Qu’est-ce qu’une oeuvre culturelle libre ?

Star Wars – Episode XIV – Acte III – Scène 2

Jeune Padawan : Bonjour Maître, je viens vous présenter ma dernière création libre.

Maître Jedi : Création intéressante… Elle est « libre » dis-tu. Qu’est-ce qui te permet de l’affirmer ?

Jeune Padawan : Je lui ai associée une licence prise chez les scribes de la planète Creative Commons.

Maître Jedi : Mais encore…

Jeune Padawan : C’est-à-dire ?

Maître Jedi : Mais encore, laquelle d’entre toutes les licences Creative Commons possibles ?

Jeune Padawan : La licence Creative Commons BY-NC-ND.

Maître Jedi : Je vois… Tu autorises donc quiconque à diffuser ta création pourvu que sa paternité soit conservée et qu’elle ne subisse ni modification ni commerce sans ton assentiment. C’est bien cela ?

Jeune Padawan : Oui, Maître.

Maître Jedi : Cette libre diffusion te fait alors dire que ta création est « libre » ?

Jeune Padawan : Oui, Maître.

Maître Jedi : Je comprends. Mais sache qu’il existe des galaxies entières qui ne considèrent pas ton œuvre comme libre.

Jeune Padawan : Ah bon !

Maître Jedi : Oui. Tu vois la galaxie Logiciels Libres, là-bas, derrière Cassiopée ?

Jeune Padawan : Celle dont toute la République vante la maîtrise technologique et l’éthique sociale ?

Maître Jedi : Celle-là oui. Cette galaxie est associée au logiciel depuis bien longtemps déjà mais elle a pris ce nom le jour où l’un de nos meilleurs éléments, Maître Jedi Stallman, est venu leur dire que leur principale activité était menacée par l’Empire et qu’il fallait agir pour s’en préserver. C’est ainsi que furent adoptées les quatre libertés du logiciel libre. Ces libertés sont précises voire sévères. Elle peuvent même t’apparaître contraignantes puisqu’on ne te demande plus ton autorisation pour altérer (ils disent modifier) ou exploiter (ils disent diffuser) ton œuvre. Mais elles ont permis à cette galaxie de résister d’abord, de poursuivre son développement ensuite et enfin de s’épanouir. Pour les rebelles de l’Alliance mais également pour de très nombreux simples citoyens de notre République, elle représente un modèle et une source d’espoir. As-tu envie que ta création entre un jour dans le Grand Livre de la Connaissance du peuple Wikipédia ?

Jeune Padawan : Oh ! J’en serais honoré Maître.

Maître Jedi : Alors là encore tu n’as pas choisi la bonne licence Creative Commons.

Jeune Padawan : Je ne le savais pas, Maître.

Maître Jedi : Les scribes de la planète Creative Commons non plus. Enfin si mais ils n’avaient pas pleinement pris conscience de ces nuances. C’est pourquoi ils ont récemment décidé d’ajouter un sceau particulier à certaines de leurs licences. Ce sceau est un symbole qui relie les habitants de la galaxie Logiciels Libres, le peuple Wikipédia et tous ceux qui placent leurs créations sous ces licences. Ce sceau est également la garantie que l’on peut travailler ensemble, sans entraves et en confiance, au bien commun de toute la République

Jeune Padawan : …Permettant alors aussi de mieux se défendre face à l’Empire.

Maître Jedi : En effet, oui.

Jeune Padawan : Je vais peut-être changer ma licence alors…

Maître Jedi : Telle n’était pas mon intention jeune Padawan. Ne sois pas si influençable !

Jeune Padawan : Oui, Maître. Toujours être libre de son choix mais savoir que le choix du libre n’a pas toujours la même définition en tout point de notre République.

Maître Jedi : C’est exactement cela. Tu seras bientôt prêt jeune Padawan.

Moi : Fin de cette introduction-divagation qui n’avait pas d’autre but que de vous présenter lyriquement la traduction ci-dessous annonçant le pourquoi du comment de ce nouveau label. Un label qui mine de rien donne du sens aux licences Creative Commons selon qu’on le possède ou non.

France Gall : C’est peut-être un détail pour vous mais pour moi ça veut dire beaucoup.

Certifié œuvres culturelles libres

Approved for Free Cultural Works

Mike Linksvayer – 20 février 2008 – CreativeCommons.org
(Traduction Framalang : Olivier Rosseler)

CC - Approved for Free Cultural WorksLa famille des licences Creative Commons s’aggrandit avec le sceau ci-dessus pour les licences qui remplissent les critères des Licences Culture Libre (NdT : Free Culture Licenses) selon la Définition des Œuvres Culturelles Libres, Parternité (BY) et Paternité-Partage à l’identique (BY-SA). Le domaine public n’est pas une licence mais est qualifiable d’œuvre culturelle libre d’après la Définition.

