Al Jazeera, Gaza et la plus libre des licences Creative Commons

BohPhoto - CC byÉvoquer le conflit à Gaza pour ne parler que de licences données à quelques unes de ses vidéos par une chaîne de télévision va peut-être vous choquer mais il n’en demeure pas moins que c’est une grande première dans le monde des grands médias. Il s’agit en l’occurrence de la chaîne Al Jazeera qui vient d’inaugurer un espace vidéo sous licence Creative Commons avec douze de ses récents reportages sur Gaza.

C’est intéressant parce que Al Jazeera est clairement ici la chaîne d’information la mieux à même de nous fournir des images. C’est également intéressant parce que le choix s’est porté sur la plus libre permissive des licences Creative Commons, à savoir la Creative Commons Attribution (ou Paternité) autorisant alors non seulement la diffusion mais également la modification et l’exploitation commerciale des vidéos en question (qui sont proposés au format Flash mais aussi dans un format en haute résolution). On peut bien entendu s’interroger sur ce qui pousse Al Jazeera à souhaiter que ses vidéos se diffusent ainsi largement mais le fait est que ce choix de licence est le meilleur moyen pour y arriver[1].

Al Jazeera inaugure un dépôt d’archives vidéos sous licence Creative Commons

Al Jazeera Launches Creative Commons Repository

Fred Benenson – 13 janvier 2009 – Creative Commons Blog
(Traduction Framalang : Don Rico)

Al Jazeera vient de mettre en ligne douze vidéos de qualité radiodiffusion tournées à Gaza et placées sous la licence Creative Commons Attribution la moins restrictive. Chaque vidéo, enregistrée par des professionnels, est associée à une page de renseignements détaillée et hébergée sur blip.tv, permettant ainsi le téléchargement facile des fichiers originaux et leur intégration dans Miro. Pour se faire une meilleure idée de la valeur de ces images, voici un extrait d’article paru dans l’International Herald Tribune et le New York Times :

« Dans un conflit où il est presque impossible aux médias d’information occidentaux de tourner des reportages dans Gaza à cause des restrictions imposées par l’armée israélienne, Al Jazeera possède un avantage indéniable : elle se trouvait déjà sur place. »

Plus important encore, grâce aux choix d’une licence CC-BY permissive, tout un chacun peut réutiliser ces vidéos, y compris les chaînes concurrentes, les réalisateurs de documentaires et les blogueurs, à la condition d’indiquer qu’elles proviennent d’Al Jazeera.

Vous trouverez de plus amples renseignements sur le dépôt d’archives CC d’Al Jazeera, et dans notre communiqué de presse. Vous pouvez aussi ajouter le dépôt d’archives d’Al Jazeera à vos flux Miro en cliquant ici.

Notes

[1] Crédit photo : BohPhoto (Creative Commons By)




Le fabuleux destin de Windows Vista

Johnsu01 - CC by-saLa campagne BadVista de la Free Software Foundation est close. Initiée au même moment que la sortie de Windows Vista, il s’agissait d’informer et de mettre en garde contre les dangers du nouveau système d’exploitation de Microsoft. Les arguments éthiques ont fait mouche mais reconnaissons que les piètres qualités intrinsèques de Vista ont bien aidé (surtout après une si longue attente). Toujours est-il que les objectifs ayant été atteints, félicitons-nous et passons à autre chose, tel est le résumé de cette nouvelle traduction[1].

Il faut dire que l’échec est retentissant surtout si on le mesure à l’aune des moyens marketings sans précédents mis en œuvre à l’échelle mondiale par Microsoft pour le faire adopter par les utilisateurs (avec la complicité des constructeurs qui voyaient là une manière de vendre de nouvelles machines puisque Vista, à performances égales que XP, nécessitait bien plus de puissance). Je n’ai pas de chiffres exacts mais j’ai comme l’impression qu’en deux ans, le Mac et GNU/Linux ont pour ainsi dire doublé leurs parts de marché (à la louche, les uns passant de 5% à 10% et les autres de 0,5% à 1%). Cela aura également mis en avant le caractère nuisible de la venté liée sans lequel Microsoft n’aurait pu éviter le naufrage. Et ne parlons pas du phénomène des netbooks totalement incapables d’accueillir le mammouth Vista et qui aura rallongé d’autant l’existence de XP à la mort maintes fois programmée et maintes fois repoussée. Soit dit en passant, quelle dommage que l’école française ait fait comme si de rien n’était et n’en ait pas profité pour l’étudier de plus près et en tirer quelques salutaires enseignements comme le rapport Becta le suggérait en Angleterre.

Aujourd’hui sortent à la hâte les premières versions bêtas publiques du prochain système d’exploitation de Microsoft, Windows 7, qui donne un peu le coup de grâce à Vista puisque nombreux vont être les utilisateurs restés sous XP à l’attendre sans passer par la case Vista. Nous verrons bien ce que cela donnera mais nul doute que Vista aura grandement contribué à ce que le colosse Microsoft se découvre encore plus vite que prévu des pieds d’argile.

BadVista : Bref mais intense

Badvista: We hardly knew ye

John Sullivan – 9 janvier 2009 – BadVista.org
(Traduction Framalang : Don Rico et Goofy)

Le 15 décembre 2006, la FSF lançait sa campagne BadVista.org pour défendre la liberté des utilisateurs, se dresser contre l’adoption du nouveau système d’exploitation Windows Vista de Microsoft, et promouvoir les alternatives libres. Deux ans plus tard, notre campagne a mobilisé près de 7000 partisans enregistrés, aux yeux du public le nom de Vista est synonyme de fiasco, et aujourd’hui nous déclarons victoire.

