J’ai eu envie un jour de changer le monde – Frédéric Couchet – TEDx Talk

On ne compte plus les interventions publiques de Frédéric Couchet en tant que délégué général de l’April.

Mais il est plus rare (et plus émouvant) qu’il nous parle de lui en nous narrant son parcours personnel et ce qui l’anime, à savoir avant tout une belle et utile aventure humaine.

C’était en mai dernier lors du premier TEDx de Bordeaux.

—> La vidéo au format webm




L’impression 3D déjà à la portée de tous avec Blender et Shapeways

Le Framablog poursuit son petit dossier sur l’impression 3D, histoire de faire comprendre à certains de quoi il s’agit et de donner à d’autres le goût d’entreprendre.

Après une courte vidéo explicative et un article de fond sur l’impact actuel et futur de la propriété intellectuelle sur l’impression 3D, voici une leçon pratique et concrète réalisée à partir du logiciel de modélisation 3D Blender.

Ce qui est intéressant ici, c’est d’abord le fait que Blender soit un logiciel libre mais c’est aussi le fait que vous n’avez pas besoin d’avoir une imprimante 3D à la maison, c’est le service en ligne Shapeways qui se charge de matérialiser l’objet à partir de votre fichier Blender et qui vous envoie le tout par la Poste.

Conclusion : on peut déjà s’y mettre !

PS : On nous signales dans les commentaires l’existence de la société Sculpteo qui propose en français un service similaire à Shapeways.

Créer des figurines imprimées 3D avec Blender et le service d’impression Shapeways

Creating 3D Printed Models with Blender and the Shapeways Printing Service

Terry Hancock – 26 mai 2011 – Free Software Magazine
(Traduction Framalang : Lolo le 13)

Un des sujets technologiques les plus intéressants de ces récentes années a été la montée en puissance de la technologie « d’impression 3D » pour le prototypage rapide de formes peines. J’avais déjà évoqué le sujet pour le Free Software Magazine, mais ce mois-ci j’ai finalement décidé de l’essayer pour mon propre compte, en créant matériellement des « figurines d’étude » (un joli synonyme de jouets) pour mon projet vidéo, Lunatics.

Dans cet article, je vais vous décrire le processus complet, depuis la création des modèles 3D jusqu’à la réception du produit fini dans ma boîte aux lettres.

La principale raison pour laquelle j’ai fait ce projet, c’est que je voulais tester les capacités du service d’impression 3D de Shapeways. Ils ont associé ce service d’impression avec une conception collaborative en ligne, ce qui crée un environnement fun et motivant pour créer et commander des figurines. C’est un service très facile à utiliser et la qualité d’impression semble être au rendez-vous. Ils proposent aussi une grande variété de matériaux d’impression comme la céramique cuite, des métaux et des plastiques.

fig_on_keyb_comp.jpg

Figure 1 : Conçu dans Blender, exporté et téléversé chez Shapeways, livré en tant que figurine plastique imprimée – C’est cool non ?

La deuxième raison est que je désirais avoir quelque chose d’un peu plus tangible pour élaborer mon projet Lunatics. J’aime travailler avec des ordinateurs, mais parfois vous voulez avoir quelque chose de tangible à tenir et à manipuler avec vos mains quand vous essayez de figer les scènes et planifier les scripts.

Il nous fallait constuire une maquette de la colonie lunaire dans laquelle se déroule la plupart des actions du film. D’ordinaire c’est une affaire de mousse avec des plans de sols imprimés, un peu comme un jeu de plateau. Et comme pour un jeu de plateau, nous allions donc avoir besoin de figurines représentant nos personnages. Nous aurions pu opter pour des pions de Cluedo ou utiliser ceux des échecs avec un code couleur ou encore des petits chevaux, mais ça aurait été bien plus sympa si nous avions des figurines qui ressemblent réellement à nos personnages.

À la même échelle (1/100e) que ces personnages, J’ai aussi voulu créer quelques véhicules spatiaux. J’ai décidé de commencer avec le Moon Truck, un rover lunaire pressurisé conçu pour transporter fret et passagers.

Comme j’ai eu quelques difficultés à imaginer concrètement ce véhicule, il m’a semblé utile d’essayer d’externaliser cette tâche à la fois comme une maquette 3D dans un ordinateur et comme une maquette physique à tenir et à regarder.

Figurine des personnages

J’ai commencé par créer les silhouettes de mes personnages dans un brouillon Inkscape. Elles sont basées sur des figurines d’architecture du domaine public que j’ai grandement modifiées. J’en ai fait des pions comme de simples découpes sur une base ronde (à la différence de soldats de plomb ou des pions Cluedo).

Puis, j’ai sélectionné chaque personnage depuis mon dessin original sous Inkscape et je les ai copiées dans des fichiers SVG séparés (Figure 2). Je les ai sauvegardés en tant que Plain SVG pour un maximum de compatibilité.

fig_svg_prep.jpg

Figure 2 : J’ai d’abord copié le dessin des silhouettes en SVG dans des fichiers séparé et sauvegardé ceux-ci au format Plain SVG.

J’ai importé chaque SVG dans Blender en tant que curves (Figure 3). Il y avait huit personnages principaux (plus deux extras). Pour les mettre à la bonne taille (à l’échelle 1/100e, un mètre est réduit à un centimètre) j’ai décidé de prendre la convention qu’un Bender Unit (BU) serait égale à 1 cm. J’ai donc mis à l’échelle les courbes de cette façon.

fig_import_to_blender.jpg

Figure 3 : J’ai importé les objet SVG dans Blender en tant que curves.

Les courbes (curves) sont des objets spéciaux et limités dans Blender. Il vaut mieux utiliser le format mesh pour l’impression 3D. Donc, après avoir importé les courbes depuis le fichier original en SVG, j’ai du les convertir en meshes (soit ALT+C au clavier, soit Changer le type d’objet… depuis le menu Objet).

Mais après la conversion, je n’avais que le squelette, c’est-à-dire les sommets et les arêtes qui les reliaient. Pour créer une face (surface) représentant la silhouette, j’ai utilisé la fonction Beauty Fill (avec le raccourci clavier Alt+F ou en sélectionnant Mesh > Faces > Beauty Fill dans le menu Option du Mode d’édition accessible via la touche Tab). En fait, ça ne crée pas une seule surface, mais plusieurs, l’espace est alors rempli automatiquement par des triangles.

J’ai ensuite passé quelques temps à simplifier la forme. La chose la plus importante est de s’assurer que les petites surfaces sont coplanaires (appartiennent à un même plan).

fig_extruding_figure.jpg

Figure 4 : Extrusion de la silhouette.

Ensuite, il m’a fallu donner de l’épaisseur à la découpe. J’ai décidé de les faire d’un millimètre de large, ce qui correspond ici à un dixième de Blender Unit. Pour ce faire, j’ai sélectionné le mesh, puis j’ai basculé sur la vue le long de l’axe X (en tapant 3 sur le pavé numérique). Puis j’ai tapé sur Tab pour passer en Mode édition et j’ai sélectionné tous les sommets (tapez A pour basculer la sélection sur tous les sommets). Enfin, tapez la séquence E (extrude), Y (direction) et 0.1 : cela créera l’extrusion de la silhouette dans la dimension Y (Figure 4).

fig_anya_figure.jpg

Figure 5 : La représentation du personnage d’Anya montre comment la silhouette extrudée chevauche la base cylindrique.

J’ai répété l’opération pour mes dix figurines : création d’une base mesh et extrusion en cylindre mesh, en faisant se chevaucher les figurines extrudées et la base (voir Figure 5).

Il n’est pas nécessaire de fusionner les objets dans Blender, ce qui me sauve d’une trop grande complexité, mais qui donnera une légère surcharge de travail à Shapeways (en effet le calcul actuel est basé sur une analyse des meshes et ils ne compte pas les chevauchements, ainsi, vous serez facturés en double pour les volumes chevauchés).

fig_all_figures.jpg

Figure 6 : Toutes mes dix figurines dans Blender.

Téléverser le modèle

J’ai fait cela plus d’une fois : au départ téléverser juste un des personnages puis essayer différentes combinaisons. Heureusement Shapeways ne fait pas attention si une forme consiste en une simple pièce ou en une douzaine, mais ils facturent un supplément par forme pour la plupart de leurs matériaux. Ça veut dire qu’il est généralement moins cher d’imprimer une petite collection d’objets en tant que forme simple (si vous le pouvez) en particulier dans le cas où, comme moi ici, elles sont de petite taille.

fig_export_stl.jpg

Figure 7 : Exportation d’une forme Blender en format STL pour l’impression 3D chez Shapewys.

Quand vous avez fini votre conception, l’étape suivante est de les exporter dans un format que Shapeways va comprendre. Celui que j’ai trouvé le plus simple à utiliser est le format STL (Figure 7). Ce format est commandé par le menu d’export standard dans Blender (File > Export > STL).

Pour impimer la forme en utilisant Shapeways, j’ai commencé par aller sur le site pour m’identifier. J’ai ensuite cliqué sur le bouton “upload” tout en haut qui m’a renvoyé vers un formulaire d’envoi de ma forme (Figure 8). Le formulaire permet aussi de créer des formes pour votre propre utilisation ou pour le rendre public. En fait, comme avec d’autres service de fabrication communautaire, si vous mettez vos formes à la vente, vous toucherez une commission. N’étant pas tout à fait prêt pour rendre ces fomes libres, j’ai donc juste cliqué sur la boite privée.

fig_upload_model_shapeways.jpg

Figure 8 : Téléversement de la figurine Anya chez Shapeways.

Il est possible que vous ayez besoin de modifier ce qui a été téléversé si vous voulez que l’image apparaisse correctement, J’ai suivi quelques mauvais conseils et j’ai orienté l’axe Y en tant que “up” (haut) à la place de l’axe Z, ce qui a eu pour résultat la malheureuse Figure 9. Ça aurait été bien imprimé, mais ça donne un rendu de prévisualisation affreux.

fig_oops_wrong_way.jpg

Figure 9 : Ooops ! L’axe Z devrait être en haut si vous voulez une prévisualisation correcte (là j’ai mis Y).

