, loin de n’être que sanitaire, montre également un enchevêtrement de décisions sociales et politiques s’appuyant sur des faits scientifiques – ces derniers, ainsi même que la méthode qui les fait émerger, faisant l’objet de nombreux débats. Les controverses portant sur les essais thérapeutiques de la chloroquine ou les revirements de situation des mesures de confinement selon les pays en fonction des modélisations qui soutenaient les décisions, soulignent comment les sciences s’articulent avec des enjeux sociaux, éthiques, économiques politiques (voir notamment le positionnement du Comité d’éthique du CNRS). Dans ce contexte, l’open science devient le fondement essentiel pour assurer un suivi des processus de décision. Elle ne doit cependant pas être réservée aux seuls chercheur.e.s mais doit permettre d’instaurer ses principes en société.

Cela demande, à l’image des valeurs de Wikipédia, d’œuvrer encore plus à une mutualisation de ressources en tant que communs numériques, avec un nécessaire travail de revues par les pairs qui n’impliquent pas seulement les professions de la recherche et de la santé, mais également la société civile (voir notamment le (réseau ALISS)) pour vérifier chaque information, l’enrichir afin qu’elle soit la plus fiable, éthique et la plus qualitative possible. Il y a donc là un défi de traduction et de médiation pour des individus et collectifs ayant chacun souvent leurs propres pratiques, et un bagage culturel et conceptuel qui peut s’avérer difficile à comprendre pour des sphères extérieures. Le moment que nous traversons vient remettre à plat les éléments fondamentaux qu’il s’agit de mettre en place dès maintenant pour protéger les dynamiques des communautés à l’œuvre tout en construisant des suites qui s’appuient sur un travail de fond commun pour maintenir et consolider les coalitions que ce moment aura vues émerger.

Découvrez les impulsions (enseignements et mesures) découlant de ce mémorandum.


Concrètement : pourquoi et comment ?

La crise actuelle démontre la fragilité du système économique et organisationnel sur lequel reposent nos sociétés.

Si elle en démontre la nécessité, il ne faut pas penser qu’une telle crise suffira à opérer un basculement. Penser un « après » nécessite donc un long travail de déconstruction opéré d’ores et déjà par les communautés constituées autour du libre, de l’open et des communs numériques, qui démontrent par leur existence même et leurs actions concrètes la possibilité de construire des projets d’intérêt général autrement.

Écrit durant la crise, le mémorandum rappelle l’importance et la place des initiatives ouvertes, participatives et collaboratives pour notre société. Il permettra de se souvenir, mais aussi d’inspirer nos politiques publiques à venir. Devant l’urgence, il se double d’un certain nombre de mesures immédiatement envisageables et parfois déjà initiées.

L’on tire de cette situation les enseignements suivants :

  1. Les mouvements « libres et ouverts », et ceux ancrés dans une dynamique de « communs numériques » participent aujourd’hui rapidement et justement à répondre aux besoins révélés quotidiennement par la crise sanitaire et sociale.
  2. La croissance du nombre de « communs numériques » permet d’imaginer une société structurée non pas autour de la détention d’une technologie, mais au contraire autour de la capacité des acteurs à travailler ensemble et à créer de la valeur en commun.
  3. L’attrait fort des modèles collaboratifs ouverts se retrouve confronté à une acculturation et une éducation encore insuffisante des acteurs souhaitant collaborer.
  4. Le développement d’une économie pérenne repose sur une sensibilisation aux enjeux juridiques et socio-économiques sous-jacents, afin d’assurer que ces nouveaux équilibres s’appuient sur des règles suffisamment consensuelles, claires et comprises.
  5. Les technologies numériques essentielles doivent être des « communs numériques » bâtis par des communautés respectueuses de la liberté et de leurs droits fondamentaux. Cette solution est plus longue, mais atteignable par nos sociétés si elles en prennent la mesure.
  6. Plus l’environnement, le contexte, les sujets montent en complexité, plus il devient essentiel de donner de nouvelles capacités d’actions et des moyens aux communautés distribuées, de se doter ainsi de nouveaux processus collectifs pour débattre, choisir et agir.

Compte tenu de la situation de crise, il est urgent et nécessaire dès maintenant que, par principe, des financements publics soient intégrés aux appels à projets ou appels à manifestation d’intérêt (AMI) de toutes les agences publiques et convergent pour alimenter un fonds de communs ouverts et pérennes.

Mesures actionnables

Plus encore, à l’aune de la crise que nous vivons toutes et tous et pour ne pas subir des mesures biaisées par une récupération politique ou économique des événements, nous souhaitons être assuré.e.s que d’ici 2021 :

  1. L’intérêt des dynamiques libres, ouvertes et collaboratives soit officiellement reconnu et soutenu dans leurs formes technologiques (logiciels, bases de données, documentations et spécifications, etc.) et systémiques (recherche ouverte, gouvernance ouverte, culture ouverte, etc.), en pensant la création et l’entretien d’infrastructures numériques essentielles à ces projets d’intérêt général.
  2. Des partenariats publics-communs soient réellement ouverts, dans chaque région, accompagnés de dispositifs nationaux, favorisant l’émergence de communs dans les champs numériques de notre société, dans des dynamiques d’ouverture, de collaboration et de frugalité numérique.
  3. Les modalités économiques et fiscales à destination des acteurs du numérique soient repensées pour éviter à tout prix les enclosures numériques et encourager la valorisation publique au travers de la diffusion ouverte des ressources financées par de l’argent public.
  4. Les modèles de propriété – et encore plus de « propriété intellectuelle » – soient interrogés véritablement à l’aune d’une société soutenable qui soit durable et prospère. Cela au moins dans leurs usages et capacités à répondre aux préoccupations sociétales majeures, en temps de crise et en temps normal.
  5. Un accompagnement soit mis en place vers l’ouverture des contenus et infrastructures des organisations publiques ayant pour mission l’accès ou la diffusion de la culture et des connaissances.
  6. Les synergies entre l’ESS et les communs soient renforcées dans le monde du numérique et des communs de la connaissance, en construisant des modèles d’économie sociale dans le numérique et en s’appuyant sur l’approche par les communs pour défendre les principes d’intérêt général et d’utilité sociale.
  7. Le statut des personnes contributrices aux communs soit reconnu en terme social et sociétal en leur consacrant des droits effectifs et opposables.

NB : le texte publié ci-dessus correspond au texte de mémorandum publié le 29/04/2020 et est soumis à de potentiels changements. Nous vous conseillons donc sa lecture sur le site officiel.

 




Pour un Web frugal ?

Sites lourds, sites lents, pages web obèses qui exigent pour être consultées dans un délai raisonnable une carte graphique performante, un processeur rapide et autant que possible une connexion par fibre optique… tel est le quotidien de l’internaute ordinaire.

Nul besoin de remonter aux débuts du Web pour comparer : c’est d’une année sur l’autre que la taille moyenne des pages web s’accroît désormais de façon significative.

Quant à la consommation en énergie de notre vie en ligne, elle prend des proportions qui inquiètent à juste titre : des lointains datacenters aux hochets numériques dont nous aimons nous entourer, il y a de quoi  se poser des questions sur la nocivité environnementale de nos usages collectifs et individuels.

Bien sûr, les solutions économes à l’échelle de chacun sont peut-être dérisoires au regard des gigantesques gaspillages d’un système consumériste insatiable et énergivore.

Cependant nous vous invitons à prendre en considération l’expérience de l’équipe barcelonaise de Low-Tech Magazine dont nous avons traduit pour vous un article. Un peu comme l’association Framasoft l’avait fait en ouverture de la campagne dégooglisons… en se dégooglisant elle-même, les personnes de Low-tech Magazine ont fait de leur mieux pour appliquer à leur propre site les principes de frugalité qu’elles défendent : ce ne sont plus seulement les logiciels mais aussi les matériels qui ont fait l’objet d’une cure d’amaigrissement au régime solaire.

En espérant que ça donnera des idées à tous les bidouilleurs…

article original : How to build a Low-tech website
Traduction Framalang : Khrys, Mika, Bidouille, Penguin, Eclipse, Barbara, Mannik, jums, Mary, Cyrilus, goofy, simon, xi, Lumi, Suzy + 2 auteurs anonymes

Comment créer un site web basse technologie

Low-tech Magazine a été créé en 2007 et n’a que peu changé depuis. Comme une refonte du site commençait à être vraiment nécessaire, et comme nous essayons de mettre en œuvre ce que nous prônons, nous avons décidé de mettre en place une version de Low Tech Magazine en basse technologie, auto-hébergée et alimentée par de l’énergie solaire. Le nouveau blog est conçu pour réduire radicalement la consommation d’énergie associée à l’accès à notre contenu.

le hardware qui faisait tourner la première version du site allégé
Premier prototype du serveur alimenté à l’énergie solaire sur lequel tourne le nouveau site.


* Voir cet article (en anglais) dans une version frugale donc moins énergivore


Pourquoi un site web basse technologie ?

On nous avait dit qu’Internet permettrait de « dématérialiser » la société et réduire la consommation d’énergie. Contrairement à cette projection, Internet est en fait lui-même devenu un gros consommateur d’énergie de plus en plus vorace. Selon les dernières estimations, le réseau tout entier représente 10 % de la consommation mondiale d’électricité et la quantité de données échangées double tous les deux ans.