À l’instar de Joan Benoit Samuelson, championne olympique de marathon, nous considérons les victoires comme des « jalons le long d’une très longue route ». Nous n’avons pas encore convaincu tous les utilisateurs de Windows, ni même les utilisateurs de Vista, de passer à un système d’exploitation totalement libre tel que gNewSense. Nous avons encore beaucoup de pain sur la planche et de nombreuses bornes à franchir. Néanmoins, la campagne BadVista a été initiée avec des objectifs précis, et tandis que nous y mettons un terme, nous tenons à faire connaître et à célébrer ce que cette campagne et ceux qui l’ont soutenue ont permis d’accomplir.

En premier lieu, nous avons réussi à créer un point d’entrée où les personnes intéressées par Vista pouvaient apprendre l’existence de solutions alternatives libres. Les utilisateurs potentiels de Vista qui tapaient « windows vista » dans un moteur de recherche populaire obtenaient et obtiennent toujours BadVista.org sur la première page de résultats. Par sa tentative de forcer les utilisateurs à abandonner les versions antérieures de Windows pour Vista, Microsoft nous a fourni l’occasion de suggérer aux utilisateurs que s’ils étaient prêts à prendre la peine de changer de système d’exploitation, décision contre laquelle la crainte du changement œuvre souvent, alors ils feraient bien mieux d’opter pour GNU/Linux.

Nous avons ainsi réussi à transformer le pilonnage marketing sans précédent de Microsoft en occasion de faire découvrir le logiciel libre à des milliers de personnes. La preuve en est, sur notre page Free Software Free Society, un appel publié dans le cadre de notre campagne contre Vista qui a été signé par plus de 1600 particuliers, mais aussi par des organisations extérieures au monde du logiciel, tels le Green Party, Friends of the Earth International, People & Planet, New Internationalist et Legambiente.

Nous avons également contribué à dénoncer les restrictions que Vista impose à ses utilisateurs. Dans notre section Vista Watch, nous avons regroupé plus de 250 articles de presse évoquant le nouveau système de Gestion des Restrictions Numériques Digital Restrictions Management de Vista, ses failles de sécurité, ainsi que les multiples problèmes inhérents à son statut de logiciel propriétaire. Outre rassembler ces articles, nous avons joué un rôle de source d’informations aux journalistes qui écrivaient sur Vista, leur fournissant des réponses franches concernant ses restrictions qu’ils n’auraient jamais obtenues de Microsoft.

Les actions menées lors de cette campagne, parmi lesquelles des manifestations dans Times Square à New York et près du Fenway Park à Boston, on contribué a maintenir ces inquiétudes au cœur de l’actualité et à contrer la propagande servie à ceux qui assistaient aux évènements organisés par Microsoft. Grâce aux opérations organisées d’étiquetage que nous avons menées sur Amazon, ceux qui envisageaient d’acquérir une copie de Vista sur ce site ne pouvaient passer à côté des renseignements concernant les restrictions qu’il impose.

Deux ans plus tard, il est évident que Vista a manqué le coche pour bénéficier d’une adoption massive. Particuliers, gouvernements, grandes entreprises, universités et organisations, tous ont massivement fait l’impasse sur Vista, voire carrément abandonné Microsoft. Une étude récente, par exemple, indique un taux d’adoption de 6% seulement par les entreprises. Le fait que Microsoft ait à maintes reprises repoussé la fin de la commercialisation de XP et publie déjà une bêta publique de Windows 7 constitue la preuve irréfutable de l’échec de Vista. Pour les entreprises qui ont adopté Vista, elles l’ont souvent fait contraintes par des contrats de support coercitifs imposés par Microsoft. Il va falloir du temps aux utilisateurs pour se libérer de ces accords, et c’est un aspect de notre mission à long terme que de les y aider.

Merci à tous pour avoir fait de cette campagne un succès. Nous retirons à présent le site du Web et mettons un terme à cette campagne pour consacrer nos efforts et nos ressources à de nouvelles campagnes qui nous permettront d’atteindre les prochains jalons sur la route menant à un monde où tout un chacun pourra choisir sans risque le logiciel libre. Galvanisés par cette réussite, nous aurons besoin que vous continuiez à nous prêter votre énergie et votre créativité afin que nous puissions ensemble empêcher les logiciels propriétaires d’empiéter sur nos libertés. BadVista.org aura non seulement permis de faire avancer cette cause mais également permis de mesurer nos forces pour les actions à venir.

Notes

[1] Crédit photo : Johnsu01 (Creative Commons By-Sa)




Libérons le matériel informatique : la lutte continue…

Bohman - CC byNous savons tous que le plus gros frein à une adoption plus importante des systèmes GNU/Linux, c’est l’incompatibilité matérielle. Qui en effet n’a pas rencontré de problèmes de pilotes ou cherché des heures sur les forums pour faire fonctionner sa webcam ? Comment convaincre facilement quelqu’un de passer à Linux tout en devant le prévenir que tout ne fonctionnera peut-être pas sur sa machine[1] ? Pas forcément évident.


Certes, de grandes avancées ont été accomplies dans le monde du libre, comme l’évoque la FSF dans son appel pour 2009, et bon nombre de machines et périphériques tournent aujourd’hui à merveille sous GNU/Linux, d’une part grâce aux efforts de la communauté pour créer des pilotes, et d’autre part grâce aux fabricants qui en fournissent plus volontiers pour les systèmes Linux.

Hélas, trop nombreux sont ceux qui ne proposent pas de pilotes libres et ouverts. Une des priorités établies par la FSF pour 2009 est d’ailleurs l’obtention de pilotes libres pour les routeurs. Rappelons au passage que c’est d’une histoire de pilote d’imprimante que tout est parti.

Même s’il peut être séduisant d’avoir des pilotes et des programmes propriétaires portés sous Linux, qui permettent de bénéficier d’une bonne prise en charge de notre matériel ou d’applications Web à grand succès, cela ne résoud pas les problèmes inhérents aux programmes dont le code n’est pas accessible, puisqu’on ne peut ni l’améliorer, ni l’adapter à ses besoins, ni l’examiner pour éviter les mauvaises surprises (côté applications, on pense à Skype, qui a le fâcheux réflexe d’aller fouiner dans vos données personnelles… et ô surprise, développer un logiciel de remplacement pour Skype est la troisième des priorités de la FSF).

