L’anonymat en ligne avec Tor, c’est Nos oignons !

Comme beaucoup d’internautes, vous êtes ces dernières années de plus en plus préoccupé par la confidentialité de vos données et de vos communications.

Vous avez renforcé et renouvelé vos mots de passe, installé des extensions qui filtrent ou bloquent les contenus indésirables, vous luttez contre le pistage des GAFAM au cours de votre navigation, vous êtes en voie de dégooglisation, mais vous n’avez peut-être pas osé aborder une étape plus délicate et technique comme celle qui consiste à chiffrer vos échanges et vos disques durs, pas osé non plus utiliser le réseau Tor. C’est bien compréhensible, vous reculez un peu devant ce qui vous semble plus complexe et vous ne savez pas exactement de quoi il retourne… On entend dire des choses tellement inquiétantes aussi !

Liste des utilisateurs potentiels du réseau Tor
Tout le monde peut trouver des avantages à utiliser Tor

Eh bien nous vous proposons aujourd’hui d’apprendre un peu mieux ce qu’est réellement ce réseau Tor, pour démystifier ce qui peut s’avérer d’un usage quotidien pour beaucoup d’entre nous.

Vous en doutez ? Pourtant emprunter les trajectoires zigzagantes de Tor est non seulement parfaitement légal mais aussi tout à fait utile et à la portée d’un vaste public.

Mais pour commencer, qu’est-ce que c’est au juste que Tor ? Comment ça marche, est-ce que c’est dangereux ? Comment peut-on l’essayer sans trop de difficultés ?

Pour répondre à ces questions, autant s’adresser directement à ceux sont sur le terrain et connaissent la question. Nous avons la chance d’avoir Nos oignons une jeune association francophone qui s’active pour multiplier les nœuds de sortie dont… STOOOOP ! Écoutons-les plutôt.

Merci à ned, syl, Chre, Cor, gagz, nicoo, Lunar, aeris et à tous ceux de l’association qui ont collectivement et gentiment répondu aux questions un peu… comment dire — enfin des questions de Goofy, quoi.

Tor c’est pour aller sur le Darknet, là où se trouvent les trafiquants de drogue et les terroristes, pourquoi vous voudriez que les internautes ordinaires y accèdent aussi ?

Utiliser Tor permet de retrouver un peu d’intimité quand on utilise Internet. Tout comme mettre une lettre dans une enveloppe, des rideaux à nos fenêtres ou son téléphone sur liste rouge, cela permet de retrouver le pouvoir de décider avec qui partager notre quotidien.
Des personnes qui veulent se livrer à des activités illégales vont bien entendu chercher à se cacher. Mais cela ne peut pas justifier d’espionner tout le monde. Tor est là pour nous aider à disposer de nos droits fondamentaux : libertés d’opinion, d’expression, d’association, de communication. Ces droits humains s’appliquent à tou·te·s, sans discrimination.

Ce qu’il faut comprendre, c’est que même si Tor était interdit, des activités illégales continueraient d’exister sur Internet sous d’autres formes et en utilisant d’autres outils. Il y a déjà sur Internet des activités illégales n’utilisant pas Tor.

Moi je veux bien essayer Tor, mais je ne veux pas d’ennuis avec la police, hein. Qu’est-ce que vous faites quand les services de police vous demandent de fournir des renseignements sur des utilisateurs considérés comme suspects ?
On leur dit la simple vérité : nous n’avons pas ces renseignements, d’une part parce que nous ne gardons pas trace de ce que les usagers font avec Tor, d’autre part parce que le réseau est conçu pour qu’il nous soit impossible de remonter à la source des communications.

C’est le moment de schématiser le fonctionnement de Tor.

Regardez d’abord comme la transmission des informations numériques est perméable à toutes sortes de gens ou institutions lorsqu’on n’utilise ni Tor ni https (le protocole sécurisé) :
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Maintenant, avec ces deux outils mis en place, observez que les diverses oreilles indiscrètes n’ont plus d’accès aux données que vous transmettez. Les trois relais Tor qui assurent ainsi votre anonymat sont d’ailleurs eux-mêmes « aveugles » à vos données. Chacun d’eux ne reçoit et transmet que des données chiffrées dont il ignore l’émetteur d’origine.
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Il paraît que la NSA a glissé ses propres nœuds Tor dans le réseau, alors il est compromis ou bien je peux avoir confiance ?
Même si c’est toujours intéressant intellectuellement d’y réfléchir, on a rarement affaire à une organisation aussi puissante que la NSA. La plupart du temps, on cherche à se protéger de publicitaires qui veulent nous bourrer le crâne, de patrons qui veulent nous empêcher de bosser tranquilles, de conjoints inquisiteurs, d’un filtre trop agressif dans une gare… Moins souvent, on veut protéger des communications confidentielles avec des médecins, des avocat·e·s, des journalistes… On est donc rarement une cible directe de la NSA. Et c’est tant mieux parce que si elle se débrouille pour pirater notre ordinateur, il sera facile de nous espionner, que nous utilisions Tor ou non.
Néanmoins, si la NSA faisait tourner des nœuds, ce ne serait pas nécessairement un problème. Le réseau Tor est conçu pour résister à la présence de nœuds sous surveillance tant qu’ils ne sont pas nombreux ou qu’ils sont surveillés par des adversaires différents. Des bénévoles font activement la chasse pour trouver des nœuds qui interfèrent avec les données échangées, ou des nœuds trop semblables qui apparaissent.

Il faut savoir qu’un adversaire comme la NSA, qui dispose de la capacité de surveiller directement les réseaux de communication, n’a nul besoin de faire tourner des relais Tor pour tenter de désanonymiser ses utilisateur·ice·s. En effet, plutôt que de s’embêter à faire tourner des relais, il suffit d’observer d’où vient et où va le trafic qui transite par les relais.
Tout serait donc perdu ? De ce qu’on en sait, bien au contraire : les documents internes que nous a transmis Edward Snowden nous ont permis de mieux comprendre l’étendue des possibilités de la NSA. La présentation interne intitulée « Tor Stinks » (Tor, ça pue), datée de 2012, explique qu’il est possible de retrouver le chemin d’une fraction des connexions traversant Tor, mais il est impossible de « désanonymiser » toutes les connexions tout le temps et il est très difficile de le faire avec une cible précise en tête.

À notre connaissance, Tor reste efficace contre la surveillance de masse, et rend bien plus compliquées les attaques ciblées.

Je me rends compte que tester Tor est à ma portée ! Un navigateur est disponible pour cela, c’est Torbrowser. Il me suffit d’aller sur le site https://www.torproject.org/projects/torbrowser.html.en et de choisir la bonne version :

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une fois qu’elle est téléchargée et installée, je choisis mon type d’usage :

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et me voilà prêt à naviguer en circulant de façon anonyme sur le Web.

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Bon, Tor c’est bien, mais quelles précautions faut-il que je prenne en plus selon vous, car Tor n’est pas une garantie contre tous les risques, hein ?
En effet ! Tor permet vraiment deux choses : empêcher le fournisseur d’accès Internet de surveiller les sites qu’on visite ; et empêcher que les sites apprennent où l’on se trouve malgré nous. Tor Browser contient des myriades de petites fonctionnalités pour empêcher que deux sites différents puissent apprendre qu’une même personne les visite tous les deux. Mais utiliser Tor Browser ne protégera pas forcément la connexion jusqu’au site visité, pour cela il faut veiller à ce que la connexion se fasse en HTTPS.

Tor n’est pas une poudre magique à « sécuriser » : la plupart des logiciels ont des défauts, Tor Browser est par exemple mis à jour toutes les six semaines afin de pouvoir colmater des brèches de sécurité le plus vite possible. Les connexions entre le réseau Tor et le site Internet auquel on accède peuvent être surveillées. Tor ou pas Tor, l’heure d’une connexion peut parfois permettre d’identifier une personne lorsqu’il y a peu de suspects.
Pour établir une analogie un peu bancale : mettre sa ceinture en voiture n’empêche pas les accidents, mais est-ce une bonne raison pour ne pas la mettre ?

Utiliser Tor ne protégera pas les échanges à partir d’un site : ça ne change rien à la sécurité des messages échangés via Twitter ou un webmail. Se « garantir contre tous les risques », c’est forcément un processus, pas un produit. Par exemple, des images contenant le numéro de série de l’appareil qui a servi à prendre les photos dans les métadonnées peuvent permettre d’identifier la source d’une journaliste, que les images aient été transférées en utilisant Tor ou pas.

Ah ben je découvre qu’il existe une liste impressionnante de projets connexes à Tor ? Pourquoi a-t-on besoin de tout cet écosystème ? Quels sont les principaux types de projets associés et quels sont ceux auxquels vous (Nos oignons) participez ?
Il y a effectivement plein de projets liés à Tor, en plus de Tor (le logiciel qui sert à faire tourner le réseau) : le navigateur Tor, HTTPS Everywhere, les logiciels de messagerie instantanée Tor Messenger et Ricochet, Pond (une alternative aux emails)…
C’est principalement pour pouvoir mieux protéger les usagers de Tor : par exemple, Tor Browser est une version de Mozilla Firefox équipée de contre-mesures pour éviter qu’on puisse vous pister de connexion en connexion.  Pond est un logiciel expérimental qui vise à fournir un service similaire aux emails, mais qui masque l’existence même d’une communication entre deux usagers donnés…
Il existe également Tails qui est un système d’exploitation live (i.e. qui peut fonctionner sur une clé USB sans installation sur un ordinateur) dont tous les logiciels intégrés passent par Tor. Utiliser un système spécialement conçu pour limiter les traces et les fuites comme Tails constitue une aide précieuse pour s’épargner des erreurs.
Notre équipe d’administration système contribue aussi à l’amélioration du projet Debian (la distribution GNU/Linux que nous utilisons principalement), entre autres sur la sécurité des services que nous utilisons, et une importante quantité de documentation, accessible à tou·te·s, couvre la configuration de nos services, leur sécurisation et les procédures que nous employons. Des membres de Nos oignons ont également créé graphnion pour afficher des graphes de relais.

Mais… c’est quoi les « services cachés » de Tor, encore un truc de fraudeurs pour échapper à la TVA sur les services ?
Pas vraiment… on parle de plus en plus de  services « .onion » ces temps-ci car de plus en plus de services sont accessibles publiquement ainsi.
Le fonctionnement habituel de Tor, c’est de permettre de se connecter à des sites Internet existants. Quand on utilise les services .onion, la connexion se fait vers un serveur qui utilise lui aussi Tor. Par exemple, cela permet pour une personne qui tient un blog politique d’être plus difficile à identifier par celles et ceux qui voudraient lui chercher des noises. Un autre intérêt est de s’assurer que les usagers du service « onion » n’y accèdent pas accidentellement sans Tor ; c’est en particulier utilisé par les systèmes de prise de contact avec les journalistes (comme « SecureDrop »), pour s’assurer que les sources ne s’exposent pas accidentellement. Depuis peu, on voit aussi de plus en plus de sites proposer un accès en .onion en plus de leur accès Internet habituel. Le plus utilisé est probablement Facebook. L’usage du .onion permet de garantir que la connexion se fait au bon serveur, et de bénéficier de la totalité de la bande passante du réseau Tor, sans être contraint par le nombre limité de nœuds de sortie.

Votre association gère aussi des « signalements d’abus ». De quoi s’agit-il ?
Parfois, des gens nous contactent pour nous informer d’un problème en provenance de nos serveurs : une tentative d’utiliser « toto123 » comme mot de passe sur un service Web, l’envoi de spam, ou encore des services qui trouvent que recevoir autant de connexions en provenance d’une même adresse Internet partagée par plusieurs personnes, c’est suspect. On leur explique alors que nous gérons des relais Tor et que nous ne sommes donc pas la source du problème. Cela dit, notre expérience est que seule une petite quantité de personnes utilisent Tor pour être pénibles : le nombre de signalements que nous recevons est bien faible en comparaison de la quantité de données que les relais de Nos oignons font transiter chaque mois.