Pour éviter les conséquences négatives d’une consommation énergivore, les énergies renouvelables seraient un moyen de diminuer les émissions des centres de données. Par exemple, le rapport annuel ClickClean de Greenpeace classe les grandes entreprises liées à Internet en fonction de leur consommation d’énergies renouvelables.

Cependant, faire fonctionner des centres de données avec des sources d’énergie renouvelables ne suffit pas à compenser la consommation d’énergie croissante d’Internet. Pour commencer, Internet utilise déjà plus d’énergie que l’ensemble des énergies solaire et éolienne mondiales. De plus, la réalisation et le remplacement de ces centrales électriques d’énergies renouvelables nécessitent également de l’énergie, donc si le flux de données continue d’augmenter, alors la consommation d’énergies fossiles aussi.

Cependant, faire fonctionner les centres de données avec des sources d’énergie renouvelables ne suffit pas à combler la consommation d’énergie croissante d’Internet.

Enfin, les énergies solaire et éolienne ne sont pas toujours disponibles, ce qui veut dire qu’un Internet fonctionnant à l’aide d’énergies renouvelables nécessiterait une infrastructure pour le stockage de l’énergie et/ou pour son transport, ce qui dépend aussi des énergies fossiles pour sa production et son remplacement. Alimenter les sites web avec de l’énergie renouvelable n’est pas une mauvaise idée, mais la tendance vers l’augmentation de la consommation d’énergie doit aussi être traitée.

Des sites web qui enflent toujours davantage

Tout d’abord, le contenu consomme de plus en plus de ressources. Cela a beaucoup à voir avec l’importance croissante de la vidéo, mais une tendance similaire peut s’observer sur les sites web.

La taille moyenne d’une page web (établie selon les pages des 500 000 domaines les plus populaires) est passée de 0,45 mégaoctets en 2010 à 1,7 mégaoctets en juin 2018. Pour les sites mobiles, le poids moyen d’une page a décuplé, passant de 0,15 Mo en 2011 à 1,6 Mo en 2018. En utilisant une méthode différente, d’autres sources évoquent une moyenne autour de 2,9 Mo en 2018.

La croissance du transport de données surpasse les avancées en matière d’efficacité énergétique (l’énergie requise pour transférer 1 mégaoctet de données sur Internet), ce qui engendre toujours plus de consommation d’énergie. Des sites plus « lourds » ou plus « gros » ne font pas qu’augmenter la consommation d’énergie sur l’infrastructure du réseau, ils raccourcissent aussi la durée de vie des ordinateurs, car des sites plus lourds nécessitent des ordinateurs plus puissants pour y accéder. Ce qui veut dire que davantage d’ordinateurs ont besoin d’être fabriqués, une production très coûteuse en énergie.

Être toujours en ligne ne fait pas bon ménage avec des sources d’énergies renouvelables telles que l’éolien ou le solaire, qui ne sont pas toujours disponibles.

La deuxième raison de l’augmentation de la consommation énergétique d’Internet est que nous passons de plus en plus de temps en ligne. Avant l’arrivée des ordinateurs portables et du Wi-Fi, nous n’étions connectés au réseau que lorsque nous avions accès à un ordinateur fixe au bureau, à la maison ou à la bibliothèque. Nous vivons maintenant dans un monde où quel que soit l’endroit où nous nous trouvons, nous sommes toujours en ligne, y compris, parfois, sur plusieurs appareils à la fois.

Un accès Internet en mode « toujours en ligne » va de pair avec un modèle d’informatique en nuage, permettant des appareils plus économes en énergie pour les utilisateurs au prix d’une dépense plus importante d’énergie dans des centres de données. De plus en plus d’activités qui peuvent très bien se dérouler hors-ligne nécessitent désormais un accès Internet en continu, comme écrire un document, remplir une feuille de calcul ou stocker des données. Tout ceci ne fait pas bon ménage avec des sources d’énergies renouvelables telles que l’éolien ou le solaire, qui ne sont pas disponibles en permanence.

Conception d’un site internet basse technologie

La nouvelle mouture de notre site répond à ces deux problématiques. Grâce à une conception simplifiée de notre site internet, nous avons réussi à diviser par cinq la taille moyenne des pages du blog par rapport à l’ancienne version, tout en rendant le site internet plus agréable visuellement (et plus adapté aux mobiles). Deuxièmement, notre nouveau site est alimenté à 100 % par l’énergie solaire, non pas en théorie, mais en pratique : il a son propre stockage d’énergie et sera hors-ligne lorsque le temps sera couvert de manière prolongée.

Internet n’est pas une entité autonome. Sa consommation grandissante d’énergie est la résultante de décisions prises par des développeurs logiciels, des concepteurs de site internet, des départements marketing, des annonceurs et des utilisateurs d’internet. Avec un site internet poids plume alimenté par l’énergie solaire et déconnecté du réseau, nous voulons démontrer que d’autres décisions peuvent être prises.

Avec 36 articles en ligne sur environ une centaine, le poids moyen d’une page sur le site internet alimenté par énergie solaire est environ cinq fois inférieur à celui de la version précédente.

Pour commencer, la nouvelle conception du site va à rebours de la tendance à des pages plus grosses. Sur 36 articles actuellement en ligne sur environ une centaine, le poids moyen d’une page sur le site internet alimenté par énergie solaire est 0,77 Mo – environ cinq fois inférieur à celui de la version précédente, et moins de la moitié du poids moyen d’une page établi sur les 500 000 blogs les plus populaires en juin 2018.


Ci-dessous : un test de vitesse d’une page web entre l’ancienne et la nouvelle version du magazine Low-Tech. La taille de la page a été divisée par plus de six, le nombre de requêtes par cinq, et la vitesse de téléchargement a été multipliée par dix. Il faut noter que l’on n’a pas conçu le site internet pour être rapide, mais pour une basse consommation d’énergie. La vitesse aurait été supérieure si le serveur avait été placé dans un centre de données et/ou à une position plus centrale de l’infrastructure d’Internet.

Source : Pingdom

Ci-dessous sont détaillées plusieurs des décisions de conception que nous avons faites pour réduire la consommation d’énergie. Des informations plus techniques sont données sur une page distincte. Nous avons aussi libéré le code source pour la conception de notre site internet.

Site statique

Un des choix fondamentaux que nous avons faits a été d’élaborer un site internet statique. La majorité des sites actuels utilisent des langages de programmation côté serveur qui génèrent la page désirée à la volée par requête à une base de données. Ça veut dire qu’à chaque fois que quelqu’un visite une page web, elle est générée sur demande.

Au contraire, un site statique est généré une fois pour toutes et existe comme un simple ensemble de documents sur le disque dur du serveur. Il est toujours là, et pas seulement quand quelqu’un visite la page. Les sites internet statiques sont donc basés sur le stockage de fichiers quand les sites dynamiques dépendent de calculs récurrents. En conséquence, un site statique nécessite moins de puissance de calcul, donc moins d’énergie.

Le choix d’un site statique nous permet d’opérer la gestion de notre site de manière économique depuis notre bureau de Barcelone. Faire la même chose avec un site web généré depuis une base de données serait quasiment impossible, car cela demanderait trop d’énergie. Cela présenterait aussi des risques importants de sécurité. Bien qu’un serveur avec un site statique puisse toujours être piraté, il y a significativement moins d’attaques possibles et les dommages peuvent être plus facilement réparés.

exemple d’images traitées pour en réduire le poids, elles sont monochromes et d’une définition dégradée
Images optimisées pour en réduire le « poids »

Le principal défi a été de réduire la taille de la page sans réduire l’attractivité du site. Comme les images consomment l’essentiel de la bande passante il serait facile d’obtenir des pages très légères et de diminuer l’énergie nécessaire en supprimant les images, en réduisant leur nombre ou en réduisant considérablement leur taille. Néanmoins, les images sont une part importante de l’attractivité de Low-tech Magazine et le site ne serait pas le même sans elles.

Par optimisation, on peut rendre les images dix fois moins gourmandes en ressources, tout en les affichant bien plus largement que sur l’ancien site.

Nous avons plutôt choisi d’appliquer une ancienne technique de compression d’image appelée « diffusion d’erreur ». Le nombre de couleurs d’une image, combiné avec son format de fichier et sa résolution, détermine la taille de cette image. Ainsi, plutôt que d’utiliser des images en couleurs à haute résolution, nous avons choisi de convertir toutes les images en noir et blanc, avec quatre niveaux de gris intermédiaires.

Ces images en noir et blanc sont ensuite colorées en fonction de la catégorie de leur contenu via les capacités de manipulation d’image natives du navigateur. Compressées par ce module appelé dithering, les images présentées dans ces articles ajoutent beaucoup moins de poids au contenu ; par rapport à l’ancien site web, elles sont environ dix fois moins consommatrices de ressources.

