Rassembler les gens (Libres conseils 35/42)

Chaque jeudi à 21h, rendez-vous sur le framapad de traduction, le travail collaboratif sera ensuite publié ici même.

Traduction Framalang : Ouve, merlin8282, Julius22, Sphinx, CoudCoud, lum’, goofy, peupleLà, Alpha, Peekmoaudionuma, lamessen

Rassembler les gens

Dave Neary

Dave Neary travaille sur des projets libres et open source depuis qu’il a découvert Linux en 1996. C’est un contributeur de longue date à GNOME et à GIMP. Il travaille à plein temps depuis 2007 pour aider des entreprises à se réconcilier avec les logiciels développés de façon communautaire. Durant cette période, il a travaillé sur divers projets dont OpenWengo, Maemo et Meego, qui étaient liés à de l’événementiel, à des méthodes de travail communautaires, à de la gestion de produits ainsi qu’à de la gestion d’outils d’analyse d’une communauté. Il s’est impliqué, en tant que bénévole, dans l’organisation du GUADEC, du Desktop Summit, du Libre Graphics Meeting, de la GIMP Conference, d’Ignite Lyon, de l’Open World Forum et de la MeeGo Conference.

L’une des choses les plus importantes que vous puissiez faire dans un projet lié au logiciel libre, à part écrire du code, c’est de rassembler les principaux contributeurs aussi souvent que possible. J’ai eu la chance de pouvoir organiser un certain nombre d’événements au cours de ces dix dernières années, mais aussi d’observer les autres et d’apprendre à leur contact pendant ce temps. Voici quelques-unes des leçons que j’ai apprises au cours du temps, grâce à cette expérience.

1. Le lieu

Le point de départ pour la plupart des réunions ou des conférences, c’est le lieu. Si vous réunissez un petit groupe (moins de dix personnes), il suffit bien souvent de choisir une ville et de demander à un ami qui possède une entreprise ou qui est professeur d’université de vous réserver une salle. Vous aurez sans doute besoin d’une organisation plus formelle dès qu’il y aura plus de monde à accueillir.

Si vous ne faites pas attention, le lieu de l’événement sera une grande source de dépenses et il vous faudra trouver l’argent correspondant quelque part. Mais si vous êtes futé, vous pouvez vous débrouiller pour obtenir assez facilement une salle gratuitement.

Voici quelques-unes des stratégies qu’il serait intéressant d’essayer :

  • Intégrez-vous au sein d’un autre événement : le Linux Foundation Collaboration Summit, OSCON, LinuxTag, GUADEC et beaucoup d’autres conférences accueillent volontiers des ateliers ou des rencontres pour de plus petits groupes. Le GIMP Developers Conference en 2004 a été le premier rassemblement que j’ai organisé, et afin de ne pas avoir à subir les problèmes inhérents au fait de trouver la salle, une date qui convient à tout le monde et ainsi de suite, j’ai demandé à la GNOME Foundation si ça ne les dérangeait pas de nous laisser un peu d’espace lors de la GUADEC — et ils ont accepté. Tirez parti de l’organisation d’une conférence plus grande, et vous pourrez en plus assister à cette grande conférence par la même occasion !
  • Demandez aux universités environnantes si elles n’ont pas des salles disponibles. Ça ne fonctionnera plus une fois que vous aurez dépassé une certaine taille, néanmoins, vous pouvez vous renseigner en particulier dans les universités dont certains chercheurs sont des membres du Linux User Group (LUG) [NdT : groupe d’utilisateurs de Linux] local. Ils peuvent en parler avec leur directeur de département afin de réserver un amphithéâtre et quelques salles de classe pour un week-end. Un grand nombre d’universités vous demanderont de faire un communiqué de presse et d’être mentionnées sur le site Web de la conférence, ce qui est un juste retour des choses. Le premier Libre Graphics Meeting s’est déroulé gratuitement à CPE Lyon et le GNOME Boston Summit a été accueilli gratuitement pendant des années par le MIT.
  • Si le lieu de rendez-vous ne peut pas être gratuit, voyez si quelqu’un d’autre ne peut pas le financer. Lorsque votre conférence commence à accueillir plus de 200 personnes, la plupart des salles seront payantes. Héberger une conférence coûtera beaucoup d’argent à celui qui prête les locaux, et c’est une part importante dans le modèle économique des universités que d’organiser des conférences lorsque les étudiants sont partis. Mais ce n’est pas parce que le centre de conférence ou l’université ne peut pas vous accueillir gratuitement que cela signifie que vous devez être la personne qui paye. Les collectivités territoriales aiment bien être impliquées lorsqu’il s’agit d’organiser des événements importants dans leur région. Le GUADEC à Stuttgart, le Gran Canaria Desktop Summit et le Desktop Summit à Berlin ont tous été financés par la région d’accueil en ce qui concerne la salle. S’associer avec une région présente un avantage supplémentaire : elles ont souvent des liens avec les entreprises et la presse locale, ce qui représente des ressources que vous pouvez utiliser afin d’obtenir de la visibilité et peut-être même des sponsors pour votre conférence.
  • Faites un appel d’offres : en incitant les groupes qui souhaitent héberger la conférence à déposer une offre, vous les incitez aussi à trouver une salle et à discuter avec les partenaires locaux avant de vous décider sur l’endroit où aller. Vous mettez aussi les villes en concurrence, et comme pour les candidatures aux Jeux Olympiques, les villes n’apprécient pas de perdre les compétitions auxquelles elles participent !

