Un livre numérique avec DRM n’est pas un livre nous dit l’Assemblée

En réalité, avec Apple ou Amazon, ce ne sont pas des livres qui sont vendus, mais des licences de lecture…

« C’est inattendu et complètement fou », s’enthousiaste à juste titre le site ActuaLitté, qui poursuit : « Durant l’examen du Projet de loi de Finance 2014, le député Éric Alauzet est venu défendre l’amendement de la députée Isabelle Attard. L’idée était simple : imposer une TVA maximale pour les vendeurs comme Apple ou Amazon, qui ne proposent que des licences d’utilisation et non la vente de fichiers en propre. »

Or, contre tout attente, c’est-à-dire ici aussi bien l’avis défavorable du rapporteur que du gouvernement, l’amendement a été adopté hier à l’Assemblée !

Vous trouverez ci-dessous toute la (savoureuse) séquence en vidéo accompagnée de sa transcription[1]. Avec notamment un Noël Mamère qui conclut ainsi son propos : « C’est aussi donc un droit à l’information, un droit à la culture et un droit à la lecture qui doit être un droit inaliénable et considéré comme un bien commun. »

La TVA réduite concerne aujourd’hui les livres papiers. Si on veut qu’il en aille de même avec les livres numériques alors il faut qu’ils soient sans DRM sinon ce ne sont plus des livres. Tel est le message important qui est passé hier à l’Assemblée. Apple et Amazon en encapsulant leurs fichiers numériques et en imposant leurs périphériques ne nous vendent pas des livres mais un service à usage restreint et durée limitée dans le temps.

Merci au groupe écologiste en tout cas pour cette véritable avancée qui pourrait bien appeler d’autres conquêtes, comme en témoigne l’échange ci-dessous que nous avons eu avec Isabelle Attard sur Twitter

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Remarque 1 : Rien n’est joué cependant, comme nous le rappelle l’April, la loi de finances doit désormais être examinée par le Sénat puis par la navette parlementaire avant son adoption définitive.

Remarque 2 : Isabelle Attard vient également de déposer une proposition de loi visant à consacrer, élargir et garantir le domaine public (voir aussi cette vidéo qui évoque la question spécifique des musées).

—> La vidéo au format webm
—> Le fichier de sous-titres

Transcription

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet, pour soutenir l’amendement no 22.

M. Éric Alauzet. Alors que la vente de livres sous forme dématérialisée est en pleine croissance, deux types de produits sont disponibles. En proposant des livres en système fermé, les acteurs historiques ont trouvé le moyen de verrouiller leur clientèle : en réalité, ce ne sont pas des livres qui sont vendus, mais des licences de lecture, assorties de contraintes qui n’existent pas pour le livre de papier. Ainsi, quand vous achetez un livre numérique chez Amazon ou chez Apple, vous ne pouvez le lire que sur un appareil autorisé par cette entreprise.

Parallèlement, il existe des livres numériques en système dit ouvert, soutenus par la majorité des acteurs concernés – auteurs, éditeurs, bibliothécaires, responsables politiques –, qui revendiquent un plus grand respect des droits du lecteur, notamment en essayant de promouvoir l’interopérabilité des livres au format électronique. Le statut de ces livres est très proche de celui des livres de papier : vous pouvez les lire, les prêter, même les revendre – bref, en disposer à votre guise. De ce fait, nous considérons que, contrairement aux livres en système fermé, les livres en système ouvert ont toute légitimité pour bénéficier de la même TVA que les livres de papier, et c’est ce que nous proposons par cet amendement. Pour conclure, je souligne que, sur cette question, nous sommes observés par la Commission européenne, car il ne s’agit pas vraiment d’un livre, mais d’un service.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

M. Christian Eckert, rapporteur général. La commission estime qu’il s’agit là d’un sujet intéressant, mais complexe. Comme vous le savez, la France se bat pour que la TVA à taux réduit puisse s’appliquer aux livres électroniques. Or, vous proposez de faire de ce principe une exception. Je comprends votre intention, mais cela risque de fragiliser la position de la France dans les négociations en cours, où nous espérons obtenir une généralisation du taux réduit de TVA à tous les livres, quel que soit leur support. Je vous invite par conséquent à retirer votre amendement, monsieur Alauzet ; à défaut, je demanderai à notre Assemblée de le repousser.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. Nous nous battons, au sein de l’Union européenne, pour que l’ensemble des supports de lecture bénéficie du taux réduit de TVA. C’est l’un des éléments de notre combat en faveur de l’exception culturelle, de l’accès pour tous à la culture et du livre. Comme vient de le dire M. le rapporteur général, prendre des dispositions dérogatoires ne peut que porter atteinte à la portée de notre combat, qui n’est déjà pas si facile à mener. En adoptant un tel amendement, nous risquons d’affaiblir notre position vis-à-vis de nos interlocuteurs, et de mettre en péril notre capacité à atteindre l’objectif que nous nous sommes fixé. Je vous invite donc également à retirer cet amendement, monsieur le député.

Mme la présidente. La parole est à M. Noël Mamère.

M. Marc Le Fur. Allez-vous nous parler de la Bretagne, monsieur Mamère ?

M. Noël Mamère. Nous pourrions effectivement en parler, puisque nous parlons de livres et qu’il est de très bons auteurs bretons. Malheureusement, si ces livres sont publiés sous la licence d’Apple ou d’Amazon, nous ne pourrons pas les faire lire à nos enfants. De même, sous licence fermée, nous ne pourrons prêter aux personnes de notre entourage les excellents livres de Svetlana Alexievitch, qu’il s’agisse de La Fin de l’Homme rouge ou de La Supplication, ouvrage très instructif sur les conséquences de la catastrophe de Tchernobyl.

M. le ministre nous dit, à juste titre, qu’il ne faut pas mettre en péril les négociations en cours, dans le cadre desquelles nous cherchons à nous opposer à l’accord sur le marché transatlantique qui se dessine entre l’Union européenne et les États-Unis. Nous avons, paraît-il, sauvé l’exception culturelle. Fort bien, mais si notre amendement n’était pas adopté, nous risquerions de lui porter un coup fatal en laissant libre cours à Apple et Amazon, sinon pour exercer leur dictature – le mot est un peu fort –, du moins pour mettre à bas l’exception culturelle dans le cadre du marché transatlantique.

Bref, nous devons nous protéger, au niveau français comme au niveau européen. Tel est l’objet de notre amendement, qui vise à sauver le droit à la lecture, notamment le droit à revenir sur un livre que l’on a déjà lu. Nous sommes sans doute nombreux ici à avoir apprécié des auteurs, dans les ouvrages desquels nous souhaitons à nouveau nous plonger. Or, avec le système d’Apple et d’Amazon, ce sera impossible. En même temps que le droit à la lecture, c’est donc aussi le droit à l’information et le droit à la culture que nous défendons, car il s’agit de droits inaliénables, considérés comme des biens communs.

