Largage de liens en vrac #8

Arkangel - CC by-saLe nouveau Gimp vient de sortir (version 2.6) et OpenOffice.org est dans les starting-blocks (version 3.0). Quant à moi je continue de remplir mes marque-pages de news logicielles susceptibles d’intéresser de près ou de loin le framalecteur. Comme d’habitude il ne s’agit que d’un survol rapide et subjectif de l’actualité[1].

  • Podcast Generator : Vous souhaitez offrir du podcast à vos visiteurs ? Alors Podcast Generator a de bonnes chances de répondre à votre besoin. Parmi les fonctionnalités on notera le streaming flash mais surtout la sortie XML/RSS compatible avec Juice and iTunes.
  • Capture Fox : Une extension ambitieuse Firefox qui permet de réaliser des screencast avec la voix qui plus est. La sortie est en AVI et n’est pour le moment disponible que sous Windows XP et Vista. Petite explication et démo en français ici (ps : j’ai pas compris si l’extension était libre et si l’on pouvait filmer l’écran de son ordinateur pour monter autre chose que sa fenêtre FIrefox).
  • niftyPlayer : Pour votre site web, sûrement le plus léger de tous les lecteurs flash audio (avec ou sans Javascript).
  • Phatch : Contraction de Photo et Batch. Permet d’automatiser certaines tâches sur une série de photographies. On peut renommer, redimensionner mais aussi faire pas mal de choses originales comme arrondir les coins, ajouter un effet ombré, etc.
  • Zarafa : L’alternative professionnelle à Microsoft Exchange passe en open source une bonne partie de son offre logicielle (c’est plus stratégique que philanthropique mais c’est toujours bon à prendre !).
  • Evolution : Restons dans la messagerie groupware avec l’annonce du portage Windows d’Evolution, célèbre alternative Unix à Outlook (à ne pas confondre avec le grand public Outlook Express).
  • Habari : Dans la grande famille des moteurs de blogs (WordPress, Dotclear) je demande le petit dernier que même que les premiers avis disent qu’il est très prometteur.
  • Hyperwords : Encore une très pratique extension Firefox (libre ou pas ?) qui rend certains internautes plus qu’enthousiaste. Il n’y a pas à dire mais ces extensions participent de beaucoup à la valeur ajoutée de Firefox (n’est-ce pas Google Chrome ou Chromium ?).
  • MiniG : Gmail est pour vous la meilleure des webmails ? MiniG c’est comme Gmail mais pour les entreprises puisque, détail ô combien important, les données sont conservées sur les serveurs de votre propre boite (développé pour OBM par Linagora).
  • xVideoServiceThief : Objectif simple mais parfaitement réussi : récupérer les vidéos des sites comme YouTube ou Dailymotion que l’on peut ensuite convertir à la volée (dommage il n’y a pas encore le format OGG).
  • Project Kenai : Une nouvelle forge (hébergement de projets de développement) qui, pour la résumer sur le papier, serait un peu une forge 2.0 avec un fort accent donné aux structures de type réseaux sociaux.
  • CodeLite : Comme on s’adresse ici à des développeurs on présuppose qu’ils maitrisent l’anglais : CodeLite is a powerful open-source, cross platform IDE for the C/C++ programming languages.
  • Panda : Panda, est un projet OpenSource qui permettra à n’importe quel propriétaire de site; prêt à mettre un peu les mains dans le code, d’offrir le chargement et la lecture de vidéos à ses utilisateurs. Imaginez un YouTube en kit (source TechCrunch).
  • Plumi : Même objectif que Panda mais sous Plone. Aucune idée de l’état d’avancement de ces solutions libres de streaming vidéo mais c’est bien d’avoir potentiellement la possibilité de se libérer des YouTube-like.
  • Omeka : Une plateforme web orientée présentation et archivage de fonds iconographiques (devrait intéresser certaines institutions culturelles comme les musées par exemple).