2. Le budget

Les conférences coûtent de l’argent. Ce qui peut coûter le plus cher pour une petite rencontre, ce sont les frais de déplacement des participants. Pour une conférence plus importante, les principaux coûts seront l’équipement, le personnel et la salle. Chaque fois que j’ai dû réunir un budget pour une conférence, mon approche globale a été simple :

  • décider de la somme d’argent nécessaire pour réaliser l’événement ;
  • collecter les fonds jusqu’à atteindre ce montant ;
  • arrêter la collecte et passer aux étapes suivantes de l’organisation.

Lever des fonds est une chose difficile. On peut vraiment y passer tout son temps. Au bout du compte, il y a une conférence à préparer, et le montant du budget n’est pas la préoccupation principale de vos participants.

Rappelez-vous que votre objectif principal est de réunir les participants du projet afin de le faire avancer. Alors, obtenir des réponses de participants potentiels, organiser le logement, la salle, les discours, la nourriture et la boisson, les activités sociales et tous les autres aspects de ce à quoi les gens s’attendent lors d’un événement… tout cela est plus important que la levée de fonds.

Bien sûr, de l’argent est nécessaire pour être capable d’organiser tout le reste. Alors, trouver des sponsors, décider de leurs niveaux de participation et vendre la conférence est un mal nécessaire. Mais une fois que vous avez atteint le montant nécessaire pour la conférence, vous avez vraiment mieux à faire.

Il existe quelques sources potentielles de financement pour préparer une conférence — combiner ces sources semble, selon moi, la meilleure des façons pour augmenter vos recettes.