Mme la présidente. La parole est à M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Je n’ai pas l’expérience de M. le ministre en ce qui concerne les négociations européennes, mais je pense que le risque qu’il évoque n’existe pas. Au contraire, si risque il y a, c’est celui lié au fait de défendre le taux réduit de TVA sur ce qui est en réalité un service, et ce qui est à craindre ensuite, c’est que le livre électronique ouvert ne suive le livre électronique vendu sous système fermé. La transparence n’est pas vraiment le maître-mot en la matière, et les personnes achetant des livres électroniques vont finir par s’apercevoir, au bout de quelques semaines ou quelques mois, que le livre en leur possession ne fonctionne plus et qu’elles n’ont en réalité acquis qu’une licence, qu’elles vont devoir racheter au même distributeur ! Il y a, je le répète, un grand risque à ne pas dissocier le livre électronique vendu sous système fermé de celui vendu sous système ouvert.

Mme la présidente. Si j’ai bien compris, vous maintenez votre amendement, monsieur Alauzet ?

M. Éric Alauzet. Je le maintiens, madame la présidente.

(L’amendement no 22 est adopté.)

Notes

[1] Source de la vidéo et du texte sur le site de l’Assemblée.




Grâce à Wikileaks on a la confirmation que l’accord TPP est pire qu’ACTA

Merci à Wikileaks d’avoir révélé hier une version de travail tenue secrète de l’accord Trans-Pacific Strategic Economic Partnership, plus connu sous l’acronyme TPP.

La France ne faisant pas partie des pays directement concernés, on n’en parle pas beaucoup dans nos médias. Mais on sait depuis longtemps que ce sont les USA qui donnent le la dans tout ce qui touche au copyright international.

Plus que donner le la, ils dictent la loi. Et celle qui se prépare ici est tout simplement scélérate…

TPP

La fuite du chapitre sur la propriété intellectuelle du Partenariat Trans-Pacifique confirme que cet accord est pire qu’ACTA

TPP IP Chapter Leaked, Confirming It’s Worse Than ACTA

Glyn Moody – 13 novembre 2013 – TechDirt.com
(Traduction : Barbidule, Penguin, Genma, MFolschette, baba, mlah, aKa, Alexis Ids, Scailyna, @paul_playe, Mooshka, Omegax)

par le service du pas-étonnant-que-le-secret-soit-si-bien-gardé

Cela fait longtemps que nous attendions une fuite majeure du Partenariat Trans-Pacifique (TPP) rédigé en secret ; grâce à Wikileaks, nous en avons enfin une (voir aussi directement le pdf). Le texte est long et lourd à lire, en partie à cause de toutes les parties entre parenthèses sur les points où les négociateurs ne se sont pas encore mis d’accord. Même si le brouillon est assez récent — il est daté du 30 août 2013 — un grand nombre de ces points y restent ouverts. Heureusement, KEI a déjà rassemblé une analyse détaillée mais facilement compréhensible, que je vous encourage vivement à lire en entier. En voici un résumé :

Le document confirme les craintes sur le fait que les différentes parties sont prêtes à étendre les limites du droit de la propriété intellectuelle, et à restreindre les droits et libertés du consommateur.

En comparaison des accords multilatéraux existants, l’accord du TPP sur la propriété intellectuelle propose l’octroi de nouveaux brevets, la création d’une propriété intellectuelle sur les données, l’extension des termes de protection pour les brevets et copyrights, l’accroissement des privilèges des ayants droit, et l’augmentation des peines pour infraction à la propriété intellectuelle. Le texte du TPP réduit le champ des exceptions pour tous les types de propriété intellectuelle. Négocié dans le secret, le texte proposé est néfaste pour l’accès au savoir, néfaste pour l’accès aux soins, et profondément néfaste pour l’innovation.

Bien que de nombreux domaines soient concernés par les propositions de la copie de travail — l’accès aux soins vitaux seraient restreints, tandis que la portée des brevets serait étendue aux méthodes chirurgicales par exemple — les effets sur le copyright sont particulièrement significatifs et troublants :

Collectivement, les dispositions du droit d’auteur (dans le TPP) sont configurées de manière à étendre les termes du droit d’auteur de la convention de Berne au-delà de la vie plus 50 ans, créant de nouveaux droits exclusifs, et fournissant bon nombre de nouvelles directives spécifiques pour gérer le copyright dans l’environnement numérique.

Voici quelques-unes des extensions de durée proposées :

Concernant les durées de copyright, le TPP définit les bases comme suit. Les États-Unis, l’Australie, le Pérou, Singapour et le Chili proposent une durée de 70 ans après la mort de l’auteur pour les personnes physiques. Pour des œuvres appartenant à une entreprise, les États-Unis proposent 95 ans de droits exclusifs, alors que l’Australie, le Pérou, Singapour et le Chili proposent 70 ans. Le Mexique veut une durée de 100 ans après la mort de l’auteur pour les personnes physiques et 75 ans après la mort de l’auteur pour des œuvres appartenant à une entreprise. Pour des travaux non publiés, les États-Unis veulent une durée de 120 ans.

Un problème plus technique concerne l’utilisation du « test en trois étapes » qui agira comme une contrainte supplémentaire sur de possibles exceptions au copyright :

Dans sa forme actuelle, l’espace des exceptions tel que défini par le TPP est moins vaste et plus restrictif que celui du traité 2012 de l’OMPI à Pékin ou celui du traité 2013 de l’OMPI à Marrakech, et bien pire que l’accord ADPIC. Bien que cela implique des problèmes légaux complexes, les ramifications politiques sont simples. Les gouvernements auraient une marge de manœuvre plus restreinte pour évaluer les exceptions dans l’éducation, dans les citations, dans les affaires publiques, dans les actualités et dans les autres exceptions « spéciales » de la Convention de Berne ? Pourquoi un gouvernement voudrait-il abandonner son autorité générale pour réfléchir à l’aménagement de nouvelles exceptions, ou pour contrôler les abus des détenteurs de droits ?

Ceci est un bon exemple de comment le TPP n’essaie pas seulement de changer le copyright en faveur de ceux qui veulent l’étendre au maximum, mais essaie aussi d’instaurer un copyright qui serait facile à renforcer à l’avenir. En voici un autre, dans lequel le TPP veut empêcher le retour à un système de copyright qui nécessite une inscription — ce genre de système ayant été proposé comme un moyen de pallier aux problèmes qui surviennent à cause de la nature automatique de l’attribution du copyright :

Le TPP va au-delà de l’accord ADPIC pour ce qui est de l’interdiction de l’instauration de formalités pour le copyright. Bien que le problème des formalités puisse sembler être un problème facile à résoudre, il y a un bon nombre de flexibilités qui seront éliminées par le TPP. À l’heure actuelle, il est possible d’avoir des exigences de formalités pour des œuvres appartenant à la sphère nationale et d’imposer des formalités à de nombreux types de droits liés, incluant ceux protégés par la Convention de Rome. Ces dernières années, les créateurs et les théoriciens de la politique du copyright ont commencé à remettre en question les bénéfices de l’enregistrement des œuvres et autres formalités, en particulier à la lumière des problèmes liés aux durées de copyright étendues sur de nombreuses oeuvres orphelines.

