Jusqu’où ira cette librévolution ?

Still wanderer - CC byNous avons fait nôtre le slogan La route est longue mais la voie est libre[1]. Or, quand bien même le sage nous dit que l’important est le chemin et pas la destination, on peut se demander jusqu’où nous mènera cette voie que nous sommes de plus en plus à nombreux à emprunter à mesure que le temps passe.

Pour Leo Babauta du site lifehack.org il semblerait que cela puisse aller très loin jusqu’à finir par modifier en profondeur nos sociétés. A chaque domaine hiérachisé et pyramidal son alternative libre se dit-il un peu naïvement.

Je ne sais si nous en arriverons là mais ce qui est sûr c’est que quelque chose s’est enclenché. Un quelque chose qui ne cherche pas forcément à se substituer à l’existant mais qui a le mérite de l’interpeller et parfois même de jouer les enfants qui osent dire que le roi est nu. On le voit bien par exemple aujourd’hui avec le monde de la musique que nous pensions depuis des lustres progressiste et rock’n roll et que nous découvrons globalement conservateur voire rétrograde.

En fait cet article n’est là que vous poser cette question : selon vous, jusqu’où ira ce mouvement du libre ? Pensez-vous, comme la phrase qui ouvre ce blog que ce serait l’une des plus belles opportunités manquées de notre époque si le logiciel libre ne libérait rien d’autre que du code ?

PS : Nous avons choisi tout au long de cette nouvelle traduction de mettre l’expression « libre » en italique là où l’auteur de l’article d’origine empoie l’expression « open source »[2].

Une vie libre : comment le mouvement du libre changera tout

Open Source Life: How the open movement will change everything

Leo Babauta – 18 juin 2007 – lifehack.org
(Traduction Framalang : Vincent, Yostral et Daria)

Prenez ceci en considération : en quelques années seulement, l’encyclopédie libre Wikipédia a rendu obsolète les encyclopédies propriétaires, que ce soit en version papier et CD-ROM ou en version commerciale en ligne. Au revoir World Book et Brittanica.

Bien sûr, ces sociétés existent toujours, mais leur clientèle se réduit rapidement au fur et à mesure que les gens se dirigent vers Wikipedia : c’est gratuit, c’est facile à utiliser et c’est beaucoup plus souvent actualisé et mis à jour.

Ce n’est qu’un exemple de la manière dont le concept du libre a déjà changé notre vie. Au cours de la prochaine décennie, nous verrons bien d’autres exemples et leurs conséquences pourraient affecter tous les aspects de notre vie.

Le concept du libre a été popularisé via le projet GNU et la licence GPL et n’a depuis cessé de s’étendre de manière de plus en plus rapide. Le système d’exploitation libre Linux a vu son nombre d’utilisateurs grimper de manière exponentielle ces dernières années, et bien qu’il y ait encore un peu de chemin à faire avant de défier Microsoft ou Apple, c’est devenu pour beaucoup une alternative viable et désirée.

Les alternatives libres croissent en nombre et en importance : du logiciel de bureautique au logiciel de finance en passant par le web ainsi que des utilitaires de bureau aux jeux ; à peu près n’importe quel logiciel auquel vous pouvez penser possède une alternative libre. Et dans beaucoup de cas la version libre est meilleure.

Maintenant, envisagez ceci : rien n’oblige le concept du libre à s’appliquer uniquement au logiciel. Il peut s’appliquer à n’importe quoi dans la vie, dans chaque domaine où l’information est actuellement dans les mains de quelques uns plutôt que tous, dans chaque domaine où quelques personnes contrôlent la production et la distribution et l’amélioration d’un produit, d’un service ou d’une entité.

Actuellement, les exemples suivants peuvent sembler utopistes, et ils le sont, mais il est possible qu’ils deviennent réalité dans les prochaines années, ou dans 10 à 20 ans. Seul le temps le dira, mais ça vaut le coup d’y réfléchir.

