La Framakey : 4 ans et plein d’enfants reconnaissants !

Trazomfreak - CC byLa Framakey souffle aujourd’hui sa quatrième bougie 😉

Depuis cette date originelle, elle poursuit tranquillement son petit bonhomme de chemin, toujours 100% libre, toujours animée par une communauté de passionnés.

Nous le savons, l’un des avantages du logiciel libre, c’est qu’il permet à tout le monde, sans discrimination, de pouvoir améliorer le logiciel pour ses propres besoins (personnels ou professionnels). Et c’était bien là l’une des principales motivations de ce projet, proposer, si vous me passez l’expression, une « arme de diffusion massive du logiciel libre ».

Ainsi durant ces quatre années[1], la Framakey a donné naissance à pas mal de « forks », c’est-à-dire des versions adaptées par des particuliers, institutionnels ou entreprises.

Je me propose de vous en présenter quelques uns, qui me paraissent assez représentatifs de la diversité d’un projet générique dont la licence libre autorise et même encourage l’appropriation (dans le sens « rendre propre à », et non dans le sens de « s’approprier »).

Commençons par les projets liés à l’éducation :

  • L’Université de Poitiers : UP Key Etu est une adaptation de la Framakey. Cette adaptation a été réalisée par la Maison des Langues et par i-médias, le Service commun informatique et multimédia de l’Université de Poitiers.}} Notez au passage que l’Université propose une vidéo dynamique, pédagogique, et bien réalisée de l’UP Key Etu en situation.
  • L’IUFM d’Aquitaine : L’IUFM @qui.CLE est mise à disposition des usagers et de tous les formateurs (formateurs permanents, PEMF, formateurs associés, conseillers pédagogiques, tuteurs, …) de l’IUFM d’Aquitaine.
  • Le projet « Clé en main », à destination des enseignants, qui fut l’un des premiers dérivés de la Framakey, et qui a inspiré la Trousse Numérique du CRDP de Versailles ;
  • l’excellent site Grain2Tice propose, lui, son le CNEP (Cartable Numérique pour l’Ecole Primaire). Utilise le lanceur PortableApps.com.
  • Le nom moins excellent site Quebecois Zone Libre en Education propose sa Liberclé qui contient notamment le Programme de formation de l’école québécoise, sous forme de fichiers PDF, ainsi qu’une vingtaine d’hyperliens vers des sites indispensables pour l’enseignant québécois voulant intégrer les TIC dans son enseignement.
  • La SEPR, organisme de formation lyonnais, a réalisée en interne une version personnalisée, diffusée à 4 000 exemplaires à ses étudiants.
  • D’autres expériences de diffusion à l’école, souvent sur des projets de taille plus modeste (< 100 clés), mais qui nous réchauffent vraiment le cœur, comme le cas exemplaire de la commune de Sainte-Ménehould.

Il existe aussi des dérivés associatifs ou communautaires :

  • Miftaah, la Framakey en langue arabe (dont on nous a rapporté des cas d’utilisation jusque dans les cybercafés libanais) : « Sous la supervision du bureau de l’UNESCO à Rabat et ICTDAR, Miftaah est réalisé par diverses universités associé dans la région : Algérienne du centre de recherche sur l’information scientifique et technique (CERIST), Marocaine de l’école de Mohammadia d’Ingénieurs, université Mohamed V Agdal et université de Birzeit en Palestine ». Voici d’ailleurs ce qu’on peut lire sur le site de l’UNESCO : « L’UNESCO reconnaît l’importance de la valeur sociale du logiciel libre et ses actions de promotion visent à donner les moyens et l’autonomie nécessaire aux pays pour faire leurs propres choix. Dans ce contexte le Bureau de l’UNESCO à Rabat en coopération avec ICTDAR élabore la clé Miftaah qui contiendra non seulement des logiciels dont le code source est ouvert et fourni gratuitement, mais aussi une capacité de stockage pour les données personnelles de l’utilisateur ; tout cela est animé par une interface agréable et à usage facile. »
  • Le DATICE Framakey, destinée aux nouveaux enseignants d’histoire-géo.
  • Plus original, la Technoboulkey, pour les profs et apprentis boulangers (aujourd’hui basée sur PortableApps.com).
  • Une adaptation (en cours de réalisation) par Antipodes-Ingénierie, société coopérative spécialisée dans le développement des compétences des premiers niveaux de formation (illettrismes, migrants…) : « Parmi nos projets, nous avons notamment le souhait d’adapter une Framakey pour les formateurs qui interviennent auprès de ces publics. Cette Framakey contiendra un nombre restreint de logiciels portables (OpenOffice.org, lecteur PDF et Firefox) ainsi qu’une méthodologie de travail pour les formateurs sous forme de pages HTML et de grilles d’évaluation sous Calc. Cette méthodologie sera elle-même diffusé sous la licence GPL (ou FDL). C’est pour nous l’opportunité de favoriser l’utilisation des logiciels libres et de permettre à des formateurs (qui souvent travaillent dans des organismes associatifs) d’avoir accès à moindre coût aux outils informatiques (l’investissement informatique est souvent chaotique dans ces structures et les logiciels « périmés » ou aux licences douteuses sont monnaie courante, les fonds investis devraient se concentrer sur le matériel et non pas se perdre dans les méandres des moultes versions trop chères des produits Microsoft. »

Framakey - coque en bois

Tout ceci fait plaisir à voir et à lire, et nous conforte dans l’idée que ça valait le coup de développer ce projet.

Cette liste étant non exhaustive, auriez-vous de nouveaux éléments à y apporter ? Avez-vous connaissance d’autres dérivés de la Framakey et de son utilisation en classe, entreprise ou administration ?

Telles les deux faces d’une même médaille, l’article se poursuit dans une seconde partie, La Framakey : 4 ans et quelques enfants ingrats ?, où l’on tentera d’illustrer le fait que le libre peut aussi malheureusement parfois faire l’objet d’une certaine récupération…

Notes

[1] Crédit photo : Trazomfreak (Creative Commons By)




Google Wave : une bonne nouvelle pour le logiciel libre ?

Rappensuncle - CC by-sa« Google Wave, c’est ce que pourrait être le mail si on devait l’inventer aujourd’hui » s’exclame le grand Tim O’Reilly, se mettant ainsi au diapason de cette autre citation, « Wave va rendre caducs tous les outils actuels de communication », entendue au moment même de la présentation de ce nouveau projet, il y a quinze jours de cela.