Une fois que vous avez bien téléversé votre forme, vous pouvez commander une impresion 3D avec comme matériau une variété de plastiques, des pierres recomposées, quelques différents types de métal et différents finis de verre (Figure 10).

De façon pratique, l’interface calcule automatiquement le volume et le prix de chaque matériau pour que vous puissiez comparer. Le coût de pour mon lot de 10 figurines va de $3.20 avec de la pierre recomposée jusqu’à $64.40 pour de l’argent (j’ai fait mes figurines en plastique “Indigo strong and flexible” vu que j’avais utilisé de l’indigo pour les travaux artistiques des Lunatics). Le coût a été facturé en fonction des volumes calculés des formes (pas le bounding box, la vraie forme), plus un coût de base par forme.

fig_materials_costs.jpg

Figure 10 : Matériaux disponibles et prix pour mon lot de figurines.

Camion lunaire

Après le téléversement de figurines et ma tentative de les commander, j’ai découvert une autre particularité du service Shapeways : Il y a un minimum de commande de 25 dollars. Donc si je ne voulais pas gâcher mon argent, il me fallait commander autre chose. J’ai donc décidé de créer une autre forme au 1/100e, cette fois un des véhicules créés pour mon projet Lunatics (Figure 11). Je ne vais pas vous faire le détail de la création, mais c’est bien entendu une conception plus complexe.

fig_moontruck_in_blender.jpg

Figure 11 : La conception du camion lunaire dans Blender (je n’ai pas imprimé le module passager sur la droite).

J’ai fait un camion en plusieurs parties qui seront assemblables après coup. C’était en partie pour permettre un assemblage modulaire avec des pièces d’autres modèles (les boogies à quatre roues sont supposés être enlevables sur le camion réel par exemple). Pour d’autres il a été plus facile de faire des formes creuses avec des paroies fines qui ne coûteraient pas tant que ça à imprimer. Le couvercle amovible sur le module l’est aussi pour pouvoir accéder à l’intérieur, bien qu’il n’y ait pas vraiment de détails à l’intérieur (mais je pourrai en ajouter dans une prochaine version).

Vous pouvez commander les pièces en utilisant un simple système de vérification, comme n’importe quel site d’e-commerce. En tant que produits fabriqués à la demande, il y a des délais de fabrication en plus des délais de livraison à inclure dans le bon de commande (Figure 12).

fig_ordering_models.jpg

Figure 12 : Shapeway s’engage sur un délai de fabrication de 10 jours dans la vue du panier d’achat.

Livraison

Bon, cet article ne serait pas complet sans les photos des produits tels que je les ai reçus ! Ils arrivent dans de jolis petits emballages, un par forme, comme vous pouvez le voir sur la Figure 13.

fig_in_packages.jpg

Figure 13 : Mes objets, tels qu’ils me sont arrivés depuis Shapeways.

J’étais content de voir qu’il n’y a pas eu de figurines cassées (séparées de leur socle). Le camion est arrivé en pièces comme prévu (Figure 14).

fig_truck_parts.jpg

Figure 14 : Le camion a été imprimé en cinq parties (châssis principal et cabine, deux boogies à quatre roues, un conteneur et le toît de la cabine).

L’assemblage du camion a marché dès le premier essai. Les roues sont plus glissées qu’emboitées, mais elles restent en place comme il faut. La prise du sas était passablement dure à ajuster et il a fallu un peu forcer mais le plastique a résisté (Figure 15).

fig_assembling_truck.jpg

Figure 15 : Assemblage des composants du camion lunaire.

Il est intéressant d’examiner la texture de près. Il est possible de voir les faces du modèle original sous Blender (les formes cylindriques sont en fait des polygones à très grand nombre de côtés, comme dans le haut du boogie à quatre roues de la Figure 16)

fig_quad.jpg

Figure 16 : Zoom sur un des boogies, notez les lignes dûes à la méthode d’impression.

Et voila !

Il faut vous avouer que j’avais espéré que les roues tournent. J’ai essayé de concevoir un modèle articulé comme un challenge, mais apparemment je n’ai pas dû laisser suffisamment de jeu pour ça et elles sont donc coincées comme si elles étaient imprimées en bloc. C’est un des nombreux problèmes de conception que j’étudierai avant de tenter d’imprimer ces figurines à nouveau.

La Figure 17 montre les figurines assemblées avec un sous et un DVD pour donner une idée de l’échelle. Je suis ravi d’avoir pu tester cette technologie sur quelle j’écrirai certainement à nouveau et j’espère avoir fait quelques émules parmi les courageux lecteurs.

fig_fullset_w_scaleitems.jpg

Figure 17 : Mes pièces complètes avec un penny et un DVD pour l’échelle.

Mais je vais arrêter d’écrire. J’ai trop envie de jouer là avec ma voiture lunaire 🙂




Petite chronique de l’e-G8, retour sur une tempête médiatique

G8 vs Internet - CC by-saLes 24 et 25 mai derniers se tenait à Paris le « Forum e-G8 », en prélude au G8 de Deauville. Ce forum participatif consacré à Internet fut résolument orienté “business” : organisé par le groupe publicitaire Publicis, les invités étaient principalement les dirigeants des plus grosses sociétés de communication (Google, Facebook, eBay, Fox, Bertelsmann, Vivendi, etc.).

Si le commerce fait évidemment partie intégrante des possibilités ouvertes par Internet, cela ne constitue qu’une petite partie de l’utilisation qui est faite du réseau aujourd’hui. Or, la sélection très orientée des intervenants ne portait par conséquent qu’un seul point de vue : « Comment utiliser Internet pour doper la croissance économique ? » et sa question sous-jacente « Comment contraindre et réguler Internet pour s’assurer que les profits continueront d’augmenter ? ».

La société civile était donc complètement marginalisée dans le programme du e-G8, laissant le champ libre à un discours de « civilisation », de « moralisation », voire de contrôle de l’Internet. C’était sans compter sur des interventions de John Perry Barlow (EFF) ou Lawrence Lessig (Creative Commons), et surtout sans la culture du « hacking » (au sens de « bidouillage », « détournement ») d’associations comme la Quadrature du Net qui ont pu faire entendre la voix des principaux concernés : les internautes.

Petite chronique de l’e-G8, retour sur une tempête médiatique

Neurone364 – 24/06/2011 – Framablog

Cette petite rétrospective se propose de parcourir les principaux évènements du « forum e-G8 » tels qu’ils furent présentés par la presse écrite sur Internet. À l’origine de cette initiative, une constatation simple : la revue de presse que tient la Quadrature du Net est passée, lors de ces deux journées pittoresques, d’un rythme de croisière d’environ 5 articles signalés par semaine, à plus de 50 par jour ! La petite équipe bénévole dédiée à la tâche a donc suivi le mouvement imprimé par le porte-parole, les co-fondateurs, les accampagnants[1], les bénévoles et tous les citoyens qui agissent et réagissent en conscience aux attaques contre Internet signalées par la Quadrature, pour finir la semaine sur les rotules, avec un sourire serein et des cernes sous les yeux.

Tout a commencé calmement, le 18 mai 2011, avec la publication par la Quadrature du Net d’un communiqué intitulé « Forum eG8 » : un écran de fumée pour le contrôle gouvernemental du Net. Dans ce communiqué, nous dénoncions l’organisation par le gouvernement d’un processus pseudo-consultatif, mis en place autour d’un show à l’américaine, avec les stars du web commercial réunies à Paris. En parallèle, accompagnée de plusieurs organisations d’artistes et citoyennes, la Quadrature invitait toutes les créativités à s’exprimer contre les tentatives de transformer Internet en un outil de répression et de contrôle en ouvrant le site web http://g8internet.com à l’expression publique.

D’un côté, il y avait donc ce simple espace de liberté, ouvert pour l’occasion par quelques gus dans un garage, et de l’autre, Publicis, un géant mondial à qui l’on confie des budgets d’état pour faire son métier : de la publicité. De la communication pour ceux qui ont, à vendre, la vision d’un Internet restreint aux intérêts de leurs activités…

Vous vous demandiez ce qu’est la Quadrature du Net ? C’est ça : un village d’irréductibles amoureux de la liberté d’expression, celle offerte à tous par l’Internet neutre que nous avons encore entre les mains, et qui s’échappe comme une poignée de sable sur laquelle soufflent de puissants intérêts privés et commerciaux.

Heureusement, cette histoire n’est pas encore écrite, et nous avons avec nous bien mieux qu’une potion magique : un réseau planétaire reliant sans discrimination toutes les bonnes volontés du monde. Il ne tient qu’à chacun de tendre la main (vers son clavier, et son prochain) pour se dresser en rempart de ce droit fondamental qu’est l’accès à Internet, l’accès aux autres.

Ce 18 mai 2011, la presse commençait à frémir devant l’évènement en préparation, LePoint.fr titrait par exemple : « Le forum e-G8 suscite doutes et attentes » notant que si « beaucoup espéraient une mise à plat des politiques de gouvernance du Net, de respect de la vie privée ou de développement des libertés d’expression et d’information, il se pouvait que l’orientation de ce e-G8 soit avant tout économique et tournée vers les grands acteurs privés plutôt que vers les internautes. »

Le 19, c’est Médiapart qui se faisait l’écho d’une société civile oubliée à cette grand messe, dans un article intitulé : « Avant le G8 du Net, les citoyens tentent de garder la parole ». Et ce « tentent » n’était rien moins que défaitiste.

Le 20 mai, la Quadrature du Net annonçait une analyse à paraître dans l’hebdomadaire Marianne et sur le site du journal détaillant la spectaculaire opération de rattrapage tentée par Nicolas Sarkozy auprès des électeurs internautes, après avoir lui-même empêché la tenue d’une conférence mondiale consacrée à la liberté d’expression sur internet, pourtant proposée par Bernard Kouchner. Après avoir menacé de passer les banlieues au karsher, le conquistador de l’Élysée voulait cette fois se donner pour mission de « civiliser » l’internet.

