Au revoir Monsieur Slashdot et merci !

L’une francophone, l’autre anglophone, deux sources principales d’informations ont accompagné ma découverte du logiciel libre, un peu avant le passage du troisième millénaire : LinuxFr et Slashdot (alias « /. »).

C’était eux qui m’apportaient alors des news fraîches et exclusives. Eux encore qui participaient à ma formation quand je parcourais les discussions dans les si nombreux commentaires.

Internet a évolué depuis, je pense notamment à l’arrivée des blogs puis des réseaux sociaux. Mais ces deux sites sont toujours là. L’un est resté bénévole et associatif. Mais l’autre s’est monté en société qui a connu depuis plusieurs repreneurs. À tel point que son créateur, Rob Malda (alias CmdrTaco), a fini avec le temps à ne plus s’y retrouver, jusqu’à passer définitivement la main l’année dernière.

Voici son témoignage.

PS : Le jour viendra lui aussi mais pour ne pas me voir rédiger le même billet dans un tout proche avenir merci de Soutenir Framasoft 😉

Redjar - CC by-sa

15 ans après mon premier article

15 Years After the First Post

Rob Malda – 3 octobre 2012 – Blog personnel
(Traduction : Naar & Amélie, Dryt, Gatitac, ttoine, ZeHiro, goofy, Penguin, audece, onoff_web, minimoy)

L’histoire de Slashdot est totalement indissociable de ma propre vie. Je l’ai créé alors que j’étais encore étudiant à l’université. Quand les gens normaux faisaient leurs devoirs ou s’adonnaient à des activités personnelles, je passais mes soirées à dessiner des icônes dans Gimp, à coder en Perl dans Vim ou à publier de nouvelles histoires à partager avec mes amis. Je n’oublierai jamais les nuits passées à scruter les dernières lignes du fichier access_log et à célébrer avec des amis comme Jeff, Dave, Nate et Kurt chaque connexion provenant de microsoft.com ou de mit.edu.

Slashdot a toujours absorbé tout mon temps, mais en grandissant il commença à engendrer des coûts réels : d’abord pour la bande passante puis pour les serveurs. Mes amis et moi-même avons fondé une société visant à couvrir ces frais pour simplement arriver à l’équilibre. Au moment où je me suis diplômé, l’entreprise ne pouvait employer qu’une seule personne à plein temps : moi. Je gagnais moins d’argent que j’aurais pu le faire autrement, mais là j’étais enfin libre de me consacrer à ce qui me passionnait le plus.

Le site a s’est développé, dépassant nos imaginations les plus folles. Rapidement, il connut une demi-douzaine d’employés mais notre petite entreprise ne pouvait plus faire face. Vendre Slashdot a été la bonne décision à ce moment-là : nous n’aurions pas pu survivre à la croissance ni aux années de vaches maigres après l’explosion de la bulle Internet. Cette décision non anodine allait nécessairement avoir des conséquences, mais elles n’ont pas été visibles au cours des premières années.

À la suite de la vente, nous avons connu un cycle ininterrompu d’années dorées : les nouveaux employés qui nous rejoignaient partageaient nos rêves. Il s’agissait de personnes qui comprenaient intuitivement ce qu’était Slashdot, ce qu’il signifiait, et à quel point il était important, car c’étaient aussi des lecteurs et utilisateurs du site. Beaucoup d’entre eux sont encore mes amis aujourd’hui. Ce sont des relations dont la valeur pour moi va bien au-delà de la sphère professionnelle.

J’ai eu alors la chance de parcourir le monde comme représentant d’une communauté en pleine croissance : Japon, Allemagne, Espagne, Australie. J’ai rencontré cette communauté en chair et en os et j’ai travaillé avec des personnes admirables. Nous participions à un projet très stimulant et mettions les utilisateurs au premier plan. Rien ne pouvait nous arrêter.

J’ai connu à travers Slashdot 14 années de tragédies : Columbine, le 11 septembre, le crash de la navette spatiale Columbia, Fukushima. Ces événements-là et tant d’autres sont à jamais associés à des pics de connexion sur les tchats entre les rédacteurs et modérateurs surexcités. La tristesse et la terreur n’empêchaient pas notre équipe de donner le meilleur d’elle-même en aidant des milliers de personnes à se connecter entre elles au moment où elles avaient le plus besoin.

Mais pour tous ces moments tristes, il y eut encore plus d’optimisme et de joie. D’innombrables avancées scientifiques, des lolcats et un flux incessant de nouvelles technologies et découvertes scientifiques en train de changer, généralement pour le meilleur, le monde autour de nous. Et je n’oublierai jamais la moiteur des mes mains alors que j’attendais fiévreusement une réponse de ma petite amie, à qui j’avais fait ma demande en mariage sur la page d’accueil de Slashdot. Tout ceci partagé avec des amis.

En 2007, je pris le plus long congé de toute ma carrière, et cela pour la meilleure des raisons. Pendant les deux semaines qui ont suivi la naissance de mon fils, je n’ai en effet mis en ligne aucune page de Slashdot. Quand j’y suis retourné, le site se portait comme un charme. Slashdot a célébré son dixième anniversaire et je comprenais pour la première fois qu’il pouvait tranquillement continuer sans moi…

Ce qui était bien, car le site était en déclin depuis quelques années. Les amis avaient été remplacés par des inconnus. Des décisions étaient prises par des gens qui, de plus en plus, n’étaient pas des utilisateurs directs du site. Ils voyaient Slashdot avant tout par la lorgnette du business : un compte de résultat, un rack de serveurs ou un nombre d’employés.

Avec le trafic qui déclinait, les défis techniques diminuaient également. La charge était rarement un problème. Le système de modération fonctionnait… tout simplement. Mais le code de la plateforme commençait à dater. Il n’était plus souple ni maintenable. Notre équipe s’était réduite… jusqu’à ce qu’il n’y reste plus qu’un seul technicien ! Notre capacité à livrer du code s’était évaporée. Le peu de temps de développement qui restait était bien trop souvent gaspillé dans des projets voués à l’échec par manque de compréhension des utilisateurs.

Au cours de ces dernières années, ces critiques à peine voilées ont lentement évolué vers de l’amertume. Il fut impossible, au bout d’un moment, de le cacher à mes amis, à ma famille, et enfin, même à mes collègues de travail. Ils l’avaient compris bien avant moi : je devais partir.

C’était il y a plus d’un an. Abandonner mon salaire me faisait peur, mais moins que quelque chose de plus important encore à mes yeux. Slashdot avait beau être devenu ce célèbre site pour geeks and nerds, il était avant tout pour moi mon site web personnel. Je l’avais toujours considéré comme mon chez moi sur Internet. Quand je suis parti, j’ai perdu le droit de continuer à y poster du contenu. Objectivement j’étais d’accord avec mes amis qui me disaient qu’une « rupture franche et nette » (NdT : The Clean Break) était meilleure pour moi… mais émotionnellement, je ressens toujours cette perte aujourd’hui. J’aime bien Twitter et Google+, mais j’aurai toujours l’impression de vivre dans la maison de quelqu’un d’autre.