Comme vous pouvez vous en douter, le TPP demande à ce qu’il y ait des protections solides de type DRM ; mais ici encore, il cherche à rendre les choses pires qu’elles ne le sont déjà :

La section sur le droit d’auteur inclut également un long discours sur les mesures de protection technique, et en particulier, la création d’un motif de poursuites spécifique contre le fait de casser les mesures techniques de protection. Les USA veulent que ce motif de poursuites spécifique s’étende même aux cas où le droit d’auteur n’est pas applicable, comme par exemple les œuvres du domaine public, ou bien les données qui ne sont pas protégées par le droit d’auteur.

Cela rendrait illégal le fait de contourner les DRM, même si ceux-ci sont appliqués à du contenu qui se trouve dans le domaine public — les enfermant alors une fois de plus, de façon efficace et permanente. Enfin, il est intéressant de remarquer que dans la sous-section fixant les dommages et intérêts pour violation de copyright, on peut y lire ce qui suit :

Pour déterminer le montant des dommages et intérêts en vertu du paragraphe 2, les autorités judiciaires seront habilitées à examiner, entre autres, toute mesure légitime de valeur que le détenteur du droit soumet, ce qui peut comprendre les bénéfices perdus, la valeur des biens ou des services concernés, mesurée en se basant sur le prix du marché, ou sur le prix de vente au détail suggéré.

C’est exactement la tournure qui a été utilisée pour ACTA, et qui a été retrouvée dans le récent accord de libre-échange entre l’UE et Singapour. Cela résume assez bien comment le TPP s’appuie directement sur ACTA, tandis que les autres mesures évoquées ci-dessus montrent comment il va bien au-delà et ce à plusieurs égards.

Voilà pour les mauvaises nouvelles. La bonne nouvelle, c’est que nous avons maintenant une version très récente de ce qui pourrait être la partie la plus controversée de l’accord. Dans les semaines à venir, nous sommes susceptibles de voir de nombreuses analyses détaillées exposant au grand jour le caractère ô combien pernicieux cet accord pour le public des pays participant aux négociations.

L’espoir étant qu’une fois qu’il en sera informé, il fera connaître son sentiment à ses représentants politiques comme il l’a fait avec SOPA et ACTA — et avec le même résultat final.




Quand la communauté OpenStreetMap aide à sauver des vies aux Philippines

La forte mobilisation de la communauté OpenStreetMap après le passage du terrible typhon Haiyan aux Philippines fournit une aide précieuse à la la Croix-Rouge sur le terrain.

« Quand les défenseurs des données ouvertes discutent à propos des licences de données, ils discutent rarement en termes de vie ou de mort. »

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Comment les éditeurs de cartes en ligne aident la Croix-Rouge à sauver des vies aux Philippines

How Online Mapmakers Are Helping the Red Cross Save Lives in the Philippines

Robinson Meyer – 12 novembre 2013 – The Atlantic
(Traduction : Garburst, Penguin, Genma, goofy, MFolschette, JLoDoesIT, fcharton, bob, Lydie, Mooshka, aKa, Omegax)

Des bénévoles à travers le monde sont en train de construire une infrastructure géo-numérique pour aider l’organisation des secours aux victimes du typhon Haiyan.

Il faudra des mois avant que nous ne connaissions les réels dégâts provoqués par le terrible typhon Haiyan. Les pertes actuelles de vies humaines liées à la tempête ne sont pour l’instant qu’une estimation. Les humanitaires venant du monde entier s’envolent maintenant vers l’archipel, ou sont seulement en train d’arriver. Avec les Philippins, ils vont venir en aide aux survivants et commencer à reconstruire.

Mais ils pourront être aidés par une technologie formidable, une collaboration humanitaire mondiale et massive rendue possible par le biais d’Internet.

De quoi s’agit-il ? D’une carte détaillée des zones touchées par le typhon Haiyan, qui n’existait pas il y a trois jours lorsque le typhon a frappé.

Depuis samedi, plus de 400 contributeurs ont effectué près de 750 000 ajouts sur la carte en ligne libre des Philippines et de ses environs.

Ces contributions reflètent l’état de la carte avant le passage du typhon, mais elles aideront les sauveteurs de la Croix-Rouge et les bénévoles à prendre des décisions cruciales afin de savoir où envoyer de la nourriture, de l’eau , des équipements.

Il est très facile ici d’exagérer, mais il est très probable qu’aux Philippines à l’heure actuelle, les données et logiciels de cartographie libres — ainsi que la communauté qui les supporte — sauveront des vies.

Le Wikipédia des cartes

Les changements ont été faits dans OpenStreetMap (OSM), une sorte de Wikipédia des cartes. OSM se veut être une carte complète du monde, libre d’utilisation et modifiable par tous. Créée en 2004, la plateforme a maintenant plus d’un million d’utilisateurs.

J’ai parlé avec Dale Kunce, un ingénieur de géolocalisation senior de la Croix-Rouge américaine, sur la façon dont l’aide apportée par les volontaires créant les cartes pouvait améliorer la situation aux Philippines.

La Croix-Rouge, à l’échelle internationale, a commencé récemment à utiliser des logiciels et des données libres au sein de ses différents projets, dit-il. Les logiciels libres réduisent ou éliminent les coûts cachés, ou le montant nécessaire pour que les choses continuent de fonctionner après le départ de la Croix-Rouge. N’importe quel logiciel ou donnée issu de la Croix-Rouge est aujourd’hui sous licence libre ou Creative Commons.

Bien qu’OpenStreetMap ait déjà été utilisé dans des crises humanitaires, c’est ici la première fois où la Croix-Rouge coordonne son utilisation avec celle des volontaires.

Comment les modifications ont-elles été effectuées ?

Les quelques 400 bénévoles qui ont édité OSM ces derniers trois jours ne sont pas tous des cartographes professionnels. À l’initiative de la branche humanitaire d’OpenStreetMap sur Twitter, l’appel fut lancé pour cartographier les zones qui se sont trouvées sur le chemin de la tempête.

À quoi ressemble la cartographie ? Généralement, il s’agit de « traçage » des routes dans OSM en se basant sur des données satellitaires. L’éditeur d’OSM met les images satellite en arrière-plan — sur lesquelles les infrastructures comme les routes sont clairement visibles — et au-dessus, la représentation du monde tel qu’il est cartographié par OSM. Les bénévoles peuvent alors tracer le chemin d’une route, comme cela est montré dans cette image GIF animée, créé par MapBox, une startup originaire de Washington :

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Les bénévoles peuvent également dessiner les immeubles dans la partie Mapbox, en utilisant le même éditeur visuel. Depuis que Haiyan a frappé, les bénévoles ont ainsi retracé quelque 30 000 bâtiments.

Les cartes, sur le terrain

Comment des données cartographiques aident-elles les personnes sur le sol des Philippines ? Tout d’abord, elles leur permettent d’imprimer sur place des cartes en utilisant les donnée d’OSM pour ensuite les redistribuer sur le terrain. La Croix-Rouge américaine a envoyé quatre responsables de haut niveau aux Philippines, et parmi eux, Helen Welch, une spécialiste de la gestion de l’information, a apporté avec elle plus de 50 cartes papier décrivant la ville de Tacloban et d’autres zones fortement touchées.

