Le Libre Accès ou le retour de la Grande Conversation par Jean-Claude Guédon

« Pour partir de loin, je dirai que le Libre Accès répond a une situation de base importante, qui est que la science, globalement et mondialement, est une Grande Conversation.

Et ce processus de découvertes et d’inventions, que l’on trouve dans la science et la technologie d’ailleurs, repose sur la facilite de converser, d’échanger et de construire sur la base de choses antérieures et ainsi de site.

Or on est dans une situation où pour des raisons multiples, complexes et historiques largement, la conversation a été entravée, empêchée, diminuée, ralentie, rendue plus exclusive pour certains au détriment d’autres et ainsi de suite.

Et tout le mouvement du Libre Accès vise quelque part à restaurer les conditions optimales de cette Grande Conversation.

C’est-à-dire de permettre à n’importe qui a les moyens de lire ces textes d’une façon ou d’une autre, d’aller chercher ces textes facilement, de les consulter facilement, de travailler avec eux, d’élaborer d’autres textes, d’autres recherches, d’autres résultats, et ainsi de suite.

Donc le Libre Accès est simplement une manière de mettre en oeuvre un rêve ancien qui était celui de la République des Lettres et des Sciences du XVIIe siècle, qui était de créer une Grande Conversation avec un certains nombres de pairs. Les pairs en l’occurrence étant ces gens qui étaient égaux les uns aux autres par la façon dont ils avaient réussi à se former, à devenir des scientifiques, à travailler ensemble.

Le Libre Accès à lui tout seul ne résoudra pas tous les problèmes de la science contemporaine. Mais le Libre Accès déjà donne une première réponse partielle aux inégalités qui se sont développées graduellement dans le monde scientifique, dans la Républiques des Sciences, en donnant une chance nouvelle à cette Grande Conversation.

Et aussi en développant peut-être des possibilités tout à fait nouvelles pour la question de l’enseignement. Car évidemment quand on a accès aux derniers résultats de la recherche, on peut enseigner une science plus à jour, plus proche du fond de la recherche, et ainsi amener les étudiants plus près d’une capacité d’intervenir beaucoup plus forte… »

La suite de ce passionnant entretien avec Jean-Claude Guédon, ci-dessous en vidéo :

—> La vidéo au format webm

URL d’origine du document

Réalisation Alain Ambrosi – Image et montage Abeille Tard – Production Vecam / C&F éditions

Ce document est issue du très intéressant DVD, ou plutôt doculivre, Sciences & démocratie, véritable mémoire du premier Forum mondial éponyme qui s’est déroulé à Belém en janvier 2009. D’autres extraits sont disponibles sur le site du projet.

L’occasion pour nous de saluer et faire connaître l’excellent travail de la maison d’édition C & F Éditions animée entre autres par Hervé Le Crosnier.




Est-ce grave docteur quand Linux baisse et Ubuntu stagne dans Google Trends ?

Dans un récent billet intitulé Quel avenir pour Linux sur le poste de travail ?, Tristan Nitot posait la question suivante, que l’on peut aussi qualifiée de question qui tue : « Alors qu’on constate que le marché du PC est en fort déclin et que le téléphone mobile se profile comme étant le moyen d’accès à Internet premier pour une majorité de gens, Linux aura-t-il le temps de percer avant que la fenêtre d’opportunité ne se ferme ? Linux aura-t-il le temps de conquérir l’ordinateur de bureau avant que celui-ci ne devienne marginal ? »

Une chose est sûre, si l’on se fie à Google Trends, « Linux » est en spectaculaire déclin :

Google Trends - Linux

Voyez par vous-même

Pour rappel Google Trends « est un outil issu de Google Labs permettant de connaître la fréquence à laquelle un terme a été tapé dans le moteur de recherche Google, avec la possibilité de visualiser ces données par région et par langue » (source Wikipédia).

On pourrait se dire que peut-être est-ce à cause de l’irrésistible envolée d’Ubuntu. Mais non Ubuntu, quand bien même il ait rattrapé Linux, stagne aussi, jusqu’à baisser même sensiblement ces derniers temps :

Google Trends - Ubuntu

Voyez par vous-même

Les deux ensemble :

Google Trends - Linux + Ubuntu

Voyez par vous-même

Attention, cela ne signifie donc rien d’autre que le fait suivant : les internautes passant par le moteur de recherche Google tapent moins souvent les mots clés « Linux » et « Ubuntu » qu’avant. Et c’est tout.

Mais j’ai bien peur que cela soit quand même signifiant…




10 différences entre les OS libres Linux et BSD

Beastie - Logo BSDIl est trop rare que nous évoquions le système d’exploitation libre BSD (Berkeley Software Distribution). La dernière fois il s’agissait d’un billet consacré à l’histoire d’Unix, à l’occasion de son quarantième anniversaire.

Et c’est dommage parce que cela finit par laisser à penser qu’il n’existe que GNU/Linux dans le monde des OS libres. Or il y a aussi la famille BSD (FreeBSD, OpenBSD, NetBSD…), louée pour la propreté de son code, sa sécurité, sa fiabilité et sa stabilité, que l’on compare souvent à son « cousin » GNU/Linux justement, histoire de l’appréhender plus facilement et de mieux comprendre ce qui fait sa spécificité.

Si on le rencontre peu souvent sur ce blog, c’est aussi parce qu’il serait difficile de le conseiller de prime abord à un utilisateur lambda pour sa machine personnelle, surtout si ce dernier provient de l’univers Windows. La matériel est moins bien et moins vite supporté, il y a moins d’applications disponibles et il se destine surtout au monde des serveurs. Mais rien ne dit qu’un jour, vous aussi…

Ce billet s’adresse donc à tous les curieux et plus particulièrement à ceux qui se sont déjà frottés de près ou de loin à une distributions GNU/Linux. Il s’adresse également aux experts et aux aficionados de BSD qui sont cordialement invités à témoigner, compléter et surtout critiquer l’article et ses arguments dans les commentaires.