Le dévoilement de Wave a d’abord valu à Google une standing ovation au sortir de la conférence inaugurale. Puis, dans la foulée, des articles souvent dithyrambiques sont apparus sur la Toile. C’est donc clairement la sensation du moment, avant même que le moindre utilisateur ait pu tester quoi que ce soit. Une nouvelle vague (wave en anglais) va-t-elle déferler sur le Web ?

Si vous voulez en savoir plus quant à son approche originale et à ses fonctionnalités, je vous invite à lire theClimber, TechCrunch ou Transnets. Outre tout ce qu’il nous propose de faire, retenons qu’on a besoin du HTML 5 et surtout que le protocole sera Open Source, basé sur XMPP (Jabber), avec un serveur qui sera libre et qu’on pourra installer chez soi (cf Minitel 2.0).

Cet aspect libre (ou prétendu tel) est très important et n’a pas forcément été mis en avant par la blogosphère (sauf l’inévitable journal LinuxFr). Pour marquer le coup et nous interroger ensemble sur l’impact potentiel d’une telle nouveauté sur le logiciel libre, nous avons choisi de traduire un article enthousiaste (peut-être trop ?) issu de la revue Free Software Magazine.

Cet article envisage Google Wave sous l’angle de ce qu’il pourrait apporter à une communauté agrégée autour d’un logiciel libre. Jusqu’à se demander si Wave ne va pas se substituer aux bons vieux outils que sont les logiciels de gestion de versions (CVS, etc.), les wikis, et autres listes de discussion. Ce qui, au sein des développeurs, serait effectivement une petite révolution dans la manière de travailler et de communiquer.

Mais il n’entre pas dans le détail des licences, dans l’évalutation du degré réel ou supposé de l’ouverture annoncée par Google (à sa décharge, on ne dispose à l’heure actuelle que le peu d’informations qu’a bien voulu nous donner la société). Et surtout il oublie d’évoquer une, pour ne pas dire la, question majeure que l’on résume souvent dans la formule « Google everywhere ». Ok pour la possibilité d’avoir son petit serveur à domicile mais dans la pratique la grande majorité se connectera à n’en pas douter chez Google. Du Google partout, tout le temps, qui va finir par devenir problématique (si ça ne l’est pas déjà !). On peut, par exemple, compter sur Google pour nous proposer son navigateur Chrome configuré aux petits oignons pour Google Wave, si vous voyez ce que je veux dire.

Aussi puissant, séduisant et ouvert (protocole, API…) soit Google Wave, le logiciel libre a-t-il intérêt à surfer tête baissée sur cette vague[1], ou bien laisser couler et continuer tranquillement dans son coin à ériger sa petite berge qui deviendra un jour si haute que pas même un tsunami ne pourra l’emporter ?

Google Wave va-t-il révolutionner la collaboration dans le logiciel libre ?

Will Google Wave revolutionise free software collaboration?

Ryan Cartwright – 15 juin 2009 – Free Software Magazine
(Traduction Framalang : Poupoul2, Daria et Tyah)

Si vous n’en avez pas encore entendu parler, Google a publié une version de développement de Wave, son nouvel outil de réseau social et collaboratif. Quel impact cela peut-il avoir sur les utilisateurs et les développeurs de logiciel libre ?

Wave est ce que Google appelle un « nouvel outil de communication et de collaboration sur le Web ». Voyez-le comme un carrefour entre le courriel, le réseau social, la messagerie instantanée, l’IRC et Twitter. Wave apporte (ou plus exactement apportera) non seulement de nouveaux moyens de communication, mais offre également un retour instantané aux autres participants. En utilisant la base d’une vague comme une conversation, il permet aux destinataires de vos conversations de voir ce que vous écrivez en temps réel, au moment où vous l’écrivez. Plus besoin d’attendre que votre contact de messagerie instantanée termine son message. Wave offre également aux participants, dans le même outil, des messages de type panneau d’affichage, afin de savoir à quel moment ils se reconnectent. Il propose des fonctionnalités sympathiques qui permettent contextuellement de répondre à différentes parties d’un message. De nouveaux participants peuvent entrer à n’importe quel moment, tout en bénéficiant à la fois de l’historique complet de la vague, mais aussi en ayant la possibilité de « rejouer la vague » telle qu’elle s’est formée, en voyant qui a écrit quoi et dans l’ordre chronologique.

Ouais, ouais, encore un outil de réseautage social… allez, circulez !

Aussi intéressant, ou pas, que cela puisse paraître, quel impact cela aura-t-il pour nous, utilisateurs de logiciels libres et plus particulièrement développeurs ? Et bien, tout d’abord, Wave est développé grâce à un nouveau protocole ouvert et Google souhaite que nous l’aidions à le développer. Ce protocole est disponible sous les termes ouverts d’une licence que Google considère « libérale » (Un oxymore peut-être ?). En plaçant un protocole ouvert derrière cette technologie, Google nous invite activement à contribuer, distribuer et propager cette technologie. Cela signifie que nous, utilisateurs de logiciels libres, pouvons créer des outils libres qui utilisent le protocole Wave. Un protocole ouvert est assurément une bonne chose dans ce contexte : Pas d’accord de confidentialité, pas de royalties liées à des licences telles que pour les formats GIF ou MP3. Google nous demande également que nous aidions à donner forme au protocole. Les contributions sont réalisées sous un contrat de licence contributeur, qui insiste sur le fait que vous donnez à Google, le droit de « reproduire, construire des travaux dérivés, publier, exécuter en public, sous-licencier et distribuer vos contributions et les travaux dérivés associés ». Google semble être parti sur la bonne voie. Le temps nous en dira bien sûr plus, mais nous ne devrions pas être trop sceptique, c’est une opportunité réelle. Là où Android est un système ouvert sur un matériel fermé, en devenant ainsi de fait semi-fermé, nous avons une chance de développer Wave avec une foule d’outils libres et ouverts basés sur l’API et le protocole de Wave.

Google a livré quelques informations sur le fait de conserver le code source ouvert. Mais jusqu’à présent, ils n’ont publié aucun code source (à l’exception peut-être pour la version développeur, dont je ne fais pas partie), Cependant, même s’ils conservent les sources de l’API fermées, disposer d’un protocole ouvert (et d’une licence libérale) signifie que nous pouvons créer des outils qui utiliseront ce protocole et que ceux qui utiliseront les outils de Google pourront collaborer avec ces outils libres, du moins en théorie.

