Que pensez-vous de la Fondation Bill & Melinda Gates ?

Meanest Indian - CC byJe viens de parcourir un article extrêmement critique vis-à-vis de la Bill & Melinda Gates Foundation. Le titre parle de lui-même : Bill Gates, apôtre de l’impérialisme humanitaire.

Cet article est issu de Mondialisation.ca. Je ne connaissais pas ce site mais, d’après ce que j’ai pu rapidement observer, il s’inscrit dans une mouvance altermondialiste pour le moins radicale vis-à-vis de la politique et des responsabilités des États-Unis (et son « complice » Israël) dans la situation du monde actuelle, participant comme d’autres à remettre par exemple en cause les thèses officielles sur le 11 septembre.

Il conviendra donc de parcourir l’article avec les précautions d’usage liées à ce positionnement (d’autant que cela manque parfois de sources) mais il n’en demeure pas moins qu’il pose de nombreuses questions et laisse souvent perplexe voire pantois.

D’ailleurs même l’article dédié de Wikipédia, pourtant succinct car en ébauche, propose un paragraphe « Critiques » où l’on peut lire (pour le moment) ceci :

D’après le Los Angeles Times, la Fondation Bill & Melinda Gates aurait investi 423 millions de dollars dans les entreprises ENI, Royal Dutch Shell, Exxon Mobil, Chevron Corporation et Total. Ces investissements iraient à contre-courant des objectifs de la fondation, le Los Angeles Times citant dans un dossier de huit pages le cas du delta du Niger où la fondation lutte contre la poliomyélite et la rougeole et dans le même temps finance les entreprises pétrolières qui sont responsables d’une très grande partie de la pollution du fleuve et de l’air, à l’origine de maladies notamment respiratoires.

Mais revenons à notre article initial. La thèse défendue ici est bien résumée dans la conclusion :

Sous prétexte de charité, Gates impose la loi de la finance jusque dans le domaine des solidarités internationales. A travers sa fondation, le philanthrope américain domine progressivement la scène mondiale de l’action humanitaire et impose sa suprématie donc ses dictats. Sa fondation est en cela un instrument essentiel de l’influence américaine dans le monde. Une poignée d’individus confisque ainsi l’aide humanitaire avec la passivité complice des Etats qui renoncent à leur rôle de garant du bien collectif et de la justice sociale.

La fondation Bill & Melinda Gates, c’est à la fois la privatisation de l’action humanitaire au profit des multinationales et le cheval de Troie de l’impérialisme américain.

Je vous laisse juge de ce constat. Quoiqu’on en pense, il me semble que la question suivante est assez légitime : « Mais pourquoi monter sa propre association humanitaire au lieu de faire des donations à un organisme ou à une association existants, qui partagent les mêmes objectifs et qui disposent déjà d’une expertise reconnue dans ce domaine ? ». Tout comme il est légitime de s’interroger sur le pouvoir et l’influence d’un organisme qui pèse (dixit l’article) près de 60 milliards de dollars, dépassant ainsi les budgets de l’Unesco, OMS et FMI réunis !

Plus près de nous (c’est-à-dire de la ligne éditoriale de ce blog), il y a aussi la problématique (et la « culture ») des licences et des brevets qui ont massivement contribué à faire la richesse de Bill Gates avec Microsoft. La Fondation est-elle à même de favoriser par exemple les médicament génériques[1] dans les pays qui en ont le plus besoin ? Idem pour les logiciels libres dans les plans d’éducation et du lutte contre la fracture numérique où est engagée la Fondation[2].

Un dernier extrait :

Cinq ans après, selon des chiffres de l’OMS, il n’y a toujours aucun générique disponible dans la plupart des pays en voie de développement et malgré les négociations à l’OMC pour permettre aux populations des pays en développement d’accéder à des médicaments bon marché, la politique de libre-échange des Etats-Unis réduit à néant les quelques avancées obtenues. Au mépris de leurs engagements multilatéraux, les Etats-Unis se sont lancés dans une politique effrénée d’accords régionaux et bilatéraux de libre-échange avec les pays en développement. Ces accords imposent systématiquement aux pays signataires des dispositions en matière de propriété intellectuelle, dites « ADPIC+ », plus contraignantes que celles de l’accord ADPIC (rallongement de la durée des brevets au-delà de 20 ans, extension des critères de brevetabilité, blocage de l’enregistrement des génériques, etc.). Elles limitent également le recours à un certain nombre de flexibilités prévues par la déclaration de Doha sur l’accord ADPIC et la Santé Publique, notamment le recours plein aux licences obligatoires et aux importations parallèles.

Ce n’est pas Bill Gates qui s’élèvera contre ce principe de protection des brevets et de monopole. Fondateur de la multinationale informatique Microsoft, sa fortune fut acquise grâce à une démarche commerciale agressive qui tenta d’imposer partout dans le monde un système d’exploitation et les logiciels coûteux qui les accompagnent. Ainsi, lors d’une tournée en Afrique effectuée avec son épouse pour le compte de sa fondation, il a organisé une réunion en 2003, sur le thème de « L’édification de la société de l’information en Afrique ». A cette occasion, il a qualifié Microsoft de « meilleure entreprise du monde » pour proposer des logiciels gratuits, des formations, le tout subventionné par la Gates Foundation dont les sommes énormes ont déjà séduit des pays comme l’Ouganda, l’Angola et la Namibie, les dissuadant d’utiliser les logiciels libres. A ce titre, il cherche à s’immiscer dans le projet « One Laptop per Child » qui vise à terme à équiper les enfants scolarisés des pays émergents d’ordinateurs à prix réduit, soit 100 dollars. Conformément à cette démarche, ces machines sont pourvues de logiciels libres dont Linux; voyant cela, le PDG de Microsoft, qui avait dénigré ce projet dans un premier temps, a fait ajouter une carte externe à ces ordinateurs pour pouvoir les faire fonctionner sous Windows.

Le titre de ce billet ouvre sur une question et attend vos réponses. La Fondation est-elle un agent déguisé du grand complot américain ou une réel bienfaiteur de l’humanité candidat au Nobel de la Paix ?

Notes

[1] Pour ce qui concerne cette question des médicaments génériques et plus généralement des licences et des brevets dans l’industrie pharmaceutique, on pourra lire ou relire Du bon usage de la piraterie de Florent Latrive.

[2] Crédit photo : Meanest Indian (Creative Commons By)




Libération du film d’animation Sita Sings the Blues

Sita Sings the Blues (Sita chante le blues) est un long métrage d’animation entièrement écrit et réalisé par une seule et même personne, Nina Paley. Primé au Festival international du film d’animation d’Annecy en 2008, il met en parallèle la légende hindouiste du Râmâyana et une rupture amoureuse autobiographique, en mélangeant les techniques d’animation (dessins, papiers découpés, ordinateur 2D, utilisation d’images libres de droits…). Si vous aimez les dessins animés, l’Inde, le jazz et les histoires d’amour qui finissent mal (en général), ce film de 80 min devrait vous plaire.

En voici la bande-annonce (via Framatube) :

—> La vidéo au format webm

Sita Sings the Blues vient tout de juste de passer sous licence Creative Commons By-Sa, comme l’annonce Nina Paley dans un joli message que nous avons traduit ci-dessous. Vous le trouverez en téléchargement intégral sur archive.org ainsi qu’en torrent sur le wiki du site officiel (existe également en streaming flash sur Reel 13).

Cette « libération » est un heureux évènement et un élément de qualité à ajouter à la Culture Libre. Mais elle ne doit pas cacher l’incroyable histoire des problèmes de droits d’auteur qu’a rencontré Nina Paley (et qui font d’ailleurs que ce film ne peut être considéré comme totalement libre).

Le film est en effet indissociable de l’interprète de jazz Annette Hanshaw (qui apparait d’ailleurs au générique du film comme protagoniste). Onze de ses chansons y figurent en étant complètement intégrées au scénario et à l’animation (impossible donc de changer la musique). Ces chansons datent de la fin des années… 1920 ! Autrement dit, un peu moins d’un siècle plus tard (et un quart de siècle après la mort de la chanteuse), Nina Paley pensa légitimement qu’elles étaient désormais dans le domaine public.