Une manière simple d’appréhender la définition est de la voir comme l’application des principes du logiciel libre au contenu. La liberté de modification, sans distinction de l’usage ou de l’usager, est un préalable nécessaire, ce qui signifie que les licences Creative Commons Pas d’utilisation commerciale (NC) et Pas de modification (ND) ne remplissent pas les conditions. Évidemment on ne vous demande pas d’accepter la définition de la liberté du mouvement des logiciels libres ou la Définition des Œuvres Culturelles Libres, et même si vous les acceptez des licences plus restrictives sont nécessaires dans certains cas. Quoiqu’il en soit, ce sceau marque une démarcation importante entre les licences plus restrictives et celles qui le sont moins, une démarcation dont les créateurs et les utilisateurs de contenu devraient être conscients.

Pourquoi les utilisateurs devraient-ils être conscients de ces distinctions ? Voici un exemple concret : certains projets importants n’acceptent que du contenu sous licence libre (conformément à la définition) ou appartenant au domaine public. C’est la cas en particulier de Wikipédia et les sites Wikimédia qui emploient la Définition des Œuvres Culturelles Libres dans leur politique de licence. L’identification claire des licences CC que l’on peut qualifier de libres est en effet l’un des problèmes à résoudre pour une potentielle migration de Wikipedia vers une licence CC Paternité-Partage à l’identique (BY-SA).

Cette signalétique supplémentaire est au cœur de nos efforts pour rendre plus lisible l’éventail de licences Creative Commons, ne parlez jamais de la licence Creative Commons car elle n’existe pas. Nos actes de licence ont toujours exprimés les propriétés particulières de chacune des licences grâce à une icône et un descriptif bref. En décembre 2006 nous avons ajouté à notre signalétique la distinction entre les licences libres et moins libres par un fond vert ou un fond jaune (voyez la différence entre Paternité et Paternité – Pas d’utilisation commerciale) et nous avons commencé à proposer des bandeaux pour les licences contenant des icônes relatives aux propriétés des licences afin que l’on puisse directement identifier visuellement la licence utilisée sans avoir à cliquer pour lire l’acte.

Nous espérons pouvoir répondre à d’autres suggestions de la communauté et présenter à l’avenir d’autres améliorations des actes des licences CC et du sélécteur de licence dans un futur proche. Alors ne zappez pas !




Un Linux toujours plus cinéphile qui mériterait une palme

Le festival de Cannes vient de s’achever. J’étais tous les jours derrière les barrières pour assister à la montée des marches mais je n’ai pas vu passer de manchot (aux palmes d’or). Il l’aurait pourtant mérité tant est forte l’utilisation de GNU/Linux dans la profession.

Une double traduction Framalang (by Miss Daria and Mr Olivier). Le premier article expose la situation actuelle à Hollywood (et en France ?) tandis que le second demande à ce que GNU/Linux ne soit pas oublié dans les génériques de fin. Les illustrations sont issues d’une présentation accompagnant le premier article.

Linux et le cinéma 1

Linux 1er système d’exploitation à Hollywood

Linux #1 Operating System in Hollywood

Robin Rowe – février 2008 – LinuxMovies.org

Dans l’industrie cinématographique, Linux a gagné. Il fonctionne sur pratiquement tous les serveurs et postes de travail utilisés pour produire les animations et effets spéciaux. LinuxMovies.org s’est réuni chaque mois à Hollywood pendant des années, mais maintenant il se réunit rarement.

Linux est utilisé pour créer la quasi-totalité des super-productions dans les salles de cinéma aujourd’hui, les films produits par Disney / Pixar, DreamWorks Animation, Sony, ILM, et d’autres studios.

Linux est le système d’exploitation le plus populaire pour les films d’animation ou d’effets spéciaux à gros budgets, avec plus de 95% des serveurs et postes de travail des grosses compagnies d’animation et d’effets spéciaux. Les gens hors de l’industrie cinématographique, et même parfois du métier, ne se rendent pas compte que Linux est si important dans les grands studios. Linux est la norme à Hollywood et est considéré comme le nec plus ultra. Dans ce monde sans dessus dessous où Windows et Mac sont des systèmes d’exploitation minoritaires, les évangélistes de Linux auraient bien du mal à trouver encore quelqu’un à convertir. Le système d’exploitation libre construit par les gens pour les gens, a été adopté en premier lieu par les studios de cinéma.