D’autant plus que l’auteur propose en conclusion une classification des OS en fonction de la maîtrise de leurs utilisateurs qui ne fera sans doute pas l’unanimité !

Remarque 1 : Le personnage ci-dessus s’appelle Beastie (bi-esse-di), c’est la mascotte BSD et il représente un charmant petit démon, oups, je veux dire daemon.

Remarque 2 : Il y a du BSD dans Mac OS X, comme aiment à la rappeler certains Macfans et les geeks qui, ayant adopté cet OS, « culpabilisent » moins ainsi 😉

10 différences entre Linux et BSD

10 differences between Linux and BSD

Jack Wallen – 4 août 2010 – TechRepublic
(Traduction Framalang : Loque huaine et Mathieu)

Malgré une tendance courante à minimiser leurs différences, Linux et BSD ont un certain nombre de caractéristiques qui les distinguent. Jack Wallen attire l’attention sur plusieurs différences importantes.

Combien de fois avez-vous déjà entendu les gens mettre Linux et n’importe quel BSD dans le même panier ? Bien sûr, il existe un grand nombre de similarités entre Linux et BSD : ils sont tous les deux basés sur UNIX. Dans l’ensemble, les deux systèmes sont développés par des organisations à but non lucratif. Et je dois dire que Linux comme les variantes BSD ont un but commun : créer le plus utile et le plus fiable des systèmes d’exploitation qui soit.

Toutefois, il y a aussi des différences significatives. Et quand les gens n’y font pas attention, c’est toute la communauté BSD qui frissonne de colère. Aussi, j’ai pensé que je pourrais aider mes frères de BSD et expliquer un peu en quoi Linux est différent de BSD.

1. Licences

Comme nous le savons tous, le système d’exploitation Linux est sous licence GPL. Cette licence est utilisée pour empêcher l’inclusion de logiciels aux sources fermées et pour assurer la disponibilité du code source. La GPL essaye d’empêcher la distribution de sources sous forme de binaires seulement.

La Licence BSD est bien moins restrictive et autorise même la distribution de source sous forme de binaires. La principale différence peut cependant être vue de la façon suivante : la GPL vous donne le droit d’utiliser le logiciel de n’importe quelle façon, mais vous DEVEZ vous assurer que le code source est disponible pour la prochaine personne qui utilisera le logiciel (ou votre variante du logiciel). La licence BSD n’exige pas que vous soyez sûr que la prochaine personne qui utilise (ou modifie votre code) rende ce code disponible.

2. Contrôle

Le code BSD n’est pas « contrôlé » par une personne en particulier, ce que beaucoup de gens voient comme un gros plus. Alors que le noyau Linux est principalement contrôlé par Linus Torvalds (le créateur de Linux), BSD n’est pas régi par une personne unique dictant ce qui peut ou ne peut pas aller dans le code. À la place, BSD utilise une « équipe centrale » (NdT : core team) pour gérer le projet. Cette équipe centrale a un droit de parole dans la direction du projet plus important que celui des autres membre de la communauté BSD.

3. Noyau contre système d’exploitation

Le projet BSD maintient un système d’exploitation entier, alors que le projet Linux se focalise principalement sur le seul noyau. Ce n’est pas aussi fondamental que ça en a l’air parce qu’un grand nombre d’applications qui sont utilisées le sont sur les deux systèmes d’exploitation.

4. UNIX-like

Il y a un vieux dicton à propos de BSD contre Linux : « BSD est ce que vous obtenez quand une poignée d’hackers UNIX se rassemblent pour essayer de porter un système UNIX sur un PC. Linux est ce que vous obtenez quand une poignée d’hackers PC se rassemblent et essaient d’écrire un système UNIX pour le PC » (NdT : BSD is what you get when a bunch of UNIX hackers sit down to try to port a UNIX system to the PC. Linux is what you get when a bunch of PC hackers sit down and try to write a UNIX system for the PC).

Cette expression en dit long. Ce que vous pourrez constater, c’est que les BSD ressemblent beaucoup à UNIX parce qu’ils sont en fait des dérivés directs du traditionnel UNIX. Linux, en revanche, était un OS nouvellement créé, vaguement basé sur un dérivé d’UNIX (Minix, pour être précis).

5. Systèmes de base

Ce point est crucial pour comprendre les différences entre BSD et Linux.

Le « système de base » pour Linux n’existe pas vraiment, puisque Linux est un conglomérat de systèmes plus petits qui s’imbriquent ensemblent pour former un tout. La plupart diront que le système de base de Linux est le noyau. Le problème c’est qu’un noyau est plutôt inutile sans aucune application utilisable. BSD en revanche, a un système de base comprenant de nombreux outils — même libc fait partie du système de base. Parce que ces pièces sont toutes traitées comme un système de base, elles sont toutes développées et packagées ensemble. D’aucun argueront du fait que cela crée un tout plus cohésif.

6. Plus à partir des sources

À cause de la façon dont BSD est développé (en utilisant le système de Ports), davantage d’utilisateurs ont tendance à installer à partir des sources plutôt que de paquets binaires pré-empaquetés.

Est-ce un avantage ou un inconvénient ? Cela dépend des individus. Si vous êtes adepte de la simplicité et de la convivialité, vous vous en détournerez. Ceci est particulièrement vrai pour les nouveaux utilisateurs. Peu de nouveaux utilisateurs veulent avoir à compiler à partir des sources. Cela peut engendrer une distribution pataude. Mais installer à partir des sources a aussi ses avantages (gestion des versions des bibliothèques, construction de paquets spécifiques au système, etc.).