Mais c’était sans compter sur des subtilités juridiques que certains justifieront sans peine mais que je ne puis m’empêcher de qualifier « d’un autre âge » (excusez-moi mais l’Hadopi ça me met à cran en ce moment). Vous me corrigerez dans les commentaires mais voici ce que j’en ai compris à parcourir cet article. Les enregistrements sont bien dans le domaine public mais ce n’est pas le cas de la composition, paroles et musiques (partitions). Et du coup les ayant-droits ont d’abord demandé à Nina Paley 500 $ par chanson pour l’autoriser à être projetée dans les festivals (ce dont elle s’est acquittée), mais surtout 200 000 $ pour l’autoriser à commercialiser le DVD de son film (somme ramenée à 50 000 $ assortie de nombreuses restrictions) ! Ubuesque non ? Alors même que la diffusion de son film permettrait justement à un nouveau public de découvrir Annette Hanshaw ! Impossible alors de trouver un distributeur pour son film. Nina Payley s’en explique longuement dans cette interview.

Enfin bref, un mal pour un bien en quelque sorte, et nous voici donc avec un Sita Sings the Blues sous licence libre (dont il faut cependant aussi respecter le copyright pour le moins complexe de la fameuse musique). Mais il me plait à penser que Nina y est venue non par dépit mais par conviction (en fait un peu des deux je pense). Il me plait également à penser que Nina Paley reçoive de nombreux dons, témoignant ainsi qu’il y a une vie économique pour une culture qui souhaiterait se soustraire aux logiques oppressantes du classique et souvent mortifère copyright.

Une dernière chose. Framalang est en train de le visionner dans son intégralité et se tient prêt à en assurer le sous-titrage si l’évaluation globale se révèle aussi positive que la première impression, sachant que vous nous aideriez d’autant en nous donnant votre propre avis dans les commentaires.

Annonce de la « libération » de Sita Sings the Blues

Sita Sings the Blues

Nina Paley – 28 février 2009
(Traduction Framalang : Simon)

Cher public,


Par la présente, je te donne Sita Sings the Blues. En tant qu’élément culturel il t’appartient déjà, mais je rends la chose explicite avec une licence Creative Commons Attribution-Share Alike. Je t’invite à distribuer, copier, partager, archiver et montrer Sita Sings the Blues. Il provient de la culture partagée, et retourne à la culture partagée.

Tu n’as pas besoin de ma permission pour le copier, le partager, le publier, l’archiver, le montrer, le vendre, le diffuser ou le remixer. La sagesse conventionnelle m’intime de réclamer un paiement pour chaque utilisation de ce film, mais alors, comment feraient les gens sans argent pour le voir ? À quelle ampleur le film se disséminerait-il s’il était limité par des permissions et des droits d’auteur à payer ? Le contrôle offre une fausse impression de sécurité. La seule vraie sécurité que j’ai, est de croire en vous, de croire en la culture et de croire en la liberté.

Ceci étant dit, mes collègues et moi même allons mettre en œuvre la licence Share Alike. Tu n’es pas libre de réduire les libertés que je donne sur Sita Sings the Blues et ses dérivés, ni en y imposant un copyright, ni en y ajoutant des DRM.

Certaines chansons de Sita Sings the Blues ne sont pas libres, et ne le seront peut être jamais ; les lois régissant le droit d’auteur t’obligent à respecter leurs licences respectives. Ce n’est pas de mon fait ; pour plus d’informations sur ce sujet, tu peux lire notre page « restrictions ».

Et comment vais-je gagner de l’argent dans tout ça ? Mon expérience personnelle atteste que le public est généreux, et souhaite soutenir les artistes. Il y a sûrement un moyen de permettre cela sans contrôler centralement chaque transaction. Le vieux système économique fait de coercition et d’extorsion touche à sa fin. De nouveaux modèles émergent, et je suis heureux d’en faire partie. Mais nous continuerons de mettre cela en place avec le temps. Tu es libre de gagner de l’argent à partir du contenu libre de Sita Sings the Blues, et tu es libre de partager cet argent avec moi. Des gens gagnent de l’argent avec des logiciels libres depuis des années ; il est temps pour la Culture Libre de suivre. Je te prie de bien vouloir croire en la confiance que j’ai en tes innovations.

Si tu as des questions, n’hésite pas à nous les poser. Si tu as des idées, réalise les, tu n’as pas besoin de ma permission, ni de celle de personne (excepté les chansons mentionnées ci-dessus). Si tu constates des abus, corrige-les, mais ne sombre pas dans les détails des arcanes des lois sur le droit d’auteur. Le système de copyright voudrait que tu penses en termes de demande de permission ; je voudrais que tu penses en terme de liberté. Nous avons mis un wiki en place, pour démarrer les choses. N’hésite pas à l’utiliser.

Je dois reprendre une vie normale maintenant, et retourner faire de nouvelles œuvres. Merci pour ton soutien ! Ce film n’existerait pas sans toi.

Affectueusement

Nina Paley




Le gouvernement britannique affiche sa volonté de soutenir l’Open Source

Steve Punter - CC byLe Framablog en témoigne dans de nombreux récents articles, « ça bouge » en ce moment en Angleterre.

Dernier évènement en date en non des moindres, l’annonce d’un plan gouvernemental d’action en faveur de l’Open Source (que l’on aurait aimé traduire par « Logiciel Libre » mais c’eût été d’après nous en modifier le sens).

Ce document intitulé Open Source, Open Standards and Re-Use: Government Action Plan est actuellement entre les mains de notre équipe Framalang, mais en attendant voici comment il est évoqué sur le site de la BBC[1].

Le gouvernement anglais soutient l’Open Source

UK government backs open source

25 février 2009 – BBC News
(Traduction Framalang : Vincent)

Le gouvernement anglais a déclaré qu’il allait accélérer l’utilisation de logiciels libres dans les services publics.

Tom Watson, MP (Ndt : Membre du Parlement), ministre de l’économie numérique, a déclaré que le logiciel libre serait considéré au même titre que le logiciel propriétaire, tel que Windows.

Le logiciel libre sera adopté « quand il apporte le meilleur rapport qualité/prix », a déclaré le gouvernement.

Il a ajouté que les services publics devraient autant que possible éviter d’être « enfermés dans des logiciels propriétaires ».

Les licences d’utilisation de logiciels libres sont généralement gratuites et adoptent des standards ouverts, et le code qui constitue les programmes peut être modifié sans crainte d’enfreindre les copyrights ou la propriété intellectuelle.

D’après certains représentants de l’industrie des logiciels libres, la migration depuis les standards propriétaires pourrait faire économiser à l’état 600 millions de £ (NdT : environ 670 millions d’euros) par an.

Simon Phipps, patron de la stratégie Open Source chez Sun Microsystems, a dit que la déclaration du gouvernement britannique faisait partie d’un « mouvement global » de reconnaissance de l’Open Source dans les gouvernements.

« Nous perdons une fortune dans le logiciel propriétaire car nous payons des licences et des promesses, et nous n’exigeons pas de valeur », a-t-il dit.

M. Phipps a dit que les écoles, les ministères et les services publics auraient une « liberté cruciale » à savoir s’ils allaient payer pour le support et la formation en utilisant les logiciels Open Source.

Le plan d’action du gouvernement pourrait voir une vague de logiciels libres déployés dans des domaines tels que les applications bureautiques (traitement de texte et tableurs), la gestion documentaires et les infrastructures de bases de données, la colonne vertébrale de nombreux systèmes informatiques importants.

Plus d’ampleur

Steve Shine, vice-président Europe de Ingres, un vendeur de support Open Source, a dit que le plan d’action du gouvernement avait plus d’ampleur que les politiques adoptées dans d’autres pays, car le plan était lié aux politiques d’approvisionnement des nouveaux logiciels pour les responsables TIC.

Il a déclaré que ce mouvement avait été en partie entamé suite à une série d’échecs retentissants de projets informatiques dans les dernières années, qui reposaient sur des logiciels propriétaires.