L’Élysée ne veut pas entendre parler de cyberdissidence, ni de liberté d’expression, il veut du “contrôle”. Frédéric Martel, Marianne, 21-27 mai 2011

Cet article de Marianne, repris dans le Figaro sous le titre : « Sarkozy préfère “l’internet civilisé” aux cyberdissidents » sera lu plus de 30 000 fois en une semaine, première goutte de pluie annonçant la fin du calme avant la tempête médiatique.

D’ailleurs des gouttes tombaient déjà au delà de nos frontières, comme en atteste cet article du New York Times paru le même jour, sous le titre narquois « Chaos of internet Will Meet French Sense of Order » ou « Le chaos d’Internet va rencontrer le sens de l’ordre français ».

La pluie s’est mise à crépiter le 23 mai, à la veille du forum, le lundi de cette fameuse semaine. Les premières éclaboussures vinrent du site PublicSénat.fr reconnaissant que l’évènement annoncé est « Pour le chef de l’Etat, l’occasion de renouer avec le monde du Web, un peu malmené avec la loi Hadopi. Nicolas Sarkozy n’est pas un grand amateur des questions numériques. », et relayant l’analyse de la Quadrature quant au contenu des « débats », voire plutôt du déballage prévu pour les jours suivants. De son côté, l’Express publiait dans un article « Ce qu’il faut savoir sur l’eG8 » confiant que

L’impression générale donnée par le forum est celle d’un grand fourre-tout, dont on imagine qu’il servira de grand rendez-vous de networking. Dans ces conditions, difficile de déboucher sur des annonces concrètes. D’autant que les chefs d’Etat du G8 ne prévoient de consacrer qu’une heure à ces questions lors du sommet de Deauville.

En Europe, le site RTL.be titrait sans illusions et avec le franc-parler que l’on ne trouve plus dans l’hexagone concernant les affaires gouvernementales : « eG8 Forum : politiques et stars du Web à Paris ».

Le mardi 24 mai la Quadrature du Net rappelait dans un communiqué, pour lancement de l’opération, que :

L’eG8 est une mise en scène où un gouvernement déconnecté de la civilisation Internet espère apparaître en phase avec celle-ci en se montrant en compagnie de quelques leaders économiques du secteur. »

Et la pluie se fit alors battante. Elle ruisselait sur nos écrans en ondées numériques défilant comme les vagues vert-phosphorescent des moniteurs de la matrice… Libération parlait ainsi de « L’illustration parfaite d’une collusion malsaine » Europe1 des « “People” et paillettes pour le G8 du web » et Le Monde relevait que l’e-G8 n’allait que « de “Internet civilisé” à l’Internet “facteur de croissance” », se faisant l’écho des analyses de la Quadrature ou de l’IGC[2] pour qui il est anormal que le forum soit « organisé par le secteur privé et que l’accès soit donné aux seuls acteurs des entreprises privées et des gouvernements. »

20Minutes.fr notait également de son côté qu’à l’e-G8 il semblait se confronter « deux visions du Net irréconciliables » tandis que Challenges.fr reprenait le glissement sémantique opéré par le Président qui ne parla plus alors dans ses discours de civiliser l’espace numérique, mais désormais de moraliser l’internet.

SudOuest.fr titra sur la sensationnelle déclaration de Nova Spivack, invité à l’événement :

Internet va balayer les gouvernements

En début d’après midi, la CNIL tapait du poing sur la table dans une spectaculaire sortie intitulée « La protection de la vie privée absente de l’e-G8 : oubli ou rejet ? » et se terminant par plusieurs remarques dont la plus cinglante est sûrement :

Lors de cet événement où tout s’achète, combien coûte la protection de la vie privée ? Apparemment pas grand-chose !

Une petite phrase qui en dit long sur la considération du gouvernement à l’égard de cet indispensable organe de l’état, et qui se répandit sur les blogs et micro-blogs cet après-midi là, alors que le déjeuner des canotiers imaginés par Publicis subissait un orage imprévu.

En milieu d’après midi, la Quadrature publiait, avec une trentaine d’organisations et associations attachées aux libertés sur Internet une « Déclaration de la Société Civile au G8 et e-G8 » rappelant en quatre points essentiels leur attachement à l’accès Internet pour tous, à la liberté d’expression et à la neutralité du réseau.

Déclaration entendue par France24 qui constata en fin de journée que l’e-G8 « ne dissipait pas la crainte de la censure » et le pire était encore à venir.

Le lendemain ce fut le déluge. Des journaux allemands, anglais, italiens, suisses, belges, canadiens ou américains se firent l’écho de l’actualité de la veille, à l’image d’FT.com titrant «? Tech titans’ optimism fades under Paris sun ?» ou « L’optimisme des titans de la technologie s’estompe sous le soleil de Paris » ou encore de V3.co.uk avec son « Rights groups revolt as Sarkozy reveals plans to stamp out Internet freedoms », « les défenseurs des droits sur internet se révoltent face aux plans dévoilés par Sarkozy d’éradiquer les libertés sur Internet ». Pour Cyberpresse.ca « Sarkozy souffle le chaud et le froid » :

Évoquant le rôle qu’a joué Internet dans les soulèvements observés en Tunisie ou en Égypte, il a déclaré que le web est devenu “le vecteur d’une puissance inédite pour la liberté d’expression dans le monde”. Mais, du même souffle, il a soutenu que le réseau mondial ne doit pas être “un univers parallèle affranchi des règles du droit ” Le discours de Nicolas Sarkozy ne risque guère d’apaiser les organisations de défense des usagers de l’internet, qui l’accusent de vouloir “censurer” le réseau.

Analyse on ne peut plus juste, car pendant ce temps là, la société civile se mobilisait pour faire entendre ses voix au cours d’une conférence de presse improvisée tournant au contre-sommet de l’e-G8. Une soixantaine de journalistes vinrent en effet y entendre Lawrence Lessig (fondateur des Creative Commons), Jean-François Julliard (secrétaire général de RSF), le journaliste américain Jeff Jarvis, Susan Crawford (membre de l’ICANN et ex-conseillère de Bill Clinton) ou encore Jérémie Zimmermann (porte parole de la Quadrature du Net). Parmi ces journalistes, ceux de ZDNet devait titrer dans l’après midi « Un “contre eG8” dénonce la mise en scène du forum Internet du gouvernement » rappelant que pour la Quadrature du Net, le « forum » e-G8 n’était qu’un pas de plus vers la régulation des réseaux, les modèles économiques de ces « géants » du web étant basés sur des restrictions aux libertés fondamentales des citoyens[3].

En fin de journée, le Figaro se fit l’écho des « Déceptions à l’e-G8 » tandis que le Monde rappelait l’une des premières revendications de la Quadrature du Net, dans un article nommé : « L’accès à Internet doit devenir un droit fondamental ».

Les jours suivants, et jusqu’à la tenue du G8 lui même, la pluie ne s’arrêta pas comme une simple averse. Le 26 mai, Ouest-France tint à résumer « G8 de l’Internet : que faut-il en retenir ? » notant « que le G8 à venir dans les jours suivant veut réguler Internet. Et cette éventualité fait des remous chez les acteurs du web. »

La France paraît assez mal placée pour donner des leçons et pourtant, quel discours le président français a-t-il tenu au gotha mondial des créateurs d’avenir ? Il leur a dit qu’il fallait réguler Internet, le moraliser

Indiquait quant à elle France24 dans un article intitulé : « Sarkozy et Internet : le grand malentendu »

Dans une interview vidéo parue le lendemain sur ITEspresso Tristan Nitot (fondateur et président de l’association Mozilla Europe) indiquait qu’à l’ « e-G8 : il y a un manque de représentativité, on a l’impression de servir d’alibi »

LeMonde concèdait le 28 mai que l’e-G8 restera « un sommet à l’impact limité » alors que Télérama ne mâchait pas ses mots, indiquant plus prosaïquement « L’e-G8 à Paris : game over ! ».

On a surtout assisté, à Paris, pendant les deux jours de ce premier “G8 d’Internet”, à des démonstrations de force et des discours de “winners” du Web en quelques minutes chrono. On n’en ressort pas franchement bouleversés…

Le porte-parole de la Quadrature du Net, Jérémie Zimmermann, qui ne dormit que 10h en trois jours, fut sollicité pour de nombreuses entrevues. Parmi ces interviews, la plus insolite fut sûrement celle accordée à LCI, qui permet aujourd’hui de lire, sur TF1.fr qu’à l’« e-G8 : Nicolas Sarkozy a voulu se racheter une conduite » alors qu’il « s’était adressé mardi exclusivement à un parterre de chefs d’entreprises et d’acteurs “business”. Or, ce n’est qu’une toute petite partie de ce qu’est réellement Internet.»…

Épuisés mais ravis, c’est globalement dans cet état que se trouvaient la plupart des neurones de la Quadrature du Net à la fin de cette intense semaine. Les trois modérateurs du site http://g8internet.com n’ayant par exemple guère profité de plus sommeil, vu l’activité débordante du site. Morceaux choisis :

Mais ces efforts ne furent pas vains, loin s’en faut. On pouvait en effet lire sur Slate.fr le 29 mai, « G8 et internet: un rendez-vous manqué » :

Difficile d’oublier que le eG8 était organisé par la France, le pays qui a introduit l’approche de la riposte graduée et un filtrage administratif du Web . Ce qui lui a valu de faire son entrée dans la liste des pays « sous surveillance » dans le rapport 2011 de Reporters sans frontières sur « Les Ennemis d’Internet ». Des dizaines d’organisations militent pour la liberté d’expression – notamment en ligne – et le respect de la vie privée, or seules deux d’entre elles ont été invitées à s’exprimer dans le cadre du eG8 

Une façon de constater, une fois de plus qu’en usant simplement, mais avec conviction, des recours démocratiques à disposition des citoyens en France, la société civile a vraiment le pouvoir de prendre part à la vie politique du pays, de participer des décisions et d’éviter le plus souvent le pire d’être voté[4]. Or la Quadrature du Net ne se présente à vous que comme une boîte à outil technique et politique, informant sur les enjeux et donnant les clés à chacun pour qu’il construise son intervention citoyenne. Ce n’est pas plus compliqué qu’un courriel, ou qu’un coup de fil, mais c’est ce quelque chose qui change la donne, alors indignez vous ! D’ailleurs, vous avez entendu parler d’ACTA ?