Notes

[1] Crédit photo : Arkangel (Creative Commons By-Sa)




Mozilla travaille à corriger le bug Firefox dans Ubuntu

Qualifié par certains de tempête dans un verre d’eau, le bug 269656 d’Ubuntu concernant l’apparition d’un CLUF à valider au premier démarrage de Firefox a suscité de nombreux commentaires.

La traduction[1] de ce billet issu du blog de la Présidente de la Mozilla Foundation Mitchell Baker montre que Mozilla est conscient du problème et travaille à le corriger.

Il témoigne également au passage du fait que Mozilla sait être réactif et à l’écoute.

Copie d'écran - Mitchell Baker

Ubuntu, Firefox et les problèmes de licence

Ubuntu, Firefox and License Issues

Mitchell Baker – 15 Septembre

Ubuntu a récemment développé un correctif qui fait apparaître un Contrat de Licence Utilisateur Final (CLUF) dans Firefox. Cela a soulevé quelques interrogations. La première touche le contenu du contrat, une autre concerne la présentation et la troisième questionne l’utilité d’une telle licence.

Nous devons reconnaître au préalable que oui, les termes du contrat de licence ne sont pas corrects. On devrait y lire que le code est régi par les licences des logiciels libres, on ne devrait pas y trouver le jargon habituel des CLUFs comme c’est le cas dans la version actuelle. Nous avons mis au point une licence qui renvoie aux licences des logiciels libres, mais en ne la communiquant pas à Ubuntu et aux autres distributeurs et en ne la rendant pas publique nous avons fait une énorme erreur. Une erreur que nous corrigerons dès que possible.

Ensuite, la présentation de la licence pose problème aux gens. Je pense qu’avec le bon contenu cette présentation n’est si mauvaise en soi. Elle doit rappeler que le logiciel est basé sur les licences de logiciels libres auxquels nous sommes très attachés. Mais quand bien même, la présentation peut continuer à poser problème. Soyez sûr que nous travaillons sur ce point. Nous le ferons de manière transparente. Vous retrouverez rapidement des messages à ce propos.

Et il reste la troisième question, celle des services. La licence de logiciel libre couvre-t-elle aussi les services auxquels vous avez accès ? Nous pensons que ce n’est pas toujours le cas et la licence l’établira clairement. Le code est soumis aux licences de logiciels libres et nous aurions dû l’affirmer plus distinctement.

Ce qui nous amène à une autre question : est-il pertinent de montrer aux gens les termes relatifs aux logiciels et aux services à leur disposition ? Quelques commentaires remettent en question l’utilité de ces termes. Là encore, si le contenu de notre licence avait été pertinent le problème ne se poserait peut-être pas car on devrait y trouver référence aux licences de logiciels libres. Nous (c’est-à-dire Mozilla) nous sommes tirés une balle dans le pied avec le contenu obsolète et incorrect (de la licence). J’espère donc que nous pourrons débattre sur ce sujet, mais je crois que nous devons en priorité régler les autres problèmes.

Nous prenons ce problème à cœur et travaillons d’arrache-pied pour le corriger.

Notes

[1] Traduction non officielle d’Olivier (Framalang).




Curiosphere.tv et Microsoft : merci le service public !

Dans la série « ça ne servait à rien de traduire le Rapport Becta »

Copie d'écran - Curiosphère TV

Curiosphere.tv vous connaissiez ? C’est la webTV de France 5 (du groupe France Télévision) dont on peut lire sur le site la description suivante :

Curiosphere.tv a une vocation éducative généraliste. Cette webTV s’est donnée pour mission d’« offrir aux médiateurs éducatifs – profs, parents, éducateurs – les meilleurs contenus audiovisuels afin de favoriser l’éducation citoyenne des enfants et leur accès à la culture ».

Ce sont ainsi plus de six cents vidéos qui sont proposées dont on précise qu’elles sont « accessibles gratuitement pour une utilisation dans un cadre scolaire ou à domicile » (les licences de type Creative Commons attendront encore un peu, mais là n’est pas mon propos).