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La ligne rouge montre la trajectoire du super-typhon Haiyan et les zones colorées montrent où les volontaires ont complété OpenStreetMap ce week-end. Notez l’étendue des modifications à Tacloban, une ville de plus de 220 000 habitants et qui est la plus touchée par le phénomène climatique.

Ces cartes ont été imprimées le samedi, avant que les volontaires n’aient fait la majorité des changements dans les zones concernées sur OSM. Quand ces nouvelles données seront imprimées sur le terrain, elles incluront presque tous les tracés des bâtiments, et les secouristes auront une meilleure représentation de l’endroit où les bâtiments « fantômes » devraient se trouver. Elles seront aussi sur papier, de manière à ce que les sauveteurs puissent y écrire, y dessiner et y indiquer des lieux.

Welch a atterri il y a 12 heures, et Kunce a dit qu’on lui avait déjà envoyé trois ou quatre cartes actualisées.

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Une partie de la ville de Tacloban avant puis après sa cartographie par l’équipe d’OpenStreetMap Humanitarian (HOT). Les routes, les immeubles et les plans d’eau n’existaient pas avant que les contributeurs les ajoutent (@RBanick).

La Croix-Rouge a commencé à vouloir utiliser des données géospatiales après le gigantesque tremblement de terre en Haïti en 2010. En utilisant des données satellitaires pré-existantes, les volontaires ont cartographié la quasi totalité de Port-au-Prince dans OSM, créant des données qui devinrent la colonne vertébrale pour le logiciel qui a aidé à organiser l’aide et à gérer les opérations de recherche.

Les efforts considérables des volontaires ont convaincu les dirigeants de la Croix-Rouge américaine d’augmenter les équipes travaillant sur la cartographie numérique et les systèmes d’information géographique (SIG). Depuis cette décision, ils ont constaté une augmentation énorme de la qualité et de la quantité de cartes.

Mais ce n’est pas tout ce que les cartes peuvent faire.

La National Geospatial-Intelligence Agency (NGA, agence nationale de renseignement géospatiale), gérée par le département de la Défense des États-Unis, a déjà récupéré des images satellitaires des Philippines. Cette agence a décidé où se situaient les dégâts les plus importants, et a envoyé les coordonnées de ces zones à la Croix-Rouge. Mais, ce lundi à 19 h, la Croix-Rouge n’avait toujours pas les images pour ces zones.

Le but de l’équipe géospatiale de la Croix-Rouge, déclare Kunce, était d’aider les hommes sur le terrain à « prendre des décisions basées sur des preuves, pas des intuitions ». L’équipe « leur a fourni toutes les données possibles ». Qu’est-ce que cela signifie ? Grâce aux volontaires, la Croix-Rouge sait où les routes et bâtiments devraient être. Mais jusqu’à ce qu’ils aient le second jeu de données, décrivant la zone après le typhon, ils ne savent pas où se trouvent effectivement les routes et bâtiments. Tant qu’ils n’ont pas ces nouvelles données, les volontaires ne peuvent décider, par exemple, quel itinéraire parmi trois ils peuvent utiliser pour envoyer de l’eau à un village isolé.

À l’heure actuelle, ils ne peuvent pas prendre ces décisions.

Kunce a déclaré que le Département d’État américain était en négociation avec la NGA pour que les images satellites puissent être mises à la disposition de la Croix-Rouge. Mais, pour le moment, rien n’a encore été publié.

Quand les défenseurs des données ouvertes discutent à propos des licences de données, ils discutent rarement en termes de vie ou de mort. Mais à chaque heure qui passe pendant lesquelles la Croix-Rouge ne reçoit pas d’images satellite, ce sont des décisions optimales qui ne peuvent pas être prises, pour savoir où envoyer des équipements ou encore où mener des opérations de sauvetage.

Et une fois que les images satellites seront arrivées, les bénévoles OSM à travers le monde pourront alors les comparer aux structures d’avant la tempête, marquant chacun des 30 000 bâtiments comme indemnes, endommagés ou détruits. Cette phase, qui n’a pas encore commencé, va aider les secouristes à hiérarchiser leurs efforts.

OSM n’est pas la seule organisation à solliciter l’aide de volontaires en ligne afin d’aider les Philippines : MicroMappers, dirigé par un vétéran des efforts d’OSM en Haïti, a également fait des appels à des bénévoles pour trier des tweets, et ainsi déterminer les zones où les secours étaient les plus nécessaires.

Kunce m’a dit que la plus large diffusion commerciale des cartes électroniques a contribué de manière générale à leur croissance tant en quantité qu’en qualité au travers des différentes organisations humanitaires.

« Si vous mettez une carte entre les mains des gens, ils vont vous en demander une autre », a déclaré Kunce. Espérons que le gouvernement va fournir de meilleures cartes à la Croix-Rouge — et aux secours qui sont sur le terrain — et ce aussi vite que possible.




Chapitre III — Post-it, grands maîtres et menue monnaie

Toujours plus à l’ouest, notre écriveur de fond est de passage à Brest, où l’on trouve par ailleurs des initiatives et des activités libristes bien intéressantes.

Le monde qui l’entoure, le Pouhiou le reluque et le relooke, il fait son équi-libriste sans fil et sans filet entre les rencontres roboratives, les jouissances de l’écriture et les fins de mois difficiles qui commencent le 10 novembre. Accompagnez Pouhiou, envoyez-lui de gros poutous et de petits touittes, encouragez-le tandis qu’il en est bientôt à mi-parcours de son défi graphomane.

Lisez-le.

J’irai écrire chez vous épisode 3 : Brest (7-10 novembre)

3 jours à Brest… c’est un peu frustrant tant ça passe vite. Les rencontres, les échanges sont si riches que j’ai parfois du mal à trouver le temps d’écrire. Mais mine de rien, on avance…

5 heures de blabla entre Rouen en Brest : check.

Pour aller de Rouen à Brest, j’ai retrouvé le bon vieux covoiturage. Avec la question qui tue : « qu’est-ce que tu vas faire là bas ? » — Je vais écrire. Mon 3e roman. Qui est libre de droits. Et je passe novembre à l’écrire chez les gens… Le voyage avec Eric, Cynthia et les autres fut une longue discussion passionnante : est-ce que le Libre, si ça se généralise, ça peut marcher ? Et là on rêve du monde de demain, genre relooking sociétal. Sous la pluie entre Rouen et Brest. On a envie d’y croire. On a peur des abus. On découvre que nous on n’a pas envie d’abuser. On réalise que certains (genre Apple) abusent. On s’échange des séries à télécharger, aussi. Et on partage la voiture d’Eric. C’est marrant comme parfois, le monde de demain s’invite dans aujourd’hui.

