Innovation et logiciel libre

Les logiciels libres n’innovent pas, il ne font que copier les nouveautés pertinentes de leurs petits camarades propriétaires, entend-t-on parfois ça et là. Certains vont même jusqu’à dire qu’ils font planer une menace sur cette innovation car ils combattent les brevets logiciels tout en dynamitant, à grands coups de partage et de gratuité, le modèle économique de certaines entreprises qui souhaitent tirer profit de leurs inventions.

Le débat mérite d’être posé (d’autant qu’on peut très bien considérer qu’un logiciel qui a choisi d’être libre est innovant en soi) mais toujours est-il qu’il y a indéniablement des progrès qui viennent directement des logiciels libres. En voici quelques uns, issus de la liste de M. Saunders. Cette liste non exhaustive est peut-être discutable alors nous vous attendons de pied ferme dans les commentaires.

Une traduction Olivier pour Framalang. Nous avons ajouté quelques liens wikipédia francophones à l’article d’origine qui n’en comportait aucun, histoire que ce soit plus clair pour un public non averti. Nous avons également choisi de conserver « Open Source » plutôt que de le traduire par « logiciel libre » parce qu’il nous a semblé que c’était plus proche de l’auteur qui manipule les deux termes, mais si vous voyez les choses différemment n’hésitez pas là aussi à troller vous manifester 😉

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Les innovations de l’Open Source

Open source innovations

M. Saunders – 28 octobre 2008 – LinuxFormat.co.uk

L’Open Source ou les logiciels libres n’ont pas une réputation d’inventeurs. Ils se contentent de copier les logiciels commerciaux, n’est-il pas ? Pas vraiment, comme l’explique Neil Bothwick, du simple gadget jusqu’à l’Internet, les logiciels libres et open source sont à l’origine de nouvelles technologies et de nouvelles façons de travailler…

« L’Open Source ne fait que plagier les logiciels commerciaux. Si les logiciels commerciaux ne dépensait pas autant d’argent dans la recherche, les logiciels Open Source seraient à cours d’innovation. L’Open Source a besoin des logiciels commerciaux pour survivre. » Voici un florilège de déclarations sur les logiciels Open Source faites par ceux qui ont un intérêt particulier à les voir échouer ou piétiner, mais est-ce justifié ou est-ce simplement de l’intimidation ?

Même si on peut répondre à ceci par quelques arguments logiques, et nous en aborderons quelques uns, la meilleure réponse se trouve dans les exemples de tous les jours où ce sont les développeurs Open Source qui innovent et les logiciels commerciaux qui se contentent de suivre.

Avant toute chose, il faut préciser que suivre l’exemple donné par les autres et utiliser leur expérience n’est pas une mauvaise chose en soi. Si vous voyez une bonne idée, ne l’ignorez pas sous le seul prétexte que d’autres l’ont eu avant vous. Les produits concurrents, quelque soit leur domaine, ont bien plus de points communs que de différences. L’ergonomie est également un facteur : une interface graphique intuitive, ça n’existe pas vraiment.

Ce que l’on décrit comme étant intuitif n’est en fait que familier ; aucune personne censée ne créerait une voiture dans laquelle les commandes sont disposées différemment de ce qui se fait habituellement, pourquoi est-ce que ça devrait être différent pour une interface en informatique ? C’est la raison pour laquelle toutes les interfaces utilisateur graphiques sont basées sur l’interface Wimp (Windows, Icons, Menus, Pointer pour Fenêtres, Icônes, Menus et Pointeur) conçue par le centre de recherche de Xerox à Palo Alto. Ce sont aussi eux qui sont à l’origine de l’Ethernet, des imprimantes laser et de bien d’autres choses encore, donc ils savent ce qu’ils font.

Alors, dans quels domaines les développeurs Open Source sont-ils des pionniers, où ont-ils explorés des terres encore vierges ? Voici quelques exemples issus de différents domaines.

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Bureau 3D

Que vous les aimiez ou que vous les détestiez, les gadgets sont partis pour durer et ils font vendre des systèmes d’exploitation. Que l’on parle d’Aqua de MacOS ou des bordures de fenêtres translucides (et illisibles) de Vista, les systèmes d’exploitation se battent pour rendre leurs bureaux « attirants ». La communauté Open Source est à la base de cette innovation grâce à Compiz Fusion qui a donné une nouvelle dimension aux gadgets sur le bureau, au sens propre du terme car le projet a apporté les effets 3D. Alors que certains fonctionnalités font la part belle aux effets visuels au détriment de l’ergonomie, d’autres permettent vraiment d’avoir une interface sensationnelle. Faites simplement démarrer le PC de votre pote qui ne jure que par Windows sur un LiveCD avec Compiz Fusion et regardez le demeurer bouche bée. Les bureaux en 3D n’iront qu’en s’améliorant avec le développement naturel du matériel qui leur permettra de tourner sans effort sur ce qui sera bientôt les machines d’entrée de gamme et un bureau en 3D sous Linux demande aujourd’hui toujours moins de ressources qu’un bureau en 2D sous Vista.

En fait, le nom Compiz Fusion lui-même dissipe un autre mythe à propos de l’Open Source : les projets sont perpétuellement en train de se diviser et de se fragmenter. De Compiz est née la sous division Beryl, mais les deux projets ont à nouveau fusionnés, mettant en commun les résultats de l’effort des deux communautés pour en faire un projet bien plus fort.

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LiveCD

L’un des grands avantages de l’Open Source est que les programmeurs peuvent utiliser le travail d’un autre, en faire un nouveau paquet et le sortir. C’est exactement ce qu’à fait Klaus Knopper avec Debian quand il a créé le LiveCD Knoppix. Les disques Knoppix possédaient des outils avancés de détection du matériel et de configuration automatique, quelque chose que l’on peut considérer déjà comme novateur. Pendant le démarrage, le disque se configure tout seul pour la majorité du matériel. Même si Knopper n’a pas inventé le concept du LiveCD (Suse en avait déjà une démo), il a été le premier a rendre ce concept utilisable, avec un disque capable de démarrer et de faire tourner un OS complet sur la majorité des configurations. Maintenant un système live dérivé de celui de Knoppix est derrière le disque d’installation de beaucoup de distributions.

Grâce à l’Open Source, Knopper a pu s’appuyer sur le travail de la communauté Debian plutôt que d’avoir à tout créer par lui même. Imaginez que l’envie vous prenne de développer un liveCD de Windows, simplement parce que l’idée vous plaît. Les seuls personnes qui seraient vraiment intéressées par votre idée seraient les avocats.

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L’édition collective Wiki

Aux début du Web vous ne trouviez que des pages fixes où le contenu de chaque page était un fichier HTML. Ensuite le HTML dynamique a pointé le bout de son nez, se servant de modifications qui touchaient uniquement les serveurs au moyen de divers langages de programmations, mais le contenu n’était toujours que le contenu que le webmaster vous fournissait. Vous pouviez le lire ou l’imprimer, mais c’était tout. Le WikiWikiWeb a changé tout cela grâce à un concept novateur : le site Web pouvait être édité par n’importe quel visiteur. A partir de ce moment tout visiteur d’un wiki a le pouvoir de créer, d’éditer ou de supprimer des pages. Cette idée anarchique au demeurant a plutôt bien fonctionné et maintenant un site peut être amélioré par n’importe qui et n’est possédé par personne, le site Web Open Source.

Internet était bien moins sauvage en 1995 quand est apparu WikiWikiWeb, sa population se composait principalement de geeks et d’universitaires inoffensifs. De nos jours, le vandalisme peut devenir problématique et de nombreux wikis nécessitent la création d’un compte avant de se lancer dans l’édition, mais cela ne change en rien leur nature ouverte. Open Source n’est pas synonyme d’irresponsabilité protégée par l’anonymat, il est question d’échange et de reconnaissance de la contribution apportée par les autres. Le wiki n’est donc pas seulement une innovation de la communauté Open Source, c’est aussi un exemple vivant de ce qu’il y a de bon dans le concept d’ouverture.

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Virtual Network Computing

VNC est l’exemple type d’invention qui ne pouvait émaner que de l’open source. VNC permet à un ordinateur de voir et, potentiellement, de prendre le contrôle d’un autre ordinateur. C’est utile pour accéder à votre propre machine lorsque vous n’êtes pas au bureau mais aussi pour assister à distance un autre utilisateur. « Appuie sur ce bouton et dis-moi ce que ça fait. » Toute personne ayant déjà eu ce genre de conversation téléphonique avec ses parents en comprendra l’utilité.

Même ceux qui sont le moins à cheval sur la sécurité de leur ordinateur devraient être horrifiés à l’idée de laisser quelqu’un contrôler leur ordinateur par Internet. Même si vous faites entièrement confiance à l’utilisateur de l’autre ordinateur (qui peut être vous-même) vous n’avez aucun moyen de savoir avec certitude ce qui advient des données lorsque vous utilisez un système propriétaire. L’Open Source n’est pas simplement à l’origine d’une innovation ici, c’est aussi un gage de sécurité : vous avez accès au code source et vous pouvez déterminer si les données de votre session ne seront pas envoyées dans une base souterraine secrète.




Building the world we want, not the one we have

4 EveR YounG - CC by-saJ’aimais bien le titre en anglais de la traduction du jour alors je l’ai conservé pour le titre du mon billet, nonobstant le fait qu’il occulte complètement son sujet à savoir Firefox et ses efforts pour nous proposer des formats multimédias audios et vidéos libres et ouverts[1].