Mais qu’est-ce que cela peut nous apporter ?

Pensez à la manière de développer du logiciel libre. Peut-être plus que n’importe quel autre type de produits, le logiciel libre a besoin d’un effort collaboratif intense de la part de ses créateurs. Grâce à SVN, Sourceforge et consorts, nous avons des moyens de partager du code source et nous possédons des outils de communication durant le cycle de développement : wiki, panneaux d’affichage, liste de dicusssions, etc. Imaginez que vous disposez d’une « vague » pour les développeurs d’un projet logiciel. Chaque contributeur, en temps réel s’il le souhaite, dispose d’une conversation sans peur de perdre le fil dans de multiples embranchements. Les nouveaux membres peuvent rejouer la discussion pour comprendre l’état présent. Des fragments de code pourraient être placés à l’intérieur de la conversation et édités en temps réel par les autres membres. Et tout cela se déroule dans un des outils les plus communs, le navigateur. Les rassemblements de développeurs pourraient inclure ceux qui ne peuvent participer physiquement grâce à l’utilisation d’une vague. Les meilleurs esprits ne seront plus exclus parce qu’ils n’ont pu réserver une place dans l’avion[2].

Si cela semble excitant, c’est parce que je m’exalte. Google Wave a le potentiel pour aller bien au-delà du simple buzz pour foules numériques. Wave a la possibilité de réellement faire du bruit et de représenter un grand pas dans la manière dont nous développons du logiciel libre. Évidemment, il m’est venu à l’esprit que les développeurs de logiciels propriétaires pourraient utiliser le même système pour produire leurs logiciels, mais soyons honnêtes : qui de deux est le plus habitué à la collaboration (en réalité, en dépend même) ?

J’ai entendu certaines personnes dire que Google Wave pourrait dépasser Twitter et Facebook d’ici 2011. Je n’en sais rien, et même peu m’importe, mais je crois que Wave peut avoir un impact aussi fort sur le développement de logiciel libre que CVS ou les wikis.

Notes

[1] Crédit photo : Rappensuncle (Creative Commons By-Sa)

[2] Non pas que j’ai entendu que cela arrive, je conjecture juste.




Framasoft et moi, il y a 7 ans de cela

Flashback. Un visiteur m’a tout récemment rappelé l’existence d’un vieil entretien totalement oublié que j’avais donné au site MoteurZine en mars… 2002 ! Et il a accompagné le lien d’un énigmatique petit smiley malicieux.

Je suis allé voir, j’ai lu, j’ai pris un coup de vieux, et j’ai compris le pourquoi du smiley 😉

À l’époque Framasoft venait à peine de naître, j’étais tout seul dessus et j’éditais à la main l’ensemble des pages statiques du site sous, aïe pas taper, Dreamweaver ! J’étais également rédacteur au Café pédagogique, c’est vous dire…

Il y a certains passages et références « un peu » datés, où je pense me faire gentiment chambrer dans les commentaires. Mais il y en a d’autres que j’assume encore fièrement plus de sept ans après.

Dans la mesure où fort heureusement je ne suis désormais plus seul du tout, je me suis dit que ça pouvait peut-être intéresser quelques uns de ceux qui depuis ont participé de près ou de loin à l’aventure Framasoft.

Copie d'écran - Framasoft - mars 2002

Interview d’aKa en mars 2002 pour MoteurZine

URL d’origine du document

Moteurzine : Bonjour. Est-ce que vous pouvez, avant tout, vous présenter à nos lecteurs ?

aKa : Alexis Kauffmann, 33 ans, professeur de mathématiques à Bobigny, animateur TICE (Technologies de l’Information et de la Communication pour l’Enseignement) dans le 93, et rédacteur au Café Pédagogique.

Pour ce qui est d’Internet, j’ai vu de la lumière un soir de novembre 1996, j’y suis entré et pour ainsi dire toujours pas ressorti.

Comment est né le site Framasoft.net ?

Le site dérive d’un autre site Framanet.net (pour FRAnçais et MAthématiques en intraNET) dont la webmistress Caroline d’Atabekian, enseignante en lettres, était et reste une partenaire professionnelle. L’idée principale était d’expérimenter des séquences pédagogiques en pages web via le réseau local de notre établissement scolaire tout en présentant ce travail à nos pairs via Internet. Et comme on ne roule toujours pas sur l’or à l’Éducation Nationale, nous étions bien contents de trouver toutes sortes de petits outils gratuits pour l’élaboration de ses séquences et/ou la maintenance du site.

Las de devoir les rechercher à chaque nouvelle installation, on a décidé de les regrouper et d’en faire une branche à part entière de Framanet. Et puis la branche a fleuri et a décidé, en novembre 2001, de voler de ses propres ailes (sic !) pour adopter le nom de domaine Framasoft.net.

Il n’y avait donc rien de « prémédité » même s’il est indéniable que depuis je me suis pris au jeu.

Pourquoi avoir choisi le domaine Framasoft.net et non pas le domaine en .com ou en .org ?

J’imagine qu’à l’époque je devais penser que le .net tournait autour d’Internet, le .com lorgnait vers le commercial et le .org avait une dimension collective. Et comme je n’étais pas nombreux au début…

Combien de personnes sont impliquées dans ce site ?

C’est un peu une question piège car justement je ne suis toujours pas très nombreux !

S’il fallait comparer le site à une organisation politique, il y aurait les membres du bureau exécutif élus par cooptation (à savoir… Moi !), les militants (principalement des collègues de Seine-Saint-Denis qui rédigent des notices ou me pondent des articles de temps à autres) et enfin la joyeuse cohorte des sympathisants (tous les internautes qui m’envoient infos, remarques et critiques).

Et pourtant je m’obstine, au risque de leurrer les visiteurs, à présenter Framasoft comme « la participation d’une équipe d’enseignants à un Internet associatif » et à m’exprimer à la première personne du pluriel. Il y a là comme un souhait en fait (j’en profite donc pour lancer un appel). Et peut-être aussi que cela me rassure psychologiquement car il n’est humainement pas possible d’avoir fait ça tout seul sur ses heures perdues en si peu de temps !

Qu’est ce qui vous a amené à vous intéresser au monde du logiciel libre et plus particulièrement, le monde du logiciel libre sous Windows (d’ailleurs, n’est-ce pas complètement contradictoire !?) et à l’exprimer sur un site ?