Hollywood préfère Linux parce que, dans de bonnes mains, c’est meilleur, plus rapide et moins cher. Dans les grandes entreprises qui ont des milliers de serveurs et postes de travail, l’économie et l’efficacité massive de Linux est mieux ressentie. Dans les petites sociétés de production, Windows ou Mac sont souvent plus populaires, car l’économie d’échelle ne s’applique pas. Malgré cela, certaines petites maisons fonctionnent avec Linux principalement. Certaines sociétés de production utilisent un environnement mixte. Par exemple, South Park est produit en utilisant des stations de travail Mac et des serveurs Linux. Bien qu’étant le roi dans l’industrie cinématographique, Linux est rarement rencontré dans l’industrie de la télévision en raison de besoins informatiques beaucoup plus modestes.

Contrairement à Windows ou Macintosh, aucune société ne possède Linux. Les développeurs de nombreuses entreprises contribuent au code de Linux qui est disponible gratuitement et fonctionne sur tous types de matériel informatique. Des sociétés comme HP, Dell, IBM, Verari, BoxX, et d’autres construisent des systèmes Linux spécifiquement pour l’industrie du film.

LinuxMovies.org est un groupe de plus de 300 techniciens qui s’entraident pour soutenir Linux dans les applications de l’industrie du film et qui font progresser Linux dans la technologie du cinéma.

Linux et le cinéma 2

Lettre ouverte – S’il vous plait, n’oubliez pas Linux dans le générique de fin

Open Letter – Please Show Linux Credit at Movie Endings

Shannon VanWagner – 10 avril 2008

Aux : cinéastes qui utilisent GNU/Linux

Cher cinéaste respecté,

J’ai récemment lu un article sur la façon dont votre entreprise utilise le système GNU/Linux pour créer le contenu de vos films. J’ai été heureux d’apprendre cela parce que je suis moi-même utilisateur/amateur de GNU/Linux et j’aimerai voir GNU/Linux gagner plus de parts de marché, de sorte que partout plus de gens puisse profiter de ce merveilleux logiciel. Le truc vraiment génial avec GNU/Linux c’est sa structure, et le potentiel qu’il a d’évoluer continuellement pour devenir un système d’exploitation encore meilleur à l’avenir.

Je vous écris donc pour demander que vous citiez GNU/Linux lorsque les crédits défilent à la fin des films que vous faites avec GNU/Linux. J’ai l’habitude de voir certains crédits accordés à beaucoup de choses dans les films (et même des choses plutôt étranges d’ailleurs), mais je ne me souviens d’aucune mention du système d’exploitation GNU/Linux dans les films que j’ai vus récemment. Donc, voir un petit logo Tux et les mots  »Fait avec le système d’exploitation GNU/Linux » permettraient non seulement de montrer un peu de respect, oh combien mérité, à la grande masse de développeurs (et aux autres participants) qui rendent GNU/Linux possible tous les jours, mais permettrait aussi de promouvoir les idéaux du système d’exploitation libre (NdT : Free as in Freedom) connu sous le nom de GNU/Linux. Peut-être même que davantage de personnes pourraient bénéficier de GNU/Linux si les grands cinéastes mentionnaient qu’ils l’utilisent dans les crédits de leurs films.

Merci d’aider GNU/Linux et à la promotion de la liberté pour l’avenir de l’informatique.

Respectueusement,

Shannon VanWagner
Amateur enthousiaste de Linux et informaticien




Monsieur Thierry Stœhr, l’ami des formats ouverts

Dans la série « Passe à ton voisin »

Thierry Stœhr est aux formats ouverts (du monde francophone) ce que Richard Stallman est aux logiciels libres (du monde entier) : un infatigable arpenteur qui cent fois sur le métier remet son ouvrage pour expliquer avec pédagogie aux foules (en délire) de quoi il en retourne et pourquoi il est nécessaire si ce n’est de soutenir la cause tout du moins de se poser quelques questions.

Je ne sais combien de fois il a dû intervenir en public pour évoquer ces satanés formats mais, ce n’est pas de sa faute, ses conférences sont d’une telle qualité qu’il est constamment sollicité. Il faut dire qu’il a une manière bien à lui d’expliquer clairement les choses tout en dénonçant au passage de purs scandales sans jamais abandonner le ton aimable et policé du gendre idéal 😉

Il est donc possible voire probable, chez fidèle visiteur du Framablog, que vous ayez déjà eu l’honneur et le plaisir d’assister à l’un de ses one-man-show. Mais pas forcément vos proches qui ne demandent peut-être eux aussi qu’à être informés (et quand bien même, comme il se bonifie à chaque itération, ce n’est jamais inintéressant de l’écouter plusieurs fois).