  • les participants : même si c’est un sujet de controverse dans de nombreuses communautés, je crois qu’il est tout à fait justifié de demander aux participants de contribuer en partie aux coûts de la conférence. Les participants profitent des installations ainsi que des événements sociaux et tirent parti de la conférence. Certaines communautés considèrent la participation à leur événement annuel comme une récompense pour services rendus ou comme une incitation à faire du bon travail dans l’année à venir. Mais je ne crois pas que ce soit une façon pérenne de voir les choses. Pour les participants à une conférence, il y a plusieurs façons de financer l’organisation de celle-ci :
    1. les droits d’inscription : c’est la méthode la plus courante pour obtenir de l’argent de la part des participants à la conférence. La plupart des conférences communautaires demandent un montant symbolique. J’ai vu des conférences qui demandaient un droit d’entrée de 20 à 50 euros ; et ça ne posait aucun problème à la plupart des gens de payer cela. Un règlement d’avance a l’avantage supplémentaire de réduire massivement les désistements parmi les gens qui vivent à proximité. Les gens accordent plus d’importance à la participation à un événement leur coûtant dix euros qu’à un autre dont l’entrée est gratuite, même si le contenu est identique,
    2. les dons : ils sont utilisés avec beaucoup de succès par le FOSDEM. Les participants reçoivent un ensemble de petits cadeaux fournis par les sponsors (livres, abonnements à des magazines, T-shirts) en échange d’un don. Mais ceux qui le souhaitent peuvent venir gratuitement,
    3. la vente de produits dérivés : votre communauté serait peut-être plus heureuse d’accueillir une conférence gratuite et de vendre des peluches, des T-shirts, des sweats à capuche, des mugs et d’autres produits dérivés afin de récolter de l’argent.? Attention ! D’après mon expérience, on peut s’attendre à obtenir moins de bénéfices de la vente de produits dérivés qu’on n’en obtiendrait en offrant un T-shirt à chaque participant ayant payé un droit d’inscription,
  • les sponsors : les publications dans les médias accepteront généralement un « partenariat de presse » — en faisant de la publicité pour votre conférence dans leur magazine papier ou sur leur site Web. Si votre conférence est déclarée comme émanant d’une association à but non-lucratif pouvant accepter des dons avec des déductions d’impôts, proposez à vos partenaires dans la presse de vous facturer pour les services et de vous donner ensuite une subvention de partenariat séparée pour couvrir la facture. Le résultat final est identique pour vous. Mais il permettra à la publication de compenser l’espace qu’elle vous vend par des réductions d’impôts. Ce que vous souhaitez vraiment, ce sont des parrainages en liquide. Comme le nombre de projets de logiciels libres et les conférences se sont multipliés ces dernières années, la compétition pour les parrainages en liquide s’est intensifiée. Afin de maximiser vos chances d’atteindre le budget que vous vous êtes fixé, voici les actions que vous pouvez entreprendre :
    1. une brochure de la conférence : pensez à votre conférence comme un produit que vous vendez. Que représente-t-elle, quelle attention attire-t-elle, à quel point est-elle importante pour vous, pour vos membres, pour l’industrie et au-delà ? Qu’est ce qui a de la valeur pour votre sponsor ? Vous pouvez vendre un contrat de parrainage sur trois ou quatre éléments différents : peut-être que les participants à votre conférence constituent une audience cible de grande valeur pour le sponsor, peut-être (en particulier pour les conférences de moindre importance) que les participants ne sont pas ce qui est important mais plutôt la couverture dont bénéficiera la conférence dans la presse internationale ou bien peut-être que vous vendez à l’entreprise le fait que la conférence améliore un élément logiciel dont elle dépend. En fonction du positionnement de la conférence, vous pouvez lister les sponsors potentiels. Vous devriez avoir une brochure de parrainage que vous pourrez leur envoyer. Elle devra contenir une description de la conférence, un argumentaire de vente expliquant pourquoi il est intéressant pour l’entreprise de la parrainer, éventuellement des coupures de presse ou des citations de participants à des éditions antérieures disant à quel point votre conférence est géniale et, finalement, la somme d’argent que vous recherchez,
    2. des niveaux de parrainage : ils devraient être fixés en fonction de la somme que vous voulez lever. Vous devriez attendre de votre sponsor le plus important qu’il vous fournisse entre 30 et 40 % du budget total de la conférence, pour une conférence de moindre importance. Si vous êtes chanceux et que votre conférence attire de nombreux sponsors, cela peut s’élever à seulement 20 %. Pour vos estimations, visez un tiers. Ceci signifie que si vous avez décidé que vous avez besoin de 60 000 euros, vous devriez alors mettre votre niveau de sponsor principal à 20 000 euros et tous les autres niveaux en conséquence (disons 12 000 euros pour le deuxième niveau et 6 000 pour le troisième). Pour les conférences de moindre importance et les rencontres, le processus peut être légèrement plus informel. Mais vous devriez toujours penser au processus entier comme un argumentaire de vente,
    3. un calendrier : la plupart des entreprises ont un cycle budgétaire soit annuel, soit semestriel. Si vous émettez votre demande à la bonne personne au bon moment, vous pourriez alors avoir une discussion bien plus aisée. Le meilleur moment pour soumettre des propositions de parrainage d’une conférence estivale est aux environs d’octobre ou de novembre de l’année précédente, lorsque les entreprises finalisent leur budget annuel. Si vous manquez cette fenêtre, tout n’est pas perdu. Mais tout parrainage que vous obtenez viendra des budgets de fonctionnement qui tendent à être maigres et qui sont gardés précieusement par leurs propriétaires. Sinon, vous pouvez obtenir un engagement de parrainage en mai pour votre conférence de juin, à la fin du processus budgétaire du premier semestre — ce qui est tardif dans la préparation,
    4. approcher les bonnes personnes : je ne vais pas enseigner l’art de la vente à qui que ce soit mais mon secret personnel dans les négociations avec les grandes organisations est de devenir ami avec des personnes à l’intérieur de ces organisations et de me forger une impression sur l’origine potentielle du budget pour mon événement. Votre ami ne sera probablement pas la personne qui contrôle le budget mais l’avoir à vos cotés est une chance d’avoir un allié au sein de l’organisation. Il fera en sorte que votre proposition soit mise devant les yeux de la personne en charge du budget. Les grandes organisations peuvent être aussi dures qu’une noix est dure à craquer, mais les projets de logiciels libres ont souvent des amis dans les hautes sphères. Si vous avez vu le directeur technique ou le PDG d’une entreprise classée au Fortune 500 parler de votre projet dans un article de journal, n’hésitez pas à lui envoyer quelques mots en évoquant le fait que, quand le temps sera venu de financer cette conférence, une note personnelle demandant qui est la meilleure personne à contacter fera des merveilles. Souvenez-vous que votre objectif n’est pas de vendre votre contact personnel mais de le changer en un défenseur de votre cause à l’intérieur de l’organisation et de créer la chance de, plus tard, vendre la conférence à la personne responsable du budget,
  • Souvenez-vous aussi, en vendant des contrats de parrainage, que tout ce qui vous coûte de l’argent pourrait faire partie d’un contrat de parrainage. Certaines entreprises offriront des tours de cou aux participants, la pause café, la glace de l’après-midi ou bien un événement social. Ce sont de bonnes occasions de parrainage et vous devriez exprimer clairement, dans votre brochure, tout ce qui se déroule. Vous devriez aussi définir un budget prévisionnel pour chacun de ces évènements lorsque vous écrivez le brouillon de votre budget.

