Pourquoi la distribution Fedora ne distribue pas Chrome et Chromium ?

Fedora, l’une des plus populaires distributions GNU/Linux, ne propose que Firefox et n’inclut pas les navigateurs Chrome et Chromium de Google.

On le comprend bien pour Chrome qui n’est pas libre, mais moins pour l’open source Chromium.

D’où ces quelques explications qui ne proviennent pas officiellement de Fedora mais d’un simple (et passionné) utilisateur de Fedora.

Scott Beamer - CC by-sa

Pourquoi Fedora ne distribue pas Chrome et Chromium ?

Why Fedora doesn’t ship Chrome and Chromium?

Alex Diavatis – 15 octobre 2012 – WorlOfGnome.org
(Traduction : pwetosaurus (@paul_playe), tibs, Sylvain, misc, ehsavoie, Gatitac, L’gugus, Penguin, viking, Nÿco)

Pour Chrome les raisons sont évidentes, Chrome de chez Google est un logiciel privateur, il contient des modules qui ne sont pas open source, donc fin de l’histoire.

Dans le cas de Chromium qui est issu du projet de système d’exploitation Chromium OS, les choses sont plus compliquées et remontent au 19 novembre 2009, quand une discussion débuta pour savoir si oui ou non il fallait pour distribuer Chromium avec Fedora. Presque trois ans plus tard, nous en sommes toujours au point de départ.

Fedora et l’open source

Fedora a toujours été et sera toujours un défenseur et un distributeur fondamental de l’open source. Un partisan fondamental de l’open source, mais pas un fanatique invétéré du logiciel libre, puisqu’ils fournissent des blobs binaires propriétaires dans leur noyau Linux. On ne peut rien reprocher à Fedora ici puisque cela vient en amont du noyau, le noyau de Torvalds, qui n’est pas totalement libre à cause de pilotes firmwares propriétaires présents principalement pour mieux faire tourner le matériel.

J’aime le nom Fedora et son logo est selon moi l’un des plus beaux qui soient dans le monde des distributions Linux. Le nom Fedora fait référence à un type de chapeau (borsalino) et vient rappeler qu’il provient de Red Hat, la plus grande compagnie open source.

Fedora Logo

Il y a cependant un fait gênant : la police du logo est une police commerciale (très chère qui plus est avec ses 275$ pour l’utiliser).

Dans leur wiki, à propos de leur logo, ils écrivent :

La police utilisée pour le logo est Bryant2. Cette police n’est pas une police libre mais elle a été choisie parce que c’est celle qui s’intègre le mieux dans le design du logo. La licence pour l’utilisation de cette police dans le logo officiel a été payée, ainsi le logo peut être utilisé à chaque fois que la marque déposée et les recommandations d’usage le permettent, sans coût supplémentaire.

Ils auraient quand même pu la partager via un torrent puisque le piratage est une forme de liberté numérique, comme l’anarchie est une forme de liberté sociale… Je plaisante bien sûr. 😉

En tout état de cause, tout cela montre que Fedora n’est pas piloté par une bande d’idéologues passés de mode du logiciel libre. Fedora ne distribue que des logiciels open source pour des raisons bien précises (sur lesquelles je ne m’étendrai pas), mais sûrement pas parce qu’ils « détestent » les logiciels commerciaux.

Fedora et l’environnement de bureau

Certaines personnes disent que Fedora n’est qu’une version de test pour la distribution commerciale Red Hat Enterprise Linux (RHEL) et ne veulent pas être des « bêta-testeurs de Red Hat ». Je pense que, même si c’était peut-être le cas dans le passé, les choses ont évolué. Les deux dernières versions de Fedora (17 et 18) tentent vraiment de proposer un système convivial et de qualité pour un usage bureautique.

Pour être franc, je pense que Canonical nous a quelque part aidé le jour où Ubuntu a décidé de développer Unitypar dessus GNOME, ne faisant plus de ce dernier l’environnement de bureau par défaut. Aujourd’hui, Red Hat et GNOME sont contraints de faire de Fedora une distribution conviviale de qualité car ils ne bénéficient plus comme avant de l’aide d’Ubuntu. Bien sûr, Fedora a beaucoup de travail à accomplir pour rattraper Canonical car Ubuntu est désormais mondialement connu comme étant la distribution de bureau pour le grand public et a réussi à se faire un nom réputé sur le marché.

Fedora et les logiciels

Fedora a une politique stricte qui détermine quel logiciel est autorisé à être inclus dans leurs dépôts officiels et quel logiciel est interdit.

Le Projet Fedora encourage vivement à utiliser des logiciels libres et open source. Fedora possède une ligne de conduite qui impose les obligations suivantes :

  • Si c’est propriétaire, cela ne peut pas être inclus dans Fedora (la seule exception étant donc les firmwares binaires).
  • Si c’est légalement problématique, cela ne peut pas être inclus dans Fedora.
  • Si cela enfreint les lois des États-Unis, cela ne peut pas être inclus dans Fedora.

Vous pouvez trouver plus de détails sur la page du wiki « Fedora Forbidden Items ». Ainsi des logiciels de base comme certains pilotes nVidia et ATi, ceux des cartes Wi-Fi, la version Java d’Oracle, le greffon Flash d’Adobe, etc. ne sont pas inclus. Bien que je sois complètement d’accord avec ce qu’ils font, je ne suis pas toujours d’accord avec la manière dont ils le font.

Et nous en arrivons au sujet initial de ce billet, à savoir : pourquoi Fedora refuse d’incorporer Chromium à leur distribution.

Chromium et Chrome

Pour les gens qui ne connaissent pas la différence, Chromium est le navigateur open source dont Google Chrome tire son code source. Les deux navigateurs (Chrome et Chromium) partagent la majorité du code et des fonctionnalités bien qu’il y ait quelques différences mineures.

Chromium n’intègre pas de fonction de mises à jour automatiques, ni de lecteur PDF ni de lecteur Flash. Chrome est un gratuiciel et ils ne fournissent pas le code source (qui est quasiment identique à Chromium de toute façon), alors que Chromium est, accrochez-vous, sous licences BSD, MIT, LGPL, MS-PL et sous triple licence MPL/GPL/LGPL.

Pourquoi Fedora ne distribue pas Chromium


Chromium est en théorie un logiciel instable (mais en pratique stable) et ils ne distribuent pas de versions stables. C’est la première raison pour laquelle Fedora ne le distribue pas. Cependant, Chromium maintient de nombreux « forks » stables parmi les créations (ou builds) de la communauté et qui portent le même nom : « Chromium ». Ce n’est donc pas le principal problème aujourd’hui.

Le vrai problème, c’est la politique d’empaquetage de Fedora et la politique d’empaquetage de Chromium. Chromium est constitué de nombreux composants open source, mais concrètement il a tendance à les forker puis les empaqueter pour les intégrer.

Par exemple (cas d’école) Chromium utilise OpenSSL. Mais l’équipe de Chromium n’est pas vraiment satisfaite de son fonctionnement et elle veut y apporter des modifications. Ils font alors un fork et ils l’incluent dans le paquet de Chromium. Ils maintiennent cependant une documentation sur les modifications qu’ils apportent à ces paquets. Mais donc maintenant Chromium se retrouve avec son propre OpenSSL, qui n’a pas été testé avec le système et cela rend l’empaquetage difficile pour tous les contributeurs de distributions Linux.

Un rapport de bug a été ouvert à ce sujet en novembre 2009 : bug de suivi sur la création d’une vraie version pour les distributions Linux #28287

Bien que nous fournissions le code source, il y a quelques étapes nécessaires avant que cela soit utilisable en amont par les distributions Linux. Ce bug de suivi sert à en suivre l’avancement.

…mais encore aujourd’hui, il faut toujours un dépôt supplémentaire pour installer Chromium.

Tom Callaway

Tom Callaway est manager de l’équipe d’ingénierie Fedora chez Red Hat et travaille conjointement avec Google pour corriger les problèmes de Chromium dans le but de l’incorporer au dépôt officiel. Il maintient également ses propres paquets de test de Chromium.

Callaway décrit le problème :

« Google forke des bits de code libre pour Chromium comme un lapin fait des petits : avec régularité et sans trop y penser. Plutôt que de tirer parti des API existantes des projets upstream comme ICU, libjingle et SQLite (pour ne nommer qu’eux), ils préfèrent forker ce code à l’instant t et modifier à mort leurs propres API pour être utilisées dans Chromium.

Ce qui ressemble beaucoup à de la méthodologie Java, que je pourrais résumer ainsi : « j’ai envie d’utiliser ce code tiers mais mon application est trop spéciale pour l’utiliser tel quel, donc j’ai rajouté des jantes et pare-chocs en alu et un éclairage néon pour éclairer le dessous, puis j’ai fourré ma copie bling-bling dans mon application ». Une grande partie des développeurs upstream de Chromium semble avoir un passé de codeurs Java ce qui pourrait être une explication mais qui n’excuse rien. Cette façon de faire devrait être un dernier recours, pas la norme.

Voici ce qui devrait plutôt arriver dans l’absolu (en prenant SQLite comme exemple) :

  • google Hé, ça serait sympa si nous pouvions utiliser SQLite dans Chromium pour nos besoins de bases de données locales.
  • google Hum, l’API SQLite ne cadre pas à 100% avec la manière dont j’aimerais que Chromium l’utilise.
  • google Salut l’équipe SQLite, il y a quelques endroits où nous aimerions voir des améliorations de l’API pour que Chromium en tire profit dans notre cas d’utilisation.
  • sqlite_upstream Salut Google, c’est tellement cool que vous vouliez utiliser notre code.
  • sqlite_upstream regarde les changements proposés par Google à SQLite.
  • sqlite_upstream Intéressant, vous pourriez essayer d’utiliser la fonction X pour mieux répondre à vos besoins mais le reste des changements semble OK.
  • sqlite_upstream valide les changements dans le code source dans la révision 12345.
  • sqlite_upstream Notre prochaine version va les inclure.
  • google Ouais ! Nous allons dire aux gens d’appliquer notre patch ou d’utiliser la révision 12345 ou plus récente. »

Vous trouverez plus d’informations sur la page consacrée à Chromium dans le Wiki Fedora.