Parmi ces vidéos, il y a une nouvelle rubrique dédiée au B2i, le fameux Brevet informatique et internet ainsi introduit par l’institution sur son site officiel Educnet :

Pour assurer l’égalité des chances, l’Éducation nationale doit dispenser à chaque futur citoyen la formation aux utilisations des technologies de l’information et de la communication qui lui permettra : d’en faire une utilisation raisonnée, de percevoir les possibilités et les limites des traitements informatisés, de faire preuve d’esprit critique face aux résultats de ces traitements, d’identifier les contraintes juridiques et sociales dans lesquelles s’inscrivent ces utilisations.

Le décor est donc planté, les louables intentions et objectifs de l’un comme de l’autre clairement affichés.

Là ou le bât blesse c’est que Curiosphère s’est associé à Microsoft pour produire les tutoriels vidéos de cette rubrique B2i. Et comme les intentions et objectifs de ce troisième larron sont quelque peu différents de ceux mentionnés ci-dessus, on se retrouve avec la présentation suivante :

Pour accompagner l’initiation de vos élèves ou de vos enfants au B2I, Curiosphere.tv, en partenariat avec Microsoft, met à votre disposition un ensemble de tutoriels vidéo réalisés par des enseignants. Reprenant des exemples concrets dans différentes disciplines, ces tutoriels vidéo décryptent dans le cadre des compétences B2I, un grand nombre de fonctionnalités et de modules de Word, Excel, Publisher, Power Point, Outlook ou encore Internet Explorer.

Illustration par l’exemple avec des titres qui ne se cachent pas derrière des termes génériques comme Traitement de texte ou Tableur :

Copie d'écran - Curiosphère TV

Et il y en a des dizaines d’autres du même acabit ! Tenez, voici comment débute texto celui-là :

Les élèves vont donc utiliser Internet Explorer pour faire des recherches afin de réaliser un exposé multimédia. Par exemple « la respiration des êtres vivants ». Live Search propose 47.000 résultats…

No comment (si ce n’est que comme par hasard il s’agit de la version 2007 de la suite MS Office qui est montrée dans ces vidéos). Toujours est-il qu’ils sont modernes web 2.0 à Curiosphere.tv puisqu’ils proposent plein de fils RSS par catégorie :

Copie d'écran - Curiosphère TV

Si Microsoft est une discipline alors je comprends mieux maintenant : Apprenons tous le Microsoft à l’école avec les deniers du contribuable !

Edit : la suite ici




Informatique à l’école : Tout ne va pas très bien Madame la Marquise

La France est-elle numériquement sous-éduquée ? Et si oui doit-on faire quelque chose pour modifier la donne en particulier à l’école ? Ce n’est pas tout à fait ainsi que Jean-Pierre Archambault[1] et Maurice Nivat exposent la problématique dans l’article que nous reproduisons ci-dessous mais cela y ressemble un peu.

Que l’on soit ou non d’accord avec leur exposé des faits et leurs propositions, cela mérite selon nous au moins un débat. Or, de la même manière que la présence de Microsoft à l’école n’est pas discutée, la présence d’un éventuelle discipline informatique à part entière n’est pas à l’ordre du jour (quand bien même uniquement en lycée et uniquement dans les sections scientifiques comme il est pragmatiquement suggéré dans un premier temps par nos auteurs).

Et si ce n’est pas à l’ordre du jour c’est que notre vénérable institution scolaire a fait le choix de l’informatique en tant qu’outil sur l’informatique en tant qu’objet d’enseignement en arguant que tout va très bien Madame la Marquise puisqu’existe le Brevet Informatique et Internet (B2i) décliné et distillé de l’école élémentaire jusqu’au lycée en passant par le collège.

Le problème c’est qu’on se retrouve en face d’un double échec. Le premier échec c’est que l’on passe alors à côté d’une certaine culture informatique tout en ne formant pas les développeurs de demain dont nous aurons nécessairement besoin (sauf à se mettre à tout externaliser en Asie ou ailleurs). Développeurs en général mais aussi, ça coule de source, développeurs de logiciels libres en particulier (dont on ne s’étonnera pas de trouver trace dans leur projet de programme pour les sections scientifiques des lycées).