Je partage l’enthousiasme de l’auteur et je remercie Mozilla qui, comme il est dit plus bas, améliore tout autant Firefox qu’il améliore le web tout entier.

PS1 : Cet article a été rédigé cet été, Firefox 3.1 n’est pas encore sorti à ce jour mais cela ne saurait tarder.

PS2 : J’en profite pour saluer ici le projet iTheora qui est « un script PHP permettant de diffuser des vidéos (et des fichiers audios) mais uniquement au format ogg/theora/vorbis. Il est simple à installer et à utiliser. Il conviendra aussi bien au blogger qu’au webmaster averti. »

Construire le monde que nous voulons, pas celui que nous avons

Building the world we want, not the one we have

Schrep’s Blog – 8 août 2008
(Traduction Framalang : Penguin et Olivier)

Grâce au dur labeur de Chris Double, Robert O’Callahan, Johnny Stenback et de beaucoup d’autres, les balises <video> et <audio> avec support natif de Theora video et Vorbis audio sont actuellement disponibles dans les nightly builds de Firefox. Ils seront inclus dans Firefox 3.1 Beta 1 qui sortira plus tard cette année.

Ce n’est pas nouveau mais je voulais vous expliquer pourquoi je trouve cela important.

Si vous lisez attentivement la spécification HTML1.0 de 1993 vous remarquerez qu’aucun format d’image n’était spécifié alors qu’il en existait des douzaines. GIF est excellent pour les logos, le dessin de lignes, etc… mais limité à 256 couleurs il n’est pas idéal pour les photos. JPEG compresse avec perte et donc est très bien pour les photos mais est moins adapté pour le dessin. PNG est arrivé plus tard pour résoudre certains problèmes de GIF et n’était pas totalement ni correctement supporté dans Internet Explorer jusqu’à la version 7. Avant que PNG ne soit supporté nativement par tous les navigateurs il existait de nombreux plug-ins pour combler ce manque.

Une technologie entravée par les brevets (GIF), primordiale pour la toile, a été remplacée par un format réellement libre et ouvert (PNG), d’abord à travers des plug-ins, puis, rapidement après, nativement dans les navigateurs. Les spécifications HTML ne spécifiait pas un format d’image spécifique, mais quelques uns devinrent incontournables dans l’usage courant.

Je pense que le même sort attend les balise <video> et <audio>. A l’heure actuelle, des centaines de millions d’utilisateurs peuvent visualiser des vidéos dans leur navigateur Web, mais cela nécessite pour les lire un des nombreux plug-ins propriétaires qui supportent des formats propriétaires. Cela veut dire que si vous réalisez une site Web avec vidéos flash/silverlight/WMV il ne fonctionnera pas sur des millions d’iPhone et d’autres navigateurs pour mobile. Et sur Linux il se peut qu’il marche comme il se peut qu’il ne marche pas. Le faire fonctionner nécessite des avocats, de l’argent et des accords commerciaux entre plusieurs parties.

En rendant disponible dans Firefox les balises HTML5 <video> et <audio> avec des formats ouverts, libres de droit, nous espérons rendre ces formats omniprésents grâce à un usage quotidien. Des formats ouverts et libres de droit vont permettre à tous les fabricants de navigateurs d’implanter nativement la lecture audio et vidéo sur toutes les plateformes, appareils et environnements, sans aucune restriction. Ils vont permettre à tous produits dont les sources sont ouvertes d’embarquer sans crainte de façon native la lecture audio et vidéo. Ils vont permettre aux réalisateurs de site Web d’utiliser gratuitement du son et de la vidéo dans leurs sites, sans se soucier de la présence ou l’absence sur une plateforme précise d’une version précise d’un plug-in précis. En tant qu’utilisateur final, nous n’aurons bientôt plus à nous demander si nous pourrons visionner le contenu vidéo d’un site donné sur notre nouveau téléphone, tablet PC ou PC parce que tous les systèmes sont capables de supporter un standard vidéo ouvert. Peut-être que je serai capable de voir les Jeux Olympiques de 2010 sur mon téléphone portable.

Un véritable accès universel au contenu. Voici le monde que nous voulons.

Il existe peu de contenu encodé en Theora/Vorbis à l’heure actuelle. Oui, et alors ?

Il y a 10 ans, il n’existait aucun contenu en H.264 alors que c’est un format plutôt répandu aujourd’hui. Jusqu’à ce que les vidéos en Flash ne deviennent courantes il n’existait pas beaucoup de contenu vidéo encodé en VP6. De nouveaux contenus sont créés sans arrêt et les transcoder en Theora/Vorbis est vraiment simple. Peu de temps après la sortie de Firefox 3.1 il y aura près de 200 millions d’ordinateurs de bureau capables de lire ce genre de vidéo. Le contenu suivra rapidement.

Je peux déjà regarder les vidéos qui Flash, Quicktime, Silverligt, etc… quel est l’intérêt de ce nouveau format ?

Avoir un support audio/video natif au sein de HTML5, avec des formats ouverts libres de droit, cela veut dire que n’importe quel fabricant de navigateur, appareil, etc.. peut supporter ce format. S’il est adopté largement, cela voudra dire que les créateurs de sites Web pourront bientôt utiliser un seul format pour toucher tous les appareils. En tant que technologie Web native, la vidéo peut donc être intégrée et mélangée avec toutes les autres avancées que le Web a connu jusqu’ici.

Est-ce que Theora ne fait pas baisser l’autonomie de ma batterie et/ou utilise mon processeur ?

Beaucoup de systèmes à l’heure actuelle sont vendus avec un forme quelconque d’accélération pour les formats H.264, MPEG-2 ou autres, ce qui réduit l’utilisation du processeur et donc l’utilisation de la batterie. Avec l’adoption du format nous nous attendons à ce que Theora bénéficie des mêmes accélérations matérielles dans un futur proche. Dans le même temps, la vidéo HD à 5-6 Mo/s se jouera de façon fluide sur des systèmes modernes sans aucune assistance matérielle.

La qualité video de Theora est-elle vraiment au rendez-vous ?

C’est tout à fait regardable et cela s’améliore tous les jours avec un travail comme celui-ci.

Existe-t-il des problèmes légaux ?

Nous avons réalisé une étude minutieuse de tous les problèmes connus et pour ce que nous en savons, Theora et Vorbis ne posent aucun risque concernant les brevets. Ils existent depuis un certain temps sans aucun problème; cependant, il existe toujours le risque que des gens sortent de leur chapeau des brevets cachés, mais ce risque existe pour tous les développeurs logiciels et pour n’importe quel type de logiciel. On ne peut pas exclure le risque que quelqu’un réclame quelque chose, ce qui ne veut pas dire que cette revendication a un fondement. Nous pensons qu’il n’y a pas de problème, mais si l’on y est contraint, nous pouvons : i) évaluer la réclamation et déterminer si elle est fondée; ii) utiliser la puissance du Web pour rassembler des preuves d’antériorité pour invalider la plainte; et iii) retirer ou desactiver la fonctionnalité si besoin est en dernier recourt.

Qu’en est-il de la Haute Définition (HD) ?

Theora peut lire et encoder du contenu HD. Avec les implémentations actuelles la qualité de la vidéo n’est pas aussi bonne qu’en H.264 mais des améliorations sont encore à venir. De plus, nous avons discuté avec les types géniaux à l’origine de Dirac et j’ai quelques vidéos 720p très impressionnantes encodées en Dirac. La bonne nouvelle, c’est qu’une fois que vous avez l’infrastructure video/audio de base dans Firefox, ajouter de nouveaux codecs/formats est assez simple. C’est un point de départ pour fournir à tout le monde un dénominateur commun pour la lecture de vidéos.

Pourquoi n’avez-vous pas juste acheté une license H.264, VC-1, MPEG-2, ou (insérer votre codec préféré ici) ?

Nous avons étudié attentivement cette option et nous aurions très bien pu le faire, à un coût élevé pour nous, pour le version binaire “officielle” de Firefox. Mais cela posait certains problèmes :

  • Cela aurait nécessité l’inclusion de code fermé dans Firefox.
  • Tout travail dérivé du code de Firefox ou Mozilla n’aurait *pas* pu le rendre disponible.
  • Aucun autre projet open source n’aurait pu l’utiliser.

Cela aurait simplement résolu le problème pour les utilisateurs de Firefox. Notre priorité est de résoudre le problème pour le Web dans son ensemble.

Pourquoi ne pas utiliser uniquement nativement DirectShow/Quicktime/Gstreamer sur chaque plateforme ?

Nous travaillons également sur cela comme vous pouvez le voir ici, ici et ici. Toutefois, cette approche a deux limitations importantes : a) le support des codecs varie énormément d’une plateforme à l’autre et b) cela ne résoud rien pour les téléphones et autres systèmes. Nous voulons un format de référence sur lequel tous les créateurs de sites Web pourront compter et qui fonctionne sur tous les environnements.

C’est fabuleux, comment est-ce que je peux aider ?

Téléchargez la version de développement de Firefox (“nightly build”) ici et essayez-là ici ou sur Wikimedia Commons. Créez du contenu natif en Theroa/Vorbis. Aidez à transcoder d’autres formats en Theora. Parlez-en à vos amis.