Sans mon contrôle éditorial habituel, Slashdot m’a semblé souvent à côté de la plaque. J’ai fini par le lire uniquement via son flux RSS, où mon bien-aimé « News for nerds » devint juste un flux parmi d’autres. J’y parcourais de moins en moins d’articles. Parce que j’y trouvais de meilleures infos ailleurs mais aussi voire surtout par que venir sur le site me faisait tout de suite voir ses changements. Des trucs que probablement personne d’autre n’aurait remarqués du reste. Quelques pixels par ici, une formulation changée par là. Certaines modifications sont pertinentes… mais beaucoup ne le sont pas. Et ça me rend triste, même maintenant.

La bonne nouvelle pour moi, c’est que je n’avais pas été aussi heureux professionnellement parlant depuis des années. Mon travail aux WaPo Labs me rappelle les effervescentes premières années de Slashdot, quand tout paraissait important. Notre équipe semble toujours lire le même livre, même s’ils ne sont pas tous à la même page. Mon boulot me paraît rafraîchissant et motivant. Et le mieux dans tout ça, c’est que je peux enfin séparer mon « moi » de « mon travail » quand le besoin s’en fait sentir. Je peux m’en détacher et prendre du recul. Je peux être impartial, lucide et honnête comme je n’ai jamais pu le faire au milieu de la tempête Slashdot.

Il y a peu, Slashdot a été vendu à un nouveau poids lourd… mettant encore plus de distance entre moi et ma création. J’y ai toujours quelques amis mais la plupart me sont étrangers. Il m’arrive cependant de passer encore de temps en temps sur une page familière dont l’information me parle et se trouve enrichie et bonifiée par la discussion. Je me surprends alors à fermer les yeux en pensant qu’un bout de mon ADN est toujours là-bas, là-dedans.

Je n’arrive toujours pas penser à l’histoire de Slashdot sans la lier à celle de ma propre vie. Mais après un an de séparation, j’ai fait mon deuil et compris que nous étions juste un chapitre dans l’histoire de nos vies respectives.

Mais quel putain de bon chapitre cela a été !

Crédit photo : Redjar (Creative Commons By-Sa)




Point de réseau social sérieux sans lolcats !

Framasoft harcèle (et parfois excède) ses followers Twitter actuellement avec ses « lolcats de soutien » (, , , , , , , , , ou encore ), ce qui ne nous empêche de nous penser sérieux et appliqués dans notre démarche de promotion et diffusion du Libre.

L’idée générale de la traduction ci-dessous c’est que si vous voulez créer un véritable réseau social au sein de votre structure alors il vous faudra aussi accepter ce qui n’a rien à voir avec votre structure. C’est le coté social du réseau social et il est beaucoup moins futile qu’on peut à priori le penser car c’est souvent un préalable à une bonne ambiance d’où pourront émerger des choses bien pertinentes pour votre structure.

Michellelevine - CC by-sa

Si vous voulez une culture vraiment collaborative, vous devez aussi accepter les LOLCats

If you want a culture of collaboration, you need to accept the LOLCats too

Steve Radick – 11 janvier 2012 – OpenSource.com
(Traduction : KoS, Maïeul, @ali0une, greygjhart)

Même lorsque la presse était sacrée, nous avons eu des romans érotiques 150 ans avant d’avoir des journaux scientifiques
Clay Shirky (Conférence TED Cannes juin 2010)

C’est une de mes citations favorites de l’une de mes personnalités favorites d’Internet, Clay Shirky. Je l’aime particulièrement parcequ’elle illustre selon moi l’époque où certaines organisations se trouvent en essayant d’intégrer les médias sociaux en leur sein.

Avant que les wikis ne soient utilisés par les communautés de coopération scientifique, les personnes s’y inscrivaient pour désigner leur équipe de foot favorite. Avant que l’intranet de ma propre entreprise ne remporte un prix, nous avions des personnes qui nous expliquaient comment elles étaient heureuse de se montrer (presque) nues sur leurs profils. Avant que nos dirigeants commencent à utiliser Yammer pour communiquer avec la base, des groupes de fanas d’Android ou de fitness s’étaient déjà constitués. Je vous parle de cela parce que si vous décidez un jour d’intégrer un média social interne à votre organisation, vous devrez préparer vous-même, vos collègues, vos patrons, votre haute direction à cette vérité inexorable.

Si vous paniquez en voyant tout ça sur votre intranet, vous n’êtes probablement pas prêt pour un intranet social.

Si vous voulez créer une culture dynamique de collaboration, vous devez accepter les photos de LOLCats, les sujets parlant de foot, les débats sans fin sur Apple et Andoid, et même les critiques sur la politique de l’entreprise.

Acceptez et intégrez ce fait maintenant et vos communautés auront de bien meilleurs chances de succès. Ou, continuez à penser que de telles choses sont une perte de temps et ne sont pas professionnelles, et soyez prêt à payer beaucoup d’argent pour un système que personne n’utilise à moins d’être forcé à le faire (et ils l’utiliseront alors mal).

Malheureusement, « social » à l’air d’être devenu un gros mot en entreprise, associé à l’image d’employés perdant leur temps sur Facebook, parlant à leur petit ami au téléphone, ou prenant une pause déjeuner de trois heures. Acceptons d’arrêter d’essayer d’enlever le social d’un réseau social. Les interactions sociales ne doivent pas seulement être acceptées, elles doivent même être encouragées et récompensées. Shirky explique pourquoi dans cette conférence TED (à partir de 5 minutes 33 secondes).

Shirky explique :

Le fossé est entre faire quelque chose et ne rien faire. Et quelqu’un qui fait des LOLcat a déjà franchi ce fossé. Oui, il est tentant de vouloir obtenir des projets aussi noble que Ushahidi sans les LOLCats, d’avoir les choses sérieuses sans les choses futiles. Mais l’abondance de médias ne marche pas comme ça. La liberté d’expérimenter, c’est aussi voire surtout la liberté d’experimenter n’importe quoi.

Il y a cette tendance de la part des dirigeants à vouloir supprimer (voire sanctionner) les blogs qui évoqueraient des solutions de contournement de la politique d’entreprise et les pages wiki détaillant les meilleurs restaurants pour déjeuner. Ils veulent aller droit au but qui serait la co-création de méthodologies avec des équipes inter-fonctionnelles et des initiatives de crowdsourcing qui font économiser des millions de dollars !

Ça ne fonctionne pas pas comme ça. Les communautés collaboratives ne commencent pas à innover juste parce que vous mettez en place un site web et envoyez un mémo. Souvenons-nous que les nouvelles érotiques sont apparues bien avant les journaux scientifiques. Il y aura donc des LOLCats avant des Ushahidi. Vous devez accepter le fait que vos employés parleront de sport et de vacances avant d’être prêts à utiliser l’outil pour procéder à un « vrai » travail.