Il a dit : « L’Open Source peut aider à éviter de nombreux coûts cachés des logiciels propriétaires, comme ceux qui font que les organisations paient à nouveau des licences s’il veulent utiliser une option logicielle à la place d’une autre. Ceci est hors de propos dans le monde du logiciel libre. »

En annonçant son plan d’action en faveur de l’Open Source et des standards ouverts, le gouvernement a déclaré qu’il voulait :

  • s’assurer que le gouvernement adopterait des standards ouverts et les utiliserait pour communiquer avec les citoyens et les entreprises qui auront adopté des solutions Open Source ;
  • s’assurer que les solutions Open Source seraient considérées convenablement et, si elles apportaient la meilleure valeur, seraient sélectionnées comme solutions pour le gouvernement ;
  • renforcer les compétences, l’expérience et les capacités au sein du gouvernement et des ses fournisseurs pour utiliser l’Open Source au mieux de son avantage ;
  • implanter une culture Open Source du partage, de la ré-utilisation et du développement collaboratif entre le gouvernement et ses fournisseurs ;
  • s’assurer que les intégrateurs systèmes et les fournisseurs de logiciels propriétaires démontreraient la même flexibilité et la capacité à réutiliser leurs solutions et produits, comme cela se fait dans le monde de l’Open Source.

Les ministères seront requis d’adopter les logiciels libres lorsqu’il « n’y a pas de différence significative de coût entre des produits Open Source ou non », à cause de sa « flexibilité intrinsèque ».

Vive réaction attendue

MM. Phipps et Shine pensent qu’on peut s’attendre à une vive réaction de la part des éditeurs de logiciels propriétaires.

« Je suis absolument certain qu’il y a eu des contacts significatifs entre les fournisseurs de logiciels propriétaires et des personnes haut-placées dans le gouvernement », a dit M. Shine.

M. Phippe a ajouté : « A court terme, les fournisseurs traditionnels vont baisser leurs prix, approcher de plus près leurs contacts et faire tout ce qu’ils peuvent pour apparaître moins chers. Mais la vraie valeur ajoutée du logiciel libre vient de sa capacité à donner une nouvelle flexibilité aux utilisateurs. »

Il a dit que l’adoption généralisée de logiciels libres dans les services publics pourrait également avoir des implications sur les usages domestiques.

« C’est déjà en train d’arriver en Angleterre. Beaucoup de particuliers utilisent Firefox et OpenOffice.org. Cela devient non seulement acceptable mais attendu. »

Notes

[1] Crédit photo : Steve Punter (Creative Commons)




Framakey : perspectives 2009

Framakey - Nojhan - Licence Art LibreL’hôte principal de ce blog, perdu quelque part entre la Grande-Bretagne et le maquis d’Hadopi, m’a demandé de venir vous faire un petit point sur les perspectives du projet Framakey sur les prochains mois (ça sortira quand ça sortira inside).
Te voici donc, ami lecteur, devant un article plus centripète que centrifuge et avouons le sans fard, plus geek que de coutume, dont l’idée est un peu de vous dire où en est la Framakey et où elle va[1].

Historique et bilan

Mais avant de commencer, rappelons en deux mots ce qu’est la Framakey.

D’habitude, sous Windows, lorsqu’on télécharge un logiciel, il faut l’installer (mais si, on l’a tous fait un jour : cliquer sur Setup, puis Suivant, J’accepte, puis Suivant 4 fois, puis revenir en arrière pour décocher la case installer la super toolbar de-la-mort-qui-tue, puis Suivant 3 fois, et enfin le bouton Installer). Ce logiciel s’installe alors le plus souvent dans le dossier C:\Windows\Program Files\LeLogiciel mais il s’éparpille aussi souvent un peu en mettant des données dans le dossier Documents and Settings, voire dans la base de registre (une base de données propre[2] à Windows conservant les paramètres de nombreux logiciels. Or, cet éparpillement est souvent inutile, et peut ralentir Windows, qui n’a vraiment pas besoin de ça pour se trainer.

Maintenant, imaginez que vous téléchargiez le même logiciel, dans un bête fichier zip. Vous dézippez où cela vous plait, vous lancez le logiciel, et… il fonctionne! Pas d’installation, pas de Suivantx12, pas de trucs qui trainent à droite ou à gauche, pas besoin de la base de registre. Tout est dans le dossier qui a été dézippé, je vous dis.
Allons plus loin : puisque le logiciel fonctionne en vase clos, alors on peut l’utiliser depuis n’importe quel dossier. Le bureau Windows. Le dossier Mes Documents. Une clé USB. Un baladeur MP3. La carte mémoire d’un appareil photo. Un lecteur réseau. etc.

C’est ce qu’on appelle un logiciel portable. Si je met les versions portables de Firefox et d’OpenOffice.org sur une clé USB, que je met la clé USB dans ma poche et que je vais au cybercafé du coin où chez ma cousine en Irlande, il suffit que je branche ma clé USB, et je retrouverai mon Firefox (marque-pages, historique et surtout extensions compris) et mon OpenOffice.org (en français, avec mon dico perso et tout et tout). Le tout exécuté depuis la clé, sans rien copier ou installer sur la machine de ma cousine ou du cybercafé (ça marche même en Chine, c’est vous dire).

Ce concept d’applications portables a toujours existé (sous Windows comme sous GNU/Linux), mais sous Windows il s’est perdu en route ces dernières années, quand Microsoft a demandé aux développeurs de ranger les paramètres de leurs applications au même endroit[3]. Il a été remis au goût du jour il y a quelques années par un américain, John Haller, qui a depuis créé le site portableApps.com.

Et la Framakey, dans tout ça ? me demandez-vous, prêt à quitter cette page (alors qu’en réalité, je teste votre résistance au syndrome Google)

La Framakey est tout simplement la première[4] initiative de démocratisation de ce concept d’applications portables pour le grand public, en proposant en un seul téléchargement d’installer facilement sur votre clé plusieurs applications portables, le tout enrobé dans une belle interface que même Tata Jeannine arriverait à utiliser.

Sortie l’été 2005, le projet a maintenant plus de 3 ans. Étant un projet 100% libre, il a connu de très nombreuses déclinaisons, puisque comme tout projet libre, chacun est encouragé à l’adapter a ses besoins. Ainsi, on a retrouvé la Framakey (ou des forks) en langue arabe[5], diffusée à plusieurs centaines de milliers d’exemplaires auprès de lycéens parisiens, auprès d’enseignants, dans des écoles primaires, en entreprise, etc. Il paraitrait même qu’un gros-industriel-plein-de-sous vend dans toutes les bonnes crèmeries une version à peine modifiée (et obsolète) de la Framakey, mais ça ne doit pas être vrai, sinon ils auraient accepté notre proposition (gracieuse) de mise à jour, ou alors ils nous auraient fait un petit don, non ?[6]… Aujourd’hui, nous estimons le nombre de Framakey diffusé à plus de trois millions d’exemplaires. Pas mal pour un projet libre.

La Framakey c’est aussi une bien belle communauté, et en tant que mainteneur du projet depuis sa création, j’en profite ici pour remercier chaleureusement tous ceux qui nous ont apporté leur aide tout au long de cette aventure et sans qui, ce n’est pas une formule, rien n’aurait été possible. C’est aussi la preuve de la force du libre, sur le plan technique (pouvoir intégrer et remixer d’autres projets libres) comme sur le plan humain (non seulement au sein de la communauté Framakey, mais aussi des échanges permanents inter-communautés avec les communautés logicielles ou celles de portableApps, de Framasoft, Dogmazic, InLibroVeritas, etc).

La Framakey évolue lentement, il faut le reconnaitre, avec une à deux versions majeures par an. Et même si techniquement, des projets comme la Liberkey (malheureusement non libre) lui sont supérieurs, j’expliquais d’ailleurs il y a peu pourquoi nous continuons à faire évoluer la Framakey face à cette stimulante concurrence.

C’est pourquoi nous avons pensé qu’il pourrait être utile de donner quelques indications sur les actions envisagées en 2009.

Les projets en cours

La Framakey 1.9

D’abord, la branche 1.x verra apparaître une nouvelle version.

  • Mise à jour de la plupart des applications, notamment OpenOffice.org en version 3.0.1
  • Nouvelle interface pour le Kiosk, basée sur jQuery
  • Modification de certains lanceurs pour une meilleure compatibilité avec Vista.
  • Ajout de quelques applications portables

http://framakey.org/Pack/PackFull1900

En dehors de l’interface (qui devrait furieusement vous rappeler quelque chose), il s’agit surtout de bénéficier d’une clé avec toutes les applications à jour. Par contre, côté développement, pas mal de travaux ont été effectués pour permettre une personnalisation plus aisée. En effet, nous pensons comme le rapportait l’infatigable et inénarrable Tristan N. qu’il faut aller (retourner ?) vers un monde de bricoleurs. Cela n’empêchera pas de livrer une Framakey aussi aboutie techniquement que graphiquement pour l’utilisateur final, mais cet utilisateur aura en plus la possibilité de bricoler le projet en fonction de ses besoins, un peu comme l’acheteur d’une voiture devrait pouvoir bricoler son véhicule comme il le souhaite (pour peu qu’il en ait l’envie). Bricoler sa Framakey a toujours été possible, puisqu’elle repose sur des technologies et des standards ouverts (Firefox + HTML/JS/CSS), mais pas forcément très simple d’accès. La version 1.9 est une version de transition qui apportera un peu plus de souplesse de ce côté là.