7. Changements de version

Grâce à la façon dont BSD est développé (voir le point 5), vous pouvez mettre à jour l’ensemble de votre système de base vers la plus récente des versions avec une seule commande. Ou bien vous pouvez télécharger les sources de n’importe quelle version, les décompresser, et compiler comme vous le feriez pour n’importe quelle autre application. Avec Linux, vous pouvez aussi changer un système de version en utilisant le gestionnaire de paquets du système. La première façon ne mettra à jour que le système de base, la seconde mettra à jour l’ensemble de l’installation. Rappelez-vous cependant que passer à la nouvelle version du système de base ne veut pas dire que tous vos paquets supplémentaires seront mis à jour. Alors qu’avec les mises à jour de version de Linux, tous vos paquets bénéficieront du processus de mise à niveau. Est-ce que cela signifie que la façon de faire de Linux est meilleure ? Pas nécessairement. J’ai vu de mes propres yeux une mise à jour Linux qui s’est horriblement mal passée, nécessitant la réinstallation du système tout entier. Cela a beaucoup moins de chances de se produire avec un changement de version BSD.

8. Dernier cri

Il est peu probable que vous voyiez un BSD exécuter la toute dernière version de quoi que ce soit. Linux au contraire, a beaucoup de distributions qui offrent les dernières versions des paquets. Si vous êtes fan du « Si ce n’est pas cassé, ne le corrigez pas » (NdT : If it isn’t broken, don’t fix it), vous serez un grand fan de BSD. Mais si vous êtes du genre à avoir besoin que tout soit le plus récent possible, vous feriez mieux de migrer vers Linux aussi vite que possible histoire de ne pas être à la traîne.

9. Support matériel

Vous constaterez, en général, que Linux supporte le matériel bien plus tôt que BSD. Ça ne veut pas dire que BSD ne supporte pas autant de matériel que Linux. Ça veut juste dire que Linux le supporte avant BSD (dans certains cas, BIEN avant BSD). Donc si vous voulez la toute dernière carte graphique, ne pensez même pas à BSD. Si vous voulez le nouveau portable qui en jette avec un chipset sans-fil dernier cri, vous aurez plus de chance avec Linux.

10. Communauté d’utilisateurs

Je vais me risquer ici à généraliser sur les utilisateurs d’ordinateurs. En préambule je dirai qu’il y a des exceptions à TOUTES les règles (ou généralités, dans le cas présent). Mais je vous présente ma généralisation sur la répartition des distributions en fonction des utilisateurs. De la gauche vers la droite on passe des utilisateurs maîtrisant le moins un PC à ceux le maîtrisant le plus. Comme vous pouvez le constater, Linux est au milieu, alors que BSD penche plus sur la droite. Beaucoup ne seront pas d’accord ; certains en seront même offensés. Mais c’est d’après moi une généralité assez juste sur l’usage du système d’exploitation selon l’utilisateur.

Mac —–> Windows —–> Linux —–> BSD —–> UNIX

Autres différences ?

Cette liste n’est en aucune façon destinée à dire que l’un est meilleur que l’autre. Je trouve que BSD et Linux ont chacun leur place. Et vous ?

Trouvez-vous les différences entre Linux et BSD assez significatives pour préférer rester sur l’un plutôt que l’autre ? Avez-vous essayé les deux ? Qu’est-ce qui vous fait préférer l’un par rapport à l’autre ? Argumentez, et faites connaître votre opinion à vos amis lecteurs.




Le Loup et le Chien

Simaje - CC byLe petit garçon s’ennuyait tout seul chez lui.

Il avait un devoir scolaire à faire pour le lendemain mais il préférait contempler le panorama, par la fenêtre du douzième étage de son appartement : trois barres d’immeuble identiques au sien entourant un parking et un parc, les murs de la résidence, plus loin la route et puis encore plus loin la rivière qu’il aimait bien, même si on ne pouvait plus s’y baigner l’été. Trop polluée avaient dit les autorités.

La vue n’avait rien d’extraordinaire en soi mais elle lui était familière. Et puis c’était amusant de voir tout ça de si haut perché.

Il y avait des enfants qui jouaient juste en bas, dans le parc. Il en connaissait quelques uns. Mais il n’avait pas le droit de les rejoindre. Sa maman disait que ce n’était pas sûr et que c’était de « mauvaises fréquentations ».

Il trouvait que sa maman exagérait parce que tout cela se passait à l’intérieur de la résidence. Une résidence protégée par une enceinte et contrôlée en son unique point d’entrée par un gardien et des caméras de surveillance. En plus chaque immeuble avait ses propres caméras, et pour y pénétrer il y avait un digicode puis un interphone. Le code changeait souvent mais en ce moment c’était « 3142 ». C’est drôle, non, la valeur approchée de Pi arrondie au millième ! Il était fier d’avoir trouvé cela tout seul.

Bon, alors, ce devoir scolaire… Il n’avait pas vraiment d’excuses parce que, contrairement à d’habitude, c’était pas mal intéressant. Il fallait apprendre par coeur la fable de La Fontaine Le Loup et le Chien.

C’est l’histoire d’un loup qui jalouse la vie tranquille et confortable d’un chien jusqu’à ce qu’il découvre que « le prix à payer pour sa sécurité c’est d’être tenu en laisse ». C’est la maîtresse qui disait cela comme ça et c’est vrai qu’elle formulait bien les choses la maîtresse.

Quand elle l’a lu pour la première fois devant nous, elle a posé le livre, s’est assurée que tout le monde avait bien compris et elle a demandé si on préférait le loup ou le chien. Au début, c’était un peu le silence dans la classe. On cherchait surtout à savoir ce que la maîtresse voulait qu’on réponde. Et quand on a pigé qu’elle voulait justement qu’on soit pas d’accord, alors on s’est détendu et on a répondu comme on voulait. Moi, j’ai choisi le chien mais j’étais bien content que la maîtresse ne me demande pas pourquoi.

Le problème, c’est que même quand je les aime bien, je ne suis pas très fort en poésie. Je retiens pas tout et j’ai du mal à me concentrer longtemps sur une tâche. Je le sais puisque c’est ce qu’on me dit depuis la maternelle.