C’est intuitivement du bon sens. N’est-il pas plus facile de publier votre bon plan du midi plutôt que d’envoyer ce rapport sur lequel vous travaillez depuis trois semaines ? Si quelqu’un n’apprécie pas votre restaurant préféré, quelle importance ? En revanche si quelqu’un critique le rapport que vous avez passé des semaines à écrire, c’est un peu plus intimidant. Une fois que vous avez franchi ce seuil, ce seuil entre ne rien faire et faire quelque chose, c’est plus facile alors de monter les marches. Une fois la glace rompue avec la mention de votre passion pour la gastronomie chinoise, il vous sera soudainement plus facile de participer à la conversation sur tel projet important de votre entreprise. Peut-être même que vous accepterez d’envoyer une partie coriace du rapport en demandant aide et éclaircissement aux autres. Sous cet angle, même les publications les plus stupides et les conversations les plus insignifiantes ont de la valeur, parce qu’elle n’engage qu’un risque mineur pour les gens à se jeter à l’eau et faire le premier pas.

Cela peut prendre du temps pour que les employés se sentent vraiment à l’aise avec l’utilisation des réseaux sociaux au travail. En lui laissant ainsi la possibilité de s’épanouir et d’apprendre ensemble à son propre rythme, votre communauté supportera bien mieux les changements d’échelle et durera bien plus longtemps.

Alors acceptez les LOLCats, les délires footballistiques, les discussions sur la bouffe, et les avatars personnalisés : au moins vos employés créeront et partageront quelque chose avec quelqu’un d’autre. Parce que ce qui viendra après ces stupides discussions mènera à du lien, des relations, des questions, des réponses, et finalement, à des innovations très créatives, à des produits et des solutions qui vous feront économiser du temps et (beaucoup) d’argent. Et vous serez récompensés pour avoir participé à rendre votre entreprise humaine et chaleureuse.

Crédit photo : Michellelevine (Creative Commons By-Sa)




Entretien avec Sésamath : au revoir Flash, bonjour HTML5, JavaScript (et LaTeX)

L’association Sésamath existe depuis 10 ans maintenant.

10 ans de projets au service des mathématiques dans l’éducation. 10 ans également, et par effet de bord, au service du logiciel libre, de par les choix des outils et des licences adoptées ainsi que la manière toute collaborative de travailler.

Avoir, entre autres, réussi à couvrir tout le collège avec des manuels scolaires libres qui représentent aujourd’hui près de 20% du marché, ça n’est pas rien ! (et c’est même du jamais vu au niveau mondial !)

L’occasion de faire le point avec Sébastien Hache, salarié et co-fondateur de l’association, qui nous annonce de bien bonnes et libres nouvelles.

Sésamath - Flyer

En quelques mots, comment se porte Sésamath ?

Sébastien Hache : Sésamath se porte plutôt bien. L’envie et la passion sont toujours là, depuis maintenant plus de 10 ans. De nouveaux membres viennent régulièrement renforcer une équipe globalement stable et de plus en plus expérimentée. La grosse difficulté est de parvenir à maintenir les ressources existantes (de plus en plus utilisées : plus d’un million d’élèves inscrits à Labomep par exemple l’an dernier) tout en continuant à faire évoluer les outils et à élargir le champ : c’est un défi compliqué mais c’est aussi passionnant.

Que pensez-vous de la récente circulaire sur l’usage du logiciel libre dans l’administration ?

Nous pensons que c’est une très bonne chose et que cela constitue un bon élément d’appui pour tous ceux qui veulent promouvoir les ressources et logiciels libres dans l’enseignement.

Que pensez-vous de l’opération Open TextBook de l’État californien ?

Plus il y aura de ressources éducatives libres et ouvertes, et mieux ce sera !

Que pensez-vous de la récente introduction de l’option Informatique et Sciences du Numérique en Terminale S ? Pensez-vous vous y impliquer de près ou de loin ?

Sesamath a fait le choix de ne pas se positionner sur des sujets autres que ceux inscrits dans ses statuts. Les objectifs de Sesamath nous occupent déjà largement.

Alors, justement, Sésamath a annoncé des nouveaux projets au lycée et dans le primaire. Peux-tu nous en dire plus ?

Pour l’instant, l’essentiel des projets de Sésamath se concentrait sur le collège, même si depuis longtemps, en particulier au niveau des liaisons inter-cycles, des ressources collège étaient utilisées en CM2 ou en seconde. C’est donc assez naturellement que nous avons lancé des appels (toujours en vigueur pour ceux que ça intéresse) dans ces deux directions pour amorcer des projets éditoriaux. En effet, l’expérience de Sésamath au collège a montré que le travail collaboratif autour d’ouvrages destinés à être publiés sur papier (même s’ils ont nativement une version numérique) était un bon catalyseur pour créer ensuite d’autres ressources numériques : un peu comme si l’ouvrage éditorialisé servait de fil conducteur pour tout le reste. Paradoxalement, le papier est aussi une bonne façon de faire connaître le numérique.

En CM2, une équipe composée de professeurs des écoles et de professeurs de collège travaille actuellement à un cahier d’exercices sur le modèle des cahiers d’exercices de collège (afin d’avoir une continuité dans la ressource). Ce cahier est destiné à être sous licence libre (CC By-Sa) : pour l’instant, durant la phase de conception, seuls les enseignants inscrits à Sésaprof peuvent y avoir accès mais quand il sera achevé (début 2013) il sera intégralement téléchargeable pour tous aux formats ODT et PDF. En même temps, nous concevons le cahier numérique associé. Une autre équipe construit en parallèle le futur manuel Sésamath 6e, qui est très largement modifié par rapport au précédent en partie justement pour tenir compte de la liaison.

En seconde, une équipe composée de professeurs de collège et de lycée travaille sur un manuel complet. Ce manuel est écrit en LaTex. Il sera de la même façon publié sous licence libre et accompagné d’un manuel numérique gratuit. Le premier chapitre sera très prochainement mis en ligne. Beaucoup de lecteurs de ce blog seront heureux de voir que Sésamath produit collaborativement un ouvrage en Latex (c’était déjà le cas pour un ouvrage d’exercices en classes préparatoires) !

Pour résumer, nous travaillons cette année sur 3 ouvrages en même temps. C’est possible grâce à l’expérience de l’association et de ses membres sur la création collaborative de manuels scolaire (organisation, outils…), mais aussi les licences libres et les formats ouverts qui permettent ce mode de création et motive les auteurs.

En parlant de format ouvert, il se dit que Sésamath est en train d’abandonner Flash. Qu’en est-il ?

Effectivement, une grande partie des ressources interactives de Sésamath (dont l’exerciseur Mathenpoche) a été développé en Flash. Il y a déjà eu pas mal de discussions sur ce point : avec le recul, il n’y a sans doute rien à regretter, mais on se rend compte actuellement que cela nous mène à une impasse. Avant d’être technique, l’impasse est d’abord collaborative : nous n’avons pas réussi à former suffisamment d’enseignants à la programmation en Flash et nous nous sommes coupés d’une communauté de développeurs dont nous avons grand besoin aujourd’hui.