Notes

[1] Crédit photo : 4 EveR YounG (Creative Commons By-Sa)




C’est rien qu’à cause de Wikipédia si nos enfants échouent !

B2i - aKa - 2008À l’heure où notre ministre de l’Éducation Nationale Xavier Darcos annonce pour la nouvelle classe de Seconde 2009 un module « Informatique et société numérique » dont je n’ai pour l’heure aucune autre information (accent algorithmique, accent éducation aux médias et à internet, ou les deux mon capitaine ?), je voudrais rappeler par cette traduction au titre volontairement caricatural qu’il y a selon moi effectivement urgence à mieux former la nouvelle génération à l’usage d’internet en général et de la recherche en particulier.

En tant qu’enseignant censé animer le B2i dans mon établissement, j’avais pris l’année dernière l’initiative de venir évoquer cela devant nos quatre classes du niveau troisième réunies pour l’occasion (voir photo ci-dessus). Je m’étais appuyé pour se faire sur de nombreuses ressources[1] dont une a priori paradoxale puisque s’adressant aux parents mais qui avait le grand mérite de couvrir à peu près tous les sujets envisagés tout en faisant (parfois vivement) réagir les élèves : Devenir e-Parent du fort intéressant site québécois Réseau Éducation-Médias (dont on ferait bien de s’inspirer du reste soit dit en passant).

Et j’en avais également profité pour parler un peu de Wikipédia, sa spécificité, son mode d’édition, sa collaboration, ses licences, son projet citoyen, ses forces et ses faiblesses, etc. pour en conclure que cette encyclopédie mutante constituait une excellente (mais non exclusive) première rampe de lancement pour une recherche particulière. Recherche particulière qui peut vous mener fort loin. Tellement loin qu’elle peut parfois vous faire revenir à Wikipédia pour compléter vous-même l’article de départ avec la pertinente information trouvée ailleurs. Histoire d’apporter nous aussi notre pierre à l’édifice 😉

Nos enfants échouent – et tout est de la faute de Wikipedia !

Our Kids Are Failing – And It’s All Wikipedia’s Fault!

Sarah Perez – 23 juin 2008 – ReadWriteWeb
(Traduction Framalang : Penguin et Olivier)

Quelle réaction irréfléchie ! Hier on apprenait en Écosse que c’est Internet qu’il faut blâmer pour le taux d’échec aux examens en Ecosse. Selon le SPTC (Scottish Parent Teacher Council : Conseil écossais des enseignants et parents d’élèves), Wikipédia, parmi d’autres sources, était cité comme étant la raison pour laquelle les étudiants échouent. Est-ce que Internet les rend stupides ? Ou bien est-ce que les étudiants ont seulement besoin d’apprendre à utiliser les nouveaux outils de recherche du Web de façon plus appropriée ?

Tout est de la faute de Wikipédia !

Dans le rapport, Eleanor Coner, porte-parole du SPTC, dit ceci : « Les enfants ont une très bonne maîtrise des outils informatiques, mais ils sont nuls en recherche. » Elle remarque que les étudiants d’aujourd’hui font la majeure partie de leurs recherches en ligne, au lieu d’utiliser des livres ou d’autres ressources qu’ils pourraient trouver dans une bibliothèque.

L’encyclopédie Internet, Wikipédia, était au cœur des préoccupations du conseil, car sa nature même lui permet d’être éditée par n’importe qui et qu’elle n’est pas mise à jour par des chercheurs reconnus.

De plus, le conseil s’inquiète des capacités de recherche des étudiants et de leur tendance à faire aveuglément confiance aux ressources en ligne. D’après Ronnie Smith, le secrétaire général de l’Institut d’Éducation d’Écosse, « Nous devons être sûrs que les jeunes ne considèrent pas ce qu’ils lisent en ligne comme des faits. »

Cela vous semble familier, non ?

Nous avons déjà entendu cette phrase de nombreuses fois : « Ne croyez pas tout ce que vous lisez » , « Ne croyez pas tout ce que vous voyez à la télévision », … maintenant c’est le tour d’Internet d’être soumis à l’inspection.

Est-ce que Internet nous rend stupide ?

Un coup d’œil rapide à cette information peut nous amener à croire qu’il s’agit d’un argument frappant en faveur de la thèse de Nicholas Carr qui dit que Internet (ou, comme il dit, Google) nous rend stupide. L’accès facile à un flot d’informations grâce à Internet, dit-il, affecte notre capacité à nous concentrer sur de longues périodes, comme lorsque nous lisons et absorbons de longs articles (une tendance que nous avons déjà mentionnée ici). D’une certaine façon, Wikipédia peut être vu comme la manifestation ultime de notre culture accommodante lorsqu’il s’agit de récupérer des informations.

Combien de fois par jour est-ce que vous faites une recherche rapide sur un fait quelconque et passez en coup de vent sur une page Wikipédia en récupérant uniquement les éléments mis en avant (dans mon cas en tout cas, j’admets que cela m’arrive au moins une fois par jour, si ce n’est plus).

Mais est-ce que les échecs aux examens sont réellement une indication sur la capacité de nos cerveaux à se reprogrammer pour s’adapter à cette nouvelle façon d’apprendre, comme Carr l’évoque dans son article ? Et est-ce que cette capacité affecte réellement notre intelligence ?

…Ou bien est-ce que les étudiants ont besoin d’apprendre à faire des recherches ?

Peut-être que non. Ce problème met plutôt en avant le fait que les institutions pédagogiques ont besoin d’adapter leur cursus et d’inclure des cours pour apprendre aux étudiants ce qu’est réellement une recherche. Une recherche Google peut les amener ou non à une ressource en ligne valable, mais beaucoup d’étudiants ne savent vraiment pas comment faire la différence entre ce qui est juste et ce qui ne l’est pas. Être capable de chercher une information en ligne et de la remettre en question pour déterminer s’il s’agit ou non d’un fait est tout simplement une aptitude qui manque à beaucoup d’utilisateurs sur Internet. Cependant, une fois que cette technique est acquise les étudiants peuvent l’appliquer durant toute leur formation, quelque soit le média qu’ils utilisent.

Notes

[1] Parmi les ressources on trouvait également notre diaporama Les licences Creative Commons expliquées aux élèves qui nous a été d’une aide précieuse pour aborder la question de l’échange et du partage sur internet.




Les femmes et le logiciel libre

Hommes - Femmes - Logiciels Propriétaires - Logiciels libres

Prenez 100 développeurs de logiciels, vous n’y trouverez que 28 femmes. Prenez maintenant 100 développeurs de logiciels libres, vous n’y trouverez alors plus que 2 femmes ! Telle serait la triste réalité d’une communauté qui aura toujours du mal à diffuser son message tant que ce déséquilibre perdurera. Pire encore, il se pourrait bien que les logiciels libres passent à côté de nombreux besoins et souhaits des femmes puisque presque exclusivement conçus par des hommes !

Du coup certains[1], comme ici Terry Hancock, proposent des pistes pour remédier à cette étrange situation. Difficile d’échapper parfois à la caricature mais cet article a au moins le mérite de faire exister le débat et de nous obliger, nous les mâles, à avoir cela présent à l’esprit lorsque nous nous engageons dans des projets libres.

Terry Hancock précise d’ailleurs dans une note : « Tout au long de cet article je fais beaucoup de généralisations sur comment se comportent les hommes et les femmes. De toute évidence les hommes et les femmes ne sont pas des groupes monolithiques et il y a beaucoup de différences que je simplifie énormément. Des différences importantes existent dans le monde réel, que ce soit pour des raisons naturelles ou sociales. En effet, en écrivant cet article, j’ai pris comme hypothèse que la plupart des problèmes ne sont qu’une manifestation des différences de style de vie. Et que c’est principalement à cause de ces problèmes de style de vie que j’ai le sentiment de pouvoir identifier une bonne partie des problèmes que les femmes rencontrent quand elles font face à la culture hacker en général et au logiciel libre en particulier. »

Une traduction Framalang de Yonnel pour une relecture attentive de… Daria 😉

L’occasion pour moi de saluer au passage quelques femmes que j’ai croisé ces dernières années au cours de mes pérégrinations dans le libre francophone : Anne (LéaLinux, Mandriva), Sophie Gautier (OpenOffice.org), Odile Benassy (OFSET, etc.), Chantal Bernard-Putz (RMLL), Michèle Drechsler (Education Nationale), Alix Cazenave (April), Perline (journaliste et auteur du Framabook sur Spip), Chloé Girard (La Poule ou l’Oeuf). Liste non exhaustive (si ce n’est ma mémoire…) à laquelle j’ajouterais bien celle qui a mené pendant près de deux ans l’un des plus beaux projets collectifs jamais envisagé à savoir Florence Devouard ex-présidente de la Wikimedia Foundation.

Copie d'écran - Free Software Magazine

Dix façons d’attirer facilement la gent féminine vers votre projet libre

Ten easy ways to attract women to your free software project

Terry Hancock – 22 septembre 2008 – Free Software Magazine – CC-By-Sa

L’inégalité entre sexes chez les développeurs et les sympathisants du logiciel libre est étonnante. Moins de 2% d’entre nous sont des femmes, selon des études commandée par la Commission Européenne. Pourquoi ? Les chiffres disent que nous les faisons fuir. Or si on trouve de bons conseils pour réussir à ne pas les faire fuir, ce qui manque c’est une stratégie de mise en pratique : je présente ici dix changements relativement simples dans la manière de diriger un projet pour le rendre plus attractif aux yeux des futurs contributeurs et plus particulièrement aux yeux des futurs contributrices.