Le second échec, et ceci n’engage que moi et ma petite expérience, c’est que le B2i est globalement une mascarade qui ne veut pas dire son nom. Des enseignants juqu’aux directions académique en passant par les chefs d’établissement, tout le monde a intérêt à dire que le B2i fonctionne dans une logique de remontée hypocrite et enjolivée des informations dont l’Éducation Nationale a le secret. Mais dans la réalité, j’en mets ma main à couper, on est loin des objectifs et on se retrouve le plus souvent avec une parodie de B2i, les élèves de plus en plus sensibilisés hors de l’école commencent d’ailleurs à s’en rendre bien compte. Vous aurez beau me sortir la dizaine d’établissements où les B2i est une réelle réussite collective (exemples toujours mis en exergue par l’institution), vous ne m’ôterez pas de l’idée que depuis le temps qu’on parle du B2i, c’est-à-dire 8 ans, ça ne marche pas bien voire pas du tout (sauf parfois en collège là où les enseignants de technologie organisent quasiment en solitaire le B2i de par la proximité des compétences à valider avec leur propres programmes d’enseignement mais alors ça ne valait pas la peine dépenser autant d’énergie pour créer le B2i). Ne reste donc-t-il plus que les blogs de profs d’en bas pour dire que le roi B2i est nu ?

Il n’est pas question de nier les problèmes liés par exemple aux emplois du temps souvent surchargés des élèves que la création d’une nouvelle discipline ne risque pas d’améliorer. Simplement il faut savoir ce que l’on veut. D’accord pour que les hommes politiques nous fassent de beaux discours sur la fracture numérique[2], les nouvelles générations à l’ère du numérique, etc. Mais alors il faudrait joindre réellement les actes à la parole en cessant quelque peu de se voiler la face.

Ulaanaatar Mongolia - OLPC - CC-By

Pour un enseignement de l’informatique et des TIC

Maurice Nivat et Jean-Pierre Archambault
1er septembre 2008t
URL d’origine sur le site de l’EPI

Dans sa leçon inaugurale au Collège de France, Gérard Berry indiquait que « tout le monde le voit et le dit, notre civilisation est en train de devenir numérique », mais que « les fondements de la locution "monde numérique" restent largement ignorés du public ». Et Il ajoutait que « ce n’est pas étonnant car l’information synthétique est encore pauvre dans ce domaine qui ne repose pas sur des bases enseignées classiquement ».[3]

L’informatique est partout, dans la vie de tous les jours, au domicile de chacun, avec l’ordinateur personnel et l’accès à Internet ; dans l’entreprise où des systèmes de contrôle informatisés font fonctionner les processus industriels. Ses métiers, et ceux des télécommunications, occupent une place importante dans les services. On ne compte plus les objets matériels qui sont remplis de puces électroniques.

C’est l’informatique, pour ne prendre que ces exemples, qui a récemment fait faire de très spectaculaires progrès à l’imagerie médicale et qui permet ceux de la génétique. Elle modifie progressivement, et de manière irréversible, notre manière de poser et de résoudre les questions dans quasiment toutes les sciences expérimentales ou théoriques qui ne peuvent se concevoir aujourd’hui sans ordinateurs et réseaux. Elle change la manière dont nous voyons le monde et dont nous nous voyons nous-mêmes.

L’informatique s’invite aussi au Parlement, ainsi on s’en souvient, en 2006, pour la transposition de la directive européenne sur les Droits d’auteur et les droits voisins dans la société de l’information (DADVSI), suscitant des débats complexes où exercice de la citoyenneté rimait avec technicité et culture scientifique. En effet, s’il fut abondamment question de copie privée, de propriété intellectuelle… ce fut sur fond d’interopérabilité, de DRM, de code source.