J’ai écrit chez Moosh

pouhiou chez moosh Arrivé à Brest, je suis rejoint par Moosh et Igor. Qui crient « Ninjaaa ! » pour traverser le passage piéton me séparant d’eux. Avec ses longs cheveux et sa frange encadrant son visage, Moosh pourrait avoir l’air d’une maîtresse d’école. Si ce n’était la joie pure, la gourmandise et la malice qui l’habitent constamment. Igor, lui, est un matou à la jolie barbe. Moosh et Igor, chez eux, illes se parlent avec des voix kawaï. Ils ont un panneau Keep Calm and Eat Cupcake et un grrros chat qui semble avoir suivi le conseil. Et tout leur décor est à l’avenant : coloré, épicé de petites touches qui, simplement, mettent en joie. Moosh et Igor semblent jouer à vivre, mais jouent avec le sérieux d’enfants espiègles et appliqués. Du coup, je leur ai fait des Outrageous Cookies.

On vit entouré de créativité.

Plus je voyage, et plus je rencontre des gens qui, à leur niveau, parfois même sans s’en rendre compte, créent. Peut-être que ça vient de moi. Il est possible que je n’attire que de dangereux esprits fertiles qui goupillent du code, des images, des histoires (et autres artisanaleries) dans leur coin. Mais n’empêche. C’est beau à voir. Les amis étudiants en cinéma. Le pote webdéveloppeur et photographe (résultat à suivre). La Moosh qui travaille à son roman à grand renfort de post-it sur de grandes feuilles. Moosh, elle, écrit comme un besoin : un besoin aussi impitoyable que la hauteur des barres qu’elle veut atteindre. Écrire c’est un jeu, et jouer est une affaire sérieuse. Moi, j’ai juste hâte de la lire.

Qui me dira comment qu’on fait ?

Moosh me fait découvrir des grands noms du story-telling. Des théoriciens qui ont passé beaucoup d’énergie à développer leur méthode pour expliquer le racontage d’histoire. La scénarisation. La caractérisation. Je sais que ce sont des outils passionnants. Quand j’ai fait du théâtre, j’ai fait le tour des méthodes : Jouvet, Stanislavsky, Artaud, Boal… Et je n’y arrive toujours pas. À chaque fois que je lis une théorie, je ne vois qu’un enfermement. Un angle toujours trop fermé, une formalisation forcément étriquée. Parce que personne n’est capable de couvrir toutes les façons de créer. Car aucune rationalisation n’a assez de mots et de concepts pour y parvenir. Un metteur en scène / prof de théâtre me disait : « on n’enseigne que soi ». Du coup, les maîtres qu’on présente comme des autorités : ça m’énerve. C’est marrant, c’est justement le thème du livre III : grands maitres et petits disciples.

Avancées…

Le livre III se porte bien. Je viens de finir le chapitre 2 (sur huit) et je suis vraiment surpris par les formes qu’il prend. Il visite l’histoire des NoéNautes à contre-courant, et c’est assez jouissif. Je sais maintenant que le premier jet ne sera probablement pas achevé au 30 novembre. Je crois réussir à écrire 50 000 mots, mais je vois que ce roman sera plus long. J’essaie de prendre le temps, mais le temps de vivre et le temps d’écrire ne sont pas séparables : ils se nourrissent. Et c’est là le nerf de la guerre : le temps. Du temps libéré par l’argent, comme toujours. On devrait pouvoir avoir le temps de vivre, d’écrire, d’échanger… sans qu’une journée ne coûte forcément X heures de SMIC. Mais non. Le revenu de base n’est pas à l’ordre du jour. Quoiqu’il y ait des citoyen-ne-s d’Europe qui croient que ça peut changer.

…et sous.

Donc je regarde le compte en banque. Il me reste 200 € (et le découvert ˆˆ) pour finir le mois. Trajets inclus. Ooops. Et là je reçois un email qui fait chaud au cœur. Un mec qui souhaite me faire un don, mais ne veut pas passer par des intermédiaires type paypal ou Flattr. Qui souhaite me faire un virement. Je lui envoie mon RIB. Et je découvre peu après qu’il m’a soutenu comme si tu achetais 30 livres des NoéNautes. Juste parce que (à l’instar de Ploum qu’il te FAUT suivre) j’expérimente des manières de se libérer de l’emploi. Voilà une aide inespérée qui tombe à point ! Ça et tous les flattr reçus le mois dernier (encore une fois : essaie flattr, teste le web payant et la reconnaissance directe !), et je suis paré pour continuer !
N’oublie pas que tu peux aussi (et surtout) faire un don à Framasoft, qui offre un cadre, un soutien et une voix aux expériences comme les miennes.
Moi, je file écrire et découvrir le chapitre III !

À tout biental,

— Pouhiou. keep clam eat a cupcake




Les Anonymous doivent-ils laisser tomber le masque ?

Une traduction un brin polémique autour du fameux masque symbolisant les Anonymous.

Aussi joli soit-il, il pose quelques problèmes qui peuvent effectivement contrarier la posture et brouiller le message des actions de cet étrange et fuyant collectif.

Le masque fait référence à Guy Fawkes, personne historique anglais du XVIIe siècle, mais il a pour auteur le dessinateur contemporain David Lloyd de V pour Vendetta. Il est devenu célèbre après l’adaptation de la BD au cinéma. Film produit par Time Warner qui détient les droits à l’image sur le masque et à qui on doit payer une obole à chaque exemplaire du masque vendu (légalement).

Premier problème, le masque est sous copyright classique. Deuxième problème, il appartient à l’une de ces multinationales souvent prises pour cible par les Anonymous. Et, dernier problème, il semblerait qu’il soit produit dans les pires conditions du capitalisme mondialisé, c’est en tout cas ce que le laisse croire cette photo qui a semé le trouble et provoqué l’article très critique ci-dessous.

On aurait aimé qu’il fut dans le domaine public. Chiche qu’on demande tous à Time Warner combien ils veulent pour qu’il en soit ainsi et qu’on monte un crowdfunding dans la foulée pour récolter la somme 😉

Vincent Diamante - CC by-sa

L’hypocrisie des Anonymous a été dévoilée. Et maintenant ils font des pieds et des mains pour se défendre.

Anonymous have been exposed as hypocrites. Watch them try to wriggle out of it

Martha Gill – 6 novembre 2013 – The Telegraph (blog)
”(Traduction : lyn, Eiyeron, MFolschette, Catalaburro, Sky, M0tty + anonymes)’

Anonymous est une organisation définie surtout par ce que ses membres ont choisi de se mettre sur la tête, le fameux masque de V pour Vendetta. Mais depuis hier le masque a connu quelques problèmes techniques. Il semblerait qu’il défigure celui qui le porte.

Le jour de Guy Fawkes, juste à temps pour l’opération Million Mask March, cette photo de Reuters est apparue en page d’accueil de Reddit. Elle montre les masques fabriqués en masse dans une usine au Brésil. Ce n’est peut-être pas un atelier clandestin, mais c’est pourtant le mot que beaucoup ont à la bouche actuellement (d’autres photographies en suivant ce lien).