Notes

[1] Néologisme pour : campaigners

[2] Internet Governance Caucus

[3] L’intégralité des interventions de cette conférence de presse est disponible depuis en vidéo sur le Médiakit de la Quadrature du Net

[4] En terme de lois inapplicables ou se révélant contraire à la constitution par exemple…




20 recommandations pour accompagner la révolution de la fabrication personnelle

Fluid Forms - CC by« Un certain nombre de forces convergentes vont faire passer la fabrication personnelle, ou autofabrication, du statut de technologie marginale utilisée par les seuls pionniers et passionnés à un outil quotidien pour le consommateur et l’entreprise lambda.

Dans quelques années, on trouvera des technologies de fabrication dans les petites entreprises et établissements scolaires.

Dans dix ou vingt ans, tous les foyers et bureaux posséderont leur machine d’autofabrication.

Dans une génération, on sera bien en peine d’expliquer à ses petits-enfants comment on a pu vivre sans son autofabricateur, et qu’on devait commander des biens préfabriqués en ligne et attendre qu’ils nous arrivent dans notre boîte au lettre livrés par la Poste. »

Cette citation qui claque est extraite d’un passionnant rapport américain d’une centaine de pages sur l’émergence de la fabrication personnelle.

Commandé par l’Office of Science and Technology Policy américain, on y expose clairement de quoi il s’agit tout en proposant d’importantes recommandations pour encourager et accompagner le mouvement.

Vous en trouverez le résumé et les principales recommandations traduits ci-dessous[1].

On ne s’étonnera pas de constater que l’accent est avant tout mis sur l’éducation, en relation avec les futurs petite entreprises qui immanquablement sortiront des garages des fab labs pour proposer localement leurs services et redessiner une économie plus humaine[2].

Certains nous reprochent notre idéalisme ou notre irréalisme, mais, telle l’impression 3D qui n’est qu’un élément du mouvement, comment ne pas voir ici l’un des plus grands espoirs d’un avenir incertain ?

Et pendant ce temps-là en France me direz-vous ? Vu comment l’Éducation nationale méprise superbement le logiciel libre et sa culture depuis plus d’une décennie, ce n’est pas demain la veille qu’on rédigera une telle étude et qu’on verra arriver des laboratoires de fabrication personnelle dans nos établissements scolaires. Quitte à prendre encore plus de retard sur le véritable train du futur et du progrès.

Pour en savoir plus sur le sujet, InternetActu est un excellent point de départ : Les enjeux de la fabrication personnelle, La prochaine révolution ? Faites-là vous-mêmes !, FabLabs : refabriquer le monde, Makers (1/2) : Faire société, Makers (2/2) : Refabriquer la société.

L’usine @ la maison : l’économie émergente de la fabrication personnelle (résumé)

Factory@Home : The Emerging Economy of Personnal Manufacturing

Hod Lipson & Melba Kurman – décembre 2010 – OSTP
(Traduction Framalang : Lolo le 13 et Yonnel)

Ce rapport souligne l’émergence des technologies de fabrication personnelle, décrit leur potentiel économique, leurs bénéfices sociaux et recommande des mesures que le gouvernement devrait prendre en considération pour développer leur potentiel.

Les machines de fabrication personnelle, parfois appelées « fabber », sont les descendantes des grandes machines de production de masse des usines, mais de taille minuscule et à faible coût. Ces machines à fabriquer à l’échelle individuelle utilisent les mêmes méthodes de fabrication que leurs ancêtres industrielles mais sont plus petites, meilleur marché et plus faciles à utiliser.

Les machines à la taille du foyer telles que les imprimantes 3D, les découpeuses laser et les machines à coudre programmables, combinées avec plan conçu sur ordinateur (en CAO), permettraient aux gens de produire des produits fonctionnels à la maison, sur demande, en appuyant simplement sur un bouton. En quelques heures, ces mini-usines pourront fabriquer un objet simple comme une brosse à dents, reproduire des pièces d’une machine complexe, créer des bijoux comme un artisan ou réaliser des ustensiles ménagers. En quelques années, les machines de fabrication personnelle pourraient être suffisamment sophistiquées pour permettre à n’importe qui de fabriquer des objets complexes tels que des appareils avec de l’électronique intégrée.

Un certain nombre de forces convergentes sont en train d’amener la conception et la production industrielles à un point critique où elles deviendront peu chères, fiables, faciles et suffisamment versatiles pour une utilisation personnelle.

L’adoption des technologies de fabrication personnelle est accelérée par les machines à bas coût, les communautés d’utilisateurs sur Internet, des logiciels de Conception Assistée par Ordinateur (CAO) d’usage plus aisé, un nombre grandissant de plans de CAO disponibles en ligne et des matières premières de plus en plus accessibles.

Les technologies de fabrication individuelle auront un impact profond sur notre façon de concevoir, fabriquer, transporter et consommer les produits physiques. En suivant le même chemin que l’ordinateur devenu personnel, les technologies de fabrication passeront de l’usine à la maison. Ces outils de production personnalisés permettront aux consommateurs, aux écoles et aux entreprises de travailler et de jouer différemment.

Ces technologies de fabrication naissantes introduiront une évolution industrielle qui réunira le meilleur de la production de masse et de la production artisanale, avec le potentiel d’inverser en partie le mouvement de délocalisation.

Les technologies de fabrication personnelle feront émerger des marchés mondiaux pour des produits personnalisés (sur le modèle de la longue traîne), dont les volumes de vente seront assez rentables pour faire vivre des entreprises spécialisées (fabrication de niche,design…). Les communautés mal desservies ou isolées géographiquement auront la possibilité de concevoir et fabriquer localement leurs propres matériel médical, jouets, pièces mécaniques et autres outils, en utilisant les matériaux présents sur place.

À l’école, les outils de fabrication à petite échelle encourageront une nouvelle génération d’innovateurs et cultiveront l’intéret des élèves pour les cours de sciences, de technologie, d’ingéniérie et de mathématiques.

Les obstacles et les défis

Nombre d’obstacles qui découragent leur généralisation à la maison, à l’école et dans les entreprises se trouvent sur le chemin de l’adoption par le grand nombre des technologies de fabrication personnelle.

Un obstacle majeur est le classique paradoxe de l’œuf et de la poule : les marchés actuels pour les technologies de fabrication personnelles à destination des consommateurs et de l’enseignement sont trop petits pour attirer l’attention d’entreprises, ce qui décourage les investissements dans la création de produits et de services qui donc ne parviennent pas à attirer plus de consommateurs.

Les autres barrières sont les questions de sécurité, les défis de la standardisation des pièces et des contrôles de versions, les problèmes de propriété intellectuelle et un manque de contrôles adaptés sur la sécurité et la réglementation.

Recommandations

Il y a plus de trente ans, notre nation a conduit le mouvement de la révolution de l’informatique personnelle. Aujourd’hui, nous devons nous assurer que nous conduirons le mouvement de la révolution de la fabrication personnelle. Des investissements gouvernementaux réfléchis et visionnaires sont nécessaires pour garantir que les États-Unis resteront compétitifs dans l’ère de la fabrication personnelle et tireront les bénéfices potentiels des technologies de la fabrication personnelle.

Ce rapport recommande les actions suivantes :

1. Créer un laboratoire de fabrication personnelle dans chaque école.

2. Former les enseignants aux technologies de conception et de fabrication en relation avec les matières scientifiques et technologiques.

3. Créer des cursus scolaires de grande qualité avec des modules optionnels de fabrication.

4. Inclure la conception et la fabrication dans les cours de soutien après l’école.

5. Allouer des ressources publiques afin d’initier les entreprises locales à la production numérique en partenariat avec les établissements scolaires locaux.

6. Encourager la publication des spécifications matérielles.

7. Développer les formats de fichiers ouverts pour les plans de CAO.

8. Créer une base de données de fichiers CAO utilisés par les pouvoirs publics.

9. Imposer la publication des sources/de la géométrie pour les ressources gouvernementales publiques.

10. Mettre en place un « Programme de Recherche et d’Innovation Individuelle » pour les entrepreneurs du DIY (Do It Yourself).

11. Donner la priorité lors d’appels d’offres aux entreprises qui utilisent la fabrication personnelle.

12. Établir un « bouclier anti-propriété intellectuelle » pour les agrégateurs et les producteurs ponctuels.

13. Explorer les microbrevets comme une unité de propriété intellectuelle plus petite, plus simple et plus agile.

14. Revisiter les réglementations sur la sécurité pour les produits fabriqués individuellement.

15. Introduire une définition plus granulaire d’une « petite » entreprise industrielle.

16. Encourager la création de Fab Labs.

17. Les avantages fiscaux accordés aux « entreprises propres » devraient également concerner les entreprises de fabrication personnelle.

18. Accorder des réductions d’impôts sur les matières premières aux entreprises de fabrication personnelle.

19. Financer une étude du Département d’éducation sur la fabrication personnelle dans les matières scientifiques et technologiques.

20. Renforcer la connaissance et l’apprentissage sur la conception de produit.

Notes

[1] Dans l’idéal nous souhaiterions traduire l’intégralité du rapport, s’il y a des volontaires qu’ils n’hésitent pas à se manifester via le formulaire de contact.

[2] Crédit photo : Fluid Forms (Creative Commons By)




#SpanishRevolution ? Traduction 1.1 du Manifeste « Democracia Real Ya »

Fito Senabre - CC by-sa« Nous ne sommes pas contre le système, c’est le système qui est contre nous ! »

« Si vous nous empêchez de rêver, nous vous empêcherons de dormir ! »

C’est avec de tels slogans que de nombreux espagnols contestent et occupent l’espace public depuis près d’une semaine, en utilisant massivement le réseau pour se coordonner.

Pas de mots d’ordre, pas de revendications précises, pas de leaders, pas d’idéologie (sauf à considérer que le petit livre de Stéphane Hessel Indignez-vous ! puisse servir de référence commune), c’est un mouvement qui déconcerte et qui n’a pas eu encore beaucoup d’écho chez nous, affaire DSK oblige.