Il y a de plus en plus d’informatique dans la société, mais les entreprises ont du mal à recruter les informaticiens qualifiés dont elles ont besoin, et cela vaut pour l’ensemble des pays développés. Le Syntec se plaint du manque d’attractivité chez les jeunes pour les métiers de l’informatique. Gilles Dowek, professeur d’informatique à l’École Polytechnique, fait le constat du faible niveau en informatique des ingénieurs généralistes en France, et de « nos étudiants, comparés à leurs camarades indiens et chinois, bien entendu, mais aussi européens »[4]. Dans leur rapport sur l’économie de l’immatériel, Maurice Lévy et Jean-Pierre Jouyet citent, parmi les obstacles qui freinent l’adaptation de notre pays à cette économie nouvelle et constituent un handicap majeur pour l’innovation, « notre manière de penser », invitant à changer un certain nombre de « nos réflexes collectifs fondés sur une économie essentiellement industrielle ». Ils insistent sur le fait que, dans l’économie de l’immatériel, « l’incapacité à maîtriser les TIC constituera une nouvelle forme d’illettrisme, aussi dommageable que le fait de ne pas savoir lire et écrire ». Nous sommes manifestement en présence d’un enjeu de culture générale, correspondant aux missions traditionnelles de l’École, former « l’homme, le citoyen et le travailleur ». Il faut donc se tourner résolument vers le système éducatif.

Si un consensus s’est dégagé au fil des ans sur la nécessité de donner une culture informatique aux élèves, des divergences sérieuses subsistent quant aux modalités pour y parvenir. Pas de problème pour considérer que l’ordinateur est un outil pédagogique aux vertus et potentialités reconnues, auquel il faut recourir avec pertinence, et un outil de travail personnel et collectif de la communauté scolaire. Ou pour intégrer les évolutions engendrées dans les disciplines par l’informatique qui modifie pour une part leur « essence », à savoir leurs objets et leurs méthodes.

En revanche, à aucun moment les élèves ne rencontrent dans leur formation générale une approche conceptuelle et disciplinaire de l’informatique, sous la forme d’un enseignement en tant que tel. Les conséquences en sont pour le moins fort dommageables.

Il y a eu dans les années quatre-vingts une option dans les lycées. Elle a été supprimée par deux fois pour de mauvaises raisons. En effet, deux approches pédagogiques s’affrontent. Pour les uns, les apprentissages doivent se faire exclusivement à travers les utilisations de l’outil dans les disciplines existantes. Une discipline informatique serait inutile. Ainsi, point besoin de savoir quoi que ce soit, ou peu s’en faut, pour se servir de logiciels. Étrange propos. Depuis que l’« homo faber » fabrique des outils et s’en sert, une bonne intelligence de l’outil (matériel ou conceptuel) est considérée comme nécessaire pour une bonne utilisation, efficace, précise et raisonnée : plus on en sait mieux cela vaut, partout. Il n’y aurait que l’informatique qui échapperait à cette règle et où l’ignorance serait un avantage ! Autre argument avancé, celui selon lequel on ne va quand même pas faire de tous les enfants des informaticiens ! Comme si l’enseignement des mathématiques ou du français, dont tout le monde admet la nécessité, avait pour but de faire de tous les élèves des mathématiciens ou des écrivains.

Pour les autres, dont nous sommes, lorsqu’un champ de la connaissance est partout, il doit être quelque part en particulier dans la culture générale scolaire, pour tous les élèves, sous la forme d’une discipline, avec ses professeurs, ses contenus, ses horaires. C’est la solution la plus efficace que l’on ait trouvée, la plus rationnelle, et la plus économique. C’est le cas par exemple des mathématiques, outil conceptuel au service de l’ensemble des disciplines, omniprésentes dans la société et, à ce titre, objet d’enseignement pour elles-mêmes. Il doit en aller à l’identique pour l’informatique. La culture scolaire est ainsi faite que des disciplines apparaissent en fonction de nouveaux savoirs et des besoins de la société, d’autres disparaissent, toutes évoluent.