Police de caractère par défaut / Pas de logo

Toutes les ressources chargées, y compris les polices de caractères et les logos, le sont par une requête supplémentaire au serveur, nécessitant de l’espace de stockage et de l’énergie. Pour cette raison, notre nouveau site web ne charge pas de police personnalisée et enlève toute déclaration de liste de polices de caractères, ce qui signifie que les visiteurs verront la police par défaut de leur navigateur.

une page du magazine l’image d’illustration est rouge, le fond est jaune, aucun logo n’est ajouté, l’essentiel est du texte et une image
Une page du magazine en version basse consommation

 

Nous utilisons une approche similaire pour le logo. En fait, Low-tech Magazine n’a jamais eu de véritable logo, simplement une bannière représentant une lance, considérée comme une arme low-tech (technologie sobre) contre la supériorité prétendue des « high-tech » (hautes technologies).

Au lieu d’un logo dessiné, qui nécessiterait la production et la distribution d’image et de polices personnalisées, la nouvelle identité de Low-Tech Magazine consiste en une unique astuce typographique : utiliser une flèche vers la gauche à la place du trait d’union dans le nom du blog : LOW←TECH MAGAZINE.

Pas de pistage par un tiers, pas de services de publicité, pas de cookies

Les logiciels d’analyse de sites tels que Google Analytics enregistrent ce qui se passe sur un site web, quelles sont les pages les plus vues, d’où viennent les visiteurs, etc. Ces services sont populaires car peu de personnes hébergent leur propre site. Cependant l’échange de ces données entre le serveur et l’ordinateur du webmaster génère du trafic de données supplémentaire et donc de la consommation d’énergie.

Avec un serveur auto-hébergé, nous pouvons obtenir et visualiser ces mesures de données avec la même machine : tout serveur génère un journal de ce qui se passe sur l’ordinateur. Ces rapports (anonymes) ne sont vus que par nous et ne sont pas utilisés pour profiler les visiteurs.

Avec un serveur auto-hébergé, pas besoin de pistage par un tiers ni de cookies.

Low-tech Magazine a utilisé des publicités Google Adsense depuis ses débuts en 2007. Bien qu’il s’agisse d’une ressource financière importante pour maintenir le blog, elles ont deux inconvénients importants. Le premier est la consommation d’énergie : les services de publicité augmentent la circulation des données, ce qui consomme de l’énergie.

Deuxièmement, Google collecte des informations sur les visiteurs du blog, ce qui nous contraint à développer davantage les déclarations de confidentialité et les avertissements relatifs aux cookies, qui consomment aussi des données et agacent les visiteurs. Nous avons donc remplacé Adsense par d’autres sources de financement (voir ci-dessous pour en savoir plus). Nous n’utilisons absolument aucun cookie.

À quelle fréquence le site web sera-t-il hors-ligne ?

Bon nombre d’entreprises d’hébergement web prétendent que leurs serveurs fonctionnent avec de l’énergie renouvelable. Cependant, même lorsqu’elles produisent de l’énergie solaire sur place et qu’elles ne se contentent pas de « compenser » leur consommation d’énergie fossile en plantant des arbres ou autres, leurs sites Web sont toujours en ligne.

Cela signifie soit qu’elles disposent d’un système géant de stockage sur place (ce qui rend leur système d’alimentation non durable), soit qu’elles dépendent de l’énergie du réseau lorsqu’il y a une pénurie d’énergie solaire (ce qui signifie qu’elles ne fonctionnent pas vraiment à 100 % à l’énergie solaire).

un petit panneau photo-voltaïque au-dessus d’un plus grand. Leur position les expose au soleil.
Le panneau photo-voltaïque solaire de 50 W. Au-dessus, un panneau de 10 W qui alimente un système d’éclairage.

 

En revanche, ce site web fonctionne sur un système d’énergie solaire hors réseau avec son propre stockage d’énergie et hors-ligne pendant les périodes de temps nuageux prolongées. Une fiabilité inférieure à 100 % est essentielle pour la durabilité d’un système solaire hors réseau, car au-delà d’un certain seuil, l’énergie fossile utilisée pour produire et remplacer les batteries est supérieure à l’énergie fossile économisée par les panneaux solaires.

Reste à savoir à quelle fréquence le site sera hors ligne. Le serveur web est maintenant alimenté par un nouveau panneau solaire de 50 Wc et une batterie plomb-acide (12V 7Ah) qui a déjà deux ans. Comme le panneau solaire est à l’ombre le matin, il ne reçoit la lumière directe du soleil que 4 à 6 heures par jour. Dans des conditions optimales, le panneau solaire produit ainsi 6 heures x 50 watts = 300 Wh d’électricité.

Le serveur web consomme entre 1 et 2,5 watts d’énergie (selon le nombre de visiteurs), ce qui signifie qu’il consomme entre 24 et 60 Wh d’électricité par jour. Dans des conditions optimales, nous devrions donc disposer de suffisamment d’énergie pour faire fonctionner le serveur web 24 heures sur 24. La production excédentaire d’énergie peut être utilisée pour des applications domestiques.

Nous prévoyons de maintenir le site web en ligne pendant un ou deux jours de mauvais temps, après quoi il sera mis hors ligne.

Cependant, par temps nuageux, surtout en hiver, la production quotidienne d’énergie pourrait descendre à 4 heures x 10 watts = 40 watts-heures par jour, alors que le serveur nécessite entre 24 et 60 Wh par jour. La capacité de stockage de la batterie est d’environ 40 Wh, en tenant compte de 30 % des pertes de charge et de décharge et de 33 % de la profondeur ou de la décharge (le régulateur de charge solaire arrête le système lorsque la tension de la batterie tombe à 12 V).

Par conséquent, le serveur solaire restera en ligne pendant un ou deux jours de mauvais temps, mais pas plus longtemps. Cependant, il s’agit d’estimations et nous pouvons ajouter une deuxième batterie de 7 Ah en automne si cela s’avère nécessaire. Nous visons un uptime, c’est-à-dire un fonctionnement sans interruption, de 90 %, ce qui signifie que le site sera hors ligne pendant une moyenne de 35 jours par an.

Premier prototype avec batterie plomb-acide (12 V 7 Ah) à gauche et batterie Li-Po UPS (3,7V 6600 mA) à droite. La batterie au plomb-acide fournit l’essentiel du stockage de l’énergie, tandis que la batterie Li-Po permet au serveur de s’arrêter sans endommager le matériel (elle sera remplacée par une batterie Li-Po beaucoup plus petite).

Quel est la période optimale pour parcourir le site ?

L’accessibilité à ce site internet dépend de la météo à Barcelone en Espagne, endroit où est localisé le serveur. Pour aider les visiteurs à « planifier » leurs visites à Low-tech Magazine, nous leur fournissons différentes indications.

Un indicateur de batterie donne une information cruciale parce qu’il peut indiquer au visiteur que le site internet va bientôt être en panne d’énergie – ou qu’on peut le parcourir en toute tranquillité. La conception du site internet inclut une couleur d’arrière-plan qui indique la charge de la batterie qui alimente le site Internet grâce au soleil. Une diminution du niveau de charge indique que la nuit est tombée ou que la météo est mauvaise.

carte météo de l’ouest de l’Europe avec symboles de passages nuageux

Outre le niveau de batterie, d’autres informations concernant le serveur du site web sont affichées grâce à un tableau de bord des statistiques. Celui-ci inclut des informations contextuelles sur la localisation du serveur : heure, situation du ciel, prévisions météorologiques, et le temps écoulé depuis la dernière fois où le serveur s’est éteint à cause d’un manque d’électricité.

Matériel & Logiciel

Nous avons écrit un article plus détaillé d’un point de vue technique : Comment faire un site web basse technologie : logiciels et matériel.

SERVEUR : Ce site web fonctionne sur un ordinateur Olimex A20. Il est doté de 2 GHz de vitesse de processeur, 1 Go de RAM et 16 Go d’espace de stockage. Le serveur consomme 1 à 2,5 watts de puissance.

SOFTWARE DU SERVEUR : le serveur web tourne sur Armbian Stretch, un système d’exploitation Debian construit sur un noyau SUNXI. Nous avons rédigé une documentation technique sur la configuration du serveur web.

LOGICIEL DE DESIGN : le site est construit avec Pelican, un générateur de sites web statiques. Nous avons publié le code source de « solar », le thème que nous avons développé.

CONNEXION INTERNET. Le serveur est connecté via une connexion Internet fibre 100 MBps. Voici comment nous avons configuré le routeur. Pour l’instant, le routeur est alimenté par le réseau électrique et nécessite 10 watts de puissance. Nous étudions comment remplacer ce routeur gourmand en énergie par un routeur plus efficace qui pourrait également être alimenté à l’énergie solaire.

SYSTÈME SOLAIRE PHOTOVOLTAÏQUE. Le serveur fonctionne avec un panneau solaire de 50 Wc et une batterie plomb-acide 12 V 7 Ah. Cependant, nous continuons de réduire la taille du système et nous expérimentons différentes configurations. L’installation photovoltaïque est gérée par un régulateur de charge solaire 20A.

Qu’est-il arrivé à l’ancien site ?

