Richard Stallman en grande forme (conférence à l’ENST le 3 avril 2007)

Que ce soit en direct dans la salle ou en différé sur le net, je commence à avoir pas mal de conférences générales sur le logiciel libre de Richard Stallman au compteur. Il faut dire que le bonhomme pour apprécier la France y revient souvent et s’exprime dans un français plus que correct (espèce étrangère en voie de disparition ?).

A priori on a l’impression d’assister toujours à la même conférence. Et celle que nous vous présentons en vidéo ci-dessous donnée mardi 3 avril 2007 dernier à l’ENST (École nationale supérieure des télécommunications) n’échappe à la règle. Chaussures ôtées et plus beau tee-shirt exhibé, on se retrouve invariablement avec la même entame (dont je ne me lasse toujours pas) : « Je puis expliquer le logiciel libre en trois mots : liberté, égalité, fraternité… » (sous vos applaudissements). Idem pour la conclusion du reste (dont je commence à me lasser) : « …J’ai des autocollants, des pins et des porte-clé à vendre ». Sacré Richard !

Et pourtant, variation sur le même thème, elles ont toutes un petit quelque chose qui les distingue des précédentes. Voici ce qu’écrivait récemment un spectateur de cette conférence sur la liste de diffusion de l’APRIL. Je recopie d’autant plus volontiers cet extrait qu’il exprime bien ce que je voulais dire.

J’ai entendu RMS plusieurs fois depuis 1998. C’est toujours la même histoire mais elle est à chaque fois amendée, corrigée, complétée, modifiée, avec de nouvelles références et des éléments d’actualité…

Mardi soir il a présenté cette histoire sous un jour très nouveau et original, qui me semble intéressant pour sensibiliser le grand public (…) et lui faire comprendre concrètement l’intérêt du LL pour lui. C’était construit, tout était utile/indispensable, la boucle était bouclée. Tout cela à partir des mêmes grandes lignes de réflexion remontant à 1983/4.

Vous voulez un exemple d‘élément d’actualité de la conférence de l’ENST ? Point d’impatience, il suffit d’attendre… la deuxième phrase. Ce qui donne : « Je puis expliquer le logiciel libre en trois mots : liberté, égalité, fraternité. Trois principes que le gouvernement actuel de la France ne respecte plus…» No comment !

Toujours est-il qu’effectivement mardi soir et pour une heure environ c’était du grand Stallman (ou RMS pour les intimes). Définition et historique du logiciel libre (ou LL pour les intimes), différence avec le logiciel privateur (terme qu’il semble désormais privilégier à logiciel propriétaire), du danger des DRM et des brevets, différence entre son approche et celle de Linus Torvalds, différence entre Logiciel Libre et Open Source (quand l’un parle d’éthique et de liberté l’autre insiste plutôt sur rentabilité, efficacité et rentabilité), pourquoi il faut dire GNU/Linux et non Linux tout court, un point sur l’emploi, un autre sur l’éducation (et sa mission morale et sociale), un clin d’œil aux droits de l’homme… tout y était.

Pédagogie et vulgarisation de haute volée, une conférence que je vous invite à voir et à faire passer à vos proches qui seraient susceptibles d’être intéressés par un sujet qui dépasse en fait aujourd’hui le stricte cadre du logiciel libre pour ne pas être loin de proposer un véritable projet de société.

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Je suis votre pire cauchemar

Janvier 2000, Eric S. Raymond, l’une des plus célèbres personnalités du logiciel libre (auteur notamment de La cathédrale et le bazar), se retrouve dans un ascenseur et remarque le badge Microsoft de l’un de ses occupants Craig Mundie.

Je vois que vous travaillez pour Microsoft, lui dit-il (avec perspicacité). Et l’autre, avec l’air un peu hautain du type en costard-cravate qui toise un hacker : Oui, et vous qui êtes-vous ?