« Objet » et « outil » d’enseignement, loin de s’opposer, sont complémentaires et se renforcent mutuellement. L’expérience montre que l’approche exclusive par l’utilisation de l’outil ne fonctionne pas, aussi bien dans l’enseignement scolaire que dans les classes préparatoires aux grandes écoles. Or, malheureusement, le B2i (Brevet informatique et internet) relève de cette démarche : les acquisitions doivent se faire dans des contributions multiples et partielles des disciplines, à partir de leurs points de vue, sans le fil conducteur de la cohérence didactique des outils et notions informatiques. Passe encore à l’école primaire où, et c’est fondamental, il y a un enseignant unique qui maîtrise donc ses progressions pédagogiques et leurs cohérences, l’organisation du temps scolaire et qui se coordonne facilement avec lui-même ! Mais ce n’est pas le cas au collège ou au lycée : là résident pour une bonne part les difficultés constatées de mise en oeuvre du B2i. On conviendra effectivement du caractère ardu de la tâche au plan de l’organisation concrète. Ainsi, un rapport de l’IGEN soulignait-il que « si différentes circulaires précisaient les compétences devant être validées, elles laissaient néanmoins dans l’ombre de l’autonomie des établissements les modalités concrètes de mise en oeuvre »[5]. Pour se faire une idée de la difficulté de l’exercice, il suffit d’imaginer l’apprentissage du passé composé et du subjonctif, du pluriel et de la subordonnée relative qui serait confié à d’autres disciplines que le français, au gré de leurs besoins propres (de leur « bon vouloir »), pour la simple raison que l’enseignement s’y fait en français.

De plus, comment organiser des apprentissages progressifs sur la durée lorsque les compétences recherchées sont formulées de manière très générale (par exemple : « maîtriser les fonctions de base » ou « effectuer une recherche simple »), éventuellement répétitives à l’identique d’un cycle à l’autre, et que les contenus scientifiques, savoirs et savoir-faire précis permettant de les acquérir, ne sont pas explicités. Sans oublier des conditions matérielles, accès, maintenance, gestion des parcs de machines… ne répondant pas forcément aux besoins. S’ajoute une formation des enseignants insuffisante. On n’envisage pas de faire enseigner la littérature française, ou les sciences de la vie, ou l’histoire par quelqu’un dont les connaissances ne dépasseraient pas celles qu’on peut acquérir en quelques semaines ou mois de stage. C’est pourtant le cas en ce qui concerne l’informatique et les technologies de l’information et de la communication. Certes, cela rend d’autant plus méritoires les efforts de tous les professeurs d’autres disciplines qui, en plus de leur matière principale, enseignent de l’informatique, souvent avec enthousiasme. Mais ils ne sont qu’une minorité. La boucle est bouclée : on retombe sur l’absence d’une discipline scientifique et technique avec des connaissances spécifiques et des méthodes identifiées et nommées.

L’association EPI (Enseignement public et informatique) a créé au sein de l’ASTI (fédération des Associations françaises des Sciences et Technologies de l’Information) un groupe de travail, de réflexion et d’action, sur l’enseignement de l’informatique et des TIC[6]. Ce groupe a élaboré un projet de programme pour les sections scientifiques des lycées[7]. Selon l’EPI et l’ASTI, qui ont notamment été reçues à l’Élysée, à Matignon et au Ministère de l’Éducation nationale, les réponses apportées par le système éducatif en matière de culture générale informatique de l’« honnête homme du XXIe siècle » ne sont pas à la hauteur des enjeux et des exigences de la société de l’immatériel. Enseigner l’informatique est une nécessité, par ailleurs de nature à lutter contre la crise des vocations scientifiques. Il serait temps qu’en particulier cesse ce paradoxe qui voit les futurs scientifiques, les générations à venir d’ingénieurs de la société de la connaissance, ne pas rencontrer dans leur scolarité l’informatique en tant que telle : théorie de l’information, algorithmique, programmation, réseaux… et autres notions et concepts, tous indispensables à une culture informatique et TIC permettant des usages raisonnés.

Maurice Nivat
Professeur émérite à l’Université Paris 7
Membre correspondant de l’Académie des Sciences

Jean-Pierre Archambault
Professeur agrégé de mathématiques
Président de l’association Enseignement Public et Informatique (EPI)

Notes

[1] Á plus d’un an d’intervalle, c’est le deuxième article du Framablog sur le sujet. Comme quoi Jean-Pierre Archambault est persévérant et nous aussi !