C’est pourquoi, Sésamath s’est donné les moyens, depuis plus d’un an maintenant, de créer un nouveau modèle d’activités intéractives : Il s’agit du projet J3P basé sur les technologies web modernes (html5/javascript). D’une certaine façon, Sésamath a terminé sa mue complète vers le libre (je me permets de remercier tous ceux qui ont contribué à ça, de façon souvent très intelligente et patiente, et parmi ceux-là évidemment toute l’équipe de Framasoft). Mais l’intérêt de J3P ne réside pas que dans son format : il ouvre aussi des pistes importantes du point de vue pédagogique. L’idée est de pouvoir créer des ressources de plus en plus adaptées aux difficultés de chaque élève en leur proposant des exercices où les réponses qu’ils donnent conditionnent les questions suivantes, pour tenter de s’adapter à la nature de leurs difficultés éventuelles.

Le projet J3P veut donc offrir aux enseignants un moyen de concevoir de tels exercices. L’enseignant pourra construire ou paramétrer le graphe de chaque exercice. Ce graphe décrit, suivant les réponses de l’élève à chaque étape, les différents parcours possibles parmi les sections qui composent l’exercice. Le projet J3P est sous licence GPL.

Toutes les bonnes volontés sont les bienvenues (ne pas hésiter à nous contacter.

Crédit illustration : Brochure Sésamath




Et les manuels universitaires libres devinrent réalité en Californie

Grande et bonne nouvelle, la Californie est allé au bout de sa réflexion sur l’opportunité des manuels scolaires libres !

C’est de notre point de vue bon sens et évidence mais ça l’est moins quand on pense à la situation dont on a hérité, avec d’énormes résistances de la part de ceux qui éditaient précédemment (et privativement) ces manuels.

Au passage vous remarquerez le choix logique et pertinent de la licence, la Creative Commons la plus dépouillée d’entre toutes : la CC By. Cela fera peut-être réfléchir ceux qui pensent encore que la clause non commerciale NC et/ou non modifiable ND sont bonnes quand il s’agit d’éducation…

Et en France, me direz-vous ? Cela fait six ans (je crois) que nos amis de l’association Sésamath ont publié leur premier manuel libre pour la classe de Cinquième en mathématiques. De véritables pionniers qui depuis ont couvert tout le collège et lorgnent désormais aussi bien sur le primaire que vers le lycée.

Six ans que l’Institution avait en son sein un exemple à soutenir, mettre en avant et montrer aux autres disciplines pour leur emboîter le pas. Pour des raisons que je ne m’explique pas (ou trop bien), elle n’en fit rien ! Il est grand temps de rectifier le tir sinon nous les derniers seront les premiers et nous aurons une fois de plus perdu un temps précieux.

Il est véritablement grand temps ! (et sous licence libre s’il vous plaît !)

L’illustration ci-dessous et un extrait d’une infographie qui résume bien les choses (et les gains) en procédant ainsi.

20mm.org - extrait- CC by

La Californie entérine officiellement son projet de loi inédit sur les manuels scolaires libres

California passes groundbreaking open textbook legislation

Timothy Vollmer – 27 septembre 2012 – CC Blog
(Traduction Framalang : Cyrille L., ehsavoie, M0tty, Rouage, lgodard, Ag3m)

C’est officiel. En Californie, le Gouverneur Jerry Brown a signé deux projets de lois (SB1052 et SB1053) qui permettront la création de manuels numériques sous licence libre pour les cinquante cours les plus populaires des universités de Californie (cf cette vidéo). Ce projet de loi a été proposé par le président du Sénat par intérim Darrell Steinberg et est passé au Sénat et à l’Assemblée de Californie fin août.

Un élément essentiel de la législation Californienne est que les manuels ainsi créés seront disponibles sous licence Creative Commons Paternité (CC-BY) :

Le manuel et d’autres matériels de cours sont placés sous la licence Creative Commons Paternité qui autorise quiconque à utiliser, distribuer, et créer des travaux dérivés basés sur ce matériel numérique tout en permettant aux auteurs ou aux créateurs d’être crédités pour leurs travaux.

La licence CC BY permet aux professeurs d’adapter le contenu des manuels aux besoins des étudiants, aux sociétés commerciales de se servir de ces ressources et d’en créer de nouvelles à partir des premières (comme par exemple des tutoriels vidéos), et ouvre des portes à la collaboration et à l’amélioration de ce matériel de cours.

Pour les étudiants, l’accès à des manuels abordables est extrêmement important, sachant que le coût de ces manuels augmente quatre fois plus vite que l’inflation, dépassant même les frais d’inscription dans certaines universités. Ainsi, en plus de rendre le manuel numérique disponible librement et gratuitement aux élèves, la loi requiert que les copies imprimées du manuel ne dépasse pas 20$.

C’est une grande victoire pour la Californie, et un exemple bien accueilli de politiques ouvertes qui visent à appuyer les licences libres pour économiser l’argent des familles californiennes et soutenir les besoins des professeurs et des élèves.




Quand Linus Torvalds se lâche sur Linux et Git

Vous prenez tranquillement un café à Portland, dans l’Oregon, lorsque tout d’un coup vous vous apercevez que c’est Linus Torvalds en personne qui se trouve à la table d’à côté.

Comme vous êtes 1. développeur et 2. pas timide, vous l’accostez gentiment et lui demandez s’il accepterait de répondre à quelques questions.

Et l’on découvre alors un Torvalds toujours aussi franc dans ses réponses mais un peu désabusé voire aigri…

Murray Wayper - CC by-nc-nd

Linus Torvalds se lâche sur Linux et Git

Linus Torvalds goes off on Linux and Git

Greg Jorgensen – 25 septembre 2012 – Typical Programmer
(Traduction : lgnap, Cyrille L., greygjhart, Gatitac, @adericbourg, lgodard, Penguin, Diwann, Florck + Anonymes)

J’étais dans un café à Portland dans l’Oregon quand j’ai remarqué Linus Torvalds assis seul à une table. J’ai demandé au créateur du noyau Linux et logiciel de gestion de versions Git si je pouvais me joindre à lui. Pendant 15 minutes, nous avons parlé de programmation et de programmeurs.

Typical Programmer Linux a été publié pour la première fois il y a maintenant 20 ans. C’est maintenant l’un des systèmes d’exploitation les plus répandus. Quel effet cela vous fait-il ?

Linus Torvalds Franchement, je suis très étonné. J’ai lancé ce projet comme un hobby et je n’en attendais pas grand chose. Au fur et à mesure que l’intérêt pour Linux croissait, j’ai observé qu’il était utilisé principalement par les développeurs purs et durs et les geeks pour se différencier de la foule. Il y a beaucoup de personnes dans l’industrie logicielle qui aiment montrer qu’ils utilisent le logiciel ou le langage de programmation le plus récent. C’est une question de statut, un peu comme les personnes qui parlent de groupes de musique indépendants ou de films étrangers. Que ce soit Linux, Haskell, MongoDB ou n’importe quoi d’autre, tout groupe comporte au moins une personne qui passe son temps à parler de fermetures ou à expliquer comment il est en train de migrer son blog vers Node.js pour qui’il puisse supporter une augmentation de la charge.