Et Eric S. Raymond de réfléchir quelques instants et lui répondre… Je suis votre pire cauchemar !

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Il n’avait pas tort.
Et Microsoft en tremble encore… [1].

😉

Annexe : retranscription de la vidéo

That was in january 2000, and one of the people who was there was Craig Mundie who is some kind of high mocky mocker at Microsoft. I think vice-president of consumer products or something like that. And, hum, I have actually met him, I bumped into him in an elevator, in an elevator and I looked his badge and said I see you work for Microsoft and he looked back at me and said Oh yeah and what do you do? And I thought he seemed just sort of a tad dismissive. I mean, here’s the archetype of, you know, guy in a suit looking at scruffy hacker and so I gave him a thousand yard stare and said I’m your worst nightmare.

Notes

[1] Cet extrait vidéo est issu du film Revolution OS (2001)




Stallman, Torvalds, Novell et la licence GPL v3

GNU GPL - elloa - Flickr - CC BY-NC

La plus célèbre et la plus diffusée de toutes les licences libres, la GNU General Public License, est sur le point de sortir sa troisième version (la GPL v3). Ce sera un événement majeur dans la sphère plus si petite que cela du logiciel libre. Il faut dire que la version précédente, c’est-à-dire la version officielle actuelle pour quelques jours encore, remonte à 1991, Cette remarquable longévité témoigne de son efficience et de sa stabilité mais il fallait bien lui apporter quelques révisions car dans l’intervalle, le développement d’internet, les DRM, les brevets logiciels, le cas exemplaire de TiVo, l’accord Novell Microsoft… de l’eau avait coulé sous les ponts du monde numérique et la nouvelle donne impliquait aussi de nouvelles menaces.

Nous sommes désormais dans la dernière ligne droite d’un long processus de maturation discussion qui aura connu ses difficultés et ses controverses. Ainsi, en septembre 2006, lors de la mise en ligne du deuxième brouillon de cette troisième version, Linus Torvalds en personne menaçait de ne pas faire passer le noyau Linux sous GPL v3 mais de rester sous GPL v2 ce qui aurait inévitablement engendré une crise au sein de la communauté.

Le troisième et dernier brouillon de la GPL v3 (faut suivre !) vient de sortir et, bonne nouvelle, il semble qu’il ait plutôt rassuré Torvalds. Un article de Linux.com par Bruce Byfield fait le point en résumant les avis et positions de Richard Stallman (en quelque sorte le papa de la GNU GPL), de Linus Torvalds (en quelque sorte le papa de GNU/Linux) et d’un représentant de Novell (le papa de ses enfants).

Traduction (n’hésitez pas à en proposer des améliorations dans les commentaires).

Stallman, Torvalds, and Novell comment on GPLv3
Jeudi 29 mars 2007 – Bruce Byfield

Les commentaires à propos de la troisième version de la GNU General Public License (GPLv3), sortie hier, continuent d’affluer. Jusque là nous avons parlé avec le fondateur de la Free Software Foundation : Richard M. Stallman, le créateur de Linux : Linus Torvalds et le directeur des relations publiques de Novell : Bruce Lowry. Leurs réactions apportent de nouvelles perspectives et laissent entrevoir un possible premier pas vers un consensus. Ensemble, ils mettent en avant les points qui monopoliseront sûrement les discussions à propos de cette version dans les jours à venir.

Richard Stallman

Richard Stallman n’a pas pris part à la consultation autour de la GPLv3. A la place, il a quitté son poste de consultant au Software Freedom Law Center pour se concentrer sur les problèmes qui avaient été soulevés. Le processus, qui a duré presque deux ans pour lui, a représenté "pas mal de travail" dit-il. Cependant il ajoute "Je ne vois pas comment on aurait pu l’éviter. Beaucoup de problèmes que nous n’avions pas anticipés ont été soulevés".