Cela ne correspond guère avec l’image du groupe. Anonymous lutte contre les effets du capitalisme globalisé – protestant contre de grandes entreprises menant la vie dure aux ouvriers. Et pourtant, on peut voir ces ouvriers, dans de mauvaises conditions de travail, fabriquant les masques des protestataires. Par ailleurs, on sait depuis pas mal de temps que Time Warner, une des plus grandes entreprises audiovisuelles au monde, fait du bénéfice chaque fois qu’un de ces masques est vendu.

Tout cela n’est-il pas légèrement… hypocrite ?

Le compte pro-Anomymous @youranoncentral a essayé de calmer Twitter : « Ecoutez tous, nos masques ont été fabriqués dans un pays en voie de développement. Nous sommes les seuls hypocrites. »

Et plusieurs personnes partagèrent des points de vue similaires à sayheykid24 sur Reddit : « Comment les gens pensent que ces masques ont été faits ? Pensaient-ils qu’ils étaient fait à la main et avec amour par des artisans opposés au grand capital ? »

En effet, que croyions-nous ? Il serait plus simple, plus économique et plus efficace pour les Anonymous de faire fabriquer des masques à la chaîne dans des pays en voie de développement. C’est généralement comme ça que de tels objets sont fabriqués. Cela serait également beaucoup demander à Anonymous que de s’assurer qu’aucune grande entreprise ne tire profit de leurs protestations. Et forcément, étant donné qu’Anonymous est un petit groupe faisant face à de grosses organisations sans scrupules, ils voudront réaliser l’opération la plus percutante possible, quitte à être aussi sans scrupules. Ils peuvent difficilement se permettre de ne pas l’être.

Mais si nous pensions cela nous aurions tort. Ces pressions économiques sont la raison pour laquelle l’industrie du disque a réprimé le piratage numérique et aussi pourquoi Mastercard et Visa ont mal agi envers certains clients – tous des ennemis, tous des Anonymous attaqués pour ces mêmes raisons. Étant donné qu’Anonymous demande aux entreprises de prendre une position inconfortable mais morale contre le système auquel elles sont soumises, si eux-mêmes n’y parviennent pas, ils sont alors eux-mêmes hypocrites. (Fabriquer un masque de Guy Fawkes est plus simple à réaliser chez soi, non ?)

Est-ce important ?

Bien sûr que ça l’est. C’est vrai que les Anonymous ne sont pas les seuls hypocrites. Mais tous les hypocrites ne sont pas entièrement dépendants de leur posture morale. Le fait de punir le mauvais comportement d’autrui fait partie intégrante du message des Anonymous – ils suggèrent de les rejoindre pour être de côté des gentils. Cela signifie que le groupe repose uniquement sur son intégrité morale – et s’ils ne peuvent se permettre de jouer selon leurs propres règles, ils ne peuvent certainement pas non plus se permettre de les enfreindre.

Le dernier problème avec le masque recensé à cette date a montré son (pas si vilain) visage hier. Il s’avère que, bien que cet accessoire soit pratique pour les vendettas masquées, il l’est moins pour se mettre publiquement en valeur. Que se passe-t-il quand la marche organisée, basée sur la notion d’anonymat, attire une célébrité tel que Russel Brand parmi ses rangs ? Brand a résolu le problème en tweetant des photos de lui-même portant son masque. Encore une fois, quelle ironie…




L’école selon Microsoft : comment j’ai appris à ne plus m’en faire et à aimer l’éducation privatrice et fermée

Paris, le 7 novembre 2013. Communiqué de presse.

Deux ans après la convocation d’une centaine d’inspecteurs de l’Éducation nationale au siège de Microsoft France, l’April, Framasoft, le CNLL, SavoirsCom1 et l’Aful s’étonnent d’une nouvelle entorse à la neutralité scolaire et à l’intérêt du service public d’éducation.

Le 19 novembre 2013, plusieurs responsables de l’Éducation nationale se déplacent au siège de la société Microsoft1. Michel Pérez, Inspecteur général de l’Éducation nationale, Catherine Becchetti-Bizot, Inspectrice générale, Directrice du Comité Stratégique pour le Numérique à l‘École ainsi que des représentations des associations de collectivités viennent découvrir une étude coordonnée par Ludovia Magazine, en association avec Microsoft, Intel et SFR2.

Le titre de l’étude se veut neutre : « Investissement des collectivités en matière de numérique à l’école ». Le dispositif de communication ne l’est pas. Par leur présence à la table ronde organisée par Microsoft, les Inspecteurs généraux légitiment l’appropriation de l’Éducation nationale par une société privée. Les signataires de ce communiqué dénoncent fermement cette nouvelle entorse à la neutralité scolaire et à la mission de service public de l’éducation nationale.

Les collectivités territoriales souhaitent-elles vraiment favoriser l’exploitation commerciale de l’école par quelques grandes sociétés pour lesquelles l’éducation est exclusivement un marché captif ?

Ce n’est pas la première fois que des responsables de l’Éducation nationale se déplacent au siège de la société Microsoft. Lors du salon Éducatec-Éducatice 2011, les inspecteurs de l’Éducation nationale chargés de mission nouvelles technologies (IEN-TICE) s’étaient vu convoqués par leur hiérarchie pour tenir leur journée annuelle au siège de la société Microsoft. L’April et Framasoft avaient déjà dénoncé « une véritable entorse à la neutralité scolaire et vivement regretté que les programmes de ces journées ne mentionnaient pas les logiciels et ressources libres3. Malgré la circulaire du premier ministre « Pour l’usage des logiciels libres dans l’administration »4.

Ce n’est pas non plus qu’un accident de parcours. Les services de l’Éducation nationale envoient depuis plusieurs mois des signaux inquiétants. Le rapport de l’Inspection générale sur « La structuration de la filière du numérique éducatif : un enjeu pédagogique et industriel »5 est très peu documenté sur les logiciels et ressources libres ou, au mieux minimise leur apport. Et le rapport n’aborde que très succinctement l’une des dispositions importantes du texte de loi pour la refondation de l’école qui recommande : « l’incitation au développement de ressources numériques se fera notamment en faveur de logiciels libres et de contenus aux formats ouverts »6. Les signataires de ce communiqué auraient pu, avec d’autres, aider les rédacteurs dans leur travail afin d’arriver à un rapport plus exhaustif.

« L’école ne doit pas être un marché captif des éditeurs privateurs du numérique. L’école que nous appelons de nos vœux, ne doit pas enseigner « avec  » le numérique sur des produits privateurs dans une approche de type B2i qui forme avant tout des consommateurs passifs » déclare Rémi Boulle, vice-président de l’April, en charge du groupe de travail Éducation. Dans la continuité des principes hérités du siècle des Lumières, elle doit former des futurs citoyens responsables, capables de réfléchir de façon libre, indépendante voire les créateurs de demain.