Alors pour illustrer la question, voici un article dénonçant la politique de Nvidia, qui refuse de publier des pilotes ouverts pour ses cartes graphiques, contrairement à ATI, qui le fait depuis son rachat par AMD.

PS : Merci à Antistress pour le lien concernant les pratiques douteuses de Skype.

Nvidia dit non aux pilotes de périphérique libres, je dis non à Nvidia

Nvidia says no to free drivers, I say no to Nvidia

Libervisco – 27 juin 2008 – Nuxified
(Traduction Framalang : Siltaar, Olivier et Don Rico)

Les développeurs du noyau Linux ont plébiscité une motion signée par une centaine de développeurs indiquant qu’ils considèrent les modules non-libres du noyau comme indésirables et dangereux. Comme ils l’expliquent « de tels modules vont à l’encontre de l’ouverture, de la stabilité, de la flexibilité et de la maintenabilité du modèle de développement de Linux et coupent leurs utilisateurs de l’expertise de la communauté de Linux. Les fabricants qui fournissent des modules de noyau à source-fermée forcent leurs clients à abandonner certains avantages clés de Linux ou à choisir de nouveaux fabricants. »

Ils sont allés jusqu’à critiquer spécifiquement Nvidia, qui ne fournit pas de pilotes de périphériques libres. Nvidia a répondu. Ils s’y refusent car, comme ils le disent, les pilotes contiennent « une propriété intellectuelle qu’Nvidia souhaite protéger », et ont de plus expliqué qu’ils fournissent déjà d’excellents services pour Linux, qu’ils ont une équipe chargée de la conception du pilote non-libre, essayant en fait de nous faire croire qu’ils proposent déjà à leurs clients sous GNU/Linux une offre honnête.

Donc mettons les choses au clair : quelle est cette offre ? Vous achetez une carte graphique, obtenez un CD de pilotes qui contient, ou non, une version Linux des pilotes (si c’est non, vous devez vous rendre sur leur site Web pour les télécharger), puis vous les installez et ça marche. Ça a l’air bien, non ? Et si vous pouviez faire mieux ? Et si vous étiez un programmeur qui souhaite améliorer un aspect particulier du pilote ? Ça vous est impossible. Donc, la question qui se pose est : possédez-vous vraiment et entièrement la carte que vous avez achetée ? Peut-être. Mais qu’en est-il de ce truc qui la fait fonctionner, ce truc qui lui fait faire ce pour quoi vous l’avez achetée ?

Eh bien, visiblement, ça ne vous appartient pas. Vous avez tout juste le droit de l’utiliser tel quel, et c’est bien le problème. Si vous pensez que quelque chose ne fonctionne pas à cause d’un bogue dans le pilote, non, vous ne pouvez pas le réparer. Vous ne pouvez que contacter leur super service après-vente et les supplier d’y remédier.

En résumé, l’offre c’est donc : vous achetez une carte, mais la seule façon de l’utiliser c’est de louer un pilote auquel vous n’avez qu’un accès incomplet, rendant ainsi votre fructueuse utilisation de la carte constamment dépendante de Nvidia et limitant évidemment de ce fait le contrôle que vous devriez avoir en tant que supposé propriétaire.

Qui leur donne le droit d’imposer de telles pratiques ? Eh bien, pour être franc, c’est vous, tant que vous achetez la carte. J’ai dit dans mon dernier post ici même que je ne considérais plus forcément leur proposition (répugnante) comme une offre immorale, mais la question est de savoir si vous êtes prêt à l’accepter ? Estimez-vous qu’acheter un produit et en obtenir un contrôle limité constitue une offre honnête à vos yeux ?

C’est une question à laquelle chacun doit répondre pour lui-même. De mon point de vue, alors que je projetais d’acheter une Nvidia, vu que le projet de rétro-conception « nouveau » semble avancer à bonne allure, je pense désormais (avec une certaine rancœur) y renoncer. AMD participe au développement d’un pilote libre pour ses cartes récentes, c’est donc par conséquent la voie à suivre.

Conclusion : Nvidia, vous dites non aux pilotes libres, alors je vous dis non. Pas mal, non ? Peut être que si suffisamment d’acheteurs agissaient de la sorte, la précieuse « propriété intellectuelle » d’Nvidia deviendrait subitement superficielle (cette « propriété » étant la recette qui fait fonctionner MA carte ! (si tant est que je l’achète)) Merci.

Notes

[1] Crédit photo : Bohman (Creative Commons By)




De l’évidence du choix Microsoft à l’Éducation Nationale

Outre la question des formats, le problème avec les sites de vidéos en ligne c’est qu’on ne sait jamais trop bien d’où provient la ressource et sous quelle licence est autorisée la diffusion (quand elle est autorisée !). Toujours est-il que je suis tombé sur une vidéo qui s’apparente fort à un reportage de promotion interne de Microsoft dans le secteur éducatif.

La société nous présente là en effet sa solution ENT-E dans le cadre des Espaces numériques de travail (ENT) qui commencent à se déployer un peu partout dans les académies.

Il y a aurait beaucoup à dire sur ces ENT, à commencer par rappeler qu’on en parle depuis plus de cinq ans, mais ce sera l’objet d’un futur billet. En attendait je vous laisse juge de la manière dont Sylvain Geron, Manager Éducation et Recherche chez Microsoft France, nous vend le sien :

Concrètement l’ENT-E c’est un portail web qui permet au chef d’établissement, à l’élève, à ses parents d’échanger entre eux des contenus. Par exemple le professeur peut mettre des contenus relatifs à un TP sur internet, l’élève peut les préparer depuis chez lui, peut poser des questions, le parent peut suivre le travail de l’élève, regarder ses notes… Le chef d’établissement peut faire des statistiques sur les notes ou vérifier les taux de présence des différents élèves dans l’établissement. Finalement l’ENT-E permet à toutes ses catégories de personnes de se retrouver ensemble autour de l’élève sur internet.