En lisant votre documentation, on voit que vous cherchez à avoir davantage de « relais » ou des « nœuds de sortie », c’est la même chose ou non ?
Pas tout à fait : les relais (ou nœuds) sont les ordinateurs faisant partie du réseau Tor ; les nœuds de sortie sont ceux qui permettent de joindre des sites Internet existants. Pour ces sites, il est facile de penser que le nœud de sortie est à l’origine de la connexion. En cas d’usage malintentionné de Tor, c’est donc souvent l’opérateur du nœud de sortie qui est consulté. Ça représente plus de travail que de faire tourner un relais « simple ».

Est-ce que tous les opérateurs acceptent qu’on mette son ordinateur au service du réseau Tor ?
Pour les nœuds de sortie, beaucoup d’opérateurs ou d’hébergeurs ont des clauses qui leur permettent de couper l’accès sans préavis, à cause des plaintes qui pourraient leur arriver. Cela n’empêche pas d’utiliser Tor ou de faire tourner des points d’entrée prévus qui permettent de contourner les dispositifs de censure (appelés « bridges »).
D’autre part, faire tourner un nœud de sortie chez soi n’est pas très utile, à cause de la bande passante limitée et de la gestion des risques liés aux abus. Il est plus utile d’aider Nos oignons à financer de nouveaux nœuds de sortie. 🙂

Le projet Tor se bat contre tous ceux qui voudraient faire disparaître l’anonymat, partout dans le monde. Mais en France, quelle est la situation, avec les lois sécuritaires qui s’empilent ? Tor est-il menacé ? Faut-il dès maintenant envisager un repli vers autre chose ?
L’anonymat est essentiel pour l’exercice des libertés fondamentales, particulièrement la liberté d’opinion. Tor n’est pour l’instant pas directement menacé en France. On sait toutefois que certains policiers souhaiteraient empêcher son usage, et que plus généralement, l’élite politique comprend mal les enjeux autour du chiffrement, comme on peut le voir autour de l’affaire FBI contre Apple couverte par les médias aux mois de mars-avril 2016.

Adopter Tor

Quoi qu’il en soit, Tor est conçu pour être un outil de contournement de la censure. Tor fonctionne même dans des pays particulièrement répressifs comme la Chine ou l’Iran qui disposent pourtant d’une capacité de filtrage et d’une politique répressive bien supérieures à ce qui existe en France actuellement. Réprimer l’utilisation de Tor risque d’être aussi efficace que de réprimer le partage d’œuvres en pair-à-pair : c’est un logiciel libre, facile à installer et à diffuser. En revanche il est clair que contribuer au projet, sous forme de code ou de relais pourrait être rendu plus difficile ou dangereux.

Il est donc important que les dizaines d’organisations et la centaine de particuliers qui font tourner des relais en France s’allient aux millions de personnes (dont une centaine de milliers en France !) qui utilisent régulièrement Tor. Restons vigilant·e·s et défendons nos libertés.

Tor a été conçu en partant du principe qu’il existera toujours des endroits où il sera possible de faire tourner des relais, où il sera possible de travailler à améliorer les logiciels et en faire la promotion.

Plusieurs projets envisagent un modèle beaucoup plus distribué et encore plus difficile à arrêter, mais c’est tout de suite plus compliqué comme problème à résoudre : ça pose la question de la compatibilité avec l’existant, et pour l’instant, rien n’est prêt pour le grand public. Il aura fallu dix ans à Tor pour être accessible à tout le monde. C’est important de soutenir ces projets le temps qu’ils mûrissent. Si Tor est remplacé un jour par un système plus fiable, ce sera tant mieux !

Je vois que vous utilisez une ribambelle de logiciels libres (Debian, Postfix, Mailman, Schleuder, SpamAssassin, BIND, Apache, Ikiwiki, Git, Keyringer, et encore de nombreux autres…) : le projet Tor serait-il possible sans des logiciels libres ?
Au-delà du fait qu’on ne peut pas faire confiance à un logiciel dont il est impossible de vérifier le fonctionnement, Tor doit rester accessible à toutes et tous. Personne de devrait avoir à payer pour pouvoir échapper au sentiment d’être surveillé·e. Mais partant de là, les ressources du projet sont plutôt limités. L’intérêt des logiciels libres est aussi de permettre de construire des solutions sur-mesure en assemblant plusieurs logiciels qui existent déjà. Ou alors de pouvoir demander de l’aide à d’autres personnes qui partagent les objectifs du projet Tor tout en travaillant sur d’autres projets. C’est important de pouvoir faire confiance à une communauté. Le projet Tails, par exemple, explique bien cette question de la chaîne de confiance en œuvre dans le logiciel libre.

De quoi avez-vous le plus besoin ? De compétences techniques, d’argent, de matériel, d’hébergement… ?

logoNosOignons
Le saviez-vous ? TOR est l’acronyme de The Onion Router, le routeur oignon. Sur le logo de l’association on voit en pointillés le trajet des données, chaque oignon-relais assure l’anonymat.

Nos oignons a bien sûr besoin d’argent pour payer l’hébergement de ses relais actuels et en ouvrir de nouveaux. Les dons réguliers sont précieux car ils nous permettent de mieux voir venir. Pour ce qui est des activités bénévoles, il y a beaucoup plus à faire côté communication et administratif que technique. On essaye d’accueillir toutes les bonnes volontés au mieux !

Actuellement, nous sommes particulièrement à la recherche de nouveaux hébergeurs, prêts à accepter un nœud de sortie Tor avec une bande passante conséquente. C’est nécessaire pour contribuer à la diversité du réseau : répartir les relais Tor chez le plus possible d’hébergeurs participe à la sécurité du réseau.

Message reçu ! Que nos lecteurs les plus aguerris rejoignent Nos oignons !

 

Quelques liens pour aller plus loin :




Il faut libérer Nuit Debout !

Chez Framasoft on aime bien quand les gens utilisent nos services « Dégooglisons ». C’est pour ça que quand on a vu que le mouvement Nuit Debout utilise l’outil Framacarte et l’intègrer sur son site officiel notre première réaction ça a été : « Chouette ! ». Notre deuxième ça a été : « Et si on interviewait ce joyeux geek qui a repris la Framacarte pour lui demander ce qu’il en pense ? ».

Séance de vote à Nuit Debout
Séance de vote à Nuit Debout

On s’est donc mis à la recherche du mystérieux développeur qui avait créé la Framacarte de Nuit Debout pour lui poser nos questions. Autant vous dire que ça n’a pas été facile ! Pas de mail ou de formulaire de contact sur leur site, pas de service presse ou communication et encore moins d’organigramme pour retrouver qui fait quoi chez eux. Bilan de l’enquête, tout ce qu’on a obtenu, c’est un pseudo, « Pea », le libriste concepteur de la Framacarte de Nuit Debout. Mais nos recherches nous ont amené à discuter avec tout plein de geeks qui collaborent à Nuit Debout et qui ont tenté de nous donner le point de vue du mouvement concernant les logiciels libres, la surveillance d’Internet, le libre accès à l’information, etc.
On a donc décidé de vous faire une petite synthèse de tous ces échanges qui peuvent constituer, non pas un point de vue officiel de Nuit Debout, mais au moins la tendance générale du mouvement.

« Pea », quant à toi, si tu existes vraiment, n’hésite pas à te manifester, car on ne perd pas espoir de t’interviewer !

Le moins que l’on puisse dire, c’est que Nuit Debout n’est pas indifférent à la question des logiciels libres et même à la culture libre en général. Pour s’en convaincre, il suffit d’aller faire un tour sur le site wiki, et plus précisément à la page Numérique. Nuit Debout essaie, quand c’est possible, de favoriser l’utilisation de logiciels libres ou au moins open-source. Ils utilisent par exemple le tchat Rocket, Mediawiki pour leur wiki et même pas mal d’outils Framasoft comme les framapads, framacalcs, etc. Pierre Lalu, un des administrateurs du tchat de Nuit Debout a d’ailleurs confirmé que la question des logiciels libres et open-source était « centrale » pour Nuit Debout. En discutant avec les nuit-deboutistes (ça se dit, ça ?), on se rend rapidement compte que, comme nous, ils ne portent pas particulièrement les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) dans leurs cœurs. Ils dénoncent unanimement le modèle de société proposé par ces grands groupes. C’est même une de leurs préoccupations, même s’ils voudraient que le sujet soit plus abordé au cours de leurs assemblées générales : « De toute façon nous n’avons fait qu’effleurer les problématiques liées au numérique dans la société… Nous n’avons pas encore évoqué par exemple les sociétés comme Uber ou les livraisons de repas qui participent à un modèle de société où chacun est son propre petit patron exploité, et ça fait partie de la société que nous rejetons (je crois) » me disait @mex. Au-delà des logiciels libres, de nombreux sujets touchant au numérique le préoccupent :
« – Veut-on du modèle de société que nous apportent Uber/Blablacar/Airbnb/Deliveroo, etc. ?
– La place des femmes dans l’informatique ;
– La robotisation VS la perte d’emplois ;
– Bientôt, les questions de singularité et de transhumanisme ».

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Stand de Libre@Toi* – Fourni par OliCat

Dans son fonctionnement, Nuit Debout a adopté nombre de solutions issues de la philosophie libriste. L’autogestion prônée par le mouvement rappelle celle qui gouverne la conception de nombreux logiciels libres. Certains geeks rencontrés m’ont d’ailleurs confiés collaborer fréquemment au développement de logiciels libres. Nuit Debout s’est d’ailleurs tournée vers La Quadrature Du Net qui, au nom de ces valeurs communes, a accepté d’héberger son chat et d’autres sites rattachés au mouvement. Ces sites, ainsi que leur contenu, sont pour la plupart sous licence libre, à l’exception du logo de Nuit Debout.

EDIT 26/04/2016 : Ce n’est pas La Quadrature Du Net qui héberge les services de Nuit Debout, mais une personne membre de LQDN qui exerce par ailleurs une activité d’hébergeur. Pardon à nos ami-e-s de La Quadrature d’avoir entretenu la confusion.

Alors, le Libre a-t-il vraiment conquis Nuit Debout ? Eh bien malheureusement, pas vraiment. Si les membres de Nuit Debout utilisent volontiers des outils libres quand ils sont disponibles, ils n’ont pas de problème à utiliser des logiciels propriétaires, voir les services des affreux GAFAM, faute de mieux. C’est ce que me disait Pierre Lalu : « Tant qu’on peut faire de l’open source et du libre, on le fait. S’il est indispensable d’utiliser du propriétaire, on le fait. Mais pour l’instant, rien n’entrave notre faim du logiciel libre. »

Un exemple concret de ce problème est le choix d’un système pour les votes par Internet. Les organisateurs de Nuit Debout cherchent depuis le début un moyen pour permettre à ceux qui ne sont pas présents physiquement de prendre part aux assemblées générales. Après plusieurs essais, la solution la plus globalement retenue est l’application Loomio, créée pour le mouvement Occupy Wall Street et sous licence libre (et dont Framasoft sortira une version relocalisée dans le cadre de sa campagne Dégooglisons Internet. Mais devant la difficulté à faire adopter Loomio au grand public, beaucoup de rassemblements se sont finalement rabattus sur Google Hangouts. De même pour la communication, Facebook est un outil essentiel du mouvement.

En fait, Nuit Debout rencontre ici un problème qu’on connaît bien à Framasoft : si les avertis sont convaincus de l’intérêt des logiciels libres, il reste très compliqué de convaincre le grand public. Comme me le dit Pierre Lalu, « avant de parler de logiciels libres, il y a besoin que des gens se forment à des outils très simples ». À Framasoft on répondra que les logiciels libres peuvent être simples et le sont souvent, mais on sait aussi que le simple terme en effraie plus d’un. Le tout est donc d’aborder la question avec pédagogie afin de convaincre le plus grand nombre, non seulement de l’intérêt des logiciels libres, mais aussi de leur facilité d’utilisation. Sauf que, comme l’ont dit plusieurs organisateurs, dans les nombreux stands existants place de la République, on ne trouve pas encore de stand pour promouvoir la philosophie libriste. En fait, le seul stand que j’ai trouvé qui portait un panneau « 100% logiciel libre » est celui de nos copains de la webradio Libre@Toi* que nous avions déjà interviewés en septembre dernier. Je suis donc retourné voir OliCat, l’un des animateurs de la radio, pour savoir ce qu’il pensait de l’utilisation des logiciels libres à Nuit Debout.