Il y a des jours où l’errance nocturne sur le réseau a du bon. « En utilisant les logiciels libres, non seulement on effectue des économies spectaculaires pour le matériel, non seulement on se libère des logiques que tentent d’imposer les grandes multinationales de l’informatique, mais, en plus, on se met en relation avec l’un des foyers les plus vivants de la société qui est en train de se créer, celle de l’intelligence distribuée », ai-je eu juste le temps de lire un soir de fin de millénaire avant de piquer du nez.

Non le logiciel libre ne se résumait pas à Linux dont ce dernier n’en devenait qu’un exemple (mais quel exemple !). Non le logiciel libre et le logiciel gratuit ne naviguaient pas dans les mêmes sphères, l’un me parlant d’argent et l’autre de liberté. Oui le modèle était pertinent pour l’éducation. Oui il y avait également là un extraordinaire potentiel « d’extension du domaine du libre ».

Pour ce qui est de l’apparent paradoxe, je vous présente l’éditeur vidéo Virtual Dub (une application libre tournant sur le système d’exploitation propriétaire Windows) et l’outil de correction de textes français Correcteur 101 (une application propriétaire tournant sur le système d’exploitation libre Linux).

Le « tout libre » est sûrement une belle idée mais il ne résiste pas à la réalité actuelle du grand public qui, et je suis le premier à le regretter, n’est visiblement pas encore prêt à lâcher son Windows. Mais en attendant, et cela minimisera du même coup le phénomène du piratage, faisons tourner ce système d’exploitation avec un maximum de logiciels libres !

Votre site est composé de trois grandes parties : l’annuaire de logiciels libres et gratuits, l’annuaire de logiciels libres, l’annuaire de liens autour du libre. Vous pouvez nous en dire plus dessus ?

Des pont naturelles peuvent les relier mais dans mon esprit ces trois parties sont bien distinctes et indépendantes.

Ceci dit, à bien y réfléchir, il pourrait également y avoir là comme une « invitation au voyage » :

  • Étape 1 : Je fais rapidement mes emplettes sur le Net en transitant par l’annuaire de logiciels libres et gratuits sous Windows.
  • Étape 2 : Mais pourquoi donc cette constante distinction entre libre et gratuit ? Allons-y voir d’un peu plus près en visitant quelques sites de l’annuaire autour du libre.
  • Étape 3 : Intéressant après tout ce concept du logiciel libre. Quel est donc l’état de l’existant sous Windows ? Et hop, un petit détour par l’annuaire de logiciels exclusivement libres.

Votre annuaire référence de nombreux logiciels « libres ». Mais, qu’est ce qui vous différencie par rapport à un site comme Telecharger.com ?

Télécharger.com est un excellent site qui possède une base de plus de 10.000 logiciels pour une audience mensuelle de 2.000.000 visites qui parcourent à peu près 20 millions de pages (source Cybermétrie, décembre 2000). C’est une sacrée différence qui pourrait déjà clore le débat !

Sinon je dirai que nous sommes plus Windows et moins boîte de Pandore, plus incisifs et moins consensuels, plus libres et moins propriétaires, plus indépendants et moins regardants sur nos stock-options, plus sobres et moins lourds à charger, ou encore plus éducation et moins publicité.

En fait je pense qu’il y a un espace pour ces deux types de sites qui ne se présentent visiblement pas dans la même catégorie.

Mais j’allais oublier une ultime et définitive différence : chez nous les âpres négociations de rachat par Vivendi Universal ont échoué !

Qu’est ce qui a été le plus difficile dans la mise en place de cet annuaire ?

La découverte de la non extensibilité du temps…

Aujourdhui, combien passez-vous de temps quotidiennement, hebdomadairement à entretenir et développer votre annuaire ?

Cette découverte m’a donc contraint à faire certains sacrifices. Mais demandez à ma femme, elle sera certainement plus objective que moi ! (mais demandez-lui gentiment car c’est un sujet sensible entre nous…)

Quelle est l’architecture logiciel et matériel derrière le site Framasoft ?

Encerclé par les sites dynamiques à la sauce ASP ou mieux PHP, le dinosaure Framasoft résiste encore et toujours à l’envahisseur en ne proposant que du HTML pur.

Il a été développé sous un très célèbre et… propriétaire éditeur WYSIWYG (Dreamweaver pour ne pas le nommer, donnez-moi l’équivalent sous Linux et je change illico de plate-forme !). Et il a opté pour un hébergement payant (Amen.fr) afin d’offrir un temps de chargement réduit à ses visiteurs.

Votre site ne comporte ni bandeaux, ni zone payante. Il est donc totalement libre et gratuit comme les logiciels que vous présentez. Est-ce une solution viable à moyen / long terme ?

Ces absences de bandeaux et de zones sont revendiquées. Et comme il m’est difficile de ne pas glisser une citation dans le moindre de mes écrits, j’ajouterai que « c’est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup ».

Ceci dit il faut pouvoir assumer ce choix. Et même si je reconnais bien volontiers que parfois de petites idées mercantilistes me trottent furtivement dans la tête (après tout il y a un service rendu), je me reprends vite en pensant à la dynamique du monde du libre et en étant content d’y apporter mon humble et modeste contribution (justement parce qu’il y a un service rendu !).

Pour ce qui est de la viabilité la réponse est simple puisque je ne suis lié par aucun contrat. Il est bien évident que le jour où, après une illumination mystique, je m’en irai passer un an dans un ashram en Inde, Framasoft s’en trouvera quelque peu déstabilisé.

Combien d’internautes vous visitent quotidiennement ? Cela fait combien de pages vues ?

Environ 2.000 visiteurs pour 10.000 pages lues… oups, vues. (source Xiti)

Qui vous amène le plus de visiteurs ? Pourquoi ?

Je constate depuis quelques temps une certaine stabilité : 40% d’accès direct, 40% via les moteurs de recherche et 20% de liens sur site. Je n’ai pas trop de commentaires à faire si ce n’est qu’il semblerait qu’il y ait là une certaine fidélisation corroborée par le fait que le mot-clé en tête de tous les moteurs est… Framasoft. Sinon sur la moyenne des 400 visiteurs qui nous viennent d’autres sites, cela se divise pour moitié de sites éducatifs et pour l’autre de sites généralistes (tels les surprenants et dynamiques annuaires du gratuit du Net).

Quelle a été votre méthode pour développer votre visibilité dans les outils de recherche ? sur Internet ?

