Formation Emancip’Asso : donner les clés aux hébergeurs de services éthiques pour accompagner les assos

Première étape du projet Emancip’Asso, la formation « Développer une offre de services pour accompagner les associations dans leur transition numérique éthique » se déroulera à Paris du 16 au 20 janvier 2023. Les inscriptions sont désormais possibles !

logo Emancip'Asso

Emancip’Asso, kesako ?

Déjà évoqué dans l’article Ce que Framasoft pourrait faire en 2022 grâce à vos dons en décembre 2021, le projet Emancip’Asso a pour principal objectif de favoriser l’émancipation numérique du monde associatif.

Pour atteindre cet objectif, le projet que nous coordonnons avec nos partenaires et ami⋅es d’Animafac s’est doté d’un comité de pilotage constitué d’acteurs impliqués dans le secteur de l’éducation populaire, de l’associatif et du numérique.

Ensemble, nous avons établi que pour atteindre son objectif, le projet devait se répartir en 4 actions :

  • une formation pour les hébergeurs de services alternatifs
  • un site web emancipasso.org qui permettra aux associations d’identifier des hébergeurs proposant des offres d’accompagnement des associations
  • un nouveau module pour le MOOC CHATONS (adaptation numérique de la formation) afin que de nombreux hébergeurs fassent émerger des offres
  • une campagne de communication de grande ampleur pour inciter les associations à prendre conscience de l’incohérence qu’il y a à vouloir changer le monde en utilisant les outils du capitalisme.

les 4 étapes du projet Emancip'Asso
Les 4 étapes du projet Emancip’Asso

 

Grâce à vos dons sur soutenir.emancipasso.org et aux financements de deux fondations (la Fondation pour le Progrès de l’Homme et la Fondation Crédit Coopératif), nous avons pu travailler cette année à la mise en œuvre de la première étape de ce projet.

Une formation pour les hébergeurs de services alternatifs

Constatant que les hébergeurs éthiques sont peu nombreux à proposer des solutions prenant en compte les besoins des associations, et notamment l’accompagnement nécessaire pour mener à bien une démarche de transition vers des outils numériques libres, le projet Emancip’Asso souhaite accompagner la montée en compétence des hébergeurs de services alternatifs en leur proposant une formation.

Destinée en priorité aux hébergeurs alternatifs membres du Collectif des Hébergeurs Alternatifs Transparents Ouverts Neutres et Solidaires (CHATONS), cette formation intitulée « Développer une offre de services pour accompagner les associations dans leur transition numérique éthique » se déroulera à Paris du 16 au 20 janvier 2023. Son objectif principal est de permettre à ces hébergeurs d’acquérir les compétences nécessaires pour ensuite proposer des offres appropriées au milieu associatif.

Demandez le programme !

Élaborée par les membres du comité de pilotage, cette formation sera animée par des professionnel·les de la formation et intégrera de nombreux retours d’expériences et mises en pratique.

programme de la formation

Lundi 16 janvier 2023

La formation débutera à 13h30, pour permettre aux participant⋅es de rejoindre facilement le lieu de formation pendant la matinée. La première heure sera dédiée à l’installation et à la présentation des participant⋅es.

A partir de 14h30, Yannick Blanc (La Fonda) interviendra pour apporter des éléments de compréhension du monde associatif. A travers une présentation de l’écosystème associatif, nous pourrons mieux appréhender la diversité du monde associatif, ce qui définit une association, quels sont ses modes de fonctionnement, ses modèles économiques, ses types de gouvernance et ses modalités de financement.

L’objectif de cette première séquence est d’apporter aux participant⋅es une meilleure connaissance des organisations auxquelles iels vont s’adresser.

Mardi 17 janvier 2023

Après un petit temps collectif de retours sur les apprentissages de la journée précédente (de 9h à 9h30), Anne-Laure Michel (Animafac) et David Ratineau (Le Mouvement Associatif) viendront, au nom du dispositif PANA (Points d’appui au numérique associatif) nous présenter un panorama des usages numériques des associations.

S’appuyant sur les études sur le numérique et les associations réalisées par les équipes de Recherche & Solidarité et Solidatech, ce panorama permettra de mieux saisir la position des associations par rapport au numérique et leur réalité budgétaire. Ce sera l’occasion de mieux comprendre pourquoi elles rencontrent souvent des difficultés à adopter des outils libres et de se questionner sur comment dépasser ces freins à l’adoption. Cette réflexion sera alimentée par plusieurs retours de démarches de transition numérique qui ont abouti ou n’ont pas abouti (et pourquoi). La fin de la matinée sera dédiée à des échanges sur les différentes manières de soutenir une structure associative engagée dans une démarche de transition numérique à trouver les financements pour se faire accompagner.

Après une pause déjeuner bien méritée, Gaëlle Payet et Elsa Da Silva (Le Mouvement Associatif Centre-Val de Loire) nous expliqueront comment instaurer un dialogue stratégique avec une association. Comment faire comprendre que la question est politique et qu’elle doit donc être discutée dans les instances ad hoc ? Comment faire comprendre que la démarche doit être co-construite avec l’ensemble des utilisateur⋅ices ?

Nous découvrirons alors, via une méthodologie pratique, quelles sont les pistes pour mettre en capacité les associations, quelles sont les étapes nécessaires à la mise en place d’une stratégie libre réussie, quelles sont les principales clés qui fluidifient la démarche et quelles sont les erreurs à éviter. Nous parlerons aussi de démarche partenariale et d’accompagnement au changement.

Mercredi 18 janvier 2023

Après un petit temps collectif de retours sur les apprentissages de la journée précédente (de 9h à 9h30), nous passerons toute la journée avec Stéphanie Lucien-Brun (La Fabrique à liens) sur comment réaliser le diagnostic numérique d’une association.

Nous découvrirons ce qu’est un diagnostic numérique, ses étapes, et les différentes méthodes de diagnostic existantes (auto-diagnostic, entretiens dirigés, design thinking, etc.) en analysant plusieurs diagnostics. Nous réaliserons des mises en situation en groupes afin de mettre en œuvre les connaissances acquises et mieux comprendre ce qui se joue dans cette étape essentielle du processus d’accompagnement.

Nous verrons ensuite comment on passe d’un diagnostic à des préconisations et sous quelles formes celles-ci peuvent être communiquées. Un moment sera dédié à la co-production d’un cahier des charges type. La journée se terminera par un temps spécifique pour construire une réflexion commune sur la posture de l’accompagnant.

Jeudi 19 janvier 2023

Après un petit temps collectif de retours sur les apprentissages de la journée précédente (de 9h à 9h30), Pascal Gascoin (Zourit.net) nous parlera formation des utilisateur⋅ices et support / assistance. On le sait, la formation initiale et continue est un élément clé pour une adoption facilitée des outils. Nous découvrirons donc que se doter de techniques pédagogiques (vulgarisation scientifique et médiation numérique) est nécessaire pour accompagner dans la durée.

Un focus sera proposé sur la co-construction de ressources (documentation, FAQ) permettant d’établir une base de référence à disposition des utilisateur⋅ices et limiter le recours à la fonction support. Et nous terminerons la matinée sur la notion de communautés d’utilisateur⋅ices : comment la mettre en place ? quels outils utiliser pour cela ? comment animer ces espaces d’échanges ?

Après une pause déjeuner pour mieux recharger les batteries, Jean-Christophe Becquet (Apitux) nous expliquera comment designer une offre de service. Il définira ce qu’est une offre de service claire (au sens de facile à comprendre), cadrée (ce que l’on propose et ce qu’on ne propose pas) et complète (intégrant l’accompagnement, la maintenance et le support) à destination des associations. Nous découvrirons comment construire les conditions de confiance nécessaires (pérennité de service, place du financement des services, clarté sur les modalités de rupture) à un échange sain avec les associations.

À travers la découverte de plusieurs techniques de design d’offre de services, nous traiterons la question de comment fixer un tarif juste dans un contexte concurrentiel. La fin de la journée sera dédiée à la découverte de techniques de marketing et de communication pour rendre lisible et visible une offre auprès des clients associatifs potentiels. Nous travaillerons au packaging d’offres spécifiques (à destination de grosses associations, pour celles dont les membres sont à distance, etc.), à comment les adapter et les décliner.

Vendredi 20 janvier 2023

Après un petit temps collectif de retours sur les apprentissages de la journée précédente (de 9h à 9h30), nous terminerons cette semaine de formation avec Laurent Marseault (co-fondateur d’Outils-Réseaux et d’Animacoop) qui nous expliquera pendant 2 heures comment développer son réseau et penser le travail en complémentarité.

Comment développer son réseau en tant qu’hébergeur ? Comment ne pas rester, forcément, en solo ? Comment développer des partenariats entre hébergeurs pour mettre en commun des compétences ? Comment identifier et travailler avec des partenaires spécialisés dans l’accompagnement associatif et/ou dans la formation ? Comment proposer des offres communes ? Après avoir réfléchi à ces questions, nous aborderons la question des modèles économiques des réseaux et spécifiquement la question de l’économie non-marchande. Et nous conclurons sur la distinction entre l’Économie Cynique et Suicidaire et l’Économie Sociale et Solidaire.

La fin de la matinée sera dédiée à la réalisation d’un bilan collectif à chaud. Nous nous interrogerons sur le format de la formation et l’articulation entre les différentes séquences pour imaginer une version encore plus pertinente de la formation. Nous questionnerons les participant⋅es sur leur capacité / envie / besoin de mettre en œuvre les connaissances acquises et nous identifierons les freins pressentis à cette mise en œuvre.

Modalités d’inscription

Cette formation s’adresse à toutes les personnes actives au sein d’une structure (association, micro-entreprise / entreprise ou coopérative) proposant l’hébergement de services en ligne alternatifs. La formation est gratuite, mais les frais de déplacement (transport + hébergement + restauration) sont à la charge des participant⋅es.

Si le programme de cette formation vous intéresse, nous vous invitons à vous inscrire en complétant ce formulaire d’inscription. En vous inscrivant à cette formation, vous vous engagez à en suivre l’intégralité : il n’est pas possible de participer uniquement à certaines séquences. Cette formation étant limitée à 20 participant⋅es, nous serons sûrement amenés à devoir sélectionner parmi vos candidatures. C’est la raison pour laquelle, nous vous incitons à bien expliciter les raisons qui vous poussent à vous y inscrire.

capture d'écran du formulaire d'inscription
Première partie du formulaire d’inscription

Nous rappelons aussi que les membres du Collectif des Hébergeurs Alternatifs Transparents Ouverts Neutres et Solidaires (CHATONS) seront prioritaires. Cependant, si votre organisation n’est pas encore membre du collectif, nous vous recommandons de tout de même compléter le formulaire.