Stand de Libre@Toi* – Photos par OliCat

Salut OliCat, même si à Framasoft on connaît bien Libre@Toi*, rappelle nous un peu qui tu es et ce que tu fais.
Libre@Toi* est une structure transmédia d’Éducation Populaire. Son but est d’initier un réseau pair à pair et open source où chacun se réapproprie les outils, les techniques et les concepts, les redistribue et contribue ainsi au bien commun. Libre@Toi* articule l’ensemble de son action autour des quatre principes énoncés comme des libertés par le mouvement du logiciel libre : utiliser, comprendre / analyser, redistribuer, modifier.

Je t’ai rencontré par hasard place de la République un soir, on peut savoir ce que tu faisais là-bas ?
Comme depuis plusieurs jours, nous y produisons en direct une émission qu’on a appelée « La place aux gens ». En retrait des AG, notre envie était tout simplement de recueillir la parole des gens sur place en leur demandant ce qu’ils faisaient à Nuit Debout. Une bonne entrée en matière pour verbaliser les craintes, mais aussi et surtout les espoirs.
Par ailleurs, nous nous faisons également l’écho des quelques poches de résistance présentes sur la place ou d’initiatives sympas qui prennent forme bien loin du tumulte des assemblées générales. Par exemple, nous aimons diffuser les prises de paroles de la commission Santé.
Nous avons également tendu nos micros et quelques casques aux participants d’une lecture / débat organisée à la sauvage autour d’un bouquin de Lordon. Ça a donné lieu à une émission de très bonne facture à laquelle a d’ailleurs participé Judith Bernard qui passait par là et s’est assise avec Thomas, l’instituteur qui avait lancé cet atelier pour finalement l’animer avec lui.

Qu’est-ce qui vous a poussé à installer Libre@Toi* au milieu de la Nuit Debout ? Il existe déjà une radio-debout non ? Vous apportez quoi de différent ?
Ta question est étonnante mais très révélatrice de l’ambiance sur place. Les gens veulent faire la révolution mais ont besoin des modèles qui constituent le monde qu’ils sont sensés rejeter avec ce mouvement. Nous ne comptons pas le nombre de ceux qui, à juste titre ou par pur fantasme s’estimant détenteurs de la « bonne parole » concernant Nuit Debout, commencent par nous demander si nous sommes Radio Debout. Et la plupart, évidemment préfère aller leur parler. En gros, ils cherchent le TF1 ou le BFMTV de la place de la République. C’est finalement plutôt amusant. Alors, qu’est-ce qu’on apporte de différent ? Ben précisément ça : un média alternatif.

C’est quoi le rapport entre Nuit Debout et la culture libre pour toi ?
S’il s’agit bien, à Nuit Debout, d’initier le mouvement vers le monde d’après, alors la Culture Libre est – ou devrait – être au cœur des structures qui organisent la lutte. C’est en effet pour Libre@Toi* une exigence, un mot d’ordre assez évident.

En parlant avec des gars de Nuit Debout j’ai bien vu qu’ils sympathisaient avec la philosophie du Libre sans pour autant faire grand-chose à ce sujet, c’est quelque chose que tu as remarqué aussi ?
C’est assez tardivement (sans doute aussi un peu par provocation) que nous avons accroché à notre stand une pancarte « 100% Logiciels Libres ». Et du coup, en effet, on a été contraint d’expliquer ce positionnement aux uns aux autres. Le moment drôle, c’est quand Radio Debout est venue nous demander de parler logiciels libres sur leur antenne. Ce que nous n’avons évidemment pas fait : ils peuvent venir quand ils veulent, à notre micro, causer logiciels libres avec nous en revanche ! 😀
Donc, pour te répondre : les Nuits Debouts sentent bien une pression au sujet du logiciel libre puisque d’autres que nous, La Quadrature par exemple, ont tenté de les y sensibiliser. Mais c’est clairement quelque chose de lointain. Un truc auquel ils n’ont pas pensé et dont la logique politique leur échappe complètement.

 

une interview sur le place de la République
une interview sur le place de la République

 

Est-ce que vous profitez de votre présence place de la République pour sensibiliser les gens aux logiciels libres ? Est-ce qu’on vient vous en parler d’ailleurs ?
J’ai un peu répondu au-dessus. La raison de notre présence à Nuit Debout, ce n’est pas de faire de l’évangélisation, mais bien de donner « leur place aux gens » en libérant leur parole, sans le théâtre des assemblées générales et autres commissions. La promotion du logiciel libre, nous la faisons par ailleurs chez Libre@Toi*, mais je ne t’apprends rien.

Et d’ailleurs vous avez donné des coups de main pour « libérer » Nuit Debout ?
Notre premier choc, ça a été le lancement de Radio Debout qui impose à chacun pour les écouter, la présence d’un lecteur Flash sur leur ordinateur. Ainsi, ceux qui venaient porter la voix de la « révolution » utilisaient Mixlr. Avec du recul, c’est risible. Sur ce la Quadrature est arrivée avec la promesse de « libérer Radio Debout » sur l’initiative de Benjamin Sonntag. Cette tentative ayant échoué, j’ai proposé et à plusieurs reprises de fournir un serveur Icecast. On a juste été snobés. Alors est-ce qu’on donne un coup de main pour libérer Nuit Debout ? Oui, en portant sa voix, différemment.


Ce qu’on peut donc dire de Nuit Debout c’est que le terreau pour accueillir les logiciels libres est fertile. Certains ont même déjà commencé à planter quelques graines. Mais ils sont en manque cruel de jardinier pour les former et faire croître la philosophie Libre chez eux. Il reste donc à trouver les volontaires prêts à ouvrir les stands Libre-Debout dans tous les rassemblements de France afin que les logiciels libres ne soient plus seulement un vœu pieux de Nuit Debout mais bien une réalité.

Pour celles et ceux qui souhaiteraient en savoir plus sur les aspects techniques « derrière » Nuit Debout, nous les renvoyons à la lecture de l’article « #NuitDebout : comment l’orchestre participatif s’est organisé » de Rue89 (où l’on apprend que Nuit Debout utilise a aussi utilisé un Framadate à 367 participants) et « Mais qui contrôle le site nuitdebout.fr » de Numérama.

Merci à Pierre Lalu, @mex, @pm56, @lili et à tous ceux qui ont répondu à mes questions sur le chat de Nuit Debout.




Olympe a besoin d’un coup de main

Olympe, hébergeur gratuit, libriste et sans pub (un parfait exemple de CHATONS, quoi) a lancé un financement participatif pour faire face à ses difficultés.

Comment en est-il arrivé là ?

 

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Olympe, hébergeur gratuit depuis 2006

Vous hébergez des sites gratuitement, avec des outils libres, sans publicité. Depuis combien de temps ?

Olympe c’est une initiative qui a commencé il y a maintenant 10 ans, avec trois amis, trois passionnés de technologies. Fin 2006, l’idée naît d’une association, elle sera créée et immatriculée dans le courant de l’année 2007.

Dès la toute première version, l’objectif est clair : hébergement gratuit et sans publicités. Cette volonté est partie d’un constat simple : le Net est un domaine en plein essor, qui explosera davantage encore dans les années à venir, et pourtant aujourd’hui, pour publier il faut soit de l’argent, soit subir des pubs.

À l’époque l’hébergement n’était pas une chose aussi courante qu’aujourd’hui. C’est devenu beaucoup plus vital de nos jours pour n’importe quelle entreprise, association, activité quelconque, fût-elle locale, d’avoir un site web, et pourtant ce clivage est encore plus vrai qu’avant. Soit vous avez de quoi payer un hébergement, soit vous mangez des pubs à longueur de journée, et de plus en plus.

Vous étiez soutenus par une entreprise-mécène, c’est ce qui vous avait motivés à faire du gratuit ? Ou il y avait une autre raison ?

Ce n’est pas le soutien de l’entreprise en question qui a motivé le gratuit, puisqu’elle est arrivée bien après. Mais Olympe il y a encore quelques années était une structure bien plus modeste, qui n’affichait pas les 90 000 utilisateurs qu’elle compte aujourd’hui. C’était essentiellement les membres de l’équipe qui contribuaient à ce qu’Olympe vive, et les coûts étaient évidemment bien moindres.

Aujourd’hui, cette structure a évolué, s’est sécurisée, a appris de ses faiblesses pour s’améliorer, et s’est stabilisée. La philosophie du gratuit a pu subsister grâce à cette entreprise-mécène, et nous pouvons l’en remercier, effectivement, mais à l’origine il y avait surtout une pensée tournée vers le libre et le partage.

Ce mécène n’est plus en mesure de vous financer, c’est bien ça ?

En effet, elle a financé durant plusieurs années l’infrastructure en grande partie, et a fini par être rachetée fin 2015 par un investisseur beaucoup moins philanthrope que ses prédécesseurs. Dès lors, la fin du mécénat nous a été notifiée et nous avons dû réfléchir en quelques semaines aux possibilités qui s’offraient à nous.

Dans un premier temps, la réaction a été celle de l’urgence : à cette période il a fallu renouveler les serveurs, ce que le président de l’association a fait intégralement à sa charge. De fait, on a dû couper dans les dépenses, et il a fallu réduire le nombre de services proposés pour nous en tenir au minimum vital. Tous les services jugés accessoires (génération de statistiques, certains monitorings…) ont été écartés.

Puis vint la seconde étape : OK, les serveurs sont renouvelés, mais pour combien de temps ? Que fait-on à l’échéance ? Clairement, Olympe n’était plus viable à long terme.

Du coup, vous avez lancé un financement participatif…

On a exploré un tas d’hypothèses. On a bien tenté de remémorer à nos utilisateurs l’existence de notre page Tipeee, appelée à recevoir quelques dons régulièrement. Mais pour vous donner un ordre d’idée, en 9 mois d’existence, cette page a recueillie 240 euros. Soit un quart des frais incompressibles mensuels nécessaires pour faire tourner Olympe.

L’idée de faire du payant nous a traversé la tête un instant, mais ça équivalait à renier toutes ces années de gratuité proposer ce que nous dénoncions dès le début. Je n’évoque même pas l’insertion de publicités sur les sites…

Il ne restait alors qu’une solution : lancer un crowdfunding (ou une campagne de financement participatif, pour les adeptes de la langue française). L’idée est connue : un mois pour réunir une certaine somme, en l’occurrence 40 000 euros. Jusqu’au 4 mai, on espère donc collecter cette somme et pouvoir mettre en œuvre un projet solide et détaillé sur la page de la campagne d’hébergement, d’innovation, et de communauté. L’idée est que cette base nous permette d’atteindre d’ici trois ans un équilibre, grâce au fonctionnement mis en place.

Vous avez besoin de 40 000 €. Que se passera-t-il si ça ne réussit pas ?
C’est effectivement une somme conséquente, et on peut légitimement se demande pourquoi autant. En réalité, la lecture du projet mis en œuvre par l’équipe répond assez bien à cette problématique, car 40 000 euros c’est trois ans d’hébergement assurés.

La campagne est lancée à objectif fixe : soit Olympe reçoit 40 000 euros d’ici le 4 mai, et l’aventure se poursuivra, soit nous ne réunissons pas la somme, et Olympe devra fermer ses portes définitivement. Ce seront alors des milliers d’utilisateurs qui verront leur site inaccessibles, et des milliers d’autres qui devront se rabattre en urgence sur d’autres hébergements, pour la plupart nécessitant de sortir une carte bleue.

C’est beaucoup d’argent, mais vous revendiquez 90 000 utilisateur-ices. Si chacun-e donne 0,50 €, c’est réglé, où est le problème ? C’est peut-être un poil plus compliqué que ça…

On a évité de retenir la base « 90 000 x 1 euro = 90 000 €, nous sommes sauvés ! », pour la simple et bonne raison que ça serait se mentir. Tout d’abord, il s’agit d’une statistique : il existe sans nul doute des utilisateurs qui n’utilisent plus leur site, d’autres qui n’en ont jamais mis en ligne, d’autres qui ont supprimé leur site et conservé leur compte au cas où… si bien que tous ces utilisateurs ne sont pas directement touchés par une fermeture imminente. C’est un peu comme si je vous disais que la boulangerie au pied de chez vous allait fermer, alors que vous ne mangez plus de pain (bon, je sais qu’attaquer le pain en étant Français c’est dangereux mais vous voyez l’idée) !