Le site Low-tech Magazine alimenté par énergie solaire est encore en chantier. Pour le moment, la version alimentée par réseau classique reste en ligne. Nous encourageons les lecteurs à consulter le site alimenté par énergie solaire, s’il est disponible. Nous ne savons pas trop ce qui va se passer ensuite. Plusieurs options se présentent à nous, mais la plupart dépendront de l’expérience avec le serveur alimenté par énergie solaire.
Tant que nous n’avons pas déterminé la manière d’intégrer l’ancien et le nouveau site, il ne sera possible d’écrire et lire des commentaires que sur notre site internet alimenté par réseau, qui est toujours hébergé chez TypePad. Si vous voulez envoyer un commentaire sur le serveur web alimenté en énergie solaire, vous pouvez en commentant cette page ou en envoyant un courriel à solar (at) lowtechmagazine (dot) com.

Est-ce que je peux aider ?

Bien sûr, votre aide est la bienvenue.
D’une part, nous recherchons des idées et des retours d’expérience pour améliorer encore plus le site web et réduire sa consommation d’énergie. Nous documenterons ce projet de manière détaillée pour que d’autres personnes puissent aussi faire des sites web basse technologie.

D’autre part, nous espérons recevoir des contributions financières pour soutenir ce projet. Les services publicitaires qui ont maintenu Low-tech Magazine depuis ses débuts en 2007 sont incompatibles avec le design de notre site web poids plume. C’est pourquoi nous cherchons d’autres moyens de financer ce site :

1. Nous proposerons bientôt un service de copies du blog imprimées à la demande. Grâce à ces publications, vous pourrez lire le Low-tech Magazine sur papier, à la plage, au soleil, où vous voulez, quand vous voulez.
2. Vous pouvez nous soutenir en envoyant un don sur PayPal, Patreon ou LiberaPay.
3. Nous restons ouverts à la publicité, mais nous ne pouvons l’accepter que sous forme d’une bannière statique qui renvoie au site de l’annonceur. Nous ne travaillons pas avec les annonceurs qui ne sont pas en phase avec notre mission.

Le serveur alimenté par énergie solaire est un projet de Kris De Decker, Roel Roscam Abbing et Marie Otsuka.




Éolienne urbaine sous licence libre, par Aeroseed

Aeroseed - Ulule

Lors de l’événement Vosges Opération Libre, nous avons eu le plaisir de rencontrer Théophile, du bureau d’étude vosgien Aeroseed, qui a récemment développé les plans d’une micro-éolienne libre présentée à cette occasion à Gérardmer.

Convaincu par le modèle open source de l’innovation, Aeroseed a décidé de proposer un financement participatif pour la construction de son éolienne urbaine, via la plateforme Ulule.

Il est assez rare de voir de jeunes ingénieurs prometteurs se lancer dans ce type de modèle de co-financement pour leurs projets, et particulièrement dans un secteur aussi compétitif que l’énergie renouvelable. Mais passer par une plateforme de financement participatif a un double avantage : d’abord, il s’agit de lever des fonds en toute transparence pour des projets avec un fort impact social, ensuite le fait de réussir une telle levée de fonds, en mobilisant l’attention du public, permet aussi de valider l’intérêt social du projet. Le pari est déjà en partie gagné puisque depuis peu de jours, ce projet d’éolienne en est à 124% de l’objectif initial. Mais en réalité, c’est parce qu’une seconde étape est visée, encore plus ambitieuse : normaliser l’éolienne et même produire des kits.

Pour en savoir plus, nous avons interviewé Théophile…

Aeroseed - Logo

Christophe Masutti (Framasoft) : Bonjour Théophile. Alors, AeroSeeD, c’est qui ? c’est quoi ?

Théophile Bresson : AeroSeeD, c’est un bureau d’étude industriel spécialisé en simulation numérique (fluide, thermique et résistance des matériaux). Il a été créé grâce à la volonté de monsieur Vincent Mauvady d’industrialiser la micro-éolienne que j’ai inventée il y a 7 ans.

AeroSeeD à donc deux activités parallèles :

  1. Un service de recherche et développement au service des entreprises régionales, nationales et internationales ;
  2. Un projet de micro-éolienne à axe vertical à voilure tournante sous licence libre.

Peux-tu présenter le projet de micro-éolienne en quelques mots ?

Ce projet de micro-éolienne est le fruit d’une succession d’étapes étalées dans le temps :

  • 2007 : l’idée a germé suite à une discussion entre amis.
  • de 2007 à 2010 : début des calculs de recherche et d’optimisation pour caractériser les performances de l’éolienne.
  • mi-2010 : étude de marché et création de la société AeroSeeD pour porter ce projet jusqu’à son industrialisation
  • de 2010 à 2012 : demande de subvention auprès des différents organisme publics (rencontre avec l’ancien vice-président du Conseil Régional, Agence de Mobilisation Économique du Conseil régional, CCI, pôle de compétitivité, divers services du Conseil Régional, ISEETECH…) pour un partage des risques sur la validation de l’éolienne grâce à un prototype.
  • 2012 : La grande désillusion ; Lorraine terre d’innovation mon œil ! Les personnes étaient toutes très enthousiastes, mais nous n’avons au final pas reçu 1 € (euro) d’aide. Il faut savoir que rien que le dépôt de brevet en France nous aurait couté 10 000€, une protection européenne 50 000€ et une protection monde est de l’ordre de 200 000 à 500 000 €.
  • mi-2012 : discussion avec David Vantyghem (association GOALL) à propos des licences libres. Changement de stratégie, abandon du brevet et choix de la licence libre.
  • 2013-2014 : tels des aventuriers, nous avons eu à défricher le terrain de la licence libre dans le domaine de l’open hardware pur !
  • de 2010 à 2014 : développement du prototype grâce aux outils du bureau d’étude (CAO, outils de calcul par éléments finis)
  • début 2014 : fabrication du prototype mécanique ; jusque-là, AeroSeeD a dû tout financer en fonds propre grâce à son activité de bureau d’étude.
  • Enfin, arrive mi-2014 à nous avons décidé de lancer un appel à don pour :
    • 1ere étape : nous aider à financer la partie automatisme et mise sur mât du prototype
    • 2ème étape (20 000 €) : nous permettre d’envisager la conception d’un kit aux normes pour le proposer aux écoles, hackerspaces et autre bidouilleurs sans oublier les pays émergents.

Peux-tu en dire plus à propos de l’impact économique et l’intérêt pour les populations ?

L’éolienne AeroSeeD vient combler un vide technologique de la production d’énergie à partir du vent dans les zones urbaines.

Elle a été conçue et optimisée pour que son rendement soit le maximum possible en présence de vent tournant. Situation dans laquelle les éoliennes actuelles, quelles qu’elles soient, ne produisent pas ou avec des rendements très médiocres.

Notre éolienne n’est par contre pas concurrente des micro-éoliennes à axe horizontal dans les milieux très bien dégagés comme les grandes plaines ou les zones côtières. En effet les éoliennes conventionnelles (axe horizontal) sont alors parfaitement capables de produire efficacement.

Finalement, pourquoi avez-vous décidé de placer votre projet en Open source / libre ?

La réponse est multiple :

  • impossibilité de trouver des financements ne serait-ce que pour le dépôt de brevet.
  • impossibilité pour une petite structure d’envisager la défense de ce brevet face à des entreprises internationales (américaines, japonaises, chinoises…)
  • La possibilité de pouvoir relocaliser l’emploi en France grâce à l’ouverture de l’idée. Exemple : une petite entreprise X de Lorraine qui n’aurait pas pu produire et vendre ce type d’éolienne si nous avions déposé un brevet, se voit maintenant dans la possibilité de le faire.
  • La capacité de ne plus envisager un concurrent comme une entité à abattre mais plutôt comme un partenaire. En effet, il peut être à l’autre bout de la France ou du monde et participe donc à l’augmentation du marché en faisant connaître ce produit. Il peut être proche de chez nous et développer une activité connexe de service (type éolienne communicante) que nous proposons directement à nos clients (via une commission). L’entreprise peut même être dans la région messine et vendre la même éolienne, c’est alors une présence motivante et qui nous permet, par réaction, de faire évoluer le produit plus rapidement.

Quelle(s) licence(s) libre(s) comptez-vous utiliser et pourquoi ?

Les licences libres autorisent légalement et encouragent la copie, l’étude, la modification et la redistribution des logiciels et des modèles de conception (plan mécanique 2D et 3D, dessin, notice, schéma électronique…). Nous avons choisi des licences libres incluant une clause de Copyleft. Ces licences libres imposent aux contributeurs qui vont distribuer gratuitement ou vendre des produits dérivés de diffuser à leur tour leurs travaux sous les mêmes licences libres. Par exemple, les licences de la Free Software Foundation pour les logiciels, manuels, notices, documentations, articles, publications, dictionnaires, les licences TAPR et CERN pour la conception matérielle (dessin industriel, plan, schéma…), les licences Art Libre et Creative Commons Attribution – Partage dans les mêmes conditions pour les œuvres artistiques ou de divertissement (roman, dessin artistique, musique, effet sonore, vidéo, photographie, animation…).

La plupart de ces licences incluent aussi une clause de défense contre les entreprises qui utiliseraient des brevets pour attaquer notre antériorité, en leur interdisant toute commercialisation des produits dérivés.

Vous faites appel aujourd’hui à un financement sur Ulule : qu’est-ce qui a motivé ce choix ?