Finalement

Au final, il y a deux bons navigateurs open source, Firefox et Chromium, mais Fedora persiste à n’en fournir qu’un seul et, malheureusement pour moi, ce n’est pas celui que je préfère 🙂

L’ironie du sort, c’est que si vous recherchez « Fedora Chrome/Chromium » dans Google, il y a de fortes chances pour que vous vous retrouviez sur une page qui vous propose le téléchargement de Chrome, puisque Google fournit un dépôt officiel Chrome pour Fedora !

Et l’on se retrouva en fin de compte avec un Google Chrome et son Flash intégré 🙂

Crédit photo : Scott Beamer (Creative Commons By-Sa)




Un logiciel libre n’est pas toujours collaboratif et de qualité

Voici un titre étrange pour un blog comme le nôtre.

Oui il existe des logiciels libres de mauvaise qualité qui ne souffrent pas la comparaison avec leurs concurrents propriétaires ! Et oui encore la majorité des logiciels libres sont uniquement développés par un seul et unique contributeur : leur créateur !

Face à de tels logiciels, les partisans de l’open source pleurent car ils détruisent aussi bien leur argumentaire pratico-technique que le mythe de la collaboration spontanée. Les partisans de logiciel libre envisagent quant à eu les choses différemment car ce qu’ils voient avant tout c’est que le logiciel est libre.

Le logiciel libre n’est pas meilleur en pratique mais il est libre en théorie et c’est bien ça le plus important…

Remarque : Cette traduction est le fruit d’une coopération entre Framasoft (et son énergie plurielle présente sur Framalang et les réseaux sociaux) et l’April (via son équipe de traduction du site GNU.org)

James Rickwood - CC by

Quand le logiciel libre n’est pas meilleur, en pratique

When Free Software Isn’t (Practically) Better

Benjamin Mako Hill – GNU.org
Licence Creative Commons By-Nd – Version du 6 octobre 2012
(Traduction : Framalang et l’équipe Trad-GNU de l’April)

Les objectifs affichés par l‘Open Source Initiative sont les suivants : « L’open source est une méthode de développement logiciel qui exploite la puissance d’une évaluation décentralisée, par les pairs, et la transparence des processus. Les promesses de l’open source sont une meilleure qualité, une plus grande fiabilité, davantage de flexibilité, un moindre coût et la fin d’une situation permettant à des fournisseurs rapaces de verrouiller leurs produits. »

Depuis plus de dix ans maintenant, la Free Software Foundation ne cesse d’argumenter contre la qualification d’« open source » dont on affuble le mouvement du logiciel libre. Si nous, les partisans du logiciel libre, réfutons ce qualificatif d’« open source », c’est surtout parce que nous considérons qu’il s’agit d’un effort volontaire pour réduire la portée de notre message de liberté et masquer le rôle de notre mouvement dans le succès du logiciel que nous avons bâti. Si nous disons que le terme « open source » est mauvais, c’est fondamentalement parce qu’il tente d’éviter toute discussion à propos de la liberté du logiciel. Mais il y a une autre raison pour laquelle nous devrions nous méfier du cadre « open source ». L’argument fondamental de l’open source, tel qu’il est défini dans la déclaration ci-dessus, est souvent incorrect.

Malgré la suggestion de l‘Open Source Initiative, que « la promesse de l’open source est une meilleure qualité, une plus grande fiabilité, plus de flexibilité », cette promesse n’est pas toujours honorée. Bien que nous ne le mettions pas souvent en avant, tout utilisateur d’un logiciel libre aux premiers stades de son développement peut expliquer que ce logiciel n’est pas toujours aussi pratique, sur le plan purement fonctionnel, que ses concurrents privateurs[1] Un logiciel libre est parfois de piètre qualité. Il n’est pas toujours très fiable. La souplesse lui fait parfois défaut. Si les gens prennent les arguments en faveur de l’open source au sérieux, ils doivent expliquer pourquoi l’open source n’a pas tenu ses « promesses » et conclure que des outils privateurs seraient un meilleur choix. Il n’y a aucune raison pour que nous fassions de même.

Richard Stallman parle de cela dans son article « Pourquoi l’open source passe à côté du problème que soulève le logiciel libre » lorsqu’il explique : « L’open source repose sur l’idée qu’en permettant aux utilisateurs de changer et redistribuer le logiciel, celui-ci en sortira plus puissant et plus fiable. Mais cela n’est pas garanti. Les développeurs de logiciels privateurs ne sont pas forcément incompétents. Parfois ils produisent un programme qui est puissant et fiable, même s’il ne respecte pas la liberté de l’utilisateur. »

Pour l’open source, la mauvaise qualité d’un logiciel est un problème à analyser ou une raison de fuir ce logiciel. Pour le libre, c’est un problème à résoudre. Pour les partisans du libre, les bogues et les fonctionnalités manquantes ne sont jamais une raison d’avoir honte. Tout logiciel qui respecte la liberté de ses utilisateurs possède un avantage inhérent sur son concurrent privateur. Même s’il a ses propres problèmes, un logiciel libre a toujours la liberté.

Bien évidemment, tout logiciel libre doit commencer quelque part. Un nouveau programme, par exemple, a peu de chances d’offrir plus de fonctionnalités qu’un programme privateur déjà établi. Un projet commence avec de nombreux bogues et s’améliore avec le temps. Alors que les partisans de l’open source peuvent argumenter qu’un projet deviendra utile avec du temps et un peu de chance, un projet libre représente pour les partisans du logiciel libre une importante contribution, dès le premier jour. Chaque logiciel qui donne aux utilisateurs le contrôle sur leur technologie est un pas en avant. L’amélioration en qualité due à la maturation d’un projet n’est que la cerise sur le gâteau.

Un second point, peut-être plus accablant encore, est que le processus de développement collaboratif, distribué, évalué par les pairs, qui est au cœur de la définition de l’open source, ne ressemble que de loin à la manière dont sont développés en pratique la plupart des projets sous licence libre (ou « open source »).

Plusieurs études universitaires menées sur les sites d’hébergement de logiciels libres SourceForge et Savannah ont démontré ce que beaucoup de développeurs de logiciels libres ayant mis en ligne une base de code savent déjà : la grande majorité des projets libres ne sont pas particulièrement collaboratifs. Le nombre médian de contributeurs à un projet de logiciel libre sur SourceForge ? Un. Un développeur solitaire. Les projets de SourceForge du quatre-vingt-quinzième centile en termes de nombre de participants n’ont que cinq contributeurs. Plus de la moitié de ces projets libres, et même la plupart des projets qui ont fait plusieurs versions à succès et ont été téléchargés fréquemment sont l’œuvre d’un seul développeur avec un peu d’aide de l’extérieur.

En insistant sur la puissance du développement collaboratif et de « l’évaluation décentralisée par les pairs », l’approche open source semble ne pas avoir grand chose à dire, dans la majorité des cas, sur les raisons pour lesquelles on devrait contribuer à un projet libre ou se servir d’un logiciel en développement. Puisque les avantages supposés de la collaboration ne peuvent être constatés quand il n’y a pas de collaboration, la grande majorité des projets de développement libres n’ont pas d’avantage technique sur leurs concurrents privateurs.

Pour les partisans du logiciel libre, ces mêmes projets sont tous vus comme des succès importants. Comme chaque logiciel libre respecte la liberté de ses utilisateurs, les partisans du libre peuvent argumenter qu’il possède au départ un avantage éthique intrinsèque sur les concurrents privateurs – même sur ceux qui proposent plus de fonctionnalités. En insistant sur la liberté plutôt que sur les avantages pratiques, la défense du logiciel libre est ancrée dans la réalité technique d’une façon qui manque souvent à l’open source. Quand le logiciel libre est meilleur, nous pouvons nous en réjouir. Quand il ne l’est pas, nous n’avons pas à considérer cela comme une attaque dirigée contre lui ni même comme un argument valable contre l’utilisation du logiciel en question.

Les partisans de l’open source doivent défendre leur thèse selon laquelle le logiciel développé librement devrait, ou devra avec le temps, être meilleur que le logiciel privateur. Les militants du logiciel libre peuvent quant à eux demander : « Comment peut-on rendre le logiciel libre meilleur ? » Dans le cadre du libre, les logiciels de haute qualité existent comme un moyen plutôt que comme une fin en soi. Les développeurs de logiciels libres doivent s’efforcer de créer des logiciels fonctionnels, flexibles, qui servent bien leurs utilisateurs. Mais ceci n’est pas le seul moyen de progresser vers la réalisation d’un objectif qui est à la fois plus simple et bien plus important : respecter et protéger leurs libertés.

Bien sûr, nous ne cherchons pas à nier que la collaboration joue un rôle important dans la création de logiciels de haute qualité. Dans la plupart des projets libres ayant réussi, ce fut d’ailleurs le cas. Il faut comprendre, soutenir et développer la collaboration, plutôt que de considérer dogmatiquement qu’elle va de soi, quand bien même les faits sont là pour montrer le contraire.

Crédit photo : James Rickwood (Creative Commons By)

Notes

[1] Autre traduction de proprietary : propriétaire




Le voyage mouvementé de Wikitravel

En 2003 naissait le projet Wikitravel qui est un peu au voyage ce que Wikipédia est à l’encyclopédie : une rédaction collaborative de guides touristiques (pays, ville, etc.), multilingues, sous licence libre et sur un wiki.