Et si vous n’êtes pas sélectionné pour cette session de formation, vous aurez toujours la possibilité de découvrir en détail les contenus qui y seront traités puisque nous publierons dans l’année un MOOC qui en sera la transposition. Et qui sait, si cette formation est un succès, peut-être pourrons-nous trouver de nouveaux financements pour organiser une seconde session ?




Retour sur le Contribatelier « Accessibilité numérique » organisé lors de la Journée Mondiale des Mobilités et de l’Accessibilité

Le 30 avril 2022, à l’occasion de la Journée Mondiale des Mobilités et de l’Accessibilité, deux structures membres du collectif CHATONS, Alsace Réseau Neutre et Le Cloud Girofle, ainsi que le hackerspace associatif strasbourgeois Hackstub, se sont mobilisées pour organiser simultanément un Contribatelier sur l’Accessibilité numérique à Strasbourg et Villebon-sur-Yvette (91). Nous leur laissons le clavier pour nous partager un compte-rendu de cette action et des pistes envisagées pour la suite.

logo contribateliers accessibilité numérique

À cette occasion, une douzaine de tests ont été menés sur des logiciels libres, dont la plupart sont proposés comme services en ligne par des membres du collectif CHATONS. Les audits consistaient en des tests d’usage réalisés par binômes, composés d’une personne malvoyante en charge du test et d’une personne voyante en charge de sa captation. L’objectif de ces tests utilisateurices fut double : permettre aux personnes qui créent ou hébergent ces solutions de prendre conscience des problèmes et des solutions possibles, et identifier les éventuels services accessibles sur https://entraide.chatons.org et https://chatons.org.

Cet article est l’occasion de détailler comment les tests se sont passés et de mettre en avant les principaux soucis et perspectives liés à l’accessibilité des services libres, dans l’optique de structurer un groupe parlant d’accessibilité au sein du collectif.

Comptes-rendus des sessions

CR du contribatelier animé par ARN et Hackstub à la médiathèque Neudorf de Strasbourg

Avec :

  • Irina (organisatrice et participante), utilisatrice expérimentée d’outils libres et contributrice, membre d’Alsace Réseau Neutre, atteinte de déficience visuelle
  • Gabriel (participant), président de C’Cité (Fédération des Aveugles Alsace Lorraine Grand Est), à l’aise avec le numérique au quotidien, atteint de déficience visuelle proche du stade aveugle
  • Sylvain (participant), ingénieur logiciel
  • Valentin (organisateur et participant), ingénieur libriste militant, gérant de ReflexLibre, membre d’Alsace Réseau Neutre et contributeur de YunoHost
  • Marjorie (organisatrice et participante), graphiste, artiste et programmeuse libriste, membre d’Hackstub et du collectif cyberféministe Hacqueen

Avec le soutien également d’Éric et Thomas qui sont passés nous voir. Éric est graphiste et programmeur libriste, membre d’ARN, et Thomas est un usager régulier du hackerspace Hackstub qui s’intéresse à l’informatique, au Libre, et à leurs enjeux.

14 tests ont été effectués sur 13 logiciels en deux demi-journées. Nous avons été surprises et surpris du nombre de tests qui ont pu être conduits en si peu de temps, avec très peu de personnes testeuses. Parmi les possibilités de tests, nous n’avons pas sélectionné les outils collaboratifs car nous redoutions une faible accessibilité de ces outils : écrire dans un document collaboratif en ligne prive généralement la personne déficiente visuelle des raccourcis de son outil d’assistance. Les résultats sont mitigés : sur 14 tests, 8 se sont soldés par un succès et 6 ont posé problème (deux réussites partielles et 4 échecs). Les services qui ont posé le plus de problèmes sont les outils de sondage. Certains des tests partiellement réussis ont nécessité une assistance, due à des défauts d’accessibilité non liés à l’outil testé. Exemple : lors du test de Mumble, un logiciel d’audioconférence libre, l’activation du micro a été ardue. Il y avait donc des problèmes liés davantage aux fonctionnalités du navigateur ou à d’autres paramètres (configuration des outils d’assistance ou des interfaces).

Un autre constat intéressant à faire est que les tests ont été effectués avec un système d’exploitation et un navigateur propriétaire (OS Windows + navigateur Edge ou Chrome). L’outil d’assistance était quant à lui libre (NVDA). On peut s’interroger sur le rapport entre le taux de réussite et l’utilisation d’outils qui ne sont pas libres : y a-t-il plus de moyens injectés pour l’accessibilité dans les outils propriétaires ?

Pour ce qui est de l’ambiance, nous avons apprécié l’accueil de la médiathèque Neudorf avec laquelle il a été facile de travailler dans une dynamique de coopération. Gabriel nous a également fait part de son enthousiasme quant à la convivialité de l’événement, malgré le peu de participation. Ce faible taux de participation, tant du côté des personnes malvoyantes que des personnes développeuses, nous a questionné sur les liens que nous entretenons avec les associations et publics déficients visuels, et nous a démontré qu’il y avait un vrai travail de sensibilisation à mener auprès de la communauté libriste. Il a toutefois permis un cadre assez intimiste, favorisant l’attention portée aux personnes participantes.

CR du contribatelier animé par Le cloud de Girofle à Villebon-sur-Yvette (91)

Avec :

  • Nicolas (participant), informaticien de métier atteint d’une déficience visuelle dégénérescente
  • Agathe (participante), libriste expérimentée et vidéaste à ses heures perdues
  • Maxime (organisateur et participant), membre du Cloud Girofle, libriste militant
  • Margaux (organisatrice et participante), membre du Cloud Girofle

Nous nous sommes retrouvés à 4 à la MJC Bobby Lapointe de Villebon-sur-Yvette (91), gentiment mise à disposition par Charles, également membre du Cloud Girofle. Avec l’aide d’Agathe, libriste et vidéaste à ses heures perdues, nous avons accueilli Nicolas, « informaticien d’avant Windows ! » atteint d’une déficience visuelle dégénérescente. Son ordinateur tourne sous Debian et le passage à la ligne de commande a été plus aisé pour lui quand sa vue a commencé à se détériorer. Il utilise encore des outils visuels, des fonctionnalités intégrées au gestionnaire de fenêtres Compiz comme le zoom et l’inversion de contraste. Mais il utilise de plus en plus les outils vocaux, qui représentent environ 80 % de son usage : le lecteur d’écran libre Orca et la synthèse vocale propriétaire Baratinoo, en attendant de trouver une synthèse vocale libre, en français, de qualité suffisante. Par ailleurs, Nicolas utilise EMACS, un éditeur de texte libre navigable intégralement au clavier développé par Richard Stallman, qui dispose de son propre lecteur d’écran (dans ces cas-là, il coupe Orca, qui est le lecteur d’écran pour systèmes GNU Linux). Il l’utilise beaucoup parce que c’est très adapté à son usage, mais ce n’est malheureusement pas toujours possible : en effet, le navigateur EWW intégré dans cet outil n’interprète pas le Javascript, un langage qui est aujourd’hui massivement présent sur le web !

Le cadre intimiste nous a permis d’échanger de manière très qualitative, et nous nous sommes concentrés sur Nicolas toute l’après-midi. Il nous aura fallu vivre cet atelier pour prendre conscience de la difficulté (pour être honnête, de la quasi-impossibilité) d’utiliser beaucoup de services libres en ligne quand on est déficient⋅e visuel⋅le (malvoyant⋅e, non-voyant⋅e).

Une dizaine de tests filmés ont été effectués par Nicolas, sans assistance extérieure, sur des services proposés par le Cloud Girofle : créer un compte sur Nextcloud, accéder à un espace de discussion Mattermost, lire un document OnlyOffice partagé par email, etc. Un protocole de test et des scénarios de tests avaient été préparé en amont et étaient mis à disposition. Les captations rendent compte de ce qui se passe sur l’écran et de la synthèse vocale.

Navigation sur Nextcloud lors du Contribatelier
Navigation sur Nextcloud lors du Contribatelier : l’utilisateur doit utiliser un niveau de zoom très élevé, en plus d’une synthèse vocale (enregistrée par l’enregistreur visible à droite).

Conclusion : c’est pas glorieux

Alors, les logiciels des CHATONS, c’est accessible comment ? Pour nous, les résultats sont édifiants (et décevants). La quasi-totalité des missions a échoué du côté de Villebon-sur-Yvette et le taux de réussite à Strasbourg ne dépasse pas 50%. Les tests qui ont rencontré le plus de succès ont été menés avec du matériel et des outils propriétaires (à l’exception du logiciel d’assistance), et il s’agissait aussi des manœuvres les plus simples.

Quelques exemples :

  • un test consistant à se créer un compte Nextcloud en recevant une invitation par email a pris une demi-heure (et nous parlons d’un test réalisé par un informaticien) !
  • un autre test sur le service Framadate (outil de planification de date) ne propose pas « oui/non/peut-être » comme réponses, mais « chaussure de ski » et « drapeau dans un trou » !
  • toujours sur Framadate, un autre testeur nous indique que la seule manière qu’il a trouvé de l’utiliser est de copier-coller les options dans un tableur, de le remplir, puis de reporter les options dans le tableau en ligne. Une gageure !

Et lors d’un test pour éditer un document en ligne (OnlyOffice) partagé avec Nextcloud, on se rend compte que le bouton pour ouvrir le document n’est pas accessible à la navigation au clavier, que même si on pose le curseur dessus, les options pour l’ouvrir ne sont pas lues par la synthèse vocale et que même si le document est ouvert, la synthèse vocale ne lit pas le document. On découvre ainsi que, même s’il y a un plugin de synthèse vocale installé dans OnlyOffice, le menu pour y accéder n’est pas accessible et que même si on clique sur ce bouton, la synthèse vocale ne fonctionne pas.

À chaque fois, la tentation d’abandonner est forte : impossible de savoir si la fonction qu’on essaye d’utiliser va réussir, ou si l’on va échouer pour une raison parfois bête (un bouton sans label, un message d’erreur qui s’affiche mais qui n’est pas lu). Assister en direct aux difficultés rencontrées par une personne malvoyante sur un ordinateur est une expérience édifiante. Nous pensons que tout le monde devrait la faire au moins une fois, pour se rendre compte des enjeux associés à l’accessibilité numérique.

écran présentant un zoom sur un client mail lors du Contribatelier
Lecture d’un mail lors du Contribatelier : l’utilisateur doit utiliser un niveau de zoom très élevé, en plus d’une synthèse vocale (enregistrée par l’enregistreur visible à droite).