Alors le petit garçon se remit à sa fenêtre. Et il vit alors plusieurs caravanes s’engager puis parcourir lentement la route…

Ils s’en vont, pensa-t-il spontanément. Et cela ne l’étonna pas.

C’est normal, non, pour des « gens du voyage » de s’en aller ailleurs au bout d’un moment ! Sauf que là, il en était sûr, le départ avait été un peu forcé. Et puis d’abord on ne dit pas gens du voyage mais Roms.

Il avait appris cela – et d’autres choses encore comme la signification des mots « nomade » et « sédentaire » – parce que depuis leur arrivée, un mois auparavant, on en parlait souvent dans le quartier, à l’école et même à table avec les parents. On en parlait souvent mais on n’en parlait pas avec eux.

Ils s’étaient installés pas loin, à quelques centaines de mètres, mais là encore interdiction familiale formelle d’aller y voir de plus près. Pourtant, maman, contrairement à papa, elle en disait plutôt du bien à table. Elle disait que c’était une communauté ancestrale, avec une riche culture, qui se montrait solidaire et ne s’était pas perdue dans l’individualisme et le consumérisme, et que c’était à nous de nous adapter et non l’inverse. Alors papa lui souriait et lui répondait qu’il ne tenait qu’à elle de tous les inviter ce soir à dormir dans notre salon. Et maman, ça n’avait pas l’air de l’amuser que papa dise ça. Elle répondait un peu énervée qu’il fallait qu’il arrête de faire son malin et que c’était de la « responsabilité des pouvoirs publics », expression que j’avoue je ne comprenais pas bien – « individualisme » et « consumérisme » non plus d’ailleurs – mais vu l’état de maman, ce n’était vraiment pas la peine d’en rajouter.

C’est dommage parce que je lui aurais bien aussi demandé sur le ton de la provocation pourquoi on disait souvent à la récré que « c’étaient tous des voleurs » ! Moi j’y croyais pas, même si je me demandais comment ils faisaient pour vivre. Faut dire que je me posais aussi d’autres questions moins importantes à leur sujet. Je me disais par exemple qu’ils n’avaient sûrement pas de connexion Internet et que ça doit faire bizarre aujourd’hui de vivre sans. D’ailleurs, nous aussi on est des voleurs. Ben oui, puisqu’on télécharge tous sur Internet !


En tout cas, ils avaient éprouvé toutes les peines du monde à s’installer de manière provisoire quelque part. Même quand le terrain était vide depuis des années, il possédait toujours un propriétaire. Et celui-ci ne tardait pas à se manifester pour refuser vigoureusement leur venue et leur demander plus ou moins gentiment de quitter les lieux. On les avait ainsi déjà déplacés quatre fois. Et c’était visiblement une fois de trop.

Voici donc tout ce que se disait le petit garçon, le nez collé à la fenêtre, en voyant défiler cet étrange cortège.

Il y avait des gens qui marchaient à côté des caravanes, sans se dire un mot, ou alors doucement parce qu’on n’entendait rien de loin. Lorsque la dernière caravane disparut de son champ de vision, il resta un moment suspendu puis se souvint qu’il avait une poésie à mémoriser.

À la réflexion, il se dit qu’il préférait peut-être le loup finalement.

Crédit photo : Simaje (Creative Commons By)




Les AMAP : c’est quoi ? c’est bien !

Mzelle Biscotte - CC by-saIl y a quelques semaines, nous tentions une nouvelle escapade parmi les Hors-sujet… ou presque du blog en vous parlant de Couchsurfing, cette pratique sociale et solidaire qui prend le contre-pied des canons de la société de consommation, et remise au goût du jour par le réseau des réseaux.

Aujourd’hui, nous poursuivons l’exploration en évoquant une autre pratique solidaire aux valeurs humanistes proches de celles portées par le logiciel libre.

Il ne s’agit pas d’un site ou d’un projet, mais d’un véritable phénomène de société, émergeant enfin en France : les AMAP. Ces Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne, poussent en effet comme des champignons et il est fortement probable qu’elles soient déjà plus nombreuses que les GUL[1] en France comme on peut s’en convaincre en se promenant sur le site Réseau-AMAP.org[2].

Les AMAP proposent tout simplement une autre façon de faire ses courses alimentaires. À l’image de l’émergence de GNU/Linux et des logiciels libres face à Windows et aux logiciels privateurs, les AMAP se composent d’hommes et de femmes qui ont décidé de s’organiser pour ne plus subir un système jugé déloyal, représenté par les coopératives agricoles et la grande-distribution, qui imposent aux paysans une agriculture intensive et polluante, tout en achetant à des prix irresponsablement bas des denrées que le consommateur paye au prix fort.

Ensemble, ils ont imaginé une autre solution, et elle fonctionne tellement bien qu’aujourd’hui, que l’on profite de l’air pur de la campagne, ou du bruit des villes, on a sûrement une AMAP à proximité. Et si elle se révèle trop éloignée, c’est qu’il y a la place pour en créer une nouvelle plus près 🙂

D’ailleurs, une fois qu’on a pris l’habitude de ne plus consommer passivement, tout s’illumine !

Voyez par vous-même : en se rapprochant du G.U.L. le plus proche, on installe un système d’exploitation libre sur sa machine, et rapidement au fil des discussions, on lance le site FDN dans son Firefox. De là, on libère sa connexion Internet et on commence à produire l’Internet qu’on consomme… Dès lors, pour peu qu’on aide à tenir le stand de l’association (par exemple au Village du Libre de la fête de l’Huma) on risque fortement de rencontrer d’autres membres qui vous présentent à leur tour : Énercoop, la coopérative d’intérêt collectif des producteurs et consommateurs d’électricité 100% renouvelable, qui permet de s’affranchir d’EDF. Et finalement, lorsqu’on a décidé d’avancer tant que la voie serait libre, on se rend compte que la route s’allonge sous les pieds, sans cul de sac, jusqu’à trouver naturel de prévenir son AMAP qu’on ne viendra pas chercher son panier pendant deux semaines puisqu’on s’évade en co-voiturage pour des vacances à l’aventure en Couchsurfing, ou avec les enfants en club CPN

Je vous présente donc « Framap », l’innocent nouveau projet de Framasoft, qui tient en un billet de blog…

Un article rédigé à Kervelgan près de Baud en Bretagne, par mon frère Denys. Et attention, Daphné K. n’a qu’à bien se tenir car il est lui aussi guitariste et poète à ses heures !