Le fait est que cela a plutôt bien marché (exemple avec Paris). Ils en ont même fait de vrais guides papiers.

Sauf que jetez un œil au graphique ci-dessous et vous comprendrez vite que son histoire n’a pas été un long fleuve tranquille. De Wikitravel, on est passé à Wikivoyage pour espérer en arriver aujourd’hui à Wikimedia Travel. C’est tout le charme de la licence libre (en l’occurrence la CC By-Sa) et de ses forks possibles lorsque le projet prend, selon certains, une mauvaise direction.

C’est de cette histoire (à rebondissements) dont il est question dans l’article ci-dessous.

Remarque : On notera que son auteur (créateur de l’application WikiSherpa) est peut-être trop pessimiste car il se pourrait bien qu’on connaisse un happy ending grâce au concours de Wikimedia. Et puis, sans licence libre, on aurait été dès le départ totalement bloqué.

Timeline - Wikitravel

Tirer la leçon de la dramatique et lente agonie de Wikitravel

Lessons From The Dramatic Slow-Motion Death Of Wikitravel

Jon Evans – 29 septembre 2012 – TechCrunch
(Traduction Framalang : @ali0une, Pandark, aKa, LuD-up, @jfomhover, ali0une, lgodard, Karma-sama, martinien, senshu)

Il était une fois, en 2003, deux entrepreneurs avec un rêve. Ils s’appelaient Evan Prodromou et Michele Ann Jenkins, et ils ont rêvé d’un guide de voyage mondial édité collaborativement — un Wikipedia pour les voyages, si vous préférez. Ainsi, il créèrent Wikitravel. Et ils ont fait mentir l’expression anglaise « Lead zeppelin » qui sous-entend que le projet n’aurait jamais pu décoller. Deux ans plus tard, ils furent racheter pour 1,7 million de dollars (~1,3 million d’euros) par une compagnie nommée Internet Brands, pas mal d’argent pour ces nombreuses journées perdues avant que la startup ne devienne populaire. Et Wikitravel prospéra , et en prenant du recul, c’était plutôt bon.

Jusqu’à ce que le paradis s’en vienne à côtoyer les enfers…

Pendant six ans Wikitravel fonctionna bien. Il y avait bien la présence de quelques publicités mais rien d’intrusif. La plateforme technique sur laquelle il tournait prenait de l’âge et avait ses défauts, mais elle fonctionnait, et c’est tout ce qui compte, n’est-ce pas ?

En 2006 cependant, les administrateurs italiens et allemands (bénévoles et indépendants qui réparaient le site, éliminaient le spam, éditaient structure et langage, et le rendaient pour ainsi dire utilisable) ont forké toutes les pages du site en ces langues pour s’en aller migrer vers un nouveau site, appelé Wikivoyage, principalement à cause de la publicité placée par Internet Brands. C’était tout à fait légal parce que tout le contenu de Wikitravel est sous licence Creative-Commons. Et cela n’affecta pas vraiment Wikitravel (et en rien sa partie principale anglaise) qui continua à attirer un demi-million de visiteurs par mois. Son travail de guide pour la planète entière devenait meilleur de jour en jour…

Mais, il y a quelques mois, les administrateurs de Wikitravel en ont eu assez. Ils ont d’abord constaté l’inclusion de nouvelles publicités encore plus invasives et surtout ils ont perdu patience face à leurs demandes répétées de mises à jour techniques restées sans réponses. D’autant plus que quand Internet Brands se décida enfin à effectuer ces mises à jour la plateforme se retrouva toute pleine de bugs ! En conséquence de quoi les administrateurs de Wikitravel baissèrent les bras et voyagèrent à travers l’Internet jusqu’à cette oasis de contenu libre qui s’appelle la Wikimedia Foundation pour lui dire en substance ceci : « Nous n’en pouvons plus de notre logement actuel. Voudriez-vous héberger un site de voyage ? » La Wikimedia Foundation réfléchit, et décida finalement de répondre par l’affirmative.

Et puis l’enfer des procédures judiciaires s’est déchaîné.

Se sentant menacé par ce fork d’un Wikitravel hébergé par Wikimédia, Interned Brands, après avoir semble-t-il initialement proposé un partenariat, « intenta des poursuites contre les contributeurs bénévoles James Heilman et Ryan Hollliday, pour avoir utilisé le mot « Wikitravel » dans la phrase « Communauté Wikitravel » lors de la communication du fork », nous dit David Gerard. En réponse, la Wikimédia Fondation a elle_même intenté une poursuite stratégique contre la mobilisation publique et demandé des explications devant les tribunaux.

Nous allons laisser les sérieux avocats décider du sort de cette aventure. Je veux juste tirer quelques leçons personnelles de cette débâcle :

  • N’irritez pas vos utilisateurs les plus fidèles et actifs (NdT : power users). Vous pensez peut-être que la masse globale de vos utilisateurs est ce qui importe le plus, mais ce sont avant tout ces utilisateurs là qui fournissent avec passion le gros du travail. Ils sont pour ainsi dire le cœur et l’âme de votre site, et s’ils partent vous aurez de gros ennuis.
  • Ne retardez pas le paiement de votre dette technique. Comme la plupart des dettes, elle subit des interêts composés exponentiels 🙂 Et vous ne connaissez pas son taux d’intérêt jusqu’à ce que vous ayez commencé à la rembourser. Je pense qui si Internet Brands avait géré Wikitravel avec plus de considération et de compétences techniques, le fork n’aurait jamais eu lieu.
  • Ne poursuivez pas vos utilisateurs en justice dans un moment d’aigreur et de dépit. Vraiment. Ne le faites pas. N’avons nous donc rien appris de la RIAA (NdT : à comparer avec notre Hadopi) ? Respirez profondément, prenez un calmant, et détendez-vous. En effet, outre la question d’ordre moral, à partir du moment où vous poursuivez vos utilisateurs, vous perdez toute crédibilité aux yeux d’une fraction énorme de l’Internet. Et la crédibilité compte. Hélas, beaucoup de gens ne le réalisent pas, jusqu’à ce qu’ils perdent la leur.

Une version provisoire du nouveau guide de voyage anglophone est maintenant disponible. En attendant la suite…




Circulaire sur l’usage du logiciel libre dans l’administration : mon tout petit bémol

Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault vient de diffuser à l’ensemble des ministères une circulaire titrée « Usage du logiciel libre dans l’administration » émanant de la DISIC (Direction interministérielle des systèmes d’information et de communication).

La première et plus importante chose à dire c’est que c’est une énorme satisfaction pour tous ceux qui (comme nous à Framasoft) font la promotion du logiciel libre depuis des années et ont attendu longtemps un tel document. C’est dense, solide, sérieux et mature, et pour tout dire, on a parfois l’impression que des passages entiers ont été pompés sur les sites de l’April, Aful ou l’Adullact 🙂

Pour en savoir plus je vous invite évidemment à le lire (bizarre tout de même qu’il ne soit pour le moment disponible qu’en version PDF scannée, pas très logique avec le sujet). On en trouve déjà une bonne synthèse chez mon ami Thierry Noisette, une légitime satisfaction au Conseil National du Logiciel Libre ainsi qu’une réjouissance (vigilante) à l’April. Et puis ça donne déjà des titres sympathiques dans les médias comme L’Etat français privilégie l’utilisation des logiciels libres !

On pourra toujours objecter qu’on aurait pu aller encore plus loin avec les deniers du contribuable (systématiquement privilégier les solutions libres…) mais ne faisons pas la fine bouche et saluons cette spectaculaire avancée. Et, chers fonctionnaires, préparez-vous déjà à mettre cette circulaire sous les yeux de votre supérieur hiérarchique récalcitrant, je pense notamment au monde merveilleux de l’Éducation nationale.

Mais alors d’où vient le tout petit bémol évoqué dans le titre du billet ?

De l’introduction du paragraphe Un choix raisonné, en haut de la page 6 de la circulaire :

Le logiciel libre a été porté à l’origine par une philosophie d’ouverture et par des « pionniers militants » qui ont rendu les utilisateurs plus institutionnels, qu’ils soient publics ou privés, méfiants par rapport à cette approche. Aujourd’hui le choix du logiciel libre dans l’administration n’est pas un engagement idéologique mais le fruit d’un choix raisonné…

Je vous attends dans les commentaires pour nous proposer votre interprétation de cette citation parce que moi elle me perturbe un peu.

Tronquez-en le début comme ci-après et vous obtenez même quelque chose d’assez étrange (voire contradictoire) :

Le logiciel libre a été porté à l’origine par une philosophie d’ouverture (…) qui ont rendu les utilisateurs institutionnels (…) publics (…) méfiants par rapport à cette approche…

Le privé peut avoir parfois quelques raisons de l’être (profit, concurrence…) mais qu’on m’explique pourquoi le service public devrait être méfiant vis-à-vis de l’ouverture ?

Revenons cependant à la citation exacte. Si j’ai tiqué sur ce passage c’est que, oui, j’ai l’impression de faire partie de ces « pionniers militants ». Et oui cela me va très bien d’être associé à une philosophie d’ouverture. C’est même cela qui me plaît avant tout dans le logiciel libre.

Sauf que non pour cette prétendue méfiance des institutions, a fortiori publiques. On se base sur quoi d’ailleurs exactement pour affirmer péremptoirement cela ? Comme on dit chez Wikipédia : « références nécessaires » !

Après plus de dix ans d’actions associatives diverses et variées en faveur du logiciel libre, au sein de Framasoft et d’ailleurs, c’est franchement un peu dur à lire. Et ce n’est pas, me semble-t-il, de la susceptibilité mal placée (si, quand même, un peu ?). Tout ce travail effectué avec les autres « pionniers » bénévoles et passionnés aurait-il été au final contre-productif pour aboutir à cet antonyme de la confiance ?