—> La vidéo au format webm

Une conférence donnée à Paris le 4 novembre 2007 dans le cadre des Ubuntu Party à la Cité des sciences et de l’industrie de la Villette. L’occasion d’annoncer, toujours en compagnie de Thierry Stœhr, la prochaine party qui aura lieu au même endroit les 7 et 8 juin prochain pour fêter comme il se doit la sortie de la dernière version d’Ubuntu la 8.04 LTS Hardy Heron.




MUTO a wall-painted animation by BLU

Il fallait que je vous fasse partager ça !

URL d’origine
Licence : Creative Commons By-Nc-Nd




Les deux oublis malheureux du Parti socialiste

Ségolène Royal - Manuel MC - CC-By-Sa

Le Parti socialiste vient d’élaborer un projet de « déclaration de principe » pour 2008, la cinquième seulement en un siècle.[1]

Loin de moi l’idée de m’embarquer dans un billet politique mais j’ai trouvé intéressante l’intervention de Maurice Ronai sur son blog à Mediapart.

Extrait :

Deux oublis malheureux : la société de la connaissance et les nouveaux biens communs

L’aggiornamento s’avère malheureusement incomplet dans la prise en compte d’un aspect essentiel de la modernité : l’essor des technologies numériques
– les possibilité que ces technologies ouvrent en matière d’accès à la culture et de circulation des savoirs
– les capacités que ces technologies confèrent aux collectifs et aux personnes pour agir sur leur vie et sur la société

La Déclaration de principes 2008 passe à côté de la nouveauté radicale que constitue l’émergence de biens communs informationnels : la production coopérative de connaissances, de logiciels et de biens culturels fondée sur la libre collaboration, la production par les pairs et le partage peut s’avérer aussi efficace que les modèles de production marchand (entreprises) ou publics (services publics).

La Déclaration de principe reste enfermée dans une dialectique marché vs secteur public (rebaptisé Etat social). Les projets coopératifs de type Wikipedia, les logiciels libres, les publications scientifiques ouvertes échappent pourtant à cette dialectique marché vs service public.

Je suis de ceux qui considèrent en effet qu’il en va aujourd’hui de la responsabilité des partis politiques de ne plus passer à côté de la nouveauté radicale que constitue l’émergence de biens communs informationnels.

Quant au Parti socialiste, c’est d’autant plus dommage que le rapport Rocard pré-présidentiel semblait ouvrir la voie…

Notes

[1] Crédit Photo : Ségolène Royal par manuel | MC sous licence Creative Commons By-Sa.




OOXML – Le discours d’Oslo

Le Framablog arrive un peu après la bataille pour ce qui concerne la triste nouvelle de la normalisation du format OOXML de Microsoft par l’ISO le 29 mars dernier.

Mais si nous avons perdu une bataille nous n’avons pas forcément perdu la guerre. Une guerre qui n’est pas dirigée contre Microsoft mais contre ses pratiques et pour la défense d’une certaine liberté.

C’est le sens et l’espoir porté par le discours[1] donné à Oslo juste après la normalisation par Steve Pepper accompagné de quelques manifestants légitimement scandalisés par les conditions générales du vote dont la Norvège ne fut pas la dernière à être soupçonnée d’irrégularité.[2]

OOXML Oslo Speech

Manifestation OOXML à Oslo : Le discours

OOXML demonstration in Oslo: The speech

Steve Pepper – 9 avril 2008 – Geir Isene

La manifestation a pris fin il y a à peu près une heure, nous en reparlerons (avec des photos). Je vous retranscris ici le discours que Steve Pepper a tenu durant la manifestation, il résume très bien toute l’histoire de la normalisation d’OOXML :

Amis, bloggers, codeurs libres, défenseurs des standards ouverts !

Nous ne sommes pas ici pour cracher sur Microsoft.

Nous sommes ici car nous croyons aux standards ouverts.

Nous ne sommes pas ici aujourd’hui parce que nous sommes opposés à OOXML.

Nous sommes là car nous sommes opposés à OOXML en tant que standard ISO.

Nous ne sommes pas là pour discréditer l’ISO.
Nous sommes ici parce que nous voulons défendre l’intégrité de l’ISO.

Nous ne sommes pas là pour attirer l’attention sur le comportement scandaleux des membres de Standard Norway dont le métier est de représenter les utilisateurs et les vendeurs de logiciels norvégiens.