Il y a beaucoup d’études sur le sujet, et si une meilleure compréhension du problème vous intéresse, alors il vous faut aller lire certaines des liens proposés. L’étude FLOSSPOLS est particulièrement informative, et bien qu’elle soit longue, elle est bien structurée, et comporte de bons résumés. Val Henson a écrit un excellent HOWTO sur les questions comportementales, dont je vous recommande chaudement la lecture. Beaucoup de littérature existe sur l’ampleur du problème, les facteurs qui y contribuent probablement, et même certaines idées sociales et politiques d’envergure pour y remédier.

Pour le dire très brièvement, ces études concluent qu’il n’y a pas de pénurie de femmes qui s’intéressent à l’informatique, ni de femmes capables de le faire bien, et il y a d’excellentes raisons pour que les femmes soient impliquées personnellement et pour le bénéfice de la communauté. Toutefois les méthodes de la communauté sont extrêmement centrées sur les mâles, et hostiles à quiconque ne rentre pas dans ce moule, un problème confirmé par les quelques pionnières qui sont réellement engagées. Les solutions recommandées impliquent prioritairement des changements culturels qui doivent avoir lieu pour éviter cette hostilité et rendre le milieu plus accessible

Je vais présumer que vous adhérez déjà à la nécessité d’inviter plus de femmes dans notre communauté, ou du moins que vous vous engagez pour faire disparaître ce qui les fait fuir. Mais qu’allez-vous y faire ? En tant que leader ou fondateur d’un projet libre, vous prenez beaucoup de décisions fondamentales sur la façon dont vous allez conduire votre projet. Et c’est là que je pense que le changement doit commencer : rendre un projet plus convivial. Puis un autre, et ainsi de suite.

À mon avis, la clé est le problème technologique. La société connectée est le produit de ses participants, mais aussi du paysage créé artificiellement par les logiciels que nous utilisons dans notre processus de production. Cet ensemble d’outils a été façonné presque entièrement par les hommes, et inconsciemment, pour les hommes et leurs besoins sociaux. Les besoins des femmes ont été ignorés, voire même parfois carrément tournés en ridicule. Et surprise, surprise… elles ne se montrent pas.

Il est temps d’y remédier. Voici une liste de dix décisions pas-si-difficiles à prendre lors de la conception d’un nouveau projet, ou à adopter dans un projet existant. Neuf suggestions sur dix ne concernent pas directement les femmes (la dixième oui, mais seulement trivialement). Rendre votre projet plus convivial et plus ouvert aux nouveaux contributeurs attirera des hommes autant que des femmes. Mais ce sont les femmes qui bénéficieront le plus de ces changements.

1. Utilisez des forums au lieu des listes de diffusion

« Lorqu’on les questionne sur le gros déséquilibre des sexes dans le développement des logiciels libres, de nombreuses femmes relatent des histoires de harcèlement ou autres traitements déplacés lors d’un salon du libre ou dans un newsgroup. Puisque la plupart des projets libres ne sont pas affiliés à une entreprise, une université ou autre groupe responsable, un comportement civilisé n’est pas imposé. »
Michelle Levesque/Greg Wilson

« Le seul fait de savoir qu’il y a une autre personne dans le groupe qui est prête à exprimer publiquement son désaccord avec le mouton noir sera d’une immense aide, et fera que les femmes auront plus envie de rester. »
Val Henson

Les raisons

  • Les standards de la communauté sont plus faciles à conserver
  • Les avatars créent une impression proche du face-à-face, qui encourage un comportement plus humain
  • Les badges et les rangs permettent de mieux évaluer la représentativité de tout participant
  • Les signatures et les avatars offrent une forme d’expression personnelle graphique qui est plus confortable pour les femmes
  • Les communications hors posts permettent à des méta-conversations de prendre place sans déranger le forum : vous n’avez pas à poster pour contrer un message injurieux, vous lui donnez juste une mauvaise note ou le signalez au modérateur
  • Les informations comme le statut marital ou autres préférences peuvent être communiquées dans les profils, par ceux qui le désirent, et ignorées par ceux qui n’en veulent pas, ce qui évite de donner envie d’en parler dans un fil de discussion.

Le vrai problème numéro un quand les femmes rejoignent des projets libres est que, depuis le début, elles doivent composer avec les cons. Si c’est votre boulot, vous vous accommodez des cons, parce que vous y êtes contraint. Mais vous l’imposeriez-vous, juste par plaisir ? Non. La plupart des contributeurs potentiels, surtout les nouveaux, sont là pour le plaisir.

Le HOWTO Encourage Women in Linux de Val Henson traite presque exhaustivement des problèmes de comportement et de ce qui doit être changé, mais il en dit peu sur la façon de procéder à ces changements. En tant que leader, il vous faut un moyen de fixer des règles communes dans la communauté et de les faire respecter. Bien que le côté Far West des forums aient parfois un certain charme personne n’a sérieusement besoin de tolérer des bordées d’insultes. Elles ne sont pas constructives, et il est toujours possible de faire valoir les mêmes arguments dans un vocabulaire civilisé.

Par conséquent, bannissez les cons et veillez à conserver la bonne ambiance. Les logiciels de listes de diffusion sont nuls en ce qui concerne les options de modération, alors ne les utilisez pas ! Ouvrez un forum dans votre CMS, sur votre serveur, ou utilisez un service d’hébergement de forum payant ou gratuit. Et faites alors en sorte que les conversations s’y déroulent en cet endroit pour les utilisateurs mais aussi pour les développeurs.

Les forums sont très plaisant une fois que vous vous y êtes habitué, et les femmes les apprécient pour d’autres raisons que l’impression d’avoir un havre de paix. Ils mettent aussi plus en avant la camaraderie et les comportements sociaux que les listes de diffusion, ce qui contribue à une plus grande impression de loisir constructif. Les femmes collaborent souvent à des projets pour se faire des amis, c’est donc un bon moyen d’encourager les contributions.

Il va sans dire, bien entendu, que vous devez avoir des règles de comportement sur le forum, et que vous devez les faire respecter. Donnez aux modérateurs le pouvoir de prendre en charge cet aspect (et les femmes, souvent, seront volontaires pour ce genre de travail, si vous leur demandez gentiment).

2. Utilisez des conversations à plat plutôt que des fils de discussion entremêlés : « qui », pas seulement « quoi »

« Alors qu’il est possible pour un développeur de réussir convenablement tout en étant fortement anti-social, et que la programmation a tendance à attirer ceux qui sont moins à l’aise pour l’interaction humaine, l’informatique peut-être social si vous le décidez ainsi. Pour moi, il est moins agréable ou créatif de développer seule que quand j’ai des gens autour de moi pour parler de mon programme. »
Val Henson

Les raisons :

  • Les environnements où les fils de discussion sont à plat encouragent une logique de conversation plus simple, qui ressemble plus à une discussion face-à-face
  • Il est plus facile de repérer qui est en train de parler, et non pas ce dont ils parlent, et ceci est susceptible d’être plus important pour les femmes, pour qui les relations entre individus au sein de la communauté sont en général plus importantes que la seule chasse à l’info.
  • Les discussions à plat encouragent des conversations plus courtes, plus essentielles, avec des sujets plus clairs, qui sont susceptibles d’être plus faciles à suivre pour tous les nouveaux arrivants, et pas uniquement les femmes

C’est un point beaucoup plus subtil et moins évident. Confrontés à l’observation que les femmes préfèrent souvent des fils de discussion à plat plutôt que des fils emmêlés autour d’un même sujet, certains concluent un peu vite que c’est à cause d’une expérience limitée de la technologie. Je suis pourtant convaincu que cela va plus loin.

La clé est la nature de l’information et les besoins psychologiques des participants : si vous êtes là en priorité uniquement pour recueillir des informations, avant de repartir vaquer à vos occupations, alors les discussions emmêlées vous rendent service, en mettant les infos dans des catégories. Par contre, si la raison de votre présence est principalement sociale, si vous recherchez la compagnie des gens qui pensent comme vous, pour discuter d’un sujet que vous aimez, alors les fils de discussion à plat vous rendent service en vous offrant un meilleur contexte pour la conversation.

Les femmes se sentent plus engagées à contribuer quand elles se sentent entourées par des gens qu’elles considèrent comme des amis et réciproquement. Donc ironiquement, ces comportements, qui peuvent ne pas sembler très favorables à la productivité, auront comme résultat une meilleure productivité.

De la même manière, je recommande de faire de très courts sessions IRC, avec des équipes ciblées sur des problèmes particuliers. Arrangez-vous pour que ce soient des sprints en ligne, de telle sorte que les gens ayant une vraie vie (ce qui est en fait le cas de beaucoup de femmes) puissent faire rentrer ces projets dans leur emploi du temps. Mais n’essayez pas de gérer des sessions IRC longues, qui trainent en longueur, et auxquelles il vous faudrait consacrer toute votre vie si vous voulez les suivre.