  • Ecoles. Actuellement, la connaissance et l’apprentissage de cette connaissance sont dans les mains de quelques-uns, de l’école primaire au lycée, jusqu’à l’enseignement supérieur. Mais pourquoi devons-nous passer par le système scolaire public ou privé, et pourquoi Harvard, Stanford et le MIT contrôlent l’éducation de leurs professeurs et universitaires ? L’enseignement à domicile, par exemple, est un mouvement qui prend de l’ampleur et qui permet aux parents de reprendre le contrôle sur l’éducation de leurs enfants, de quitter un modèle autoritaire de contrôle de l’esprit pour aller vers un modèle d’apprentissage, de questionnement, de pensée critique – et c’est réellement ce que devrait être l’éducation. Comprenez que je ne blâme pas les professeurs – ce sont des gens honnêtes plein de bonnes intentions, mais ils sont limités par le système éducatif, qui est contrôlé par notre gouvernement. Le concept du libre peut s’appliquer à l’enseignement supérieur : imaginez une école en ligne pour programmeurs ou comptables ou entrepreneurs, où les vrais professionnels décident du cursus et enseignent les cours et délivrent les diplômes. Si cette alternative devient de plus en plus acceptée (et ceci mettra du temps), il n’y a pas de raison pour qu’un diplôme d’Harvard soit meilleur qu’un diplôme libre, qui serait également beaucoup moins cher.
  • Gouvernement. Nos gouvernements sont dirigés par un nombre relativement limité de personnes (les politiciens et technocrates), qui régentent de nombreux aspects de nos vies, depuis les impôts et les dépenses des gouvernements jusqu’à la régulation de l’internet et du commerce. Mais imaginez que progressivement des alternatives libres pour ces fonctions soient créées et gagnent en reconnaissance. Ceci peut être difficile à imaginer, mais l’exemple des écoles cité précédemment est une manière d’envisager ce changement. L’e-mail est un autre exemple de comment une fonction publique pourrait être co-optée, car le système postal est moins indispensable qu’auparavant – de moins en moins de gens utilisent le service postal pour écrire des lettres, et les jours où nous recevons nos factures par la poste ne deviendront bientôt plus qu’un lointain souvenir. Peut-être que toutes les fonctions des gouvernements ne pourront pas être co-optées (même si c’est possible), mais si suffisamment de services publics deviennent obsolètes à cause de meilleures alternatives, la justification des impôts deviendra plus faible. L’aide libre aux pauvres, plutôt que les allocations sociales. L’aide médicale libre, plutôt qu’un système public de santé. Il y a beaucoup de possibilités.
  • Entreprises. Ceci peut paraitre idéaliste, mais considérons que la puissance des entreprises soit leur capacité à gérer la connaissance, la fabrication et la distribution de produits et de services. Si leur connaissance devient libre au travers d’alternatives – pensez aux médias traditionnels face aux blogs – alors les entreprises ne sont plus réellement nécessaires. Même la fabrication pourrait devenir décentralisée si les brevets sur les produits devenaient libres.
  • Loisirs. Les industries de la musique, des films, de la télévision, des livres et de la presse sont actuellement fermées – avec la production et la distribution de ces sources de divertissements contrôlés par quelques-uns. Seul un petit nombre de personnes réalisent des albums, des films ou des livres, alors qu’il y a beaucoup de gens talentueux partout ailleurs. L’attribution des contrats pour ces choses est dirigée par un petit nombre de gens. Il y a un nombre limité de canaux de distributions. Mais imaginez une alternative libre, où les personnes collaborent sur de la musique et la révèle sur internet. Ceci existe déjà sur internet avec l’industrie des livres et des magazines, où des gens distribuent des livres électroniques gratuits ou écrivent des blogs ou collaborent sur des recettes de cuisine et des manuels utilisateurs. Il n’y a pas de raison qu’une telle collaboration et une distribution gratuite ne puisse pas arriver avec d’autres loisirs, même si la production est un peu difficile ou onéreuse.
  • Argent. Cela peut paraitre paradoxal, mais qu’est-ce que l’argent ? C’est un système fermé qui dit qu’en échange d’un bien ou d’un service, je vais vous donner un « coupon » que vous pourrez utiliser ailleurs pour avoir des biens ou des services. Une alternative libre pourrait être créée, et aussi longtemps que les personnes font confiance au système, il n’y a pas de raison que ceci doive être contrôlé par les gouvernements et ne puisse pas être utilisé mondialement.
  • Internet. La plupart des biens ou services disponibles sur Internet sont actuellement propriétaires, y compris Google, Microsoft et Yahoo. Ceci pourrait bien changer si les gens développaient des alternatives libres de ces biens ou services. Il y en a déjà quelques-unes, depuis les messageries ou moteurs de recherches libres, jusqu’aux wikis et dictionnaires en lignes, annuaires internet, etc.