3. Contenu

Le contenu d’une conférence est son élément le plus important. Des événements différents peuvent traiter différemment d’un même contenu — certains événements invitent une grande partie de leurs intervenants, tandis que d’autres comme GUADEC et OSCON font des appels à propositions et choisissent les interventions qui rempliront les salles.

La stratégie que vous choisirez dépendra beaucoup de la nature de l’événement. Si l’événement existe depuis une dizaine d’années, avec un nombre de participants toujours croissant, faire un appel à articles est une bonne idée. Si vous êtes dans votre première année, et si les personnes ne savent vraiment pas quoi faire de l’événement, alors donnez le ton en invitant de nombreux orateurs, aidant ainsi les gens à comprendre votre objectif.

Pour Ignite Lyon l’an dernier, j’ai invité environ 40 % des orateurs pour le premier soir (et j’ai souvent dû les harceler pour qu’ils me proposent une intervention). Les 60 % restants sont venus via un formulaire de candidature. Pour le premier Libre Graphics Meeting, en dehors des présentations éclairs, je pense avoir d’abord contacté chaque orateur, à l’exception de deux d’entre eux. Maintenant que l’événement en est à sa 6e année, il existe un processus d’appel à contributions qui fonctionne plutôt bien.

4. Le programme

Il est difficile d’éviter de mettre en parallèle des exposés attrayants pour les mêmes personnes. Dans chaque conférence, vous pouvez entendre des personnes qui voulaient assister à des conférences se déroulant en même temps, sur des sujets similaires.