3. Autant que possible, utilisez les wikis plutôt que des logiciels de gestion de versions

On considère que pour être un bon informaticien, il faut pendant presque toutes les heures d’éveil soit utiliser un ordinateur soit apprendre à s’en servir. Bien que ce soit encore une idée reçue, les femmes sont en général moins sujettes à l’obsession sur une seule activité, et préfèrent mener une vie plus équilibrée. Les femmes croient souvent que si elles commencent l’informatique, elles perdront inexorablement cet équilibre, ce qui fait que certaines préféreront carrément éviter ce domaine.

Les raisons :

  • Les femmes aiment le travail coopératif, elles ne font pas que le tolérer
  • Le jeu de la réputation est beaucoup moins important pour les femmes que le sentiment d‘appartenance au groupe
  • Tout le monde a un navigateur, mais les femmes ont souvent moins de contrôle sur l’équipement et les logiciels qu’elles utilisent, surtout quand elles débutent
  • Même si les femmes ont le contrôle nécessaire pour installer des environnements de développement, en général elles ne veulent pas perdre autant de temps à jouer avec les outils, et veulent moins d’obstacles pour pouvoir simplement travailler
  • Les femmes veulent plus souvent discuter ou chercher l’approbation pour leurs changements, ce qui est surtout dû à des problèmes de confiance

Wikipédia a un groupe de contributeurs beaucoup plus représentatif que le logiciel libre. Une raison en est que le coût d’entrée de la participation n’est pas très élevé. Vous voyez quelque chose de faux dans un article, alors vous cliquez sur modifier et vous réparez l’erreur. Il n’y a pas de grosse barrière, vous ne devez donc pas être extrêmement motivé pour la passer.

Il est dommage qu’il n’y ait pas encore de bon outil pour implémenter la gestion de versions du code source via un environnement de style wiki (comment faire pour tester les changements ?), mais c’est absolument possible pour tout le reste du projet : la documentation, les ressources textuelles et graphiques, etc.

4. Utilisez des langages de très haut niveau (Perl, Python, Ruby, etc.)

« Un autre point important est que le développement de logiciels libres est souvent un hobby, juste pour le plaisir, pris sur le temps libre. Où est le temps libre pour une femme ? Après leur journée de travail, la plupart ont encore la seconde journée de travail, chez elles, pour prendre soin de la maison, des enfants et du mari. Si les hommes peuvent avoir le privilège de faire du logiciel libre pour leur loisir, assis devant leur ordinateur à s’amuser à coder ce qui leur plait, en général les femmes n’ont pas ce privilège. »
Fernanda Weiden

« Avoir des enfants fait une différence, une vraie différence. »
Mitchell Baker

« J’ai donc entrepris la conception d’un langage qui rendrait les programmeurs plus productifs, et si cela impliquait que les programmes seraient un peu plus lents, eh bien, c’était un contrecoup acceptable. De par mon travail sur l’implémentation du langage ABC, j’ai eu beaucoup de bonnes idées sur la façon de faire. »
Guido van Rossum (à propos de ce qui l’a motivé à créer le langage de progammation Python)

Les raisons

  • Les femmes ont moins de temps pour s’adapter à une technologie
  • Leur temps est plus morcelé, il doit tenir compte de responsabilités comme de soutenir ou de prendre soin d’une famille
  • Les interruptions imprévues et l’incertitude qui en résulte quant aux moments disponibles pour la programmation est un problème encore plus important : vous ne savez jamais si vous allez pouvoir assembler de nouveau ce que vous venez juste de désassembler
  • Si elles n’ont pas confiance et ont commencé la programmation tardivement, beaucoup de femmes d’aujourd’hui n’auront simplement pas la croyance qu’elle peuvent venir à bout d’un problème complexe dans un langage qui ne rend pas les choses faciles
  • Les langages modernes de très haut niveau (VHL Very High Level) comme Python, Perl et Ruby peuvent souvent condenser le travail de fourmi des programmeurs, et permettent de mieux utiliser le temps disponible
  • Un langage qui met l’accent sur la lisibilité, comme Python, peut faciliter la récupération après une interruption, par conséquent moins de temps est perdu

Ce fut une révélation personnelle. Pendant des années au lycée et à la fac, j’ai programmé en BASIC, puis en FORTRAN, et ensuite en C et C++. Je trouvais cela plutôt pas mal convenable, et comme la plupart des hackers, je passais de longues heures nocturnes à programmer.

C’est alors que, quelque temps après la fac, nous avons eu notre premier enfant. Après, je me suis rendu compte que je ne pouvais plus programmer. Sérieusement. il y avait juste trop d’interruptions. Dès que je revenais dans la course avec le logiciel sur lequel je travaillais et que j’étais assez loin pour entamer l’étape logique suivante, j’étais de nouveau interrompu, et le programme retournait en veilleuse. Plus tard, je me retrouvais à devoir résoudre le puzzle de ce que j’avais écrit le jour, la semaine, voire les mois précédents.

Quand j’ai fini par me remettre à la programmation, c’était pour faire du logiciel libre, et quelqu’un sur mon premier projet m’a recommandé d’essayer Python. C’était incroyable. Je pouvais enfin y arriver comme avant. C’est à la fois parce que le code de Python est plus compact et qu’il est plus lisible.

Maintenant les enfants ont l’âge d’aller à l’école, et j’ai plus de temps, Mais je suis désormais trop accro à la productivité de Python pour en changer !

5. Suivez les idées de l’extreme programming

« Comme toute discipline, l’informatique est plus facile à apprendre quand vous avez des amis et des mentors à qui vous pouvez poser des questions et avec qui vous pouvez former une communauté. Pourtant, pour diverses raisons, les hommes ont habituellement tendance à être le mentor et l’ami d’autres hommes. Quand le déséquilibre entre sexes est aussi grand qu’il l’est dans l’informatique, les femmes trouvent peu ou pas d’autres femmes avec qui échanger. »
Val Henson

Les raisons :

  • Le développement par les tests transforme une gratification très tardive en de nombreuses petites satisfaction, les femmes qui manquent souvent de confiance en leurs capacités techniques ont parfois besoin de voir pour prendre confiance
  • La programmation en binômes est une méthode de travail très féminine, avec ces équipes rapprochées qui scrutent le code ensemble. Deux paires d’yeux trouvent plus de bugs, et il n’y a pas de meilleur moment pour trouver un bug que juste après (ou même avant) le moment où l’erreur est commise
  • La disparition du monde masculin centré sur le pouvoir, avec des équipes de développeurs hiérarchisées, est une vraie victoire pour les femmes, qui préfèrent les structures plus horizontales, entre pairs.

Une magnifique tendance, largement motivée par le développement des logiciels libres, est celle appelée Extreme Programming ou XP (NdT : voir Wikipédia). À mon avis, c’est en fait une méthode de travail très féminine, et en tout cas, elle s’oppose directement à certains des obstacles auxquelles les femmes sont confrontées. Il y a plein d’autres raisons d’utiliser les méthodes XP, mais le fait d’attirer les développeuses en est une de poids.

Un sujet qui pourrait poser problème est que les femmes pourraient avoir du mal à trouver des partenaires pour des sessions de programmation en binôme. Il pourrait être alors pertinent d’essayer de faire l’expérience avec des petits (tout petits) chats IRC et certains moyens de voir le code en même temps qu’on le modifie.

6. Remplacez les classements hiérarchiques par des processus valorisants

« Il est intéressant de constater que des réponses grossières sont souvent données par des gens qui sont en train de se faire une réputation. Souvent, c’est comme si les participants moins bien notés essaient de se construire une réputation soit en répondant grossièrement et ainsi montrer leur impatience vis-à-vis des ignorants, soit en se pavanant avec toute l’étendue de leurs connaissances, au lieu de fournir une réponse simple. »
FLOSSPOLS

« Souvent, la seule récompense (ou la plus grande récompense) quand on écrit du code est le statut et l’approbation des pairs. Beaucoup plus souvent, la récompense est une flamme cinglante (NdT : voir Wikipédia), ou encore pire, pas du tout de réaction. »
Val Henson

Les raisons :

  • Le culte de la personnalité ne tourne qu’autour de la gloire et de l’honneur, choses souvent très importantes pour les hommes, mais qui sont habituellement d’un intérêt secondaire pour les femmes
  • Les femmes trouvent généralement ennuyants les concours de supériorité macho, et voyons les choses en face, ils sont idiots
  • Les femmes n’aiment pas se la raconter, mais elles adorent être valorisées et participeront davantage si c’est le cas
  • La réputation (subjective) est souvent carrément fausse et très, très biaisée. Des mesures (objectives) sont souvent nécessaires pour voir ce qu’il en est vraiment, surtout quand les participants ne sont pas pareillement francs
  • Les rituels d’acceptation explicite encouragent un sentiment d’appartenance qui est plus important pour les femmes que pour les hommes, et plus important qu’un désir de compétition pour mener la meute
  • Cela donne confiance et encourage à contribuer quand on a un retour tangible et une reconnaissance pour ce que l’on fait

Il est important de se rendre compte que les messages injurieux sur les forums et autres concours de domination masculine servent bien une fonction sociale. C’est une façon très primitive d’évaluer l’importance et la valeur des individus dans le groupe. Le fait de savoir qui est le chef est quelque chose qui rend la coopération plus aisée (surtout pour les hommes). Les hommes, par instinct ou depuis l’enfance, savent comment jouer à ce jeu, et ils le font inconsciemment.