  • Avancement : 90%
  • Ce qu’il reste à faire : voir ici
  • Date de release estimée : 4 mars 2009 13:04:12 (au moins, on ne pourra pas me reprocher d’être précis !)

Les Framakey « Spécial Edition »

Il s’agit de versions destinées à des publics particuliers ou répondant à des « univers fonctionnels » précis.

Framakey LaTeX

La Framakey LaTeX Edition a été créée pour accompagner le Framabook « Tout… sur LaTeX » de Vincent Lozano. Il s’agit d’une version largement basée (avec l’autorisation de l’auteur !) sur l’excellente USBTeX de Nicolas Poulain, à laquelle ont été ajoutée des outils pour en faciliter l’utilisation, et des logiciels libres permettant de travailler sur l’ensemble de la chaine de publication.
Il nous faut donc la mettre à jour, et corriger quelque petits bugs.

  • Date de release estimée : RMLL 2009 (Juillet)
Framakey Education

Framasoft est historiquement lié au milieu de l’éducation nationale (que les profs, instits et autres personnels de l’EN lèvent le doigt. Vous voyez ? Vous êtes nombreux !).
La première adaptation de la Framakey a d’ailleurs été le projet « Clef en main » coéditée par le CRDP de Paris et Mostick. Depuis, la Framakey a inspiré de nombreux autres projets : dans le primaire, au collège/lycée, à l’université, pour les IUFM, etc. Voir des logiciels libres à portée de mains d’élèves[7] nous ravi et nous motive.

Il est aussi régulièrement question de travailler avec l’association de profs de maths SESAMATH qui sont autant des amis qu’une source d’inspiration. Le projet est pour l’instant en stand-by, mais nous ne désespérons pas d’avancer dans les mois qui viennent. De plus, laclasse et cyrille, deux gentils membres de la communauté Framakey, se sont donnés bien du mal pour portabiliser des logiciels éducatifs que vous retrouverez très bientôt sur le portail Framakey.

  • Date de release estimée : fin 2009
La Framakey Jeux

Il y a une demande. On sait le faire. On peut le faire. Alors on le fera 🙂

  • Date de release estimée : RMLL 2009 (Juillet)
La Framakey Handicap

Pour rencontrer régulièrement des personnes traitant du handicap et de l’accessibilité face aux logiciels (libre ou pas), nous avons décidé d’intégrer cette problématique de façon transversale en 2008 en ajoutant différents logiciels libres à tous les packs Framakey (comme une loupe ou un lecteur d’écran). Après en avoir discuté avec des professionnels du métier, nous pensons pouvoir travailler avec eux pour les aider à concevoir le contenu d’une clé spécifique.

  • Date de release estimée : 2009 (Stéphanie, si tu me lis…)
La FramaGNU

Wstryder - CC byAhhhhh. Si Framasoft avait touché 1€ à chaque fois qu’on nous posait la question « La Framakey, elle marche sous linux ? », nous n’aurions même pas besoin de lancer (très bientôt) une campagne de soutien à Framasoft !

Jusqu’ici la réponse était « La Framakey fonctionne avec Wine. On peut aussi y faire tourner des distributions légères comme SLAX ou ToutouLinux en émulation. Mais on ne fera probablement jamais de clé bootable, car 1) ça prends beaucoup de place 2) les applications sur la Framakey sont déjà presque toutes présentes dans n’importe quelle distrib, et 3) booter sur une clé, Tata Jeannine elle va galérer comme une maman ourse. »

Mais il n’y a que les imbéciles (et les développeurs JSP) qui ne changent pas d’avis, et comme on n’a pas envie d’en faire partie, on va faire un peu de teasing :

  • Oui, il y aura bientôt une Framakey incluant un système GNU/Linux bootable.
  • Oui, ce système aura un disque persistant (= les documents et les applications ajoutés sous Linux resteront sur la clé, contrairement aux LiveCD/LiveUSB)
  • Oui, il y aura des liaisons entre les deux systèmes (= je suis avec portableThunderbird sous Windows, je relève mes mails. Je reboote sous Linux, j’ouvre Thunderbird, je retrouve ces mêmes mails).
  • Oui, a priori ce système sera… Ubuntu

Houla, j’en vois qui s’énervent déjà à lire le dernier point : « Encore du Ubuntu ! Pourquoi pas (Mandriva\Fedora\Hurd.*) ? » toussatoussa.

D’abord, rappelons que Framasoft – et donc la Framakey – vise le plus large public et que, sans aucunement préjuger de qualité techniques d’une distrib, l’expérience (tout a fait subjective, mais tout à fait assumée) nous a montré que des utilisateurs comme Tata Jeannine avaient de meilleurs retours sur la communauté Ubuntu-fr qu’ailleurs.

Ensuite, rappelons que la Framakey est volontairement hackable by design et 100% libre, donc aide toi et le GNU/RTFM t’aidera.

De plus, nous avons d’excellentes relations avec la communauté Ubuntu-fr, qu’on a connu à l’époque où ils étaient, oh pas plus haut que ça, alors que maintenant même le géant vert à l’air d’un nain à côté d’eux (il n’y a bien que Chuck Norris qui puisse encore leur faire de l’ombre). Je vous avais prévenu, c’est subjectif comme point de vue.

Enfin, pour ceux qui répondraient qu’on entretient un système, blablabla, je répondrai qu’on a déjà commencé à travailler sur un outil qui permettrait de choisir sa distribution avant l’installation. Un mix entre UnetBootin (pour le choix des ditribs) et Fedora LUC pour la possibilité de créer un disque persistant. Elle est pas belle la vie[8] ?

  • Avancement : une version alpha de chez alpha, disponible pour les windowsiens existe déjà, mais c’est tellement alpha que je n’ose vous livrer de lien[9]

Date de release estimée : RMLL 2009 (Juillet) (dépendra en partie de la communauté Ubuntu-fr. C’est pas parce que ce sont des amis qu’on ne va pas leur mettre la pression 😛 )

Le retour de la version Light

On nous a souvent reproché le fait d’avoir abandonné la version Light (pour les clés de 256Mo). C’était tout simplement trop lourd de maintenir 2 packages. Grâce aux outils dont je vous parlais plus haut, développés pour la Framakey 1.9, la version light fera son retour. N’espérez pas y trouver OpenOffice.org, celui-ci a pris beaucoup d’embonpoint, et son transfert sur clé peut prendre plusieurs heures sur des clés de mauvaises qualité.

  • Date de release estimée : fin mars 2009.

La Framakey Megapack

Tata Jeannine, quand elle achète un ordinateur, elle a de fortes probabilités de se retrouver avec du Windows inside (c’est le problème de la vente liée, mais je préfère ne pas l’évoquer aujourd’hui, sous peine de cumuler ça à l’exaspération générée par Hadopi). En plus, elle a plein de logiciels, dont la plupart lui diront au bout de trente jours qu’elle doit leur donner son numéro de carte bleue, sinon, ils se mettront en grève.

Par contre, elle n’a aucun logiciel libre. Alors que pour pas un rond, ils feraient tout aussi bien le travail et, accessoirement mais pas trop, lui redonnerait une prise directe et citoyenne sur sa vie numérique.
Alors, si Tata elle téléchargeait la Framakey Megapack, en 3 clics et le temps d’un épisode de Derrick, elle se retrouverait avec 60 applications libres sur son disque dur, le menu Démarrer qui va bien et tout et tout. Et même, on lui expliquerait en quoi Firefox (yeepa !) c’est plus mieux qu’Internet Explorer (bweark !), le tout avec un peu de musique libre pour bercer ces oreilles.