Ma solution pour la programmation des conférences est très simple, mais elle fonctionne dans mon cas. Des post-it de couleur, avec une couleur différente pour chaque thème, et une grille vide. Le tour est joué. Écrivez les titres des exposés (un par post-it), ajoutez les quelques contraintes que vous avez pour l’orateur, puis remplissez la grille.

Mettre le programme en-dehors de l’ordinateur, et dans des objets réels, permet de voir très facilement les conflits, d’échanger les conférences aussi souvent que vous voulez, et de le publier ensuite sur une page Web quand vous en êtes satisfait.

J’ai utilisé cette technique avec succès pour GUADEC 2006 et Ross Burton l’a réutilisée avec succès en 2007

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5. Les fêtes

Les fêtes sont un compromis à trouver. Vous voulez que tout le monde s’amuse, et s’éclater jusqu’au petit matin est une partie très importante quand on participe à une conférence. Mais la fréquentation matinale souffre après une fête. Ayez pitié du pauvre membre de la communauté devant se tirer hors du lit après trois heures de sommeil pour aller parler devant quatre personnes à 9 heures du matin après la fête.

Certaines conférences ont trop de fêtes. C’est super d’avoir la possibilité de se saouler avec des amis chaque nuit. Mais ça n’est pas génial de vraiment le faire chaque nuit. Rappelez-vous du but de la conférence : vous voulez stimuler l’avancement de votre projet.

Je préconise une grande fête, et une plus petite, au cours de la semaine. En-dehors de ça, les personnes seront tout de même ensemble et passeront de bons moments, mais ce sera à leurs frais, ce qui fait que chacun restera raisonnable.

Avec un peu d’imagination, vous pouvez organiser des événements qui n’impliquent pas l’utilisation de musique forte et d’alcool. D’autres genres d’événements sociaux peuvent faire l’affaire, et même être plus amusants.

Au GUADEC, nous organisons un tournoi de football depuis quelques années. Lors du sommet OpenWengo en 2007, nous avions embarqué les personnes pour une balade en bateau sur la Seine puis nous étions ensuite montés sur un manège du XIXe siècle. Faire manger les gens ensemble est un autre moyen de nouer des liens. J’ai de très agréables souvenirs de repas de groupe lors de nombreuses conférences. À la conférence annuelle de KDE, l’Akademy, il y a traditionnellement une grande journée de sortie durant laquelle les personnes vont ensemble à un pique-nique, quelques activités simples de plein air, une promenade en bateau, un peu de tourisme ou quelque chose de similaire.

6. Les coûts supplémentaires

Attention à ces dépenses imprévues ! Une conférence dans laquelle j’étais impliqué, et où le lieu de réunion était « sponsorisé à 100 % » nous a laissé une note de 20 000 euros pour les coûts de main-d’œuvre et d’équipement. Oui, le lieu était sponsorisé, mais la mise en place des tables et des chaises, ainsi que la location des écrans, des vidéoprojecteurs et de tout le reste ne l’était pas. Au bout du compte, j’ai estimé que nous avions utilisé seulement 60 % de l’équipement que nous avions payé.

Tout ce qui est fourni sur place est extrêmement coûteux. Une pause-café peut coûter jusqu’à 8 euros par personne pour un café et quelques biscuits, de l’eau en bouteille pour les conférenciers coûte quatre euros par bouteille, etc. La location d’un rétroprojecteur et de micros pour une salle peut coûter 300 euros ou plus pour une journée, selon que le propriétaire exige ou non que l’équipement audio-vidéo soit manipulé par son propre technicien.

Quand vous traitez avec un lieu commercial, soyez clair dès le départ sur ce pour quoi vous payez.

Les détails sur place

J’aime les conférences attentives aux petits détails. En tant qu’orateur, j’aime quand quelqu’un me contacte avant la conférence pour m’avertir qu’il me présentera. Que souhaiterais-je qu’il dise ? C’est rassurant de savoir que, quand j’arriverai, il y aura un micro sans fil et quelqu’un qui peut aider à l’ajuster.