Puis une voix off qui tourne brillamment autour du pot du logiciel libre :

Microsoft propose aux collectivités territoriales une solution adaptée à leurs besoins grâce à un code spécifiquement développé pour créer un ENT. La preuve en est la mise à disposition gratuite de ce code spécifique, la possibilité de modification et de distribution dans les académies.

Et Sylvain Geron d’ajouter :

L’ENT-E s’appuie sous le code qui a été développé sur des briques de bases des produits Microsoft, et bien évidemment plus de gens utiliseront l’ENT-E plus les produits Microsoft sous-jacents seront utilisés.

Cela va sans dire mais cette franchise vous honore…

Mais ce qui a provoqué la rédaction de ce billet c’est l’ultime intervention que nous devons à Claudine Colomina, conseillère pour les TIC à l’académie de Montpellier, qui répondait visiblement à la question du choix Microsoft :

Pourquoi Microsoft ? Heu… Le problème ne s’est… on en a souvent discuté… le problème ne s’est absolument pas posé dans l’Académie. Il était évident que l’on voulait travailler sur des outils pérennes, sur du solide, que nous n’avions pas d’équipes de développement qui nous permettaient de travailler sur du libre par exemple, qu’il fallait un suivi dans toutes les activités, dans tout ce que l’on allait construire. Et il n’a jamais été question d’envisager un autre partenariat qu’avec Microsoft pour ce faire.

Et voici enfin la vidéo dont il est question dans tout ce billet :

Si un enseignant initié de Montpellier (ou d’ailleurs) passe par là, nous le remercions par avance des précisions qu’il pourrait apporter, parce que cette histoire « d’équipes de développement permettant ou non de travailler sur du libre » ne me semble pas très claire…

Edit du lundi 12 janvier : « L’initié » est bien intervenu en la personne de Benjamin Clerc qui précise dans les commentaires : « Je suis dans l’académie de Montpellier, chargé de mission à la Matice. Cette vidéo date … Mme Colomina est à la retraite depuis plus d’un an et c’est bien une solution libre qui a été retenue dans l’académie de Montpellier (en relation avec les académies de Bordeaux, Orléans et Lille), basée sur e-sup portal. »




Largage de liens en vrac #10

ClickFlashPhotos - CC byPremier largage 2009 qui, de l’aveu même de son auteur, n’est pas forcément un grand cru quand bien même vous soyez tout de même susceptible d’y trouver chaussure à votre pied si vous n’êtes pas trop difficile en ce début d’année qui le sera d’après les experts[1].

  • Myst OnLine : Uru – Live : La sage Myst fut un jeu mythique de la fin du siècle dernier. Sa version en ligne passe en Open Source d’abord parce que le projet est un échec commercial mais aussi pour voir si la communauté réussira à s’organiser pour ne pas le laisser mourir et le faire renaître de ses cendres.
  • sIFR lite : sIFR est un JavaScript permettant l’affichage de n’importe quelle typographie sur son site via le plugin Flash. Cette version allégée et simplifiée pour séduire certains webmasters pressés.
  • Lilina : Un joli aggrégateur de flux RSS en ligne qui marche sur les plate-bandes de Google Reader.
  • Greenshot : Un logiciel pour faire de la copie d’écran sous Windows.
  • FireTorrent : Une extension qui permet d’intégrer à Firefox toute la gestion des téléchargements de fichiers bittorrents. Vous n’avez alors plus à vous munir d’un client bittorrent pour partager vos fichiers.
  • Dictionnaire Le Littré : Le grand dictionnaire de la langue française d’Émile Littré accessible directement que l’on soit sous Windows, Mac ou Linux.
  • Agile Carousel : Un très esthétique plugin jQuery permettant de faire défiler des images dans une page web.
  • Ketarin : Un soft permettant de surveiller les mises à jour de vos logiciels en ligne (directement ou via le site FileHippo). Il y a un exemple avec CDBurnerXP mais sincèrement j’ai pas tout compris donc si quelqu’un veut ajouter quelques précisions dans les commentaires, il est le bienvenu !
  • Numpty Physics : Un jeu qui s’inspire du jeu vraiment sympa Crayons Physics (voir la vidéo en accueil pour bien comprendre comme ça marche) en utilisant le moteur 2D libre Box2D engine (pour la version compilée Windows c’est directement ici).
  • WindowsPager : Windows n’a pas, comme Linux, la possibilité de gérer plusieurs bureaux virtuels, heureusement que WindowsPager est là pour combler le trou.
  • OpenSource FLV Player : Comme son nom l’indique, tout petit lecteur libre de vidéo au format Flash.
  • VortexBox : D’après le site LifeHacker, VortexBox transforme vos vieux PC en jukebox (c’est-à-dire serveur) musical.
  • Browser Security Handbook : Signalons enfin ce guide très complet réalisé par Google (et sous licence libre Creative Commons By-Sa) sur les problèmes de sécurité et de respect des standards des navigateurs web (pour résumé ce sont globalement Firefox et Chrome qui arrivent en tête, sauf que Google est un peu juge et partie sur ce coup-là).

Notes

[1] Crédit photo : ClickFlashPhotos (Creative Commons By)




Vivre libre ou mourir, ou s’adapter pour survivre ?

Wili Hybrid - CC byQuand un petit malin demande à Richard Stallman ce qu’il pense de la piraterie, on peut s’attendre à une réponse bien sentie… et on aura raison ! Avec l’humour qu’on lui connaît, Stallman en profite pour dénoncer les licences restrictives, les pratiques intrusives des éditeurs de logiciels propriétaires (ou comme il se plaît à les appeler, "privateurs"), et l’amalgame entre partage et vol.