Oui il y a des personnes, dont je suis, qui attachent une attention particulière à la pensée souvent radicale d’un Richard Stallman. Mais pour la plupart d’entre nous, il s’agit je crois bien plus alors d’un objectif à atteindre que d’une injonction à tout modifier ici et maintenant ! C’est d’ailleurs tout le sens de notre slogan « le route est longue mais la voie est libre ». Il est vrai que certains prennent cela au pied de la lettre et se rangent sous la bannière du « 100% libre ou rien » en adoptant trop souvent un ton hautain voire méprisant envers ceux qui n’auraient pas encore rencontrés la lumière. Ils sont véhéments mais minoritaires et en tout état de cause ce ne sont pas eux qui rédigent les communiqués mesurés et argumentés des quelques associations mentionnées plus haut. Dit autrement : il ne faut pas confondre les « intégristes du libre » (une infime partie) avec les « pionniers militants » (le grand tout).

À partir de là je ne vois pas ce qui a pu réellement rendre méfiantes les institutions, si ce n’est de les inviter régulièrement au changement en bousculant leurs habitudes (ce qui peut-être violent, je le concède, surtout lorsqu’elle sont… mauvaises).

Bien que jamais l’expression ne soit utilisée, je comprends fort bien que cette circulaire, en direction des services informatiques des administration, soit pragmatiquement bien plus « open source » que « logiciel libre ». Mais ce passage confus, voire offensant, n’était pas forcément très opportun.

Lorsque j’ai rencontré le logiciel libre, j’ai décidé peu de temps après, en 2001, de créer un modeste annuaire de logiciels libres pour Windows, pierre angulaire du futur réseau Framasoft. À l’époque on les comptait à peine sur les doigts d’une seule main et ils étaient globalement de piètre qualité. Et pourtant j’avais l’intuition et la conviction qu’ils portaient en eux les germes du futur succès que l’on connaît aujourd’hui (et qui n’est pas prêt de s’arrêter). Je sais que je me jette maladroitement des fleurs là, mais ce que je veux dire par là c’est que c’était bien moins un engagement idéologique qu’une analyse rationnelle lucide et précoce de la situation.

Autrement dit le fruit d’un choix raisonné qui a mis une bonne décennie à arriver jusqu’à d’autres…




Ceci est une Révolution : ce que l’Open Source a changé

Patrice Bertrand - SmilePatrice Bertrand est directeur général de la SSII Smile spécialisée dans l’intégration de solutions open source ainsi que président du prochain Open Word Forum (dont Framasoft sera).

Il a tout récemment fait paraître un article dans le quotidien économique et financier La Tribune qu’il nous a semblé intéressant de reproduire ici (enrichi de quelques liens) avec son aimable autorisation.

C’est accessible et synthétique. On n’hésite pas à employer les grand mots.

Et, clin d’œil à nos plus fidèles lecteurs, on peut également y trouver là comme une sorte de réconciliation entre les frères ennemis « open source » et « logiciel libre » (enfin vous nous direz dans les commentaires).

Ceci est une Révolution : ce que l’Open Source a changé

Patrice Bertrand – 17 septembre 2012 – La Tribune

URL d’origine du document

Les 11, 12 et 13 octobre prochains se tiendra à Paris, l’Open World Forum, un événement de renommée internationale dédié à l’open source et aux approches ouvertes. L’open source est une idée qui a pris naissance dans le monde du logiciel, mais a inspiré et bousculé bien d’autres domaines. Tout comprendre en quelques clics sur une révolution qui bien au-delà de l’informatique, touche l’ensemble de la société…

Logiciel libre et open source

Revenons aux origines. Le logiciel libre est imaginé dans les années 80 par Richard Stallman. Il affirme que les programmes informatiques doivent pouvoir être librement utilisés, et surtout étudiés et modifiés. Utopique pour certains, il amorce pourtant une véritable révolution, qui 20 ans plus tard a bousculé toute l’économie du logiciel, et bien au delà. Fin des années 90, certains préfèrent l’appellation alternative de logiciel open source pour désigner à peu près la même chose, mais en mettant en avant non pas tant la liberté, que les qualités spécifiques de ces programmes réalisés de manière collective, peu centralisée, dont le code source (le programme tel qu’il est écrit par un informaticien) est disponible et peut être modifié, utilisé pour créer de nouveaux programmes, des oeuvres dérivées.

A certains égards, l’open source est un mouvement humaniste. Il considère que le logiciel est, à la manière de la connaissance scientifique, une forme de patrimoine de l’humanité, un bien commun que nous enrichissons collectivement, pour le bien être de tous.

L’open source, disons ici plutôt le logiciel libre, porte aussi un message particulièrement d’actualité: le logiciel nous contrôle, il est vital pour nous de contrôler le logiciel. Des pans de plus en plus grands de notre vie sont sous la maîtrise de logiciels. Un logiciel détermine si votre voiture va freiner, un autre si votre pacemaker va faire battre votre coeur, et un autre peut-être déterminera pour qui vous avez voulu voter aux présidentielles. Le logiciel fait désormais plus que nous rendre service, il nous contrôle. Ce n’est pas un mal en soi, à condition seulement que le contrôlions aussi, que nous sachions ce qu’il fait exactement, et ayons le droit de le modifier si besoin. Cette exigence première du logiciel libre est plus que jamais essentielle.

Ces 20 dernières années, le logiciel libre et open source, réuni sous l’appellation FLOSS, a apporté d’incroyables bouleversements.

Dans l’informatique, une révolution aux multiples facettes

D’abord dans la manière de créer des programmes. Dans les années 90, peu après la naissance du web, c’est une révélation : les programmes les plus critiques de la toile, les programmes les plus utilisés, les programmes les plus complexes, sont des programmes open source. Même Bill Gates en prend soudain conscience, et adresse en 1998 un mémo à ses troupes, où il s’alarme de cette transformation, de ces logiciels aussi bons et parfois meilleurs, de cette nouvelle forme de concurrence.

L’open source a apporté une rupture dans l’économie du logiciel en abaissant les coûts d’une manière incroyable. Tout ce qui constitue le socle d’une plateforme informatique, d’une plateforme web, est devenu tout simplement gratuit : système d’exploitation, bases de données, logiciels serveurs, outils de développement, outils d’administration. Bien sûr, le coût total de possession n’est jamais nul : il faut du matériel, du support et de l’expertise humaine pour déployer et faire marcher tout cela. Mais pour une start-up, la barrière à l’entrée a été abaissée de manière phénoménale, stimulant et accélérant la création d’entreprises innovantes. Et pour les entreprises utilisatrices, cette nouvelle donne s’est traduite en gains de compétitivité.

Comme toutes les révolutions technologiques depuis la machine à vapeur, l’open source a amené une forme de destruction créatrice, comme l’avait décrit l’économiste Joseph Schumpeter. En produisant des alternatives quasi-gratuites à des logiciels anciennement coûteux, l’open source a fait disparaître des acteurs devenus non compétitifs, et réduit les marges de quelques autres. Mais le contexte nouveau d’un socle logiciel devenu un bien commun a permis l’émergence de milliers d’acteurs, de startups innovantes, dont certaines sont déjà grandes. Et a permis, plus largement, l’émergence du web, de ses acteurs géants, et des milliers d’acteurs plus petits mais innovants et grandissants.

Le développement logiciel a été profondément modifié lui aussi. L’approche moderne du développement consiste à assembler des composants, grands et petits, pour l’essentiel open source. Une part déterminante du développement consiste donc à sélectionner les bons composants et les intégrer, en ne développant réellement que les parties spécifiques, qui concentrent la valeur ajoutée de l’application. C’est une transformation du développement logiciel qui a apporté d’importants gains de productivité.

L’open source domine sur les serveurs et dans le cloud

L’open source a eu des succès mitigés sur le poste de travail, sur le PC ordinaire. Et pourtant, moins visible et moins connue du public, la victoire de l’open source a été écrasante du côté serveurs et Cloud. Si Windows domine sur les postes de travail, le système d’exploitation Linux a une domination plus grande encore sur les millions de serveurs des grandes plateformes du web, de Google, Facebook, Amazon, ou eBay, mais des plus petits acteurs de la même manière. Une étude récente estimait à 90 % la part de marché de Linux sur le Cloud de Amazon. Dans beaucoup de domaines, l’open source est en pointe, faisant naître les outils de demain. Citons par exemple l’émergence du Big Data, la manipulation des données à une échelle nouvelle, où les outils de bases de données anciens atteignent leurs limites, et où des technologies nouvelles sont nécessaires. Ces nouvelles bases, dites NoSql, sont pratiquement toutes des logiciels open source.

Open Innovation

L’open source a apporté aussi une nouvelle approche de la R&D. Une belle illustration est donnée par le projet open source Genivi, qui a l’initiative de BMW et PSA a réuni des grands constructeurs automobiles et équipementiers dans une démarche typique de R&D mutualisée, construisant ensemble une plateforme logicielle destinée à leurs véhicules. Pour réussir ce projet stratégique, ces grands industriels ont adopté le modèle open source tant en termes de socle, de développement, de diffusion, que de gouvernance. Et l’on pourrait citer évidemment le noyau du système Linux lui-même, auquel contribuent des dizaines d’entreprise, en faisant sans doutes le plus bel exemple de R&D mutualisée, à l’échelle mondiale. Les démarches appelées parfois « open innovation » ont montré les bénéfices d’une innovation plus ouverte sur le monde, moins cachée, fonctionnant en réseau.

Open Art

Certains ont présenté l’open source comme antagoniste à la propriété intellectuelle. C’est tout le contraire, puisque l’open source se définit par ses licences d’utilisation, qui s’appuient elles-mêmes sur le droit d’auteur. L’auteur, titulaire des droits, donne à l’utilisateur des droits étendus, et quelques devoirs. Ce principe par lequel l’auteur d’une oeuvre reste parfaitement identifié, conserve ses droits, mais autorise différentes utilisations et la redistribution de son oeuvre a été étendue à de nombreux domaines, bien au delà du logiciel.