Ce choix a été motivé par la cohérence de la licence libre avec l’appel à don, mais également par ce manque de financement auquel nous avons fait face. Cet appel à don a également eu pour effet de nous retourner une véritable étude du marché fiable et quantifiable. Nous avons eu un retour quantitatif de personnes non seulement suffisamment intéressées par notre projet pour faire un don, mais en plus qui souhaitent être tenues au courant de la date de sortie des kits car ils souhaitent en acheter.

Rétrospectivement, le financement participatif était pour nous le meilleur choix.

En avez-vous déjà parlé avec vos partenaires industriels habituels? Ils en pensent quoi ?

Nos partenaires industriels n’ont pas été mis au courant de manière systématique. On pourrait parler de discussion sélective avec des personnes intéressées qui sont accessoirement nos partenaires. Ils envisagent cette stratégie de la licence libre avec intérêt non sans appréhension. Il est vrai que ce mode d’action est radicalement différent du mode protectionnisme qui nous est proposé par le brevet, et qui nous est infusé pendant nos études.

Pour ma part il s’est agit d’un véritable reboot cérébral avec mise à jour du firmware… 😉

Sur le long terme, pensez-vous créer une communauté d’utilisateurs/contributeurs autour de ce projet d’éolienne ?

C’est exactement notre volonté depuis fin 2012

Existe-t-il d’autres projets open source hardware dans la Région Lorraine ? Pensez-vous faire un rapprochement ?

Il y a la FoldaRap, une imprimante 3D open source pliante qui est commercialisée à Folschviller, un projet de four verrier, un standard téléphonique avec un ERP et de la visioconférence, conçu et commercialisé par des Vosgiens.

Il y a aussi des projets uniquement logiciels comme par exemple un logiciel d’aide à la saisie au clavier développé au laboratoire LITA à Metz, le logiciel d’hébergement d’images Lutim.

Il existe certainement plein d’autres projets libres à détecter.

Avez-vous d’autres projets en stock ?

Oui, notamment dans le domaine de la production d’algues, mais pour l’instant nous souhaitons voir aboutir ce projet d’éolienne avant de tenter l’aventure du libre sur nos autres projets.

Merci et bonne chance !

-> Éolienne urbaine : Une source d’énergie renouvelable sous licence libre




Logiciels et matériels libres font le bonheur de l’éducation

Avec du logiciel et du matériel libres, on est aujourd’hui en mesure de proposer des cours tout à fait passionnants, ouverts, modulables et sans entrave à la création.

Le témoignage d’un prof qu’on aurait bien aimé avoir lorsqu’on était jeune.

Maltman23 - CC by-sa

Un programme universitaire qui enseigne l’interaction homme-machine avec du logiciel et du matériel libres

University course teaches computer-human interaction with open hardware and OSS

Jonathan Muckell – 28 mars 2014 – OpenSource.com
(Traduction : Omegax, Mounoux, lamessen, Piup, aKa, lumi, Kcchouette, ton, Gatitac)

La plupart des gens considèrent que leurs interactions avec les systèmes informatiques se passent via un clavier, une souris ou un écran tactile. Cependant, les humains ont évolué pour interagir avec leur environnement et leurs congénères de manière bien plus complexe. Réduire l’écart entre les systèmes informatiques du monde numérique et le réel est en train d’être étudié et testé dans le cours de Physical Computing (NdT : Difficile à traduire, informatique physique/démonstrative) de l’université d’État de New-York (SUNY) à Albany.

En tant que professeurs de ce cours, nous profitons en ce moment d’une grande variété de projets de logiciels et matériels libres pour en apprendre plus sur les principaux concepts fondamentaux grâce à des expériences pratiques et la mise en place d’outils libres. Côté logiciel, nous utilisons un environnement de développement intégré (Arduino Sketch) et nous développons des modélisations pour les imprimantes 3D en utilisant OpenSCAD. Pour la partie matériel libre du cours, nous utilisons des Arduino et la PrintrBot Simple.

Le cours de Physical computing associe l’utilisation du matériel et du logiciel pour détecter et contrôler les interactions entre les utilisateurs et l’environnement. Elle peut repérer et répondre à des actions, par exemple en détectant la localisation des véhicules à une intersection et en ajustant le réglage des feux. Le domaine de l’informatique physique est relativement vaste, englobant des spécialités telles que la robotique, les microcontrôleurs, l’impression 3D et les vêtements intelligents.

D’après mon expérience, les étudiants aiment avoir la possibilité de combiner la pensée créative et sa mise en œuvre pratique. Il naît un sentiment d’émerveillement et d’accomplissement quand ils sont capables de faire quelque chose qui se passe dans le monde physique. L’une des premières activités du cours est simplement d’écrire du code et de créer un circuit pour faire clignoter une ampoule LED. Je ne me lasse jamais de voir leur joie quand ils y arrivent la première fois. L’un des objectifs principaux est de maintenir cet état d’émerveillement et d’excitation. Quand le cours progresse, nous avons les « Jeux olympiques des robots » où les étudiants se font rivalisent avec leurs robots construits sur mesure dans différentes catégories. Plus tard, nous plongeons dans l’impression 3D, où ils créent des objets personnalisés.

Chaque fois que nous abordons un nouveau domaine, je vois cette étincelle, cette excitation sur le visage de mes étudiants. Je veux que la passion et un véritable intérêt pour le matériel se développent. Je veux qu’ils expérimentent en rentrant dans leurs dortoirs. Si je réussis, les étudiants ne devraient pas avoir la sensation de travailler comme dans une école traditionnelle. Durant le processus et spécialement pour leur projet de fin d’étude, j’insiste sur l’inovation et la pensée créatrice. Quelle est la valeur de ce qu’ils génèrent à travers les conceptions qu’ils proposent ? Je veux que les étudiants pensent de façon créative et non pas qu’ils suivent un processus établi ou des tâches séquentielles prédéfinies.

J’utilise souvent le circuit imprimé Arduino pour enseigner car c’est un moyen fantastique pour apprendre. Non seulement il est très utile pour introduire des sujets tels que la programmation embarquée et l’électronique, mais c’est aussi une plateforme phénoménale pour le prototypage rapide et l’innovation. Des étudiants ont accompli des projets de fin d’étude vraiment innovants. Deux de mes étudiants ont utilisé une commande WiiMote de Nintendo pour jouer à pierre-feuille-ciseaux contre l’ordinateur. Si vous jouez suffisamment longtemps, l’ordinateur mémorise vos précédents mouvements et prédit ce que vous allez choisir avant vous. Des étudiants ont controlé une voiture à partir d’un smartphone et un autre groupe a programmé l’envoi automatique d’informations de détecteurs sur Twitter. Au début du semestre, les cours sont basés sur les concepts fondamentaux, avec du temps dédié aux travaux pratiques en équipes réduites. La dernière partie du semestre est basée sur des projets intégrés et créatifs.

Ce semestre, nous avons introduit l’impression 3D comme sujet principal du programme scolaire. C’est l’occasion pour les étudiants de construire des objets physiques, ainsi que de combiner capteurs, pièces mécaniques et processeurs pour donner vie aux objets. D’un point de vue éducatif, le Printrbot Simple est vraiment l’idéal. Nous avons commandé l’imprimante en kit et avons demandé aux élèves d’effectuer l’assemblage. Ce procédé a non seulement fourni une occasion pour les étudiants d’apprendre les mécanismes de fonctionnement d’une imprimante 3D, mais leur a aussi donné un sentiment d’appropriation par l’utilisation et l’entretien des imprimantes au fil du temps. Les imprimantes 3D ont des problèmes similaires à ceux des imprimantes 2D — elles se bloquent, elles ont des problèmes mécaniques et d’entretien. Toutefois, le Printrbot Simple est conçu de façon à faire participer les élèves. Et ils ont acquis les compétences nécessaires pour corriger et résoudre les problèmes quand ils surviennent.

Le Libre en classe

La plupart des élèves ont une certaine expérience du Libre et de l’open source. Le Département Informatique de l’Université d’Albany repose sur ??l’utilisation d’outils libres. En particulier, de nombreux étudiants utilisent GitHub, qui est exploité dès les premiers cours. Le département donne aussi des cours spéciaux qui sont purement focalisés sur le logiciels libre. L’élément nouveau pour les étudiants est la notion de matériel libre.

La majorité des gens ont tendance à penser que le Libre ne concerne que le développement logiciel. Le matériel libre est un concept novateur et passionnant pour les étudiants.

Le matériel et les logiciels libres ont permis à notre cours de Physical Computing d’éviter les problèmes de licences, et donc de pouvoir évoluer librement. Cela nous a aussi apporté de la flexibilité : nous se sommes pas enfermés sur une seule plateforme ou un outil unique. Le Libre autorise les modifications sans être bloqué par les modalités de contrat de licence du vendeur.

Crédit photo : Maltman23 (Creative Commons By-Sa)




Renault ZOE : une voiture avec DRM est-elle encore une voiture ?