TP Linux est maintenant grand public. Est-ce devenu trop facile ?

Linus Je ne pense pas que ce soit plus facile, mais il y a beaucoup plus de ressources maintenant. Dans la plupart des cas, Linux est plus difficile à comprendre et à utiliser que Windows ou MacOS. Les personnes qui l’utilisent pour les serveurs avaient déjà l’habitude d’Unix, le changement n’était donc pas très important pour eux. Ils connaissaient les conflits de mises à jour et de dépendances et le cauchemar des bibliothèques partagées. Sur les postes de travail, je pense que les gens s’en sont désintéressés après quelques années.

TP Une perte d’intérêt ? de motivation ?

Linus Personne ne s’emballe plus pour les terminaux à fenêtre transparente , pour les palettes de couleur de Kate ou pour être le premier à expliquer sur Slashdot comment faire marcher telle mystérieuse carte son. Ça, c’était ce qui faisait passer les précurseurs de Windows à Linux. Maintenant Linux ressemble à Windows. Je peux installer Ubuntu sur le portable de ma grand-mère et elle ne voit même pas la différence tant que l’icône Facebook est sur son écran.

TP Et au sujet du nombre de distributions ? On dirait qu’il y a plus de distributions que d’utilisateurs finaux sous Linux.

Linus Il y a plus de distributions Linux sur un seul disque Linux Format que toutes les versions Windows réunies. Mais elles sont toutes à peu près similaires. Ce sont toutes à peu près la même chose réchauffée. Seuls des noms plus ou moins ingénieux ou drôles les distinguent les unes des autres. À partir du moment où un livre Linux pour les nuls a été publié, j’ai commencé à m’en désintéresser.

TP Vous avez publié le système de gestion de versions Git il y a moins de dix ans. Git est rapidement devenu à la mode et semble être majoritaire parmi les systèmes de gestion de versions, ou au moins celui que les gens recommandent le plus sur Reddit et HackerNews.

Linus Git a repris le relais parce que Linux commençait à ne plus trop séparer les gourous des ignorants. Je ne m’attendais pas vraiment à ce que quiconque l’utilise parce que c’est tellement dur à utiliser, mais finalement cela s’est révélé être son principal attrait. Aucune technologie ne saura jamais être trop compliquée ou trop obscure pour les barbus à t-shirt noirs.

TP Je trouvais déjà que Subversion était difficile d’accès. Je ne me suis pas encore cassé la tête avec Git.

Linus Vous allez passer beaucoup de temps à essayer de vous familiariser avec, tout en étant ridiculisé par les experts sur GitHub et ailleurs. J’ai appris qu’aucune toolchain n’est jamais trop compliquée car le besoin de prestige et la sécurité de l’emploi sont trop forts. Au bout du compte, vous allez vous aussi découvrir l’Easter egg dans Git : toutes les opérations significatives peuvent être exprimées à l’aide la commande rebase.

TP Que pensez-vous de GitHub du coup ?

Linus Ça a commencé comme un cocon, un sorte de cimetière pour projets non maintenus ou inutiles, et c’est toujours la majorité de ce qui y est hébergé. Mais c’est devenu aujourd’hui une sorte de grand World of Warcraft pour développeurs, où ils sont notés en fonction de leurs contributions et des projets sur lesquels ils ont les privilèges trunk. J’ai entendu dire que des boîtes informatiques recrutaient désormais à partir de votre réputation GitHub, alors j’imagine que si vous ne committez rien vous n’obtiendrez plus de boulot dans les start-ups les plus cools. Le bon vieux temps où l’on faisait passer le test du FizzBuzz et où on demandait comment faire pour déplacer le mont Fuji pendant les entretiens d’embauche est révolu.

TP Vous semblez un peu aigri au sujet de Git.

Linus Vous verrez, les premiers livres Git pour les nuls et Git Visual Quickstart vont paraître dans quelques mois et, en ce qui me concerne, ce sera le début de la fin. Ces livres marquent la fin d’une certaine expertise sur Git et de la réputation sur GitHub comme indicateurs fiables de la qualité du geek. Une fois qu’une technologie est adoptée par la masse, les geeks les plus geeks la délaissent au profit de quelque chose de plus ésotérique encore. Regardez ce qui est arrivé à Ruby on Rails. Les gens qui se forment à partir de tutoriels, de « todo lists » Rails, n’ont même jamais entendu parler de DHH.

TP Et pour la suite ?

Linus Je ne suis pas sûr. Difficile de prédire la prochaine mode technologique. J’ai travaillé sur un éditeur de texte que j’utilise moi-même, si compliqué qu’il ferait passer Vim pour Notepad, peut-être que je le publierai un de ces quatre.

Linus a terminé son café et a dû partir. J’ai apprécié le temps qu’il m’a consacré et de m’avoir fait voir Linux et Git sous un jour nouveau.

Crédit photo : Murray Wayper (Creative Commons By-Nc-Nd)

NdT : Oups, j’oubliais, Greg Jorgensen a publié son billet sous le tag « satire ». Je dis ça, je dis rien… Ça vous apprendra à ne pas lire jusqu’au bout 😛




12 bonnes raisons d’être un administrateur systèmes fainéant

On l’appelle sysadmin, adminsys ou plus correctement administrateur systèmes. Il a la lourde charge de s’occuper des serveurs d’une organisation.

Si vous avez l’impression qu’il bulle toute la journée, ne le critiquez pas ! Vous êtes en réalité en face d’un excellent administrateur systèmes 🙂

Anita Hart - CC by-sa

12 raisons pour lesquelles tous les administrateurs système devraient être paresseux

12 Reasons Why Every Linux System Administrator Should be Lazy

Ramesh Natarajan – 12 juillet 2011 – GeekStuff.com
(Traduction : Husi10, Ag3m, Gatitac, Kathryl, Thur, M0tty, Ag3m, Dominique, minimoy)

Un administrateur systèmes fainéant est un bon administrateur systèmes
Anonyme

Le travail d’un administrateur systèmes n’est généralement pas visible des autres services informatiques ou par les utilisateurs finaux. La plupart du temps, ils regardent les administrateurs systèmes en se demandant pourquoi ils n’ont pas l’air de faire grand chose.

Quand vous voyez un administrateur systèmes qui est tout le temps en train de courir dans tous les sens, à essayer d’éteindre le feu, en prise constante avec des problèmes de production, vous pourriez penser qu’il travaille dur et fait vraiment bien son boulot. Mais en réalité il ne fait pas bien son job.

Quand vous voyez un administrateur système (UNIX/Linux, base de données, réseau), qui apparemment n’a pas l’air de se fouler beaucoup au bureau, semble toujours relax et n’a pas l’air d’avoir une activité visible, vous pouvez être certain qu’il fait bien son job.