Les méthodes des femmes pour atteindre les mêmes buts sont très différentes. Ils tournent autour de niveaux de coopération plus élevés, de moins de compétition, et d’une attention beaucoup plus pointue à l’affirmation de soi et des autres dans le groupe. Les femmes sont beaucoup plus sensibles à l’appartenance qu’à la victoire. Elles accordent beaucoup moins d’importance à la gloire qu’au fait d’être reconnues et appréciées.

Concentrez-vous donc sur un renforcement positif des bons comportements et des bonnes contributions. Quand quelqu’un fait quelque chose d’utile pour le projet, donnez-lui en crédit. Donnez-lui alors plus de responsabilités. Et, sur le forum, donnez-lui quelque symbole (un label ou un avatar) en reconnaissance de ce qu’ils ont fait. De cette façon, il n’y a pas de nécessité d’en faire des tonnes. Tous pourront voir en un instant qui est à l’origine de contributions réelles.

Les femmes, à cause de la timidité, du manque de confiance, ou des pressions sociales contre le fait de se mettre en avant, ne s’attribueront généralement pas seules ces titres. Ils doivent leur être donnés par les autres. Être "valorisées" ou "utiles" constitue la motivation première de leur contribution.

Bien trop souvent, cela n’arrive tout simplement pas dans le fonctionnement des logiciels libres. Les contributeurs passent des centaines d’heures à écrire et/ou à améliorer du code, et qu’est-ce qu’ils ont en retour de leur sueur ? Souvent, pas grand-chose.

Passez un peu de temps à roder sur un forum ou une liste de diffusion dominés par les femmes si vous voulez voir de quoi je parle. Les femmes font vraiment cette chose incroyable de s’encourager et se complimenter les unes les autres. Surtout, elles n’oublient pas de dire merci quand quelqu’un fait quelque chose de bien pour leur communauté.

7. Accordez de l’importance à ce que les femmes font

« Le fait d’ouvrir notre définition du hacking pour y inclure de tels concepts traditionnellement féminins comme l’interface utilisateur et la psychologie, les communications écrites et verbales, l’interaction entre groupes, etc., peut être une alternative valide à l’obligation faite aux femmes de rentrer dans le moule existant du hacker. De surcroît, cela peut avoir pour résultat des communautés et des processus qui soient plus performants que nos modèles actuels. »
Kirrily Skud Robert

Les raisons :

  • Les bons logiciels sont beaucoup plus que juste du code
  • La documentation n’est pas plus facile à écrire que le code (à moins de le faire très mal)
  • Le marketing, le visuel, les logos, les icônes, ou tout simplement le fait d’aider les gens est aussi important
  • Dans un environnement sûr et qui leur permet de s’affirmer, les femmes feront une bonne partie de ce que les hommes ne veulent pas faire sur un projet, et qui est absolument essentiel pour le succès du projet
  • Les distinctions artificielles comme celle du Turing-complet (NdT : voir Wikipédia) sont une division du monde idiote : le HTML, SVG, XML et SQL ne sont pas plus faciles à écrire que du C, Java ou Python, et avec exactement la même importance pour beaucoup de projets
  • La sous-évaluation systématique du travail des femmes est un reliquat de politiques archaïques et sexistes, c’est juste une façon de les perpétuer

Il y a une constante (dans l’ensemble de la société, pas seulement en informatique) tentative de dévaluation de tout ce qui est fait par des femmes qui serait moins important ou moins difficile que quoi que ce soit qui ait été fait par des hommes. C’est peut-être parce que les hommes ressentent un besoin d’être important et que les femmes ressentent surtout qu’elles ont besoin d’être utiles.

Mais la réalité est que les tâches traditionnellement assurées par les femmes sont souvent tout autant difficiles et tout autant cruciales pour la réussite du projet que n’importe laquelle des tâches traditionnellement assurées par les hommes.

Assez souvent, la documentation, les pages web et autres produits non-langage de programmation sont des domaines auxquels les femmes participent aisément (ce sont en effet des domaines que le logiciel libre, milieu dominé par les hommes, a fortement tendance à ignorer). Valorisez-le pour ce qu’il est, et ne faites pas de distinctions artificielles. Une contribution est une contribution. Et ceux qui aujourd’hui écrivent de la documentation pourraient écrire du code demain, si vous ne les faites pas fuir dans l’intervalle.

8. Mettez l’accent sur le processus communautaire plutôt que sur les produits finis

« Les ordinateurs sont encore perçus comme des jouets de garçons, même avant d’aller à l’université de nombreux garçons sont en effet prêts à travailler avec la technologie et à développer des carrières dans des domaines techniques. Les femmes quant à elles ont souvent besoin de consacrer plus de temps à l’étude et à l’amélioration de leurs compétences. Dans la communauté du libre, il est plus important d’échanger le savoir, par le code, la documentation, le débat et les idées. C’est comme une bibliothèque, une énorme encyclopédie disponible en direct. C’est très important pour les femmes et peut être très utile à leur développement. »
Sulamita Garcia

Les raisons :

  • La fabrication d’un logiciel en tant que produit est artificielle et à l’opposé de la nature du logiciel libre
  • Les domaines du service et du support sont les centres de profit du logiciel libre, ils méritent donc plus de respect

Le modèle du logiciel comme un produit défini à manufacturer avant une certaine date de sortie et à vendre est un modèle hautement artificiel, créé avant tout pour rendre viables les entreprises qui développent du logiciel propriétaire. La réalité est que le processus de création d’un logiciel est beaucoup plus original et créatif.

Ce devrait être un choix évident. Dans le monde des logiciels propriétaires, on crée un logiciel pour le profit (on vend des copies du code), alors que le service et le support se font à perte (parce que typiquement vous avez inclus une sorte de support dans le prix de vente des copies que vous avez vendues, et vous ne le rattraperez pas régulièrement). Dans le monde des logiciels libres, les choses sont habituellement exactement à l’opposé : vous ne gagnez rien en livrant le code, parce que les gens peuvent l’avoir gratuitement et le copier autant qu’ils le souhaitent, mais vous pouvez gagner de l’argent en vendant du service et des contrats de support divers et variés.

Les femmes, bien sûr, ont tendance à graviter beaucoup plus autour des rôles de support que les hommes. Et pourtant elles reçoivent très peu de reconnaissance en retour. N’y a-t-il pas quelque chose de bizarre ? Oui, c’est ça, les femmes assurent les gros sous. Alors pourquoi est-ce que ce fait est si peu mis en avant ?

9. Créez un système formel de parrainage et des processus d’initiation

« LinuxChix était à l’origine un espace de rencontre et de support pour les femmes qui travaillaient dans l’informatique. En général lorsque ces femmes nous rejoignaient elles étaient heureuses et agréablement surprises qu’il y ait un groupe de femmes qui discutaient de technologie, se rendant ainsi compte qu’elles n’étaient pas seules. »
Sulamita Garcia

Les raisons :

  • Les femmes ont moins d’opportunités d’apprentissage
  • L’apprentissage informel avec les hommes peut être gênant (est-elle votre apprentie ou votre petite amie ?)
  • Les femmes ont peut-être manqué des opportunités d’apprendre précocement à cause du sexisme rencontré très tôt dans leur vie

Au bout du compte, apprendre à programmer a tendance à être un processus d’apprentissage. Vous pouvez pas mal apprendre dans des cours formels ou par la lecture. Vous pouvez même apprendre en passant un temps fou à vous cogner la tête contre les murs en essayant de faire fonctionner quelque chose tout seul. Mais la meilleure manière est de pouvoir demander de l’aide, même au début où vous avez besoin de poser les questions très, très bêtes.

10. Rendez visibles les femmes actuellement présentes dans votre projet

« J’encourage toutes les femmes dans l’informatique à être aussi visibles que possible – acceptez toutes les interviews, soyez valorisées publiquement – même quand vous n’en avez pas envie. Cela peut vous embarrasser, mais en vous autorisant à être promue ou rendue publique, vous pourriez changer quelque part la vie d’une petite fille en devenir. »
Val Henson

Les raisons :

  • Il y a des pionnières[2] dans le logiciel libre qui peuvent agir comme des modèles pour les jeunes femmes qui cherchent une carrière ou une vocation, mais elles sont perdues dans la masse de tous les hommes dans ce domaine
  • Les modèles peuvent incarner de très bonnes motivations pour tous, mais surtout pour les plus jeunes qui peuvent ne pas être totalement certaine de pouvoir vraiment suivre le chemin d’une telle vocation
  • Souvent, nous agissons comme si les forums du libre étaient à 100% réservés aux hommes, alors que la réalité se situe plutôt à 90%-95%. Rendre la minorité de femmes visible permet tout autant aux hommes qu’aux femmes de s’ajuster à la réalité de la situation et laisse de la place pour que les minorités s’épanouissent
  • Beaucoup de femmes regardent plus qu’elles ne participent aux forums, pour beaucoup des raisons décrites ci-dessus. Voir les femmes acceptées par la communauté encouragera toujours plus d’entre elles à participer

Alors que le chemin de pionnière est difficile, la présence des femmes en encouragera d’autres à les rejoindre. Cela fera également comprendre aux hommes de votre projet qu’ils sont en galante compagnie et qu’ils ne peuvent plus se permettre certains comportements.

Bien entendu, il faut que les pionnières qui travaillent sur des projets de logiciels libres acceptent d’être un peu plus mise sous la lumière. Vous ne devriez certainement pas leur imposer la reconnaissance, mais vous devriez leur demander si elles veulent bien se lever et affirmer plus encore leur présence.