Et nous sommes ici car nous voulons empêcher l’adoption d’un standard numérique nuisible en Norvège.

Je reviendrai à cela rapidement. Je voudrais d’abord prendre quelques minutes pour rappeler un peu le contexte aux personnes qui ne comprennent pas les tenants et les aboutissants du problème. Accrochez vous.

Ce problème ce rapporte entièrement aux documents, aux documents numériques pour être précis.

Je vous parle de la manière d’enregistrer les documents et de comment nous échangeons les documents entre nous. Je parle de ces documents que vous créez tous les jours : rapports, lettres, articles, dissertations, livres, thèses, feuilles de calculs et autres grâce à des programmes comme Microsoft Word et Excel.

Mais oublions les documents un instant et parlons plutôt de sèches-cheveux.

Voici un sèche-cheveux ordinaire que j’ai acheté dans un magasin ici en Norvège. Il a une prise. La prise a deux broches. Je peux brancher ce sèche-cheveux dans n’importe quelle prise électrique n’importe où en Norvège.

OOXML Oslo Speech

Si je peux le faire c’est parce que toutes les prises électriques sont les mêmes. Il existe un standard pour les prises électriques en Norvège.

Le même standard est utilisé dans une grande partie de l’Europe et même ailleurs dans le monde : si je vais au Danemark, je peux emmener ce sèche-cheveux, le brancher et il fonctionnera.

Ca serait pareil en Finlande, Suède, Allemagne et dans plein d’autres pays. J’ai juste à le brancher et il marche.

Mais si je vais en Angleterre je ne peux pas simplement le brancher parce que les prises électriques là-bas sont différentes. Elles ont trois broches carrées à la place de deux rondes.

Si je vais aux Etats-Unis ou au Japon je ne peux pas simplement le brancher parce que leurs prises électriques sont également différentes. Elles ont deux broches plates à la place de deux broches rondes.

Les documents sont comme les sèches-cheveux. On voudrait pouvoir les brancher dans n’importe quelle logiciel et pouvoir travailler dessus. Mais ce n’est pas possible aujourd’hui. Si vous créez un document avec Microsoft Word et que vous l’envoyez à quelqu’un d’autre, cette personne ne peut rien en faire à moins qu’elle ait Microsoft Word.

Je crois que ça n’est pas normal.

OOXML Oslo Speech

Les gens ne devraient pas avoir à donner de l’argent à Microsoft pour pouvoir lire des documents. Dans l’état actuel des choses, Microsoft a en réalité le contrôle sur les documents que vous et moi créons.

Il ne devrait pas en être ainsi.

Des standards ouverts peuvent résoudre ce problème et c’est pourquoi je crois en ces formats. C’est pourquoi j’ai passé ces 13 dernières années à représenter la Norvège en tant que volontaire dans un comité de standardisation international. J’ai travaillé sur plusieurs standards, dont SGML, XML et Topic Maps, et j’ai été Président du comité ISO norvégien depuis 1995.

Il y a deux ans, mon comité a approuvé la normalisation d’un standard ouvert pour les documents de bureau appelé ODF. ODF a été développé de manière ouverte et démocratique par une organisation appelée OASIS.

L’objet d’ODF était de proposer une alternative à ce que nous appelons les formats "propriétaires". Plutôt que des formats de documents qui sont détenus et contrôlés par une seule entreprise et qui vous obligent à utiliser un logiciel particulier, les gens à l’origine d’ODF voulaient définir un format ouvert qui permettrait de connecter vos documents à n’importe quel logiciel.

ODF a été développé, comme je l’ai dit, de manière ouverte et démocratique. Mais un membre important ne faisait pas partie du processus. Le vendeur qui domine le marché, Microsoft, a refusé d’y participer et il a refusé de supporter ODF depuis qu’il est devenu un standard.

Ils ont à la place décidé de créer un standard concurrent appelé OOXML et d’utiliser l’Ecma pour s’introduire à la dérobé dans l’ISO.

C’est la raison pour laquelle nous sommes ici aujourd’hui.

OOXML Oslo Speech

Nous ne sommes pas contre OOXML en lui-même. En fait nous sommes reconnaissant envers Microsoft pour, après vingt années de domination du marché, avoir documenté son format avec des spécifications ouvertes.

Nous sommes cependant contre l’approbation par l’ISO de OOXML. La raison est simple : il n’est pas dans l’intérêt des utilisateurs comme vous et moi d’avoir deux standards pour le même objet. Ca serait un peu comme si Microsoft venait ici et commençait à installer des prises électriques à 3 broches plutôt que 2 et qu’ils nous forcent ensuite à acheter leurs sèches-cheveux.