Mais la question, plus vaste, que pose cet article du Deccan Herald, est celle du rapport entre logiciel libre et logiciel propriétaire, et de l’opposition entre deux conceptions assez opposées. À l’avis tranché de Stallman (rejet pur et simple des logiciels propriétaires), s’oppose celui de Jimmy Wales, créateur de Wikipédia, selon qui l’un doit se nourrir de l’autre.[1]

Alors, refus de tout compromis ou adaptation pour la survie de l’espèce, tel est le sujet de réflexion que nous vous proposons avec cette traduction signée Framalang.

Darwinien ou marxiste ?

Darwinian or Marxist

L. Subramani – 17 décembre 2008 – Deccan Herald
(Traduction Framalang : Goofy, Don Rico et Olivier)

Que pensez-vous de la piraterie ? Richard Stallman, considéré comme le père du mouvement pour le logiciel libre, a donné à cette question une réponse amusante et qui donne à réfléchir. « La piraterie, » a déclaré Stallman lors d’une conférence à Bangalore au mois de décembre 2008, « c’est très mal, parce que c’est mal de s’attaquer à des bateaux en mer. »

Comme la personne qui l’interrogeait était tenace et précisait que la question portait sur la piraterie dans le sens de piratage de logiciels et de musique, Stallman a donné une réponse meilleure encore : « Les pirates ne s’attaquent jamais à des navires avec des logiciels et de la musique, mais avec des canons. »

D’après Stallman, le piratage est un des termes inventés pour attaquer la liberté et la « solidarité d’une communauté », et ce terme doit être rejeté. « Rompre un accord n’est pas correct, mais si un distributeur de logiciels assimile votre désir de partager ce que vous aimez avec vos amis à l’attaque d’un navire, cette idée mérite d’être dénoncée. » a-t-il déclaré, sous les applaudissements de l’assistance.

Sans nul doute, l’idée de logiciel « libre » invite à concevoir le développement et la distribution de logiciel du point de vue de l’utilisateur. La liberté d’utiliser le code, d’en étudier la source, de la modifier, de la partager, d’en distribuer des copies à d’autres, voilà qui s’adresse à l’utilisateur. Mais dans quelle mesure de telles libertés peuvent-elles être exigées dans une ère dominée par les marques déposées et les technologies « juteuses », voilà une question toujours en suspens après tous les arguments convaincants donnés çà et là.

En fait, Stallman lui-même n’a rien contre l’idée de faire du profit en vendant des logiciels, mais il veut que ceux qui développent et distribuent ces produits s’en tiennent rigoureusement à cet ensemble de « libertés ». Il est possible qu’il ait raison de prétendre que les gens sont tellement préoccupés d’acheter ce qui peut tourner sur leur machine qu’ils en oublient leurs droits. Mais on ne peut s’empêcher de se demander s’il est vraiment condamnable que des vendeurs de produits surveillent le système de leurs clients pour s’efforcer de mieux les satisfaire ou pour les empêcher de distribuer leur copie – ce qui est le seul moyen dont ils disposent pour s’assurer de la vente du logiciel.

Comme le fait remarquer Stallman lui-même, on ne se soucie que trop rarement des implications de la licence d’un logiciel. Jusqu’à une période assez récente, beaucoup ne se préoccupaient pas, lorsqu’ils revendaient leur vieux PC, de ce qu’ils risquaient en négligeant d’effacer toutes leurs données personnelles de disque dur. Les experts ont souvent signalé les dangers encourus en signant la « politique de confidentialité » des services en ligne sans la lire vraiment. Mais devrions-nous être « radicaux » dans notre réaction, comme le suggère Stallman, au point de rejeter les logiciels propriétaires et de nous abandonner corps et âme au logiciel libre ? La réponse est venue le même soir de Jimmy Wales, le fondateur de Wikipédia, la plus grande base de connaissance au monde. Wales a élaboré la meilleure application pratique des idées de Stallman en faisant de Wikipedia une plateforme ouverte pour créer, partager et modifier des contenus.

Bien que Wales admette être tout à fait « Stallmanien » dans ses convictions, il reconnaît être moins radical dans le développement d’un système d’accès au savoir en ligne qui comporte des contenus en plus de 200 langues, et rivalise avec de très puissantes institutions comme l’Encyclopædia Britannica.
« Le logiciel libre est une façon de concevoir la création et la distribution de contenu », déclare Wales. « Il existe souvent une tension entre les deux modèles (le libre et le propriétaire). Nous ne pouvons concevoir, par exemple, qu’un individu seul puisse créer un système de logiciels qui serait vendu des millions de dollars. C’est aussi absurde que de croire que de grands distributeurs vont créer des logiciels complètement Open Source. Donc d’une manière ou d’une autre ils doivent apprendre à co-exister. »

Et il existe des raisons de penser que les modèles du logiciel libre et celui du logiciel propriétaire peuvent co-exister. Il est difficile, par exemple, de rejeter l’argument de Stallman suivant lequel l’enseignement dispensé aux enfants à l’école devraient s’appuyer sur les logiciels libres de telle manière qu’ils ne soient pas excessivement dépendants d’un seul système propriétaire.
De la même façon qu’ils apprennent ce que sont les feuilles des plantes en les observant de près, ils peuvent apprendre le fonctionnement d’un logiciel en étudiant son code source, ce qui est possible avec un logiciel libre.

Mais il est aussi difficile de concevoir le développement de logiciels sans un modèle propriétaire. Une solution serait qu’une majorité d’utilisateurs insistent auprès des fabricants de logiciels pour qu’ils soient moins intrusifs. Stallman prétend que les entreprises commerciales devraient faire plus que protéger leurs propres intérêts.

« Les entreprises commerciales doivent fournir des produits utiles aux utilisateurs sans les tenir en otage au moyen de pratiques inacceptables », dit Stallman. « Aujourd’hui, les logiciels installent des programmes espions pour savoir ce que fait l’utilisateur, et les fabricants contraignent les usagers à créer du contenu avec leurs programmes, au lieu de leur vendre une copie de leur logiciel. De telles pratiques compromettent les droits de l’utilisateur, et nous devons insister auprès des fabricants pour qu’ils soient au contraire respectés. » À quel point les fabricants seront-ils réceptifs à ces propos, voilà ce que tout le monde se demande.