De fait, en admettant que l’on ait un utilisateur actif sur deux, et que chacun donne 1 € on arrive tout juste à la somme escomptée. Et c’est effectivement illusoire que de s’attendre à ce que tout le monde donne, pour deux raisons.

Premièrement, Olympe est associé légitimement dans l’esprit commun à la gratuité. Or, le gratuit qui demande de payer, psychologiquement c’est un cap difficile à passer pour beaucoup d’utilisateurs. Ce n’est pas la somme qui est bloquante mais l’acte du paiement : pour preuve, ceux qui ont donné ont très largement dépassé les 1, 2 ou 5 euros. Le don moyen varie entre 10 et 20 euros.

Deuxièmement, donner n’est pas à la portée de toutes les bourses, et c’est là-aussi l’intérêt d’un crowdfunding : ceux qui peuvent et qui partagent nos valeurs participent pour ce qu’ils en retirent, mais également pour en faire profiter d’autres, moins avantagés. Donner 10 euros quand on est cadre sup’ et donner 10 euros quand on est au chômage, vous en conviendrez, ce n’est pas la même chose.


Quel est le portrait-robot de vos « clients » ?

Difficile de dresser un portrait-robot d’autant d’individus. Les utilisations d’Olympe sont variées : des sites de petites entreprises locales, d’artistes, de jeunes développeurs en herbe qui se font les dents, d’enseignants qui partagent avec leurs élèves, de « youtubeurs » qui fédèrent leurs communautés, de gamers, tout un tas d’associations locales (anciens combattants, amicales de retraités, amicale de la gendarmerie…), les sites de partage d’événement, notamment des mariages, des sites institutionnels…

C’est difficile de dresser un profil commun à tous. S’il y a une variable commune c’est que nous avons un public globalement cohérent par rapport à l’offre gratuite. Ce sont énormément de personnes qui n’ont pas de quoi s’héberger chez un professionnel.

Pensez-vous qu’il/elles seraient d’accord pour payer une cotisation ? Leur avez-vous posé la question ? Avez-vous d’autres idées pour fonctionner ?

L’idée d’une cotisation a été évoquée lors de notre phase de réflexion, évidemment. Mais sans rentrer dans les détails, ça revient encore une fois à retomber sur de l’hébergement payant : soit vous payez votre cotisation et vous êtes hébergés, soit vous ne payez pas et vous supportez les pubs.

Qu’une cotisation soit proposée aux utilisateurs qui souhaitent acquérir un statut de membre à part entière, c’est effectivement un souhait que nous avons de longue date mais qui n’a pas été mis en œuvre pour l’instant. Que cette cotisation subordonne l’accès aux services, c’est inconcevable au regard des valeurs que nous voulons véhiculer depuis tout ce temps.

Les autres idées nous les avons, et nous adorerions pouvoir les mettre en œuvre, mais nous agissons dans l’urgence : aujourd’hui on ne réunit pas 40 000 euros pour être tranquilles pendant 3 ans, on les réunit pour mettre en place pendant ces trois ans un projet sérieux, structuré, réfléchi pour aboutir à une stabilité financière à l’horizon 2018.

Est-ce que ça signifie que le gratuit, ça ne peut pas marcher ?

Nous n’avons — fort heureusement — pas pris ce postulat, sans quoi nous n’aurions jamais lancé la campagne qui suit son cours actuellement. Le gratuit peut marcher et doit marcher à une époque où le Net est avalé par des géants qui monétisent au maximum un service se voulant, à l’origine, libéré de tout cela.

Nous y croyons, et c’est bien pour cela que nous nous battons depuis 8 ans sur Olympe et pour Olympe. En huit ans, on a participé régulièrement aux RMLL, on a organisé des activités de formation en Afrique, on a connu une augmentation constante de nos utilisateurs : il y a forcément une place pour le gratuit.

Nous y croyons, et nous continuerons d’y croire.

On est encore loin du but… Si vous souhaitez aider Olympe, c’est le moment.

https://www.olympe.in/




Allumons les réverbères du Libre

Dans son communiqué de presse du 07 avril 2016, la Commission des lois du Sénat français déclare approuver le projet de loi pour une République Numérique porté par la secrétaire d’État au numérique Axelle Lemaire. Néanmoins, le Sénat a tenu à renommer ce projet de loi :

La commission a adopté le projet de loi en le modifiant : sans constituer la révolution que suggérait son premier intitulé, il contient un certain nombre de dispositions utiles pour assurer une meilleure régulation de la société numérique et améliorer la protection des droits des individus. C’est pourquoi la commission a modifié le titre du projet de loi, désormais intitulé : « projet de loi pour une société numérique ».

L’argument est limpide : nul ne saurait transformer les prérogatives de la puissance publique en place. C’est à la société de se transformer (se numériser) et c’est à la République (et ses institutions) qu’il revient de réguler les usages numériques. Tel est l’ordre des choses, et il est fort compréhensible que la Commission des lois ne laisse pas passer un texte qui transformerait une République dont elle est garante de l’intégrité.

Pourtant, cette rigidité est-elle bien conforme à l’air du temps ? Cette société numérique n’est-elle pas justement en train de montrer que ces usages sont précisément ceux d’une démocratie en train de se faire, mobilisant les attentions et renouvelant les pratiques politiques y compris debout à la place de la République. Peut-être est-ce justement à cause de cela et de ce qu’il cristallise comme besoin de transparence, de démocratie et de coopération, que le logiciel libre peine tant à être compris et assimilé par les institutions.

Ce texte de Véronique Bonnet, administratrice de l’April, synthétise ces questionnements. Un peu d’espoir peut-être en usant nous-mêmes, de plus en plus, du logiciel libre pour s’émanciper enfin ?

Sympathy for the Free Software

Par Véronique Bonnet, administratrice de l’April

Indésirable, le logiciel libre (free software) ? Un amendement de la commission des lois du Sénat vient de faire disparaître, pour l’instant, avant l’examen en séance prévu fin avril, l’encouragement au logiciel libre. Certes, il s’agissait bien d’un amendement de repli, non juridiquement contraignant, que l’Assemblée avait voté comme pis-aller, vu les tirs de barrage contre la priorisation. Le simple encouragement est-il déjà tabou ? Caillou dans la chaussure ? Loup dans la bergerie ? Disons ici notre sympathie irréductible, notre attachement citoyen au logiciel libre, n’en déplaise aux frilosités qui se drapent dans des habits bien improbables.

Du diable, on dit qu’il est dans les détails.

Un détail, justement. Le projet de loi numérique a changé de nom, la semaine dernière, en cours de route. Initialement, il s’appelait « Projet de loi pour une république numérique ». Le Conseil d’État, en décembre dernier, s’était étonné du décalage entre un tel intitulé et le contenu du projet de loi.

Dans le second volet d’un article publié le 15 avril par la revue EpiNet, intitulé « Bienheureuse panne d’imprimante, encore », j’ai essayé de montrer que si on prenait au sérieux la notion de république, alors on ne pouvait pas faire l’économie d’une priorisation de l’informatique libre dans le domaine public, « dans la tâche de protéger des regards ce qui doit l’être, et celle de rendre visible et accessible ce qui doit l’être, dans une république. »

J’avais dans mon argumentaire fait état de deux axes, esquissés, mais non assumés par le texte soumis à l’examen des parlementaires. Un premier axe qui disait vouloir découvrir et laisser à découvert ce qui devait l’être, dans une république, soit les traitements algorithmiques des paramètres qui débouchent sur des décisions et influent sur les existences. Un second axe qui disait vouloir couvrir et garder couvert ce qui devait le rester dans une république, soit le contrôle des données personnelles.

La semaine dernière, le gouvernement a remplacé le terme de « république », peut être trop contraignant, par le terme de « société ». Société numérique en lieu et place de la république numérique ? En rabattre sur les exigences de fraternité, d’égalité et de liberté vers une loi a minima peu conforme aux exigences de la république, mais bien suffisante pour la société. On ne peut s’empêcher de faire le lien avec la très thatcherienne et libérale exclamation : « such a thing as society! », dans un contexte où il était demandé à cette responsable britannique de prendre au sérieux le traitement social de la pauvreté.

Remplacer « république » par « société », est-ce donner congé à bon compte à la juste revendication d’une interopérabilité, d’une auditabilité, soit, en un mot, de choix numériques qui garantissent une dimension publique vraiment publique et une dimension privée vraiment privée, purement et simplement ? La république oblige. La société, tout autant.

À ce moment de croisée des chemins pour le Libre, puisque c’est maintenant l’ensemble des Sénateurs qui doit examiner le projet de loi, esquissons en quelques traits de quelle liberté heureuse ce combat pour la priorité au logiciel libre est fait.

En tant que libristes, nous sommes, en quelque sorte, des allumeurs de réverbères. Une variante des lanceurs d’alerte. Un peu ce que les lucioles sont aux colibris. Nous essayons de sensibiliser sur le non auditable, le non interopérable, l’obscurantisme des verrous logiciels, des chausse-trappes, des rentes de situation. Allumeur de réverbère, c’est un beau métier.

 

allumeur de réverbère dessin de saint exupéry pour le Petit Prince
Copyright © 2016 Le Petit Prince – Eh non, l’ouvrage n’est toujours pas dans le domaine public en France.

 

Celui du Petit Prince, dans l’accélération folle de la succession des jours et des nuits, réduits chacun à une minute, suivait néanmoins la consigne : éclairer quand il le fallait, éteindre quand il le fallait. Saint-Exupéry suggère de celui-là qu’il est un peu lampiste. La consigne lui a été donnée quand le jour durait un jour, et la nuit une nuit. Mais lampiste encore au sens d’autrefois : celui qui veille à l’allumage des lampes.

Ma main au feu que la régie lumière du projet de loi « pour une république numérique », puis « pour une société numérique » soit plus proche du Prince de Machiavel, régulateur et opératoire, que de la philosophie des Lumières, émancipatrice. Le pire est de faire croire que le logiciel libre peut porter atteinte aux appels d’offre, un vilain petit canard juridique, monstre mal bâti. Démon ? Seulement au sens du démon de Socrate, cette voix intérieure qui est médiation entre les situations et les concepts. Free Software, doux démon. Loin des tentations de la Pomme et autres gaffes à âmes.

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Faut-il, pourtant, se résoudre, abjurer ? « Eppure, si muove », aurait dit, ou en tous cas pensé, Galilée. Que l’on traduit d’ordinaire par « et pourtant, elle tourne ». Il parlait de la Terre, dans la perspective de l’héliocentrisme honni par les potentats d’alors. Aller contre l’évidence de la logique des êtres parlants d’étudier, utiliser, améliorer, redistribuer, en sécurisant leurs échanges et en ayant une visibilité sur ce qu’il veulent partager ou garder pour eux ?

Ceux qui prennent les libristes pour de joyeux lampistes — pas au sens d’autrefois —, et les vessies pour les lanternes, et les enfants du bon dieu pour des canards sauvages, feraient bien de s’aviser que le bon sens finit toujours par prévaloir sur les mauvais prétextes.

Il y a quelque chose comme une raison dans l’histoire. Si ce n’est pas sous cette législature, tôt ou tard, le free software finira par s’imposer. Mais ce serait mieux maintenant.

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Devil girl by GDJ,  Public Domain

Pour ma part, c’est tout vu. Je roule en GNU/Linux. Je m’habille en Debian. Je n’ai pas encore de RoLeX pour réussir ma vie, mais je suis, j’eXisTe en LaTeX. Je priorise avec l’April. Je dégooglise avec Framasoft. Je neutralise avec LQDN. J’ai jeté aux orties mes menottes numériques. Contre les portes dérobées, je mets en garde les autres, avec d’autres. Et à toi, Free Software, je dis ma sympathie, que diable !

 




La mairie de Fontaine passe au Libre !