  • Date de release estimée : RMLL 2009 (Juillet)

D’autres éditions en perpective

Tout est possible, mais le temps n’étant pas extensible, voilà déjà un planning bien chargé. Évidemment, les idées sont les bienvenues…

Les « Framakey webapps »

Framakey - Harrypopof - Licence Art LibreDe plus en plus d’applications qu’on utilise sont des applications web. D’ailleurs, je ne vous ai pas dit que Tata Jeannine utilisait (l’excellent) Dotclear pour raconter la vie de Puffy, son caniche nain ?
Le souci, c’est que les applications web, on aime bien les tester avant, et que c’est souvent compliqué de mettre en place un système Apache/PHP/MySQL, puis d’y installer l’appli en configurant la base et tout et tout.

Alors l’idée serait donc de proposer des applis web portables pour Windows. Par exemple : PortableDotclear.zip, je dézippe, je lance PortableDotclear.exe, et hop, me voilà avec un dotclear directement utilisable.
Portable(Drupal|wordpress|joomla|mediawiki|dokuwiki|alfresco|sugarCRM|.*), c’est possible !

D’ailleurs, Bitnami le propose déjà. Mais 1) c’est pas 100% libre, et 2) ça n’est pas portable (installation de services windows).

Éventuellement, imaginez-le couplé avec Mozilla Prism, et ça peut donner un truc vraiment sympa, non ? (Évidemment, dans les endroits hyper-connectés, l’intérêt peut être limité, mais puisqu’on veut mettre vos sites sur liste blanche…)

  • Avancement : 30%
  • Dates de release estimée : 5 à 6 paquets pour les RMLL 2009 (Juillet)

Les projets à venir

La Framakey Mac

Évidemment, il n’y a pas que Windows dans la vie, il y a Mac aussi[10].
« Et pourquoi pas une Framakey pour les Mac ? »
Il y a une demande. On sait le faire. Mais on ne peut pas le faire…

C’est tout bête, mais on n’a pas de Mac, chez Framasoft (notez qu’on m’en a prêté un, une fois, j’ai trouvé que ça ressemblait furieusement à une Fedora[11]). L’appel au don[12] est ouvert. Par contre, c’est pas pour faire mon difficile, mais s’il pouvait être 1) récent et 2) portable ou mini, ça m’arrangerait pour préserver la paix de mon ménage qui commence à trouver que le bureau ressemble furieusement à la salle des machines de Star Treck IV.

  • Date de release estimée : pas de Mac, pas de Framakey Mac.

La Framakey 2

Ah, la Framakey 2, alias Winaptic, alias « ça sortira… un jour… peut être »… Tous les libristes m’ayant croisé ces 3 dernières années ont dû repartir avec un bon mal de crâne, tellement je les ai saoulé avec ce projet (les Kazé, Paul, Sonny, et j’en passe). Le principe, c’est tout simplement un Synaptic pour Windows. Avec pour système de paquets, le … .zip (volontairement, on ne gère pas de dépendances, tout étant dans le zip). Là encore, un des problèmes de Tata Jeannine, c’est qu’elle n’a jamais entendu parler de Firefox (la pauvre) ou d’Audacity, ou d’InfraRecorder. Pourtant, ça lui serait bien utile.
Elle télécharge donc la Framakey 2 (10Mo) sur son disque dur (interne ou externe) ou sa clé USB, l’exécute et là on lui demande de quoi elle a besoin. « Un navigateur web ? Mais bien sûr qu’on a cela, je vous propose de télécharger Firefox en cochant la case à côté. Ah, et un logiciel pour enregistrer vos vinyls ? bien entendu, cochez donc Audacity. Ca sera tout ? Bien. Tant que vous êtes là, je vous signale que l’application CoolPlayer que vous aviez téléchargée existe dans une version plus récente. Souhaitez vous la mettre à jour ? Parfait. Maintenant, cliquez donc sur Télécharger et installer et allez donc regarder la fin de Derrick pendant que je travaille. »

Bref, une Framakey sur mesure.

Dans mes rêves les plus fous, elle était faite en XUL, la technologie qui motorise Firefox. D’ailleurs, entre télécharger une extension et une application, il n’y a qu’un pas…(je laisse les développeurs XUL méditer cette phrase). Mais mes rêves les plus fous… Enfin bref, une version alpha est disponible depuis plusieurs mois. Mais elle est boguée et pas très à jour… Elle repose sur aSuite pour le lanceur, et AppSnap pour le gestionnaire d’applications, avec une glue maison pour faire tourner tout ça. Grâce à Mouss (de la communauté Framakey), on a pu faire le gros des adaptations nécessaires, mais il reste encore pas mal de bugs…

Vous pouvez d’ailleurs en voir une ancienne vidéo (ça commence en gros à la moitié) :

—> La vidéo au format webm

  • Avancement : 50%
  • Date de release estimée : 2009 si tout va bien… et on ne rigole pas au fond de la salle…

Pendant ce temps là, à Vera Cruz

La roadmap serait incomplète sans parler :

  • du portail d’applications portables, qu’il faut maintenir à jour (sans parler des nouvelles applications qui y seront ajoutées sous peu),
  • du rapprochement en cours avec la communauté PortableApps.com (même si je suis critique sur leur système de packaging et description d’applications, ils sont infiniment plus gros que Framakey, et nous avons donc tout intérêt à coller à leurs normes),
  • du site web Framakey, qui sera probablement refondu dans l’année,
  • du projet, récurrent, de monter une petite boutique en ligne où vous pourriez acheter des clés de qualité à prix modique, avec la Framakey de votre choix préchargée (donc, plus la peine d’enchainer Les feux de l’amour, Derrick et Arabesque, que tous les fichiers soient copiés).

Voilà, c’était un rapide (!) tour d’horizon de « où en est Framakey, et où va-t-elle ? ». Félicitations à ceux qui auront réussi à lire jusqu’ici !
Si vous le souhaitez, et si l’hôte de ce blog en est d’accord, je reviendrais régulièrement vous donner des nouvelles de l’avancement de ces différents projets.
A moins que ça ne soit pour vous parler du FramaDVD… Mais chut, je ne vous en dis pas plus…

Marius - CC by-sa

Notes

[1] Crédits photos et illustrations : 1. Nojhan (Licence Art Libre) – 2. Capture écran Framakey 1.9 par Pyg (Creative Commons By) – 3. Wstryder (Creative Commons By) – 4. Harrypopof (Licence Art Libre) – 5. Marius (Creative Commons By-Sa)

[2] Enfin, propre, propre, c’est une façon de parler.

[3] Notez que l’idée n’est pas mauvaise en tant que telle, mais elle n’est pas toujours pertinente.

[4] Au niveau mondial, je pense bien, jusqu’à ce qu’on m’indique le contraire.

[5] Imaginez ma surprise l’été dernier quand, rencontrant un ami d’ami de nationalité libanaise, il me vanta les mérites de sa clé pleine de logiciels et qu’au lancement je découvris.. un clone de la Framakey !

[6] Attention : de l’ironie un peu agacée se cache dans cette phrase, sauras-tu la retrouver ?

[7] Certes, le journalistes fait de nombreux amalgames et contre-sens, mais pour nous l’essentiel est bien que les élèves puissent avoir librement accès à Firefox, OpenOffice.org, et bien d’autres…

[8] Attention : un presque titre de série se cache dans ce titre, sauras-tu le retrouver ?

[9] Attention : un mensonge éhonté se cache dans la phrase précédente, sauras-tu le retrouver ?

[10] Attention : un troll se cache dans cette phrase, sauras-tu le retrouver ?

[11] Attention : une vérité profonde se cache dans cette phrase, sauras-tu la retrouver ?

[12] Financier, ou carrément de machine si vous êtes sur Lyon.




Logiciels libres et éducation : la BBC s’y met aussi

Amerune - CC byRestons en Angleterre pour évoquer l’ouverture d’un récent et prometteur projet de la BBC autour du logiciel libre et de l’éducation : le BBC Learning Open Lab (dont nous avons traduit la présentation ci-dessous). On notera qu’ils préfèrent utiliser le terme « Open Source », ce qui leur permet alors d’englober sous ce vocable non seulement les logiciels mais tout ce qui va « autour » : technologies, formats, licences et contenus.

Ils ont raison de faire ces associations. Et j’aurais presque envie d’y ajouter les pratiques voire même la culture commune.