Stefane Fermigier, Vice-Président du CNLL, rappelle pour sa part « La place du logiciel libre dans le système éducatif français est un enjeu majeur pour la compétitivité de notre économie. Pour continuer d’être à sa place de leader mondial du logiciel libre, la France doit aussi se doter d’une politique éducative forte dans ce domaine, en privilégiant l’usage d’outils pédagogiques libres, en fondant l’apprentissage du numérique à l’École sur les logiciels libres, et en enseignant les technologies et méthodologies propres au logiciel libre dans les filières informatiques et scientifiques ».

Enseigner « avec  » le « numérique » dans toutes les disciplines nécessiterait a minima :

  • un véritable enseignement de la science informatique ;
  • d’authentiques cours de technologie qui ne seraient plus limités, en collège, à la seule étude d’objets physiques dans lesquels l’informatique qu’ils pourraient incorporer est ignorée et traitée comme une boîte noire  ;
  • un authentique apprentissage raisonné des logiciels et de l’internet qui n’est actuellement enseigné nulle part ;
  • un enseignement des technologies et méthodologies propres au logiciel libre dans les filières scientifiques et informatiques ;
  • l’utilisation de logiciels libres et la diffusion sous licence libre des ressources utilisées dans le service public de l’éducation ;
  • une réflexion opérationnelle (approfondie) sur les contenus de cet enseignement, dès l’école primaire.

C’est également enseigner l’apprentissage du travail collaboratif, incompatible avec des ressources privatrices DRMisées, des formats de fichiers non interopérables, des licences qui ne permettent pas la libre circulation et le libre partage des savoirs. L’École ne doit plus être contrainte dans des systèmes privateurs et fermés.

Nous nous tenons à la disposition de l’Inspection générale et de Mme Catherine Becchetti-Bizot pour toute information complémentaire sur les logiciels et ressources libres pour l’éducation et leur souhaitons un riche salon Éducatec-Éducatice.

À propos de l’April

Pionnière du logiciel libre en France, l’April est depuis 1996 un acteur majeur de la démocratisation et de la diffusion du Logiciel Libre et des standards ouverts auprès du grand public, des professionnels et des institutions dans l’espace francophone. Elle veille aussi, dans leurre numérique, à sensibiliser l’opinion sur les dangers d’une appropriation exclusive de l’information et du savoir par des intérêts privés.

L’association est constituée de plus de 3 600 membres utilisateurs et producteurs de logiciels libres.

Pour plus d’informations, vous pouvez vous rendre sur le site Web à l’adresse suivante : http://www.april.org/, nous contacter par téléphone au +33 1 78 76 92 80 ou par notre formulaire de contact.

Contacts presse :

  • Rémi Boulle, vice-président de l’April, en charge du groupe de travail Éducation, rboulle@april.org>, 06 05 03 32 30
  • Frédéric Couchet, délégué général, fcouchet@april.org +33 6 60 68 89 31
  • Jeanne Tadeusz, responsable affaires publiques, jtadeusz@april.org +33 1 78 76 92 82

À propos de Framasoft

Issu du monde éducatif, Framasoft est un réseau d’éducation populaire consacré principalement au logiciel libre et s’organise en trois axes sur un mode collaboratif : promotion, diffusion et développement de logiciels libres, enrichissement de la culture libre et offre de services libres en ligne.

Pour plus d’informations, vous pouvez vous rendre sur le site Web à l’adresse suivante : http://www.framasoft.org/ et nous contacter par notre formulaire de contact.

Contact presse :

  • Alexis Kauffmann, fondateur et chargé de mission, aka@framasoft.org +33 6 95 01 04 55

À propos du CNLL

Le Conseil National du Logiciel Libre est l’instance représentative, au niveau national, des associations et groupements d’entreprises du logiciel libre en France. Le CNLL représente 13 associations et groupements, et par leur intermédiaire plus de 300 entreprises françaises spécialisées ou avec une activité significative dans le logiciel libre.

Le CNLL a pour principale mission de représenter l’écosystème du logiciel libre auprès des pouvoirs publics et des organisations nationales et internationales existantes.

Contact Presse :

  • Amélie Vaysse, chargée de communication, relations presse. 01 41 40 11 42 – info@cnll.fr

À propos de SavoirsCom1

SavoirsCom1 est un collectif qui s”intéresse aux politiques des biens communs de la connaissance. Son action vise à faire en sorte que les politiques publiques favorisent la création, la diffusion et la mise en partage de biens communs informationnels. SavoirsCom1 défend lespositions exprimées dans son Manifeste.

Contact presse :

À propos de l’Aful

Association Francophone des Utilisateurs de Logiciels Libres, l’AFUL a pour principal objectif de promouvoir les logiciels libres ainsi que l’utilisation des standards ouverts. Ses membres, utilisateurs, professionnels du logiciel libre, entreprises ainsi que d’autres associations, sont issus d’une dizaine de pays ou de régions francophones (France, Belgique, Suisse, Afrique francophone, Québec).

Interlocuteur de nombreux médias, l’AFUL est présente sur nombre de salons, conférences et rencontres. Elle agit notamment activement contre la vente liée (site Non aux Racketiciels, comparatif bons-vendeurs-ordinateurs.info et bons-constructeurs-ordinateurs.info), pour l’interopérabilité (membre de l’AFNOR, participation aux référentiels d’interopérabilité et d’accessibilité de la DGME, site formats-ouverts.org, etc.), intervient sur les problématiques du droit d’auteur ainsi que pour la promotion de l’utilisation de logiciels et ressources pédagogiques libres pour l’éducation entendue au sens large.

Contacts presse :

Notes

1. Le Numérique à l’École : un enjeu partagé
2.Lancement de la deuxième édition de l’étude sur le numérique éducatif dans les collectivités territoriales
3.Les inspecteurs de l’éducation nationale convoqués chez Microsoft
4.Circulaire Ayrault sur le bon usage des logiciels libres dans l’administration française
5. Michel Pérez est le coordonnateur du rapport « La structuration de la filière du numérique éducatif : un enjeu pédagogique et industriel », 24/09/2013
6.Loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République publiée au Journal Officiel le mardi 9 juillet 2013  : « L’incitation au développement de ressources numériques se fera notamment en faveur de logiciels libres et de contenus aux formats ouverts ».




Le Brésil ne veut plus de logiciels impossibles à auditer

Avant Snowden, nous criions dans le désert.

Il en va tout autrement aujourd’hui. Et les gouvernements réalisent soudainement le danger d’avoir choisi des logiciels propriétaires qu’on ne peut évaluer et auditer faute d’accès au code source.

Il ne va pas être facile pour Microsoft, Apple et consorts de répondre ici aux exigences de transparence des autorités brésiliennes qui se tourneront naturellement vers le logiciel libre.

En attendant le tour de la France…

Edward Snowden - Laura Poitras - CC by

Le gouvernement brésilien va interdire l’achat des logiciels qui ne permettent pas leur plein contrôle

Governo vai barrar compra de software que impeça auditoria

Natuza Nery et Julia Borba – 5 novembre 2013 – Folha de S. Paolo
(Traduction : Ulan, Pierre, JonathanMM)

A partir de l’année prochaine, le gouvernement (brésilien) n’achètera plus d’ordinateurs ou de logiciels qui ne peuvent être pleinement audités par les pouvoirs publics. La directive a été publiée le 5 novembre dernier dans le journal officiel « Diario official da Uniao ».