Notes

[1] La route est longue mais la voie est libre a été proposé par Nemtua sur nos forums le 26 Mai 2004 suite à un appel à slogan pour Framasoft.

[2] Crédit photo : Still wanderer (Creative Commons By)




Une belle histoire comme on les aime chez Framasoft

Voici le récit du passage sous licence libre d’une police cursive éducative que ne renierait pas mes amis de Veni Vidi Libri. Il nous est narré par mon collègue et néanmoins ami Julien Noël qui annonce dans son introduction que c’est le type d’histoire comme on les aime chez Framasoft. Et… il a parfaitement raison 😉

Il cite au passage l’une des grandes réussites francophones du monde du libre à l’école, à savoir Gcompris dont il se murmure qu’il pourrait même être intégré dans les futures versions de l’OLPC.

Cela va sans dire mais cela va mieux en le disant : n’oubliez pas de remercier son auteur si vous l’utilisez parce que ce n’est pas autrement que nous perpétuerons ce bon esprit qui nous anime et qui réussit, comme ici, à convaincre de plus en plus de monde de nous rejoindre.

L’image est un exemple d’utilisation de cette jolie police avec les premiers vers de Liberté célèbre poème de Paul Eluard.

Exemple police cursive Écolier court

Libérez la police !

Julien Noël – Juin 2007

Voici une belle histoire comme on les aime chez Framasoft.

J’ai tout compris

Il était une fois un jeune papa qui initia son fiston, de trois ans à peine, à l’ordinateur. Évidemment, pas question d’apprendre le B-A-BA de l’informatique sur du logiciel propriétaire. Dans la famille, on est libre de père en fils depuis 30 générations[1]. Le futur fils prodige est donc placé devant une machine sous Linux et découvre le maniement du clavier, de la souris, etc. via le formidable logiciel Gcompris.

En cinq jours à peine (si si), l’enfant est capable de reconnaître toutes les lettres et tous les chiffres. Et tout cela, en s’amusant – alors même que le père, féru d’informatique libre et passant de nombreuses heures quotidiennement devant son PC, était très dubitatif quant à l’apprentissage assisté par ordinateur.

Un an plus tard, l’enfant a grandi et il est temps de passer à l’étape supérieure. Au primaire, on apprend d’abord à identifier et à écrire les majuscules (ou les capitales – je n’ai jamais compris la différence). Il s’agit donc maintenant, à partir de polices cursives, d’identifier les lettres calligraphiées… Mais si, vous savez, celles que l’on écrit avec la main (vous savez bien, la main, ce truc qui permet de taper au clavier : eh bien, initialement, au moyen âge, il permettait d’écrire… Si, si !).

L’heureux papa contacte donc le développeur principal de Gcompris[2] et lui demande s’il est possible d’intégrer une police cursive.

La réponse tombe comme un couperet : pas de police cursive dans Gcompris parce que pas de police cursive libre tout court.