Framap : Favoriser la Reconnaissance des « Association pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne »

Denys Descarpentries – 19 août 2010

Dans un monde où les entreprises seraient délocalisées pour augmenter les profits des grands actionnaires, dans un monde où les agriculteurs n’auraient d’autre choix pour survivre que de s’agrandir et de produire de façon intensive, à grand renfort d’engrais et de pesticides ; dans un monde qui ressemblerait étrangement au nôtre donc, quels seraient les leviers d’action des consommateurs non consentants ?

Une piste qui a fait ses preuves est celle des « consom’acteurs » qui se réunissent en AMAP (Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne) et s’émancipent des circuits de grande-distribution, tout en mangeant bon et bio.

Le principe des AMAP est relativement simple. Il s’agit de mettre en relation un groupe de consommateurs et une ou plusieurs fermes locales, pour organiser une distribution hebdomadaire de paniers, composés de « produits de la ferme ». C’est un contrat solidaire entre d’un côté des producteurs qui s’engagent à nous fournir toutes les semaines des produits bio et d’un autre des consommateurs qui paient à l’avance la totalité de leur consommation pour une période donnée[3].

En ce qui me concerne, je suis adhérent d’une AMAP avec mon amie depuis deux ans. Nous nous fournissons en légumes, lait, produits laitiers (beurre, fromages, crème fraîche, desserts…), en pain, œufs, miel, jus de pomme et en cidre (et oui, nous habitons en Bretagne ^^). Nous avons un contrat avec chacun des 7 producteurs membres de l’AMAP et les intérêts que nous y trouvons sont nombreux. Je vais les classer en trois catégories : les aspects économiques, environnementaux et sociaux (les initiés remarqueront au passage qu’il s’agit là des trois piliers du développement durable…!).

L’aspect économique

Pour les producteurs adhérents, l’aspect économique est le plus important. Le fait de recevoir la totalité des paiements au début de chaque période permet aux agriculteurs de compter sur une trésorerie suffisante pour réaliser des investissements lourds. Ces investissements sont nécessaires pour faire évoluer leur outil de travail, et à plus forte raison en agriculture biologique où les techniques d’élevage et de culture sans « produit artificiel » et dans le respect du bien-être des animaux demandent des outils spécifiques.

Pour les « amapiens » que nous sommes, il s’agit en revanche du point le plus délicat. En effet cela demande de faire un chèque environ tous les 6 mois, ce qui représente une grosse sortie d’argent à prévoir dans le budget. En fonction des AMAP, il est tout de même possible de faire plusieurs chèques pour un même producteur et d’étaler ainsi les versements.

Concernant le budget alimentation, il faut bien se rendre compte d’une part que les produits bio achetés à l’AMAP ne sont pas plus chers que sur les marchés et si vous habitez en ville, ils sont même moins chers que dans les grandes surfaces. Et ensuite, que même s’il faut toujours se rendre dans les magasins pour acheter les produits qui ne sont pas proposés par l’AMAP (tout bonnement le « non alimentaire »), les passages en supermarché sont beaucoup moins fréquents. Cela entraîne des économies de déplacement et une baisse notable des achats impulsifs des lots en super promo exposés en tête de gondole ou des produits qu’on ne pensait pas acheter avant d’entrer dans le magasin mais sur lesquels on craque quand on a le malheur d’aller faire les courses le ventre vide… Au final, nous observons que notre budget pour les courses n’a pas changé, alors que désormais nous mangeons bio et que nous contribuons activement à tous les autres aspects développés dans cet article.

Le dernier aspect économique (et non le moindre) c’est que les producteurs de l’AMAP sont des producteurs locaux. Cela permet de maintenir un tissu économique autour de chez nous, évite de passer par des intermédiaires qui s’enrichissent sur notre dos et celui des agriculteurs et cela réduit les coûts environnementaux liés aux transports des marchandises par camion ou pire, par avion. Il s’agit donc de lutter à notre échelle contre une forme de délocalisation bien réelle : celle des productions agricoles. D’ailleurs, soit dit en passant, lorsqu’on achète des produits en supermarché la logique reste la même : mieux vaut accorder sa préférence aux fruits et légumes du terroir, ou à défaut « origine France », par rapport aux autres provenances. Mais nous débordons déjà là sur le second aspect.

L’aspect environnemental

Il s’agit de l’aspect le plus facilement identifiable des AMAP. Les producteurs qui nous fournissent s’inscrivent dans une démarche d’agriculture biologique. Ils conduisent leurs cultures sans utiliser de produits synthétiques polluants tels que les engrais de laboratoire et les pesticides (herbicides, insecticides, fongicides, etc…). Pour la conduite des animaux, les hormones et les antibiotiques sont interdits et le bien-être animal est également un critère d’évaluation à respecter pour être labellisé.