C’est la diversité qui fait la force

« Les gens écrivent des logiciels pour combler leurs besoins, pour que les logiciels fassent ce qu’ils veulent qu’ils fassent. Si les femmes ne participent pas dans l’écriture du code et l’écriture de la documentation, elles n’auront jamais les résultats et la réponse à leurs besoins. C’est ainsi. Celles qui ne font que regarder n’ont aucune influence sur le développement, et la conséquence est de ne pas avoir de logiciel qui réalise précisément ce que vous voulez qu’il fasse. »
Fernanda Weiden

J’espère avoir convaincu que les bénéfices d’avoir de plus en plus de participantes dans le logiciel libre sont évidents. Nous écrivons des logiciels pour répondre aux besoins des gens, mais nous ne pouvons voir clairement que nos propres besoins. Une plus grande diversité de ceux impliqués signifie plus de perspectives sur tous les problèmes, une meilleure compréhension des problèmes qui doivent être résolus, et de meilleures solutions à ces problèmes.

Beaucoup des contributions stéréotypiquement féminines : le design de l’interface, la documentation, et même le marketing sont des domaines dans lesquels le logiciel libre est tristement déficient. Il devrait être assez évident que si c’est ainsi que les femmes souhaitent contribuer, nous devrions foutrement leur rendre la vie facile.

Il y a beaucoup à gagner en amenant les femmes dans le logiciel libre, et la meilleure façon pour vous d’aider à ce que ça soit possible est de commencer par votre projet et les projets auxquels vous contribuez.

Notes

[1] Quelques ressources francophones sur le sujet glanées sur le net : Femmes et logiciels libres : un enjeu de société de Laurence Rassel, Hacker ou macho alternatif ? de Lize De Clercq, Les femmes et les logiciels libres : Situation, Analyse, Propositions d’Aurelie Chaumat et Les Femmes dans le Logiciel Libre de Anne Østergaard.

[2] Parmi les pionnières citons par exemple Ada Lovelace, Grace Hopper, Frances Allen, Rosalind Picard, Mitchell Baker et Mary Lou Jepsen.




OpenOffice.org 3.0 est dans la place !

OpenOffice.org 3.0

OpenOffice.org version 3.0 est officiellement sortie de son cocon aujourd’hui. Nombreux sont ceux qui l’attendaient avec impatience qu’ils soient déjà utilisateurs de la version précédente, ou candidat à la migration (comme par exemple en milieu scolaire où, doit-on encore le rappeler, MS Office 2007 est à déconseiller).

Télécharger la version française d’OpenOffice.org 3.0

Pour marquer le coup rapidement et passer en revue tout aussi rapidement quelques nouveautés significatives de cette nouvelle génération de notre suite bureautique libre préférée, nous vous proposons une courte traduction[1] imagée d’un article paru cet été.

OpenOffice.org 3.0

OpenOffice.org 3.0: Que peut-on en attendre ?

OpenOffice.org 3.0: What to Expect?

Rami Taibah – 6 juillet 2008 – Bringing Linux to the Masses

Il y a quelques mois, OpenOffice.org sortait sa version 2.4, offrant une panoplie impressionnante d’améliorations. Pourtant, si vous pensiez que la version 2.4 était une version majeure, vous n’avez encore rien vu ! Le 13 octobre, OpenOffice.org va sortir sa version 3.0, qui devrait offrir une immense avancée ! De l’avis général, la version 3.0 qui arrive est considérée comme une jalon important dans le développement du projet. Voici quelques-uns des progrès que j’attends avec le plus d’impatience :

Writer

Avec la version 3.0, Writer bénéficiera d’une multitude de progrès intéressants. Vous aurez le choix entre différentes vues : une seule page, plusieurs pages côte à côte et une vue livre. Un curseur de zoom a été ajouté dans le coin inférieur droit de l’écran, ce qui est, admettons-le, quelque chose que l’on a vu en premier dans Office 2007, mais qui est à coup sûr une fonctionnalité bienvenue.

OpenOffice.org 3.0

L’outil d’insertion de commentaires, repensé et embelli, permet d’ajouter des notes en couleur et des commentaires dans la marge à la place de l’ancienne méthode inefficace (que je n’ai jamais utilisée).

OpenOffice.org 3.0

Le menu permet maintenant de facilement passer d’un correcteur orthographique à un autre, ce qui est très pratique pour les documents multi-lingues. Cette amélioration est la bienvenue lorsqu’on travaille sur des documents en plusieurs langues comme moi avec mes documents anglais/arabe.

Le support de Mac OS X

Je me souviens d’un ami qui se plaignait de l’intégration de l’Arabe dans MS Office sur son Mac (ou plutôt de son absence), je lui avais alors suggéré OpenOffice.org. Hélas, j’ignorais qu’il fallait installer d’autres paquets (X11 et d’autres). Nous avons dû pas mal bidouiller pour réussir à le faire fonctionner. Avec OpenOffice.org 3.0, plus aucun problème, OpenOffice prendra nativement en charge MacOS X !

Filtres d’import pour Microsoft Office 2007

Il me répugnait de recevoir un document se finissant en x (docx, pptx, xlsx) ! Quelle extension à la noix, à vous donner des frissons dans le dos. Ce n’est désormais plus le cas, car avec OpenOffice 3.0 on peut directement les importer et les éditer en un clin d’oeil ! Bien sûr, l’import n’est pas encore parfait, mais nous savons tous à qui revient la faute (vous savez, ces milliers de pages de documentation obscure…)

Nouveau style dans Calc

OOo propose à présent un style glacé et des effets de transparence plus léchés ! Voici une comparaison entre les anciens :

OpenOffice.org 3.0

…et les nouveaux :

OpenOffice.org 3.0

Les écrans différents de Presenter

Ça m’a toujours semblé couler de source, sans savoir si cela existe dans Office ou non, mais c’est formidable qu’OpenOffice 3.0 le propose. En gros, dans Presenter, on peut voir un écran différent de celui affiché sur le projecteur. On peut ainsi avoir un aperçu de la diapositive suivante, du temps écoulé, des notes et des commentaires.

OpenOffice.org 3.0

Les tableaux intégrés en natif dans Impress

Jusqu’alors, lorsqu’on comparait OpenOffice à Microsoft PowerPoint, les tableaux constituaient le talon d’Achille d’OpenOffice. La seule solution consistait à réaliser des dessins maladroits de tableaux ! Ce n’est plus le cas !

OpenOffice.org 3.0

Import PDF

Bien que cette fonctionnalité ne soit pas encore présente dans la version beta que j’ai installée, elle devrait apparaître et fonctionner dans la mouture finale du 13 octobre.

Conclusion

OpenOffice 3.0 est un jalon majeur pour le projet, qui comporte des tas d’autres nouvelles fonctionnalités. J’ai également noté une très sensible amélioration de la vitesse, qui a toujours été un problème dans les versions précédentes d’OpenOffice.org.

Télécharger la version française d’OpenOffice.org 3.0

Notes

[1] Une traduction que nous devons à Penguin, Olivier et Don Rico.




Largage de liens en vrac #8

Arkangel - CC by-saLe nouveau Gimp vient de sortir (version 2.6) et OpenOffice.org est dans les starting-blocks (version 3.0). Quant à moi je continue de remplir mes marque-pages de news logicielles susceptibles d’intéresser de près ou de loin le framalecteur. Comme d’habitude il ne s’agit que d’un survol rapide et subjectif de l’actualité[1].

  • Podcast Generator : Vous souhaitez offrir du podcast à vos visiteurs ? Alors Podcast Generator a de bonnes chances de répondre à votre besoin. Parmi les fonctionnalités on notera le streaming flash mais surtout la sortie XML/RSS compatible avec Juice and iTunes.
  • Capture Fox : Une extension ambitieuse Firefox qui permet de réaliser des screencast avec la voix qui plus est. La sortie est en AVI et n’est pour le moment disponible que sous Windows XP et Vista. Petite explication et démo en français ici (ps : j’ai pas compris si l’extension était libre et si l’on pouvait filmer l’écran de son ordinateur pour monter autre chose que sa fenêtre FIrefox).
  • niftyPlayer : Pour votre site web, sûrement le plus léger de tous les lecteurs flash audio (avec ou sans Javascript).
  • Phatch : Contraction de Photo et Batch. Permet d’automatiser certaines tâches sur une série de photographies. On peut renommer, redimensionner mais aussi faire pas mal de choses originales comme arrondir les coins, ajouter un effet ombré, etc.
  • Zarafa : L’alternative professionnelle à Microsoft Exchange passe en open source une bonne partie de son offre logicielle (c’est plus stratégique que philanthropique mais c’est toujours bon à prendre !).
  • Evolution : Restons dans la messagerie groupware avec l’annonce du portage Windows d’Evolution, célèbre alternative Unix à Outlook (à ne pas confondre avec le grand public Outlook Express).
  • Habari : Dans la grande famille des moteurs de blogs (WordPress, Dotclear) je demande le petit dernier que même que les premiers avis disent qu’il est très prometteur.
  • Hyperwords : Encore une très pratique extension Firefox (libre ou pas ?) qui rend certains internautes plus qu’enthousiaste. Il n’y a pas à dire mais ces extensions participent de beaucoup à la valeur ajoutée de Firefox (n’est-ce pas Google Chrome ou Chromium ?).
  • MiniG : Gmail est pour vous la meilleure des webmails ? MiniG c’est comme Gmail mais pour les entreprises puisque, détail ô combien important, les données sont conservées sur les serveurs de votre propre boite (développé pour OBM par Linagora).
  • xVideoServiceThief : Objectif simple mais parfaitement réussi : récupérer les vidéos des sites comme YouTube ou Dailymotion que l’on peut ensuite convertir à la volée (dommage il n’y a pas encore le format OGG).
  • Project Kenai : Une nouvelle forge (hébergement de projets de développement) qui, pour la résumer sur le papier, serait un peu une forge 2.0 avec un fort accent donné aux structures de type réseaux sociaux.
  • CodeLite : Comme on s’adresse ici à des développeurs on présuppose qu’ils maitrisent l’anglais : CodeLite is a powerful open-source, cross platform IDE for the C/C++ programming languages.
  • Panda : Panda, est un projet OpenSource qui permettra à n’importe quel propriétaire de site; prêt à mettre un peu les mains dans le code, d’offrir le chargement et la lecture de vidéos à ses utilisateurs. Imaginez un YouTube en kit (source TechCrunch).
  • Plumi : Même objectif que Panda mais sous Plone. Aucune idée de l’état d’avancement de ces solutions libres de streaming vidéo mais c’est bien d’avoir potentiellement la possibilité de se libérer des YouTube-like.
  • Omeka : Une plateforme web orientée présentation et archivage de fonds iconographiques (devrait intéresser certaines institutions culturelles comme les musées par exemple).