Recherche police désespérément

Le papa, têtu comme un Bill Gates décidé à trucider Linus Torvalds, se met donc à la recherche de la perle rare. Il google, google, google et finit par tomber sur ça : http://perso.orange.fr/jm.douteau/index.htm (évidemment, à l’époque, ce n’était pas libre).

Il joint le créateur de ces polices[3] et tente de le convaincre de les passer sous licence libre. Jean-Marie Douteau aime comprendre ce qu’il fait et pourquoi il le fait. S’ensuivent alors de nombreux échanges “épistomail” afin de mieux percevoir les principes et les enjeux du logiciel libre, pourquoi une police gratuite est inutilisable dans Gcompris, pourquoi la GPL et la LGPL… Bref, tout ce qui fait ce joli monde qui nous est si familier mais si obscur lorsque l’on ne baigne pas dedans.

Après un court passage sous licence creative common, le créateur des polices " Écolier court” et “Écolier lignes court” décide de les passer sous licence OFL, orienté dans ce choix par Sophie Gautier, la responsable OpenOffice.org France. Cette décision permettra d’intégrer les deux polices dans Gcompris ET dans OOo[4].

Vive la police libre !

Jean-Marie Douteau se demande maintenant ce que vont devenir ses bébés : il s’impatiente de les voir grandir et attend vos questions, vos remarques, vos encouragements, vos suggestions et vos contributions (par exemple pour ajouter des caractères qui n’y sont pas).

Notes

[1] au moins

[2] Bruno Coudoin

[3] Jean-Marie Douteau

[4] et évidemment dans tout logiciel compatible avec cette licence




Lounge Buddha Bar Session

Jeudi dernier, petite escapade vers Florence. Charmante bourgade si il en est mais difficile d’échapper à l’invasion touristique…

Comme il me reste en stock des chansons de l’Inconnue de la Villa Mystère[1], je crains fort que vous n’ayez à subir un nouveau petit clip diaporama avec quelques photos prises autour de la Piazza della Signoria ce jour-là.

Notes

[1] En fait je ne désespère pas de faire quelque chose de libre avec ces chansons quand bien même le contrat SACEM soit totalement anésthésiant. Dans l’intervalle j’ai cru comprendre que la diffusion en streaming n’était certes pas autorisée (sauf sur le site perso de l’artiste) mais moins répréhensible que le téléchargement direct des morceaux au format ogg ou mp3.




Message du président de la République

Voici une récente et vibrante allocution télévisée du président de la République… équatorienne qui invite tous les pays d’Amérique latine à utiliser le logiciel libre à l’occasion du FLISOL, Festival Latinoamericano de Instalación de Software Libre, qui a eu lieu le 28 avril dernier.

Pour ce qui concerne la France, je crains qu’il ne faille encore un peu patienter !

Traduction

Mes chers amis. Rafael Correa président de la République d’Équateur vous salue. Comme vous le savez, le temps est venu de l’intégration de l’Amerique latine à tous les niveaux, incluant entre autres la technologie et l’utilisation des technologies de l’information.

Pour cette raison, il est nécessaire que nous tous adoptions le logiciel libre aussi bien au niveau public que privé. De cette manière nous garantirons la souveraineté de nos états, nous dépendrons de nos propres forces et non de forces externes à la région. Nous serons producteurs de technologies et pas seulement des consommateurs. Nous posséderons le code source, et développerons ainsi de nombreux produits qui, par la mise en commun de nos efforts, pourront être d’une grande utilité pour les entreprises publiques et privées de la région.

Aussi, je vous invite tous à utiliser le logiciel libre. Le gouvernement équatorien l’a deja établi comme politique de gouvernement et d’État. Ceci constituera un pas important dans l’integration et, pourquoi ne pas le dire, – pour la libération de l’Amérique latine.

La vidéo est classiquement extraite de YouTube mais ce qui l’est moins, et c’est assez malin, c’est qu’elle vient du canal YouTube de la présidence équatorienne qui peut ainsi l’inclure dans son annonce officielle sur le site gouvernemental tout en permettant à l’info de se diffuser.

edit : merci à plakat pour la relecture de la traduction




Trois petits tours et puis s’en va, SACEM je ne t’aime pas !