Il n’y a pas vraiment eu de méthodes. Des annonces dans des listes de profs où j’étais abonné, quelques messages personnels cullotés à des webmestres dont j’appréciais le site, plus le bouche à oreille, et un jour vous vous apercevez que quelques sites pointent vers le votre. Du coup vous possédez le précieux sésame, vous avez un « indice de popularité ». La terre promise n’est plus loin, elle approche, elle arrive : vous êtes référencé sur… Google ! Après vous pouvez aller vous coucher, ça tournera tout seul !

Quels sont vos projets à moyen / long terme pour Framasoft ?

Ma préoccupation du moment, c’est de trouver un hébergeur « compréhensif » car l’accroissement du nombre de visiteurs est apparemment proportionnelle au prix du forfait et cela devient alors problématique de faire dans le bénévolat tout en perdant de l’argent.

Sinon il n’y a pas vraiment de projets mais peut-être un souhait : obtenir une petite reconnaissance de la part de la communauté du libre francophone.

Pour terminer, pouvez-vous nous dire quel est votre site Internet préféré et pourquoi ?

Tiens, c’est curieux je ne m’étais encore jamais posé la question !

La raison vous dirait à n’en pas douter Google car sa disparition m’obligerait à reprendre des cours de recherche sur le Net ! Et la passion pencherait sûrement vers les sites que j’ai dédié à mes deux filles. Mais là point d’url c’est mon jardin secret…

Alexis, merci d’avoir pris de votre temps de répondre à ces questions.




Le logiciel libre européen est-il politiquement de gauche ?

Celesteh - CC byL’April se félicite du succès rencontré par l’initiative du Pacte du Logiciel Libre au lendemain des élections européennes. Bravo pour la mobilisation, c’est effectivement une bonne nouvelle que d’avoir 34 députés issus de 7 pays différents signataires de ce Pacte (même si on pourra m’objecter que cela représente à peine 5% des 736 députés que totalise l’assemblée).

Mais c’est moins la quantité que la qualité des ces élus qui a retenu mon attention.

On dit souvent que le logiciel libre n’appartient à aucun parti ou courant politique. On dit également que le vieux clivage gauche-droite n’est plus forcément pertinent à l’aube de ce nouveau millénaire. On dit enfin que le mouvement écologiste ne doit pas (ou plus) être classé à gauche.

Il n’empêche que si vous regardez dans le détail la liste de ces 34 députes, vous serez peut-être comme moi frappé par la parenté commune de ces élus[1].

Le voici reproduit ci-dessous, accompagnés par des liens Wikipédia donnant de plus amples informations sur les partis auxquels ils appartiennent (j’y ai appris plein de choses personnellement) :

Au final, et à une exception britannique près, il n’y en a que pour « la gauche », prise au sens large (du centre-gauche, aux socialistes, en passant par les verts).

De là à en conclure qu’il n’y a que la gauche qui manifeste un intérêt assumé pour le logiciel libre en Europe, il n’y a qu’un pas que j’hésiterais cependant à franchir.

Et vous ?

Notes

[1] Crédit photo : Celesteh (Creative Commons By)




Largage de liens en vrac #18

Whatsername? - CC by-saCe n’est pas un grand cru de news logicielles, loin s’en faut (sans être non plus de la piquette).

Faut vous avouer aussi que je n’ai pas forcément été très attentif cette semaine à l’actualité. La faute à une entité virtuelle rencontrée sur GNM (Gnm is not Meetic).

Or justement ce soir, c’est notre premier rendez-vous. Tout comme mon port LPT1, j’espère faire bonne impression. À la question : mais comment vous reconnaitrais-je ? Elle m’a répondu qu’elle tiendrait un ballon vert à la main[1]. On a beau être éduqué à la grandeur d’âme, je l’espère tout de même un peu jolie…

  • Moovida : Un média player de plus ? Oui mais l’interface est vraiment bien pensée et très esthétique. Quelqu’un a testé ?
  • meta-iPod : Ce logiciel se présente comme un iTunes Cleaner. Comme je connais pas bien iTunes, je ne peux pas trop vous en parler. Mais je peux vous balancer telle quelle la description du site officiel : « meta-iPod can clean up an iTunes library with as many features as a Swiss Army Knife. From recovering ratings and play counts from your iPod to tracking down files or folders gone missing, meta-iPod analyzes all data sources containing your music to put the pieces of the puzzle back together. »
  • DSpace : Une plate-forme d’archivage de documents orientés recherche et enseignement. Le mieux c’est encore de take a tour si vous souhaitez aller au delà de ma présentation vague et floue.
  • BitBlinder : L’Hadopi va adorer puisqu’il s’agit du faire du Bittorrent mais de manière sécurisée et anonyme ! (on en parle sur TorrentFreak)
  • Hemlock : Tout nouveau. Un framework qui mélange le format Flash (bouh) et le protocole ouvert de messagerie instantanée XMPP (clap, clap) pour offrir la discussion en direct live aux développeurs qui souhaitent inclure ce module dans leurs applications Web.
  • Wagn : Je vous traduis l’équation qui figure en page d’accueil : un wiki (où les gens écrivent ensemble) + une base de données (où les gens organisent ce qu’ils ont écrit ensemble) + un CMS (pour faire de chouettes sites Web) = un Wagn (où les gens font tous ensemble de chouettes sites Web).
  • Appcelerator : Un framework de développement d’applications Internet riches (RIA) qui semble très ambitieux sur le papier et qui permet de créer rapidement des programmes non seulement pour Windows, Mac ou Linux mais également pour iPhone, Android & co (là encore cela dépasse de loin mes compétences, donc si quelqu’un veut nous en dire plus dans les commentaires…)
  • Tiny Core Linux : Sortie de la version 2.0 de cette mini-distribution GNU/Linux (env. 10 Mo) qui a ses adeptes. Et puis ça peut être utile sur une clé USB ne serait-ce que pour la vitesse au boot.
  • jQuery SuperBox! : Tout le monde connait désormais l’effet lightbox, ces fenêtre qui s’ouvrent pour vous montrer généralement une image pendant que le fond s’obscurcit (certains sites en abusent même que). Ici on vous en propose une version légère, accessible, extensible et évidemment sous licence libre.
  • Jokosher : Il s’agit de « rendre la production audio simple ». Une sorte de Audacity en version light et ergonomique ?
  • Engine Room Audition : Faut vraiment voir la vidéo (et ses effets) pour comprendre. Assez artistique ma foi.
  • The Guide : Une application Windows only permettant de créer des documents puis de la classer dans une structure en arbre. La encore, les copies d’écran aident à mieux capter la chose. On notera que vous pouvez paramétrer le logiciel pour qu’il devienne pleinement portable (par exemple sur une clés USB à la manière de la Framakey).