Bilan et perspectives

Le contribatelier, un outil de sensibilisation à l’accessibilité

Participer à ce contribatelier a été très éclairant à la fois sur l’urgence de la situation des personnes déficientes visuelles (beaucoup de services restent bloquants, et pour certains sur des points assez élémentaires), et sur ce qu’implique concrètement la manipulation d’outils d’assistance tels que les lecteurs d’écran. On se sent plus outillé et plus armé pour défendre ce grand sujet. C’est un format idéal pour provoquer une prise de conscience auprès de personnes non initiées, qui a le double avantage de sensibiliser tout en étant dans le “faire” (en l’occurrence, contribuer au libre). Les expériences ont globalement été appréciées de toustes les participantes. Que ce soit du point de vue de l’accueil ou du travail réalisé, ces séances ont offert un cadre convivial, surtout en petits groupes.

Le point sur les difficultés rencontrées

Nous nous sommes interrogés sur le degré d’intervention des personnes qui ne sont pas en situation de handicap lors d’un blocage pendant un test. Nous avons conclu de cet échange qu’il valait mieux laisser du temps pour dénouer la situation avant d’intervenir, afin de véritablement éprouver l’accessibilité de l’outil, mais que si on se retrouvait face à une impasse, il fallait accompagner la résolution du problème rencontré.

Si la personne déficiente visuelle ne prend pas aisément le service en main, il y a différents types d’échec :

  • celui où elle devra d’abord explorer l’interface pour la comprendre et consulter la documentation ;
  • celui où des astuces/manipulations lui sont indiquées par une autre personne ;
  • celui où elle ne pourra jamais accéder au service par ses propres moyens.

Côté développement, on peut aussi distinguer différents cas :

  • celui où il suffirait de corriger quelques détails ;
  • celui où les modifications sont complexes mais le service partiellement utilisable ;
  • celui où il faudrait quasiment tout revoir.

On découvre ainsi plusieurs catégories de problèmes :

  • des problèmes de conception : pages web trop complexes (comment s’y retrouver quand des centaines d’informations non hiérarchisées – il n’y a pas de couleurs en synthèse vocale – sont lues ?), notifications non accessibles ou synthèse vocale indisponible dans certains environnements (canevas notamment) ;
  • des erreurs d’implémentation : boutons sans label, titres des vidéos qui ne sont pas indiqués, parties du logiciel non navigables au clavier ;
  • des problèmes de version : avec la course aux fonctionnalités, les navigateurs web un peu anciens sont de moins en moins supportés. Or ce sont souvent ces navigateurs qui équipent les systèmes adaptés aux non-voyant⋅es. Choisir de ne pas les prendre en compte, c’est se priver de certain⋅es utilisateurices qui utilisent des systèmes spécifiques, pour lesquels les mises à jour sont parfois compliquées.

De manière générale, bien qu’une bonne moitié des interfaces graphiques des logiciels « en dur » sont inutilisables ou difficilement utilisables, elles restent mieux gérées par la synthèse vocale que dans les applications web, qui sont d’expérience peu accessibles. Les standards d’accessibilité sont peu respectés et la conception de pages complexes rend la lecture des pages plus difficile encore.

Par ailleurs, alors qu’aujourd’hui la majorité des personnes utilisent un très petit nombre de navigateurs web (Firefox, Chrome et Safari, qui se partagent la majorité du marché et concentrent toute l’attention des personnes développeuses), les personnes déficientes visuelles utilisent parfois d’autres navigateurs (Edge, Lynx, etc.), en plus de matériels d’assistance variés. Suivant les profils, on peut trouver des plages ou afficheurs braille, de la vocalisation, des outils visuels (zoom, couleurs, contraste), etc. Certains logiciels d’assistance définissent leurs propres raccourcis clavier, qui peuvent entrer en conflit avec les raccourcis natifs du système ou ceux d’autres programmes. L’interopérabilité de tous ces équipements n’est donc pas triviale.

personne utilisant une plage braille
Un lecteur braille – Photo by Sigmund on Unsplash

 

Il y a également un autre paradoxe : la plupart des logiciels libres populaires dédient une partie de leur documentation à l’accessibilité, chacun expliquant comment les logiciels sont accessibles. Nous reconnaissons les efforts faits pour améliorer la situation, pourtant, en regardant les cas de OnlyOffice et de Mattermost, nous regrettons :

  • que ces pages ne soient pas plus mises en avant, par exemple au moment de se connecter au logiciel, et pas seulement en faisant une recherche sur le site de l’entreprise qui développe le logiciel ;
  • que les informations fournies dans ces pages soient parfois incomplètes, par exemple en ne précisant pas les limitations induites par le mode lecture ;
  • que ces procédures ne fonctionnent souvent pas ! Mattermost peut se naviguer au clavier, mais sur la version de Firefox utilisée par un de nos testeurs, celle-ci ne fonctionne pas. Autre exemple : le plugin de synthèse vocale d’OnlyOffice ne peut pas être activé facilement, et nécessite une configuration administrateur qui n’est pas faite par défaut.

Une personne dans le groupe strasbourgeois a rencontré des difficultés liées au verrouillage de son système, configuré par une entreprise qui fournit des systèmes adaptés aux personnes déficientes visuelles. Cette dernière n’installe que des versions de logiciels dont l’accessibilité a été évaluée, et parfois légèrement modifiées pour les rendre plus accessibles. L’entreprise dispose donc de son propre dépôt de paquets Debian, et configure les machines de ses clients et clientes pour utiliser ce dépôt en priorité, afin d’éviter qu’iels ne fassent des mises à jour non testées. L’inconvénient de cette méthode “verrouillée” est qu’il est ardu d’accéder aux dernières versions logicielles, faute de mises à jour, qui sont souvent disponibles sur le tard (plusieurs années sont parfois nécessaires). Le principe est pertinent, mais la prudence excessive, ou peut-être le manque de personnel compétent pour le travail d’adaptation, rend l’utilisation d’une machine sous ce système laborieuse. Par ailleurs, ce contrôle à distance du paramétrage peut donner le sentiment d’être dépossédé de sa machine, d’autant plus si la communication sur les changements apportés fait défaut. Il est possible de contourner le verrouillage “à la main”, mais cela demande une certaine aisance en informatique, et lève la garantie d’assistance en cas de soucis. Ainsi, des problèmes sont persistants avec Firefox car la version fournie n’est pas la dernière, ce qui a été bloquant pour mener à bien les tests : la personne est mobilisée pour la résolution du problème plutôt que pour la réalisation des tests. Ça pose la question du processus de développement logiciel : aujourd’hui on fournit des logiciels qui évoluent sans cesse, dont les anciennes versions ne sont pas supportées facilement, voire pas supportées du tout.

Et après ?

Nous souhaitons proposer à nouveaux des contribateliers sur l’accessibilité numérique afin de finir les tests prévus. De plus, nous préparerons d’autres tests à mener, avec comme priorité les services qui répondent à des usages du quotidien (communication, collaboration, sondage, traitement de texte, etc.). Nous envisageons néanmoins des tests sur des outils plus techniques dans un second temps (services proposés par YunoHost par exemple, un système d’exploitation qui facilite l’administration d’un serveur et participe à la démocratisation de l’auto-hébergement).

Par ailleurs, il est intéressant de noter que réaliser plusieurs fois un même test n’est pas futile. Au contraire, cela rend compte des différences rencontrées en fonction des systèmes et configurations, mais aussi selon les handicaps. La diversité des profils est très importante pour les tests. Il faut bien prendre en compte la différence de handicaps et de niveaux de culture numérique.

Nous pensons aussi qu’il serait pertinent de mettre en avant les manipulations qui facilitent la prise en main des outils et logiciels. Il y a parfois des astuces simples, qui s’avèrent très utiles pour contourner les difficultés rencontrées, même s’il est regrettable de devoir presque recourir au hack pour pouvoir utiliser un service.

Beaucoup de documentation à été produite lors de ces ateliers : des vidéos et des notes principalement. Nous entrons désormais dans la phase de restitution de ces tests, nous allons créer et publier des reports de bugs d’accessibilité sur les forges Git des logiciels concernés et les suivre. Deux personnes parmi nous, Irina et Valentin, ont fait deux rapports de bug antérieurement autour de Network Manager et de Mumble. Les protocoles pour soumettre les bugs d’accessibilité peuvent être laborieux, selon leur retour.

Lors de notre débrief, nous nous sommes demandés comment mobiliser davantage sur l’accessibilité numérique, au regard du faible nombre de personnes participantes. Nous aurions en effet souhaité que l’opération se déroule simultanément au sein de multiples structures membres du collectif CHATONS en France, afin de fédérer sur la question, et de lui donner plus de résonance.

Actions envisagées

Nous avons relevé plusieurs type d’action à envisager, en dehors de la reconduite de contribateliers sur le sujet et de la publication de ce communiqué :

  • Faire émerger un groupe “Accessibilité”. Une interstructure Accessibilité a déjà été créée sur la Litière, le wiki des CHATONS. Il serait intéressant de constituer un groupe national de travail, s’étendant à des structures telles que la FFDN, et qui peut-être ne se cantonnerait pas qu’au Libre pour réellement servir l’accessibilité numérique, qui dépend aujourd’hui de beaucoup d’outils propriétaires déployant les moyens.
  • Un atelier sur cette thématique sera proposé lors du camp CHATONS 2022 (18-22 août).
  • Rédiger des rapports de bug à destination des développeur⋅euses de logiciels.
  • Mettre à disposition sur les mails de connexion envoyés par les logiciels un lien vers des page décrivant les raccourcis clavier et options d’accessibilité proposées par le logiciel, ainsi que la liste des fonctions qui sont inopérantes.
  • Mettre plus en évidence l’accessibilité dans les critères pour intégrer le collectif CHATONS.
  • Faire infuser l’accessibilité numérique dans la communauté libriste à travers des ateliers de sensibilisation et d’auto-formation, en organisant des permanences en milieux associatifs rassemblant des publics déficients visuels, en veillant à ce que les formats proposés considèrent l’accessibilité et en parlent, etc.
  • Construire une relation de confiance et créer du lien entre associations de personnes déficientes visuelles et développeuses.
  • Aller chercher des gens plus compétents sur ces questions, et saisir des structures telles que les tiers-lieux numériques, les universités, les milieux étudiants, etc.
  • Compiler et traduire la documentation et les ressources existantes sur l’accessibilité numérique.

Quelques parti-pris non consensuels

L’inaccessibilité numérique renforce la fracture numérique et ne concerne pas que les personnes atteintes d’un handicap visuel mais aussi les personnes éloignées du numérique de manière générale, comme les personnes âgées ou les personnes neurodifférentes. Renforcer l’accessibilité numérique pour les personnes déficientes visuelles renforce aussi l’accessibilité numérique tout court !

L’accessibilité numérique n’est pas un patch, un plugin à ajouter, mais bien une philosophie, une manière de voir les choses qui doit infuser dès la base du développement (on parle d’accessibilité native).

Que choisir : du libre à tout prix, ou l’accessibilité ?

En tant que défenseur⋅euses des logiciels libres, on s’interroge : la liberté numéro zéro, c’est celle d’utiliser le logiciel libre.