Naïfs que nous sommes…

Dans un récent billet j’annonçais un peu hâtivement le projet de faire un album sous licence Art Libre avec les fonds de tiroir d’une chanteuse que j’apprécie tout particulièrement et que je présentais dans un petit clip diaporama en guise de découverte.

Cela risque d’être un peu plus compliqué que prévu pour cause d’affiliation de la dite chanteuse à la SACEM (je subodorais cependant qu’il pouvait y avoir potentiellement un problème en me gardant bien de citer son nom). En fait cela risque même d’être tout simplement impossible à réaliser puisque le contrat SACEM est une cession de droits exclusifs pour le passé, le présent et le futur.

Et déjà rien que la mise en ligne du clip est illégale.

C’est d’autant plus dommage que ces fonds de tiroirs ne sont pas des morceaux au rabais. Ce sont des créations antérieures au groupe actuelle de la chanteuse (et antérieures à son inscription à la SACEM qui plus est). Elle ne comptait tout simplement plus les exploiter, les jouer et/ou les réenregistrer avec sa nouvelle formation et du coup elle m’avait contacté pour savoir si ça m’interessait de les verser dans le pot commun de la culture libre via Framasoft.

Vous m’en voyez contrarié (pour ne pas dire plus) parce que cela signifie que les morceaux vont rester définitivement dans les tiroirs contre la réelle volonté de leur auteur. Je veux bien que, comme ils disent, la SACEM protège les artistes et la création mais en ce moment, je ne sais pas si vous avez remarqué, plus on parle de nous protéger et plus on finit par nous vérouiller.

Allez, un dernier petit clip (toujours aussi illégal) en guise d’au revoir pour vous faire partager ma frustration.

Il s’agit d’une chanson traditionnelle irlandaise In search of a rose reprise notamment par The Waterboys. Les photos sont sous licence Creative Commons BY et ont toutes été faites dimanche dernier dans un parc à Rome.




Aimez-vous cette chanson ?

Un peu de teasing

Une auteur-compositeur-interprète serait prête à sortir quelques morceaux originaux et inédits de ses cartons pour en faire un album sous licence Art Libre.

Se sentir soutenue et encouragée par le communauté la motiverait encore davantage 😉

En voici un échantillon que j’ai un peu massacré auditivement parlant avec ma première mais piètre tentative d’en faire un clip diaporama (photographies BY myself sous Creative Commons BY).

Malgré la faible qualité sonore du montage, appréciez-vous quand même le potentiel ?

edit : j’ai refait le diaporama en améliorant la qualité d’image (et les transitions) mais le revers de la médaille c’est que c’est plus lourd à se charger




Richard Stallman en grande forme (conférence à l’ENST le 3 avril 2007)

Que ce soit en direct dans la salle ou en différé sur le net, je commence à avoir pas mal de conférences générales sur le logiciel libre de Richard Stallman au compteur. Il faut dire que le bonhomme pour apprécier la France y revient souvent et s’exprime dans un français plus que correct (espèce étrangère en voie de disparition ?).

A priori on a l’impression d’assister toujours à la même conférence. Et celle que nous vous présentons en vidéo ci-dessous donnée mardi 3 avril 2007 dernier à l’ENST (École nationale supérieure des télécommunications) n’échappe à la règle. Chaussures ôtées et plus beau tee-shirt exhibé, on se retrouve invariablement avec la même entame (dont je ne me lasse toujours pas) : « Je puis expliquer le logiciel libre en trois mots : liberté, égalité, fraternité… » (sous vos applaudissements). Idem pour la conclusion du reste (dont je commence à me lasser) : « …J’ai des autocollants, des pins et des porte-clé à vendre ». Sacré Richard !