Aujourd’hui on vous propose une interview postée à l’origine sur le site des Libertés Numériques d’Europe Écologie les Verts, article qu’ils ont eut le bon goût de mettre sous CC-BY-SA. Ne vous inquiétez pas ça parle quand même de logiciel libre…

C’est même le sujet principal, puisqu’on a là un retour pratique du service informatique de la mairie d’une ville d’un peu plus de vingt mille habitant-e-s qui a la volonté politique de passer au Libre : services en ligne, systèmes d’opération, logiciels et applications mobiles… Tout en restant une association a-partisanne, nous y voyons là un retour d’expérience et un exemple qui fait chaud à nos petits cœurs de Libristes !

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L’expérience du logiciel libre à la mairie de Fontaine

Nicolas Vivant est directeur du système d’information à la mairie de Fontaine, en Isère. Depuis quelques années, il s’attelle à la migration du parc informatique vers des solutions logicielles open source et libres.

Des logiciels libres d’abord, puis des distributions Linux entières, ont débarqué sur les ordinateurs des employés de la mairie. Comment s’est réalisée cette migration ? Quels retours des usagers ? Quels avantages ? Nicolas a accepté de répondre à nos questions.

Bonjour Nicolas, peux-tu d’abord nous présenter rapidement ta ville, combien y a-t-il d’employés dans la mairie et de postes informatiques ?

Fontaine est une ville d’un peu plus de 22 000 habitants. La mairie emploie 600 personnes et le parc de PC est également de 600 postes environ (dont 250 dans les écoles maternelles et élémentaires), répartis sur une quarantaine de sites.

Quel est ton rôle ?

Je suis DSI (directeur des systèmes d’information). Sept agents travaillent au service informatique. Le service gère l’informatique de la ville (postes clients, serveurs, logiciels, réseau), la téléphonie (fixe et mobile) et la vidéosurveillance.

Comment est venue l’idée de remplacer le système d’exploitation existant par une solution opensource ? Etait-ce une volonté politique au départ, ou plutôt une solution envisagée à cause de soucis techniques ?

La mise en place du logiciel libre est une décision ancienne. Elle remonte à 2001. C’est un choix politique porté depuis par les majorités successives. Les valeurs de l’opensource et du libre rejoignent dans une large mesure celles du service public communal : travail communautaire, service de l’intérêt général, transparence et juste prix. L’intérêt économique, avéré à Fontaine, est venu comme un bénéfice secondaire de ce choix.

Les « décideurs » ont-ils été difficiles à convaincre, quelles étaient leurs inquiétudes à l’idée de changer d’environnement de travail ? Et quels arguments les ont convaincus ?

Dans une commune, il y a deux types de décideurs : les élus et la direction générale. Le libre étant un choix politique, l’adhésion des élus était évidente puisqu’ils étaient moteurs. Pour ce qui concerne l’administration, et pour répondre à l’inquiétude légitime d’un certain nombre d’utilisateurs (décideurs ou non), une stratégie de migration « douce » a été mise en place. C’est par l’expérimentation et la démonstration que nous avons choisi d’agir, plutôt que par l’argumentation.

Dans un premier temps (avant 2009), le choix de logiciels d’infrastructure (messagerie, serveur de fichiers, annuaire informatique, etc.) libres a été fait. Ce changement a été transparent pour les utilisateurs, mais il a permis d’asseoir les bases du changement.

Dans une deuxième séquence (2008 à 2012), les logiciels tournant sur nos PC sous Windows ont été migrés sur du libre (Thunderbird pour les mails, Firefox pour le web, OpenOffice pour la suite bureautique). Le plus difficile a été de changer de suite bureautique. Une formation spécifique de deux jours a été mise en place. Plutôt que de former nos utilisateurs à l’utilisation de la bureautique (dont ils connaissaient, pour la plupart, les bases), le choix a été fait de les aider à migrer leurs connaissances et leurs données. Sur les deux jours de formation, un jour et demi ont donc été consacré à « Comment faire sur OpenOffice ce qu je sais fait sur MS Office ? » puis une demi-journée à la migration effective des documents utilisés au quotidien, avec l’aide du formateur. Cette formation était proposée à l’ensemble des employés qui souhaitaient s’y inscrire. Quand le cycle de formation a été terminé, nous n’avons pas systématiquement désinstallé Microsoft Office. Nous avons simplement cessé de livrer dans les services des PC comprenant la suite de Microsoft. Ainsi, au fil du temps, la suite propriétaire a disparu de notre parc. Il reste quelques exceptions, dues à des incompatibilités d’OpenOffice avec des logiciels « métier », mais elles représentent moins de 5% de notre parc.

La dernière étape de la migration vers le logiciel libre, toujours en cours, concerne le système d’exploitation. Notre parc est essentiellement composé de machines sous Windows Seven. La stratégie de migration comprend plusieurs phases et nous avons choisi de prêcher par l’exemple plutôt que d’utiliser une approche contraignante :

  • De janvier à septembre 2014, nous avons travaillé sur l’interface graphique, que nous voulions belle en plus d’être pratique, et sur l’intégration de postes sous Linux dans notre système d’information. Nous tenions à ce que le niveau de service soit au moins équivalent à celui que nous délivrions pour les postes sous Windows.
  • De septembre 2014 à décembre 2014 (3 mois), nous avons réalisé un test avec 20 utilisateurs. La direction générale et les élus (les décideurs, donc) ont été intégrés dans cette phase. Cela nous a permis de parfaire notre interface et de vérifier que tout fonctionnait correctement. Les résultats ont été très positifs, et nous n’avons pas eu de demande de retour en arrière.
  • De janvier à juin 2015, nous avons proposé un plan de volontariat. En plus des postes déjà installés, une trentaine d’agents se sont portés volontaires pour migrer sous Linux.

 

Nous sommes désormais dans la quatrième phase, qui est une phase d’incitation : nous proposons systématiquement Linux pour les postes neufs en déploiement. Si l’utilisateur refuse, Windows est conservé.

Parallèlement, l’adjoint à l’éducation nous a demandé d’entamer la migration sous Linux des PC des écoles maternelles et primaires. Sur les 17 écoles de la commune, plusieurs se sont portées volontaires pour un test. En décembre 2015, nous avons entamé le processus de migration d’une école pilote. La migration de toutes les écoles devrait prendre trois ans.

Si tout se passe selon les prévisions, 70% de notre parc informatique devrait utiliser Linux en 2018.

Y a-t-il eu « d’amicales pressions » d’éditeurs de logiciels propriétaires pour tenter de freiner cette démarche (si oui, avec quel discours) ?

Aucune, au contraire. Les éditeurs essaient de prendre en compte l’utilisation de PC sous Linux pour que tout se passe bien. L’augmentation significative de logiciels tournant sur des navigateurs web facilite grandement la migration.

Et les usagers de ces postes de travail, étaient-ils motivés ou plutôt dubitatifs ?

Aujourd’hui, aucun utilisateur n’a été contraint. Il n’y a donc pas de résistance forte. Certains, dubitatifs, ont été séduits par les avantages apportés par Linux (stabilité, rapidité) et qu’ils ont pu observer chez leurs collègues. D’autres ne sont pas convaincus et ont choisi de rester sous Windows. Nous respectons ce choix.

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Quelle distribution Linux a été choisie, s’agit-il d’une version ad-hoc, modifiée pour mieux convenir à vos besoins ?

Nous nous sommes basés sur Ubuntu 14.04 LTS. Des modifications importantes ont été nécessaires pour une intégration parfaite dans notre informatique existante. Comme sous Windows, un profil est automatiquement créé lorsqu’un utilisateur se connecte avec ses identifiants habituels (LDAP) et ses disques réseau partagés sont montés automatiquement. Nous avons également ajouté un « dock » (Cairo-Dock) pour faciliter la navigation sur l’interface et disposer d’un « bouton démarrer ». Nous évaluons actuellement une nouvelle interface basée sur ElementaryOS (cette distribution étant elle-même fondée sur une Ubuntu 14.04 LTS), encore plus simple et plus rapide. Les résultats sont prometteurs et elle devrait devenir en 2016 notre interface de référence.

Avez-vous procédé à des recrutements pour gérer ce nouveau parc logiciel, ou bien avez-vous formé des personnes en interne ?

Nous n’avons pas procédé à des recrutements spécifiques. Certains agents du service informatique disposaient déjà des connaissances nécessaires. Les autres ont été formés en interne. Notre interface est simple d’utilisation, et une formation basique permet donc d’atteindre rapidement le niveau de service attendu par nos utilisateurs.

Dans les faits, quels soucis éventuels lors de l’installation de la distribution Linux ? (ordinateurs vétustes, périphériques non reconnus, …) ?

Aucun problème bloquant ne s’est posé, mais la migration a nécessité une cohérence globale pour être pleinement efficace. Lors de l’attribution du marché des systèmes d’impression et de copie de la ville, par exemple, une attention particulière a été portée sur la qualité des pilotes disponibles pour Linux. Nous avons fait le choix de matériel Kyocera, parfaitement compatible. HP aurait pu être un autre choix. D’autres constructeurs ont été écartés. L’installation sur les PC se fait avec FOG (Free Open Ghost) et nous n’avons rencontré aucun problème sur les machines, pourtant variées, que nous avons installées jusqu’à présent.

La courbe d’apprentissage du nouveau système a-t-elle constitué un problème ?

Pas véritablement, parce que le déploiement est très progressif, et qu’un gros travail a été fait au niveau de l’interface graphique pour les utilisateurs. Un retour quasiment systématique que nous avons eu est :

« finalement ce n’est pas très différent de Windows…»

Le fait que les utilisateurs retrouvent, sous Linux, les logiciels auxquels il étaient déjà habitués sous Windows (Thunderbird, Firefox, LibreOffice, …) a été déterminant.

Finalement, l’inquiétude la plus vive a été pour le service informatique lui-même. Nous sommes passés par une phase de doute quant à notre capacité d’apporter un même niveau de service sur un environnement aussi différent. Après un an de travail quotidien sur Linux, ce doute est levé.

Cela fait donc un an maintenant que les ordinateurs de la mairie tournent sous linux, au-delà du changement technique quel bilan en tires-tu, côté finances et usages au quotidien ?

Toute l’administration ne tourne pas sous Linux, loin de là. La migration prendra du temps. C’est la dernière étape de la migration vers le libre, et pas la plus simple. Chi va piano, va sano e va lontano !

D’un pur point de vue financier, acheter des PC sans système d’exploitation nous permet de faire de sérieuses économies (autour de 30% sur un PC portable acheté par l’UGAP, la centrale d’achat des collectivités). Les machines sous Linux génèrent moins d’appels à la hotline, l’installation d’images par FOG prend cinq minutes, et ce temps gagné représente également une économie certaine (il faut compter 45 minutes pour l’installation d’une image Windows).

Autre intérêt : Linux vieillit mieux que Windows et la performance met du temps à se dégrader. Le remplacement des machines peut donc être décalé dans le temps. Mon estimation est qu’une économie de 30% sur le matériel est envisageable à terme (mais nous n’en sommes pas encore là, le parc de machines sous Linux étant encore largement minoritaire).

Au quotidien, les retours des utilisateurs sont positifs et le support est facilité. La bonne nouvelle, c’est donc que tout se passe bien et sans souffrance ce qui, au regard d’expériences menées dans d’autres collectivités, n’était pas évident de prime abord. L’autre bonne nouvelle c’est que, conformément à l’esprit du logiciel libre, le travail mené à Fontaine est partagé avec d’autres collectivités. Notre espoir est que le mouvement prenne de l’ampleur, pour le bien de tous.

Est-ce que le fait d’utiliser des solutions opensource a permis de faire un minimum « d’évangélisation » à ce sujet parmi les équipes de la mairie, ou bien est-ce qu’ils ne voient pas la différence ?

Nous avons eu quelques demandes d’installation sur du matériel personnel d’agents communaux et nous avons donné plusieurs coups de mains à d’autres collectivités de l’agglomération. Grenoble, qui a également entamé sa mutation, est dans le même esprit et il n’est pas impossible qu’une solution commune émerge de tout ce travail. Nos élus voient d’un bon œil cet essaimage, en cohérence avec la politique qu’ils ont choisie et qu’ils soutiennent. Plusieurs actions sont envisagées pour faire connaître plus largement notre travail et les bons résultats obtenus : conférences, démonstrations lors d’événements autour du libre, travail à destination de la population fontainoise, etc.