Notes

[1] Crédit photo : Wili Hybrid (Creative Commons By)




Quand l’album de Nine Inch Nails bouscule toute l’industrie musicale

Notsogoodphotography - CC byOn risque d’en parler longtemps. Imaginez-vous en effet un album de musique sous licence Creative Commons, disponible gratuitement et légalement sur tous les sites de partage de fichiers, et qui arrive pourtant en tête de meilleurs ventes 2008 sur la très fréquentée plate-forme de vente en ligne Amazon !

Voilà une nouvelle qui fait du bien et qui va à l’encontre de bon nombre d’idées reçues véhiculées notamment par certaines pontes de l’industrie culturelle (et leurs amis politiques). Une véritable petite bombe en fait, surtout en temps de crise. Les mentalités et les comportements évoluent et cela bénéficie indirectement aux logiciels libres qui sont « gratuits » ou « payants » selon que vous décidez ou non de soutenir le logiciel libre considéré[1].

Nine Inch Nails : l’album MP3 sous licence Creative Commons s’est vendu comme des petits pains

NIN’s CC-Licensed Best-Selling MP3 Album

Fred Benenson – 5 janvier 2009 – Creative Commons Blog
(Traduction Framalang : Don Rico)

L’album de Nine Inch Nails (NIN) diffusé sous licence Creative Commons, Ghosts I-IV, a fait un bon nombre de gros titres.

Pour commencer, l’opus a été salué par la critique et récompensé par deux nominations aux Grammy Awards, ce qui atteste la qualité musicale de cette œuvre. Mais ce qui nous emballe vraiment, c’est le formidable accueil qu’a reçu cet album chez les adeptes de musique. En plus d’avoir généré plus d’un 1,6 million de dollars de gains pour Nine Inch Nails dès la première semaine et d’avoir atteint la première place du classement de Billboard dans la catégorie musique électronique, Ghosts I-IV figure à la quatrième place des albums les plus écoutés de 2008 sur Last.fm, fort de 5 222 525 écoutes.

Mais le plus enthousiasmant, c’est que Ghosts I-IV a été l’album MP3 le plus vendu en 2008 sur la plateforme de téléchargements de MP3 d’Amazon.

Songez un peu à ce que ça signifie.

Les fans de NIN auraient pu utiliser n’importe quel réseau de partage de fichiers pour télécharger légalement l’album entier, puisqu’il est sous licence Creative Commons BY-NC-SA. Beaucoup l’on d’ailleurs fait, et des milliers continueront à le faire. Alors pourquoi les fans prendraient-ils la peine de payer des fichiers identiques à ceux qui sont disponibles sur les réseaux P2P ? On peut d’abord l’expliquer la facilité d’accès et d’utilisation des pages de téléchargements de NIN et d’Amazon. Mais il y a aussi le fait que les fans ont compris qu’acheter des fichers MP3 allait directement profiter à la musique et à la carrière d’un groupe qu’ils apprécient.

La prochaine fois qu’on tentera de vous convaincre que produire de la musique sous licence Creative Commons entamerait les ventes de musique numérique, souvenez-vous que Ghosts I-IV a prouvé le contraire, et soumettez cet article à votre interlocuteur.

Notes

[1] Crédit photo : Notsogoodphotography (Creative Commons By)




Les drôles de conseils du site Educnet

Zara - CC by-saNous le savons, et n’ayons pas peur de paraphraser les Beatles pour appuyer notre propos (et montrer toute l’étendue de notre culture), « logiciel libre » et « éducation » sont des mots qui vont très bien ensemble.

Voici ce qu’en disait récemment le Département de l’instruction publique du canton de Genève : « Dans sa volonté de rendre accessibles à tous les outils et les contenus, le libre poursuit un objectif de démocratisation du savoir et des compétences, de partage des connaissances et de coopération dans leur mise en œuvre, d’autonomie et de responsabilité face aux technologies, du développement du sens critique et de l’indépendance envers les pouvoirs de l’information et de la communication. »

En France pourtant cette association ne va pas de soi. Nouvelle illustration avec le site Educnet, portail TICE du Ministère de l’Éducation Nationale et du Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche (autrement dit c’est ici que l’on traite des Technologies de l’information et de la communication pour l’éducation ou TICE).

Sur ce site donc, dans la catégorie juridique Légamédia[1], on trouve, et l’intention est louable, une page consacrée non pas aux logiciels libres mais aux logiciels « Open Source » : L’utilisation et le développement de logiciels issus de l’Open Source.

Il est difficile pour un site qui aborde tant de sujets d’être « expert en tout » mais dans la mesure où il s’agit d’un canal officiel de l’Éducation Nationale, je n’ai pu m’empêcher de réagir[2] et d’en faire ici une rapide lecture commentée.

1- Définition technique et pratique : L’Open Source est le nom donné à leur mouvement en 1998 par les acteurs du logiciel libre. Fruit de la mouvance libertaire de l’Internet, les bases de l’Open Source ont été jetées en 1984 par Richard Stallman avec son projet GNU (GNU’s not Unix). Ce projet consistait à créer un système d’exploitation aussi performant qu’Unix et complètement compatible avec lui. Est ainsi né le premier système d’exploitation dit « libre », car son utilisation, sa copie, sa redistribution voire sa modification étaient laissées au libre arbitre de l’utilisateur. Sous le nom d’Open Source, sont fédérées toutes les expériences d’accès libre au code source des logiciels.