Et pourtant, variation sur le même thème, elles ont toutes un petit quelque chose qui les distingue des précédentes. Voici ce qu’écrivait récemment un spectateur de cette conférence sur la liste de diffusion de l’APRIL. Je recopie d’autant plus volontiers cet extrait qu’il exprime bien ce que je voulais dire.

J’ai entendu RMS plusieurs fois depuis 1998. C’est toujours la même histoire mais elle est à chaque fois amendée, corrigée, complétée, modifiée, avec de nouvelles références et des éléments d’actualité…

Mardi soir il a présenté cette histoire sous un jour très nouveau et original, qui me semble intéressant pour sensibiliser le grand public (…) et lui faire comprendre concrètement l’intérêt du LL pour lui. C’était construit, tout était utile/indispensable, la boucle était bouclée. Tout cela à partir des mêmes grandes lignes de réflexion remontant à 1983/4.

Vous voulez un exemple d‘élément d’actualité de la conférence de l’ENST ? Point d’impatience, il suffit d’attendre… la deuxième phrase. Ce qui donne : « Je puis expliquer le logiciel libre en trois mots : liberté, égalité, fraternité. Trois principes que le gouvernement actuel de la France ne respecte plus…» No comment !

Toujours est-il qu’effectivement mardi soir et pour une heure environ c’était du grand Stallman (ou RMS pour les intimes). Définition et historique du logiciel libre (ou LL pour les intimes), différence avec le logiciel privateur (terme qu’il semble désormais privilégier à logiciel propriétaire), du danger des DRM et des brevets, différence entre son approche et celle de Linus Torvalds, différence entre Logiciel Libre et Open Source (quand l’un parle d’éthique et de liberté l’autre insiste plutôt sur rentabilité, efficacité et rentabilité), pourquoi il faut dire GNU/Linux et non Linux tout court, un point sur l’emploi, un autre sur l’éducation (et sa mission morale et sociale), un clin d’œil aux droits de l’homme… tout y était.

Pédagogie et vulgarisation de haute volée, une conférence que je vous invite à voir et à faire passer à vos proches qui seraient susceptibles d’être intéressés par un sujet qui dépasse en fait aujourd’hui le stricte cadre du logiciel libre pour ne pas être loin de proposer un véritable projet de société.

—> La vidéo au format webm




Mais pour qui vote le libriste ?

Difficile d’échapper à l’élection présidentielle française en ce moment. Alors je vais y aller moi aussi de mon petit couplet et d’oser vous proposer ma très fine analyse sociologico-politique à une question que vous ne vous posez pas en m’appuyant pour cela sur deux sondages en rien comparables. Vous voici donc prévenu, et si vous poursuivez la lecture de ce superficiel billet ce n’est plus de ma faute.

Kézako un libriste ?

Première difficulté c’est quoi un libriste ? Le jargon français a sa petite idée.

Libriste - Jargon Français

Un libriste serait donc un fan du logiciel libre, un peu comme on serait fan de Johnny Hallyday en somme. On a échappé au Partisan du librisme mais ça reste tout de même peu satisfaisant. Et puis il y a cette précision qui interpelle au risque de produire son effet contraire : Le terme est positif. Ouf ! nous voici rassurés parce que quand le terme est négatif ça donne généralement l’équation suivante : libriste = intégriste du libre, qui, d’après ses détracteurs, voudrait rendre libre à peu près tout ce qu’il touche au mépris le plus élémentaire du pragmatisme situationiste de nos habitudes et des règles économiques du marché.

Bon, bref, passons, ne nous écartons pas du sujet (parce qu’il y aurait beaucoup à dire sur ces habitude et ces règles du marché) et faisons un choix. On va réduire ici le libriste à… un visiteur du célèbre site linuxfr. Voilà, ça vaut ce que ça vaut, mais ça m’arrange pour la suite.

Deux sondages

Le premier sondage est tout ce qu’il y a de plus classique et pour tout vous avouer je l’ai pris un peu au pif pourvu qu’il fut récent. Il s’agit d’une enquête Ipsos/DELL difusée par SFR et Le Point auprès de 1300 personnes interrogées par téléphone le 7, 9 et 10 avril sur leur intention de vote au premier tour.