Mais qui sait si il ne fera pas tâche d’huile en France et en Europe car, pour le coup, vérité (notamment économique) en deçà des Pyrénées est la même au delà, modulo le fait que tous les pays n’ont pas encore un taux de chômage de sa jeunesse à… 40% !

Pour en savoir plus il y a l’article Wikipédia à suivre au jour le jour (si possible en langue originale). Il y a aussi cette excellente traduction d’Owni : Comprendre le révolution espagnole[1].

« Quelque chose de grand est en train de se passer ici », nous dit-on dans ce billet. On y apprend également que l’un des éléments déclencheurs du mouvement fut le passage d’une loi présentant de forte similitudes avec notre Hadopi et notre Loppsi (la Ley Sinde). Une loi qui fit l’objet d’un pacte entre les trois grands partis coalisés (PSOE, PP et CiU) et qui, no comment, donna l’impression à une majorité d’internautes qu’elle était un cadeau fait aux groupes de pression au détriment des citoyens.

Certains n’y verront peut-être qu’un apéro Facebook amélioré, d’autres au contraire évoquent déjà la contagion du printemps arabe au sein même de nos démocraties (ou de ce qu’il en reste).

Nous verrons bien… Mais en attendant nous vous proposons ci-dessous la traduction française du manifeste de l’un des fers de lance du mouvement, le collectif « Democracia Real Ya ! », « une vraie démocratie, maintenant ! ».

Remarque : On peut considérer cette traduction comme la version 1.1 de celle que l’on peut trouver actuellement sur Internet et qui était, à nos yeux, nettement perfectible, étant entendu que vous pouvez continuer à proposer des améliorations en vue d’une version 1.2 🙂

Manifeste de « Democracia Real Ya ! »

URL d’origine du document

Nous sommes des personnes simples et ordinaires. Nous sommes comme toi. Des gens qui se lèvent chaque matin pour étudier, pour travailler ou pour chercher du boulot ; des gens qui ont une famille et des amis. Des gens qui travaillent dur tous les jours pour vivre et offrir un meilleur futur à ceux qui les entourent.

Parmi nous, cer­tains se consi­dè­rent pro­gres­sis­tes, d’autres plutôt conser­va­teurs. Certains sont croyants, d’autres pas. Certains ont des idéo­lo­gies affirmées, d’autres sont apo­li­ti­ques. Mais nous sommes tous préoc­cupés et indi­gnés par la situa­tion poli­ti­que, économique et sociale actuelle. Par la cor­rup­tion des poli­ti­ciens, des patrons, des ban­quiers… qui nous laissent impuissants et sans voix.

Cette situa­tion nous fait souffrir au quotidien ; mais si nous nous unissons nous pouvons la modifier. C’est le moment de nous mettre en marche pour bâtir ensemble une société meilleure. Pour ce faire, nous sou­te­nons fermement que :

  • Les priorités de toute société développée doivent être l’égalité, le progrès, la solidarité, le libre accès à la culture, le développement durable et le bien-être des personnes.
  • Il existe des droits fondamentaux que la société a le devoir de garantir : le droit au logement, au travail, à la culture, à la santé, à l’éducation, à l’engagement politique, à l’épanouissement personnel et le droit à l’accès aux biens nécessaires à une vie saine et heureuse.
  • Le fonctionnement actuel de notre système politique et gouvernemental ne répond pas à ces priorités et il devient un obstacle pour le progrès de l’humanité.
  • La démocratie, par essence, émane et appartient au peuple, mais, dans ce pays, la majorité de la classe politique ne lui prête pas attention. Le rôle des politiciens devrait être de faire entendre nos voix aux institutions, en facilitant la participation politique des citoyens grâce à des voies de démocratie directe pour le bénéfice de l’ensemble de la société. Et non celle de s’enrichir et prospérer à nos dépens, en se pliant aux exigences des pouvoirs économiques et s’accrochant au pouvoir par la dictature partitocratique du PPSOE[2].
  • La soif de pouvoir et son accumulation entre les mains de quelques-uns créent inégalités, tensions et injustices, ce qui mène à la violence et que nous refusons. Le modèle économique en vigueur, obsolète et antinaturel, coince le système social dans une spirale qui se consomme par elle-même en enrichissant une minorité et en plongeant les autres dans la pauvreté. Jusqu’à l’effondrement.
  • L’accumulation d’argent est la finalité du système, sans prendre en considération le bien-être de la société et de ceux qui la composent ; gaspillant nos ressources, détruisant la planète, générant du chômage et des consommateurs frustrés.
  • Nous sommes les rouages d’une machine destinée à enrichir une minorité qui ne sait plus reconnaître nos besoins. Nous sommes des citoyens anonymes, mais sans nous rien ne serait possible car nous faisons tourner le monde.
  • Nous ne devons plus placer notre confiance en une économie qui ne tourne jamais à notre avantage. Il nous faut éliminer les abus et les carences que nous endurons tous.
  • Nous avons besoin d’une révolution éthique. L’argent ne doit plus être au dessus tout, mais simplement à notre service. Nous sommes des êtres humains, pas des marchandises. Je ne suis pas le produit de ce que j’achète, pourquoi je l’achète et à qui je l’achète.

Pour toutes ces raisons, je suis indigné(e).
Je crois que je peux changer les choses.
Je crois que je peux aider.
Je sais que tous ensemble nous le pouvons.
Il ne tient qu’à toi de nous rejoindre.

Notes

[1] Crédit photo : Fito Senabre (Creative Commons By-Sa)

[2] Contraction des deux partis PP et PSOE, un peu comme si on disait UMPS chez nous.




L’expérience Sugar Labs préfigure-t-elle une révolution éducative du XXIe siècle ?

Danishkanavin - CC by-saDu projet One Laptop per Child (ou OLPC) les grands médias ont surtout retenu qu’il s’agissait de mettre un ordinateur entre les mains des enfants des pays défavorisés. Confondant la fin et les moyens ils sont alors souvent passés totalement à côté de son intérêt principal qui est pédagogique. Negroponte n’a de cesse à juste titre de le répéter : « le projet OLPC n’est pas un projet informatique, c’est un projet éducatif ».

Lorsqu’une écolière Uruguayenne et un écolier Uruguayen allument leur petit ordinateur vert, ils se retrouvent sur une interface qui est fort différente du classique environnement graphique d’un Mac, Windows ou d’une distribution GNU/Linux.

Ici on abandonne la métaphore du bureau. Applications et fichiers sont bien entendu toujours présents mais ce qui est mis en avant c’est l’interaction avec les autres, ce qui apparaîtra de suite à l’écran c’est la présence du camarade, ce sur quoi il travaille, sachant qu’il est alors facile de le rejoindre pour collaborer.

Cette interface innovante et pleine de promesses s’appelle Sugar (cf vidéo). Elle est déjà massivement utilisée dans des pays comme l’Uruguay (cf vidéo) et nous voici alors projetés à des années-lumière de ce qu’une école française peut proposer non seulement comme outil mais aussi et surtout comme conception générale de sa fonction et de ses missions[1].

En matière d’éducation et de nouvelles technologies, il y a ceux qui pensent qu’il est important de savoir comment mettre en gras dans Word, c’est-à-dire apprendre le mode d’emploi d’un logiciel propriétaire, et il y a ceux qui veulent en profiter pour… changer le monde !

Le créateur de Sugar, Walter Bender, est de ceux-là. Simon Descarpentries l’a rencontré pour nous à Paris à l’occasion de l’Open World Forum 2010 et il a gentiment accepté de nous livrer un texte inédit nous présentant la jeune fondation Sugar Labs, sa philosophie, ses objectifs et ses réalisations.

Il ne s’agit que d’un témoignage mais c’est un témoignage important car il est bien possible que se trouve là l’une des pistes possibles et souhaitables pour l’éducation de demain. Et il n’est guère étonnant de constater la convergence entre une conception dynamique, créative et collective de l’apprentissage et le logiciel libre et sa culture.

Culture communautaire : l’expérience Sugar Labs

Community culture: The experience of Sugar Labs

Walter Bender – décembre 2010 – Licence Creative Commons By-Sa
(Traduction Framalang : Siltaar, Goofy, Seb seb, Zitor, Julien et Barbidule)

Dans un article publié il y a 30 ans et intitulé « Critique de l’ordinateur contre pensée technocentrique », Seymour Papert écrivait : « le contexte du développement de l’homme est toujours la culture, jamais une technologie isolée ». Dans un autre passage du même article, Papert offre un aperçu de ce qui est nécessaire pour fonder une culture de l’apprentissage : « Si vous vous demandez que doit savoir un pratiquant averti du LOGO, la réponse va au-delà de la capacité à utiliser et enseigner le LOGO. L’adepte doit être capable de parler du LOGO, d’en faire la critique, et de discuter des critiques émises par d’autres personnes ».

30 ans après, remplaçons « LOGO » par « Sugar »

Sugar est une plateforme logicielle destinée à l’éducation des enfants. Sugar est développé et maintenu par Sugar Labs, une communauté mondiale de développeurs et d’éducateurs bénévoles. Notre objectif est l’émergence d’une génération de penseurs critiques et de gens capables d’inventer des solutions. À travers Sugar, nous nous efforçons de procurer à chaque enfant une chance d’apprendre et d’apprendre à apprendre, dans un contexte qui va lui permettre à la fois d’entamer un échange dynamique avec d’autres et de développer des moyens indépendants pour atteindre ses objectifs personnels.

Que devraient apprendre les enfants et comment devraient-ils apprendre ? Ceux qui apprennent devraient avoir accès aux idées qui nourrissent leur culture locale de même qu’aux idées puissantes qui constituent l’héritage global de l’humanité. Mais ils devraient aussi s’exercer à l’exploration et à la collaboration, et s’approprier des connaissances en menant une démarche authentiquement ouverte de recherche de solutions. Ce qui peut être réalisé au sein d’une communauté éducative construite autour d’une structure de responsabilités, c’est-à-dire avec des apprenants qui s’impliquent dans un processus d’expression, de critique et de réflexion par eux-mêmes. Qu’est-ce que j’apprends ? Comment l’ai-je appris ? Pourquoi est-ce important ? Puis-je l’enseigner à d’autres ? Est-ce que j’en ai une connaissance approfondie en l’enseignant ?