Le site Educnet s’adresse à la communauté éducative dont en tout premier lieu aux enseignants. Expliquer rapidement ce qu’est un logiciel libre n’est pas chose aisée mais on aurait tout de même pu s’y prendre autrement, à commencer par privilégier l’expression « logiciel libre » à celle d’« Open Source ». Par exemple en empruntant la première phrase de l’article dédié de Wikipédia : « Un logiciel libre est un logiciel dont la licence dite libre donne à chacun (et sans contrepartie) le droit d’utiliser, d’étudier, de modifier, de dupliquer, et de diffuser (donner et vendre) le dit logiciel ».

Une fois ceci posé et compris, on aura bien le temps par la suite d’entrer plus avant dans le détail et d’aborder les choses plus finement en évoquant le code source ou les différences d’approche entre « logiciel libre » et « Open Source ». Quant à la « mouvance libertaire de l’Internet » je n’évalue pas l’effet produit sur le lecteur mais elle oriente assurément le propos.

1.1- Les principes de l’Open Source : En réaction au monopole d’exploitation reconnu par le droit d’auteur ou le Copyright, la finalité de l’Open Source est la promotion du savoir et sa diffusion auprès d’un public le plus large possible. Il est proposé aux internautes utilisant et développant les logiciels issus de l’Open Source de créer un fonds commun de logiciels en ligne. Concrètement, l’utilisation de logiciels issus de l’Open Source permet le libre accès au code source du logiciel, sa copie et sa libre redistribution.

Je continue à me mettre à la place d’un enseignant qui découvrirait ici le logiciel libre et cela demeure complexe à appréhender ainsi présenté. Reprendre la traditionnelle introduction de Richard Stallman (« je peux résumer le logiciel libre en trois mots : liberté, égalité, fraternité  ») aurait eu certainement plus de sens et d’impact. Retenons cependant que la finalité est « la promotion du savoir et sa diffusion auprès d’un public le plus large possible », ce qui tombe plutôt bien quand on s’intéresse à l’éducation, non ?!

1.2- Les conditions d’utilisation : Afin de développer à un moindre coût un projet informatique, des élèves et leur enseignant peuvent utiliser des logiciels « Open Source », les modifier ou les améliorer afin de les adapter à leurs besoins. En revanche, les améliorations effectuées sur le logiciel initial doivent être versées dans le fond commun mis en ligne. Il est possible de puiser gratuitement dans le fond des logiciels libres, à condition qu’à son tour on enrichisse le fond de ses améliorations en permettant à d’autres de les exploiter gratuitement…

Qu’est-ce que c’est alambiqué ! Et faux par dessus le marché : nulle obligation d’enrichir le fond des logiciels libres pour les utiliser ! On voudrait nous faire croire que les logiciels libres sont réservés aux informaticiens que l’on ne s’y prendrait pas autrement.

2- Les points de vigilance : En utilisant des logiciels issus de l’Open source, les élèves comme leurs enseignants doivent avoir conscience des conditions d’utilisation particulières de ce type de logiciel. Cela permet d’avoir des outils logiciels performants à moindre coût, mais son apport dans l’amélioration du logiciel n’est nullement protégé. Il faut au contraire le mettre en libre accès en rappelant sur le site de téléchargement du logiciel les principes de l’Open Source.

Là ce n’est plus alambiqué c’est carrément de parti pris ! La tournure et le champ lexical adopté (« vigilance », « avoir conscience », « conditions », « mais », « nullement protégé », « au contraire »…) ne peuvent que conduire à inspirer une certaine méfiance au lecteur alors même qu’on devrait se féliciter de l’existence du logiciel libre, véritable facilitateur de vie numérique en milieu scolaire !

Et pour finir en beauté, l’ultime conseil, dans un joli cadre pour en signifier toute son importance (les mises en gras sont d’origine) :

Conseils : Il est donc déconseillé d’utiliser ce type de logiciel si les élèves, leurs enseignants, voire l’établissement scolaire souhaitent garder un monopole d’utilisation des travaux de développement du logiciel libre. Les principes de l’Open Source obligent les développeurs à garantir un accès libre aux améliorations du code source du logiciel libre.

La cerise sur le gâteau, pour définitivement convaincre le lecteur que non seulement le logiciel libre c’est compliqué mais qu’il est en fait à déconseiller alors même qu’il ne viendrait jamais à l’idée des élèves, enseignants et établissements scolaires de « garder un monopole d’utilisation des travaux de développement du logiciel libre ». Sommes-nous sur Educnet ou sur un site du Medef ?

Que l’Institution souhaite conserver un positionnement neutre vis-à-vis du logiciel libre, je le déplore et le conteste mais je peux le comprendre. Personne ne lui demande en effet de sauter sur sa chaise comme un cabri en criant : logiciel libre, logiciel libre, logiciel libre ! Mais de là à présenter les choses ainsi…

Soupir… Parce qu’on avait déjà fort à faire avec Microsoft et ses amis.

Et ce n’est malheureusement pas terminé parce que, autre intention louable, il y a également une page consacrée (nouvel emprunt à l’anglais) à « l’Open Content » : L’utilisation de contenus issus de l’Open Content.

1- Définition technique et pratique : Dans le prolongement du mouvement Open Source qui concernait que les logiciels, l’Open Content reprend les mêmes principes de libre accès à la connaissance en l’appliquant cette fois à tout type de contenus en ligne (content). Sur l’Internet, des auteurs mettent en libre accès leurs créations musicales, photographiques, littéraires, etc. … Ils choisissent ainsi de contribuer à l’enrichissement d’un fonds commun de savoir mis en ligne. Lors de l’élaboration d’un site web ou de tout autre travail, les élèves ou les enseignants peuvent utilement puiser dans ce fonds et intégrer ces contenus issus de l’Open Content dans leurs propres travaux. Enfin, à leur tour, les élèves et leurs enseignants peuvent aussi verser leurs propres travaux dans le fonds commun de l’Open Content. Il faut pourtant garder à l’esprit quelques règles à respecter.