Pour Stallman, la GPLv3 fait partie de l’évolution constante de la licence pour empêcher les tendances technologiques et légales de nuire aux principes du logiciel libre. "Avec la GPLv1 je voyais deux moyens pour quelqu’un de rendre un logiciel libre vraiment propriétaire" dit-il. "L’un était par l’ajout de termes supplémentaires à la licence, l’autre moyen était de ne pas publier la source. Donc la GPLv1 a rendu ces deux choses impossibles. Ensuite, en 1990 j’en ai trouvé un autre : les détenteurs de brevet pouvaient faire pression sur les développeurs et leur imposer des conditions plus restrictives sur l’utilisation du logiciel. Alors la GPLv2 a ajouté la Section 7, selon laquelle soit vous distribuez votre produit avec toutes les libertés liées à la GPL soit vous ne le distribuez pas, peu importent les conditions qui vous sont imposées. Actuellement nous avons découvert deux autres manières pour rendre un logiciel libre vraiment propriétaire : l’un d’entre eux est la TiVoisation (NdT : en rapport avec les enregistreurs numériques TiVo aux Etats-Unis) et l’autre est l’accord Novell-Microsoft, donc nous essayons de bloquer les deux. Et à chaque fois que nous découvrirons ce qui constitue une menace pour les libertés des utilisateurs nous essaierons de la bloquer."

Stallman dit que le dernier énoncé couvrant l’accord Novell-Microsoft a été achevé moins de cinq jours avant la sortie de la troisième version. L’astuce, dit-il, était d’écrire le langage dans la Section 11 afin de ne pas écarter de tels accords comme les licences partagées entre plusieurs sociétés qui incluent un engagement mutuel sur les brevets ou un arrangement avec ce qu’il appelle les "trolls des brevets", ces sociétés qui obtiennent des brevets et font leur beurre sur des litiges ou par des menaces de procès. A contre cœur il a accepté d’ajouter une ultime phrase qui consacrerait l’accord Novell-Microsoft, mais il dit "J’espère qu’on en arrivera pas là". Le maintien de cette phrase dépend, d’après lui, des commentaires de la communauté sur cette version.

Après le lancement de la GPLv3, Stallman prévoit une révision de la GNU Free Documentation License et de l’Affero GPL, une licence créée pour les logiciels proposés comme services Web. Malgré les efforts d’internationalisation de la GPLv3, il ne s’attend pas à voir de traductions officielles de la licence dans d’autres langues. "Ça serait bien d’avoir des versions officielles", dit-il, "mais c’est aussi très risqué. Je suis très peu enclin à prendre ce risque."

A propos de l’opposition d’opinion entre l’open source et les logiciels libres, que la GPLv3 a souvent accentués, Stallman dit qu’ils font tous les deux partie de la communauté du logiciel libre. Cependant, en se référant aux défenseurs de l’open source, il dit : "Tout le monde n’accorde pas le même prix à la liberté. Quand on donne la liberté aux gens de choisir leur propre opinion, ils ne tomberont pas tous d’accord." En même temps, Stallman dit qu’il pense qu’un consensus sur l’adoption de la GPLv3 est essentiel, car "les projets sous GPLv3 protègent les utilisateurs de nouvelles menaces contre leur liberté. Si la GPLv3 n’est pas largement adoptée, ou si de nombreux programmes restent sous GPLv2, alors ces programmes seront vulnérables à de nouveaux types d’attaques. Par exemple, si Linus (Torvalds) ne se convertit pas à la GPLv3, alors les utilisateurs de Linux seront vulnérables à la TiVoisation. C’est un problème important.

"Quand le but d’un programme est de vous limiter, le rendre plus puissant et fiable dans ce qu’il fait est pire. C’est donc une erreur de dire que l’obtention de logiciels plus puissants et fiables est un but" comme le maintient le point de vue de l’open source. Au contraire, "le but du mouvement des logiciels libres est de vous donner le contrôle du logiciel que vous utilisez. Ensuite, si vous voulez le rendre plus puissant vous pouvez y travailler." Malgré cela, Stallman garde quelques espoirs. Il remarque, par exemple, que les défenseurs de l’open source ne partagent pas tous le même avis. Il montre Sun Microsystems comme exemple d’une société dominée par la pensée open source et qui envisage d’embrasser la GPLv3 pour des raisons qui lui sont propres.