Or c’est notamment là que pour le moment « ça coince un peu » chez nous en France. Si l’influence disproportionnée d’un Microsoft n’avait pour conséquence que de retarder le déploiement de l’alternative libre qu’est OpenOffice.org, ce serait certes contrariant (perte de temps, d’énergie…) mais ce serait non critique. Après tout il ne s’agit que de remplacer un outil par un autre, fut-il libre.

Si par contre cela aboutissait à ce que le modèle et les mentalités « propriétaires » perdurent ou pire se renforcent (comme on peut le voir actuellement sur le site Educnet qui a décidé de ne pas modifier ses édifiantes présentations) alors là oui, effectivement, cela pourrait devenir à la longue plus problématique[1].

Je résume rapidement le petit tour britannique réalisé par le Framablog au cours de ces derniers mois. L’école se bouge avec le Becta qui est capable de pondre un rapport lucide sur Vista et MS Office, d’engager des discussions sur les formats bureautiques (en face à face avec Microsoft) et les formats associés aux tableaux numériques, et de créer un site ambitieux d’enseignants autour du Libre. Ajoutez-y donc également aujourd’hui la BBC et le politique qui pointe le bout de son nez, et vous obtenez le portrait d’un pays en mouvement qui semble se poser les bonnes questions et agir en conséquence.

Je ne désespère pas de vous parler d’une contrée plus proche la prochaine fois…

À propos du BBC Learning – Open Lab

About BBC Learning – Open Lab

(Traduction Framalang : Don Rico)

Le BBC Learning – Open Lab est le fruit d’une collaboration entre BBC Learning, BBC Future Media and Technology et BBC Backstage.

Le terme « Open Source » (OS) désigne la technologie, les logiciels et le contenu que tout un chacun est libre d’utiliser, adapter, améliorer et redistribuer librement. La licence appliquée à l’Open Source est différente de celle qui s’applique au « logiciel propriétaire ». Le logiciel propriétaire est toujours accompagné d’un accord de licence qui en restreint l’utilisation et interdit de le modifier, de le copier et de le distribuer gratuitement.

Le BBC Open Lab est un espace où vous pouvez vous créer un réseau et collaborer avec d’autres utilisateurs en mesure de vous faire profiter de leurs compétences et de vous aider dans un domaine que vous connaissez peut-être mal. Utilisez ce site pour accéder aux derniers matériaux Open Source mis à disposition par la BBC, visionner des projets modèles, partager des idées et des informations concernant l’Open Source, lire des billets de blogs publiés régulièrement, obtenir aide et conseils. Vous êtes enseignant, vous avez trouvé un outil en ligne qui ne correspond pas tout à fait à vos attentes ? Postez un commentaire sur Open Lab afin de partager vos idées de modifications et d’améliorations, et voyez si la communauté peut vous aider.

Travaillant en partenariat avec BBC Backstage, notre but est de soutenir l’engagement de la BBC envers l’ouverture et de…

  • Soutenir le développement de code, d’applications et de projets libres d’utilisation et axés sur l’éducation.
  • Encourager les enseignants, les développeurs et les étudiants à innover grâce à la création et à la distribution d’outils et de contenus ouverts.
  • Faciliter la communication intersectorielle depuis le primaire jusqu’à l’enseignement supérieur, en encourageant la transmission du savoir et la culture de pratiques et de réflexions novatrices.
  • Contribuer à l’essor de l’Open Source au Royaume-Uni.
  • Fournir des ressources pédagogiques nouvelles : backstage.bbc.co.uk/openlab

Notes

[1] Crédit photo : Amerune (Creative Commons By)




Largage de liens en vrac #12

Marcelo Alves - CC by-saDites, vous n’avez pas mieux à faire que de venir fouiner par ici ? En plus c’est comme d’habitude, des logiciels non testés, mal classés et de qualité disparate.

Non, franchement, vous devriez plutôt parcourir notre magnifique dossier sur Wikipédia ou alors, je ne sais pas moi, acheter un framabook pour l’offrir à votre ami(e) déçu(e) de n’avoir rien reçu(e) à la Saint-Valentin.

Vous êtes toujours là ? Bon ben tant pis pour vous. On aura tenté de vous dissuader mais c’était sans compter sur votre légendaire entêtement[1].

  • GimpPhoto : « GimPhoto is GIMP modification with new menu layout, great selection of plugins, and many additional resources for more professional look and feel as digital photo retouching and image editing application package. » Est-ce clair ou je traduis ? En tout cas c’est du GIMP dans sa dernière version 2.4.3, avec toujours cette idée fixe de séduire les photoshopeurs, à comparer (dans les commentaires ?) avec Gimpshop (dont le site a subi une invasion de sauterelles pubs ces derniers jours). Tant qu’à parle de GIMP voici 50 tutoriels (en anglais).
  • Flowplayer : Des lecteurs pour lire les vidéos .flv en streaming flash, il en existe pas mal (et même en libre) mais celui-là, sous GPL, est peut-être le meilleur qu’il m’ait été donné de voir (comme ça, a priori). Tout est configurable et la version playlist a vraiment de la gueule.
  • Chevreto : Un script espagnol prometteur pour proposer à vos internautes une site pour déposer facilement et très joliment (Ajax inside) vos images, qu’elles proviennent de votre ordi ou du Net (+ redimensionnement à la volée). Pourrait donc devenir le ImageShack du libre en quelque sorte.
  • Burning Mill Express : Pour Windows only, un logiciel de gravure (CD, DVD, ISO…) qui semble bien réalisé. Je ne suis vraiment pas un spécialiste, quelqu’un peut nous dire ce qu’il vaut pa rapport à la concurrence libre sur cet OS ?
  • AribaWeb : Un framework pour nous faire de puissantes applications Web en Ajax et tout le toutim. Si vous arrivez à nous pondre un Gmail du libre avec, merci de nous prévenir dans les commentaires.
  • Dicts.info : C’est pas du libre mais c’est bien pratique. Des tonnes de dictionnaires pour traduire un peu dans toutes les langues (par exemple de l’estonien au coréen). Typiquement le genre de sites qui attend que les gens viennent pour nous coller de la pub mais évitons le procès d’intention…
  • iPodME : Celui-là je ne sais pas trop si il mérite le référencement mais bon… il s’agit de convertir ses vidéos pour son iPod (sources disponibles mais j’ai pas vu la licence). Que pour Windows avec .NET dedans (c’est bien ce que je vous disais).
  • Twitter sur Pidgin : Pour suivre Twitter (mais aussi Identi.ca) sur le célèbre logiciel de messagerie instantané. L’occasion de rappeler les liens vers le compte Framasoft de Twitter et Identi.ca (nos derniers tweets sont dans la colonne de droite de cette page du reste).
  • Open Web Messenger : Application de chat en ligne permettant à vos visiteurs de discuter avec vos techniciens, commerciaux ou tout autre intervenant, sous licence Eclipse.
  • Lavoisier : Une bien belle police Open Source signalée par theClimber.
  • 10 obscure Linux applications you need to try : À ne lire que si vous êtes geek, admin et sous GNU/Linux (et que vous comprenez l’anglais mais, bon, si vous répondez aux trois premiers critères le quatrième devrait naturellement suivre).

Notes

[1] Crédit photo : Marcelo Alves (Creative Commons By-Sa)




Projet de loi Création et Internet : l’April s’insurge et appelle à la mobilisation

Qualifié, malheureusement à juste titre, de DADVSI 2, le projet de loi « Création et Internet » (ou Hadopi) vient de chauffer aux oreilles de l’April. Il faut dire qu’il y a de quoi et le rapporteur (et benjamin) de l’UMP Franck Riester d’en prendre pour son grade.

Je vous laisse, je dois contacter mon député…

Riposte graduée : le rapporteur s’oppose à l’interopérabilité, l’April appelle à la mobilisation

URL d’origine du document

APRIL – 23 février 2009 – Communiqué de presse

Trois ans après DADVSI, le gouvernement et la majorité semblent n’avoir rien retenu des débats sur l’interopérabilité[1] et le logiciel libre. Lors de l’examen du texte « Création et Internet » en commission des lois de l’Assemblée nationale, le rapporteur UMP Franck Riester s’est opposé à l’interopérabilité des moyens de sécurisation imposés par le projet de loi, au motif que l’interopérabilité empêcherait le libre choix de l’utilisateur ! L’April s’insurge et appelle chacun à contacter son député pour l’alerter.