L’open source se décline dans l’art également. Les licences Creative Commons ont permis de diffuser des oeuvres de toutes natures en donnant des droits étendus, en particulier une libre rediffusion, avec ou sans le droit de modifier l’oeuvre originale. Ainsi, la fondation Blender, qui développe l’un des meilleurs programmes d’animation 3D du monde, un programme open source, réalise des open movies, des films d’animation dont tous les fichiers source, qui permettent de générer le film, sont rendus disponibles et peuvent être modifiés. Comme un roman dont on pourrait réécrire la fin.

Open hardware

L’open source a gagné le matériel également, sous l’appellation de « open hardware ». Il s’agit ici de partager les plans de circuits et d’équipements entiers. Un bel exemple d’open hardware, le projet Arduino est un microcontrôleur programmable totalement open source, matériel et logiciel, qui peut être adapté pour toutes formes de traitement du signal, ou de contrôle de process. Il peut être programmé pour réagir aux signaux de capteurs externes, les traiter, et commander des actions. Depuis 2005 il s’enrichit d’année en année, et plus de 300 000 unités ont été fabriquées. La diffusion de l’open hardware est encore modeste, mais souvenons-nous que c’était le cas aussi de l’open source logiciel à ses débuts : un « truc de geek ». Mais ces trucs de geeks font tourner les plateformes du web aujourd’hui.

Le mot clé derrière ces projets, ces démarches, est celui de réappropriation de la technologie. La technologie n’est pas le domaine réservé d’une élite minuscule, du fond de la Silicon Valley. Nous pouvons la maîtriser, et particulièrement si nous réunissons nos forces. C’est le principe des FabLabs. Nous ne sommes pas que des consommateurs idiots qui s’endettent pour acheter le dernier smartphone, dont on n’aura pas le droit même de changer la batterie. Avec quelques amis, avec un peu d’aide, avec des plans et des logiciels open source, nous pouvons construire des choses extraordinaires, dans notre garage. Pas tout à fait le dernier smartphone, mais pas très loin. Les imprimantes 3D ouvrent de nouvelles frontières pour ces démarches. Après avoir pris le contrôle des logiciels, il sera possible de reprendre le contrôle sur le matériel. On rêve déjà de pouvoir télécharger, sous licence libre, les plans d’une pièce de rechange pour sa cafetière, d’imprimer chez soi sa pièce en 3D. Et un peu plus tard, d’imprimer la cafetière open source elle-même ! Utopique ?

Mais justement, c’est la plus grande révolution de l’open source, de montrer que l’utopie gagne, parfois.

Open médecine ?

Les systèmes open source ne sont pas que pour les bricoleurs du dimanche. Ils gagnent par exemple la recherche en médecine. Merveilleux exemple de matériel et de logiciel open source associé à une démarche de recherche : des chercheurs ont développé Raven, un robot chirurgien open source, mis à disposition des équipes de recherche du monde entier afin de faire progresser les logiciels et technologies de chirurgie assistée. D’autres chercheurs travaillent à une machine combinant scanneur et radiothérapie, dont les plans, le code source, et les instructions de fabrication seront open source. Il est intéressant de remarquer que certains de ces projets de médecine open source ont reçu le soutien de la FDA, qui est un peu l’équivalent de l’AFSSAPS, avec l’espoir en particulier que le logiciel open source améliore la qualité, jugée insuffisante, des équipements propriétaires.

Fédérer les énergies citoyennes

L’open source a montré aussi que l’on pouvait fédérer et organiser les efforts d’un grand nombre de personnes sur un projet commun. Il était précurseur de ce qu’on a appelé plus tard le crowdsourcing, ces projets qui impliquent un grand nombre de contributeurs bénévoles, dont la réussite emblématique est celle de Wikipedia, mais qui a aussi donné OpenStreetMap. Avec un double crédo : d’une part la connaissance est un bien commun qui doit être accessible à tous sans barrière économique, d’autre part les citoyens peuvent gérer eux-mêmes ce patrimoine, dans le cadre d’une organisation décentralisée, et d’une gouvernanceouverte.

Parmi les déclinaisons de l’open source, on peut citer aussi le mouvement de l’open data, la mise à disposition des données publiques, mais aussi des données de certaines entreprises. Une démarche citoyenne et démocratique d’une part, mais aussi le socle de nombreuses initiatives et modèles économiques nouveaux appuyés sur ces données.

L’open source a fédéré des combats citoyens fondamentaux. Les militants de l’open source ont une force particulière : ils réfléchissent aux tendances sociétales, mais sont aussi au coeur des technologies nouvelles et parfois de leurs rouages économiques. Ils ont compris par exemple l’importance de standards réellement ouverts, dont la spécification soit librement accessible, dont la gouvernance soit ouverte, dont l’utilisation soit gratuite. Ils se battent pour la neutralité du Net, ce principe fondateur de non-discrimination des flux sur le réseau mondial, qui a permis l’émergence de toute une industrie du web et qui est menacée aujourd’hui. Ils tentent d’expliquer aux politiques pourquoi les brevets ne sont pas applicables au monde du logiciel, où la seule protection du copyright est amplement suffisante. Dans le monde du logiciel, les brevets sont contre-productifs, ils découragent l’innovation, ils sont l’arme d’un oligopole de géants et d’entités mafieuses appelées patent trolls. Pour les premiers il s’agit d’effrayer les petits concurrents plus innovants. Pour les seconds, d’extorquer une rente sur l’innovation des autres.

Une industrie florissante

L’open source n’est pas à l’écart de l’économie, au contraire. Les développeurs qui construisent les programmes open source ne sont pas toujours des bénévoles : la plupart sont payés par des entreprises qui voient un intérêt bien analysé dans leurs participations à ces travaux : elles bénéficient de logiciels performants dont elles n’ont eu à financer qu’une fraction de la R&D, elles ont une parfaite maîtrise de ces technologies qui deviennent des standards, elles ont un rôle dans la gouvernance de ces projets.

En France, l’économie du logiciel libre représente plus de 300 PME et ETI, éditeurs de logiciels ou sociétés de services, dédiées au logiciel libre. Elles sont souvent réunies en associations régionales, elles-mêmes fédérées au sein du CNLL, le Conseil National du Logiciel Libre. Elles représentent ensemble plus de 3000 salariés, et connaissent une croissance annuelle de près de 30 %. Si on comptabilise également les emplois liés au logiciel libre dans les sociétés de services généralistes, l’industrie (notamment aéronautique) et les télécommunications, le chiffre d’affaires global lié à l’open source est estimé à 2.5 milliards d’euros, soit 6% du marché des logiciels et des services informatiques, et plus de 30.000 emplois, en croissance annuelle de 30%. Source : Pierre Audoin Consultants.

On le voit, les déclinaisons de l’open source sont nombreuses, les impacts de l’open source vont bien au-delà du logiciel, des nouvelles technologies, ils s’étendent à d’autres industries, à l’ensemble de la société, à nos conceptions de la citoyenneté, de la démocratie. Toutes ces facettes de l’open source, à l’articulation de la technologie et du sociétal, sont représentées à l’Open World Forum. Ceci est une révolution, comme le dit une célèbre marque technologique…




De la question des marques dans le logiciel libre

Le navigateur Firefox étant libre, vous pouvez l’adaptez à vos besoins, le modifier et le distribuer mais vous n’aurez plus nécessairement le droit, sauf autorisation de la Fondation Mozilla, de l’appeler Firefox. Dans le cas contraire il faudra lui trouver un autre nom.

Même chose s’il vous prend l’envie de vendre des tee-shirts avec le célèbre logo du panda roux entourant la terre. Sans autorisation de la fondation cela ne vous sera pas légalement possible.

On pourrait presque dire que dans le logiciel libre tout est libre sauf sa marque (nom, logo…).

Cela se conçoit bien car il est important de savoir qui fait quoi, mais c’est souvent une surprise pour l’utilisateur.

Ce billet de Benjamin Mako Hill évoque donc de cette question du branding qui doit être au service du projet et non mettre des bâtons dans les roues de sa communauté.

Roadsidepictures - CC by-nc-nd

Open Brands

Open Brands

Benjamin Mako Hill – 2 septembre 2012 – Copyrighteous (blog personnel)
(Traduction : GPif, ehsavoie, Fe-lor, goofy_chromium, Louson, JoKoT3, Penguin, pwetosaurus, Giant Jack)

Fin juillet, les membres de l’Awesome Foundation m’ont invité à participer, lors de leur conférence, à une interessante discussion au sujet des marques ouvertes (NdT : Open Brands). Awesome est un jeune regroupement d’organisations qui s’interroge pour savoir s’il faut, et si oui comment, controler ceux qui utilisent le terme Awesome dans leur nom. Ils m’ont demandé d’intervenir pour présenter comment la communauté du logiciel libre abordait ce problème.

La gouvernance d’un logiciel libre est souvent étonnamment floue sur le sujet. J’ai assisté et participé a des discussions houleuses sur cette question de la marque, dans chaque projet de logiciel libre (réussi) où j’ai travaillé. Plusieures années en arrière, Greg Pomerantz et moi avons écrit, autour de quelques bières, un brouillon de politique de marque déposée pour la distribution Debian. J’ai également travaillé avec le responsable du projet Debian, Stefano Zacchiroli et un avocat de du Software Freedom Law Center afin d’aider à la rédaction d’un brouillon pour la politique de marque déposée du projet Debian dans son ensemble.

Grâce à ces réflexions, j’en suis venu à élaborer trois principes, qui, à mon avis, mènent à des discussions plus claires pour déterminer si la culture libre et le logiciel libre doivent enregistrer une marque déposée et, s’ils le font, comment ils doivent concevoir d’accorder ou non l’utilisation de la marque à d’autres (et sous quelles conditions). J’ai listé, ci-dessous, ces principes par ordre d’importance.