Une autre facette de l’aspect environnemental se trouve dans la sauvegarde de la biodiversité. Les producteurs n’étant pas soumis aux contraintes de la grande distribution, ils peuvent « se faire plaisir » en cultivant des légumes méconnus[4] ou d’anciennes variétés presque oubliées (à l’heure des productions intensives et uniformisées) malgré leurs qualités. Je vous recommande de tester certaines espèces de tomates roses et biscornues[5] absolument délicieuses mais délaissées car ne répondant pas aux standards « toute ronde et bien rouge » ! Ou encore les délicieuses chips de panais, une espèce de grosse carotte blanche et savoureuse. Cette découverte de nouveaux légumes dans les paniers s’apparente un peu à ouvrir les « dragées surprises de Bertie Crochue » dans Harry Potter : on ne sait pas sur quoi on va tomber ! Des fois on aime, et parfois moins… Heureusement, il y a un panier d’échange où l’on peut remplacer ce qu’on n’aime pas par des légumes qu’on préfère, à condition d’y avoir goûté au moins une fois ! D’ailleurs nous sommes régulièrement surpris avec mon amie par la saveur des légumes bio, tellement meilleurs que ceux qu’on trouve dans le commerce (et ce n’est pas un cliché).

Quand le panier contient des espèces méconnues, notre producteur (qui est un passionné), accompagne toujours le sac d’un petit mot pour expliquer de quelle variété de légume il s’agit, préciser son histoire et indiquer comment le cuisiner facilement. Ainsi, il s’agit non seulement de faire revivre certaines espèces mieux adaptées à nos sols et à nos climats, mais également de piquer les curiosités, ajoutant toujours un peu de surprise à la découverte de la composition du panier de la semaine.

L’aspect social

Après avoir détaillé les aspects les plus matériels de l’affaire, abordons maintenant ce volet, un peu plus « bonus », un peu moins quantifiable, mais où pour ma part, je trouve aussi mon compte : l’aspect social. Tout d’abord, quand on est enfermé toute la journée chez soi et que l’on ne voit quasiment personne (quand on travaille à domicile par exemple, ou quand on cherche du travail), c’est pas plus mal d’avoir rendez-vous avec son panier de courses et donc avec les autres adhérents de l’AMAP par la même occasion. Comme ça on sort un peu de la maison (au moins une fois dans la semaine…) et on rencontre des personnes qui partagent des valeurs communes. Comme la distribution en elle-même est assez rapide, ça laisse du temps pour engager des discussions. Les profils classiques que l’on rencontre sont des couples d’enseignants (souvent à l’origine de la création de l’AMAP), beaucoup de jeunes dans la trentaine [6], des actifs de la classe moyenne (si si, il y en a encore) et bien sûr des écologistes convaincus.

Ensuite, pour approfondir les connaissances et surtout pour faciliter le bon déroulement des distributions, tous les adhérents sont conviés à s’inscrire à tour de rôle pour prêter main-forte aux agriculteurs, au moins une fois par semestre. On s’inscrit par trinôme, en fonction des places disponibles, ce qui nous amène à passer l’heure de distribution avec d’autres personnes et à voir défiler l’ensemble des adhérents (dont certains qu’on ne verrait pas autrement à cause des impératifs horaires propres à chacun). Les missions des « amapiens » de permanence sont : d’aider les producteurs à installer les tables, de porter les produits (cagettes, bidons de lait…) des camionnettes jusqu’aux tables, de peser les légumes et de les mettre en sachet pour gagner du temps pendant la distribution, puis de tout débarrasser à la fin. Cela nous permet également de voir l’envers du décors et de participer au groupe.

Enfin, nous sommes invités occasionnellement (une à deux fois par semestre) à venir apporter notre aide directement sur la ferme d’un des producteurs adhérents. Cela présente plusieurs avantages pour chaque partie. Tout d’abord c’est un renfort bienvenu pour l’agriculteur (arrachage de mauvaises herbes, récolte de plants de pomme de terre…). C’est également l’occasion pour l’agriculteur de nous présenter sa ferme et comment il travaille, et on est bien entendu invité à poser toutes nos questions. Mais c’est surtout un bon prétexte pour prendre l’apéro tous ensemble après le travail et la visite, puis de sortir les salades, les tartes au fromage de chèvre ou les pains d’épices que chacun a préparé chez lui la veille (avec les produits de l’AMAP évidemment) et de se faire un bon repas dans une ambiance conviviale, au soleil (même en Bretagne) à la campagne, en échangeant nos convictions associatives (et nos meilleures recettes).

C’est dans ce contexte et dans cette ambiance qu’en fonction de l’âge et du dynamisme de l’AMAP, d’autres services peuvent se mettre en place. Nous avons par exemple commencé cette année un service de « prêts de matériel » pour des outils qu’on n’a pas forcément tous chez soi (taille-haies, perceuses…). C’est vraiment le côté associatif de l’AMAP qui ressort. D’ailleurs dans le même état d’esprit, un des derniers courriels en date qui a circulé dans notre AMAP proposait de s’intéresser à la possibilité d’héberger soi-même sa boîte aux lettres électronique via une connexion Internet du fournisseur d’accès « dont vous êtes le héros », un certain FDN.fr[7].

Conclusion

Pour conclure ce billet, je ne serais pas tout à fait honnête si je ne vous faisais pas part des quelques inconvénients que j’ai pu constater au cours de mes deux années d’AMAP. Tout d’abord, comme je l’ai déjà mentionné, il faut payer tous les paniers au début du semestre. Au moins le budget est fixe, et puis c’est un réel atout pour les petits producteurs, mais il faut pouvoir sortir l’argent.

Ensuite, on ne sait pas à l’avance ce qu’on va avoir dans son panier… Mais une chose est sûre, ce sont des produits bios et ce sont des produits de saison (ce qui permet au passage d’apprécier à nouveau le rythme des saisons : non, on ne mange pas de haricots verts en hiver !).

Enfin, il n’y a presque pas de pause dans les distributions. Les agriculteurs prennent rarement de vacances et donc il faut être là toutes les semaines pour la distribution car on n’est pas remboursé d’un panier que l’on n’a pas pu venir chercher. Une solution consiste à proposer son panier à quelqu’un d’autre quand on n’est pas là… on peut donc faire passer un mot à l’AMAP la semaine précédente pour savoir si quelqu’un est intéressé pour le racheter, mais c’est quand même quelque chose à prévoir. Avec mon amie, on préfère offrir le panier à nos voisins, pour leur faire découvrir le concept et peut être les compter prochainement comme de nouveaux adhérents 🙂

Car, si la voie est libre, la route est encore longue…

Notes

[1] Trois sites qui recensent les Groupes d’Utilisateurs de GNU/Linux en France : l’annuaire de l’AFUL, l’InterLUG, et l’initiative TrouveTonGUL.