Linus Torvalds

Quand la deuxième version de la GPLv3 a été publiée, Linus Torvalds a été l’un de ses critiques les plus francs. Bien qu’il insiste sur le fait qu’il ne donne qu’une opinion rapide sur la GPLv3, et qu’il pourrait changer d’avis à mesure qu’il l’étudie plus en détail, sa première réponse à la troisième version donne un accord nuancé.

"Est-elle meilleure ?" demande Torvalds rhétoriquement. "Et de loin ! Mais elle a été limité de manière qui la rendent plus saine au moins. Je devrai y réfléchir. Le langage employé est plus clair et meilleur que celui de la GPLv2 à bien des égards et de nombreuses zones que j’aurai qualifiées d’"absurdité évidente et complètement idiote" ont soit été améliorées soit complètement retirées."

Torvalds approuve la reformulation et les clarifications des termes ajoutés dans la Section 7, suggérant que la troisième version rende la double licence plus simple dans des cas particuliers. Il ajoute : "l’absence totale de nouvelles restrictions est un soulagement énorme et rend la licence bien plus utile".

"Je ne suis pas certain que l’accord Novell (avec Microsoft) méritait tant d’attention", dit Torvalds, en référence à la Section 11 de la version. Cependant, il dit : "Je pense effectivement que ce sujet (plutôt que l’hystérie autour des DRM) était potentiellement une bien meilleure incitation à écrire la GPLv3 de prime abord."

La Section 6 autour de l’anti-TiVoisation couvre déjà cette "hystérie des DRM". A propos du langage tenu dans cette section de la version actuelle, qui remplace une interdiction complète des technologies restrictives et les logiciels espions par l’obligation d’inclure leur code source : "Il prétend toujours contrôler non seulement le logiciel, mais aussi le matériel ou l’environnement sur lequel le logiciel est installé. Je trouve ça odieux, mais le langage est bien meilleur, et ils (la FSF) semblent avoir réalisés que leurs anciennes versions étaient insensées (c’est-à-dire qu’ils disent clairement que si quelque chose est créé pour ne pas recevoir de mise à jour il n’y a pas de raison qu’il demande des ‘informations d’installation’ et des clés). Le fait de limiter les choses aux ‘dispositifs pour utilisateurs’ permet aussi de se débarrasser d’un grand nombre de problèmes idiots présents dans les versions antérieures de la GPLv3. "Sous cette nouvelle forme je pense que la GPLv3 devient au moins une alternative viable à la GPLv2. Je dois encore la lire en entier quelques fois et laisser les choses se décanter mais intérieurement, après l’avoir lue une première fois, je sens au moins que je n’ai plus cette impression de ‘Je n’aurai jamais choisi cette licence si je devais commencer un projet.’"

Novell

Représentant Novell, Bruce Lowry a refusé de fournir une réaction détaillée à cette version, apparemment pour réserver les commentaires officiels pour la version finale. Cependant il indique rapidement que "Rien dans cette nouvelle version de la GPLv3 ne réduit la capacité de Novell à inclure des technologies sous licence GPLv3 dans SUSE Linux Enterprise, openSUSE et d’autres offres open source, ni maintenant ni dans le futur."

Lowry dit "Nous sommes fermement décidés à poursuivre le partenariat avec Microsoft et ce, comme nous l’avons toujours fait, en total accord avec les termes des licences des logiciels que nous proposons, logiciels sous licence GPLv3 compris. Si la version finale de la GPLv3 a un impact potentiel sur l’accord que nous avons avec Microsoft, nous réglerons ça avec Microsoft." Lowry décrit Novell comme un "soutien fort au logiciel libre et à l’open source" et comme un "donateur important pour un grand nombre de logiciels libres et de projets open source."