Que faire quand une partie de la population se retrouve exclue contre son gré de l’utilisation de logiciels libres ? Voulons-nous des logiciels qui ne libèrent que les développeur⋅euses ou permettent aussi d’autonomiser les utilisateurices ?

Pour aller plus loin :

Résultats des tests d’accessibilité réalisés le 30 avril 2022 par ARN et le Cloud Girofle




Comment migrer son frama.site avant la fermeture du service le 6 juillet prochain ?

Nous avons annoncé pour le mardi 6 juillet 2021 la fermeture du service https://frama.site/. Pour rappel, frama.site héberge à la fois des sites (logiciel PrettyNoemieCMS), des blogs (logiciel Grav) et des wikis (logiciel Dokuwiki). Afin que les utilisateur⋅ices de ce service puissent continuer à héberger leurs sites et wikis, nous avons cherché si d’autres hébergeurs proposaient ce service.

Dès janvier dernier, Bee-Home a été le premier à vous permettre cette migration. Et c’est au tour d’Ouvaton.coop de vous permettre cette migration.

Afin que vous puissiez choisir en toute transparence l’offre qui vous correspond le mieux, on s’est dit qu’il n’y avait rien de mieux à faire que d’interviewer ces structures afin qu’elles vous en disent plus sur qui elles sont, comment elles fonctionnent et qu’elles détaillent leur offre de migration.

Interview de Thomas Bourdon, de Bee-Home

Bonjour Thomas. Peux-tu te présenter ?
Je suis Thomas Bourdon, 38 ans, habitant dans l’Aisne, passionné d’informatique depuis toujours et utilisateur de GNU/Linux (et autres logiciels libres) depuis 2001. Mais ce n’est qu’en 2007 que j’ai réellement compris l’éthique du logiciel libre et du fonctionnement décentralisé (ou acentré) d’Internet. Depuis j’ai commencé à monter mes propres services à la maison (auto-hébergement) pour moi-même puis pour mes proches, et finalement pour des petites structures.

Tu nous parles de Bee-Home ? C’est quoi ? C’est qui ? Comment ça marche ?
Comme j’hébergeais de plus en plus de services pour de plus en plus de monde, il était temps que je quitte ma petite connexion ADSL pour prendre un serveur (puis deux) en datacenter. Comme je ne souhaitais pas payer de ma poche ces serveurs, j’ai décidé de monter l’auto-entreprise Bee Home dans ce but. Ce choix est aussi guidé par le fait que les structures que j’héberge ont besoin d’avoir des factures « officielles » et ne peuvent pas faire de don financier.

La page d’accueil du site web de Bee-Home

Les services que je fournis sont essentiellement du cloud – avec le logiciel Nextcloud (synchronisation de fichiers, agenda, carnet d’adresses, suite bureautique collaborative, discussion par texte ou visio et mail) – et l’hébergement de sites web. Pour cela je propose plusieurs outils que je maintiens (sauvegarde, mise à jour). Ainsi l’utilisateur·ice ne s’occupe que de publier du contenu. Évidemment il ou elle peut récupérer sur simple demande l’intégralité de son site pour l’héberger ailleurs par exemple.

Tous ces services sont payants et permettent aux utilisateur·ices d’avoir leur propre nom de domaine (sauf forfait de base) dont le coût est inclus dans le forfait. Même si je propose des forfaits pré-établis, il est tout à fait possible d’adapter le service et le tarif au besoin de la personne ou structure. Pour cela, il suffit de me contacter.

Bee-Home offre donc la possibilité de migrer son frama.site sous Grav / Dokuwiki. Ça se passe comment ? Ça coûte combien ?
J’ai décidé de proposer ce service gratuitement sans durée limitée sur simple demande. En revanche, j’impose un quota maximum de 500Mo d’espace disque. Au-delà de ce quota, je proposerai un tarif adapté. Chaque site sera accessible via une adresse se terminant par bee.wf (mon-site.bee.wf par exemple). Il est bien sûr possible d’utiliser son propre domaine pour celles et ceux qui en possèdent un.

Documentation sur la façon de migrer son framasite chez Bee-Home

Pourquoi ne pas permettre la migration des framasites réalisés avec le logiciel PrettyNoemieCMS ?
J’expliquais que je propose de maintenir moi-même les outils utilisés (WordPress, Grav, Dotclear, Piwigo…) pour les sites hébergés. C’est pourquoi je ne propose que des outils activement maintenus afin d’éviter l’usage d’outils obsolètes pouvant contenir des failles de sécurité qui ne seront jamais corrigées. PrettyNoemieCMS est justement un outil non maintenu, voilà pourquoi je ne le propose pas. Si un·e utilisateur·ice l’utilise, je peux toutefois proposer un hébergement sous Grav dans les mêmes conditions. Bien sûr il ou elle sera contraint de refaire son site entièrement.

Bee-Home fait partie du collectif CHATONS depuis fin 2018. Pourquoi avoir rejoint le collectif ?
D’une part parce que je partage complètement les valeurs de ce collectif, et d’autre part parce que cela m’a toujours plu de gérer et de proposer de l’hébergement de services.

Interview de l’équipe du directoire de Ouvaton

Bonjour l’équipe du directoire. Pouvez-vous vous présenter ?
Bonjour.
Nous sommes 3 personnes au « directoire » d’Ouvaton, actuellement :
– Claire, présidente, qui fait de l’informatique depuis le début des années 80 et chez Ouvaton depuis le début en 2001
– Matthieu, aussi informaticien et chez Ouvaton depuis 2006
– François, commercial, qui fait lui aussi de l’informatique, et chez Ouvaton depuis 2017

Vous nous parlez de Ouvaton ? C’est quoi ? C’est qui ? Comment ça marche ?
Ouvaton a été créée en 2001, sous la forme d’une société anonyme « coopérative de consommation ». Cela veut dire que nos coopérateurs sont co-propriétaires et co-entrepreneurs de la coopérative. Grâce à cette structure, les utilisateurs sociétaires sont réellement des hébergés-hébergeurs. Donc Ouvaton, c’est plusieurs milliers de personnes qui décident. Et dans les faits, plusieurs dizaines qui ont « les mains dans le cambouis » au quotidien !

La coopérative se base sur un certain nombre de valeurs, que nous donnons sur notre site. Pour résumer à grands traits : indépendance et coopération, démocratie et protection de la vie privée.

Ouvaton fonctionne autour :

  • d’un conseil de surveillance de 9 membres élus pour des mandats de 3 années par l’Assemblée Générale
  • d’un directoire dont les membres sont nommés, pour des mandats renouvelables de 3 ans, par le conseil de surveillance

Page d’accueil du site https://ouvaton.coop/

Nous essayons aussi, dans la mesure des moyens de chacun, d’impliquer au quotidien un maximum de coopérateurs. Aucune obligation, mais une participation de chacun selon ses moyens (et ses envies !). Il y a toujours des chantiers en route dans un collectif comme Ouvaton et chacun peut y trouver sa place. Les Assemblées Générales sont l’occasion de présenter chaque année aux sociétaires l’état de la coopérative et de mettre aux votes les grandes orientations proposées par le conseil de surveillance et le directoire.

Ouvaton offre donc la possibilité de migrer son frama.site sous Grav / Dokuwiki. Ça se passe comment ? Ça coûte combien ?
Il faut commencer par créer son compte chez Ouvaton, sur notre interface de gestion Ouvadmin. L’adresse du site pourra être en *.ouvaton.org (https://monsite.ouvaton.org par exemple), et l’utilisation de son propre nom de domaine est bien sûr possible.

Notre documentation explique la procédure à suivre pour exporter puis importer son Framasite chez Ouvaton, et notre équipe d’assistance est là pour accompagner les utilisateurs en cas de difficultés.

Pour le prix, ce sera 12€ TTC la première année, et après ce sera 42€ TTC par an (le tarif « normal »). Ce tarif inclut des mails, de l’espace disque… On réfléchit sérieusement (et collectivement) à faire évoluer nos tarifs pour plusieurs offres selon les besoins. Pour ceux qui veulent vraiment rejoindre l’aventure, ils peuvent bien sûr devenir coopérateurs. La part sociale est à 16€ et permet d’être coopérateur « de plein droit ».

Pourquoi ne pas permettre la migration des framasites réalisés avec le logiciel PrettyNoemieCMS ?
Malheureusement ce logiciel n’est plus maintenu. Nous préférons nous concentrer sur Grav et Dokuwiki, qui disposent de solides équipes de développeurs pour les faire évoluer. Mais les personnes qui utilisent encore PrettyNoemieCMS peuvent reconstruire leur site sur un autre CMS aux mêmes conditions.

Je lis sur votre site web que vous comptez candidater pour rejoindre le collectif CHATONS fin 2021. Pourquoi souhaitez-vous rejoindre le collectif ?
Les valeurs affichées par le collectif sont concordantes avec les nôtres, nous avons donc souhaité le rejoindre au plus vite. Mais nous devons dans un premier temps assainir notre plateforme de quelques logiciels propriétaires qui étaient utilisés par notre ancien infogérant. C’est une tâche assez lourde qui, en plus du travail technique, a nécessité de nombreux échanges au sein de notre équipe. Nous sommes épaulés dans cette tâche par la super équipe de Octopuce, notre nouvel infogérant. Le train est en route et nous devrions pouvoir présenter notre candidature fin 2021 pour rejoindre les CHATONS.

 

Que vous utilisiez les services de frama.site ou que vous souhaitiez vous créer un nouvel espace sur internet, Framasoft vous encourage donc à aller étudier de près les offres de Ouvaton et Bee-Home.




Liiibre, une solution complète pour vos projets collaboratifs

Hier, mardi 15 septembre, les copains et copines de Indie Hosters (structure membre du Collectif des Hébergeurs Alternatifs Transparents Ouverts Neutres et Solidaires) ont officiellement mis en ligne leur nouvelle solution : Liiibre. Iels nous avaient parlé de ce projet pendant la période de confinement et au sein de Framasoft, on les avait encouragé⋅es dans cette voie. En effet, chez Framasoft, nous  accompagnons depuis plusieurs années les organisations qui prennent conscience de la nécessité de mettre en cohérence leurs outils numériques et leurs valeurs. Avec cette solution, c’est dorénavant bien plus simple pour elles de migrer sur des outils libres et émancipateurs. Nous vous proposons donc une petite présentation de cette solution en mode interview.

 


Alors, c’est quoi exactement Liiibre ?
Liiibre, c’est un espace sécurisé avec un compte pour chaque usager·e donnant accès aux meilleurs outils libres pour collaborer en ligne dans une seule interface unifiée : stockage de données, agendas partagés (Nextcloud), édition de documents (OnlyOffice), messagerie instantanée (RocketChat) et visioconférence (Jitsi). Avec un seul mot de passe, chaque usager·e accède facilement à l’ensemble des outils.