1. Nous voulons que les gens utilisent nos marques.

Les discussions concernant les marques déposées semblent tourner à un exercice consistant à imaginer tous les abus possibles de l’image de la marque déposée. C’est à la fois idiot et erroné. Il faut être très clair sur ce point : Notre problème n’est pas que les gens n’utilisent pas correctement nos marques, mais qu’ils ne sont pas assez nombreux à les utiliser. Le but primordial d’une politique de protection des marques devrait être d’en rendre possible et facile son utilisation légitime.

Nous voulons que les gens fabriquent des tee-shirts avec nos logos. Nous voulons que les gens écrivent des livres sur nos logiciels. Nous voulons que les gens créent des groupes d’utilisateurs et tiennent des conférences. Nous voulons que les gens utilisent, parlent, et fassent la promotion de nos projets, commercialement ou non.

Or le branding peut limiter la diffusion de notre marque et va ainsi nuire à nos projets. Parfois, après avoir soigneusement considéré ces inconvénients, nous pensons que ces compromis en valent la peine. Et c’est parfois le cas. Cependant, les projets sont souvent trop prudents, et en conséquence font l’erreur de trop vouloir contrôler. Je pense que le désir des projets libres de contrôler leur marque a fait plus de dommage que tous les mauvais usages des marques mis bout à bout.

2. Nous voulons que nos projets soient capables d’évoluer.

La création d’une marque déposée donne le pouvoir légal de contrôler une marque dans les mains d’un individu, d’une firme ou une organisation à but non lucratif. Même si ça n’a pas l’air d’être si important, ce pouvoir est, fondamentalement, la capacité à déterminer ce que le projet est, et ce qu’il n’est pas.

J’ai entendu dire que dans le monde politique américain, il n’y a aucune marque déposée pour les termes Républicain ou Démocrate et qu’aucune permission n’y est requise pour créer une organisation affirmant appartenir à l’un ou l’autre parti. Et cela n’implique pourtant pas de confusion générale. À travers les structures sociales et organisationnelles, on voit clairement qui en fait partie ou non, et qui est à la marge.

Plus important, cette structure permet à de nouvelles branches et des groupes extérieurs à la ligne officielle de grandir et se développer en marge. Les deux partis se disputent depuis le XIXe siècle, ont changé de position dans le spectre politique sur un grand nombre de questions, et ont été le lieu d’importantes divergences idéologiques internes. La plupart des organisations devraient aspirer à une telle longévité, à de tels débats internes et à une telle flexibilité.

3. Nous ne devrions pas troubler nos communautés.

Bien qu’ils soient souvent sources d’abus, les marques sont foncièrement en faveur des consommateurs. Le but des marques légalement déposées est d’aider les consommateurs à ne pas être induits en erreur sur la source d’un produit ou d’un service. Des utilisateurs peuvent aimer un logiciel du projet Debian, ou peuvent le détester, mais il est agréable pour eux de savoir qu’ils ont la Qualité Debian lorsqu’ils téléchargent une distribution.

Bien évidemment, protéger des marques légalement n’est pas le seul moyen pour atteindre ce but. Les noms de domaine, les politiques internes et les lois contre la fraude et l’usurpation d’identité servent également ce but. L’Open Source Initiative a fait une demande de marque déposée pour le terme open source, et leur demande a été heureusement rejetée. L’absence d’enregistrement d’une marque ne les a pas empêchés de contrôler l’utilisation de ce terme. Si certaines personnes tentent de donner le terme open source à leurs produits open source alors qu’ils ne le sont pas, elles sont rappelées à l’ordre par une communauté de personnes qui savent de quoi ils parlent.

Et puisque les avocats sont rarement dans la boucle, il est difficile de savoir si déposer une marque aiderait dans la grande majorité des cas. Il est également vrai que la plupart des structures du libre manquent d’argent, de conseils juridiques ou de temps, pour obliger à une utilisation correcte de la marque. Il est effectivement très important que votre communauté d’utilisateurs et de développeurs sache précisément ce qu’est, et ce que n’est pas, votre produit et votre projet. Mais comment nous décidons d’arriver à cela n’est pas quelque chose que nous devons considérer comme acquis et tout le monde doit être impliqué dans les décisions.

Crédit photo : Roadsidepictures (Creative Commons By-Nc-Nd)




À la rencontre des « bots » qui veillent eux aussi sur Wikipédia

Connaissiez-vous les « bots » de Wikipédia ?

Le mieux est de commencer tout d’abord par demander à Wikipédia :

« Les bots sont des agents automatiques ou semi-automatiques qui interagissent avec Wikipédia comme le fait un utilisateur, mais pour des tâches répétitives et fastidieuses pour un humain. Les bots peuvent être utilisés pour créer des articles. D’autres peuvent être utilisés pour éditer ou même détruire des articles. Certains bots sont spécialisés dans la gestion des liens d’interlangue, la résolution des homonymies, les annulations de certains vandalismes ou encore les opérations sur les catégories. Des bots bien conçus peuvent apporter un bénéfice concret à Wikipédia. Cependant, parce que le système n’a pas été conçu pour supporter des bots, même un bon bot peut avoir des effets secondaires non souhaitables. »

C’est donc de ces satanés bots dont il est question dans la traduction ci-dessous. Bien moins pour glorifier l’intelligence artificielle que pour rendre hommage à ceux bien humains qui les programment dans les coulisses.

Remarque : Les wikipédiens francophones ont quant à eux souvent à faire avec le bot Salebot (Attention, bot méchant ! nous prévient-on sur sa page « Utilisateur »), un article spécialement dédié lui avait été consacré par Camille Gévaudan sur le site Écrans en août 2008.

Kristina Alexanderson - CC by-sa

Meet the ‘bots’ that edit Wikipedia

Daniel Nasaw – 25 juillet 2012 – BBC News
(Traduction : elfabixx, Pwetosaurus, Gatitac, Jose, ProgVal, Kaya, fck)

Rencontrez les « bots » qui éditent Wikipédia

Wikipedia est écrit et maintenu par des dizaines de milliers de volontaires bénévoles dans le monde, qui sont eux-mêmes assistés par des centaines de « bots » — des programmes informatiques autonomes — qui aident à garder l’encyclopédie fonctionnelle.

« Le pénis est l’organe mâle de copulation et de miction chez les mammifères. » dit la page Wikipédia en question.

Cette affirmation est indéniablement vraie, et donc mérite d’être dans Wikipédia, mais elle n’a assurément rien à faire dans l’article du site consacré à la Cour suprême !

C’est un facétieux lecteur anonyme de Wikipédia vivant en Caroline du Sud a proposé cette contribution à l’encyclopédie mondiale en ligne la semaine dernière, et il a suffi de quelques secondes pour que cette erreur soit détectée et supprimée.

Ce vandalisme n’a pas été trouvé par un autre contributeur, mais simplement par un programme d’intelligence artificielle appelé « bot », qui est une aphérèse de « robot ».

Virtuellement invisible

ClueBot NG, car tel est son nom, réside dans un ordinateur à partir duquel il intervient sur la vaste encyclopédie pour détecter et nettoyer le vandalisme, quasiment dès que celui-ci apparaît.

Il fait partie des quelques centaines de bots qui patrouillent sur Wikipedia à tout moment. Son rôle dans la restauration immédiate de l’article sur la Cour suprême illustre comment les bots sont devenus une partie indispensable — même si virtuellement invisible — du projet Wikipédia.

« Wikipedia serait une belle pagaille sans les bots », écrivait dans un courriel un administrateur de Wikipédia, connu sur le site sous le nom de Herfold.

À elle seule, la version anglaise de Wikipedia dépasse les quatre millions d’articles ce mois-ci. Elle contient autour de 2.5 milliards de mots, équivalent à des millions de pages, et est 50 fois plus grosse que l’Encyclopædia Britannica.

Wikipedia est maintenue dans toutes les langues par des dizaines de milliers de contributeurs — dont environ 77 000 font plus de cinq éditions par mois.

Le projet est devenu avec le temps tellement vaste et sa maintenance un tel travail intensif que cela défie les capacités de ses administrateurs et simples contributeurs humains de le maintenir en ordre.

Intervenir contre les vandales

C’est là que les (ro)bots interviennent.

« On s’amuse à penser au jour où les robots se mettront en grève juste pour que tout monde se rende compte de la quantité de travail qu’ils abattent », dit Chris Grant un étudiant de 19 ans à Perth en Australie, qui fait partie du comité de Wikipédia qui supervise les robots.

« Le site demanderait beaucoup plus de travail de notre part et épuiserait davantage les contributeurs ».

Les bots effectuent ainsi de nombreuses tâches éditoriales et administratives qui sont fastidieuses, répétitives et chronophages mais néanmoins vitales.

Ils suppriment le vandalisme et les grossièretés, organisent et cataloguent les entrées, et gèrent les coulisses de l’encyclopédie, ce qui lui permet de fonctionner efficacement et de garder son apparence soignée et uniforme dans le style.

En des termes plus concrets, les bots sont comme des étudiants qui veillent sur les livres, déplacent des piles d’un étage à un autre, corrigent les codes-barres au dos des livres, et effectuent d’autres tâches ingrates, qui permettent aux bibliothécaires qualifiés de se concentrer sur les acquisitions et la politique du lieu.

Les bots peuvent-ils écrire ?

« Wikipédia s’est tellement développée que je ne sais pas comment les gens pourraient bien la gérer si tous les bots s’en allaient » nous dit Brad Jorsch, un programmeur informatique en Caroline du Nord qui gère un bot qui traque les bandeaux rappelant aux rédacteurs d’ajouter des sources aux articles.

Les bots sont présents depuis presque aussi longtemps que Wikipédia elle-même.