Un avant goût des mois à venir

Stallman, Torvalds et Novell attendent de voir ce qui va se passer et la version finale de la licence avec de s’engager pleinement. Cependant, leurs commentaires mettent en avant les problèmes autour desquels tourneront les discussions dans les trois prochains mois à mesure que la GPLv3 s’approche de sa version finale. Malgré des efforts évidents de la part de chacun pour éviter les conflits et malgré quelques signes encourageants, le consensus est encore loin d’être atteint, mais l’adhésion générale à la GPLv3 semble déjà plus probable qu’il y a six mois.

Bruce Byfield est un journaliste informatique qui écrit régulièrement pour Newsforge, Linux.com et IT Manager’s Journal.




Mais que fait la police ?

Hospital, Amagasaki - m-louis - CC BY-SA

Deux petites choses et un rappel autour des polices de caractères (en fait on dit plutôt fontes de caractères si j’ai bien compris).

Tout d’abord la sortie du site Open Font Library qui se veut le pendant de l’Open Clip Art Library mais pour les polices. L’objectif est de regrouper des polices librement utilisables puisque dans le domaine public (c’est la condition d’entrée pour être sur le site). Pratique !

Ensuite une sorte de tableau d’équivalence graphique entre les polices Linux et quelques grands classiques du monde Windows et Mac (Arial, Verdana, Georgia,, Courrier New…). Très pratique ![1]

Quant au rappel, c’est pour mettre une nouvelle fois en lumière la police libre DejaVu que nous sommes nombreux à utiliser.[2]

Notes

[1] Surtout pour le linuxien fraîchement débarqué du monde Windows ou Mac.

[2] L’illustration est une photographie de m-louis intitulée Hospital, Amagasaki issue de Flickr et sous licence Creative Commons BY-SA.




L’autre raison de voter Ségolène d’après Rocard

Sacré Rocard ! Ce n’est pas ce extrait vidéo[1] qui va lui faire baisser sa cote de popularité auprès de la communauté ! Et la parti socialiste a certainement vu juste en lui confiant récemment une mission « sur les enjeux du numérique » [2].

A la question : quelle est pour vous la meilleure raison de voter Ségolène Royal ? Il répond que la meilleure raison de voter socialiste, c’est-à-dire Ségolène, c’est actuellement l’état économique du monde….

C’était somme tout attendu mais ce qui l’était moins c’est qu’il ajoute une autre raison : le… logiciel libre !

Retranscription intégrale du passage :

« Et puis j’ai une raison de plus qui est l’intérêt que j’ai porté au problème du logiciel libre, c’est-à-dire au problème de l’ouverture dans l’émergence d’une société de l’information. L’émergence de l’internet, la multiplication des internautes en très grand nombre et des activités des services que permettent ces nouvelles technologies offrent un champ considérable que les grandes puissances industrielles et financières aujourd’hui voudraient limiter par trop de contrôle, une brevetabilité, qui est un monopole pendant quelques temps, et cela tarirait je crois la fertilité de tout ce champ. Je suis très reconnaissant à l’équipe de campagne de Ségolène d’avoir pris conscience de cela et d’avoir souhaitée qu’un rapport soit fait qui prépare ce qu’elle fera si elle est élue. »

—> La vidéo au format webm

Bien sûr, comme c’est à lui qu’on a confié la mission il en profite pour l’évoquer et donc par là-même se donner un peu d’importance.

Il n’empêche que le téléscopage de l’état du monde et du logiciel libre comme raisons de voter en faveur d’un candidat à l’élection présidentielle, c’est du jamais vu de la part d’un ancien Premier Ministre. C’est également assez révélateur de remarquer que Michel Rocard dont la mission a pour (vaste) titre « les enjeux du numérique » met tout de suite en avant le logiciel libre.