Illustrations originales de Thibault Daumain sous licence CC BY-NC-SA 4.0

Nous sommes partis du constat que sensibiliser à l’usage des outils libres sur de petites infrastructures locales (comme le font les CHATONS) c’est très important, mais qu’il devient indispensable, encore plus depuis la crise de la COVID19 où les besoins de collaborer en ligne se sont multipliés massivement, de proposer un service professionnel robuste et à plus grande échelle. C’est pourquoi nous avons choisi de déployer Liiibre avec Kubernetes, une infrastructure technique qui permet ce passage à l’échelle.

Qui est à l’origine de ce projet ?
C’est l’association IndieHosters. Nous sommes un collectif de personnes provenant d’horizons divers, dotées de compétences/réseaux spécifiques, qui développent un regard transversal sensible aux enjeux humains, écologiques, techniques, économiques, pédagogiques, artistiques, juridiques et politiques et mues par le désir d’inscrire l’association dans l’avenir des communs numériques. Depuis 2016, IndieHosters s’est spécialisé dans la mise à disposition d’outils en ligne répondant à toute une variété d’usages allant du blog au forum, en passant par le réseau social Mastodon ou encore la collaboration en ligne.

Conscients de la nécessité de s’émanciper collectivement des GAFAM, retrouver la maîtrise de nos données et raviver l’utopie concrète que porte en ses gènes l’idée même d’Internet, nous nous sommes donné pour mission de faciliter la transition vers un numérique éthique. Pour tenter d’avancer plus loin dans cette voie, nous nous sommes dernièrement constitué·es en association à but non lucratif et avons choisi de concentrer nos efforts à répondre au besoin le plus pressant aujourd’hui pour les organisations : la collaboration en ligne. Car travailler ensemble à fabriquer l’avenir, nécessite aussi d’utiliser des outils cohérents avec ses idées et valeurs.

Cette aventure a aussi été l’occasion d’étoffer le collectif : de deux personnes, nous sommes passés à six membres dans le collège de l’association. De nombreux contributeur⋅ices nous ont également rejoints, notamment pour mettre en place une équipe dédiée à l’accompagnement, en lien avec un réseau national de formateur⋅ices et de facilitateur⋅ices. Nous pensons en effet que dans un cadre collectif, ce qui va amener chacun·e à tirer les fruits des outils collaboratifs est lié à la qualité de l’animation qui relie l’équipe.

C’est pour qui ?
En mars dernier, alors que toute la France s’est retrouvée confinée, nous nous sommes demandé comment nous pouvions être utiles dans ce contexte inédit, conscients que les tissus coopératifs et associatifs allaient être touchés de plein fouet par la crise.

Durant cette période, les particuliers comme les entreprises se sont mis massivement à recourir à des solutions leur permettant de travailler en ligne. Pour certain⋅es, ce fut l’occasion de découvrir de nouveaux outils, et surtout de nouvelles manières de collaborer. Seulement ces outils nécessitent d’être hébergés quelque part. S’il est possible de faire appel à des hébergeurs éthiques comme les CHATONS pour quelques utilisateur⋅ices, il nous a semblé qu’il était temps de proposer une solution professionnelle et fiable aux entreprises et associations afin qu’elles puissent s’organiser avec des outils respectueux de leurs données et de leur autonomie.

Illustrations originales de Thibault Daumain sous licence CC BY-NC-SA 4.0

Liiibre est donc destiné aux organisations allant d’une trentaine à plusieurs centaines de personnes qui ne souhaitent pas héberger elles-mêmes leurs outils sans pour autant lâcher leur souveraineté sur les données. Si un groupe démarre dans la collaboration en ligne, nous les accompagnons dans la prise en main des outils et surtout dans la découverte des méthodologies de travail à distance en groupe. Et si ce sont des usager·es exigeant·es habitué·es à Google Drive, Slack, et consorts, mais souhaitant reprendre le contrôle sur leurs données, Liiibre s’adresse aussi à elleux.

Pas besoin de se préoccuper de l’hébergement des outils et des données, nous nous en chargeons, en garantissant que nous n’exploiterons jamais les données, ni les métadonnées. Nos outils étant sous licence libre et open source, les usager·es restent également libre de migrer Liiibre chez un autre hébergeur ou sur leurs propres serveurs à tout moment.

Quel est le modèle économique ?
Chez IndieHosters, il n’y a pas de client·e⋅s et nous ne sommes pas prestataires. Ensemble, nous permettons la mise à disposition d’une ressource dont la gestion suit un code social précis qui organise sa pérennité et son statut de commun à long terme sans que cela n’entrave jamais nos libertés, ni la maîtrise de nos données en tant que contributeur·ices.

Illustrations originales de Thibault Daumain sous licence CC BY-NC-SA 4.0

En utilisant Liiibre, non seulement un⋅e usager·e a l’assurance que ses données seront respectées, mais en devenant contributeur⋅ice, iel participe aussi à prouver qu’un modèle économique à échelle locale et humaine où l’on se fait confiance en bonne intelligence est possible sur Internet. Plutôt que de consommer un produit, vous devenez partie prenante d’une ressource commune et de la communauté qui en prend soin.

C’est donc sur ces principes que nous avons calculé le montant de base (8€ par mois pour chaque usager·ère au sein d’une organisation), de manière à ce qu’il permette une viabilité économique tout en étant juste pour les usager·ères. Ce montant est directement lié au coût en infrastructure technique et temps de travail de notre côté, et ne vise pas à faire du profit, seulement à pérenniser les services rendus.

Et parce que chez IndieHosters, c’est l’humain qui passe avant tout, ce montant peut-être réévalué sur la base d’un contrat de réciprocité dans lequel les usager·ères s’engagent à contribuer à la ressource par des moyens différents de la monnaie, ce qui permet à des collectifs d’accéder aux outils sans se ruiner financièrement. De même, si une organisation a les moyens de contribuer en versant le tarif plein, elle soutient en même temps d’autres groupes en leur facilitant l’accès aux outils libres. Elle n’est ainsi pas “cliente” mais bien contributrice de la communauté elle aussi.

En bref, nous gérons la complexité liée à l’hébergement d’outils libres, et nous structurons un modèle économique basé sur les communs qui privilégie le partage et la pérennité des ressources que nous mettons à disposition.




La réponse de l’hébergeur à la bergère

…ou considérations pratiques à l’attention des hébergeurs qui reçoivent une demande de retrait de contenu

L’association Scenari dont je suis membre a reçu un mail de la directrice juridique d’un important éditeur de manuels scolaires (que j’appellerai Éditions X), intitulé « contenus non autorisés ». Ce mail nous informait qu’avaient été découverts « des contenus non autorisés sur votre site et notamment « ​​Relation Client à Distance et Digitalisation »​ » et nous demandait « de supprimer tous les contenus non autorisés par nos maisons d’édition ».

On pourrait s’étonner que certains éditeurs de manuels scolaires jugent opportun en ce moment de chasser les copies illicites sur le Web. On pourrait préférer qu’ils concentrent l’ensemble de leurs forces pour chercher comment mettre à disposition leurs ressources au plus grand nombre. Mais ce n’est pas le sujet de cet article.

On pourrait aussi avoir envie de rappeler que les contenus pédagogiques devraient être sous licences libres, a fortiori quand ils ont été largement financés par l’argent public. Cela permettrait aux enseignants de se les réapproprier plutôt que de recréer des ressources à côté. Cela permettrait de favoriser des processus contributifs. Cela permettrait leur capacitation numérique, cela améliorerait leur autonomie quand il s’agit de mettre à disposition du contenu en ligne. Mais ce n’est toujours pas le sujet de cet article.

 

À la réception de cette demande, nous avons réagi promptement (on verra que c’est le terme employé dans la loi), mais avec un peu de recul, je me dis que nous avons réagi trop promptement. Le sujet de cet article est d’étudier comment un petit hébergeur associatif doit réagir en face d’une telle demande.

Rappel du contexte

L’association Scenari est hébergeur de contenus créés avec MyScenari, un logiciel libre combiné à un hébergement offert à ses membres, qui permet notamment de créer des sites et de les mettre en ligne. Pendant la crise Covid-19 l’association a lancé une « Action solidaire Scenari » permettant à tout enseignant non membre de l’association de bénéficier de cet hébergement (scenari.org).

C’était la première fois que nous recevions une demande de retrait de contenus.

Des contenus non autorisés… par quelle autorité ?

Nous avons donc réagi promptement, c’est à dire que nous avons immédiatement répondu au mail reçu que nous allions « éliminer les contenus non autorisés » et nous avons presque aussi rapidement signifié à l’auteur que nous avions reçu cette demande. Celui-ci a retiré ses contenus aussitôt le message reçu, reconnaissant que c’était « borderline », mais regrettant que l’éditeur n’ait pas été « un peu plus compréhensif » dans le contexte actuel où il lui faut bien chercher des solutions pour maintenir la fameuse « continuité pédagogique », et s’étonnant que les Éditions X avec qui il est en contact ne l’aient pas interpellé directement.

Donc les contenus ont été éliminés. Grâce à nous.

Grâce à nous un éditeur a pu faire valoir son bon droit. Grâce à nous le travail d’un enseignant et de ses étudiants a été compliqué. Le travail d’un enseignant qui avait fait l’effort de chercher des solutions, par lui-même, d’en trouver, de les mettre en œuvre. Pas pour spolier des ayants droit, mais pour inventer des solutions à ces problèmes. Il a créé du contenu, nous l’avons détruit.

Pourquoi diable avons-nous fait cela ?

Parce que nous avons réagi, presque mécaniquement, à un argument d’autorité. Un argument d’autorité c’est un argument qui « consiste à faire appel à une autorité plutôt qu’à la raison », nous dit Arthur Schopenhauer dans L’Art d’avoir toujours raison (ouvrage que je recommande par ailleurs). Donc, la Directrice juridique (avec une majuscule) des Éditions X nous remercie de. Notez qu’il n’y a pas d’accent à Édition dans le mail reçu, qu’un éditeur devrait pourtant savoir que les majuscules s’accentuent, et qu’en faisant remarquer cela j’use également d’un stratagème rhétorique, l’attaque personnelle (argumentum ad personam) qui permet d’attaquer la personne plutôt que le discours. Je me dispense habituellement de le faire lorsque je m’en rends compte, c’est un des avantages de s’intéresser à la rhétorique. Disons que j’ai laissé celui-ci pour illustration de mon propos, et montrer que la rhétorique est une arme à double tranchant.
dessin humoristique fabriqué avec le générateur de geektionnerd. Titre : Soyons procéduriers avec Édith Sillon. à gauche une silhouette féminine mains sur les hanches déclare "Nous vous demandons donc de supprimer les contenus non autorisés, car nous défendons les intérêts des ayant-droits (ortho fautives avec trait d’union inutile et pluriel au mot "droit"). En face d’elle, une autre silhouette féminine, bras croisés , répond : Pas question parce que le pluriel c’est ayants droit (S à ayant, pas de trait d’union). Elle ajoute plus bas "et toc";
Argument d’autorité donc. Je vois pourtant au moins trois bonnes raisons de faire fonctionner sa raison, justement, et de ne pas répondre à une telle demande à moins, soit d’y être obligé légalement, soit de s’être construit son propre avis sur la question.