Voici 12 raisons qui font d’un administrateur systèmes paresseux le meilleur des administrateurs systèmes :

1. Qui est le chef ? La principale raison pour laquelle un administrateur systèmes paresseux est le meilleur administrateur système possible tient à son attitude. Ils ne voient pas tout à fait les machines comme les autres services informatiques. Il y a une différence entre les développeurs et les administrateurs systèmes. Les développeurs pensent qu’ils sont là pour servir les machines en écrivant du code. Il n’y a rien de mal dans cette démarche puisque les développeurs prennent beaucoup de plaisir à écrire du code. Mais les administrateurs systèmes pensent tout autrement. Ils pensent au contraire que les machines sont à leur service. Tout ce qu’ils ont à faire, c’est nourrir la machine, la rendre heureuse et laisser la machine faire tout le dur labeur pendant qu’ils se relaxent et paressent. La première étape pour devenir un administrateur systèmes paresseux demande parfois un léger changement d’attitude : il s’agit de faire savoir à la machine que vous êtes le patron.

2. Écrire des scripts pour des tâches récurrentes. Être fainéant, c’est être malin. Un administrateur systèmes intelligent est passé maître dans tous les langages de script (bash, awk, sed, etc.). Chaque fois qu’il sera obligé de faire une tâche, et s’il y a une vague possibilité qu’on puisse avoir besoin de ce même travail plus tard, il écrira un script pour faire le boulot. Ainsi, lorsqu’on lui demandera plus tard de refaire le même travail, il n’aura pas à réfléchir ; il aura simplement à exécuter le script puis à retourner paresser.

3. Tout sauvegarder. Être fainéant signifie tout sauvegarder. Un administrateur systèmes paresseux sait qu’il doit donner un peu de temps dans la création de processus de sauvegarde, et donc écrire des scripts de sauvegarde pour toutes les applications et tous les systèmes critiques. Quand l’espace disque n’est pas un problème, il planifie la sauvegarde pour toutes les applications même si elles ne sont pas critiques. Ainsi, dès que quelque chose se passe mal, il ne se met pas à transpirer de stress, il a simplement besoin de restaurer une sauvegarde pour pouvoir retourner aux trucs paisibles qu’il faisait juste avant.

4. Prévoir un plan de reprise d’activité. Les administrateurs systèmes n’aiment pas avoir à gesticuler dans tous les sens en cas d’urgence. Quand tout se passe bien, ils prennent un peu de temps pour créer un plan de reprise d’activité et de récupération de données.Comme ça, quand les choses tournent mal, ils peuvent le suivre, faire revenir rapidement les choses à la normale, puis retourner encore à leur rythme d’administrateur paresseux.

5. Configurer un sytème à haute redondance. Les administrateurs sysèmes fainéants n’aiment pas être réveillés au beau milieu de la nuit à cause d’une bête panne materielle. Ils font donc en sorte que les periphériques soient hautement redondants. Cela inclut à la fois le matériel et les logiciels : ils ont deux cartes réseaux configurées, une double alimentation, deux disques durs, bref tout en double. Comme ça, si l’un des équipements vient à flancher, le système fonctionnera toujours et notre fainéant d’administrateur pourra se concentrer à la réparation de l’équipement défaillant lorsqu’il se lèvera le matin, à la même heure que tous les autres matins.

6. Laisser de la place pour une croissance inattendue. Un administrateur systèmes paresseux ne permet jamais à son système de tourner à plein régime. Il garde toujours de la place libre en cas d’imprévus. Il s’assure que le système ait assez de CPU, ainsi que de l’espace disque et de la RAM disponibles. Lorsque le service commercial décide de larguer des tonnes de données pendant la nuit, il n’a pas besoin de réfléchir à la façon de gérer cette croissance inattendue.

7. Être proactif. Être paresseux ne veut pas dire que vous devez juste vous assoir et vous tourner les pouces. Être paresseux signifie être proactif. Les administrateurs systèmes paresseux détestent être réactifs. Ils anticipent toujours les difficultés et l’expansion. Lorsqu’ils ont du temps libre à disposition (et ils en ont donc beaucoup), ils gardent un œil attentif sur les projets afin de gérer la future croissance et éviter que des problèmes non prévus adviennent.

8. Adorer les raccourcis clavier. L’administrateur systèmes fainéants connaît tous les raccourcis clavier de toutes ses applications favorites. S’il passe quotidiennement un temps significatif sur une application, la première chose qu’il fait est de maîtriser les raccourcis clavier de cette application. Il tient à passer le moins de temps possible sur l’application pour parvenir à ses fins, et ainsi redevenir paresseux.

9. Passer maître de la ligne de commande. Tous les administrateurs systèmes paresseux sont des pros des lignes de commande. Cela s’applique aux administrateurs systèmes Linux, aux administrateurs de bases de données, aux administrateurs réseaux, etc. Si vous voyez un administrareur systèmes lancer une interface graphique alors que la même tâche peut être effectuée en ligne de commande, alors vous savez qu’il n’est pas un administrateur systèmes paresseux. Il y a deux raisons pour lesquelles les administrateurs systèmes paresseux adorent les lignes de commande. D’une, il peut faire les choses rapidement en ligne de commande. Et d’autre, ça lui donne l’impression que c’est lui le patron et non pas le système. Quand vous utilisez les lignes de commande, vous avez le contrôle, vous savez exactement ce que vous voulez faire. Quand vous utilisez une interface graphique, vous êtes à sa merci sans être sûr à 100% de ce qu’il va produire après votre clic.

10. Apprendre de ses erreurs. Les administrateurs systèmes fainéants n’aiment jamais faire les mêmes erreurs deux fois. Ils détestent travailler sur des problèmes imprévus, mais quand ils apparaissent, ils travaillent à le corriger, réfléchissent à comment cela est arrivé, et mettent immédiatement le nécessaire en place pour que cela n’arrive pas de nouveau. Travailler sur le même problème deux fois est considéré comme un véritable péché pour un administrateur système fainéant. Il aime travailler sur le problème une seule fois, faire ce qu’il faut pour prévenir l’apparition de la même erreur dans le futur, et retourner tranquillement paresser.

11. Se former en continu aux nouvelles technologies. Il n’y a rien de mal à apprendre de nouvelles technologies pour avoir un meilleur travail ou juste pour se tenir à jour des progrès dans le domaine. Mais un administrateur systèmes paresseux n’apprend pas de nouvelles technologies pour cette raison. Il s’y forme parce qu’il aime garder le contrôle sur les systèmes en permanence. Il sait que c’est lui le chef et non pas la machine. Ainsi, quand arrive une nouvelle technologie, il prend le temps de l’étudier. À présent, il a de nouveaux outils pour occuper le système tandis qu’il continue à paresser. C’est la paresse qui est la principale motivation de sa formation.