Faire attention à tous ces détails nécessite de nombreux volontaires, et ça nécessite quelqu’un pour les organiser avant et pendant l’événement. Il faut passer beaucoup de temps à parler à l’équipe sur place, plus particulièrement aux techniciens audio/vidéo.

Lors d’une conférence, le technicien audio-vidéo avait prévu de basculer manuellement l’affichage vers un économiseur d’écran à la fin d’une conférence. Au cours d’une session de mini-conférences, nous nous sommes retrouvés dans une situation burlesque quand, après le premier conférencier, j’ai interverti l’ordre de passage : au moment où la présentation suivante s’affichait sur mon portable, nous avions toujours l’économiseur sur le grand écran. Personne n’avait parlé avec le technicien de la régie pour lui expliquer le format de la présentation ! Et c’est comme ça qu’on a fini par avoir pas moins de quatre spécialistes de Linux à s’occuper de l’ordinateur portable qui vérifiaient les connexions en psalmodiant divers mantras Xrandr, qui s’efforçaient de remettre en marche le rétroprojecteur au-dessus de nos têtes ! Nous avons fini par changer d’ordinateur portable, le technicien de la régie a compris de quel type de session il s’agissait, et ensuite tout s’est fort bien passé — la plupart des gens concernés ont accusé mon portable.

Gérer une conférence, ou parfois une plus petite rencontre, prend du temps, et nécessite beaucoup d’attention aux détails, qui pour la plupart ne seront jamais remarqués par les participants. Et je n’ai même pas évoqué des choses comme les banderoles et les affiches, la création du graphisme, la gestion de la presse ou d’autres joyeusetés qui vont de pair avec l’organisation d’une conférence.

Le résultat final est en revanche particulièrement gratifiant. Une étude que j’ai menée l’année dernière sur le projet GNOME a montré qu’il y a eu une forte augmentation de la productivité sur tout le projet juste après notre conférence annuelle et un grand nombre de membres de notre communauté mentionnent la conférence comme ayant été, pour eux, le point culminant de l’année.




Le projet, c’est d’abord des personnes (Libres conseils 34/42)

Chaque jeudi à 21h, rendez-vous sur le framapad de traduction, le travail collaboratif sera ensuite publié ici même.

Traduction Framalang : Ouve, Julius22, Sphinx, fubik, peupleLà, goofy, KoS, merlin8282, Munrek, Asta, Jej, Alpha, lamessen

L’important, c’est les gens

Nóirín Plunkett

Nóirín Plunkett est une touche-à-tout qui maîtrise plusieurs domaines. Rédactrice technique le jour, son travail open source illustre l’expression « Si vous voulez que quelque chose soit fait, demandez à une personne occupée ». Nóirín a commencé dans l’open source avec Apache, donnant un coup de main sur la documentation du projet httpd. En moins d’un an, elle a été recrutée dans l’équipe de planification des conférences, qu’elle dirige désormais. Elle a participé à la mise en place du projet de développement communautaire chez Apache et a déjà agi en tant qu’administratrice d’organisation pour le Summer of Code. Elle siège aux conseils d’administration de la fondation du logiciel Apache et de l’Initiative Open Cloud. Quand elle n’est pas en ligne, elle est dans son élément naturel sur une piste de danse. Mais c’est également une harpiste et chanteuse talentueuse et une excellente sous-chef (NdT : en français dans le texte).

Rien ne vaut une voie classique, bien que la mienne le soit peut-être moins que la plupart des autres. J’ai fait ma première contribution quand j’avais la vingtaine. À cette époque, j’avais déjà travaillé plus d’un an chez Microsoft. Mais après Microsoft, j’ai déménagé à l’étranger afin de poursuivre mes études. C’était sympathique d’avoir un divertissement, j’ai donc commencé à travailler sur différentes documentations et traductions et j’ai contribué au projet httpd d’Apache.