En répondant positivement à la demande sans y être légalement obligé, on fait le choix de léser celui qui est ciblé par la demande. Or nous n’avons pas forcément les éléments pour savoir qui est dans son droit de l’un ou de l’autre. D’une part au sens légal, qu’est-ce qui me prouve que ?… On verra que la loi actuelle va en ce sens et que la preuve est à la charge du demandeur. D’autre part au sens éthique : les ayants droit ont-ils vraiment raison d’interdire coûte que coûte l’accès à leurs contenus, en toutes circonstances ? Aaron Swartz est mort d’avoir refusé une réponse simpliste à cette question. On ne nous en demande pas tant, mais on peut au moins s’arrêter un peu et réfléchir.

En répondant positivement à la demande sans y avoir mûrement réfléchi, nous agissons comme les robots qui suppriment des contenus, parfois de façon tout à fait stupide et injustifiée. Or la majorité des hébergeurs, a fortiori petits, a fortiori libristes, sont contre les systèmes de filtrage automatisés et ont combattu leur systématisation prévue par la proposition de directive européenne sur le droit d’auteur.

En répondant positivement à la demande sans y être obligé, nous consommons de l’énergie qui n’est pas investie ailleurs. Les hébergeurs associatifs, sans orientation commerciale, ont mieux à faire que de s’occuper des intérêts des détenteurs de droits patrimoniaux. Faire tourner les services, les sécuriser, les faire connaître, les documenter, répondre aux utilisateurs, modérer les propos inappropriés, haineux ou discriminatoires… À tout cela on s’est engagé. Mais supprimer des corrigés d’exercices pour un BTS ? Vraiment ? Est-ce que les éditeurs ne peuvent pas se débrouiller pour cela ? (on verra que c’est également à peu près ce que dit la loi, pour le moment).

La loi qui s’applique actuellement est la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, dites LCEN.

L’article qui nous intéresse est en particulier l’article 6.

En voici quelques points saillants :

Les hébergeurs sont désignés par la périphrase : « Les personnes dont l’activité est d’offrir un accès à des services de communication au public en ligne », je garderai le terme hébergeur pour mon exégèse (Section I-1).

Les hébergeurs doivent être en mesure de prévenir le « téléchargement et la mise à disposition illicite d’œuvres et d’objets protégés par un droit d’auteur ou un droit voisin » (Section I-1 et référence à l’article L. 336-3 du CPI).

Les hébergeurs ne peuvent pas voir leur responsabilité engagée s’ils « n’avaient pas effectivement connaissance » du caractère illicite des données stockées ou s’ils « « ont agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l’accès impossible » » (Section I-2 et I.3).

Les hébergeurs ne sont pas obligés de « surveiller les informations qu'[ils] transmettent ou stockent », ni de « rechercher des faits ou des circonstances révélant des activités illicites » » (sauf « « surveillance ciblée et temporaire demandée par l’autorité judiciaire ») (Section I-7).

Les hébergeurs ont l’obligation de « mettre en place un dispositif facilement accessible et visible permettant à toute personne de porter à leur connaissance » des données permettant « la répression de l’apologie des crimes contre l’humanité, de la provocation à la commission d’actes de terrorisme et de leur apologie, de l’incitation à la haine raciale, à la haine à l’égard de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation ou identité sexuelle ou de leur handicap ainsi que de la pornographie enfantine, de l’incitation à la violence, notamment l’incitation aux violences sexuelles et sexistes, ainsi que des atteintes à la dignité humaine », « des activités illégales de jeux d’argent », des opérations liées au « tabac manufacturé dans le cadre d’une vente à distance » (l’atteinte au droit d’auteur n’est, logiquement, pas mentionné dans cette liste) (Section I-7).

Et la section I.5 nous précise que la connaissance des faits litigieux est présumée acquise lorsqu’il leur est notifié (je reproduis intégralement cette partie) :

  • la date de la notification ;
  • si le notifiant est une personne physique : ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ; si le requérant est une personne morale : sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente légalement ;
  • les nom et domicile du destinataire ou, s’il s’agit d’une personne morale, sa dénomination et son siège social ;
  • la description des faits litigieux et leur localisation précise ;
  • les motifs pour lesquels le contenu doit être retiré, comprenant la mention des dispositions légales et des justifications de faits ;
  • la copie de la correspondance adressée à l’auteur ou à l’éditeur des informations ou activités litigieuses demandant leur interruption, leur retrait ou leur modification, ou la justification de ce que l’auteur ou l’éditeur n’a pu être contacté.

On comprend donc que celui ou celle qui veut faire retirer du contenu par un hébergeur doit :

  • au moins avoir essayé de contacter directement l’auteur de l’infraction qu’elle pointe, avant de s’adresser à l’hébergeur,
  • fournir une motivation qui prouve les faits, ce n’est pas à l’hébergeur de mener l’enquête.

Évolutions attendues à moyen terme (directive européenne)

La directive européenne 2019/790 sur le « droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique » a été adoptée le 17 avril 2019. Il s’agit d’une directive, c’est donc un texte qui ne s’applique pas encore mais qui doit être transposé dans la loi française.

L’article 13 du projet de directive, devenu l’article 17 de la directive adoptée, a été combattu, notamment par les hébergeurs et les défenseurs des libertés individuelles, parce qu’il renverse la charge des ayants droit vers les hébergeurs :

« Si aucune autorisation n’est accordée, les fournisseurs de services de partage de contenus en ligne sont responsables des actes non autorisés de communication au public, y compris la mise à la disposition du public, d’œuvres protégées par le droit d’auteur et d’autres objets protégés, à moins qu’ils ne démontrent que […] ».

L’hébergeur qui n’aura pas d’accord avec les ayants droit et/ou qui ne sera pas en mesure de filtrer a priori les contenus sera responsable. Ce qui implique la nécessité pour les hébergeurs de passer de tels contrats et de mettre en place des dispositifs automatisés de filtrage.

Je ne m’étends pas sur cette évolution à venir, pour le moment, le régime qui s’applique est celui décrit précédemment.

« La directive passe par deux étapes avant de produire ses effets : une fois votée par les institutions européennes, elle doit ensuite être transposée par les États membres dans leur droit national, à la différence du règlement, qui s’applique directement. »

Guide dont vous êtes le héros à l’usage des petits hébergeurs

1

Vérifiez que le sujet de la demande n’est relatif qu’au droit d’auteur.

Si on est bien uniquement dans le cas du droit d’auteur, allez en 2.
Si on est dans le cas d’un autre signalement portant sur une répression d’intérêt général tel que mentionné par la loi (crimes, haine, terrorisme, discrimination… cf. supra), allez directement en 6.

2

Vérifiez que la demande reçue est conforme à la forme prescrite par la LCEN, article 6, section I.5 (cf. supra).

Si oui, il faut la considérer, allez en 6.
Sinon, allez en 3.

3

La demande reçue n’est pas complète :

S’il y a des menaces associées à une demande incomplète, allez en 4.
Si la demande est presque complète, il ne manque qu’une information par exemple, allez en 5.
Sinon, allez en 9.

4

Vous avez été menacé alors que la demande de signalement n’est pas conforme à la loi :

  • signalez à votre tour la menace reçue au procureur de la république avec un mot pour lui expliquer la situation et mettre en évidence votre statut de petit hébergeur (ce sera utile notamment si le demandeur est un habitué des démarches cavalières) ;
  • si vous pouvez joindre l’auteur mis en cause, transmettez-lui la demande pour information, informez-le de votre démarche.

5

La demande est presque dans les formes, mais qu’il manque au moins une information :

  • accusez réception de la demande en répondant que vous êtes un prestataire technique dont l’activité est d’offrir un accès à des services de communication au public en ligne tel que défini par la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique ;
  • n’entreprenez aucune autre démarche (au demandeur de rendre conforme sa demande s’il le souhaite) ;
  • si vous pouvez joindre l’auteur mis en cause, transmettez-lui la demande pour information, informez-le de votre démarche.

6

Vous avez reçu une demande conforme à la LCEN, vous êtes tenu d’y répondre, vérifiez les informations transmises.

Si vous êtes convaincu que les informations sont fausses, allez en 7.
Si vous avez un doute sur la véracité des informations, allez en 8.
Si les informations vous semblent vraies, allez en 10.

7

Vous avez reçu une demande conforme à la LCEN, mais vous êtes convaincu qu’elle est abusive :

  • accusez réception et informez le demandeur que vous pensez les informations transmises fausses et signalez-lui que l’article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique, prévoit que le fait de demander sciemment un retrait sur des bases inexactes est puni d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 Euros d’amende ;
  • si vous pouvez joindre l’auteur mis en cause, transmettez-lui la demande pour information, informez-le de votre démarche.

8

Vous avez reçu une demande conforme à la LCEN, mais avez un doute sur la véracité des informations :

  • ​accusez réception et demandez un complément d’information au demandeur ;​
  • si vous pouvez joindre l’auteur mis en cause, transmettez-lui la demande pour information, informez-le de votre démarche, demandez-lui éventuellement son avis ;
  • une fois recueillies les informations complémentaires, décidez de vous rendre en 7 ou en 10.

9

La demande est incomplète, sans menace :

Ignorez la demande et ignorez les relances si elles ne sont pas plus circonstanciées (ou menaçantes).

10

Vous avez reçu une demande conforme à la LCEN et les informations vous semblent vraies :

  • procédez au retrait immédiat des données ou rendez-les inaccessibles (en cas de manipulation informatique présentant un risque de perte de données, procéder à une copie préalable) ;
  • si vous pouvez joindre l’auteur mis en cause, transmettez-lui la demande et informez-le de votre décision.

logigramme parodique avec des symboles de jeu dans les symboles et des phrases idiotes
Le trajet idéal vous est fourni dans une représentation simplifiée grâce à ce logigramme. On est comme ça chez Framasoft.

La responsabilité de l’hébergeur

Je précise que ce guide est juste un guide, chaque hébergeur est invité à l’adapter selon son éthique et les situations rencontrées. En particulier, la jurisprudence a déjà considéré que la responsabilité de l’hébergeur pouvait être engagée même si la demande était incomplète dès lors que la description des faits était suffisamment précise pour permettre le retrait. Donc, suivre ce guide comporte une part de risque, notamment si vous ne répondez pas ou peu (points 5 et 9 du guide).