Dans cet essai, je compte exposer la façon dont Sugar nourrit une culture éducative par l’association de deux communautés – les développeurs de Sugar et ceux qui apprennent – participant à créer un « contexte favorable au développement humain » et un changement de culture scolaire.

La culture du logiciel libre

La culture du logiciel libre a influencé le développement de Sugar. Les développeurs du Libre vont au-delà du produit de consommation, ils créent et partagent leurs créations ; ils « débattent » du logiciel libre, ils en font la « critique », et ils « discutent le point de vue critique des autres ». Il ne prennent rien pour argent comptant. Les points communs entre le projet Sugar et le mouvement du logiciel libre sont les suivants : des outils pour s’exprimer, car les enfants créent des contenus autant qu’ils les consomment ; et la collaboration, car les enfants partagent leurs réalisations, s’aident mutuellement, et se lancent dans un processus de réflexion sur eux-mêmes et de critique collective.

Le projet Sugar s’inspire également de la façon dont les acteurs de la communauté du logiciel libre collaborent. Tout comme les développeurs de logiciels, les enfants discutent, se socialisent, jouent ensemble, partagent des médias, s’associent pour créer de nouveaux médias et des programmes, s’observent les uns les autres, dans un cadre à la fois formel et informel. Le projet Sugar facilite le partage, la collaboration et la critique. Les développeurs de logiciels libres et ceux qui apprennent avec Sugar rédigent des documents, échangent des livres et des images, créent de la musique ou écrivent du code ensemble. Les deux communautés s’investissent dans une « pratique de réflexion » : il s’agit de mettre en pratique leur expérience tout en étant guidé et épaulé par des « spécialistes » d’un domaine (ils peuvent être professeurs, parents, membres de la communauté dans un salon de discussion, ou encore de camarades étudiants investis dans un échange critique soutenu).

De la même façon qu’avec le logiciel libre, Sugar encourage chaque enfant à être une force créative au sein de sa communauté. L’apprentissage avec Sugar n’est pas un acte passif où l’enfant reçoit le savoir. Il est actif. On parle de créativité, d’aisance, d’innovation, et de résolution de problèmes, tout ce qui implique l’expression personnelle et les liens forts à la communauté. Sugar apporte les outils d’expression à portée des enfants pour qu’ils soient libres d’agir à l’intérieur de leur communauté et à travers leurs actions, de changer le monde. Le logiciel libre est une condition nécessaire pour établir cette culture de l’expression et de l’émancipation. Le mot d’ordre de la génération suivante d’élèves sera « montre-moi le code, que je puisse en tirer un apprentissage et l’améliorer. »

Réalisations et défis

Depuis que nous avons établi les Sugar Labs en tant que projet dans le cadre du Software Freedom Conservancy (NdT : lit. Protection des Libertés Logicielles) en 2008, nous avons démontré notre engagement à un ensemble de valeurs fondamentales qui comprennent la liberté et l’ouverture ; nous sommes devenus dans une large mesure indépendants de tout matériel et distribution (lorsque nous avons commencé, nous étions liés à une seule plateforme – le netbook XO du projet One Laptop per Child (OLPC)) ; nous avons énormément avancé sur le chemin qui conduit à une version logicielle stable 1.0 ; nous sommes forts d’une vaste communauté qui comprend près de 2 millions d’élèves utilisateurs ainsi que, bien entendu, des développeurs de logiciels et de nombreux professeurs et étudiants qui ont leur franc-parler.

Alors que nous nous débattons quotidiennement avec des défis techniques, notre défi principal est l’un des engagements avec notre communauté : comment pouvons-nous nous assurer qu’il y a un dialogue fructueux entre le développeur et les communautés éducatives liées à Sugar ? En d’autres termes, comment pouvons-nous transmettre à la communauté éducative la culture de la collaboration et de l’esprit critique qui est essentielle au développement de la plateforme Sugar, et à mieux nous permettre d’apprendre de nos utilisateurs finaux ? L’un des rôles que joue la communauté Sugar est de sensibiliser l’ensemble de l’écosystème du logiciel libre aux besoins des enseignants. Un autre rôle est de sensibiliser l’ensemble de l’écosystème éducatif au pouvoir de l’expression, de la critique et de l’auto-critique. Dans nos interactions avec les deux communautés, nous prenons grand soin de nous demander nous-mêmes : « Quel effet cela a-t-il sur l’apprentissage ? ».

Afin d’élargir nos efforts, un équilibre entre la fréquence des déploiements Sugar et la fréquence des nouveautés apportées par les Sugar Labs doit être maintenu. Nous avons un bon bilan dans notre réactivité aux besoins identifiés par les déploiements ; dans le même temps, nous sommes pro-actifs en sollicitant une plus grande participation de la communauté.

Les Sugar Labs sont aussi axés sur les besoins des enseignants. Nous avons des discussions régulières sur la façon de solliciter leurs retours. Certains initiatives, tel qu’une liste de discussions fréquentée par des enseignants et des conversations hebdomadaires sur la pédagogie sont très productives. Un exemple de notre succès est que des enseignants commencent à apporter des modifications à Sugar et à ses activités. Un autre exemple est que des professeurs d’université enseignent l’informatique avec des logiciels libres dont Sugar.

Sugar Labs se décline au pluriel

Sugar Labs est une communauté globale qui se charge de définir des objectifs clairs et de maintenir l’infrastructure dont a besoin le projet dans son ensemble. Mais la communauté Sugar encourage et facilite également la création de « labs locaux » qui apportent leurs spécificités et une autonomie pour les déploiements régionaux, y compris en partenariat avec des entreprises locales à but lucratif, ce que le Sugar Labs « central » ne peut pas faire.

Ces labs locaux :

  • adaptent la technologie et la pédagogie à la culture et aux ressources locales (ex : développement d’activités et de contenus spécifiques à une région) ;
  • aident à traduire Sugar en langues régionales ;
  • gèrent les déploiements Sugar dans les écoles de la région ;
  • créent des communautés locales adhérentes aux principes des Sugar Labs, rendant Sugar plus ouvert et autonome ;
  • permettent la communication entre ces communautés locales et la communauté mondiale Sugar Labs ;
  • hébergent, co-hébergent ou s’associent dans l’organisation de conférences, ateliers, discussions et rencontres relatifs à l’utilisation et au développement de Sugar.

Avec le temps, la charge technique se répartit sur les labs locaux (la sortie récente de « Dextrose », pour les OLPC XO construits au Paraguay, est un exemple de comment les labs locaux – menés par une communauté de volontaires – peuvent travailler ensemble pour résoudre des défis techniques et pédagogiques).

En « amont » et en « aval »

Marco Presenti Gritti, développeur Sugar et co-fondateur des Sugar Labs, me rappelait que lorsque nous avons créé les Sugar Labs, nous avons pris une décision réfléchie sur l’étendue du développement. « En suivant le modèle de l’environnement graphique GNOME, nous n’allions pas tout créer et gérer nous-même, mais nous allions nous intégrer et nous appuyer sur les distributions GNU/Linux et le projet OLPC pour le faire ».

Classiquement, un projet en amont[2] développe du code et un processus de publication. En aval, les distributions créent des paquets avec des personnalisations et distribuent un produit pour l’utilisateur final (cela implique habituellement un processus QA bien défini et un mécanisme de support).

Le spécificité éducative de notre projet a nécessité d’élargir le modèle et les communautés impliquées. Le développement et les déploiements de Sugar sont évidemment engagés dans la construction d’images, de QA, des tests, dans la recherche d’erreurs à corriger, dans la documentation, le support… qui relèvent de programmeurs experts. Mais, comme mentionné précédemment, nous travaillons également avec des étudiants et lycéens et à l’occasion un professeur qui connaît suffisamment bien le Python peut contribuer aux correctifs.

Afin de créer un produit viable et gérable, nous devions établir un équilibre entre notre travail comme projet logiciel « en amont » et les efforts « en aval » des distributeurs GNU/Linux. C’est ainsi que nous travaillons activement avec la communauté Fedora (laquelle a pris à son compte une grosse partie de la charge associée au support du matériel OLPC), la communauté Debian, openSUSE, Trisquel, Mandriva, Ubuntu (ex : le Sugar Ubuntu remixé), etc.. À l’occasion nous devons assumer un rôle de leader, comme quand nous avons pris à bras-le-corps les initiatives naissantes pour créér un Live USB« Sugar on a Stick ».

Optimisé pour la communauté

À la conférence LIBREPLANET en 2010, Eben Moglen a accordé un entretien sur tout ce qui avait été accompli par la communauté du logiciel libre. Le logiciel libre n’est plus une possibilité ; il est « indispensable », a-t-il affirmé. Ce logiciel « fiable et qui a un coût de production quasi nul » présente de nouvelles et nombreuses opportunités, en particulier dans le secteur de l’éducation, qui est toujours grevé par un budget serré. Seul le logiciel libre est « écrit une fois mais exécuté partout ».

Nous voulons aussi écrire du code fiable qui permette à Sugar d’être exécuté « partout », et nous avons réalisé de grands progrès en suivant les pas de la grande communauté GNU/Linux. Mais la communauté Sugar a un objectif supplémentaire : nous souhaitons que nos utilisateurs finaux participent également à l’amélioration du code, parce que cela participe de l’apprentissage. Si tout le monde est capable d’écrire du code et si ce code est écrit avec les modifications des utilisateurs finaux en tête, nous aurons un monde dans lequel chacun est engagé dans le « débogage », ce que Cynthia Solomon a décrit une fois comme « l’une des grandes opportunités éducatives du XXIe siècle ».

Oui la licence GPL (General Public License) utilisée par les Sugar Labs garantit que le logiciel peut être modifié par l’utilisateur final. Mais, pour la plupart des utilisateurs, ceci n’est qu’une liberté théorique si la complexité du logiciel représente une barrière insurmontable. Par conséquent, les critères habituels (fiabilité, efficacité, maintenance, etc.) sont nécessaires mais non suffisants pour l’éducation.

Aux Sugar Labs, nous faisons un pas supplémentaire en nous assurant que notre code est à la fois libre et ouvert, mais également « ouvert à la manipulation des utilisateurs finaux ».