Notes

[1] Crédit photo : Whatsername? (Creative Commons By-Sa)




Microsoft Office à l’école française : stop ou encore ?

Todd Baker - CC byEst-il si loin le jour où nous verrons en France un reportage similaire à celui que nous avons choisi de reproduire ci-dessous ? Titré « le boum des logiciels libres », il nous vient de la TSR (Télévision Suisse Romande) dans le cadre de son émission Nouvo consacrée aux « nouvelles tendances et technologies » (canal YouTube).

Que dire sinon que cela fait plaisir à voir et que nous applaudissons des deux mains ! Difficile en effet selon nous de faire mieux dans le temps imparti. Nous avions d’ailleurs publié un article dédié à cette évolution libre du Canton de Genève[1].

Faut-il le rappeler (et bien moins pour nous enorgueillir que pour déplorer l’immobilisme de la situation de l’autre côté des Alpes) : c’est peu ou prou exactement le même discours que tient le Framablog depuis un petit bout de temps déjà.

Ainsi, il y a tout juste un an (au moment même où le Café pédagogique se découvrait VRP de son généreux sponsor américain) nous avions fait l’effort de traduire un long rapport britannique qui déconseillait, étude sérieuse et détaillée à l’appui, l’usage en milieu scolaire de la suite bureautique propriétaire Microsoft Office 2007 ainsi que le nouveau (et tant décrié) système d’exploitation Windows Vista. Nous étions bien naïfs en pensant alors que ce rapport allait un tant soit peu émouvoir la communauté et réussir à faire naître un débat en haut lieu.

Car il n’en fut rien.

Peut-être parce que l’influence de Microsoft à l’école française demeure aussi efficace que disproportionnée ?

Cela n’empêche certainement pas la suite OpenOffice.org de se déployer silencieusement chaque jour davantage dans toutes les écoles Jean-Macé et les lycées Sud Médoc de France. Mais nous serions certainement allés bien plus vite sans cette résistance passive de notre administration, SDTICE en tête.

Le temps de la décision volontariste et du courage politique est-il enfin venu ?

On notera que le reportage ne se résume pas à l’éducation, puisqu’on y évoque par la suite brièvement la situation du logiciel libre dans le secteur privé (qui ne connait pas la crise) et le secteur public (ici en milieu hospitalier). Avec cette conclusion réaliste : « Pourtant le grand public hésite toujours à faire le pas, fidèle à Microsoft et autres leaders du marché ».

Le boum des logiciels libres

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Reportage : Zian Marro / Montage : Sandro Milone – 1 juin 2009 – TSR (Nouvo)

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Transcript

Il s’agit de la retranscription de la première partie de la vidéo consacrée à l’éducation.

Voix off : Cours d’informatique dans cette classe de 8ème.

Le professeur : Le cours d’aujourd’hui consiste à faire faire aux élèves une feuille de calcul pour calculer leur moyenne à l’aide du logiciel libre Calc, qui est le correspondant en fait d’Excel.

Voix off : Les logiciels gratuits d’OpenOffice remplacent les bons vieux Word et Excel de Microsoft. Réputé compliqué, le libre a beaucoup évolué.

Un élève : C’est assez facile de travailler avec, surtout avec les profs qui nous donnent des consignes très claires. C’est très facile.

Voix off : Facile, mais aussi et surtout indépendant. Une ouverture qui plait aux profs.

Le professeur : On n’est pas soumis effectivement à l’hégémonie de certains logiciels. Pour avoir des nouvelles versions, à chaque fois il faut repayer etc. Donc, à mon avis, il faut s’affranchir dans une certaine mesure des logiciels dit propriétaires.

Voix off : Dans un ordinateur, le système d’exploitation, Windows par exemple, ainsi que les programmes sont payants. Aujourd’hui on peut facilement remplacer un, deux voire la totalité de ces coûteux logiciels par du libre. Et cette année l’État de Genève a édité un CD avec OpenOffice pour les élèves.

Une élève : Je trouve que c’est bien parce que comme ça on peut les avoir chez nous et on sait deja comment ça marche.

Voix off : Dans les écoles de Genève tous les ordinateurs sont equipés. L’État évite ainsi des frais de licences pour près de 900 000 francs par an, et surtout ne dépend plus de Microsoft.

Notes

[1] Crédit photo : Todd Baker (Creative Commons By)




Pourquoi je vais voter pour le Parti Pirate

Jon Aslund - CC byDemain c’est jour d’élection pour tous les pays de la communauté européenne. En Suède il est un parti tout à fait original, qui, si l’on en croit les derniers sondages, pourrait bien conquérir un siège au prochain Parlement : j’ai nommé le parti pirate (piratpartiet en suédois).

Wikipédia nous dit : « Le parti pirate est un parti politique de type contestataire, fondé en 2006, dont le leader est Christian Engström. Ce parti s’attache notamment à diminuer les droits de la propriété intellectuelle, comme le copyright, les brevets et la protection des œuvres. Le programme comprend aussi un soutien au renforcement des droits de vie privée (comme la propriété privée et les informations privées), à la fois sur Internet et dans la vie courante. Le parti n’a pas de programme autre que ce sujet et il n’est donc pas possible de lui attribuer une position de droite ou de gauche. »

Si chez nous c’est le débat sur l’Hadopi qui aura notoirement contribué à sensibiliser le grand public sur ces questions, chez eux c’est surtout le récent procès (et son verdict) contre le site d’échange de fichiers torrents The Pirate Bay[1] qui, en défrayant la chronique, a eu pour conséquence indirecte de voir un parti pirate, de plus en plus soutenu, occuper le devant de la scène.

Et parmi ces soutiens, il y a le romancier et professeur Lars Gustafsson, dont la maigreur de sa page Wikipédia en français ne doit pas vous tromper sur sa renommée nationale (et internationale). C’est la traduction (ci-dessous) de sa récente tribune au magazine Expressen qui sert de prétexte à ce billet. Qu’un intellectuel de tel renom achève son article en expliquant que « pour toutes ces raisons mon vote ira au parti pirate » a eu son petit effet chez nos amis nordiques et témoigne de l’intérêt que suscite ce parti (et le mouvement qu’il incarne) au sein de la société suédoise.