Récemment, le ministère de l’éducation nationale a signé un partenariat avec Microsoft pour des solutions pédagogiques via des produits de cette entreprise, quel est ton regard sur cette décision et penses-tu que des solutions libres auraient pu être envisagées à la place ?

Les choix des services de l’État manquent sérieusement de lisibilité. Les positionnements semblent varier selon les ministères. D’un côte le SILL (Socle Interministériel de Logiciels Libres) de Matignon, le choix du libre par la gendarmerie, etc. Et de l’autre cette initiative de l’éducation nationale ou d’autres ministères. Peu importe : il y a fort à parier que l’évolution, si évolution il y a, viendra d’initiatives locales multiples (et peut-être concertées) plutôt que de grandes décisions qui s’imposeraient à tous. Pensons global, et agissons local.

Pour info, la liste des logiciels libres que nous utilisons :

 

Interview réalisée par Grégory Gutierez, responsable de la commission Partage 2.0. à Europe Écologie les Verts et publiée le 15 janvier 2016 sur le site EELV.




Hypra : la révolution par l’humain

En s’inspirant des problèmes d’accès à l’informatique des personnes déficientes visuelles, Jean-Philippe et Corentin, les fondateurs d’Hypra (dont plusieurs membres sont aveugles ou mal voyants) ont conçu un modèle qui personnalise l’accompagnement de l’utilisateur.

Leur « Système à Accès Universel » facilite la migration vers le logiciel libre, y compris pour le grand public.

Bonjour ! Alors, dites-nous : comment utiliser un ordinateur quand on ne voit pas ?

Deux possibilités, soit je suis complètement aveugle (environ 100 000 personnes en France) et je recours à un transcripteur braille que je connecte à mon ordinateur (mais une minorité des aveugles lisent le braille), soit j’utilise un retour vocal.

Si je suis malvoyant, je vais utiliser un certain nombre de fonctionnalités d’assistance visuelle : le zoom, l’inversion des contrastes, un localisateur de curseur, de souris etc.

Dans bien des cas, le retour vocal et l’assistance visuelle se complètent utilement et permettent à la personne déficiente visuelle de gagner en confort d’utilisation, de limiter sa fatigue, voire tout simplement d’accéder à l’information.

Notre innovation tient d’abord à cela. Pour la première fois, Hypra fournit un système d’exploitation à ses utilisateurs qui leur assure cette complémentarité. Et là où JAWS, le retour vocal historique, coûte 1 500 euros (pris en charge sur les fonds publics), et où ZoomText, la solution leader sur la malvoyance, coûte 600 euros, notre couplage de solution est lui gratuit.

Conclusion, les personnes peuvent concentrer leurs moyens sur le nerf de la guerre, c’est à dire la maîtrise de leur outil à des fins d’autonomie et de productivité à long terme.

J’ai croisé des cannes blanches électroniques, des téléphones à synthèse vocale… Est-ce que l’autonomie passe forcément par la technologie ?

La technologie est une condition nécessaire mais non suffisante.

Dans notre vision, le vrai facteur critique d’émancipation, c’est le service à la personne.

Quand on parle de service à la personne chez Hypra, c’est un tout.

L’étape n°1, c’est la personnalisation du système. Nous avons choisi les composants logiciels les plus souples au monde, ils sont donc conçus, dès l’achat, pour s’adapter aux envies et aux besoins de chacun. Exemple : la taille et le type de police, la barre des menus sur le bureau, mais cela concerne aussi les raccourcis clavier dont la maîtrise est essentielle pour l’autonomie et idéale pour plus d’efficacité. Là où Windows et Mac proposent du standard auquel tout le monde doit s’adapter nous disons : « non, le système doit ressembler à la personne qui l’achète. » C’est à la technologie de s’adapter à l’Homme et non l’inverse. Nous installons, en outre, les logiciels que la personne souhaite à partir d’une étude rigoureuse de ses besoins. C’est donc du sur-mesure.

Encore faut-il apprendre à l’utiliser…

Jean-Philippe en conférence – CC BY SA – photo Hypra

Justement. Aujourd’hui, Windows ou Mac mettent un ordinateur dans les mains des gens en leur disant « débrouillez-vous », vous verrez, c’est intuitif, le grand mot à la mode. Oui, enfin, intuitif, plus on passe de temps avec les gens, déficients visuels ou pas, plus on se rend compte en fait qu’ils ne maîtrisent pas leurs outils. Personne ne leur a expliqué la base, comment se repérer, comment avoir les bons réflexes, comment faire évoluer leurs outils. Conclusion, c’est l’esprit de débrouille qui règne, qui est très loin de garantir ni un confort optimal d’utilisation, ni une utilisation des pleines potentialités de l’informatique en général. Les problématiques d’autonomie et de productivité sont certes plus critiques pour les déficients visuels, vu la place fondamentale du numérique pour eux, mais elles concernent le reste de la population au sens large.

L’étape d’après, c’est l’accompagnement sur la longue durée. Windows, Mac et une partie écrasante des éditeurs de logiciels vous fournissent les logiciels et vous livrent à vous-mêmes pour les mises à jour, les différents problèmes d’utilisation que vous pouvez rencontrer. Exemple : les mises à jour sur Mac OS. Non seulement les gens sont obligés de mettre à jour sous peine d’obsolescence programmée, mais nul ne leur explique comment faire. Il y a bien une option : repasser à la caisse dans des magasins tiers tout en se faisant déposséder de son ordinateur pendant une durée indéterminée avec le risque de perdre ses données. Chez Hypra, nous disons que cela est inacceptable. Le service à la personne doit être global, continu, intégré, proactif. Nos mises à jour, aussi parce qu’elles sont moins fréquentes que la frénésie de nos concurrents, sont anticipées. Nous dialoguons de personne à personne avec nos utilisateurs, nous leur expliquons, nous leur proposons les choses, nous les conseillons en leur exposant différentes options et en leur permettant de choisir de manière éclairée. Nous nous élevons contre le forçage inacceptable de Mac ou Windows ou d’autres logiciels qui consiste à dire : mettez à jour sous peine d’obsolescence !

Le cœur de notre métier, notre passion, c’est la personne humaine. Cela irrigue tout notre travail.

Comment rentabiliser un modèle aussi exigeant ?

En étant transparent, clair sur ses intentions, et sûr de ses forces comme de ses faiblesses, et surtout en étant pédagogue. Nous expliquons à nos utilisateurs ce pourquoi ils payent.

Capture d’écran avec loupe

Nos utilisateurs payent pour du service, c’est à dire justement la personnalisation de l’accompagnement. Au global, cela leur revient le prix qu’ils payeraient pour un simple ordinateur Mac ou Windows sur deux ou trois ans, c’est à dire 1 500 à 1 600 euros. Mais plutôt que de les payer sans visibilité sur deux, trois ans, ils payent d’une traite avec la garantie de ne plus avoir à subir de coûts cachés liés aux problèmes de mise à jour, de sécurité, mais aussi de matériel. Nous sommes en effet en train de ficeler un solide accord-cadre avec plusieurs constructeurs de manière à offrir un S.A.V. irréprochable et global (logiciel et matériel).

Nous fournissons donc un package clé en main payé d’un bloc qui leur permet justement de de prémunir contre de nouvelles dépenses imprévues qui ont également pour conséquence de rendre leur ordinateur indisponible pendant une durée indéterminée. Bien sûr, pour celles et ceux qui aiment la débrouillardise et qui ont du temps à y consacrer, il est possible de se passer de formation et d’accompagnement sur la durée, et le prix est alors ramené entre 800 à 1 000 euros. Nous ne le conseillons qu’aux utilisateurs très avancés.

Ce que nous proposons, nous, en définitive, c’est une continuité de service qui garantit de trouver un interlocuteur et un dialogue de qualité, une exigence de performance et de délais lorsqu’un problème quelconque se présente. Cela permet d’économiser sur l’autre grand coût caché de l’informatique : le temps. Aujourd’hui, le monde va vite, les gens sont très occupés, et l’informatique ne les intéresse parfois pas du tout. Il faut donc qu’ils y passent le minimum de temps possible en y consacrant le temps et le prix nécessaires à l’achat, de manière à être tranquille par la suite. C’est pour nous un défi de tous les jours : faire penser le long terme à nos utilisateurs. C’est une tâche difficile, harassante, mais très stimulante.

Vous insistez plusieurs fois sur le côté « on paie une fois et on est tranquille ». C’est tout de même une start-up qui dit ça ! Comment les utilisateurs peuvent-ils être sûrs de bénéficier d’un suivi sur le long terme ?

Parce qu’on fait du logiciel libre. Tout ce qu’on fait est reversé à la communauté. Du coup, sur le long terme, notre esprit et nos développements demeureront accessibles à tous, surtout qu’on les intègre dans Debian.

De plus, comme on ne ferme rien de nos développements, la seule chose qui nous fait vivre, c’est le service. Du coup, pour vivre, on n’a pas le choix que de maintenir le capital confiance et d’être irréprochables.
C’est, à mon sens, une garantie pour nos clients. Si on rompt notre pacte de confiance avec le public ou les communautés du libre, notre modèle économique est menacé. C’est pour ça que Hypra a un côté ultra démocratique.

Quelle est la place du logiciel libre dans l’offre d’Hypra ?

Elle est capitale. C’est parce que notre modèle repose sur une solidarité internationale des concepteurs de logiciels que nous pouvons nous concentrer sur le service à la personne et ne pas faire payer les logiciels. Nous nous engageons, par ailleurs, lorsque notre modèle sera arrivé à maturité, à attribuer une partie de nos gains à cette communauté internationale de gens bénévoles qui nous permettent d’exister aujourd’hui.

C’est donc du 100% ?

Notre engagement éthique en ce domaine est clair : nous ne recourons à des logiciels propriétaires que lorsque aucun autre choix non-handicapant pour l’utilisateur n’est possible. Nous l’avons fait pour le retour vocal, nous allons le faire pour un logiciel qui permet aux aveugles de lire leur courrier papier (via la reconnaissance optique de caractères). Seuls des logiciels propriétaires pouvaient assurer une performance suffisante. Nous avons déjà en tête de proposer dans le futur la même performance mais sous la forme de logiciels libres dont nous aurions coordonné le développement.

La plupart de nos lecteurs comprennent bien l’importance du Libre pour des valides. C’est pareil pour les handicapés, j’imagine ?

Dessin Gknd - Le geek dit C’est pas parce qu’on a une mauvaise vue qu’il ne faut pas aller sur Internet. Le smiley ajoute Ouais! Ce serait dommage de rater les trolls les imbéciles et les salauds.

 

Je dirais que c’est l’inverse. Les handicapés, mieux que personne, comprennent l’importance fondamentale du logiciel libre. Ce sont eux qui sont en première ligne des besoins de personnalisation, et seul le logiciel libre permet cette flexibilité.

Par ailleurs, ce sont aussi les premiers à souffrir des rentes de monopole que constituent les entreprises qui conçoivent et commercialisent des logiciels propriétaires. Notre grand sondage mené en janvier 2015 montrait qu’une grande partie de la population déficiente visuelle était consciente que JAWS (le retour vocal à 1 500 euros) était sur-tarifé pour les évolutions qu’il connaît dans le temps. Beaucoup s’indignaient sur l’effet d’aubaine de la prise en charge publique (par les Conseils Généraux) d’un logiciel aussi cher. Mais surtout, 75% des 450 répondants se déclaraient prêts à passer au logiciel libre si une offre de service de qualité était fournie.

Si l’on se tourne vers le grand public, l’équation n’est pas si différente, mais la prise de conscience est peut-être moins avancée. Je dis bien peut-être. Car les gens sont fatigués des mises à jour incessantes et déstabilisantes sous Windows dont le paroxysme est Windows 10, ils sont également fatigués de la sous-traitance du service de Apple à des organismes agréés qui sont des machines à cash. On s’est rendu compte également que les enjeux de vie privée avaient gagné en importance dans le choix de leur système d’exploitation.

Il est donc temps de leur proposer un autre modèle, et c’est exactement ce que nous sommes en train de faire.