Cela commençait fort bien mais, comme précédemment, un bémol final : « il faut pourtant garder à l’esprit quelques règles à respecter ». C’est tout à fait juste au demeurant, il y a bien des règles à respecter, celles de la licence accolée à la ressource. Amusez-vous cependant à comparer par exemple la licence (« Open Content ») Creative Commons By-Sa avec les directives (non « Open Content ») concernant les usages des « œuvres protégées à l’Éducation Nationale, effet garanti !

2- Les points de vigilance : L’Open Content est un choix conscient et maîtrisé par l’auteur, comme le démontrent les licences d’utilisation de ce type de « contenus libres ». Les conditions d’utilisation sont claires.

Là encore, il faut que le lecteur soit « vigilant » en ayant la « maîtrise » des « conditions d’utilisation » et la « conscience » de ses choix. Faites mille fois attention avant d’adopter de telles licences ! Dois-je encore une fois renvoyer à cet article pour illustrer des conditions d’utilisation bien moins claires que n’importe quelle ressource sous licence libre ?

2.1- Les prérogatives morales : Tout d’abord, les licences sont l’occasion de rappeler aux futurs utilisateurs, élèves et enseignants les prérogatives morales de l’auteur : le respect de la paternité et de l’intégrité de l’œuvre. En utilisant ces contenus, le nom de l’auteur doit être mentionné et aucune modification à l’œuvre originale doit être apportée sauf si elle est mentionnée avec l’accord de l’auteur.

Avec l’accord de l’auteur… sauf dans le cas où la licence choisie confère d’office certains droits à l’utilisateur qui n’a alors rien à demander à l’auteur pour jouir de ces droits. C’est justement le positionnement adopté par les licences libres et les licences de types Creative Commons (voir ce diaporama à ce sujet), licences de la plus haute pertinence à l’ère du numérique surtout en… milieu scolaire. Imaginez-vous en effet devoir demander à chaque auteur les autorisations d’usage pour chaque œuvre que vous souhaitez utiliser et étudier en classe !

Et n’oublions pas non plus l’existence du domaine public qui n’est pas mentionné ici.

2.2- Les prérogatives patrimoniales : De même, la licence précise les conditions d’exercice des prérogatives patrimoniales de l’auteur : les droits de reproduction et de représentation. Sur ces points, selon le principe de libre accès, la licence permet la copie et la redistribution de l’œuvre à condition que les copies soient faites dans une finalité non commerciale. Il s’agit d’une cession à titre gratuit limitée. Les contenus issus de l’Open Content peuvent donc être utilisés sans restriction dans le cadre de l’activité scolaire à la condition de respecter les prérogatives morales des auteurs initiaux et en rappelant sur les pages où se trouvent les contenus « libres » les conditions des licences « Open Content ».

Encore du jargon juridique qui n’est pas de nature à être véritablement compris par l’enseignant, qui plus est sujet à caution puisque les licences libres autorisent généralement aussi bien la modification que l’exploitation commerciale d’une œuvre soumise à cette licence.

Et comme pour l’article précédent, un (étrange) conseil à suivre pour conclure :

Conseil : Il est par contre déconseillé au milieu scolaire d’utiliser ce type de contenus si on envisage de valoriser ses travaux en s’associant avec un partenaire privé pour une exploitation commerciale.

S’agit-il de « valoriser » ou de « monétiser » les travaux ? Et là encore, vous en connaissez beaucoup vous des enseignants qui envisagent de s’associer à un partenaire privé pour une exploitation commerciale ? De plus il n’y a aucune antinomie, on peut très bien adopter des licences libres et s’associer à un partenaire commercial pour exploiter (avec succès) ses travaux, Sésamath et ses manuels scolaires libres en vente chez l’éditeur Génération 5 nous en donne un parfait exemple.

Résumons-nous. Avec les licences libres appliquées aux logiciels et aux ressources, on tient de formidables instruments favorisant l’échange, le partage et la transmission de la connaissance en milieu scolaire (c’est ce que je tente de dire modestement au quotidien sur ce blog en tout cas). Mais de cela nous ne saurons rien si ce n’est que consciemment ou non tout est fait pour dissuader l’enseignant de les évaluer sérieusement en le noyant sous la complexité et les mises en garde avec des considérations économiques qui viennent parasiter un discours censé s’adresser à la communauté éducative.

Ces deux pages, non retouchées depuis un an, mériteraient je crois une petite mise à jour. Qu’il me soit alors permis de suggérer à leurs auteurs la lecture de ces quelques articles qui ne viennent pas d’un illégitime électron libre et « libriste » (comme moi) mais qui émanent du sérail : Les Creative Commons dans le paysage éducatif de l’édition… rêve ou réalité ? (Michele Drechsler, mars 2007), Un spectre hante le monde de l’édition (Jean-Pierre Archambault, septembre 2007) et Favoriser l’essor du libre à l’école (Jean-Pierre Archambault, juin 2008). Peut-être y trouveront-ils alors matière à quelque peu modifier le fond mais aussi la forme du contenu tel qu’il se présente actuellement.

Sur ce je souhaite une bonne rentrée à tous les collègues et à leurs élèves, ainsi qu’une bonne année à tous les lecteurs du Framablog. Il serait tout de même étonnant que l’année qui vient ne voit pas la situation évoluer favorablement pour le logiciel libre et sa culture, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’école.

Notes

[1] On notera par ailleurs, bien mise en évidence dès l’accueil de la rubrique Légamédia, un « conseil de prudence aux agents publics souhaitant bloguer » qui doivent avoir le souci « d’éviter tout propos susceptible de porter atteinte à la fois à la dignité des fonctions qu’ils exercent et aux pouvoir publics  ». C’est bien de le rappeler mais on retrouve le même climat de méfiance voire de défiance, cette fois-ci vis-à-vis des blogs. J’espère que critiquer comme ici le contenu d’un site officiel ou s’interroger sur la pertinence des accords sur l’usage des « œuvres protégées » n’entrent pas dans ce cadre sinon je crains que ce billet soit l’un des derniers du Framablog.

[2] Crédit photo : Zara (Creative Commons By-Sa)