Sondage Ipsos/DELL Présidentielle

Le second est plus original puisqu’issu du site LinuxFr (vous savez, le repaire de… libristes). Il est toujours en cours et compte, en ce doux mercredi 11 avril à 23h41, exactement 2677 votes.

Sondage LinuxFr Présidentielle

Si on lui écarte les réponses qui ne correspondent pas à des votes pour des candidats, et ceci afin de pouvoir mieux le comparer au sondage précédent, ça donne alors : Royal : 24,8 %, Bayrou : 44,4 %, Sarkozy : 14,2 %, autre de gauche ; 13,8%, autre de droite ; 2,8%.

Subjectif comparatif

Les sondages, blabla, on n’a pas attendu 2002 pour cela, c’est à prendre avec des pincettes, ils ne disent que ce qu’on veut bien leur faire dire, tout ça… Ok, j’en conviens fort bien. Tout comme je reconnais, mais c’est assumé et apprécié, que les sondages LinuxFr sont beaucoup plus un pretexte à convivialité et échanges (décontractés) qu’un truc véritablement sérieux. Il suffit de consulter la liste des sondages précédents pour s’en convaincre dont le passionnant Combien de bouton(s) possède(nt) votre souris ?

Il n’empêche qu’il y a tout de même quelques différences notables entre les deux études. Alors moi, ni une ni deux, faisant fi de la moindre rigueur scientifique, d’en tirer pour notre libriste les quelques enseignements / hypothèses / élucubrations suivant(e)s.

  • Le libriste ne vote pas comme le français moyen
  • Le libriste vote deux fois plus pour Bayrou et deux fois moins pour Sarkozy que le français moyen (Royal restant stable)
  • L’axe Bayrou-Royal totalise un peu plus des 2/3 des votes ce qui tendrait à ancrer le libriste au centre gauche
  • L’axe Bayrou tout seul s’approche des 50%
  • Question connexe : Si, parait-il, Bayrou est le favori des bobos, est-ce que le libriste est lui-même un bobo ?
  • L’extrême droite est marginale chez le libriste
  • L’extrême gauche n’est pas marginale mais son score ne suffit pas à démontrer que le libriste est majoritairement un gauchiste révolutionnaire altermondialiste (comme on peut parfois le lire çà et là)
  • Le libriste s’exilera à Bangalore si Sarkozy passe

Le propos reste à affiner

Soit. Admettons cette dissymétrie. On peut alors se demander en quoi les prises de position des candidats vis-à-vis du logiciel libre influence directement le vote de notre libriste. Y accorderait-il la même importance que celles concernant l’éducation, l’économie, le chômage, l’Europe, tout ça ? Cela pourrait expliquer que Bayrou soit sa coqueluche et Sarkozy son mouton noir parce que l’un a défendu publiquement très tôt le logiciel libre tandis que l’autre se fait plutôt discret sur le sujet.

C’est possible mais ce serait un peu réducteur. Il est cependant plausible que les prises de position des candidats sur les nouvelles technologies et la société de l’information dans son ensemble (dont le récent débat autour de la DADVSI) touchent notre libriste tout comme elles touchent, et c’est logique, l‘internaute moyen (qui lui se distingue du français moyen en ce que ce dernier n’est connecté qu’à 44% au net). C’est ce que laisserait à penser un autre sondage réalisé sur le site d’Agoravox le média citoyen (la révolte du pronétariat, le cinquième pouvoir, tout ça…) dont les résultats sont très proche de ceux de LinuxFr.

Libristes et agoravoxiens, même combat donc ici. Peut-on alors étendre ces préférences au net francophone tout entier ? Et de se souvenir qu’en 2005 internet avait majoritairement dit non au référendum français sur le traité établissant une Constitution pour l’Europe avec le résultat final que l’on sait…