Notes

[1] Crédit photo : Arkangel (Creative Commons By-Sa)




Affaire OOXML – Quand 6 pays disqualifient l’ISO

Nous aurons l’occasion d’y revenir mais la standardisation du format OOXML par l’ISO, dans des conditions de pression qui confinent au scandale, est certainement l’un des gros points noirs de l’année en cours.

Quatre pays, le Brésil, l’Afrique du Sud, le Venezuela, et l’Equateur, avaient officiellement remis en cause cette normalisation en faisant appel de la décision. Peine perdu, l’appel a été rejeté cet été. Plus rien ne s’oppose donc à ce que Office Open XML, le format de fichier bureautique défendu par Microsoft, devienne officiellement la norme ISO/IEC DIS 29500.

Ce qui n’empêche pas les pays en question (plus Cuba et le Paraguay) de dire après coup tout le bien qu’ils pensent de l’ISO dans cette déclaration[1] non diplomatiquement correcte que nous soutenons sans condition et qui rappelle au passage que nous avions déja avec l’ODF une norme bureautique libre et ouverte satisfaisante.

Il est bien dommage que la France en soit absente mais cela n’est malheureusement guère étonnant quand on avait décidé de voter non pour finalement s’abstenir à la dernière minute.

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DECLARATION CONSEGI 2008

Nous, les sous-signés représentants de sociétés nationales en informatique du Brésil, d’Afrique du Sud, du Venezuela, de l’Equateur, de Cuba et du Paraguay, faisons part de notre déception après avoir pris connaissance du communiqué de presse émanant de l’ISO/IEC/JTC-1 et daté du 20 août concernant les recours déposés par les instances nationales du Brésil, d’Afrique du Sud, d’Inde et du Venezuela. Nos instances nationales, conjointement à celle de l’Inde, ont chacune, indépendamment, fait part de leur grande inquiétude concernant l’ensemble du processus d’adoption rapide de DIS29500. Le fait que ces inquiétudes n’aient pas été traitées comme il se devait par une commission de conciliation entâche l’integrité de ces institutions internationales de normalisation.

Nous ne gaspillerons pas plus d’énergie à faire pression sur nos organismes nationaux pour qu’ils continuent d’appuyer nos contestations, mais nous jugeons cependant qu’il est important de clarifier certains points :

1. L’assouplissement des règles pour permettre la procédure express pour DIS29500 nous interpelle. Que l’ISO TMB n’ait pas jugé utile d’accorder aux contestations l’attention nécessaire pour les étudier convenablement remet en question la confiance que nous pouvons accorder à ces institutions et à leur capacité à répondre à nos besoins nationaux.

2. L’empiètement de la norme en question sur la norme ISO/IEC26300 (Open Document Format) existante reste sujet à questionnement. Nos pays ont déjà fait d’importants efforts pour employer la norme ISO/IEC26300, l’une des principales raisons étant justement qu’elle avait obtenu le titre de norme ISO en 2006.

3. L’adoption à grande échelle d’une norme pour les documents est longue et coûteuse, des projets s’étalant sur plusieurs années ayant été initiés dans chacun de nos pays. Parmi nous, nombreux sont ceux à avoir allouer beaucoup de temps et de ressources dans cet effort. Par exemple, au Brésil, le processus de traduction de la norme ISO/IEC26300 en portugais a duré plus d’un an.

Les problèmes rencontrés au cours de l’année précédente nous ont tous mis dans des situations délicates. Au vu de l’incapacité de l’organisme a suivre ses propres règles, la capacité de l’ISO/IEC a se transformer en un organisme de normalisation ouvert et libre de toute influence, ce qui est une nécessité urgente, nous semble compromise. Il nous apparaît clairement maintenant que nous allons devoir, quoiqu’à contre coeur, ré-évaluer notre appréciation de l’ISO/IEC, en particulier en ce qui concerne sa pertinence vis à vis des différentes structures d’interopérabilité de nos gouvernements nationaux. Alors que dans le passé la mise en oeuvre au sein d’un gouvernement d’une norme ISO/IEC était automatiquement envisagée, cet état de fait est maintenant discutable.

Signataires :

Aslam Raffee (South Africa)
Chairman, Government IT Officer’s Council Working Group on Open Standards Open Source Software

Marcos Vinicius Ferreira Mazoni (Brazil)
Presidente, Servico Federal de Processamento de Dados

Carlos Eloy Figueira (Venezuela)
President, Centro Nacional de Tecnologías de Información

Eduardo Alvear Simba (Ecuador)
Director de Software Libre, Presidencia de la República

Tomas Ariel Duarte C. (Paraguay)
Director de Informática, Presidencia de la República

Miriam Valdés Abreu (Cuba)
Directora de Análisis, Oficina para la Informatización

Notes

[1] Merci à Olivier et Daria pour la traduction.




Mozilla travaille à corriger le bug Firefox dans Ubuntu

Qualifié par certains de tempête dans un verre d’eau, le bug 269656 d’Ubuntu concernant l’apparition d’un CLUF à valider au premier démarrage de Firefox a suscité de nombreux commentaires.

La traduction[1] de ce billet issu du blog de la Présidente de la Mozilla Foundation Mitchell Baker montre que Mozilla est conscient du problème et travaille à le corriger.

Il témoigne également au passage du fait que Mozilla sait être réactif et à l’écoute.

Copie d'écran - Mitchell Baker

Ubuntu, Firefox et les problèmes de licence

Ubuntu, Firefox and License Issues

Mitchell Baker – 15 Septembre

Ubuntu a récemment développé un correctif qui fait apparaître un Contrat de Licence Utilisateur Final (CLUF) dans Firefox. Cela a soulevé quelques interrogations. La première touche le contenu du contrat, une autre concerne la présentation et la troisième questionne l’utilité d’une telle licence.

Nous devons reconnaître au préalable que oui, les termes du contrat de licence ne sont pas corrects. On devrait y lire que le code est régi par les licences des logiciels libres, on ne devrait pas y trouver le jargon habituel des CLUFs comme c’est le cas dans la version actuelle. Nous avons mis au point une licence qui renvoie aux licences des logiciels libres, mais en ne la communiquant pas à Ubuntu et aux autres distributeurs et en ne la rendant pas publique nous avons fait une énorme erreur. Une erreur que nous corrigerons dès que possible.

Ensuite, la présentation de la licence pose problème aux gens. Je pense qu’avec le bon contenu cette présentation n’est si mauvaise en soi. Elle doit rappeler que le logiciel est basé sur les licences de logiciels libres auxquels nous sommes très attachés. Mais quand bien même, la présentation peut continuer à poser problème. Soyez sûr que nous travaillons sur ce point. Nous le ferons de manière transparente. Vous retrouverez rapidement des messages à ce propos.

Et il reste la troisième question, celle des services. La licence de logiciel libre couvre-t-elle aussi les services auxquels vous avez accès ? Nous pensons que ce n’est pas toujours le cas et la licence l’établira clairement. Le code est soumis aux licences de logiciels libres et nous aurions dû l’affirmer plus distinctement.

Ce qui nous amène à une autre question : est-il pertinent de montrer aux gens les termes relatifs aux logiciels et aux services à leur disposition ? Quelques commentaires remettent en question l’utilité de ces termes. Là encore, si le contenu de notre licence avait été pertinent le problème ne se poserait peut-être pas car on devrait y trouver référence aux licences de logiciels libres. Nous (c’est-à-dire Mozilla) nous sommes tirés une balle dans le pied avec le contenu obsolète et incorrect (de la licence). J’espère donc que nous pourrons débattre sur ce sujet, mais je crois que nous devons en priorité régler les autres problèmes.

Nous prenons ce problème à cœur et travaillons d’arrache-pied pour le corriger.

Notes

[1] Traduction non officielle d’Olivier (Framalang).