Véritable DADVSI 2, le projet de loi « Création et Internet » déjà validé par le Sénat est actuellement programmé à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Après un examen en commissions, le texte sera examiné en séance à partir du 10 mars 2009.

L’essentiel du projet de loi est bien d’échafauder une nouvelle autorité administrative – l’Hadopi[2] – qui aura pour but de faire une répression de masse sur la base de relevés informatiques. Mais il prévoit également d’imposer aux titulaires d’un accès à Internet des « moyens de sécurisation » visant à empêcher que leur connexion soit utilisée pour commettre des infractions.

« On ignore tout de la nature de ces moyens de sécurisation : on ne sait pas ce qu’ils font, ni où ils s’installent, et quelle est la maîtrise que l’utilisateur pourra en avoir, » déplore Alix Cazenave, responsable des affaires publiques de l’April. « Qu’ils ne fassent pas le jeu d’éditeurs pratiquant la vente liée serait un minimum ! » L’April a d’ailleurs été reçue par des députés de tous les groupes pour leur faire part de ses questions et de ses inquiétudes[3].

Pourtant sur la question précise de l’interopérabilité, les députés Jean Dionis du Séjour (Nouveau Centre) et Patrick Bloche (Socialiste, Radical et Citoyen) se sont heurtés à un refus catégorique du rapporteur, motivé par un argument que nul n’aurait imaginé : il est simplement défavorable à l’interopérabilité[4] ! Il s’est de même opposé à ce que l’abonné soit exonéré de sa responsabilité lorsqu’il n’existe pas de moyens de sécurisation adaptés à sa configuration. L’April avait pourtant, dès le 6 mars 2008[5], alerté le conseiller juridique de la ministre de la culture sur le risque que comporte ce genre de mesures pour l’interopérabilité et le logiciel libre. À l’époque déjà, aucune réponse n’avait été apportée quant à la nature de ces moyens de sécurisation, le conseiller Henrard se contentant d’affirmer que la loi créerait le marché (sic).

« Ce que Franck Riester ne comprend pas, c’est que l’interopérabilité est le libre choix des consommateurs. On se croirait de retour en 2006 avec le benjamin de l’époque, Laurent Wauquiez, qui avait au moins eu l’honnêteté de reconnaître son incompétence[6]. En 2005, la SACEM voulait nous faire changer nos licences[7] ; Franck Riester voudrait-il nous obliger à changer de système d’exploitation ?», s’interroge Frédéric Couchet, délégué général de l’April.

« Monsieur Riester est la preuve qu’il reste encore à l’Assemblée nationale des députés opposés à l’interopérabilité et au logiciel libre[8]. Il soutient un dispositif qui va, une fois de plus, pénaliser sans aucune justification les auteurs et utilisateurs de logiciels libres, les mettant dans une situation d’insécurité juridique absolument inacceptable. Le groupe UMP a décidément bien choisi son rapporteur : tout comme cette loi, il nie la réalité technique, protège des intérêts particuliers et souffre d’un archaïsme affligeant » s’insurge Benoît Sibaud, président de l’April.

Comme pour DADVSI, l’urgence est déclarée. Comme pour DADVSI, ce texte est annoncé comme le remède miracle contre le téléchargement non autorisé d’œuvres en peer-to-peer. Comme pour DADVSI, des mesures « techniques » de contrôle d’usage sont imposées. Comme pour DADVSI, l’interopérabilité est méprisée. Comme pour DADVSI, le logiciel libre est ignoré, et ses utilisateurs menacés.

C’est pourquoi, comme pour la loi DADVSI, l’April appelle tous les citoyens attachés au logiciel libre à contacter leurs députés[9] et à les alerter afin qu’ils s’opposent à cette nouvelle menace. Elle les invite également à écrire au rapporteur Riester pour lui demander de revenir sur ses positions inacceptables.

Notes

[1] rappelons au passage l’article 7, adopté le 16 mars en seconde délibération à l’unanimité, faisant de la France le premier pays d’Europe à véritablement défendre activement l’interopérabilité, première mondiale saluée Outre-Atlantique. Communiqué du 18 avril 2006 « Projet de loi "DADVSI" : à contre-courant, le Sénat rejette l’interopérabilité et prône la brevetabilité du logiciel ».

[2] Haute Autorité pour la diffusion et la protection des œuvres sur Internet, créée à partir de l’Autorité de régulation des mesures techniques de la loi DADVSI.

[3] Notamment les porte-paroles des groupes Nouveau Centre (NC), Socialiste, Radical et Citoyen (SRC), Gauche Démocratique et Républicaine (GDR), ainsi que par la rapporteure pour avis (UMP) de la commission des affaires culturelles. Elle doit également être auditionnée par le rapporteur pour avis (UMP) de la commission des affaires économiques.

[4] Extrait du compte-rendu n°28 de la réunion de la commission des lois, mercredi 18 février 2009, séance de 9h30 : — Art. L. 331-30 (nouveau) du code de la propriété intellectuelle : Liste des moyens de sécurisation efficaces : La Commission adopte un amendement du rapporteur précisant les consultations auxquelles la HADOPI devra procéder avant de rendre officielles les spécifications fonctionnelles des moyens de sécurisation et supprimant l’établissement d’une liste officielle de ces spécifications. Elle est ensuite saisie d’un amendement de M. Jean Dionis du Séjour précisant que les moyens de sécurisation devront être interopérables et mis à la disposition des consommateurs gratuitement. – M. le rapporteur : Les moyens de sécurisation mis en place ne sauraient être gratuits, à l’image des logiciels de contrôle parental, mis à la disposition des consommateurs à titre payant, même si leur prix est modique. – M. Jean Dionis du Séjour : J’accepte de supprimer de mon amendement la condition de gratuité. – M. le rapporteur : J’en viens au second objet de l’amendement : l’interopérabilité. Je n’y suis pas favorable. Il faut laisser au consommateur sa totale liberté de choix en fonction de son système d’exploitation. L’interopérabilité n’est pas nécessaire pour les consommateurs et elle est trop contraignante pour les éditeurs de logiciels. La Commission rejette l’amendement, puis adopte deux amendements du rapporteur, le premier visant à préciser que la HADOPI établit une liste labellisant les moyens de sécurisation, le second de nature rédactionnelle. Elle rejette ensuite, par cohérence, un amendement de M. Patrick Bloche précisant que les moyens de sécurisation devront être interopérables et mis à la disposition des consommateurs gratuitement.

[5] Voir le compte rendu de la réunion avec Laurent Ladouari et Olivier Henrard.

[6] « Nous devons reconnaître honnêtement les limites de nos compétences techniques – certains d’entre nous en ont apporté la preuve, moi le premier hier soir – sur des sujets extrêmement techniques comme le MP4 ou les fichiers MP3. » – Laurent Wauquiez, député UMP benjamin de l’AN sous la XIIème législature, porteur de la partie civile de l’amendement Vivendi, lors de l’examen du DADVSI. Franck Riester est « benjamin du groupe UMP et troisième plus jeune député de l’hémicycle » selon ce portrait.

[7] « Vendredi 18 novembre 2005, au ministère de la Culture, le SNEP et la SCPP déclarent aux auteurs de Logiciel Libre : « Vous allez changer vos licences. » La SACEM ajoute : « Vous allez arrêter de publier vos logiciels. » Et se déclare prête à « poursuivre les auteurs de logiciels libres continuant de divulguer leur code source » – Extrait du communiqué de presse de la FSF France du 25 novembre 2005.

[8] Contrairement au prédécesseur de Franck Riester sur la 5ème circonscription de Seine-et-Marne, Guy Drut, UMP lui aussi, qui a été un des questeurs à l’origine de la migration vers le logiciel libre du poste de travail des députés français.

[9] Pour une liste des députés, leurs fiches individuelles et leurs coordonnées, voir également le Mémoire Politique disponible sur le wiki de la Quadrature du Net.




« Vous êtes trop cons, je laisse tomber ! »

Nils Geylen - CC by-saDans notre récent billet Du choix risqué du logiciel propriétaire et étranger pour sa défense nationale, nous avions évoqué le cas de Conficker, ce ver informatique qui a récemment affecté (et infecté) bon nombre d’ordinateurs sous Windows.

Carla Schroder a fait sa petite revue de presse autour du sujet[1] et… les bras lui en sont tombés ! À dire vrai, elle en a carrément gros sur la patate. Tout y passe : les journalistes, les militaires, les sociétés d’antivirus, les clients de Microsoft et bien sûr ce « système d’exploitation de merde ».