Nous ne sommes pas contre l’ISO non plus. Non protestons contre la manière dont a été corrompu par une grande multinationale ce qui jusque là avait toujours été une organisation transparente et démocratique où chaque pays a un vote.

Je ne hais pas Microsoft. J’aimerai accueillir Microsoft dans la communauté des standards, mais uniquement si Microsoft respecte les règles et en particulier l’esprit du processus de standardisation.

Microsoft a une mauvaise réputation dans la communauté des standards. Ils représentent le grand méchant loup, tout comme IBM il y a 20 ans. Mais IBM a prouvé qu’il est possible de changer.

J’espère que Microsoft aussi changera. Je pense que c’est possible. Mais cela ne se produira que si nous, les utilisateurs, les forçons à changer.

Microsoft a besoin de notre aide. Nous devons leur dire d’arrêter de se comporter comme un éléphant dans un magasin de porcelaine. Nous devons les aider à comprendre que le travaille sur les standards se fait dans la coopération, pas par le conflit. Les standards ne devraient pas être créés par la guerre. Ils devraient être créés grâce à la collaboration.

Microsoft a beaucoup à apprendre et cela prendra du temps. Ca prendra aussi du temps pour que Microsoft gagne la confiance de tous ceux dont ils ont saboté le travail durant ces vingt dernières années.

Microsoft affirme qu’ils croient maintenant aux standards ouverts. Il faut qu’ils comprennent qu’il faudra du temps avant que tout le monde ne leur fasse vraiment confiance. Ils doivent commencer par se montrer moins arrogants et plus humbles et ils doivent prouver par la pratique qu’ils pensent vraiment ce qu’ils disent.

Ils peuvent faire le premier pas en admettant s’être trompé en ne supportant pas ODF.

OOXML Oslo Speech

J’en appelle à Microsoft, qu’ils admettent que tenter de forcer OOXML par la procédure rapide de l’ISO était une erreur et j’attends d’eux qu’ils supportent ODF.

J’attends d’Ecma qu’ils retirent OOXML de l’ISO et qu’ils en gardent le contrôle. Nous en avons besoin pour les documents anciens.

J’attends de Standard Norway qu’ils admettent qu’ils ont eu tort d’outrepasser la décision de leur propre comité d’experts et qu’ils modifient le vote de la Norvège du Oui en Non.

J’attends du gouvernement norvégien qu’il se montre fort face à Microsoft et qu’il n’approuve pas OOXML comme un standard norvégien.

Finalement, j’attends des utilisateurs de part le monde qu’ils tournent leur regard vers la Norvège et qu’ils suivent notre exemple. A votre tour de manifester ! Révélez les irrégularités qui se sont produites dans votre pays ! Exigez de vos gouvernements qu’ils modifient leur vote pour qu’il reflète les intérêts des gens ordinaires et non les intérêts des monopolistes et des bureaucrates.

Kjære nordmenn, vi er ikke alene. Chers norvégiens, nous ne sommes pas seuls.

Les pays représentants la majorité de la population du monde ont voté Non à OOXML et ils ont eu raison.

OOXML Oslo Speech

Permettez moi de citer juste un exemple. Il est tiré d’un discours donné par la Ministre Sud-africaine du Service Public et de l’Administration, Mme Geraldine J. Fraser-Moleketi. Elle l’a donné à la Conference on the Digital Commons and Open Source Software à Dakar au Sénégal il y a tout juste trois semaines. Voilà ce qu’elle disait :

« L’adoption de standards ouverts par les gouvernements est un facteur clé dans la construction de systèmes d’information interopérables qui sont ouverts, accessibles, justes et qui renforcent la culture démocratique et les pratiques de bonne gouvernance.

ODF est un standard ouvert développé par un comité technique au sein du consortium OASIS. L’Afrique du Sud a rejoint les rangs grandissants des gouvernements nationaux à avoir adopté ODF l’année passée.

Il est malheureux que le numéro un sur le marché des logiciels de bureautique, qui jouit d’une domination considérable du marché, ait choisi, plutôt que de participer et de supporter ODF dans ses produits, de développer son propre standard de document concurrent.