Voici quelques actions entreprises par Sugar Labs pour encourager et faciliter les modifications des utilisateurs finaux :

  • Susciter des attentes et des envies en établissant une culture dans laquelle c’est la norme d’utiliser les libertés permises par le logiciel libre et articuler la liberté pour modifier les aspects du logiciel libre (1ère liberté).
  • Offrir des outils qui facilitent l’accès aux sources (ex : un menu « voir les sources » toujours disponible, rendant la source de chaque application à portée d’un « clic de souris »).
  • Utiliser des langages de script (Python, Javascript, et SmallTalk dans le cas de Sugar) pour que ces changements puissent être immédiats et faits directement.
  • Mettre en place des paliers pour permettre à l’utilisateur final de commencer en faisant des petits pas (alors que le langage de programmation C peut avoir une « couche haute », il n’a pas de très « basse couche »).
  • Réduire le risque associé aux erreurs en proposant des « zones tampons » ; si en touchant au code vous introduisez des bugs collatéraux ou irréversibles alors les gens seront vite conditionnés à ne pas se livrer à des comportements à « risque » en modifiant le code.
  • Fournir de « vrais » outils : s’assurez-vous que la vraie version puisse être modifiée et non une version répliquée indépendante mais peu motivante.
  • Être une communauté de soutien ; on peut dire à juste titre de la communauté Sugar qu’elle est accueillante et tolérante avec les « nouveaux venus », poser une question c’est déjà devenir membre de la communauté, nous sommes pointilleux pour ce qui concerne l’octroi de privilèges sur le « projet principal » mais nous donnons les droits pour encourager la création de branches expérimentales.

Quand on m’a demandé combien de correctifs ont été fournis par les utilisateurs de Sugar, j’ai répondu que des membres de la communauté ont contribué aux correctifs mais que je n’avais pas connaissance de correctifs apportés par des enfants. Encore faut-il faire la distinction entre correctifs envoyés et acceptés, car l’apprentissage commence en créant le correctif, en le soumettant, et en le partageant avec d’autres même lorsqu’il ne se retrouve pas accepté. Sugar a inculqué aux enfants et à leurs professeurs le sentiment qu’ils peuvent être créatifs et utiles avec l’informatique.

Cependant, après deux années d’expérience concrète de Sugar, nous commençons à voir des contributeurs émerger de sa communauté d’utilisateurs. Par exemple, en Uruguay, qui a été le premier pays à fournir des outils éducatifs libres à chaque enfant, quelques préadolescents sont en train de coder activement (un enfant de 12 ans d’une petite ville à des heures de Montevideo fréquente notre canal IRC, y pose des questions et poste du code, à la mi-décembre 2010, il a déjà envoyé huit activités sur notre portail). Quand le président uruguayen José Mujica a entendu parler de ces réalisations, il a souri et a dit avec une voix remplie de fierté : « Nous avons des hackers ». Il y a peut-être 12 enfants qui développent du logiciel libre aujourd’hui en Uruguay. L’an prochain ils seront 100. Dans 2 ans, ils seront 1000. L’Uruguay est en train d’expérimenter un changement de culture lié à un changement dans les attentes que le pays a pour ses enfants, un changement accéléré par la culture du logiciel libre.

Maximiser nos efforts

Qu’est-ce qui motive nos contributeurs et qu’est-ce qui motive les professeurs (que nous aimerions voir adopter Sugar) ?

Pour tenter d’y répondre je me suis appuyé sur l’article L’économie comportementale : les sept principes des décideurs publié par le New Economics Foundation :

  • Le comportement des autres personnes compte. Nous devons sensibiliser les professeurs aux meilleures pratiques de Sugar pour qu’ils puissent faire des émules. Pouvons-nous identifier les « génies », « contacts », « commerciaux » dans nos communautés cibles ? Quelles ressources pouvons-nous mettre en place pour les inciter à adopter Sugar ? Ainsi je travaille avec une petite école de quartier dans la ville de Boston dont l’exemple est suivi par d’autres quartiers bien plus importants. Si nous pouvons avoir une influence sur un professeur « génie » du quartier, nous pourrions avoir un gros avantage. Cela signifie également que nous devons être vigilants quant à la qualité pédagogiques de nos activités proposées.
  • Les habitudes sont importantes. Ces habitudes qui participent au status quo ne doivent pas être négligées. Qu’est-ce qui motive et encourage le changement ? Quelles actions pouvons-nous mener pour soutenir et engager les changements dans les pratiques et les comportements ?
  • Les gens sont motivés pour « faire ce qu’il faut ». Mettons alors cette notion de « faire ce qu’il faut » (NdT : do the right thing) en débat avec les enseignants, essayons de voir avec eux si leurs conceptions peuvent évoluer. En géométrie, il n’y a pas de chemin réservé aux rois, disait Euclide.
  • Les attentes des gens influencent leur comportement : ils veulent que leurs actions soient en phase avec leurs valeurs et leurs engagements. C’est un travail de longue haleine pour nous car nous ne sommes pas toujours en phase au départ avec ces attentes. Cependant, tant que nous respectons et sommes fidèles à nos valeurs, nous pouvons convaincre et avoir de l’influence.
  • Les gens sont réticents au changement de peur de perdre ce qu’ils possèdent. Utiliser Sugar à partir d’un clé USB (« Sugar on a Stick », qui emprunte seulement un ordinateur sans rien modifier dedans) n’implique aucune changement irréversible tout en permettant de faire une nouvelle expérience pédagogique.
  • Les gens hésitent souvent lorsqu’il s’agit de prendre de grandes décisions. Ils sont souvent intimidés par les perspectives d’apprentissage de nouvelles choses (jusqu’à vraiment les faire). De plus es pertes immédiates peuvent décourager et faire perdre de vue les récompenses à long terme. Nous devons accorder une grande importance à ce moment crucial du démarrage en accompagnant ceux qui acceptent de prendre un tel risque.
  • Les gens ont besoin de se sentir écoutés et impliqués pour s’engager dans le changement. Nous avons une communauté qui tente d’accorder le plus grand soin à l’accueil des participants et à l’examen de leurs contributions. Ceci est une de nos grandes forces.

Est-ce que cela fonctionne ?

L’évaluation de projets éducatifs a toujours été difficile, en partie parce qu’il est difficile d’arriver à un concensus sur les mesures d’évaluation.

Il semble plus facile de prendre le problème par la négative où le consensus sur ce qu’il ne faut pas faire est plus facile à trouver. Ainsi Michael Trucano, qui blogue sur le portail éducation de la Banque mondiale, a publié un « top 10 » des pires pratiques de l’utilisation des nouvelles technologies dans l’éducation. Liste que je prends ici comme référence négative pour le projet Sugar avec comme exemples probants et prometteurs les deux déploiements d’envergure que sont le Paraguay Educa et le Plan Ceibal en Uruguay.

1. Parachuter du matériel dans les écoles et espérer qu’un miracle se produise.

C’est une critique souvent entendue pour le projet One Laptop per Child (un ordinateur portable par enfant), mais dans le faits, il y avait d’importants mecanismes d’aide et de mise en place en Uruguay et au Paraguay avant même que le matériel ne soit livré. En Uruguay, en plus du vaste support proposé directement par le gouvernement (incluant un programme de formation des professeurs, un centre d’appel, une vidéothèque des bonnes pratiques, etc.), deux initiatives communautaires au niveau national ont vu le jour : Ceibal Jam, qui fournit des logiciels et du contenu local aux enfants d’Uruguay, et Red de Apoyo al Plan Ceibal (RAP-Ceibal), qui assure un réseau d’aide pour les professeurs. Paraguay Educa a une équipe de conseillers qui travaille à temps plein dans les écoles, en aidant les professeurs. Et les éducateurs des deux pays participent régulièrement à des forums mondiaux.

2. Concevoir via l’OCDE des environnements d’apprentissage à implémenter partout.

Les « pays développés » proposent du contenu et quelques règles de bonnes pratiques, mais ce sont avant tout les équipes pédagogiques locales en Uruguay et au Paraguay qui échangent et conçoivent leurs propres matériels et programmes pour répondre à leurs besoins locaux (par exemple, un professeur de la campagne péruvienne a écrit un livre sur l’utilisation de Sugar en salle de classe qui est internationalement lu et reconnu par les autres professeurs).

3. Penser les contenus éducatifs après la mise en place du matériel.

En Uruguay et au Paraguay, c’est la pédagogie qui a guidé la vitesse de déploiement d’un projet vu avant tout comme une plateforme d’apprentissage (incluant les ordinateurs portables, la connectivité, les serveurs, la formation, la documentation, le support, l’assistance de la communauté, etc.).

4. Supposer que vous pouvez uniquement importer du contenu venu d’ailleurs.

Le mot clé ici est « uniquement ». L’Uruguay et le Paraguay profitent bien entendu des contenus créés ailleurs (comme par exemple ceux de la communauté Etoys) mais ils n’oublient de favoriser la production de ressources locales, qu’il s’agisse de nouveaux contenus ou de contenus modifiés à partir de ceux récupérés ailleurs.

5. Ne pas surveiller, ne pas évaluer.

À Plan Ceibal, ils ont un fonctionnement étendu pour surveiller l’état du réseau, des serveurs, et des ordinateurs portables lors du déploiement. Il y a beaucoup d’évaluations en cours du programe, aussi bien internes qu’externes. Paraguay Educa a été l’objet d’une évaluation externe par la Banque Interaméricaine de Développement (IDB Inter-American Development Bank).

6. Faire un gros pari sur une technologie qui n’a pas fait ses preuves.

C’est en particulier le cas lorsque l’on se base sur un unique distributeur et sur des standards fermés et/ou propriétaires. C’est alors une épée de Damoclès qui pèse sur l’avenir du projet. Les deux programmes mentionnés ci-dessous ont fait l’objet d’appels d’offre public et ont plusieurs distributeurs. Les deux utilisent abondamment des logiciels libres.

7. Ne pas être transparent sur le coût global de l’opération.

L’Uruguay a été assidue en publiant les chiffres de leur coût total de possession, maintenance et services du projet (chiffres, basés sur les coûts mesurés sur le terrain, qui se sont avérés plus bas que ce que certains avis pessimistes avaient prévu).