12. Tout documenter. C’est ce qui distingue les bons administrateurs systèmes des meilleurs administrateurs systèmes. Voyez-vous, l’administrateur systèmes paresseux déteste être dérangé lorsqu’il est sur la plage à profiter de ses vacances. Donc, que fait-il ? Il documente tout, de manière à ce que lorsqu’il n’est pas là, d’autres puissent faire le boulot de base à sa place, et fassent tourner les choses sans le déranger pendant ses vacances. Il y a une autre raison pour laquelle l’administrateur systèmes paresseux documente tout : parce qu’il oublie des choses. Comme il est fainéant, il a tendance à oublier ce qu’il a fait le mois précédent. Puisqu’il n’aime pas du tout réfléchir deux fois sur le même sujet, il documente tout, et quand il aura besoin de faire la même chose dans le futur, il reviendra à sa documentation pour comprendre ce qu’il avait fait la fois précédente.

Voilà. Être un administrateur systèmes fainéant, ce n’est pas si simple en fait, c’est même beaucoup de travail. Si vous n’en êtes pas, vous saurez désormais les reconnaître. Si vous en êtes et que vous courez toujours partout, vous savez maintenant ce qu’il vous reste à faire.

Crédit photo : Anita Hart (Creative Commons By-Sa)




La troisième révolution industrielle est en marche et nous pouvons tous y participer

La « troisième révolution industrielle » est une expression popularisée par un récent essai de Jeremy Rifkin. Mais s’il se penche attentivement sur la question de l’énergie, qu’il envisage durable et distribuée, il se montre moins prolixe sur la question de la production.

Or là aussi de profonds bouleversements nous attendent…

Je casse une assiette aujourd’hui. Je prends ma voiture pour aller chez Ikea en acheter une autre (construit en Chine). Je casse une assiette demain. Je vais chercher sur Internet le fichier numérique « assiette », puis je demande à mon imprimante 3D de m’en créer une nouvelle sous mes yeux ébahis.

Et là où ça devient encore plus intéressant c’est quand l’imprimante tout comme le fichier sont libres, m’assurant alors que j’aurais une grande variétés de fichiers « assiette » à télécharger et que je pourrais même les modifier à ma guise avant de les imprimer 🙂

Pasukaru76 - CC by

La Troisième Révolution industrielle

The third industrial revolution

The Economist – Avril 2012
(Traduction : Louson, Lolo le 13, angezanetti, Fe-lor, GPif, xaccrocheur, @poulpita, fck, Coyau)

La numérisation de la fabrication modifiera la manière de fabriquer les biens ainsi que la notion même de travail.

La première révolution industrielle commença à la fin du XVIIIe siècle, avec la mécanisation de l’industrie du textile. Les tâches qui avant étaient exécutées laborieusement à la main par des centaines de petites industries de tisserand ont été réunies en une seule fabrique, et l’usine était née. la seconde révolution industrielle arriva au début du XXe siècle quand Henry Ford maîtrisa l’évolution des lignes d’assemblage et conduit à l’âge de la production de masse. Les deux premières révolutions rendirent les gens plus riches et plus urbains. Maintenant une troisième révolution est en cours. La fabrication devient numérique. Elle risque pas de ne changer que les affaires, mais bien plus de choses encore.

De nombreuses technologies innovantes convergent : logiciels, nouveaux matériaux, robots plus habiles, nouveaux procédés (en particulier l’impression 3D) et une large variété de services web. L’usine du passé reposait sur la production en masse de produits identiques : Ford disait que les acheteurs de voiture pouvaient avoir la couleur qu’ils voulaient, tant que c’était noir. Mais le coût de production de lots plus petits, d’une plus grande variété, où chaque produit est fait précisément sur mesure selon le vœu de chaque client, est en train de chuter. L’usine du futur se concentrera sur la personnalisation de masse et ressemblera bien davantage à de toutes petites industries qu’à la ligne de montage de Ford.

Vers une troisième dimension

Autrefois, pour faire des choses, on vissait et on soudait. Maintenant un produit peut être conçu sur un ordinateur et « imprimé » sur une imprimante 3D, qui crée un objet en volume en accumulant des couches successives de matière. La conception numérique peut être ajustée en quelques coups de souris. L’imprimante 3D peut fonctionner sans surveillance et peut faire des objets trop complexes pour être produits dans une usine traditionnelle. Un jour, ces machines étonnantes pourront faire presque tout, partout, dans votre garage ou dans un village en Afrique.

Les applications d’impression 3D sont particulièrement époustouflantes. Déjà, les prothèses auditives, et les parties haute technologie des avions militaires sont imprimées avec des formes adaptées. Un ingénieur travaillant au milieu du désert, à qui il manquerait un certain outil n’a plus besoin de se le faire livrer dans la ville la plus proche. Il peut simplement télécharger le design et l’imprimer. Les jours où les projets sont arrêtés pour cause de pièce manquante, ou encore, lorsque les clients se plaignent de ne plus pouvoir trouver les pièces de rechange de ce qu’ils avaient achetés, seront bientôt de lointains souvenirs.

Les autres changements sont presque aussi capitaux. Les nouveaux matériaux sont plus légers, plus résistants et ont une durée de vie plus longue que les anciens. Les fibres de carbone remplacent l’acier et l’aluminium pour des produits allant du VTT aux avions de ligne. Les nouvelles techniques permettent aux ingénieurs de réduire la taille des objets. Les nanotechnologies donnent de nouvelles fonctions aux produits comme les bandages qui guérissent les coupures, les moteurs avec un rendement supérieur ou de la vaisselle qui se nettoie plus facilement. Les virus crées génétiquement sont développés pour être utilisés comme batteries. Et, avec Internet qui permet aux designers de collaborer sur les nouveaux produits, les barrières d’entrées sont en train de s’effondrer. Ford avait besoin d’un gros tas de capital pour construire sa colossale usine River Rouge; son équivalent moderne peut commencer avec trois fois rien dont un ordinateur portable connecté et la soif d’inventer.

Comme toutes les révolutions, celle-ci sera fortement perturbatrice. La technologie numérique a déjà renversé les média et la vente au détail, comme les filatures de coton ont écrasé les métiers à tisser manuels et la Ford T a mis les maréchaux-ferrants au chômage. Les gens seront extrêmement surpris devant les usines du futur. Elle ne seront pas pleines de machines crasseuses commandées par des hommes en blouse graisseuse. Beaucoup seront d’une propreté irréprochable et quasi-désertes. Certains fabricants de voitures produisent le double de véhicules par employé qu’il y a dix ans. La plupart des emplois ne sera plus dans les usines mais dans les bureaux non loin, qui seront pleins de designers, d’ingénieurs, d’informaticiens, d’experts en logistique, de commerciaux et d’autre professions. Les emplois manufacturiers du futur demanderont d’avantage de compétences. De nombreuses taches répétitives et ennuyeuses deviendront obsolètes : on n’a pas besoin de riveteur quand un produit n’a plus de rivets.