Le site a été fondé en 2001 et l’année suivante, un bot appelé Rambot a créé environ 30 000 articles — à un rythme du millier par jour — sur les villes individuelles des États-Unis. Le bot a puisé ses données directement à partir de tabeaux de recensement américain. Et les articles se lisaient bien comme s’ils avaient été écrit par un robot. Ils étaient courts et convenus, et contenaient à peine plus que des séries de statistiques démographiques.

Mais, une fois qu’ils avaient été créés, des rédacteurs humains prenaient le relais et remplissaient les entrées avec des détails historiques, des informations sur la politique locale et les sites touristiques.

En 2008, un autre bot a créé des milliers de courts articles sur des astéroïdes, renseignants quelques lignes de données pour chacun à partir des bases de données de la NASA.

Aujourd’hui, la communauté Wikipédia demeure divisée quant à l’apport des bots aux articles. Certains administrateurs trouvent que de petits articles composés de quelques données n’ont que peu de valeur, d’autres trouvent que tout nouveau contenu est bon à prendre.

La peur des bots malicieux

Le résultat du débat a été que les bots ne sont désormais plus autorisés à écrire des articles entiers. Cependant, leur capacité à effectuer le plus gros de la maintenance libère les vrais contributeurs humains qui disposent alors de plus de temps pour effectuer une recherche, créer ou modifier un article et vérifier l’exactitude du travail des autres.

« Je ne pense pas que les gens réalisent quelle quantité de maintenance et de travail annexe sont nécessaires sur Wikipédia » dit Grant.

Certains administrateurs craignent les dégâts qu’un bot renégat pourrait un jour occasionner à l’encyclopédie. Pensez à Skynet dans les films Terminator.


Ces peurs sont infondées, d’après Grant.

Déjà, un robot n’est pas comme une automobile : si une partie d’une opération échoue, il s’arrêtera plutôt que de se fracasser quelque part.

« Il faudrait déjà que quelqu’un demande à un programmeur de rendre le bot fou et qu’il efface tout », dit Grant.

« Les bots avec les droits de supprimer des pages, bloquer des éditeurs, et prendre d’autres décisions drastiques ne peuvent être utilisés que par des contributeurs de confiance disposant de hauts privilèges administratifs », dit Grant.

Cependant, les bots aussi font des erreurs lorsqu’ils font face à des situations pour lesquelles ils n’ont pas été conçus. ClueBot NG, le bot anti-vandlisme, a cependant un très faible taux de faux positifs (lorsqu’il confond des articles légitimes avec du vandalisme). Étant donné que Wikipédia garde une trace des éditions, les erreurs peuvent être réparées presque aussi vite qu’elles surgissent, disent les administrateurs.

Les contributeurs humains ne craignent pas d’être un jour remplacés par les bots, disent les maîtres de bots. « Ecrire un article, citer ses sources, ou encore améliorer sa grammaire et son orthographe nécessiteront toujours le concours d’une personne », conclut Jorsch.

Crédit photo : Kristina Alexanderson (Creative Commons By-Sa)




Il y a quelque chose de magique dans Firefox OS !

Le système d’exploitation Firefox OS peut libérer nos smartphones et autres tablettes en apportant une alternative à Apple et Android, un peu comme l’a fait le navigateur Firefox avec le Web en son temps.

Nous vous proposons ci-dessous le témoignage passionné (et passionnant) d’un de ses développeurs.

Rob Hawkes - CC by-sa

Il y a quelque chose de magique dans Firefox OS

There is something magical about Firefox OS

Rob Hawkes – 12 septembre 2012 – Blog personnel
(Traduction : Un gros collectif de bénévoles nocturnes issus de Framalang, Identi.ca et Twiiter)

Dans ce billet, je parle du projet Firefox OS, ce qu’il signifie, ce que réserve le futur, et ce qu’il a d’un peu magique.

Au cours des quinze derniers mois, j’ai passé de plus en plus de temps à travailler sur le dernier projet de Mozilla : Firefox OS. Rapidement, je suis tombé amoureux de ce projet et de ses valeurs, à un point que je n’avais jamais connu pour une nouvelle plateforme.

Soyons clairs ; Firefox OS est le début de quelque chose d’énorme. C’est une révolution en marche. Une bouffée d’air frais. Un point culminant de la technologie. C’est magique, et ça va tout changer.

Qu’est-ce-que Firefox OS ?

Pour ceux qui seraient un peu perdus, voici l’essentiel en deux mots :

Firefox OS est un nouveau système d’exploitation pour mobile développé par le projet de Mozilla : Boot to Gecko (B2G). Il utilise un noyau Linux et boote sur un environnement basé sur Gecko, ce qui permet aux utilisateurs de lancer des applications entièrement développées en HTML, JavaScript, et d’autres API Web ouvertes.

Mozilla Developer Network

En bref, Firefox OS consiste à récupérer les technologies dans les coulisses du Web, telles que JavaScript, et à les utiliser pour produire un système d’exploitation entier. Prenons quelques instants pour y réfléchir… un système d’exploitation pour mobile basé sur JavaScript !

Pour ce faire, une version légèrement modifiée de Gecko (le moteur derrière Firefox) a été créée dans le but d’y intégrer les différentes API JavaScript relatives à la téléphonie, comme WebTelephony pour faire des appels, WebSMS pour envoyer des messages, et la Vibration API pour… faire vibrer le téléphone.

Mais tout génial qu’il soit, Firefox OS représente plus qu’un ensemble de technologies Web dernier cris utilisées de façon démente. C’est aussi l’association de nombreux autres projets de Mozilla autour d’un concept unique — le Web en tant que plateforme. Certains de ces projets intègrent nos initiatives Open Web Apps et Persona, notre solution d’authentification sur le web (anciennement BrowserID). C’est absolument fascinant de voir tous ces différents projets de Mozilla s’unir de façon cohérente en partageant une seule et même vision.

Je n’irai pas plus loin dans la description du projet vu que le but de cet article n’est pas de le faire dans le détail, même si de plus amples informations peuvent être trouvées sur les pages de Firefox OS sur MDN. Je vous invite vivement à les lire.

Pourquoi Firefox OS ?

Vous pouvez vous dire « Ça a l’air bien, mais pourquoi utiliser JavaScript pour faire un téléphone ? » Et vous avez raison, c’est une question réellement importante. La bonne nouvelle est qu’il y a de nombreuses raisons à cela, autres que de faire la joie des développeurs Web.

Les deux principales raisons sont que Firefox OS répond à un manque dans le marché du téléphone, et qu’il constitue une alternative au paysage privativeur, restreint et contraignant du marché actuel.

Combler un manque dans le marché du téléphone

Ce n’est un secret pour personne : les smartphones sont ridiculement chers, même dans les régions du monde dont le niveau de vie est considéré comme élevé. Mais si vous les trouvez chers dans les pays qui ont les moyens de se les offrir, alors pensez un peu à ce que représente un iPhone 4S 16 Go qui vaut 615 £ dans un pays émergent comme le Brésil. C’est 100 £ plus cher que le même téléphone en Angleterre !

En fait, ces prix plus élevés au Brésil sont principalement dus aux fortes taxes d’importation. Apple semble vouloir éviter ceci dans le futur en construisant des usines dans le pays. Quoi qu’il en soit, cela montre bien que les appareils haut de gamme et hors de prix ne sont pas toujours une solution pour tous les pays. Laissons de côté le fait que dans certaines sociétés vous n’avez pas forcement l’envie d’exhiber publiquement un téléphone qui a le même prix qu’une petite voiture.

A l’heure actuelle, que faites-vous si vous souhaitez acheter un smartphone sans débourser une somme astronomique ? Vous pouvez vous tourner vers des terminaux Android d’entrée de gamme, mais ils sont souvent bien trop lents.

Heureusement, c’est là que Firefox OS intervient.

Le but de Firefox OS n’est pas de rivaliser avec des appareils haut de gamme mais d’offrir des smartphones milieu de gamme au prix de l’entrée de gamme. Ce n’est pas une plaisanterie.

Bonnie Cha

Firefox OS répond parfaitement aux attentes du marché : il offre la même expérience d’utilisation sur un matériel d’entrée de gamme que le fait Android sur du matériel plus performant. Et ce n’est pas une blague.

Par exemple, je teste en ce moment même des jeux écrits en JavaScript sur un terminal fonctionnant sous Firefox OS et qui coûte une soixantaine d’euros (clairement, un appareil très bas de gamme). On pourrait donc s’attendre à ce qu’ils fonctionnent très mal, mais non seulement ils tournent bien plus rapidement que les mêmes jeux s’exécutant dans un navigateur internet Android (Firefox ou Chrome) sur le même appareil, mais ils tournent même aussi vite, si ce n’est plus, que les mêmes jeux sous un navigateur Android sur une machine bien plus performante qui coûte 4 ou 5 fois plus cher.

Pourquoi de telles améliorations de performance par rapport aux navigateurs sur Android pour des appareils identiques ? Grâce à l’absence de couche intermédiaire entre Gecko et le hardware, permettant à des choses comme le JavaScript de tourner à plein potentiel, et en finir avec le mythe du JavaScript lent !

De telles performances de JavaScript sur un matériel aussi abordable est une des raisons qui me font penser que Firefox OS annonce le début de quelque chose d’énorme.

Je dois cependant préciser que Mozilla n’est pas forcément sur le point de lancer un appareil à 60 € : il s’agit seulement d’un terminal en particulier que nous utilisons pour le développement et les tests.

Fournir une alternative : une plateforme ouverte

La seconde réponse à la question « Pourquoi Firefox OS ? » est qu’il s’agit non seulement de créer une plateforme mobile alternative et ouverte, mais également d’essayer d’agir pour influencer les grands acteurs du mobile à changer les choses.