8. Négliger les problèmes d’équité.

En Uruguay ce sont avant tout les familles modestes qui sont ainsi équipées en informatique avec un accès Internet gratuit.

9. Ne pas former vos professeurs (ni votre directeur d’école).

Le plus gros investissement dans le programme au Paraguay a été la formation des professeurs. C’est sûrement la principale clé de la réussite du projet et nous veillons à ce que cette formation soit toujours plus efficace et adaptée aux réalités du terrain.

Trucano laisse le point numéro 10 comme exercice ouvert pour le lecteur. J’ajouterais :

10. Ne pas impliquer la communauté.

Dans les deux communautés uruguayenne et paraguayenne l’implication fait partie du projet par nature. Pour ce qui concerne Sugar, c’est un effort d’une communauté globale qui implique des centaines d’ingénieurs et des milliers de professeurs. Un résultat remarquable est le degré d’implication des parents dans les programmes.

Regarder vers le futur

Comme il est de mise avec chaque projet piloté par une communauté, il y a un débat permanent sur la vision de Sugar. Il peut y avoir des divergences d’opinion sur l’étendue de la mission des Sugar Labs (allant d’un point d’attention particulier sur les outils de collaboration à une vision plus large sur tout ce qui est nécessaire pour des déploiements réussis de l’OLPC). Mais tout le monde s’accord à dire qu’il y a une communauté Sugar de développeurs et d’apprenants pleine de vie et d’énergie et que les plateformes d’apprentissage basées sur des logiciels libres encouragent l’appropriation du savoir quel que soit le domaine que l’apprenant explore : musique, navigation sur internet, lecture, écriture, programmation, dessins, etc.

Carla Gomez Monroy, une pédagogue qui a participé à de nos nombreux déploiements, décrit Sugar comme « un environnement émergent et collaboratif, où la communauté identifie, code, utilise, innove, conçoit et re-conçoit ses propres outils » Les membres de la communauté d’apprentissage de Sugar s’engagent dans le débogage de leur créativité et des outils mis en place pour exprimer cette créativité. Ils investissent Sugar en tant que technologie mais aussi et surtout comme une culture de l’apprentissage passant par l’expression et la critique collective.

L’expérience Sugar Labs est « une participation collaborative pour apprendre à apprendre avec des outils qui nous correspondent ».

Walter Bender est le fondateur et le directeur exécutif de Sugar Labs, une fondation à but non lucratif. En 2006, Bender a co-fondé « One Laptop per Child », une organisation à but non lucratif avec Nicholas Negroponte et Seymour Papert.

Notes

[1] Crédit photo : Danishkanavin (Creative Commons By-Sa)

[2] Dans le développement logiciel, la métaphore de la rivière est utilisée pour décrire où les différentes activités et responsabilités se situent dans l’écosystème. L’« Amont » fait référence aux auteurs et mainteneurs du logiciel. L’« Aval » fait référence aux distributeurs et aux utilisateurs du logiciel.




J’ai mal à mon Gmail ou le piège du code JavaScript non libre

Rovlls - CC byCertains résistent encore mais nombreux sont les visiteurs (et rédacteurs) de ce site à posséder un compte de messagerie Google Gmail.

Il faut dire que, techniquement parlant, c’est une excellente application en ligne[1].

Mais il ne faut pas oublier de dire aussi que, techniquement parlant, l’application est propulsée par du code JavaScript qui est malheureusement non libre, avec toutes les conséquences (néfastes) que cela implique.

Or puisqu’il existe une version simplifiée de Gmail, épurée de ce code, cela signifie d’abord que l’on peut s’en passer et ensuite que cette surcouche pourrait fort bien devenir libre.

C’est la proposition de la Free Software Foundation qui nous invite à faire pression sur Google pour qu’il accepte ce pas dans la bonne direction.

Évitons les pièges du JavaScript de Gmail

Avoid the pitfalls of the JavaScript Trap on Gmail

Matt Lee – 30 mars 2011 – FSF.org
(Traduction Framalang : Goofy et Penguin)

Nous lançons aujourd’hui la première phase d’une série d’opérations à mener pour utiliser les sites Web les plus populaires sans leur code JavaScript propriétaire.

Vous n’êtes peut-être pas conscient des dangers du JavaScript, un problème que nous avons intitulé le piège JavaScript, lorsque du logiciel propriétaire est exécuté dans le navigateur de votre ordinateur.

Nous concentrerons notre première opération sur le service Gmail de Google.

Le piège JavaScript

Lorsque vous visitez un site Web comme Gmail, votre navigateur va télécharger et exécuter plusieurs milliers de lignes de code JavaScript. Le code JavaScript n’est pas différent de langages comme Pyhon, C++ ou Ruby (les applications qui sont exécutées sur nos ordinateurs et qui sont écrites dans ces langages doivent être des logiciels libres, afin que nous puissions les exécuter, les modifier et les partager si nous en avons envie). Le JavaScript d’aujourd’hui n’est plus le JavaScript d’autrefois, il est désormais utilisé pour écrire de puissantes applications côté serveur grâce à des logiciels libres comme Node.js et le moteur JavaScript V8.

De plus, nous avons vu récemment des entreprises comme Research In Motion (les fabricants du BlackBerry) recommander à leurs clients de désactiver complètement le JavaScript du navigateur WebKit de leurs téléphones à cause de la découverte d’un problème de sécurité. Même si les logiciels libres qui intègrent du JavaScript peuvent également avoir des problèmes de sécurité, cet exemple illustre le fait que nous avons un réel besoin d’avoir accès au code qui s’exécute sur nos ordinateurs, et de pouvoir le modifier.

Ce que JavaScript pourrait faire

Il est évident que le JavaScript est une technologie très puissante et très utile lorsqu’elle se trouve entre de bonnes mains. De nombreux développeurs de logiciels libres ont ainsi écrits des extensions et des améliorations pour des sites populaires grâce à des outils comme GreaseMonkey. Il existe une flopée de scripts Greasemonkey libres pour Gmail. L’existence de tels scripts montre à la fois que le JavaScript de Gmail n’est pas trivial, mais également que des utilisateurs pourraient faire des contributions intéressantes et utiles si le code JavaScript était publié en tant que logiciel libre pour leur permettre de le modifier.

Par ailleurs, des sites comme Gmail, Twitter et Facebook utilisent beaucoup trop de JavaScript pour proposer leurs services. La preuve en est que les mêmes services en version mobile proposent pratiquement les mêmes fonctionnalités sans JavaScript. Là où la nécessité du JavaScript se fait sentir il peut être publié en tant que logiciel libre, et là où ces raffinements supplémentaires sont facultatifs, on peut fournir une version basique du site qui n’a pas besoin de JavaScript.

Google a fait un premier pas vers cet objectif en développant une version du site Gmail en « Version HTML simplifiée », qui ne dépend donc pas d’un copieux code JavaScript pour proposer une interface utilisateur. Google propose également les protocoles IMAP et POP qui permettent d’accéder aux comptes Gmail sans passer du tout par la case site Web. Ces initiatives constituent toutes deux des avancées positives vers un idéal plus vaste.

Notre requête à Google : une étape de plus dans la bonne direction

Si vous utilisez Gmail, demandez gentiment mais fermement à Google d’être « logiciel libre friendly » en publiant le code JavaScript de Gmail sous une licence libre. En acceptant de le faire, Google permettrait aux utilisateurs qui accordent de l’importance aux libertés logicielles d’utiliser Gmail dans une version avancée, et de proposer des contributions et modifications utiles à tout le monde.

Nous serions ravis de recevoir vos réactions et suggestions, ainsi que les démarches que vous proposez pour les sites les plus connus. Vous pouvez dès maintenant ajouter vos idées et contributions sur le wiki de LibrePlanet.

Notes

[1] Crédit photo : Rovlls (Creative Commons By)




L’association Framasoft publie son rapport moral 2010

Yesika - CC by-saNé en 2001 Framasoft est un réseau de sites et de projets collaboratifs dont l’objectif est de promouvoir et diffuser le logiciel libre et sa culture au plus large public. Avec le temps ce réseau a pris une telle dimension qu’il a eu besoin de s’appuyer sur une structure associative, créée en 2004, pour soutenir son action.

Vous trouverez ci-dessous le rapport moral et financier de l’association pour l’année 2010.

Encore une année riche et bien remplie. Il faut dire qu’avec un annuaire qui a dépassé les 1 500 logiciels (dont une sélection à installer automatiquement), une collection de désormais 10 livres, une clé USB et un DVD aux multiples déclinaisons, un espace de discussion, un autre d’information, un canal vidéo… et même une boutique en ligne, il y a de quoi faire. Sans compter notre présence sur le terrain à une bonne trentaine de manifestations autour du Libre.

La campagne de dons « 1000 10 1 » (1000 donateurs à 10 euros par mois pendant 1 an) n’a pour le moment pas atteint son objectif initial puisque nous n’en sommes qu’à la moitié du chemin. Elle nous assure cependant déjà la pérennisation complète d’un permanent et nous permet d’envisager l’avenir avec si ce n’est sérénité tout du moins un certain optimisme[1].

Grand merci à tous les donateurs (que la crise n’épargnent souvent pas). Merci également à tous ceux qui nous ont laissés un petit mot sur le site de soutien, nous avons eu l’idée d’en faire une synthèse sous forme de carte heuristique que nous consultons de temps en temps pour nous redonner le moral les jours où le travail se fait trop pesant 😉

Merci enfin et surtout aux animateurs, développeurs, rédacteurs, traducteurs, relecteurs, sous-titreurs, etc., à tous ceux qui de près ou de loin participent avec nous à cette aventure qui voit chaque année le logiciel libre prendre un peu plus de place dans nos ordinateurs et dans nos esprits en témoignant par la pratique que d’autres mondes sont possibles.

Remarque : Framasoft fêtera donc ses 10 ans le 13 novembre prochain (date du dépôt du nom de domaine framasoft.net). Si vous avez des idées originales pour célébrer comme il se doit l’évènement, nous sommes preneurs 😉

Notes

[1] Crédit photo : Yesika (Creative Commons By-Sa)