Est-ce que vous expliquerez clairement aux utilisateurs que le système est basé sur du Libre ? Je pense à des gens qui cultivent un certain flou… et quand on farfouille on trouve une Debian modifiée…

Ça dépend avec qui. Il faut bien comprendre que le libre, ça n’a pas une bonne image parmi le public (au mieux l’indifférence, au pire le rejet par préjugé). Pour pleins de raisons et parce que sa compréhension exige de réfléchir à des choses que les gens ne soupçonnent pas. Ou elle renvoie à un historique, une image, pas toujours génial. Du coup, tout en affirmant notre ancrage libriste sans complexe, on ne le met pas en avant auprès de nouveaux clients, sauf si ça permet d’aborder un sujet qui préoccupe un utilisateur (vie privée, confidentialité des données, rapport aux développeurs de logiciels). Pour les autres, si on leur met ça sous le nez, ils tournent les talons. Mieux vaut donc leur mettre du libre par principe, qu’ils le sachent ou pas. Dans tous les cas, qu’ils en soient conscients à l’achat ou non, c’est une garantie de durabilité pour eux. Et malgré tout, on l’affirme haut et fort dans notre communication grande échelle. S’ils ne passent pas au libre par militantisme, or peu de gens militent, nos clients pourraient le défendre pour le modèle que ça véhicule et qu’ils vivent quotidiennement avec nous dans leur usage de l’informatique. C’est une autre façon de promouvoir le libre auprès d’un public moins sensible aux enjeux de la propriété intellectuelle en informatique.

Du coup, c’est très proche du comportement d’Ordissimo (qui ne cite JAMAIS Debian sur son site, j’ai vérifié), et qui cherche à séduire les débutants (âgés) en informatique.

À un détail près, on cite Debian, nous. Mais à des endroits où vont les gens plus intéressés par les aspects techniques (et à qui le nom même ne détournera pas de l’éthique). En outre, tous nos développements vont dans Debian (Compiz, mate-accessibility, etc.), donc très bientôt, Debian pourra ressembler nativement à Hypra si la communauté souhaite s’ouvrir à l’universalité qu’on propose. Enfin, quand on forme les gens, pas question d’empêcher les installations non Hypra, les mises à jour, contrairement à Ordissimo. Les gens apprennent bel et bien les mécanismes de Debian et ils le savent. Aucun logo Debian n’a été supprimé. Donc ils sont vite informés de ce qu’ils utilisent (une Debian adaptée le temps qu’elle s’adapte elle-même). Mais ce serait une erreur de communication de vouloir le dire à tout le monde haut et fort avant même de susciter un intérêt par d’autres moyens, ça agiterait trop de peurs et de préjugés.

Ordissimo se base sur Debian et protège son travail de paramétrage en ne le reversant pas et en n’y autorisant pas de modification. Hypra est transparent et dans une logique de dialogue mutuel constant avec Debian, et nous l’affirmons. Et nous y amenons les utilisateurs, mais au lieu de le dire à l’achat, on les acclimate à cet univers pour que le libre et Debian leur paraissent, en fin de compte, une évidence par-delà les préjugés.

Selon vous, c’est le moment pour que le logiciel libre atteigne enfin le grand public ?

Le terrain est favorable pour une percée du logiciel libre. Le succès, notre succès collectif, à nous, les acteurs du logiciel libre, est possible.

Il est possible si nous professionnalisons le service apporté à l’utilisateur, si nous montrons que nous apportons plus que les acteurs traditionnels pour un prix équivalent ou inférieur.

Il est possible si nous jouons collectif, si nous savons conjuguer nos efforts dans un juste équilibre communauté/entreprises, si nous savons dialoguer, nous écouter, nous faire confiance. C’est ce que nous cherchons à faire avec la communauté Debian, avec le leader de communauté Orca ou les développeurs Compiz. Cela suppose que les programmeurs, et en premier chef nos programmeurs chez Hypra, comprennent que les qualités relationnelles sont au moins aussi importantes que les qualités de programmations.

Il est possible à condition d’amorcer un virage philosophique. Il faut en finir avec la technocratie. L’émancipation ne doit pas viser seulement les concepteurs de logiciels. Je lisais récemment le chef informatique de chez Enercoop sur Framablog (dont les locaux parisiens sont 100% sous Debian) qui faisait un lien direct entre le logiciel libre et l’émancipation des programmeurs. Mais il ne parlait que très peu des utilisateurs et éludait les aspects critiques de conduite du changement. S’émanciper, du point de vue de l’utilisateur, c’est certes avoir les possibilités de changer, mais encore et surtout avoir la maîtrise du changement.

À noter que l’on a installé Hypra et formé un salarié déficient visuel chez eux qui est très content, à tel point d’ailleurs, qu’il veut que l’on installe le S.A.U. sur son Mac, une belle vitrine pour le logiciel libre…

De manière plus générale, le pouvoir doit être aux utilisateurs-citoyens et non aux programmeurs. C’est à eux que sont destinés les biens communs que sont les logiciels libres. Les programmeurs ont du mal à l’entendre. C’est là une des explications, selon nous, du plafond de verre du logiciel libre.

Il est possible, enfin, si chacun se trouve bien à sa place. La communication, c’est un métier, et ce n’est pas le métier des ingénieurs. Le logiciel libre est le seul monde dans lequel les ingénieurs s’imaginent être de formidables communicants. C’est un métier, il faut le professionnaliser. C’est aussi la raison pour laquelle nous avons quitté la forme associative pour faire une entreprise.

Nous pensons que l’heure est venue que le logiciel libre démarre une métamorphose, nous avons envie d’amorcer ce mouvement avec tous ceux et toutes celles qui y sont prêts.

www.hypra.fr




Les bibliothèques, outils de (re-)décentralisation du Web

Installer un relais Tor dans une bibliothèque publique ? Voilà une initiative qui peut paraître surprenante au premier abord, mais c’est ce qu’a fait la bibliothèque de Lebanon aux États-Unis dans le cadre du Library Freedom Project, pour garantir l’anonymat des usagers qui se connectent à Internet dans ses emprises.

Le texte de Jason Griffey traduit ci-dessous explique en quoi cette démarche fait sens dans une bibliothèque et pourquoi il deviendra sans doute même de plus en plus important que les bibliothèques s’emparent des enjeux de la protection de la vie privée et de la décentralisation d’Internet.

Nous remercions Lionel Maurel, alias Calimaq, pour cette présentation et surtout pour ses commentaires qualifiés et éclairants que vous retrouverez à la fin de cet article.

Les bibliothèques peuvent éviter à l’Internet des objets de subir la centralisation du Web

par Jason Griffey

Source :  How libraries can save the Internet of Things from the Web’s centralized fate
Traduction Framalang : Benoit, Penguin, goofy, xi

jasonGriffeyTout le monde pense que les bibliothèques ont un rôle positif à jouer dans le monde, mais ce rôle diffère suivant que vous parliez à un bibliothécaire ou à leur tutelle. Demandez à un membre de leur tutelle ce que les bibliothèques ont en commun, et il répondra probablement : elles partagent les livres avec les gens. Les bibliothécaires auront une réponse différente : elles partagent un ensemble de valeurs. Il est temps pour les bibliothèques de défendre ces valeurs en soutenant l’accès à Internet et en menant le combat pour conserver un Internet ouvert, libre et sans propriétaire.

Le Code d’Éthique de l’association des bibliothèques américaines dit : « Nous avons une obligation particulière de garantir la libre circulation de l’information et des idées aux générations actuelles et futures. » (1)

Cette libre circulation de l’information sur Internet est en danger à cause du renforcement de la centralisation de ces vingt dernières années. Ce qui était alors un terrain ouvert où tous les participants pouvaient exprimer leurs idées et créer des outils et du contenu dépend maintenant de plus en plus de services propriétaires fournis par des entreprises comme Facebook, Amazon, Twitter et Google. Ce n’est pas le futur qu’envisageait John Perry Barlow en 1996 lorsqu’il a écrit sa Déclaration d’Indépendance du Cyberespace :

Je déclare l’espace social global que nous construisons naturellement indépendant des tyrannies que vous cherchez à nous imposer. Vous n’avez aucun droit moral de dicter chez nous votre loi et vous ne possédez aucun moyen de nous contraindre que nous ayons à redouter.

À l’époque, Barlow, comme beaucoup d’autres, pensait que la plus grande menace sur ce monde naissant provenait des gouvernements. C’est bien plutôt le commerce et le capitalisme qui ont permis à de grandes sociétés de dominer de façon quasi totale les services majeurs sur Internet. Les romans cyberpunks avaient tout compris.

D’un autre côté, la décentralisation est devenue la priorité dans les domaines où l’anonymat et la sécurité sont de mise. Par exemple, Bittorrent permet la distribution de contenu d’un utilisateur à l’autre sans que l’information ne réside sur un serveur. Tor (« le routeur oignon ») est un réseau de serveurs décentralisés qui rendent anonymes les moyens de communication. Le Bitcoin est une monnaie qui ne repose ni sur des banques ni sur des gouvernements, utilisant à la place un réseau distribué de « registres » pour garder trace des transactions. Le mouvement pour la re-décentralisation dépend souvent de la générosité d’inconnus qui offrent une partie de leur propre infrastructure au réseau en question : bande passante, cycles de calcul ou expertise technique — s’exposant ainsi parfois à des risques personnels et professionnels importants.

Les systèmes décentralisés vont fournir l’information et les services du prochain grand virage informatique : l’Internet des objets.
Ces « objets » seront décentralisés par essence, et cette décentralisation peut être protégée contre l’accaparement si nous préparons le terrain maintenant en créant des nœuds par lesquels ces micro-réseaux vont communiquer.

L’Internet décentralisé partage les valeurs traditionnelles des bibliothèques. Les systèmes décentralisés sont de solides remparts contre la censure, le contrôle ou les intérêts d’entreprises dirigées par leurs actionnaires. Les services distribués n’ont pas de point faible centralisé — pas de prise électrique unique à débrancher, pas de serveur unique qui puisse être assigné à comparaître — donc ces services ne peuvent pas être retirés à leurs utilisateurs finaux. Leurs intérêts sont directement alignés sur ceux de leurs utilisateurs qui n’auront pas à pâtir de maîtres indifférents.

La force des systèmes décentralisés est aussi leur faiblesse. La décentralisation signifie qu’il n’est pas possible de forcer ou soudoyer une entreprise pour modifier le système afin qu’il soit plus facile à contrôler ou à espionner, mais cela signifie aussi qu’il n’existe pas d’entité capable de lutter au tribunal ou au Congrès [NdT : pouvoir législatif américain] pour défendre le système lorsqu’il est attaqué.

Les bibliothèques peuvent soutenir un système décentralisé à la fois par leurs ressources informatiques et leur pouvoir de pression. Les combats qu’elles ont menés en faveur d’une infrastructure libre, juste et ouverte pour Internet montrent que nous avons de l’influence dans la sphère politique, ce qui a tout autant d’importance que les serveurs et la bande passante.

À quoi ressembleraient des services bâtis sur les valeurs et l’éthique des bibliothèques ? Ils ressembleraient à des bibliothèques : accès universel à la connaissance. Anonymat des demandes d’information. Un soin particulier apporté aux capacités de compréhension et à la qualité de l’information. Un fort engagement pour s’assurer que les services sont disponibles à tous les niveaux de pouvoir et de privilège.

Pour prendre un exemple, la bibliothèque Kilton, à Lebanon dans le New Hampshire, a installé un relais Tor. C’est l’aboutissement d’une longue bataille pour obtenir que les bibliothèques reconnaissent que leur infrastructure a un rôle important à jouer en faveur d’une grande idée : aider à protéger les communications du monde entier. Alison Macrina, la directrice du Library Freedom Project, et Nima Fatemi, la directrice technique, ont accompli un travail magnifique pour mener à son terme ce projet et démontrer qu’une bibliothèque peut servir aussi bien sa communauté locale que le vaste monde.