La mission de Mozilla depuis ses débuts en 1998, d’abord en tant que projet autour d’un logiciel, puis en tant que fondation et entreprise, a consisté à fournir des technologies ouvertes capables de rivaliser avec les produits des entreprises dominantes.

Steve Lohr

Firefox a bouleversé le marché du navigateur et montré aux utilisateurs qu’il existe une alternative. Et c’est ce que Mozilla s’efforce de reproduire avec Firefox OS, en permettant à chacun de pouvoir choisir sa façon d’utiliser le Web.

Cette fois-ci, c’est le Web mobile qui est menacé. Pas par Microsoft, mais par Apple et Google, qui sont les plateformes dominantes pour smartphones. Avec leurs applications natives, leurs catalogues d’applications propriétaires, et leurs règles imposées aux développeurs, Apple et Google relèguent le Web à l’arrière-plan.

Thomas Claburn

Sur les téléphones, le domaine qui nécessite le plus de travail est la portabilité des applications…

Avec l’excitation autour des applications mobiles, ils donnent l’impression d’être en retard sur un point : ils restreignent leurs utilisateurs à un système d’exploitation particulier, et aux appareils qui le supportent. Le Web, au contraire, a évolué de façon à ce que le contenu soit ressenti de la même façon, quel que soit le matériel. Mozilla, créateur du navigateur Web Firefox, est déterminé à rendre cela vrai également pour les smartphones.

Don Clark

Ce que Firefox OS cherche à faire, c’est utiliser l’omniprésence du Web pour créer une plateforme qui permet aux applications d’être utilisées aussi bien sur un téléphone portable, un ordinateur, une tablette, ou depuis n’importe quel appareil possédant un navigateur. Ne serait-ce pas génial de pouvoir reprendre sur votre ordinateur la partie d’Angry Birds à laquelle vous étiez en train de jouer sur votre téléphone ? Moi, j’adorerais !

Un rêve à portée de bidouille pour les développeurs

Une dernière raison pour laquelle Firefox OS est nécessaire, c’est que nous n’avons pour le moment aucune plateforme mobile aussi bidouillable (NdT hackable) (il est plus ou moins possible de personnaliser Android, mais ce n’est pas si facile).

Comme Firefox OS est construit avec HTML, JavaScript et CSS, vous n’avez besoin que de connaissances élémentaires en développement Web pour changer complètement l’expérience offerte par l’appareil. En éditant une simple ligne de CSS, vous pouvez totalement modifier l’apparence des icônes de l’écran d’accueil ; ou encore, vous pouvez ré-écrire les fichiers internes JavaScript qui gèrent les appels téléphoniques.

Il s’agit réellement d’une plateforme pour les développeurs et je suis impatient de voir jusqu’à quel point elle sera amenée au-delà de la vision de Mozilla.

Un timing parfait

S’il y a quelque chose dont je suis conscient depuis mon arrivée chez Mozilla il y a un an et demi, c’est à quel point je suis chanceux d’être ici pour le démarrage du projet Firefox OS. Si je me souviens bien, le projet a été annoncé (sous le nom Boot to Gecko) pendant mes premières semaines de travail.

C’était déjà passionnant à l’époque, mais ça l’est encore plus aujourd’hui. Firefox OS est littéralement la chose numéro 1 sur laquelle je travaille actuellement et honnêtement j’adore ça. En réalité, je me sens privilégié d’y participer.

Je me suis demandé de nombreuses fois ce que l’on pouvait ressentir en travaillant chez Mozilla durant le lancement initial de Firefox : l’excitation, la passion, la nervosité, l’incapacité d’expliquer à quel point c’est impressionnant et à quel point on devrait s’en préoccuper.

Pour être honnête, je ne pense pas que beaucoup de monde comprenne réellement ce qui se passe avec Firefox OS, ni à quel point son lancement est important. Un peu comme pour Firefox, j’imagine. Pour le moment, je suis heureux d’être chez Mozilla à un instant clef de son histoire.

À couper le souffle

Les personnes qui le comprennent sont les développeurs qui ont essayé le terminal de démonstration qui est montré occasionnellement, lors d’événements avec des Mozilliens. Il n’y a rien que j’apprécie d’avantage que de voir les différentes phases de leurs émotions lorsqu’ils jouent avec les appareils :

  1. D’abord, il y a une légère confusion, quelque chose comme « Pourquoi tu me passes un téléphone Android ? » ;
  2. La confusion est suivie par la réalisation soudaine qu’il ne s’agit pas d’Android mais d’un système en JavaScript ;
  3. Après un court moment, l’excitation leur fait lancer des « oh putain ! » ;
  4. Un instant plus tard, les voilà absorbés à explorer tous les recoins de l’appareil en posant plein de questions ;
  5. Le moment où je leur demande de me rendre l’appareil est accompagné d’une légère réticence et finalement d’un « C’était pas mal du tout, je suis impressionné ! ».

Vous devez penser que j’ai tendance à enjoliver les choses, mais je peux vous assurer que c’est réellement le genre de réaction qu’ont pu avoir les gens auxquels j’ai présenté l’appareil. C’est réellement jouissif.

Ce dont j’ai commencé à me rendre compte, c’est que plus je regarde d’autres personnes s’amuser avec un appareil sous Firefox OS, plus je suis convaincu de sa capacité à changer la donne. C’est comme s’ils s’éclataient avec, sans que j’aie besoin d’intervenir.

Des défis à relever

Il ne serait pas juste de parler de la grandeur de Firefox OS et des points sur lesquels je travaille sans détailler les principaux défis que nous devons relever.

Il y a bien sûr les problèmes classiques : comment gérer un écosystème d’applications qui est libre et sans restrictions ; ou anticiper les problèmes d’interopérabilité des appareils, comme ceux que peut connaître Android.. Ces problèmes sont importants, mais ne m’intéressent pas.

Ce qui m’intéresse le plus, c’est le défi de développer des jeux en HTML5 ; tant pour les performances apparentes que pour les véritables, sur lesquelles les développeurs se plaignent. C’est indéniablement l’un des défis spécifiques à Firefox OS (Android et iOS sont aussi mauvais l’un que l’autre), mais pour le moment, je suis entièrement consacré à Firefox OS et les façons d’améliorer ces points.

Aujourd’hui, la majorité des jeux HTML5 préexistants sur téléphone tournent soit de manière saccadée (0 à 20 images par seconde), ou tout juste fluide (20 à 30 images par secondes). La plupart du temps, ces jeux ne tournent pas à un rythme d’images stable, ce qui rend l’expérience peu plaisante.

Ce qui est intéressant, c’est qu’une grande partie de ces soucis ne semblent pas venir du terminal ou de JavaScript. Il y a quelques jeux intenses, comme Biolab Disaster, qui tournent de manière incroyable, même sur le terminal bas de gamme avec lequel j’effectue les tests (nous parlons ici d’un taux d’images par seconde entre 40 et 60FPS).

Pour moi, il est clair que si les mobiles et les plateformes sont parfois à blames (pas aussi souvent que certains le voudraient), il y a cependant beaucoup de choses que nous apprenons des jeux qui fonctionnent convenablement sur des terminaux bas de gamme, pour voir quelles techniques ils utilisent et comment éduquer au mieux les autres développeurs souhaitant utiliser HTML5 sur téléphone mobile.

Je crois vraiment que des jeux HTML5 gourmands peuvent très bien tourner sur des appareils mobiles, même sur ceux bon marché. Pourquoi suis-je si confiant à propos de ça ? Parce que les gens font déjà des jeux comme ça. Il y a deux choses dans ma vie que je crois sans douter… mes yeux.

Nous en sommes là.

Au-delà du téléphone mobile

Ce qui m’excite le plus à propos de Firefox OS n’a rien à voir avec l’appareil mobile que nous sortons l’année prochaine mais plutôt avec le futur qui nous tend les bras. J’ai abordé ce point auparavant lorsque j’ai parlé de Firefox OS comme un rêve de bidouilleurs, et comment les autres pourraient le récupérer et le développer au delà de la vision qu’en a Mozilla.

La bonne nouvelle est que c’est déjà prêt aujourd’hui. Nous avons déjà un port de Firefox OS sur le Raspberry Pi, ainsi que pour la Pandaboard. Ils ne sont pas parfaits, mais ce qui est génial c’est qu’ils existaient déjà bien avant que Firefox OS voie sa première version sortir.

Vous avez aussi la possibilité de lancer Firefox OS depuis un ordinateur sous Mac, Windows et Linux. Alors qu’il n’est pas possible d’acceder au même matériel qu’avec un appareil mobile, la version pour PC vous permet de bénéficier des autres fonctionnalités (telles que les applications qui tournent dans des processus séparés). En plus, c’est vraiment simple à mettre en place.

Je peux imaginer un futur proche où l’API Gamepad aura été implémentée dans Gecko et pourra être accessible à travers le client PC Firefox OS. Qu’y a t-il d’extraordinaire ? Il y a qu’il n’est pas difficile d’imaginer voir ce client PC être lancé depuis un appareil connecté à un téléviseur, avec un système d’exploitation personnalisé pour utiliser un gamepad plutôt qu’une souris ou un touchpad (ce n’est que du JavaScript).

Ce que vous aurez ici sera le début des consoles de jeux vidéo HTML5, et c’est en fait une chose que je suis impatient d’explorer durant mon temps libre en dehors de Mozilla.

Ce que je veux dire, c’est que nous arrivons à un moment de l’histoire où les ordinateurs peuvent à présent fonctionner avec les technologies que l’on utilise pour créer des sites Web. Que pourrions-nous faire dans un monde rempli de terminaux fonctionnant avec ces technologies, qui pourront tous communiquer en se connectant via les mêmes API ?

J’ai hâte de voir à quoi ce monde ressemblera !

Crédit photo : Rob Hawkes (Creative Commons By-Sa)