Comme par hasard, bien sûr, la conférence européenne sur Apache allait avoir lieu à Dublin, alors que, cet été-là, j’étudiais à Munich. Mais la chance sourit aux Irlandais et, avec un peu d’astuce, j’ai convaincu Sun Microsystems de financer ma participation à la conférence.

J’ai une photo du moment où j’ai pris conscience que cette chose appelée open source était bien réelle, et que ça allait changer le monde. C’était pendant la soirée avant la conférence. Nous n’avions toujours pas trouvé où la fibre se terminait, elle était censée constituer la colonne vertébrale de notre réseau. Nous avions vérifié chaque coin, chaque armoire et chaque plinthe, en vain. Nous avions laissé tomber pour cette nuit, et nous étions occupés à nous assurer que les salles qui accueilleraient les sessions de formation auraient au moins suffisamment de connectivité pour que les formateurs puissent utiliser leurs supports de présentation (1).

Et à mesure que la nuit tombait, que les routeurs révélaient lentement les secrets de leurs configurations par défaut, la demi-douzaine de volontaires, des gens que je n’avais rencontrés que dans l’après-midi même, devenaient des amis.

Je ne pourrais pas vous dire où sont les six filles avec lesquelles j’ai vécu pendant cet été-là à Munich. Mais je suis toujours en contact avec chacune des personnes que vous voyez sur cette photo. L’une d’elles a déménagé dans un autre pays, une autre est partie sur un autre continent. La plupart ont changé de travail entre-temps, j’ai eu mon diplôme et je me suis conformée à la grande tradition irlandaise de l’émigration pour trouver du travail.

Vous voyez, l’open source, c’est d’abord des gens. Vraiment, sur presque n’importe quel projet dont vous voudriez faire partie, le code ne vient qu’après.

Ce qui fait que travailler sur un projet est un bonheur et non une plaie, ce sont les gens. Ce qui fait qu’un projet prospère plutôt qu’il ne stagne, ce sont les gens. Bien entendu, vous serez capable de coder toute la nuit pour un projet si ça permet de résoudre un problème que vous pensez être important ; mais, à moins d’avoir des gens avec lesquels vous pouvez collaborer, discuter, concevoir et développer, vous allez probablement finir par perdre la motivation ou vous retrouver bloqué pour un bout de temps.

Les conférences, les sprints, les hackathons, les « retraites » (NdT : une ou plusieurs journées qui se concentrent sur la création de code de très bonne qualité plutôt qu’écrit dans l’urgence) ou tout ce que votre communauté appelle ses « moments de face à face », voilà leur vraie valeur : permettre de se retrouver face à face avec les gens avec lesquels vous avez travaillé. Les êtres humains sont des animaux sociaux ; les bébés reconnaissent des visages avant même de commencer à gazouiller, et peu importe à quel point les gens sont polis ou amicaux dans leurs courriels, il y a toujours quelque chose qui manque dans ces communications-là.

Rencontrer des gens en face à face nous donne une occasion de voir l’humanité de ceux avec qui on a pu avoir du mal à s’entendre, de partager la joie du travail bien fait avec ceux avec qui on aime travailler. Ainsi, si j’avais un conseil à donner à ceux qui commencent, et j’aurais aimé qu’on me le donne, ça serait de sortir, de rencontrer des gens, de coller des noms aux visages dès que l’opportunité se présente (2).

Et si vous trouvez que les occasions sont rares et trop espacées, n’hésitez pas à demander. Cherchez des gens qui voyagent près de chez vous ou qui vivent là où vous voyagez, dénichez un parrainage pour assister aux grands événements de la communauté, organisez votre propre événement !

C’est la richesse de nos communautés qui donne toute sa valeur à l’open source, ainsi que les efforts partagés vers des objectifs communs. Et, bien sûr, les sessions musique, les repas, les pintes et les soirées ! Ce sont les choses qui nous rassemblent, et vous allez découvrir qu’une fois que vous avez rencontré les gens en personne, même vos interactions par courriel seront plus riches, plus gratifiantes et plus fructueuses qu’elles ne l’étaient auparavant.