Lorsque nos voitures ressembleront définitivement à des iPhones, nous ne pourrons les conduire que sur des autoroutes Apple…

Renault Zoé

Renault verrouillera à distance ses voitures électriques

Renault will remotely lock down electric cars

Gerloff – 31 octobre 2013 – FSFE Blog
(Traduction : Jeff_, Dimitri, chr, MFolschette, Catalaburro, Penguin, ttoine, P + anonymes)

Longtemps, les voitures ont été un symbole de liberté et d’indépendance. Plus maintenant. Dans sa voiture électrique Zoe, le fabricant automobile Renault a apparemment la possibilité d’empêcher à distance la batterie de se recharger. Et c’est plus inquiétant qu’il n’y paraît.

Lorsque vous achetez une Renault Zoe, la batterie n’est pas incluse. Au lieu de ça, vous signez avec le constructeur un contrat de location pour la batterie. Sur un forum de possesseurs de Zoe, l’utilisateur Franko30 dénonce le fait qu’une clause de ce contrat donne le droit à Renault d’interdire à la batterie de se recharger lorsque la durée de location contractuelle prend fin. D’après un article du journal Der Spiegel, le constructeur peut aussi le faire en cas de défaut de paiement de votre part.

Cela signifie que Renault a les moyens de contrôler à distance le processus de rechargement de la batterie. Selon le même article, la Zoe (et la plupart des autres voitures électriques) collecte une multitude de données concernant votre utilisation du véhicule, et les envoie au constructeur à votre insu. Ces données indiquent au constructeur où vous allez, quand et à quelle vitesse, où vous rechargez la batterie, et plein d’autres choses encore. Nous savions déjà que Tesla faisait cela depuis la prise de bec publique avec un journaliste qui avait publié une critique de leurs voitures dans le New York Times. Voir un constructeur grand public comme Renault faire la même chose révèle à quel point cette pratique est dangereuse.

Ce genre de choses cadre bien avec le tableau dystopique que brossait Cory Doctorow dans son discours de 2011 « La guerre imminente contre nos libertés d’utilisateurs » (que vous devriez absolument regarder, si ce n’est pas déjà fait, d’autant que traduit en français par le Framablog NdT), au cours duquel il dit que « nous n’avons plus de voitures, mais des ordinateurs que l’on peut conduire ». La question est alors de savoir qui contrôle cet ordinateur. Vous, le constructeur, ou quelqu’un d’autre ?

S’il y a un mécanisme qui permet de contrôler à distance ce que fait votre voiture, certains feront usage de ce mécanisme à un moment donné. Il pourrait s’agir du constructeur qui verrouille votre voiture car vous ne pouvez pas poursuivre la location de la batterie parce que vous avez perdu votre emploi, ce qui signifie qu’il devient plus difficile pour vous de trouver du travail. Il pourrait s’agir du gouvernement, qui forcerait le constructeur à faire ce qu’il lui demande. Dans son post sur le forum, Franko30 prédit que les gouvernements pourraient simplement demander aux constructeurs de voitures de bloquer le rechargement des batteries à proximité d’événements politiques controversés (un sommet du G8 par exemple) afin d’empêcher la participation à des manifestations. Sans oublier la possibilité pour une personne malveillante d’obtenir l’accès à ce mécanisme en soudoyant un employé de chez Renault.

Le seul moyen de se prémunir de tout cela est de se tenir éloigné des voitures et autres ordinateurs que vous ne pouvez pas totalement contrôler, et de créer des systèmes qui responsabilisent les utilisateurs. À la Free Software Foundation Europe, nous soutenons les personnes qui créent des systèmes donnant le contrôle à l’utilisateur.




Un étudiant nous propose un appareil photo libre en impression 3D pour 25 €

Léo Marius vient à peine de sortir diplômé de l’École supérieure d’art et design de Saint Etienne. Son projet de recherche consistait à créer de toutes pièces (l’expression est bien trouvée) rien moins qu’un appareil photo en impression 3D !

Nom de code du projet : O3DPC (Open 3D Printed Camera). Nom de code de l’appareil : OR-01 (OpenReflex 01).

Le plus simple est encore d’illustrer tout de suite cela par une image explicite.

OpenReflex - Léo Marius

Il ne s’agit donc pas de photo numérique mais argentique, avec de vieilles pellicules dedans, et il reste le coût (non négligeable) des objectifs. Il n’empêche que le résultat est saisissant, fonctionnel et surtout mis à disposition de tous grâce au choix du Libre.

Nous avons évidemment eu envie d’en savoir plus en interviewant ci-dessous ce jeune créateur.

On voit ici, une nouvelle fois, combien le Libre peut être utile en situation d’étude et d’apprentissage. Combiné avec une accessibilité croissante des nouvelles technologies, il permet à tout un chacun, ayant un peu d’imagination, de réaliser puis partager des choses formidables.

On voit également se dessiner une nouvelle génération de makers/hackers, qui n’a pas eu à batailler (comme nous) pour faire connaître et exister le Libre, et qui l’adopte presque naturellement. Une génération qui donne, somme toute, espoir et confiance en l’avenir 😉

OpenReflex - Léo Marius

Entretien avec Léo Marius

Léo Marius, bonjour, peux-tu te présenter succinctement ?

Je suis un jeune designer tout juste diplômé de l’École supérieure d’art et design de Saint Etienne. Passionné par les nouvelles technologies et en particulier l’impression 3D dans laquelle je vois des opportunités de créations incroyables souvent sous-exploitées (je milite contre les têtes de Yoda et les coques pour smartphone imprimés !).

Libriste et actif dans le milieu associatif depuis quelques années. J’apprécie beaucoup la photographie mais je ne suis pas moi-même photographe.

Qu’est-ce donc que le projet O3DPC ? Comment est-il né ? Et en quoi est-il relié à tes études ?

Le projet O3DPC (pour Open 3D Printed Camera) est un travail de recherche que j’ai mené en rapprochant l’impression 3D libre et la photographie, il rassemble plusieurs projets sur lesquels j’ai travaillé, dont plusieurs sténopés et dernièrement le reflex imprimé.

J’ai mené ce travail en tant que projet personnel tout au long de mes études en design, c’était l’occasion pour moi de rapprocher deux domaines qui m’intéressent : l’impression 3D et la photographie.

OpenReflex - Léo MariusDe ce projet est donc sorti le prototype OR-01, quelles sont ces principales caractéristiques ? ces atouts ? ces améliorations futures (j’ai cru lire un projet avec la carte Arduino) ?

C’est un reflex argentique classique avec une visée directe (on peut voir directement ce que l’ont vise sur le petit rectangle dessus et un obturateur manuel qui fonctionne à environ 1/60° de seconde).

Son atout principal c’est que l’ensemble de ses sources sont libres, et donc adaptable, il est ainsi facile de le modifier pour l’adapter si certaines choses fonctionnement mal ou si on souhaite l’adapter pour des usages particuliers.

Dans sa forme actuelle je retiendrai deux éléments particulièrement intéressants :

  • En premier la bague d’adaptation pour les optiques est démontable, on peut donc facilement s’imprimer des baïonnettes différentes pour s’adapter a plusieurs types d’objectifs sans avoir à changer de boîtier.
  • Il y a également le dos autonome et démontable que j’apprécie, la partie où l’on met sa pellicule. Lorsque j’utilise le mien j’ai deux dos prêts avec deux pellicules différentes et je peux les changer rapidement pour m’adapter à la luminosité (ou switcher entre une pellicule noir et blanc et couleur, tout cela en plein milieu du rouleau d’une pellicule)

Le choix de l’open source, c’est un choix pragmatique, éthique ou les deux mon général ? Je lis (avec joie) une licence CC by-sa pour tes pièces, pourquoi n’as-tu pas retenu la clause non commerciale NC ?

Un peu des deux. À mon arrivée à l’école, j’ai intégré l’association Le_Garage (dont j’ai été président pendant deux ans) qui fait de la sensibilisation dans l’école aux questions du libre en art et design. Ça a donc été assez naturel pour moi de redistribuer ce travail sous licence libre.

L’idée principale derrière l’OR-01 c’est la réappropriation et la compréhension des nos appareils quotidiens, fermer les sources aurait interdit et contredit cet objectif

Pour ce qui est des la clause NC je préfère ne pas l’utiliser car je la trouve trop floue et contraignante dans la pratique. Si on souhaite qu’un projet se diffuse il ne faut pas lui mettre des bâtons dans les roues. Je n’ai aucune raison de m opposer à ce que quelqu’un souhaite se rapproprier le projet, l’améliorer et le vendre, s’il a lui même fourni un travail et qu’il respecte les conditions de redistribution de la licence copyleft.

Quelle imprimante 3D utilises-tu ? La « full libre » RepRap ou la « moins libre » MakerBot[1] ?

J’ai commencé le projet O3DPC il y a un peu plus de trois ans avec une Makerbot de 1ere génération (la numéro 660 ! une pièce de collection) que nous avions acquis avec notre association libriste et qui était encore libre à l’époque. Le reflex a été réalisé avec une Makerbot de dernière génération, la Replicator 2X qui a été achetée par notre école en complément d’une imprimante 3D haut de gamme que nous avions déjà.