(manuscrit médiéval, banque d'images BNF)
Geek expliquant le fonctionnement du routeur oignon à une bibliothécaire (manuscrit médiéval, banque d’images BnF)

Ça n’a pas été facile, parce que la plupart des gens ne comprennent pas ce qu’est Tor ni pourquoi Tor est important dans le monde. C’est exactement pour ça que nous avons besoin que les bibliothèques montrent le chemin. Les bibliothèques devraient embrasser ce futur distribué et mettre à disposition leurs surplus de cycles et de bande passante pour mettre en œuvre les prochaines étapes de l’évolution vers un Internet décentralisé. Les bibliothèques sont l’endroit idéal pour développer ces services, car ils sont en phase avec l’éthique des bibliothèques, et celles-ci jouent ainsi pleinement leur rôle de membres de confiance au sein de leur communauté.

Tor est seulement un exemple. Les plus grande bibliothèques peuvent contribuer à l’hébergement de ressources et d’applications. Les associations de bibliothécaires peuvent parrainer des services décentralisés dans le but de les rendre accessibles, afin que les petites bibliothèques puissent les installer et les gérer facilement. Toutes les bibliothèques peuvent commencer à explorer ces possibilités, engager leurs communautés en tant qu’utilisateur de ces services, mais aussi en tant que contributeurs, par leurs compétences techniques et leurs connaissances.

Les bibliothèques — par leur position dans la communauté, leurs valeurs et leur longue expérience dans leur mission qui et de rendre l’information aisément accessible tout en protégeant les intérêts des utilisateurs — ont une position privilégiée pour nous guider sur le chemin de la re-décentralisation d’Internet. Les bibliothèques et les bibliothécaires ne peuvent pas se permettre de laisser passer cette occasion de nous emmener vers la prochaine étape. Ils doivent s’en emparer.

(Image: Tubes and Wires, Eddie Welker, CC-BY)

(1) On consultera également avec intérêt la charte UNESCO sur le rôle des bibliothèques

* * * * * * *

220px-Lionel_Maurel_Journee_domaine_public_2012Les bibliothèques ne sont pas seulement des points d’accès à des contenus culturels ou scientifiques. Ce sont aussi depuis longtemps des lieux d’apprentissage du rapport à l’information, des espaces d’exercice de la liberté d’expression et plus généralement, du vivre-ensemble et de la citoyenneté. Les bibliothécaires américains ont été sensibilisés plus tôt à la question de la protection de la vie privée, notamment parce qu’ils ont été frappés de plein fouet par le Patriot Act après les attentats de 2001. Le texte initial prévoyait en effet la possibilité pour le FBI d’accéder aux fichiers des usagers des bibliothèques pour connaître la teneur de leurs lectures.

Les bibliothécaires américains (et notamment la puissante ALA – American Library Association) ont agi pendant de nombreuses années pour contester cette dérive et ériger la défense de la privacy (confidentialité) comme valeur majeure pour leur profession. Par extension, la liberté d’accès à Internet en bibliothèque a fait l’objet également d’une attention particulière,  notamment pour permettre aux usagers d’accéder à un internet sans filtrage au nom de l’Intellectual Freedom de la même manière que les bibliothèques sont censées ne pas exercer de censure sur les ouvrages acquis pour leurs collections.

Ces questions prennent de plus en plus d’importance à mesure que la surveillance de masse de la population se déploie et se renforce, sous l’action conjuguée des États et des grandes entreprises du Web. En 2014, à l’occasion de son congrès annuel qui se tenait à Lyon, l’IFLA — l’association internationale des bibliothécaires — a apporté son soutien aux 13 principes contre la surveillance de masse portés par EFF. Dans le contexte des révélations d’Edward Snowden, c’était un symbole fort qui marquait un tournant dans l’implication des bibliothécaires sur ces questions.

Malgré le cortège de lois sécuritaires adoptées en France depuis trois ans, les bibliothécaires français restent moins en pointe que leurs homologues américains dans ces débats. Néanmoins, leur implication évolue également dans un sens similaire. L’Association des Bibliothécaires de France (ABF) a adopté en 2015 une charte Bib’Lib en faveur de « l’accès libre à l’information et aux savoirs ». Ce texte est associé à un label et  préconise de garantir l’accès à un internet libre et ouvert, « sans contraintes d’identification autre que ce que prévoit la loi » et dans le respect des données personnelles des usagers. Certains établissements, comme la BULAC à Paris , agissent comme des pionniers pour définir des bonnes pratiques en termes de conservation des données de connexion et d’accès à Internet. Et on commence peu à peu à voir des établissements français comme la bibliothèque de l’INSA qui organisent des crypto-parties.

L’un des intérêts du texte de Jason Griffey est d’établir le lien entre les enjeux de protection de la vie privée et de décentralisation d’Internet. Les bibliothèques peuvent en effet jouer un rôle important dans la formation des usagers à l’utilisation des outils et au développement de la « littératie numérique ». On espère que des passerelles pourront d’ailleurs se créer entre les bibliothèques françaises et le projet CHATONS de Framasoft, qui fait la promotion d’alternatives libres et décentralisées aux services proposés par les GAFAM.

Il est d’autant plus important que les bibliothèques jouent ce rôle citoyen que la pression sécuritaire monte en France. Suite aux attentats de novembre dernier, le gouvernement avait annoncé un temps son intention de bloquer le WiFi public et d’interdire l’usage du réseau tor en France. Si ce genre de projets venaient à être mis à exécution, non seulement les bibliothèques françaises seraient directement impactées, mais une initiative comme le Library Freedom Project deviendrait impossible dans notre pays…




Comment modifier et personnaliser sa Framacarte ? (Tutos uMap 4/4)

Juste avant Noël, nous vous présentions Framacartes, un service de création de cartes personnalisées pour vos sites web, communautés, randos, chasses au trésor… Framacartes est basé sur le logiciel Umap, qui permet d’ajouter des points, tracés et polygones sur les fonds de cartes d’OpenStreetMap.

C’est alors qu’Antoine Riche, ingénieur informatique, Contributeur et Formateur OpenStreetmap, nous a contactés pour nous présenter sa série de tutoriels (libres, eux aussi) pour apprendre à maîtriser uMap (et donc Framacartes) à toute la famille Dupuis-Morizeau.

C’est avec son autorisation (et de chaleureux remerciements) que nous reproduirons sur le framablog les quatre premiers tutos (le niveau « débutant ») afin d’en faire profiter le plus grand nombre.

Nous avons commencé par nous familiariser avec uMap pour profiter pleinement d’une Framacarte

Puis, nous avons vu comment créer sa première Framacarte

Ensuite, nous avons créé un compte afin de faire de bien jolies cartes et de ne pas les perdre !

Cette semaine et pour finir cette série de tutoriels, apprenons comment personnaliser ses Framacartes.

Je modifie et personnalise ma carte

Ce que nous allons apprendre

  • Gérer son catalogue de cartes
  • Choisir un fond de carte
  • Sélectionner les options d’interface

Procédons par étapes

1. Retrouver une carte

Vous souhaitez modifier une carte pour l’améliorer ou la mettre à jour. Si vous avez redémarré votre navigateur et à fortiori votre ordinateur, la première chose à faire est de retrouver la carte ! Si vous avez créé cette carte avec votre compte comme nous l’avons vu dans le tutoriel J’utilise un compte et crée une belle carte), afficher une de vos cartes se fait en trois opérations simples :

  1. connectez-vous à votre compte umap
  2. affichez votre catalogue de cartes
  3. cliquez sur le nom de la carte, affiché sous l’aperçu de la carte

umap_edit2La carte s’affiche alors en mode consultation. Cliquez sur le crayon en haut à droite de la carte pour passer en mode édition : vous pouvez dès lors modifier la carte. N’oubliez pas de sauvegarder la carte une fois les modifications terminées.

Il peut être fastidieux de passer du mode édition au mode consultation et vice-versa de façon répétée. Une astuce consiste à utiliser pour la même carte deux onglets ou deux navigateurs, l’un en mode édition l’autre en mode consultation. Vous devez tout de même enregistrer la carte dans l’onglet en mode édition avant de l’actualiser (par exemple avec la touche F5) dans l’onglet en mode consultation.

umap_homeVous pouvez retourner à votre catalogue de cartes à tout moment en cliquant sur le pictogramme Retourner à l'accueil dans le menu du bouton Plus à gauche de la carte.

2. Changer le fond de carte

Nous avons vu dans le tutoriel Je consulte une carte uMap que plusieurs fonds de carte sont disponibles dans umap. Lorsque vous éditez une carte vous pouvez choisir le fond de carte qui sera utilisé à l’affichage de la carte.

umap_layersCliquez sur le pictogramme Changer le fond de carte : un panneau à droite montre une vingtaine de fonds de cartes. Il vous suffit de cliquer sur l’un d’eux : faites votre choix et n’oubliez pas d’enregistrer la modification.

Le choix du fond de carte est une affaire de goût. Le contexte de la carte peut vous aider à en choisir un plutôt qu’un autre, par exemple :

  • les fonds Outdoors, Landscape ou OpenTopoMap montrent le relief : judicieux pour une carte de randonnée
  • OpenCycleMap montre les grands itinéraires cyclistes, comme les EuroVélo (Côte Atlantique, Loire à Vélo…)
  • Positron, Toner et OSM-Monochrome sont en noir et blanc : vos marqueurs, lignes et polygones seront plus visibles
  • le style HOTOSM, créé par le groupe humanitaire d’OpenStreetMap, permet d’aller jusqu’à un niveau de zoom élevé (niveau 20) : intéressant si l’étendue de votre carte couvre un quartier ou votre jardin

Tous les fonds de carte utilisés par umap, à l’exception des images aériennes de l’IGN, sont réalisées à partir des données OpenStreetMap. Ils sont produits par des associations, des entreprises ou des bénévoles qui les mettent gracieusement à disposition.

Remarquez le texte affiché en bas à droite de la carte : il crédite les auteurs du fond de carte, par exemple Map tiles by Stamen Design - Map Data © OpenStreetMap contributors.

3. Choisir les options d’interface

Vous pouvez configurer les éléments de la carte mis à disposition des utilisateurs qui consulteront votre carte. Vous pouvez par exemple ajouter une mini-carte de situation ou une barre de légende.

umap_parametersPour cela, ouvrez dans le menu Éditer les paramètres l’onglet Options d’interfaces. Vous pouvez activer ou désactiver une dizaine d’options dont voici la signification.

options_interface

Quelques remarques :

  • si vous cachez le bouton Plus, les utilisateurs de la carte ne pourrant ni la partager ni changer le fond de carte
  • si vous cachez les boutons de zoom et désactivez le zoom avec la molette de la souris, les utilisateurs ne pourront ni zoomer ni dézoomer … sauf à découvrir le menu accessible avec un clic droit sur la carte.
  • les boutons de navigation en bas des popups permettent de faire défiler les éléments de la carte

Lorsque la mini-carte de situation est affichée, l’opération Changer le fond de carte modifie le fond de celle-ci. Vous devez désactiver la mini-carte pour changer le fond de la carte principale.

umap_shareNotez que ces options – et quelques autres – sont également disponibles en Options d’export de l’iframe du menu Exporter et partager carte, où elles permettent de contrôler les mêmes options d’interface lorsque la carte est intégrée dans une page Web.

4. Copier ou supprimer une carte

Tout en bas des Propriétés de la cartes, l’onglet Options avancées propose deux opérations peu utilisées mais qu’il est bon de connaître :

  • Supprimer supprime la carte du serveur umap, ainsi que les données qui y sont associées !
  • Cloner cette carte effectue une copie de la carte et de ses données. La nouvelle carte est ajoutée à votre catalogue.

Dans les deux cas un message vous demande de confirmer l’opération.

Faisons le point

Ce tutoriel nous mène à la fin du niveau débutant. Vous savez créer, modifier et personnaliser une carte. Vous savez styliser vos marqueurs, lignes et polygones. Enfin vous savez gérer votre catalogue de cartes.

Une fois ces opérations maîtrisées, les tutoriels de niveau intermédiaire vous apprendront à structurer vos cartes avec des calques et enrichir le contenu de vos popups. Vous découvrirez également comment coproduire une carte et créer un diaporama géolocalisé.

Ces tutoriels, en cours de rédaction par Antoine Riche, ne seront pas reproduits sur le Framablog, mais il seront disponibles sur le wiki de Cartocité.

L’équipe du Framablog tient encore à chaleureusement remercier Antoine pour son travail sur ces tutos et sa sympathie 😉

Liens utiles :