Si ce format rencontre le succès, il est difficile d’imaginer comment le chevauchement de ces deux standards ISO va profiter aux consommateurs. Je me tourne vers les vendeurs pour leur demander d’être attentifs aux demandes des consommateurs mais aussi à celles des développeurs de logiciels libres. Je vous en prie, travaillez ensemble pour produire des standards de documents interopérables. La prolifération de standards dans ce domaine est déroutante et coûteuse. »

Madame Fraser-Moleketi : Le peuple de Norvège est avec vous et nous vous demandons pardon pour le comportement inacceptable de notre organisme de normalisation.

Notre victoire à l’ISO nous a été volée de 3 petits votes.

Sans les irrégularités en Norvège, on n’en serait plus qu’à 2 votes. On entend parler d’irrégularités similaires dans d’autres pays comme la France ou le Danemark. Changeons ces votes non-représentatifs. Evinçons OOXML de l’ISO.

Microsoft pense avoir remporté une bataille, mais je déclare que ce n’est pas encore terminé.

Il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué et cet ours est encore bien vivant.

OOXML Oslo Speech

Notes

[1] Une traduction Olivier (Framalang).

[2] Les photographies de la manifestation sont toutes issues du groupe OOXML du site Flickr.com.




Tag : Paris

—> La vidéo au format webm

Au départ il s’agissait, pour le prof que je suis, de présenter un exemple de remix culturel à mes élèves. Utiliser des créations existantes dont les licences autorisent la reprise pour produire quelque chose d’un tant soit peu original. L’occasion de parler de la culture libre, des Creative Commons, de la musique en libre diffusion, etc.

L’idée de base était de créer un petit diaporama sur fond musical en choisissant un tag (ou étiquette) sur l’annuaire de photographies partagées Flickr (restreint à certaines licences Creative Commons) pour y sélectionner quelques images et les agencer dans un ordre particulier.

C’est le tag Paris qui a été retenu. Les photographies sont donc censées illustrer de près ou de loin la capitale. La chronologie suivant, vaguement, celle d’une journée du matin au soir.

Voici donc le résultat ci-dessus. On dira que c’est une première version parce que cela reste trop lourd en taille et du coup c’est parfois un peu saccadé depuis notre serveur. Je précise que je suis parisien d’origine mais vivant désormais depuis plusieurs années loin de la Ville Lumière. Ceci explique peut-être cela, c’est-à-dire la petite pointe de nostalgie… Il n’empêche que je retrouve bien ma ville en recomposant ce puzzle iconographique (clichés touristes et clichés bobos inclus !).

La musique, sous licence Creative Commons By-Nc-Nd, est de Rob Costlow (titre : Not Alone). Toutes les photographies sont sous licence Creative Commons By ou By-Sa. J’aurais dû toutes les créditer en fin de diaporama (ce sera pour la version 2.0) mais en attendant vous pouvez les retrouver en naviguant sur cette page de recherche de Flickr.

Au passage ce petit clip illustre je crois la formidable richesse de Flickr puisqu’ici je me suis astreint à un unique tag et à deux licences. Je me demande du reste si on ne pourrait pas sur ce modèle (un tag Flickr, des photos sous licences libres) faire carrément des framabooks photographiques que l’on vendrait grâce à notre partenaire éditeur In Libro Veritas. Cela permettrait aussi bien de faire de chouettes bouquins de photos que d’illustrer la culture libre en marche (et éventuellement aussi de soutenir Framasoft).

Pensez-vous que l’idée soit (commercialement) bonne ?




VidToMP3.com ou la grande hypocrisie collective

Copie d'écran - YouTube - Tryad

Dans la série « je donne des leçons en criant dans le désert »…

Un nouveau site outil de type MFA[1] vient de sortir VidToMP3.com. Il propose tout simplement de ripper, c’est-à-dire récupérer, les pistes sons de n’importe quelle vidéo des plate-formes YouTube, Dailymotion, MySpace, etc.

J’ai fait le test avec le morceau Bluetooth des sympathiques bobos de la Chanson du Dimanche. Il vous suffit d’aller sur YouTube, de copier l’URL de la vidéo recherchée et d’y coller le tout dans VidToMP3.com. Il ne vous reste alors plus qu’à cueillir sur le site, après un court laps de temps, un mp3 de qualité tout à fait correcte prêt à s’ajouter à la playlist de votre baladeur musical préféré.

C’est… cool n’est-ce pas ?!

Et comme il est désormais quasi impossible qu’une chanson un tant soit peu connue ne se retrouve pas d’une manière ou d’une autre sur ces plate-formes vidéos, ben vous tenez là un système parfait pour alimenter votre baladeur avec la musique de votre choix.

Vraiment super top cool !!!