L’utilisation de la Makerbot est un moindre mal, les technologies utilisées sont les même que sur les RepRaps traditionnels et les pièces qu’il est possible d’imprimer avec une Makerbot le seront aussi sur une RepRap bien calibrée. Je souhaitais, pour aider à sa diffusion, que le boîtier soit imprimable sur une imprimante de type RepRap. Si j’avais pu choisir je pense que j’aurais opté pour une Lulzbot. 😉

OpenReflex - Léo Marius

Au niveau logiciel, quels sont ceux que tu utilises et pourquoi ? Sont-ils tous libres ?

J’ai essentiellement utilisé Blender, c’est un logiciel que je connais bien et que je trouve extrêmement polyvalent et flexible. Les formes produites avec ce logiciel sont souvent très souples, et on déplace avec aisance les points pour adapter nos formes et nos courbes. Souvent en design on nous fait utiliser l’application propriétaire Rhino qui est beaucoup plus stricte dans son utilisation (« un tout petit peu plus haut » sur Blender correspond à un « Z+0,23mm » sur un Rhino mais il faut alors redessiner toute sa courbe avant de refaire sa révolution). Avec Blender on peut se permettre des approximations, ce qui est bien pratique dans une démarche de recherche.

J’ai également utilisé le libre OpenScad pour certaines pièces qui nécessitaient des formes et des distances très précises. Le fait de pouvoir coder ses pièces s’est avéré très utile. La pièce ne correspond pas ? Il suffit de changer quelques lignes de code pour tout modifier ! L’ensemble est libre 😉

Ce qui était particulièrement pratique c’est que, n’ayant pas d’ordinateur portable performant, je me déplaçais avec mon disque dur et les versions mobiles de toutes mes application pour les principaux OS dessus et je pouvais alors travailler où je le souhaitais.

Tu déposes les fichiers numériques de tes pièces sur Thingiverse et Instructables. Aujourd’hui quand on est développeur et qu’on cherche du boulot, on peut mettre dans son CV ses contributions sur GitHub. Penses-tu qu’il en ira de même demain dans le design sur ce type de dépôts ?

Oui, et de plus en plus. Je prends par exemple le designer Samuel Bernier qui a diffusé une partie de son travail en libre sur Instructables et que j’ai interogé pour mon mémoire (sur les Designers/Makers). Lorsque je lui ai demandé ce que lui avait apporté le libre, il m’a répondu : « des contacts et beaucoup d’opportunités ».

J’ai d’ailleurs mis récemment une note sur mon compte Instructables précisant que je cherchais un emploi, et j’ai reçu une proposition assez intéressante la semaine dernière (rien de défini, mais on verra). Ça fonctionne. Et si cela n’aboutit pas je peux me dire que 95% de mes employeurs potentiels auront vu mon projet de diplôme avant que je les contacte, ce qui est pas mal déjà comme entrée en matière.

25 euros en pièces détachées pour une appareil photo, c’est possible ? Et si oui, ne crains-tu pas pas qu’une société s’en empare et commercialise ton projet sans toi puisque c’est open source (question troll-piège :)) ?

Comme je l’ai mentionné plus haut, tant qu’ils respectent la clause de redistribution à l’identique (SA), cela me va. Je pourrais ainsi à mon tour récupérer leurs sources (que j’espère améliorées) pour mes propres boîtiers 😉

OpenReflex - Léo Marius

Éprouves-tu une certaine « nostalgie » de la photo argentique ?

Pas vraiment de la nostalgie, mais c’est une sensibilité différente à l’image que l’on ne retrouve pas avec le numérique : l’attente et l’incertitude de la photo, le coût aussi qui limite l’utilisation abusive. On réfléchit avant d’appuyer sur le bouton, on n’en prend pas cinquante à la volée comme cela se fait trop souvent.

Je me souviens du temps où les objectifs étaient obligatoirement reliés à une marque (ceux pour Canon, Nikon, etc.). Avec ton OR-01 et sa bague adaptable, tu donnes en quelque sorte de l’interopérabilité aux appareils photos, non ?

Oui, toujours dans l’idée de se rapproprier la technologies. Si l’appareil avait été dépendant d’un type d’objectifs, cela n’aurait pas fonctionné.

Techniquement, comment réussis-tu avec des pièces à monter à rendre l’appareil totalement opaque ?

Le tout est imprimé avec du plastique opaque et, en mettant des rebords et des emboîtements bien placés, l’étanchéité se fait sans trop de difficultés. Pour certaines zones, un peu plus sensibles, j’ai ajouté de la patafix noire pour combler les trous potentiels.

Toutes les parties étant autonomes c’est surtout le dos dans lequel se trouve la pellicule qu’il faut rendre étanche à la lumière, on peut se permettre des petits jours dans les autres. Ça reste un appareil DIY. 🙂

Un petit mot sur Framasoft que tu sembles connaître ?

Merci ! Continuez ce que vous faites. Le libre l’emportera ! 😉

Un appel à lancer ? Une actualité à annoncer ?

Peut être une nouvelle version plus aboutie de l’OpenReflex qui devrait être disponible en financement participatif en septembre ou octobre (selon mes engagements professionnels). N’hésitez pas à suivre mon blog ou à me poster un message sur le dépôt Instructables pour être tenus au courant.

Et sinon, permettez-moi un petit clin d’oeil hommage à Gilles Roussi, le professeur à l’origine de l’association Le_Garage qui nous lira surement 😉

OpenReflex - Léo Marius

Photo ci-dessous réalisée avec l’OR-01




Prothèse de main : de dix mille à cent cinquante dollars grâce à l’impression 3D

Quand l’association de l’impression 3D et de l’esprit Libre donnent des choses extraordinaires…

Robohand - MakerBot

Des prothèses de main open source peuvent être imprimées en 3D pour 150$

Open Source Prosthetic Hand Can Be 3D Printed For $150

John Pugh – 26 mai 2013 – psfk.com
(Traduction : Goofy, Calou, nicolas, MatElGran, GPif, Asta, Pascal, audionuma)

Robohand est une main mécanique à bas coût qui peut être fabriquée avec une imprimante MakerBot3D.

Pour les patients souffrant d’une blessure traumatique ayant entraîné la perte d’un membre, ou les enfants nés avec un handicap tel que le syndrome des brides amniotiques (dont la conséquence est souvent que l’enfant naît avec un ou plusieurs doigts manquants), une nouvelle prothèse a le potentiel de changer littéralement leur vie quotidienne. Cependant, les technologies actuelles de prothèse sont très compliquées et onéreuses, pouvant coûter jusqu’à 10 000 $ pour une prothèse de doigt basique. Imaginez qu’au lieu d’avoir recours à des produits complexes et coûteux, nous puissions simplement imprimer une prothèse complète confortablement à la maison !

Robohand est une main mécanique qui peut être imprimée en 3D avec une imprimante MakerBot. À l’origine de l’idée, Richard Van As, un menuisier sud-africain qui a perdu quatre doigts lors d’un accident en 2011. Suite à cet accident, il commença à travailler avec le designer de mains mécaniques Ivan Owen (Seattle) pour concevoir un modèle de prothèse peu coûteux et capable de fonctionner aussi convenablement qu’une main ou que de doigts réels. Se basant sur leur concept, MakerBot a fait don d’une imprimante 3D Replicator 2 Desktop[1] à leur équipe, accélérant ainsi la création de prototypes fonctionnels, tout en réduisant les coûts de production.

Au total, le coût des pièces de la Robohand fabriquées avec l’imprimante MakerBot3D s’élève seulement à 2,50$ de matériel et on obtient une prothèse fonctionnelle complète, incluant le matériel non imprimable, pour environ 150$. En plus d’une économie importante, Van As a compris à quel point cette méthode lui permet d’affiner rapidement sa conception en fonction des besoins spécifiques d’un individu. Suite à la diffusion de son histoire, il a reçu des courriels et des messages sur Facebook de parents d’enfants atteints du syndrome des brides amniotiques voulant explorer le potentiel d’une conception par impression 3D. Cette technologie est d’autant plus décisive pour les enfants que leur croissance est rapide, ils nécessitent de multiples prothèses au cours de leur croissance. À la suite de ces conversations sur le réseau social, au moins trois enfants ont été sélectionnés et ont reçu leurs nouvelles mains.

Le projet est entièrement open source, ce qui signifie que n’importe qui ayant accès à une imprimante 3D peut télécharger le fichier de conception gratuitement et créer sa propre main robotique. Alors que ce projet est toujours en cours de finalisation, les équipements d’impression 3D montrent un vaste potentiel pour notre santé. En facilitant l’accès à tous et en réduisant fortement le coût de production, ces équipements vont permettre à des patients qui s’en sortent difficilement, du fait d’un manque d’accès aux prothèses, de pouvoir vivre un vie normale.

Notes

[1] À propos de cette nouvelle imprimante, et sans vouloir troller, on pourra lire : Polémique : la nouvelle imprimante 3D de MakerBot a-t-elle trahi l’open hardware ?