Ainsi, les systèmes d’exploitation comme Windows (Microsoft) et MacOS (Apple) ne seront plus utilisés si les entreprises concernées font obstacle aux enquêtes sur l’espionnage informatique.

Actuellement, à l’installation d’un logiciel (propriétaire), les utilisateurs acceptent les termes d’utilisation de l’éditeur autorisant éventuellement celui-ci à accéder à leur ordinateur.

Le gouvernement brésilien souhaite avoir le droit de surveiller qui surveille ses concitoyens, et ce dans le but de pouvoir identifier et tracer les tentatives d’espionnage.

Selon le journal « Folha de São Paulo », l’intention n’est pas de promouvoir une conversion massive des parcs informatiques, mais prévenir que les produits actuels ne sont plus conformes aux nouvelles exigences.

De cette manière, il y aura un substitution graduelle des programmes traditionnels (propriétaires) pour des logiciels libres, comme Linux, si nous ne parvenons pas à négocier avec les grandes entreprises.

L’importance accordée par le gouvernement à l’espionnage a augmenté depuis qu’ont été publiés les dénonciations sur l’accès par les services américains aux archives des autorités et entreprises brésiliennes.

Économie

Le gouvernement considère que, en plus d’augmenter la sécurité, la directive entraînera des économies. L’utilisation de logiciels libres met un terme au renouvellement obligatoire des licences de ces programmes.

Interrogé pour la rédaction de cet article, Apple n’a pas souhaité répondre à cette décision.

Microsoft a informé qu’il fournit aux gouvernements « l’accès contrôlé au code source et aux autres informations techniques pour les aider à évaluer la sécurité des produits ». La société a également déclaré qu’elle se met à disposition du gouvernement brésilien pour discuter des détails de la mesure.

Valeur incertaine

Il n’y a pas encore d’estimation de l’impact de cette décision sur les dépenses gouvernementales. Les informations plus précises sur ces coûts ne seront dévoilées qu’après l’application de la directive, quand aura lieu une enquête sur les contrats actuellement en vigueur et les dates d’expirations de ceux-ci. Comme ces licences ont été obtenues à des moments différents, il n’est pas encore possible de faire d’estimation.

Le journal précise que le gouvernement de Dilma Rousseff étudie également avec détermination une autre mesure de sécurité informatique : installer le client de messagerie libre Expresso (Serpro) comme référence sur tout ordinateur public à la place de Outlook, ce qui engendrera des économies supérieures à 60 millions de reais par an (environ 20 millions d’euros).

Crédit photo : Laura Poitras (Creative Commons By)




Google Maps change de version ? Passons à OpenStreetMap !

Les nombreux services de Google sont généralement gratuits mais ils sont aussi propriétaires.

Ainsi les utilisateurs de Gmail s’en sont rendu compte dernièrement : Google modifie quand bon lui semble son interface et ses fonctionnalités. Et nous sommes mis devant le fait accompli de changements qui vont bien plus dans le sens d’une intégration toujours plus poussée avec les autres services Google (Google+ notamment) que d’un réel souci du confort des utilisateurs.

C’est également ce qui est en train de se produire actuellement avec Google Maps qui change d’interface et donc de version de son API, signifiant par là-même que tous ceux qui avaient développé des applications spécifiques avec la version précédente de l’API devront tout recoder avec la nouvelle version.

Une bonne occasion de migrer vers la carte libre OpenStreetMap[1] à l’aide du site Switch2OSM[2].

Google Maps v2

Faut-il mettre à jour la version 2 de l’API de Google ? Libérez-vous plutôt et passez à OpenStreetMap.

Upgrading from Google v2 API? Free yourself and upgrade to OpenStreetMap

5 novembre 2013 – OpenStreetMap Blog
(Traduction : goofy, lyn, GregR, Britz, Sphinx + anonymes)

Avez-vous reçu un courrier électronique comme celui-là (cf image ci-dessus) ?

Nous ne pouvons vous garantir que vous pourrez disposer de vos cartes. Nous vous recommandons vivement de migrer vers la version 3 de Google Maps avant le 19 novembre.

Oui, Google Maps a décidé de fermer sa vieille API JavaScript de Maps (v2). Ils vous conseillent de passer beaucoup de temps à ré-écrire votre code pour passer à la nouvelle API v3.

Mais pourquoi ne pas utiliser ce temps pour passer à un meilleur service ?

OpenStreetMap (OSM) est une carte créée par des experts, à savoir les habitants mêmes du territoire qu’ils cartographient. On y trouve les sentiers pédestres et les pistes cyclables, les canaux, les espaces verts et les espaces publics, de même que toutes les routes et les chemins de fer. Elle est continuellement mise à jour : pas besoin d’attendre le prochain passage de la voiture Google. Pas étonnant que Foursquare, Github et Mapquest aient déjà opté pour OSM.

Passer de Google Maps à OpenStreetMap est plus facile que vous ne le pensez. Si vous vous êtes déjà confronté à l’ancienne API de Google Map, vous allez trouver en notre équivalent, Leaflet, une bouffée d’air frais. Son interface douce et agréable vous permettra de mettre mieux en valeur l’apparence de votre site, et l’application mobile est aussi fluide que l’application native.

Si vous souhaitez aller plus loin, OpenStreetMap vous permet de créer une belle carte, personnelle, à partir de nos données. Vous n’êtes pas limité au seul style Google, que tout le monde utilise. Puisque les sources sont libres et ouvertes, vous n’avez pas à payer quoi que ce soit pour accéder à des services « premium ».

Comment franchir le pas ? Le site switch2osm.org, géré par la communauté OpenStreetMap, fournit des conseils pour passer à OpenStreetMap. Les sections « The Basics » (NdT : Premiers pas) et « Using Tiles » (Utiliser des tuiles) vous permettront de transformer votre code JavaScript pour qu’il fonctionne avec OSM. Ce site est également utile pour trouver toutes les informations nécessaires à la création de cartes personnalisées.

Au bout du compte, OpenStreetMap est beaucoup plus qu’une solution alternative à l’API Google Maps. Nous offrons quelque chose de différent : un accès libre et ouvert aux données cartographiques brutes. Cela permet aux développeurs de débrider leur créativité et d’innover un maximum, en allant beaucoup plus loin qu’une simple intégration d’une carte dans un site web. Cerise sur le gâteau : plus on utilise OSM sur des sites web, plus les cartes seront vues des utilisateurs et plus les contributeurs à ce travail de cartographie collaborative seront nombreux ; au final, la carte, créée par la communauté, devient de plus en plus précise.

Utiliser OpenStreetMap, c’est défendre et promouvoir ce projet et ainsi nous aider dans notre mission bénévole : créer la carte du monde la plus ouverte et la plus riche qui soit.

switch2osm.org

Notes

[1] Pour rappel notre article Framablog : Avez-vous le réflexe OpenStreetMap ? et notre tag dédié.

[2] Nous envisageons de traduire ce site en français.