On notera que ce parti pirate connait de nombreuses déclinaisons dans les autres pays européens, mais aucun n’a le poids du piratpartiet et, de fait, aucun autre ne se présente aux élections.

En France la situation semble un peu confuse, puisqu’on a déjà, au moins, deux « partis pirates » alors même qu’on n’en a pas du tout entendu parler pendant le projet de loi Création et Internet. Il y a en effet un parti pirate canal historique (sic) et un parti pirate tout court. Ce dernier semble le plus crédible a priori, mais je manque d’informations. Peut-être viendront-ils apporter quelques précisions dans les commentaires…

Selon moi, et quand bien même cela ne soit ni son objectif ni sa fonction, une structure emmenée par La Quadrature du Net aurait pu y aller. Avec le risque bien sûr de se planter complètement et que cela se retourne contre elle. Mais elle aurait certainement récupérée pas mal d’abstentionnistes potentiels échaudés par l’épisode Hadopi et tout ce qui, à sa suite, semble se mettre en place. Jusqu’à peut-être, qui sait, gagner un élu, et causer ainsi localement un petit tremblement de terre politico-médiatique.

Mais je vous laisse avec Lars Gustafsson dont nous avons traduit la traduction anglaise de son texte d’origine…

Lars Gustafsson : « Pourquoi je donne mon vote au Parti Pirate »

Lars Gustafsson: “Why my vote goes to the Pirate Party”

Lars Gustafsson – Traduction anglaise Rasmus – 27 mai 2009 – Copyriot
(Traduction Framalang : Olivier)

Introduction du traducteur anglophone

Lars Gustafsson est sans doute l’écrivain suédois en vie le plus prolifique. Depuis les années 1950, il ne cesse de nous abreuver de poésie, de romans et de critiques littéraires. Il y a peu, il officiait encore comme professeur de philosophie à l’Université du Texas. De retour pour de bon en Suède, il vient de commencer à s’auto-publier sur un blog. Il est aussi le lauréat de nombreux prix littéraires, le plus récent date seulement de deux jours lorsque le prix Selma Lagerlöf lui a été remis.

Vous comprendrez donc pourquoi ses récentes déclarations dans le numéro de Expressen publié aujourd’hui ne passent pas inaperçues en Suède. Il y explique que le copyright doit être abandonné et il déclare que son vote ira au parti pirate aux élections européennes toutes proches.

Comme je pense que ce texte pourrait en intéresser plus d’un hors de Suède j’en ai fait une traduction rapide. Elle est sans doute loin d’être parfaite donc je vous demanderai de vous abstenir de poster des commentaires sur les erreurs de traductions, je vous invite plutôt à les corriger vous-mêmes et à indiquer l’adresse dans les commentaires !

Je dois aussi préciser que, personnellement, je ne partage pas entièrement l’analyse de Lars Gustafsson. La dichotomie entre matériel et immatériel particulièrement est problématique. Les technologies numériques offrent en effet la re-matérialisation n’importe où, c’est un point qui fait actuellement débat au sein de l’Embassy of Piracy, débat qui s’intensifiera à la Venice Biennale. Il y a aussi matière à remettre en question le concept de reproductibilité de Walter Benjamin. Cependant Lars Gustafsson, comme Walter Benjamin, a le mérite de réussir à formuler les conflits actuels en termes matérialistes et d’utiliser les références historiques à bon escient. Le débat est lancé. Encore une fois, pardonnez-moi s’il y a des erreurs de traduction…

La tribune de Lars Gustafsson

Därför röstar jag på Piratpartiet

Les écrits anciens qui sont parvenus jusqu’à nous racontent comment l’empereur perse ordonna que les vagues de la mer soient châtiées car une tempête l’empêchait de transporter ses troupes par navire.

Plutôt stupide. De nos jours il se serait sûrement plaint au tribunal d’instance de Stockholm, ou il aurait exigé un entretien avec le juge, peut-être…

La détresse des droits civiques au printemps 2009 me rappelle étrangement les luttes pour la liberté de la presse en France au cours des décennies qui précédèrent la révolution française. Des idées radicalement nouvelles émergent, des idées qui n’auraient jamais vu le jour sans les progrès galopants de la technologie.

Descentes contre les ateliers d’impression clandestins, pamphlets confisqués et même saisie du matériel d’impression. Mises aux arrêts et transports épiques sous le couvert de la nuit à destination de Paris depuis l’enclave prussienne de Neuchâtel – où non seulement une bonne partie de l’Encyclopédie a été produite mais à partir d’où énormément de pornographie osée a circulé également, dissimulée dans des pamphlets athéistes.

Entre les années 1730 et 1780 le nombre de censeurs d’État a quadruplé. Les descentes contre les ateliers d’impression clandestins augmentèrent proportionnellement. Avec le recul maintenant nous savons que ça n’a pas endigué le mouvement en marche. Au contraire, les nouvelles idées se sont encore plus développées et se sont répandues plus rapidement encore, stimulées par la censure toujours plus forte et les descentes dans les ateliers d’impression clandestins.

Le combat porte de nos jours sur la défense de l’essence même d’Internet, un espace de droits civiques et d’échange d’idées. Un espace qui doit rester vierge de toute menace sur la vie privée et de toute influence de puissants intérêts privés.

Le rejet d’une folle proposition de loi franco-allemande au Parlement européen n’est en aucun cas l’assurance que la vie privée en ligne restera un acquis.

Devons-nous vraiment nous inquiéter alors ? Prenons l’exemple de la rivière Dalälven. Au printemps elle est en crue, les pires années elle peut envahir les terres sur 100 voire 200 mètres alentour. Elle inonde alors les quartiers résidentiels et les prairies. Appeler les forces de l’ordre y changera-t-il quelque chose ?

Jusqu’à maintenant, l’Histoire nous montre que les lois n’ont jamais réussi à s’opposer au développement technologique.

Walter Benjamin est l’auteur d’un essai très important, L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique, dans lequel il tire quelques conclusions très intéressantes sur les évolutions qui doivent accompagner l’avènement de la reproductibilité, malgré son échelle encore modeste à l’époque. La révolution numérique pousse la reproductibilité à un niveau que Walter Benjamin n’aurait pas imaginé même dans ses rêves les plus fous. On peut parler de reproductibilité maximale. Google est sur le point de construire une bibliothèque qui, si on lui permet d’aller au bout de son projet, rendra la plupart des bibliothèques physiques obsolètes ou surannées. Le cinéma et la presse écrite se sont retrouvés les premiers entraînés dans cette nouvelle immatérialité.