Attention danger ! Restrictions numériques et physiques sur nos propres appareils

Nous devons craindre de nous réveiller un jour dans un monde où non seulement les contenus numériques seront sous contrôle mais également les appareils qui permettent de les consulter…

Brendan Mruk et Matt Lee - DRM.info

Restrictions numériques et physiques sur votre propre appareil

Digital and physical restrictions on your own device

Erik Albers – 3 mai 2013 – FSFE Blog
(Traduction : goofy, hugo, Eijebong, ProgVal, Rudloff, Tony, Rogdham, Asta, KoS + anonymes)

À propos des restrictions numériques

Aujourd’hui, 3 mai 2013, on célèbre la Journée internationale contre les Mesures Techniques de Restriction (Digital Restrictions Management)[1], promue par la Fondation pour le Logiciel Libre (Free Software Foundation, FSF). En général, le terme Digital Restrictions Management (DRM) se réfère à différentes restrictions que les entreprises – ou tout autre fournisseur de contenu – imposent sur les données et contenus numériques. Ces restrictions sont là pour permettre aux fournisseurs de décider ce que vous pouvez faire avec vos données et contenus, et ce que vous ne pouvez pas faire. Ainsi, ils vous empêchent d’être en pleine possession de vos données. Ces données sont défectueuses par nature (defective by design) – quel que soit le prix que vous soyez prêt-e à y mettre.

Et cela nous mène à un monde où l’on « n’achète » rien d’autre qu’une « licence d’utilisation ».

Les restrictions comme celles-ci évoluent, jusqu’au jour où la personne détenant les droits peut légalement décider de soudainement supprimer tout ce que vous avez acheté – à distance !

Cette année, la journée contre les DRM se concentre sur une nouvelle menace globale contre tout ce que ce que nous connaissons du World Wide Web : le World Wide Web Consortium (W3C) réfléchit à un projet de spécification d’Extension de Contenus Chiffrés (Encrypted Media Extensions proposal, EME), qui vise à avaliser le support des DRM dans HTML5. HTML est le cœur de ce qu’est le Web (NdT: « de ce qu’est Internet » (sic) dans la version originale). Établir les DRM au sein d’HTML pourrait devenir une terrible menace pour la liberté de l’Internet, les navigateurs libres et la liberté des utilisateurs en général.

J’espère que beaucoup de personnes dans le monde vont rejoindre la FSF ou la FSFE (FSF Europe), ou s’aligner avec d’autres organisations dans leur combat contre les DRM dans HTML5. S’il vous plait, signez la pétition et faites le plus de bruit possible pour que d’autres personnes se rendent compte de ce développement captieux.

À présent, je voudrais utiliser cette journée pour faire le point sur un autre problème. Quelque chose auquel les DRM ne sont pas forcément reliées ; mais, qui y est effectivement relié : la propriété de vos propres appareils.

À propos de la propriété de votre appareil

De plus en plus souvent, nous voyons comment les entreprises et les fabricants vendent des appareils bridés qui sont en fait des (mini) ordinateurs – mais sont artificiellement bloqués pour que vous ne puissiez pas vous en servir comme des ordinateurs universels. Les fabricants sont créatifs lorsqu’il s’agit de restreindre vos appareils et sont déjà prêts à s’attaquer aux ordinateurs universels classiques avec une restriction appelée Secure Boot. Mais, l’amère vérité est que de telles restrictions sont déjà valables pour des appareils « mobiles » – téléphones et tablettes – ce qui remet fondamentalement en cause de ce que l’on appelle propriété.

Note : Ce que je vais expliquer est tout à fait vrai pour beaucoup d’appareils sur le marché – mais comme je connais mieux le système Android et les restrictions qui viennent avec celui-ci, je vais me concentrer sur les téléphones Android. À propos, si vous voulez en savoir plus sur la façon de débloquer son chargeur de démarrage (bootloader), changer votre système d’exploitation et utiliser du Logiciel Libre sur votre appareil mobile, vous pourrez trouver plus d’informations sur http://www.freeyourandroid.org.

Si aujourd’hui vous achetez un appareil Android, vous achetez le matériel d’un fabricant qui vient avec un système d’exploitation préinstallé développé par Google, Android. Ce système d’exploitation vient souvent avec son lot d’inconvénients, comme des applications que vous n’êtes pas autorisé-e à désinstaller. Ainsi, ils vous vendent un système d’exploitation bloqué. Malheureusement, le même matériel vient souvent avec un chargeur de démarrage bloqué, donc vous n’êtes pas capable de remplacer le système d’exploitation. À part quelques applications, en quoi est-ce mal ?

Tout d’abord, c’est une restriction artificielle de votre appareil. Ils ne veulent pas que vous l’utilisiez comme vous l’entendez – que vous souhaitiez utiliser le système préinstallé ou non. Ils appellent souvent cela un « produit fini », ce qui devrait être littéralement compris comme la fin de votre liberté.

Ensuite, leur but est de vous lier aux intérêts du fabricant. Et leur intérêt est d’augmenter le nombre d’appareils vendus chaque année au lieu d’assurer la maintenance de ceux déjà vendus. Comment ? Si vous achetez un téléphone Android et qu’ensuite Google publie une nouvelle version, vous ne pourrez pas installer cette nouvelle version car votre chargeur de démarrage est bloqué. Autrement dit, peu importe que votre appareil soit capable de fonctionner sur un nouveau système d’exploitation, ils restreignent simplement la possibilité de le faire.

Heureusement, il y a une façon de vous réapproprier votre appareil et d’installer le système de votre choix, quel qu’il soit : débloquer le chargeur de démarrage. Mais comme ce n’est pas l’intérêt de votre fabricant – tel que je l’ai expliqué plus haut – ils vont probablement déclarer votre garantie nulle si vous le faites. Ce qui est juridiquement incorrect. Comme Carlo Piana et Matija Šuklje l’ont fait remarquer – ainsi qu’une association de consommateurs allemande – ce n’est pas légal suite à la Directive Européenne 1999/44/EC (NdT: la garantie est due par le vendeur, voir Code de la consommation, L.211). Malheureusement, ils essayent toujours de vous faire peur. Cela ne peut pas être vu que comme une mauvaise habitude. L’intention est d’éviter que les utilisateurs ne se réapproprient leurs propres appareils. C’est pourquoi ils continuent de le faire – même si ce n’est pas sur une base légale.

Les constructeurs ont différentes politiques concernant la possibilité de débloquer votre chargeur de démarrage. Dans le pire des cas, ils vont feront signer un contrat juridique avant que vous n’obteniez le code spécifique pour débloquer votre chargeur de démarrage. Dans ce contrat, que vous devez signer, ils vous forcent souvent à renoncer à votre garantie – qui est un transfert de vos droits en tant que consommateur, comme expliqué plus haut. Mais, pire encore, il y a le contrat que vous devez signer pour débloquer votre appareil Motorola[2] :

Les appareils qui ont été débloqués sont pour votre utilisation personnelle uniquement. Une fois que vous avez débloqué votre appareil, vous ne pouvez l’utiliser que pour votre utilisation personnelle et ne pouvez pas le vendre ni même le céder.

Pardon ? Vous n’êtes plus autorisé à vendre votre appareil ? Celui que vous avez acheté ?

Où allons nous ?

Le contrôle à distance et la gestion des restrictions de vos données numériques sont quelque chose dont nous devons nous soucier. Mais, de plus en plus d’entreprises ont déjà imposé des restrictions numériques sur l’usage physique de nos appareils – tel que l’interdiction d’installer les logiciels que vous voulez sur votre propre appareil. Ou, comme on l’a déjà vu, la limitation sur les conditions de vente de votre propre materiel. C’est un développement négatif contre lequel nous devons agir et essayer de changer ces pratiques. Si nous échouons à le faire et laissons tomber nos droits en tant que consommateurs et nos libertés civiles, nous devons craindre de nous réveiller un jour dans un monde où non seulement le contenu numérique sera hors de contrôle de la société, mais également le contrôle physique de la technologie.

De nos jours, Google nous donne un parfait exemple de comment cela peut être fait : les Google Glass vont être du matériel qui sera vendu par Google et qui est actuellement en beta test sous le nom de Google Glass Explorer Edition. À cause de la licence d’utilisation que vous devez signer pour devenir un beta testeur, vous ne serez pas autorisé à vendre l’appareil ou même le prêter à un ami. Certes, cela peut être vu comme une mauvaise habitude ou une restriction compréhensible pour un test. Ce n’est pas mon propos. Je veux dire que cela devrait concerner tout le monde : si vous ne respectez pas les conditions de Google, ils désactiveront votre matériel à distance.

Cela se rapproche de l’étape finale : l’intégration par le constructeur d’une option pour détruire à distance votre matériel, laissant chaque utilisateur sans contrôle de sa propre technologie informatique, de ce qui lui appartient. Si le futur est dans le contrôle à distance, la société perdra le contrôle de la technologie et de son contenu. À partir de là il est facile d’imaginer la censure, la supervision et le contrôle de la société par des monopoles d’une manière encore jamais vue.

Crédit illustration : Brendan Mruk et Matt Lee (Creative Commons By-Sa)

Notes

[1] Lire à ce sujet ces deux billets du Framablog : Mobilisons-nous ! Pas de DRM dans le HTML5 et les standards W3C et DRM dans HTML5 : la réponse de Cory Doctorow à Tim Berners-Lee.

[2] C’est seulement un exemple, j’en suis conscient. Il y a peut être d’autres entreprises qui agissent de la sorte, je n’en sais rien.