[2] Crédit photo : Ulaanbaatar, Mongolia par OLPC sous licence Creative Commons BY.

[3] http://www.college-de-france.fr/default/EN/all/inn_tec/p1200929441219.htm

[4] « Quelle informatique enseigner au lycée ? », intervention à l’Académie des Sciences du 15 mars 2005 http://www.lix.polytechnique.fr/~dowek/lycee.html

[5] http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/074000125/0000.pdf en page 17

[6] http://www.epi.asso.fr/blocnote/blocsom.htm

[7] http://asti.ibisc.univ-evry.fr/groupe-itic/Programme-04-03-2008.pdf




Créatifs Culturels et Mouvement du Logiciel Libre

Riza - CC byLes Créatifs Culturels vous connaissiez ? Moi non, jusqu’à cet été où quelqu’un est venu m’en parler avec une certaine passion pour ne pas dire une passion certaine[1].

De quoi s’agit-il exactement ? L’expression n’est pas forcément heureuse mais ce serait une nouvelle catégorie sociologique regroupant des personnes dont la première caractéristique est d’ignorer qu’elles en font partie !

Viennent ensuite les caractéristiques de fond et, comme souvent, Wikipédia est ton ami :

« Les Créatifs Culturels auraient en commun de favoriser la faible dépendance vis-à-vis des modes de consommation industrialisés, de chercher à favoriser le développement personnel et spirituel, de remettre l’humain au cœur de la société, de refuser les dégradations environnementales, notamment celles induites par l’exploitation des ressources naturelles et de rechercher des solutions nouvelles aux problèmes personnels ou sociaux (par exemple sans fausse antinomie entre engagement et vie personnelle). »

Cette absence d’antinomie entre engagement et vie personnelle, ce serait ce qui les distingue des Bobos (selon Sauveur Fernandez sur Novethic.fr) :

« Les Bobos et autres Nonos ont une réelle part de sincérité, mais sont pétris de contradictions, car encore au premier stade de sensibilisation. Viennent ensuite les consom’acteurs avec des degrés plus ou moins fort d’implication. Puis les alternatifs, c’est à dire les personnes qui s’impliquent réellement dans leurs engagements qu’ils essaient de vivre concrètement. Ils sont à la fois consom’acteurs et citoyens engagés, mariant à la fois la connaissance et la pratique concrète. Ils représentent, en fait, l’ensemble des gens sensibles à l’éthique, au social, à l’environnement. Ce sont eux les créatifs culturels, même s’ils n’aiment pas trop ce terme, le trouvant un peu trop "mode" ou "gadget". »

Ekopedia se montre quant à lui un peu plus précis voire engagé :

« Ce terme désigne une famille sociologique occupant une part importante des populations occidentales : 17% en France et 25% aux Etats-Unis. Il est la traduction de l’américain cultural creatives, créé par le sociologue Paul H. Ray et la psychologue Sherry Ruth Anderson.

Le courant porté par les créatifs culturels, ou "créateurs de culture", est perçu par les sociologues comme l’avènement d’une nouvelle culture. Elle serait d’après ces deux chercheurs «la manifestation d’une lente convergence de mouvements et de courants jusqu’alors distincts vers une profonde modification de notre société», l’éveil d’une civilisation post-moderne, aussi importante que celle qui, il y a cinq cents ans, marqua la fin du moyen-âge.

Les créateurs culturels vivent d’ores et déjà dans un système de valeur et de comportement nouveaux : mode de consommation fondé sur le respect et la reconnaissance de la valeur de l’environnement (consommation d’aliments biologiques, utilisation de la médecine naturelle), conscience des valeurs féminines (place des femmes dans la sphère publique, coopération et préoccupation par rapport à la violence), prédominance de l’être sur l’avoir et le paraître, quête humaine tournée vers l’intérieur et l’extérieur (connaissance de soi, ouverture aux autres, dimension spirituelle), implication individuelle et solidaire dans la société, dans le social avec une dimension locale, ouverture culturelle (respect des différences et de la multiculturalité). »

Déjà 17% en France… Et comme ils n’ont pas encore conscience de leur appartenance, on peut envisager des évolutions socio-économiques intéressantes le jour où ils réaliseront leur force potentielle et agiront véritablement ensemble. Sinon c’est le marketing qui récupèrera tranquillement tout ça.