Les films, les romans ou les magazines sont facilement reproductibles. Mais ce n’est pas tout, les objets en trois dimensions, comme ceux créés par des machines programmables, peuvent aussi être reproduits, rapidement et sans laisser de trace.

Cette dématérialisation menace naturellement le droit de la propriété intellectuelle. Nous ne parlons pas ici des difficultés que Jan Guillou et une bonne douzaine d’autres auteurs pourraient affronter pour s’acheter une autre maison de campagne encore. C’est un problème social dont, pour être honnête, je me contrefous.

Le droit de la propriété intellectuelle touche à des aspects bien plus sérieux : qu’ont apporté les brevets déposés par les grandes firmes pharmaceutiques sur les trithérapies aux pays du tiers monde ? Et que dire de l’appropriation de plantes et de cochons par Monsanto ?

La société est garante d’un équilibre juste entre des intérêts contraires, l’ignorer serait un non-sens hypocrite. Une armée de défense opérante est plus importante qu’une patinoire ou que des pistes cyclables. Le Net représente une menace pour la propriété intellectuelle ? Et alors ?

La liberté de pensée et la sécurité des citoyens, autrement dit un Internet que les tribunaux aux ordres des lobbies et que les hommes politiques européens bien dressés n’auront pas encore transformé en canal gouvernemental, est sans aucun doute bien plus important que les desiderata d’une scène littéraire et musicale devenue essentiellement industrielle, une industrie que les détenteurs de droits eux-mêmes voient s’effondrer au cours de leur vie. Le souhait de vendre beaucoup de copies ne doit pas prendre le pas sur celui d’être lu, d’influencer ou de décrire son époque. Quand tel est le cas, les intérêts industriels devraient être mis de côté au profit de la défense de l’Art avec un A majuscule.

Le souci premier de tout artiste ou auteur qui se respecte est certainement d’être lu ou entendu par ses contemporains. Les moyens pour atteindre cette fin, c’est-à-dire atteindre son public, de ce point de vue ne sont que secondaires.

Les combats, toujours plus nombreux, pour défendre la formidable liberté de parole offerte par Internet, les droits civiques immatériels, que nous voyons se propager de pays en pays sont les prémices d’un libéralisme porté par la technologie et qui donc accroit notre liberté, à l’instar des changements radicaux qu’a connu le 18ème siècle.

Pour toutes ces raisons mon vote ira au parti pirate.

Reportage vidéo de la télévision Suisse Romande

URL d’origine du document
Reportage : François Roulet / Montage : Sandro Milone – 5 juin 2009 – TSR (Nouvo)

—> La vidéo au format webm

Notes

[1] Crédit photo : Jon Åslund (Creative Commons By)




Quand Microsoft sabote Firefox avec une extension non désirée !

Microsoft côté scène, cela donne cette affligeante publicité. Mais côté coulisses c’est moins reluisant.

En effet, ceux qui sous Windows ont depuis février dernier mis à jour leur framework .NET (version 3.5 Service Pack 1), ont eut la très très désagréable surprise de constater qu’une extension de plus apparaissait désormais dans leur navigateur Firefox ! (cf copie d’écran ci-dessous)

Et ils l’ont fait d’autant plus volontiers que Windows Update les invite à le faire, et que cette mise à jour était jugée par Microsoft importante (critique même) du point de vue de la… sécurité !

Or la procédure normale c’est de laisser à l’utilisateur le choix volontaire d’installer telle ou telle extension et jamais ô grand jamais de l’installer automatiquement à l’insu de son plein gré ! Et pour couronner le tout, on ne peut pas la désinstaller ! (la touche Uninstall est grisée)

On vous explique cependant sur Annoyances.org comment bidouiller la base de registres pour arriver néanmoins à bouter cette scandaleuse extension hors de votre navigateur préféré. Madame Michu appréciera la simplicité de l’opération ! De plus, le site prend soin d’ajouter la chose suivante :

This update adds to Firefox one of the most dangerous vulnerabilities present in all versions of Internet Explorer: the ability for websites to easily and quietly install software on your PC.

Je précise qu’à l’heure qu’il est je ne sais pas ce que fait concrètement cette extension, mais à la limite je m’en fous.

Bonjour la sécurité et bonjour la déontologie !

Franchement le bon moment pour envisager une migration GNU/Linux non ?

Microsoft .NET extension - Firefox

Microsoft installe une extension Firefox sans le consentement de l’utilisateur

Microsoft Installs Firefox Add-ons Sans User Consent

Michael Klurfeld – 30 mai 2009 – TechGeist
(Traduction Framalang : Olivier)

Chez Techgeist on apprécie pas trop quand les logiciels interfèrent avec d’autres logiciels sans demander la permission. Et C’est pire encore quand c’est le système d’exploitation qui s’en mêle.

Du coup on est bien remonté contre Microsoft là. En effet, en déployant un service pack pour le framework .Net, une mise à jour jugée critique et proposée automatiquement par Windows Update, Microsoft prend aussi la liberté d’installer le .Net Framework Assistant, une extension pour Firefox.

Tout d’abord, honte à vous Microsoft de vous en prendre à Firefox. Le simple fait de s’en prendre à n’importe quel logiciel est déjà un fait grave en soi, mais se débrouiller pour dégrader un navigateur, un marché sur lequel Microsoft perd peu à peu pied, est clairement un coup sous la ceinture. Ne disposant pas de tous les éléments, je ne peux pas me prononcer sur les intentions de Microsoft. Mais par contre, les logiciels qui s’installent en douce, sans la permission de l’utilisateur, j’appelle cela des logiciels malveillants.

Mais ce n’est pas tout. Non seulement avec cette extension Firefox hérite de vulnérabilités propres à Internet Explorer, mais la désinstaller relève du parcours du combattant. Vous pouvez la désactiver d’un clic. Mais malheureusement le bouton Désinstaller est grisé et inactif. Le seul moyen que j’ai trouvé pour m’en débarrasser est de modifier la base de registre (voici un guide des étapes à suivre).

Vraiment, Microsoft ? C’est ça que vous appelez jouer gentiment pour se faire apprécier des petits enfants ?