[2] Crédit photo : Mzelle Biscotte (Creative Commons By-Sa)

[3] Il y a souvent deux saisons de production : « printemps/été » et « automne/hiver ».

[4] Voici un lien vers le blog de l’association « Le Sens de l’Humus » qui expérimente différentes méthodes d’agriculture biologique autour des murs à pêche de Montreuil. Vous y trouverez plusieurs billets présentant ces « légumes méconnus ».

[5] Tomates rose de Berne

[6] En majorité des filles, et pas forcément en couple 😉

[7] Note de Siltaar : et cette anecdote authentique n’est pas de mon fait !




Geektionnerd : La poule aux oeufs d’Oracle

La société Oracle est dans l’œil d’un cyclone actuellement. Et les craintes liées au rachat de Sun l’année dernière ne cessent de se confirmer.

C’est en effet Sun qui développait la solution libre OpenSolaris (cf cette news ZDNet) et qui possédait les brevets Java dont il est question ci-dessous (cf cette news LinuxFr).

On se demande dès lors à quelle sauce la suite bureautique libre OpenOffice.org, elle aussi chapeautée par Sun, va être mangée !

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Les jeunes ne jurent que par Apple (et se foutent du logiciel libre ?)

Multitrack - CC byIndépendamment de la question financière, que choisirait actuellement un jeune bachelier si il avait le choix de s’équiper en matériel high tech ?

Ce n’est qu’une impression mais il semblerait bien que tous ou presque souhaitent désormais posséder du Apple : MacBook, iPod, iPhone, iPad…

Deux liens qui corroborent cette impression.

Le premier lien est économique. Un cabinet financier américain vient tout juste de dégrader la notation de Microsoft estimant que l’éditeur ne parvenait pas à séduire les jeunes générations (source ZDNet). Ainsi 70% des étudiants entrant à l’université possèderaient un Mac[1].

Cela fait beaucoup quand même ! Mais justement le second lien est académique. Le département Information Technology and Communication de l’Université de Virginie nous propose d’intéressantes statistiques sur l’équipement informatique de ses étudiants de première année.

On peut y constater de notables évolutions de 1997 à nos jours. Comme on s’y attendait les étudiants tendent à être tous équipés, et au profit aujourd’hui presque exclusif de l’ordinateur portable. Mais pour quel OS ? Et là effectivement la comparaison est édifiante. Les courbes de Windows et de Mac suivent des chemins diamétralement opposés. En 2004, nous avions 89% pour Windows et 8% pour le Mac. En 2009 c’est 56% de Windows et 43% de Mac. On est encore loin des 70% évoqués plus haut, mais au train où vont les choses, c’est apparemment pour bientôt.

Pourquoi avoir choisi l’année 2004 comme repère ? Parce qu’ils étaient alors 77 étudiants à avoir un autre OS que Windows ou Mac (autrement dit un OS libre). Or ils ne sont plus que 8 en 2010, soit 0,3% !

D’où cette double question que je soumets à votre sagacité : Est-ce que selon vous Apple fascine réellement toute la jeunesse ? Et si oui cela a-t-il, dès aujourd’hui et pire encore demain, des conséquences sur le logiciel libre ?

À parcourir ces trois récents articles du Framablog : Pourquoi je n’achèterai pas un iPad, La fin du Web ouvert – Apple ou la banlieue riche du Web et Combien de futurs hackers Apple est-il en train de tuer ?, je crains déjà votre réponse. Et me demande dans la foulée si cela ne met pas une nouvelle fois en exergue la faillite absolue en amont de l’école (et des parents) quant à la sensibilisation au logiciel libre et sa culture.

Notes

[1] Crédit photo : Multitrack (Creative Commons By)




La vie n’est pas en lecture seule

Ciprian Ionescu - CC byUn fichier informatique est dit « en lecture seule » lorsque vous n’avez que le droit de l’exécuter et donc de le lire. Alors qu’un ficher disponible « en lecture/écriture » vous offre en plus la possibilité de le modifier.

Vous n’en ferez peut-être rien mais cette liberté supplémentaire change la donne puisque vous n’êtes plus condamné à être passif. Si un jour il vous prend l’envie d’ajouter du code à un logiciel libre ou de compléter un article de Wikipédia, vous pouvez le faire.

Par extrapolation, nous ne voulons pas d’une vie qui nous serait proposée par d’autres uniquement en lecture seule. Nous souhaitons pouvoir agir sur elle et y participer. « L’imprimerie a permis au peuple de lire, Internet va lui permettre d’écrire », nous dit ainsi Benjamin Bayart.

Techniquement parlant, tout est en place pour que cela ait bien lieu et les nouvelles pratiques de la jeune génération témoignent tous les jours de cette aspiration[1].

Et pourtant, il semblerait que certains ne souhaitent pas nous voir profiter pleinement de ce progrès. Et d’ériger alors toujours plus de barrières et de péages artificiels.

Comme nous le signale son auteur en fin d’article, ce petit texte rédigé dans le train en 2006 « a pour simple but de vous faire réflechir aux politiques des grands groupes des médias et/ou de votre gouvernement ». De nombreux bits ont beau avoir coulé sous les ponts d’Internet depuis, il garde toute son acuité. Jusqu’à y voir parfois modestement une sorte de manifeste de la jeunesse du début de ce nouveau siècle.

La vie n’est pas en lecture seule

Life is not read-only

Olivier Cleynen – 2006 – Licence Creative Commons By
(Traduction Framalang : Olivier, Pablo, Djidane et Siltaar)

Pour eux, c’est de la piraterie. Carrément du vol, voilà ce qu’est le téléchargement. Vous prenez quelque chose qui a un prix, sans le payer. Volez-vous à l’étalage ou cambriolez-vous des maisons ? Pourquoi alors télécharger gratuitement ?