Rocard président ! Rocard président !

😉

Notes

[1] La vidéo est issue du site dédié du parti socialiste.

[2] Michel Rocard s’est vu confier par le PS une mission portant « sur les enjeux du numérique ». Il se penchera sur les thèmes suivants: « Comment relancer l’innovation dans le numérique et le logiciel en France et en Europe ? Comment les technologies de l’information peuvent elles contribuer aux objectifs que le pacte présidentiel s’assigne en matière de réussite éducative ?» Il devra également apporter des réponses à trois questions: « Comment l’informatique (et les logiciels libres) peuvent ils contribuer à la réforme de l’État ? Comment le numérique peut-il revitaliser notre politique culturelle ? Comment préserver l’ouverture, l’innovation, la concurrence, l’interopérabilité dans la société de la connaissance ? ». Ses conclusions seront remises à Ségolène Royal au début du mois d’avril. Par le passé, Michel Rocard a notamment travaillé sur le dossier des brevets logiciels en Europe : il a défendu la non-brevetabilité des logiciels au Parlement européen. (source AFP)




Hi, I’m Linux !

Vous connaissiez peut-être la campagne de pub d’Apple Get a Mac campaign ?

Il s’agit d’une succession de petits clips qui sont autant d’échanges entre deux uniques personnages. Chaque clip commence invariablement ainsi :

« Hello I’m a Mac / And I’m a PC ».

Et, on s’en doute, les dialogues et situations ont une fâcheuse tendance à valoriser Mister Mac et à ringardiser Mister PC (et donc par extension Mister Microsoft).

Certes mais alors que faites-vous du troisième homme de la campaign ? En l’occurrence le troisième homme c’est une femme et, je ne sais pas pourquoi, mais elle m’est tout de suite bigrement sympathique 😉

On doit cette contre-pub à Novell[1] qui, comme IBM, communique ici de manière astucieuse et volontairement discrète autour de GNU/Linux.

Notes

[1] Vous trouverez sur le site de Novell une autre contre-pub de la même veine ainsi que les liens vers les formats mpg et ogg des vidéos.




De la difficulté du Linux inside chez Dell et ailleurs par Mark Shuttleworth d’Ubuntu

Mark Shuttleworth - by Stopped. - Flickr

La société Dell a ouvert mi-février un site boîte à idées (le Dell IdeaStorm) où elle invitait les internautes à exprimer leurs desiderata en matière de produits (soit en émettant une idée originale, soit en votant pour une idée déjà éditée). Résultat des courses : un gros buzz mais surtout un véritable plébicite pour Linux et les logiciels libres.

La première proposition qui récolte à ce jour plus de cent mille suffrages (et plus de mille commentaires) concerne la pré-installation de Linux (accompagné ou non de Windows)[1]. Je ne sais si Dell s’attendait à un tel engouement mais toujours est-il qu’il fallait bien faire quelques chose après avoir ouvert la boîte de Pandore. Et c’est ainsi que Dell met en ligne jusqu’au 23 mars prochain un questionnaire afin de mieux étudier une éventuelle intégration de Linux dans ses gammes grand public. On notera que le choix des distributions par défaut sont : Novell/SuSE Linux Desktop, Red Hat Enterprise Desktop, Fedora, OpenSUSE et Ubuntu (mais on peut ajouter la suggestion de son choix).

Du coup le big boss d’Ubuntu Mark Shuttleworth, a pris sa plus belle plume pour nous faire part sur son blog de son avis sur le sujet. On peut lire entre les lignes qu’il aimerait bien qu’Ubuntu fasse partie des heureux élus mais il va surtout beaucoup plus loin en analysant pourquoi selon lui Linux a du mal à occuper nativement les PC neufs. Et de proposer quelques pistes pour y remédier.

Une traduction que nous devons à notre dream team Framalang : Olivier, GaeliX et DonRico.