Soit. Mais deux modestes petites questions en passant.

La première est d’interroger le concept même de Créatifs Culturels. Est-ce un groupe socio-culturel pertinent, qui représente réellement un phénomène palpable et durable ?

Personnellement, à parcourir quelques liens sur le sujet, je dois avouer que j’ai eu très souvent l’impression d’en être (sauf lorsque l’on insiste trop sur le côté spirituel ou développement personnel qui dérive parfois sur du new-age de mauvais aloi). Et puis, ça fait plus chic dans les diners mondains de se débarasser de l’étiquette péjorative de Bobo pour arborer fièrement celle de Créatif Culturel 😉

La seconde question est plus originale mais en relation avec le sujet principal de ce blog. En admettant que le concept soit valide, y aurait-il une quelconque affinité entre les Créatifs Culturels et le mouvement du logiciel libre ?

Vous me direz que cela oblige à définir le mouvement du logiciel libre, ce qui est déjà une difficulté en soi. Mais, admettons qu’on adhère peu ou prou à ce qui sous-tend cette citation de Stallman : « Le mouvement du logiciel libre est un mouvement social », peut-on alors envisager des convergences et autres synergies entre les deux mouvements (dans la manière d’appréhender l’économique et le relationnel par exemple) ?

En fait il me faudrait un peu plus de temps pour me pencher sérieusement sur la question (procrastination quand tu nous tiens !). Piteux et confus, je m’aperçois donc que je n’ai donc pas rempli la promesse du titre de mon billet. Ce qui ne m’empêche pas d’attendre avec impatience… vos propres réponses dans les commentaires !

Ce qui est à mon avis presque certain c’est que si un Créatif Culturel (digne de ce nom) se met à s’intéresser de près ou de loin à l’informatique il se tournera naturellement et effectivement vers les logiciels libres. À la différence du Bobo qui lui adoôore les logiciels libres mais souffre encore du syndrome Bayrou 😉

Notes

[1] Crédit photo : Riza (Creative Commons By)




Framabook passe à la télé

Lors des dernières RMLL à Mont de Marsan, j’ai été invité par Gilles Gouget (Divergence FM) à présenter notre petite collection de livres libres Framabook lors de la couverture de l’évènement par Divergence Numérique et la chaîne FreeNewsTV.

—> La vidéo au format webm

L’occasion de faire un peu de comm’ autour de ce projet qui nous tient à cœur et dont nous vous reparlerons bientôt puisque de nouveaux volumes sont dans les starting-blocks.

L’occasion aussi de rappeler les volumes déjà édités :

PS : N’hésitez pas à faire suivre l’info parce qu’en attendant de voir arriver les framabooks dans les grandes librairies, on compte avant tout sur le bouche à oreille du net 😉




La différence entre Open Source et Logiciel Libre enfin clairement expliquée

L’Open Source[1] :

Le Logiciel Libre[2] :

Notes

[1] La première vidéo est issue d’un reportage tout récent de SkyNews sur l’anoblissement du manchot Nils Olav ! (exemple parfait pour comprendre ce qui nous sépare de l’humour anglais)

[2] La seconde vidéo est un extrait d’un documentaire de la BBC Worldwide.




La SACEM, Don Quichotte et les vilaines Majors

Vous n’avez pas le temps de farfouiller dans les millions de youtoubeuries pour y dénicher les vidéos les plus intéressantes ? Ne vous inquiétez pas, le Framablog et son armée de visionneurs fous vous épargnent ce fastidieux travail (de sape).

Thème du jour : De la non fatalité d’être à la SACEM lorsque l’on fait de la musique. Ce qui en soi est une excellente nouvelle 😉

C’est expliqué vite-fait-bien-fait par notre ami Eric Aouanès de Dogmazic, lors d’une prise de vue réalisée au moment de l’inauguration de la première borne Automazic à Gradignan.

—> La vidéo au format webm