Créer du contenu est très difficile : rien que pour remasteriser, créer l’emballage et faire de la publicité pour la dernière compilation, il faut aligner trois millions de dollars. Comment les artistes peuvent-ils s’en sortir ? Comment la vraie culture peut-elle encore survivre ?

En fait. Peut-être que vous n’avez pas vraiment dépossédé quelqu’un de quelque chose. Peut-être ne vous êtes-vous pas vraiment servi dans un rayon. Peut-être que vous n’auriez de toute façon pas dépensé un centime pour ce truc « protégé contre la copie ».

Et tous ces trucs ont la peau dure. De la musique que vous n’avez pas le droit de copier, des films que vous n’avez pas le droit d’enregistrer, des fichiers protégés par des restrictions et des bibliothèques musicales qui disparaissent lorsque vous changez de baladeur… Certaines entreprises produisent même des téléphones et des ordinateurs sur lesquels elles restent maîtresses des programmes que vous pouvez installer.
Les choses empirent lorsque la loi est modifiée pour soutenir ces pratiques : dans de nombreux pays il est devenu illégal de contourner ces restrictions.

Qu’attendez-vous de la vie ? Quelles sont les choses qui comptent vraiment ? Lorsque vous faites le bilan de votre année, qu’en retenez-vous ? Les bons moments passés entre amis ou en famille ? La découverte d’un album génial ? Exprimer votre amour, ou votre révolte ? Apprendre de nouvelles choses ? Avoir une super idée ? Un e-mail de la part de quelqu’un qui compte pour vous ?

Et des choses passent au second plan : un grand nombre de pixels, le tout dernier iPod… déjà dépassé, un abonnement « premium », une augmentation vite dépensée, profiter de sa toute nouvelle télévision HD… Tout le monde apprécie ces trucs, mais si on y réfléchit un peu, c’est pas si important.

Vous ne deviendrez certainement pas un astronaute exceptionnel. Vous ne traverserez pas l’Atlantique à la nage. Vous ne serez pas leader international. La vie c’est maintenant. Et c’est quand on partage ses idées, ses pensées et sentiments.

La vie n’est pas en lecture seule. Elle est faite de petites choses qui ne peuvent être vendues avec des verrous. Si l’on ne peut plus choisir, essayer, goûter, assister, penser, découvrir, faire découvrir, exprimer, partager, débattre, ça ne vaut pas grand chose. La vie devrait être accessible en lecture et en écriture.

Peut-être que le droit d’auteur n’est pas aussi légitime que certains voudraient nous faire croire. En fait, le discours de Martin Luther King « I have a Dream © » est toujours protégé par le droit d’auteur. Vous ne pouvez pas chanter la chanson « Joyeux anniversaire © » dans un film sans payer de droits. L’expression « Liberté d’expression™ » est une marque déposée.

Le partage de fichiers est criminalisé. Certains sont jugés et emprisonnés pour avoir développé des technologies qui permettent d’échanger des fichiers (la loi réprime le fait « d’éditer, de mettre à la disposition du public ou de communiquer au public, sciemment et sous quelque forme que ce soit, un logiciel manifestement destiné à la mise à disposition du public des copies non-autorisées d’œuvres ou objets protégés »).
Mais qu’en est-il de ceux qui ont inventé et vendu les magnétoscopes, les photocopieurs, les lecteurs de cassette munis d’un bouton d’enregistrement ? Et d’ailleurs, où sont les personnes qui ont inventé les baladeurs numériques ?

Vous avez dit deux poids, deux mesures ? Des milliers de personnes gagnent leur vie en poussant nos enfants à fumer ou en développant l’export de mines anti-personnelles. Et à coté de ça, le partage de fichier, ces mêmes fichiers que l’on peut voir sur YouTube, est puni par une amende compensatoire pouvant atteindre 150 000 dollars par fichier.

Et on dit que l’industrie de la musique est en danger.
Qui veut d’une industrie musicale ? Et plus particulièrement telle qu’elle existe ? Laissons l’industrie, aux boîtes de conserve et aux voitures.

La culture ne se meurt pas dès que vous téléchargez un fichier. La créativité n’est pas diminuée lorsque vous découvrez quelque chose. C’est toute la société qui en profite lorsqu’on peut apprendre et s’exprimer.

Participez. Appréciez. Découvrez. Exprimez. Partagez.

Donc. Une société équilibrée où les artistes peuvent gagner leur vie et où le partage de fichiers n’est pas criminalisé est possible. Voici quelques suggestions :

Musique

  • Allez voir les artistes en concerts (sauf s’ils vendent leurs places 200€)
  • Que pensent et font vos artistes favoris ? Renseignez-vous, vous découvrirez peut-être quelque chose
  • Achetez intelligemment votre musique
  • Si l’artiste est mort maintenant, gardez votre argent pour le dépenser autrement
  • Ne vous contentez pas d’écouter, chantez !
  • Ne racheter pas la musique que vous possédez déjà en CD ou vinyl.

Participez

Films

  • Fréquentez les petites salles (qui se soucient surement plus de l’artiste que de l’industrie)
  • Fuyez les MTP (DRM) et les lecteurs « labellisés »
  • Partagez les bons films avec vos amis, ceux qui sont pour vous immanquables.

Logiciel

Tous les jours

LifesNotReadOnly.net a pour simple but de vous faire réflechir aux politiques des grands groupes des médias et/ou de votre gouvernement. Ça n’est qu’un petit manifeste rédigé dans le train en 2006. Olivier Cleynen en est l’auteur. Vous êtes libre de répliquer le contenu de ce site Web, même pour des applications commerciales, sous les termes de la license CC-by.

Notes

[1] Crédit photo : Ciprian Ionescu (Creative Commons By)