Un système d’autant plus parfait qu’il est… sans risque. Parce que le hic c’est que ce que j’ai fait pour la Chanson du Dimanche est tout à fait illégal. Bien qu’il s’agisse d’un groupe un peu particulier puisque né sur internet grâce à la mise en ligne de leurs vidéos, il est formellement interdit de faire ce que j’ai fait, puisqu’en l’absence de licence associée à leurs vidéos c’est le copyright classique qui s’applique.

Et il en va bien entendu de même pour les autres chansons (en pire même lorsqu’il s’agit de groupes sous contrat avec les Majors).

Du coup cela me fait dire péremptoirement qu’on nage dans l’hypocrisie collective. Une hypocrisie qui, comme la valse, se décline en trois temps.

  • Les plate-formes vidéos d’abord. YouTube, MySpace, Dailymotion… aucun de ces sites n’associent de licence claire et individuelle aux vidéos proposées. Du coup c’est le Term of Use (indigeste voire incompréhensible) qui s’applique par défaut et si on le suit à la lettre alors on ne peut télécharger sur le site que des vidéos qui nous appartiennent en propre. Oui pour votre bébé au rire communicatif ou vos vacances en Asie en compagnie d’éléphants savants (et encore faut s’assurer de l’autorisation de l’éléphant, quoiqu’ici c’est plus facile puisque sachant dessiner il doit bien savoir parapher). Mais non pour le dernier clip-vidéo à la mode ou l’extrait d’une récente émission de télé dont ces sites sont pourtant truffés.[2]. J’avais déjà évoqué ce problème dans un billet au titre délicat Est-ce que YouTube nous entube ? où je préconisais plutôt l’utilisation de Blip.tv (qui, vous avez dit bizarre, n’est d’ailleurs pas encore dans la liste de VidToMP3.com). Depuis force est de constater que rien n’a bougé du côté de YouTube. Et ceci oblige des groupes libres comme Tryad à faire mention de la licence à même le descriptif de la vidéo qu’il faut dérouler qui plus est (voir illustration ci-dessus qui ouvre le billet). Ce n’est tout simplement pas sérieux messieurs de chez YouTube donc de chez Google.
  • Le site VidToMP3.com ensuite. Voilà un site qui colle de la pub partout avec son modèle économique qui est clairement l’affluence (voir ma note ci-dessous) et qui vient nous dire en petit et en bas de page : Only rip the sound from none-copyrighted sources. C’est ç’là oui, on va t’écouter mon grand et du coup plus personne ne viendra sur ton site !
  • La blogosphère ensuite. Vite, vite, faisons un billet avec VidToMP3.com dans le titre pour être bien référencé, extasions-nous sur l’utilité du service et taisons les problèmes liés aux absences de licences (si tant est que les blogueurs en question aient la moindre culture des licences). Que ne ferions-nous pas pour chouchouter nos fidèles lecteurs…

Je ne nie pas que le service puisse être parfois utile (au format audio ouvert ogg ce serait encore mieux) mais si, comme tente modestement de le faire ce blog, on se place dans une problématique de sensibilisation à la culture libre alors on n’est pas à Houston mais on a visiblement un problème.

Un problème de licences ou plutôt d‘éducation aux licences qui, si il était plus médiatisé, obligerait tout ce petit monde (visiteurs inclus) à mieux se positionner. Quitte, si entêtement et bornitude[3] il y a, à faire découvrir les douces mélopées de la musique en libre diffusion que l’on trouve sur des Dogmazik et autres Jamendo.

Quitte aussi à rencontrer les logiciels libres. Parce que dès que vous commencez à vous préoccuper des questions de licences à l’ère du numérique ils ne sont pas bien loin…

Notes

[1] MFA est l’acronyme de Made For Adsense. Un site MFA signifie qu’il a été conçu avec l’objectif non dissimulé de faire des sous avec la régie publicitaire de Google. Pour le site qui nous concerne il y a d’autres bannières mais le modèle est bien présent : proposer un service qui amènera beaucoup de visiteurs qui engendreront beaucoup de revenus publicitaires. Et, si j’ose dire, tout le monde s’y retrouve puisque cela permet au service de rester tranquillement gratuit.

[2] Pour les clip-vidéos ou passages télés c’est à nuancer parce que les ayants droits négocient au cas par cas avec les plates-formes vidéos, ce qui vient passablement compliquer la situation. Mais ce qui est sûr c’est que vous, visiteur YouTube, vous n’avez pas le droit de les récupérer.

[3] La bornitude caractérise l’attitude bornée d’une personne ou d’un groupe d’individus. Exemple : Ségolène Royal a fait preuve de bornitude en tentant de justifier sa bravitude.