Pré-installer Linux

Le fait que l’idée la plus soutenue de l’IdeaStorm lancé par Dell soit la pré-installation de Linux (sous la forme de Ubuntu | Fedora | OpenSuSE) a suscité beaucoup d’attention. À vrai dire, la question ne se pose plus de savoir si une pré-installation de Linux est une idée populaire chez les consommateurs. Pourquoi alors est-il si difficile d’acheter un PC aux États-Unis ou en Europe avec Linux (Linux seul idéalement) sur le disque dur ?

Les détails, comme toujours, c’est là que le bât blesse.

Premièrement, les marges sur les PC sont très minces.

Il en découle deux conséquences significatives. La première, et c’est la plus importante, c’est que les fonds alloués par Microsoft pour le marketing croisé représentent une part de poids dans les marges de bon nombre de grands revendeurs de PC. Faire un pied de nez au géant peut certes être amusant, mais c’est risqué. Si Microsoft réduit la contribution marketing par PC allouée à un certain revendeur, celui-ci se retrouve avec un gros handicap financier vis-à-vis de ses concurrents. Par conséquent, l’un des problèmes majeurs auquel est confronté un revendeur ou un constructeur lorsqu’il envisage la pré-installation de Linux, c’est l’impact que ce choix aura sur ses relations avec Microsoft — c’est-à-dire un risque de résultats inférieurs.

Pratiquer de faibles marges implique que toute interaction avec un client ou un appel au support client peut réduire le profit à néant, pas seulement pour cette vente mais pour bien d’autres également. Le pire scénario étant quelqu’un qui achète un ordinateur au prix le plus bas sur le site web d’un marchand en pensant que la machine est livrée avec Windows. Ensuite il téléphone, furieux parce que "ça ne marche pas avec le jeu qu’il essaye d’installer". Un client qui achète Linux par accident sans savoir ce que cela signifie coûte très cher à une entreprise qui fait relativement peu de profit sur le secteur des produits bas de gamme. Pour cette raison, je ne pense pas que cela ait un sens pour Walmart de proposer des PC d’entrée de gamme basés sur Linux, aussi n’avons-nous jamais fait pression sur un revendeur américain ou européen pour qu’il tente la pré-installation d’Ubuntu, à moins que celui-ci puisse, à notre sens, isoler le marché d’acheteurs qui veulent vraiment Linux de ceux qui recherchent juste une super offre sur un "ordinateur (Windows)".

Deuxièmement, nous, partisans des logiciels libres, sommes une foule exigeante et très difficile à satisfaire. Vous savez comment vous êtes, vous vous asseyez et configurez votre Dell dans les moindres détails, vous voulez un modèle particulier de portable HP, vous voulez celui avec le circuit graphique Intel, pas l’autre puce, parce que vous privilégiez l’approche des pilotes libres d’Intel… vous êtes, en résumé, un client expert et exigeant. Ce qui signifie que pour nous atteindre grâce à Linux, un revendeur devrait proposer Linux PARTOUT, pas seulement sur quelques modèles.

Pire encore, nous ne sommes pas des utilisateurs "Linux", nous sommes des utilisateurs de la version 6.06.1 d’Ubuntu, de la version 10.2 de SuSE ou de Fedora 6. Nous voulons une distribution particulière, et dans de nombreux cas une VERSION spécifique de cette distribution. Afin de nous satisfaire, le vendeur devrait offrir une large palette de possibilités, machine et distribution/version.

C’est une proposition coûteuse.

Alors que peut-on faire pour qu’on réponde à nos attentes ?