Mais d’un autre côté le législateur a confié de facto à l’hébergeur la responsabilité de garantir l’équilibre entre liberté d’expression d’une part et le préjudice aux tiers d’autre part. Si l’hébergeur ne tient pas son rôle, en arbitrant systématiquement en faveur des retraits, de peur d’un jugement défavorable, y compris lorsque les faits ne sont pas avérés ou que les procédures ne sont pas respectées, alors il œuvre de fait contre la liberté d’expression. Le statut juridique de l’hébergeur ne lui permet pas d’être neutre, il doit prendre ses responsabilités.

Note concernant l’identité de l’éditeur

L’association Scenari a préféré ne pas divulguer le nom de l’éditeur, j’ai respecté ce choix, le propos de l’article étant moins de porter l’attention sur l’attitude de celui-ci que de proposer une réflexion pratique.

Note concernant le mail reçu

Ressentant peut-être une légère honte à faire cette demande en plein confinement, la directrice juridique a assorti sa demande du commentaire suivant : « En effet, nous nous opposons à la mise en ligne de corrigés de nos ouvrages et la majorité des enseignants nous demande de lutter contre ces pratiques qui perturbent leur enseignement. ».

J’ai choisi de ne pas considérer cet angle car :

  • Sa demande portait bien sur « tous les contenus non autorisés par nos maisons d’édition » et non pas sur tel ou tel corrigé.
  • Je souhaiterais une preuve que la préoccupation de la majorité des enseignants soient en ce moment de lutter contre ces pratiques et pas plutôt de lutter pour trouver des solutions.
  • Une recherche web circonstanciée ne faisait pas ressortir ces contenus, donc seuls les étudiants ayant déjà l’adresse fournie par l’enseignant pouvait en pratique accéder au contenu.

Remerciements

Merci aux membres de l’association Scenari, de Framasoft et du CHATONS de m’avoir aidé dans cette recherche, et en particulier à Denis Dordoigne à qui j’ai emprunté une part significative du guide proposé, à Stéphane Poinsart de m’avoir pointé la référence du JournalDuNet concernant la jurisprudence, à Christelle pour ses précieux compléments, à Benjamin pour m’avoir relu et rappelé que les hébergeurs avaient leur rôle à jouer, à tous les autres qui ont contribué anonymement.

 




entraide.chatons.org : des services libres en ligne sans inscription

Suite au confinement dû à l’épidémie de coronavirus, vous êtes nombreu⋅ses à avoir besoin d’outils pour continuer à communiquer avec vos proches et/ou télétravailler. Le Collectif des Hébergeurs Alternatifs Transparents Ouverts Neutres et Solidaires – CHATONS – (dont fait partie Framasoft) met en place https://entraide.chatons.org/, un portail d’accès simplifié à des services en ligne sans inscription et répondant aux besoins les plus courants.

On vous a déjà parlé de CHATONS, non ?

Initié en 2016 par Framasoft, ce collectif rassemble à ce jour plus de 70 structures qui proposent des services en ligne libres, éthiques, décentralisés et solidaires afin de permettre aux internautes de trouver rapidement des alternatives aux services proposés pas les géants du web. Les structures membres du collectif s’engagent notamment :

  • à n’utiliser que des logiciels libres ;
  • à ne pas exploiter les données des bénéficiaires de leurs services (= ne pas transmettre ou exploiter vos données) ;
  • à ne pas utiliser de régies publicitaires (ou autres services de pistage).

Très souvent, on explique que CHATONS, c’est un peu un réseau d’AMAP des services en ligne. Vous connaissez le principe des AMAP ? Ces associations qui proposent aux habitants des villes des paniers de légumes (ou autres denrées) issus de la production agricole locale (et souvent biologique) ? Là où les géants du web représenteraient l’industrie agro-alimentaire, les structures membres de CHATONS seraient des « paysans informatiques » proposant des services en ligne « bio » :

  • sans OGM (= sans logiciels privateurs ne garantissant pas vos libertés),
  • sans pesticide (= sans baser leurs revenus sur la vente de vos données personnelles),
  • sans marketing agressif (= sans régie publicitaire pistant vos comportements),
  • sans une « course au pouvoir d’achat », qui en réalité porte tort aux petits agriculteurs (= prix équitables entre les chatons et leurs bénéficiaires)

Des chatons qui font leur part

Parce que plusieurs structures au sein du collectif proposaient déjà aux internautes des services en ligne facilement accessibles depuis leur site web, nous avons pensé qu’il serait pertinent en cette période de les identifier et de les valoriser. Dès l’annonce du confinement, nous avons donc commencé à créer des pages sur notre litière pour lister les instances publiques d’outils répondant aux besoins les plus courants pour les personnes en situation de télétravail.

C’est en listant les adresses web de ces services qu’il nous a semblé judicieux de créer une nouvelle page sur chatons.org qui donnerait un accès direct à ces services, sans obliger les internautes à consulter une page sur notre wiki et à ensuite devoir aller sur la page du chaton pour accéder au service. D’autant plus que nous étions conscients que les internautes ne sauraient pas forcément quelle instance choisir parmi cette liste. C’est de là qu’est né entraide.chatons.org, un portail d’accès simplifié à des services en ligne sans inscription et répondant aux besoins les plus courants.

Pour la petite histoire, un petit groupe agile composé de membres du collectif, en particulier Angie, Lise, Thomas et Pierre-Yves de Framasoft, ainsi que Valentin d’ARN / Sans-nuage, et Florian des Colibris s’est retrouvé à faire des petits points réguliers en audioconférence à leurs heures perdues, à avancer par petits pas asynchrones sur le développement de cette nouvelle page web, et à se concerter par tchat (avec les outils libres que l’on préconise 😉 ), pour réaliser cette plateforme en une grosse semaine. Dans un contexte où tout le monde n’a que le mot solidarité à la bouche, nous vivions là une belle expérience irréversible de coopération !

Des services en ligne facilement accessibles

Sur entraide.chatons.org, nous vous proposons l’accès à 9 outils différents :

  • la rédaction collaborative avec l’outil Etherpad (alternative à Google Docs)
  • la visioconférence avec l’outil Jitsi Meet (alternative à Skype, Zoom, etc.)
  • la prise de rendez-vous avec l’outil Framadate (alternative à Doodle)
  • le tableur collaboratif avec l’outil Ethercalc (alternative à Google Sheets)
  • le partage temporaire de fichiers avec les outils Lufi, Firefox Send ou Plik (alternative à WeTransfer)
  • le partage d’images avec l’outil Lutim (alternative à Imgur)
  • les tableaux de post-it avec l’outil Scrumblr (alternative à Padlet)
  • les raccourcisseurs de liens avec les outils Polr, LSTU ou rs-short (alternative à bit.ly)
  • le partage de textes sécurisé avec l’outil PrivateBin (alternative à Pastebin)

Et comme pour chaque outil, il existait plusieurs instances chez les chatons, nous avons mis en place une interface qui ne vous oblige pas à choisir chez qui vous utilisez ce service. Techniquement, on vous propose l’accès à une instance de chaque outil de manière aléatoire, chaque chaton pouvant indiquer son niveau de disponibilité pour chaque service.

Ainsi, sur entraide.chatons.org, lorsque vous souhaitez créer, par exemple, un pad pour y prendre des notes de manière collaborative, vous est indiqué le nom du logiciel utilisé (en l’occurrence Etherpad) et chez quel chaton ce pad sera créé. Cela permet de répartir la charge de création de nouveaux pads entre les 19 chatons qui proposent ce service. Ainsi, aucune structure ne se retrouve à devoir gérer une affluence trop massive d’internautes sur ses services.

Ainsi vous pouvez découvrir et utiliser librement ces services avec des garanties de respect votre vie privée, et autres valeurs rendant l’informatique moins dystopique, comme indiqué dans le manifeste et la charte du CHATONS.

Et après le confinement ?

Nous prévoyons de maintenir cette page au-delà du temps de confinement et même de l’enrichir dans les semaines / mois qui viennent afin de vous proposer à terme d’autres outils libres fournis par les chatons, y compris ceux nécessitant inscription ou ceux nécessitant un accès payant.

Nous espérons que ce sera pour vous l’occasion de découvrir et soutenir des structures locales qui œuvrent à nous rendre plus autonomes et souverains sur nos outils de travail en véhiculant des valeurs de solidarité et de partage.

 

Découvrir entraide.chatons.org




Solidarités numériques : le Libre se mobilise

Le Libre et ses acteurs et actrices, associatifs ou individuels, se mobilisent davantage encore dans les conditions compliquées si particulières du confinement.

Empruntons cette mise au point initiale à Pascal Gascoin, chargé de mission éducation-numérique aux Ceméa, notre allié dans l’Éducation populaire :

La situation de confinement que nous traversons nous oblige à repenser, à inventer nos modes de communication, nos façons de travailler pour continuer, malgré tout, à mener à bien nos projets, nos activités tout en gardant le lien, avec les bénévoles et les équipes de nos organisations, nos élèves et les accompagner au mieux.

Aux CEMEA, nous sommes choqués de recevoir quasi quotidiennement dans nos boîtes mails de soi-disant « guides de survie numérique en période de confinement », provenant souvent de « start-ups associatives » qui nous proposent pêle-mêle des solutions payantes, d’autres gratuites, sans jamais faire référence à la façon dont seront traitées nos données, ni faire la différence entre le service “gratuit” d’une multinationale et celui volontairement éthique et fraternel d’une association.

Donc essayons de « dégoogliser le confinement ». Voici quelques-unes des initiatives récentes du numérique libre pour aider à franchir ensemble les semaines houleuses de la crise sanitaire.

Nous allons forcément en oublier, mais vous pouvez nous faire signe pour que nous puissions compléter et mettre à jour la liste ci-dessous.

C’est parti pour une recension rapide sans souci hiérarchique particulier.

C’est où/c’est ouvert ?

Sur ce site https://www.caresteouvert.fr vous pouvez savoir sur une carte (openStreetMap, la cartographie libre et collaborative qui fait la nique à googlemaps) quels sont les services « encore ouverts », ça peut être utile. Et c’est également collaboratif : signalez vous aussi les ouvertures/fermetures de lieux utiles en période de confinement.

Dépannons avec des panneaux

copie d’écran exemple d’affiche généréeLe site http://revolf.free.fr/local-pad-sign/# permet d’imprimer facilement des affiches et panneaux d’affichage avec des informations utiles pour vos voisins de balcon, de hall d’immeuble, de zone pavillonnaire, dans la rue sur le trajet du ravitaillement etc. Vous pourrez inclure automatiquement un QR code et l’adresse d’un pad dans votre affiche.