Ce qui nous donne, vous l’aurez compris, un article coup de gueule et coup de sang un « brin » polémique qui ne manquera pas de faire réagir dans les commentaires[2].

J’abandonne. Windows ou la preuve que les gens sont trop cons pour utiliser des ordinateurs.

I Give Up. Windows Is Proof That People Are Too Stupid To Use Computers.

Carla Schroder – 12 février 2009 – LinuxToday Blog
(Traduction Framalang : Olivier et Don Rico)

Et trop cons ou faux-culs pour reconnaître en Windows l’échec qu’il est vraiment. S’il s’agissait de n’importe quel autre type de produit, on l’aurait banni de tous les pays du monde depuis des lustres. Pour parler de la dernière attaque virale affectant Windows, le ver Conficker, la BBC prend son ton nonchalant habituel, ne le décrit comme un ver spécifique à Windows qu’au bout de plusieurs paragraphes, cite des vendeurs d’antivirus comme si leur avis avait un quelconque intérêt, alors que ce ne sont que des nuisibles, pour finir par rejeter la faute sur les utilisateurs :

« Le ver se répand par les réseaux peu sécurisés, les cartes mémoires et les PC qui ne sont pas à jour (…) Microsoft a fait son travail en protégeant les ordinateurs familiaux, mais le ver continue sa progression dans les entreprises qui ont ignoré la mise à jour (…) Bien sûr, le vrai problème vient des utilisateurs n’ayant pas appliqué le correctif sur leurs ordinateurs », ajoute-t-il.

Veuillez m’excuser, il faut que j’aille me défouler sur quelque chose.

BIEN SÛR que c’est la faute des utilisateurs. Ils continuent à utiliser le pourriciel le plus cher et le plus mal conçu de tout le Système solaire. Mais ses défauts incurables ne leurs sont pas imputables. Abandonnez aussi l’idée que ces utilisateurs puissent être secourus par Linux, nous ne voulons PAS qu’ils utilisent Linux. « It is impossible to make anything foolproof, because fools are ingenious » (NdT : « Il est impossible de concevoir un produit infaillible, car les idiots sont ingénieux » Jeu de mots sur foolproof, infaillible et fool, imbécile).

Quand on parle de logiciels malveillants, ce sont des logiciels malveillants pour WINDOWS, PAS des logiciels malveillants pour les ordinateurs

Les armées américaine et anglaise sont mises à mal par des logiciels malveillants pour WINDOWS. Pas des logiciels malveillants pour ordinateurs, des logiciels malveillants pour WINDOWS. Chers journalistes, prenez note. C’est un fait de la plus haute importance. Je sais à quel point vous détestez les faits et les recherches, je vous l’apporte donc sur un plateau. Ne me remerciez pas. Même Wired, dont on attend pourtant mieux, s’est fendu de ces quelques lignes, du mauvais journalisme de première classe :

« La progression rapide d’un ver au sein du réseau de la Défense donne des sueurs froides aux ingénieurs informaticiens du ministère de la Défense. L’utilisation des clés USB, des CD, des cartes mémoire et de tout autre support de stockage est donc prohibée sur leurs réseaux pour essayer d’enrayer la progression du ver. »

À aucun moment l’article ne fait mention de Windows ou de Microsoft. Ça nous a bien fait marrer quand la Royal Navy a mis Windows sur ses sous-marins il y a tout juste quelques semaines. Mais la plaisanterie a assez duré :

« Le ministère de la Défense a confirmé aujourd’hui qu’il a été victime d’un virus ayant causé l’arrêt d’un "petit nombre" de serveurs de la Défense dont, en particulier, le réseau d’administration des bâtiments de la Royal Navy. »

Ils minimisent évidemment le problème, ne vous faites pas de bile, ce n’est rien de grave, circulez il n’y a rien à voir. Après tout, les têtes nucléaires sont à jour avec le SP4 ou une autre connerie du genre. Et là non plus personne n’évoque le mot tabou Windows.

Des avions de chasse cloués au sol par une infection bénigne, sans importance

Celle-là, elle est à se tordre :

« Des avions de chasse français n’étaient pas en mesure de décoller après que des ordinateurs militaires ont été infectés par un virus… Les appareils étaient dans l’incapacité de télécharger leur plan de vol après que les bases de données ont été infectées par un virus Microsoft malgré une alerte donnée quelques mois auparavant. »

Et là encore le problème est minimisé : « L’échange d’informations a été affecté, mais aucune donnée n’a été perdue. C’est un problème de sécurité que nous avions déjà simulé. » Il faut reconnaître que le reporter a eu le courage de dire Microsoft et Windows. Mais malheureusement c’est encore l’utilisateur qui est pointé du doigt.

Microsoft ameute les troupes !

Je vous ai réservé la meilleure histoire pour la fin. Je n’invente RIEN ! Microsoft elle-même, la plus grosse entreprise de logiciel, connue pour les milliers de milliards de dollars qu’elle a engrangé dans ses coffres-forts, qui dépense des milliards de dollars pour le développement de Windows mais dont les codeurs ne parviennent pas à se sortir de ce pétrin, offre donc une récompense :

Microsoft ameute les troupes pour choper Conficker
« Dans un effort coordonné à l’échelle mondiale pour venir à bout de ce que les experts désignent comme ce qui pourrait être le pire logiciel malveillant, des grands noms de l’industrie, du monde universitaire et des services de police joignent leurs efforts dans la chasse au ver Conficker… Microsoft coordonne des actions visant à arracher la tête du ver – offrant une récompense de 250 000 dollars à quiconque pourrait fournir des informations menant à l’arrestation et à la condamnation des responsables de la propagation de Conficker sur Internet. »

Vous devez vraiment lire cet article, on le croirait extrait du Journal des aberrations. Il nous conte comment cette ligue d’experts s’est mise en branle pour combattre ce ver : vendeurs d’antivirus, services secrets, ICANN, Verisign et les universités. Voici la chute de l’histoire :

« Conficker utilise la fonction Autorun de Windows – celle qui lance automatiquement les CD-Rom ou les DVD quand on les insère dans l’ordinateur.
Autorun facilite la vie des utilisateurs, mais désactiver AutoRun, c’est enquiquinant, d’après Nazario. »

Enquiquinant ? J’ai bien lu ? ENQUIQUINANT ???

Je ne sais pas trop, je suis tiraillé entre l’envie d’utiliser un langage peu châtié et celle de me mettre à pleurer. J’imagine alors que Conficker n’est « qu’un léger désagrément ». Et j’imagine que s’ils finissent pas attraper et punir les auteurs de Conficker, les 36 millions d’autres vers Windows, chevaux de Troie Windows et autres logiciels malveillants Windows disparaîtront tous.

Personne ne rejette la faute sur Microsoft

Faut-il donc être un petit génie pour comprendre que « Tiens, si j’arrête d’utiliser ce système d’exploitation de merde je n’aurai plus ces problèmes ! Tiens, peut-être que le fabricant mérite bien un petit procès pour avoir fait subir au monde cette bouse, une bouse qui a engendré des milliards de dollars de dégâts et qui a mis en danger la sécurité publique ! »

Pensez-vous. Après avoir vu le même scénario se répéter des centaines de fois au cours des 13 dernières années, tout ce qu’on peut en conclure, c’est que :

  • Les journalistes sont des crétins.
  • Les militaires sont des crétins.
  • L’industrie des antivirus n’est qu’un énorme parasite qui se satisfait bien de son inefficacité.
  • Les clients de Microsoft sont des crétins.
  • Tout le monde est corrompu… des corrompus bon marché qui plus est.

La seule hypothétique lueur d’espoir que nous ayons, c’est que les milliers de vers Windows vont se mettre en guerre les uns contre les autres et détruiront chaque machine Windows sur Terre. Mais le remède ne serait que de courte durée, car même après un holocauste nucléaire Windows la première chose que les gens feraient serait de se relever, de s’épousseter et d’essayer de redémarrer leur machine pour voir si ça ressuscite leur système.

Notes

[1] Pour comparer, voici une revue de presse francophone (by Google) parlant de Conficker. Est-ce mieux décrit que ce qu’évoque Carla ?

[2] Crédit photo : Nils Geylen (Creative Commons By-Sa)