Tout d’abord, nous pouvons aider les vendeurs à avoir un aperçu plus détaillé de la nature réelle de la demande. Par exemple, voilà un sondage réalisé par Dell qui, je suis sûr, aidera à orienter leurs décisions pour vous aider à trouver une offre Linux chez eux:

http://www.dell.com/linuxsurvey/

L’idéal, bien sûr, serait que ce genre de sondage ne soit pas limité à un vendeur afin que nous puissions donner notre avis une fois et le voir pris en compte par toute l’industrie, mais c’est déjà ça. (L’idéal serait aussi que Dell considère Ubuntu comme étant supporté par la communauté mais également par une société – mais ça, c’est une autre histoire 🙂 )

Ensuite, nous pouvons réfléchir à des moyens qui permettraient de changer le modèle afin qu’il y ait une meilleure adéquation entre les attentes des clients et les contraintes économiques de l’industrie. Par exemple, si vous êtes de ceux qui ont voté pour la pré-installation de Linux sur le forum Dell IdeaStorm, seriez-vous heureux de recevoir un ordinateur Dell sans OS et un CD d’Ubuntu dans la boîte, que vous devriez installer vous-même sans l’aide de Dell ? Et que diriez-vous si on vous donnait l’assurance que l’ensemble des composants que vous avez installés "devraient" marcher, mais sans garantie ? Peut-on ajuster ces paramètres jusqu’à obtenir votre satisfaction, tout en laissant à Dell des profits corrects pour une prise de risque raisonnable ? Résolvez ce problème et je pense que nous ferons un pas vers l’éradication du Bug #1[2]

Addendum :

Bien sûr, certains revendeurs se spécialisent dans la pré-installation de Linux. Mon préféré étant System76, qui propose une grand choix de portables et de PC de bureau avec, entre autres, Ubuntu pré-installé. Bravo à eux pour avoir déniché ce secteur du marché et réussi à y connaître le succès.

Mark Shuttleworth, le 14 mars 2007

Notes

[1] On notera qu’en proposition numéro 2 arrive une autre excellente idée : la pré-installation d’OpenOffice.org.

[2] NdT : Ce "bug #1", clin d’œil des développeurs d’Ubuntu, peut se traduire ainsi : « Microsoft possède la plus grosse part du marché des PC actuels. C’est un bug qu’Ubuntu souhaite corriger. »




De l’art de ne pas être un bon rhéteur du libre

Combient de fois avons-nous tenté de convaincre notre auditoire de migrer vers du libre ? Et… d’essuyer malheureusement souvent une fin de non recevoir.

L’entreprise dépend bien entendu du contexte et du logiciel choisi. Dans l’ordre croissant de difficulté, il est a priori plus simple de substituer Firefox à Internet Explorer (voire OpenOffice.org Writer à MS Office Word) que de changer carrément de système d’exploitation.

Il n’empêche que quelle que soit la situation il y a, in my humble opinion, quelques erreurs classiques de communication à ne pas commettre.

  • Ne pas parler trop vite (cela a tendance à crisper votre interlocuteur)
  • Ne pas parler trop fort (cela a tendance à irriter votre interlocuteur)
  • Ne pas parler trop vite et trop fort (cela a tendance à exaspérer votre interlocuteur)
  • Ne pas utiliser de références absconses qui n’évoquent rien à votre interlocuteur si ce n’est qu’il le renvoit à sa propre ignorance (genre : noyau 2.6, LiveCD, et même Gnome 2.0 le jour de la sortie de Warty Warthog !)
  • Ne pas user d’expression qui induit un comportement absurde de la part de votre interlocuteur (genre : attends, comment peux-tu avoir la moindre opinion sur Ubuntu alors que tu ne l’as même pas essayé ?)
  • Ne pas porter de jugement à l’emporte pièce lorsque votre interlocuteur se montre réticent au changement ( genre : ok, reste dans ta caverne !)

Mélangez tout ces ingrédients et vous obtenez alors un dialogue de sourd où les protagonistes par réaction restent sur leur position en y mêlant ego et orgueil.

La preuve par l’exemple avec cet extrait de la série américaine (et donc planétaire) Veronica Mars.

Notre jeune geek a bien mérité cette réplique cinglante de la demoiselle qui clot le débat : I know what I like and I like what I know !