Enseignant⋅e⋅s dans l’urgence

logo de l’asso solidaire scenariL’association Scenari qui milite pour les usages de la chaîne éditoriale du même nom, vous propose une opération spéciale.
Que vous permet Scenari ? De pouvoir publier vos cours facilement avec une chaîne éditoriale : vous rédigez une seule fois pour publier sous de multiples formats, et vous n’aurez qu’un seul document à modifier /mettre à jour.
N’ayez pas peur de l’apprentissage d’un nouvel outil numérique, vous aurez l’appui et le soutien d’une personne de l’association : parrainage pour rédiger des cours, couplage avec Canoprof pour le primaire et le secondaire, parrainage d’apprentissage de la plate-forme. Accès offert à l’hébergement et à la mise en ligne des contenus que vous aurez produits (services en temps normal réservés aux adhérents de l’association)

 

logo des Zourits (pieuvre souriante)Des Zourits pour l’école
les CEMEA proposent l’accès gratuit à de nombreuses ressources libres pour l’école adresses mail, audioconférences avec jitsi, etc. mais aussi un accompagnement pour les enseignant⋅e⋅s etc. Tout cela est expliqué sur cette page.
2 plaquettes informatives et pour les contacter (liens directs vers .pdf) :
pour les écoles
pour les petites assos

Urgences numériques

Vous faites partie des acteurs locaux stratégiques : un support et dépannage numérique vous est proposé par un collectif de plus de 200 personnes bénévoles, professionnelles des technologies d’information, qui peuvent vous aider à faire face à vos urgences : pharmacies, cabinets médicaux, mairies, établissements scolaires, commerces d’alimentation, associations, indépendants. Vous pouvez donc demander de l’aide mais aussi participer pour en fournir à votre tour (c’est ça l’esprit Contributopia, hein)…

Le Big Boinc

Boinc, c’est le calcul collaboratif pour la recherche médicale, nous signale Tikayn. Votre ordinateur ou votre ordiphone s’ennuient avec leurs puissantes capacités généralement en sommeil ? Contribuez par leur puissance de calcul à la recherche médicale, comme le font déjà plus de 4 millions de personnes.

proposition sur Mastodon : contribuer avec vos appareils numériques à la recherche médicale

Github spécial Covid

Bastien recense sur ce Gthub les ressources libres et open source d’info et solidarité autour de la pandémie :

https://github.com/bzg/covid19-floss-initatives/blob/master/index.org

Insolite

Même les Balkany veulent contribuer ! (ah non zut ils ne sont pas libres)

Et du côté de Framasoft ?

JCFrog et l’interface de jitsi meet

  • Nous avons renforcé les capacités des serveurs et de l’infrastructure de Framatalk et Framapad qui peuvent donc à nouveau accueillir les besoins de communication des particuliers et associations qui doivent se joindre. Non, les enseignants qui souhaitent faire une visioconférence pour des classes de 35 ne sont pas les destinataires prioritaires de ces outils, pour des raisons compréhensibles de tenue de charge. Ces services peuvent être utilisés par des personnes qui, souvent, n’ont pas d’autres moyens (dont des malades isolé·es de leur famille). Prenez soin de ne pas monopoliser cette ressource afin qu’elle reste partagée.
  • https://rdv-medecins.framasoft.org/login est un outil libre de prise de rendez-vous médicaux à destination du personnel médical exclusivement. Vous avez un bout de serveur ? Vous pouvez héberger le même outil (Nextcloud + ses applications « rendez-vous » et « calendar ») pour le mettre à disposition de votre médecin. Et voilà la documentation utilisateur/trice !
  • Vous avez hélas ou tant mieux davantage de temps libre ? Profitez-en pour vous former en ligne aux arcanes du numérique : c’est parti pour Librecours Voir l’article du framablog qui vous explique tout. Les inscriptions sont ouvertes par ici

 

à suivre …

 

 




Ouverture du MOOC CHATONS : Internet, pourquoi et comment reprendre le contrôle

C’est officiel, le premier module de notre parcours pédagogique pour favoriser l’émancipation numérique est désormais complet. À vous de vous en emparer, de le partager… et pourquoi pas de l’enrichir !

Prendre le temps de co-construire un MOOC avec soin

Nous vous en parlions en décembre dernier lors d’un point d’étape, la publication du premier module de ce MOOC est l’aboutissement d’un projet né il y a plus de 3 ans !

C’est en 2016 que la fédération d’éducation populaire La Ligue de l’Enseignement nous propose un partenariat autour de cette idée de cours ouverts en ligne à suivre librement pour cheminer vers l’émancipation numérique. En 2018, un financement de la fondation AFNIC nous permet de rassembler des ressources existantes et d’en créer de nouvelles pour les organiser en un séquençage pédagogique.

Seulement voilà, en plus de la loi de Murphy qui génère des retards, il faut bien avouer que c’est notre premier module de notre premier MOOC. Il nous a donc fallu du temps et des expérimentations (et quelques errements…) avant de parvenir au résultat que nous avons mis en ligne sur notre plateforme Moodle.

C’est donc avec beaucoup de modestie (et d’enthousiasme !) que nous vous présentons ce premier module, co-conçu avec la Ligue de l’Enseignement, que vous pouvez parcourir sur mooc.chatons.org.

Décrire le monde numérique d’aujourd’hui, sans drama ni paillettes

Intitulé « Internet, pourquoi et comment reprendre le contrôle », ce premier module se donne pour objectif de permettre à chacun⋅e d’entre nous de devenir des acteurs et actrices d’un Internet « bien commun », respectueux de l’individu et du collectif.

Pour être en capacité d’agir, nous pensons qu’il faut d’abord avoir une vision claire du monde sur lequel on veut agir. Chacune des trois séquences de ce premier module cherche à nous dépeindre comment le paysage numérique actuel s’est construit et où sont nos espaces d’action.

Pour le plaisir, voici la première vidéo de ce MOOC

La première séquence, « Internet, pourquoi et comment », revient en 4 leçons aux sources de notre monde numérique, de la création d’Internet aux problèmes posés par les réseaux sociaux et plateformes.

La séquence suivante, intitulée « Les GAFAM, c’est quoi ? Et en quoi c’est un problème ? » essaie en cinq leçons de dresser un portrait sans fard des géants du Web, de leur domination sur notre société et du système qui les porte : le capitalisme de surveillance.

Enfin, la séquence « C’est quoi les solutions ? » cherche à expliquer en cinq leçons les leviers d’action qui peuvent nous permettre de changer le paysage numérique, de sortir du rôle de consommateurs isolés et de créer des communautés d’acteurs.

Un module accessible à toutes, à tous, sans expertise requise

Le cours est déjà ouvert, et chacun·e peut y participer quand bon lui semble : il n’y a pas de période d’inscription à respecter. Le maître-mot, ici, c’est l’autonomie. Nous voulons laisser aux apprenant·es un maximum de libertés dans leur parcours pédagogique, quitte à ne pas mettre en place de système de certification.

Ainsi, les contenus pédagogiques ont été pensés pour être accessibles à toute personne voulant découvrir le cours, quel que soit son niveau de connaissances sur le numérique. Ni Framasoft, ni la Ligue de l’Enseignement n’assureront d’accompagnement pédagogique contraint à un calendrier : chacune et chacun peut suivre les leçons à son rythme, et gérer son temps consacré à ce MOOC.

Cliquez sur le panneau pour aller découvrir la plateforme mooc.chatons.org et vous inscrire au premier module (en construction).

Pour faciliter cette auto-gestion, chacune des séquences pédagogiques est accompagnée d’un questionnaire à choix multiples. Ainsi, chaque apprenant·e pourra auto-évaluer les connaissances acquises. Par ailleurs l’ensemble du module est accompagné d’un glossaire (pour se remettre en tête les termes et personnes-clés) ainsi que d’un forum d’entraide (où, par contre, nous essayerons d’être régulièrement présent·es).

Il est possible d’accéder aux contenus sans inscription, afin de pouvoir les partager librement. Nous vous conseillons cependant de vous créer un compte (c’est gratuit aussi), ce qui vous permettra justement de bénéficier de ces fonctionnalités avancées :

 

  • accès aux exercices d’autoévaluation avec les QCM ;
  • possibilité de suivre l’avancement de votre parcours de formation (pour reprendre une leçon là où vous vous étiez arrêté ou pour suivre vos résultats aux évaluations) ;
  • possibilité de gagner des points d’expérience au fur et à mesure de la réalisation du module ;
  • recevoir un badge en fin de parcours pédagogique, indiquant que vous avez bien réalisé l’ensemble du module ;
  • accès au forum d’entraide ;
  • accès aux annonces spécifiques du site (nouveautés, alertes, etc.).

 

Comme un logiciel libre, ce MOOC va évoluer

Comme d’habitude avec Framasoft, et en accord avec la Ligue de l’Enseignement, tous les contenus créés pour ce MOOC sont placés sous licence libre CC-By-SA (certaines images et vidéos sont issues de sites tiers, et signalées comme telles). Car nous espérons bien qu’il va évoluer, notamment grâce aux contributions et retours sur le forum d’entraide, ainsi qu’avec les apports des membres du collectif CHATONS.

Programme de la deuxième séquence de ce premier module.

Il faut donc voir ce MOOC comme un commun, organique, vivant : il grandit si l’on en prend soin. S’il manque des ressources, si un exercice est à côté de la plaque, si une leçon est trop longue, nous vous invitons à partager votre avis sur le forum d’entraide et à contribuer (comme pour un logiciel libre, tiens !).

Chez Framasoft, nous sommes bien conscient·es de ne pas avoir la science infuse. Il est donc très important que quiconque puisse remettre en question nos choix dans la forme comme dans le fond de ce MOOC. Si vous prenez le temps de rédiger un retour sur le forum d’entraide, vous nous apporterez une précieuse contribution. C’est la première fois que nous réalisons un tel contenu, nous avons donc beaucoup à apprendre !

C’est un petit pas pour les MOOC, mais un grand pas dans Contributopia

Pour l’instant, les modules suivants (sur la structuration et l’animation communautaire d’un membre de CHATONS d’une part, et sur la gestion de l’infrastructure technique informatique d’autre part) ne sont pas financés. Nous n’avons donc pas prévu de les faire en 2020. C’est aussi une chance : il nous faut attendre de voir comment sera reçu ce premier MOOC, afin de tirer les leçons de cette expérience.

Monde de l’éducation Populaire dans Contributopia.
Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Cependant, s’il y a de la demande (et des moyens) pour que l’on poursuive cette aventure, nous pourrons tenter le coup à partir de 2021… Car nous n’avons pas oublié que, dans notre feuille de route Contributopia, il y a le projet fou d’une Université Populaire du Libre, Ouverte, Autonome et Décentralisée (« UPLOAD »)…

Si la route vers cette UPLOAD est encore longue, la voie est libre… et un des premiers pas est certainement la sortie de ce premier module du MOOC CHATONS. À vous de le partager !

Pour aller plus loin