La révolution n’affectera pas seulement la façon dont les choses sont faites, mais aussi le lieu où elles sont produites. Avant les usines se délocalisaient dans des pays à bas salaires pour diminuer le coût du travail. Mais le coût du travail est de moins en moins important : un iPad de première génération à 499 $ comprend aujourd’hui seulement 33 $ de travail manufacturé sur lequel l’assemblage final en Chine ne représente que 8 $. La production aujourd’hui offshore va de plus en plus souvent revenir dans les pays riches, bien moins à cause d’une hausse des salaires chinois que parce que les compagnies veulent désormais être plus proches de leurs clients de façon à pouvoir répondre plus rapidement à leurs demandes de modifications. Et certains produits sont si sophistiqués qu’il est pratique d’avoir les personnes qui les ont conçus et celles qui les ont fabriqués au même endroit. Le Boston Consulting Group estime que dans des domaines comme les transports, les ordinateurs, la fabrication de produits métalliques et la machinerie, 10 à 30 % des biens que les américains importent actuellement de Chine pourraient être fabriqués à domicile d’ici 2020, stimulant l’exportation américaine de 20 à 55 milliards de dollars par an.

Le choc de la nouveauté

Les consommateurs auront peu de difficultés à s’adapter à cette nouvelle ère de meilleurs produits rapidement livrés et créés près de chez eux. Les gouvernements pourraient toutefois commencer par résister au mouvement. Leur instinct est de protéger les industries et les entreprises qui existent déjà plutôt que de promouvoir les nouvelles qui les détruiront. Ils attirent les anciennes usines avec des subventions et stigmatisent les patrons qui voudraient délocaliser. Ils dépensent des milliards dans de nouvelles technologies qui, à leur avis, prévaudront dans l’avenir. Et ils s’accrochent à la croyance romantique que la fabrication est supérieure aux services, sans prendre en compte la finance.

Rien de ceci n’a de sens. Les frontières entre la manufacture et les services deviennent floues. Rolls-Royce ne vend plus de réacteurs, elle vend les heures pendant lesquelles chaque moteur propulse un avion dans le ciel. Les gouvernements ont rarement choisi les vainqueurs, et ils vont probablement mettre du temps à voir ces légions d’entrepreneurs et de bricoleurs qui s’échangent des plans en ligne, les transforment en produits chez eux et les vendent à l’échelle mondiale depuis un garage.

Pendant que la révolution gronde, les gouvernements devraient en rester aux bases : de meilleures écoles pour une main d’œuvre qualifiée, des règles claires et équitables pour les entreprises de toutes sortes. Laissez le reste aux révolutionnaires.

Crédit photo : Pasukaru76 (Creative Commons By)




Quand la bière aime être libre

L’autre jour Obama, toujours malin en campagne, a fait soudainement irruption sur le site Reddit pour un AMA (Ask Me Anything) signifiant qu’on pouvait donc lui poser n’importe quelle question.

Et ceci fut fait puisqu’on lui demanda alors quelle était la recette de la fameuse bière de la Maison Blanche. Réponse de l’intéressé : nous la publierons incessamment sous peu.

Chose promise, chose due.

L’occasion pour le site OpenSource.com d’aller plus loin et de s’amuser à contredire Richard Stallman himself dans un article que nous vous proposons traduit ci-dessous.

The Art Gallery of Knoxville - CC by-sa

La bière rassemble les gens : d’Obama aux brasseurs, en passant par les communautés en ligne

Beer brings people together: Obama, homebrewers, and online communities

Casey Brown – 31 août 2012 – OpenSource.com
(Traduction : Unagi, pwetosaurus, enso, Philippe, tanguy, Zii, Laurent, sheldon)

Dans ma citation préférée à propos du Libre (NdT: originellement « de l’open source »), Richard Stallman explique que « Dans le logiciel libre il est question de liberté, pas d’argent. Pour comprendre cela, je vous invite à penser le libre (free) comme « liberté d’expression » (free speech) et non pas comme « bière gratuite » (free beer) ».

Malgré tout, la semaine dernière, j’ai commencé à me poser la question de la validité de cette explication. En réalité, j’aurais pu dire que le logiciel libre est exactement comme la bière libre.

En effet, ces derniers jours, la plupart des discussions dans les commuautés open source concernaient la bière libre. Des Yeastie Boys à l’ale au miel du président Obama, la bière a été un sujet populaire (enfin, plus qu’habituellement).

Il s’avère que la communauté des brasseurs amateurs s’est construite sur les principes open source depuis déjà longtemps. D’après le site The Powerbase, « L’idée de partager ses recettes de bières avec les autres n’est pas neuve. Les brasseurs amateurs font ça depuis, eh bien, toujours. La communauté des brasseurs amateurs a toujours été très favorable au partage et, pour bien des gens, échanger et améliorer des recettes est le coeur de l’activité. »

Mercredi dernier, le brassage amateur open source a fait parler de lui. Dans un sujet où l’on pouvait lui demander n’importe quoi sur Reddit, le président Obama a répondu à 10 questions qui lui avaient été posées. Un des redditeurs lui demanda la recette de l’ale au miel brassée de la Maison Blanche. Le président répondit, « Nous la divulguerons bientôt ! Et croyez-moi par expérience, elle est savoureuse ! »

Bien sûr, la communauté open source s’excite chaque fois que la Maison Blanche décide de passer un projet en open source. Que ce soit leur plateforme de pétition « Nous le peuple » ou leur recette de bière préférée. Même si c’est juste une recette de bière, c’est un pas certain vers l’ouverture. La session « question / réponse » a été si populaire que cela « a mis le site à genoux », reporte CNET.

La Digital IPA (Idian Pale Ale) des Yeastie Boys revenait également régulièrement dans les conversations des communautés open source ces derniers jours. Pour décrire leur bière, le site internet des Yeastie Boys disait : « De la même manière que numérique se rapporte à des zéros et des uns, le concept de IPA se rapporte aux malts et aux houblons ».

Cette bière se démarque des autres car les Yeastie Boys ont intelligement apposé des QR codes donnant accès à la recette sur les bouteilles, de manière à ce que l’on puisse tenter de la brasser soi-même. Ces codes proposent aussi des liens vers différentes formes de médias sociaux, permettant aux amateurs de partager facilement leurs recettes modifiées.

Certaines personnes publient même leurs recettes de bières sous licence Creative Commons. Free Beer publie ses recettes sous la licence CC Attribution-ShareAlike 2.5 et explique que tout le monde est libre d’utiliser la recette et de gagner de l’argent avec, mais avec l’obligation de publier la recette sous la même licence et de citer la source originale. Leur site vous permet de télécharger une étiquette Free Beer à afficher sur vos bouteilles, et dispose d’un blog avec les photos des bouteilles à travers le monde.

Même chez Red Hat, la communauté open source de brasseurs amateurs prospère. Nous avons une liste de diffusion qui leur est entièrement dédiée et qui contient des sujets traitant de recettes et d’astuces. Occasionnellement ils apportent même leurs créations au bureau pour une dégustation.

Alors peut-être est-il temps pour M. Stallman de mettre à jour sa citation. Qu’y changeriez-vous ? Et l’un d’entre vous a-t-il jamais tenté de brasser lui-même sa bière ? Nous aimerions avoir des retours d’expériences et des recettes. Mais plus important encore, nous aimerions pouvoir toutes les goûter. Vous savez comment nous contacter…

Crédit photo : The Art Gallery of Knoxville (Creative Commons By-Sa)