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Notes de l’auteur :

(1) Le lendemain matin, nous sommes allés dans les combles pour essayer de trouver la fibre, toujours rien. Pour finir, nous l’avons trouvée dans le local technique de la boîte de nuit, située dans le sous-sol à côté.

(2) Malheureusement, je dis ça comme une mise en garde : comme dans tout rassemblement important, assister à une conférence open source présente des risques. Certains pires que d’autres, mais d’après mon expérience, les agressions, particulièrement, semblent plus fréquentes dans les communautés techniques que dans les communautés non-techniques. Dénichez les événements qui publient un code de conduite ou une politique anti-harcèlement et demandez de l’aide si vous ne vous sentez pas en sécurité. La grande majorité des gens que vous trouverez dans un événement open source sont des êtres humains formidables et attentionnés. J’espère qu’avec le temps, changer les attitudes empêchera la minorité de penser qu’elle peut se permettre des comportements déraisonnables dans ce genre de lieux…




Savoir vendre un projet (Libres conseils 33/42)

Chaque jeudi à 21h, rendez-vous sur le framapad de traduction, le travail collaboratif sera ensuite publié ici même.

Traduction Framalang :Julius22, Sphinx, fubik, peupleLà, okram, goofy, merlin8282, Munrek, Texmix, Asta, Jej, gregseth, lamessen

Qui êtes-vous, qu’avez-vous à vendre et en quoi ça pourrait m’intéresser ?

Sally Khudairi

Active sur le Web depuis 1993, Sally Khudairi est la publicitaire en embuscade derrière certaines des organisations et des standards les plus importants de cette industrie. Ancienne adjointe de Sir Tim Berners-Lee et championne toutes catégories de l’innovation collaborative, elle a aidé au lancement de The Apache Software Foundation en 1999 et en fut la première femme et membre non-technique élue. Sally est vice-présidente du marketing et de la publicité pour The Apache Software Foundation et directrice générale de HALO Worldwide, une société de conseil en communication pour des marques de luxe.

Tout le monde est vendeur. Du PDG à la star des commerciaux, en passant par le gars qui répartit le courrier, chacun est un représentant de votre entreprise. Les technologies et les stratégies ont changé au fil des années mais une bonne communication reste primordiale. Au bout du compte, tout le monde vend quelque chose, et c’est un équilibre intéressant à trouver dans la publicité ; qui vous êtes, ce que vous faites et ce que vous vendez sont souvent étroitement imbriqués. Quand les gens me disent qu’ils ne savent pas qui je suis, je leur demande s’ils ont entendu parler du W3C, d’Apache ou des Creative Commons.

La réponse habituelle est « bien sûr ! », ce qui me confirme que je fais bien mon boulot. Si vous savez qui ils sont et ce qu’ils font, tout va bien. Après tout, c’est le produit qui compte, pas le publicitaire. Je n’ai jamais cherché à être là : me faire les dents dans la communication à la naissance du Web n’était pas facile, mais grâce au ciel j’ai pu observer les autres et esquiver un certain nombre de torpilles. Après une forte montée en puissance et quelques projets très en vue, quel conseil pourrais-je partager avec un chargé de relations publiques en herbe, avec un porte-parole chevronné rompu à la pratique des médias, ou un technologue qui ose enfourcher le cheval ombrageux de la promotion, malgré ses ruades ?

N’oubliez jamais de vous manifester

Quand vous vendez votre histoire à la presse, souvenez-vous que les médias, eux aussi, ont quelque chose à vendre. Bien sûr, au plus haut niveau, le rôle d’un journaliste est de raconter une histoire irrésistible et convaincante — qu’elle soit vraie ou non, que les faits soient exacts ou non —, qu’elle réponde ou non à une éthique, c’est une autre question. Qu’il s’agisse d’attirer le lectorat, de fidéliser les abonnés ou de promouvoir les espaces publicitaires, eux aussi sont en train de vendre quelque chose. Votre boulot, c’est de les aider à faire le leur. À dire vrai, il est possible que certaines personnes n’aient jamais entendu parler de vous, même si vous êtes dans le métier depuis déjà pas mal de temps. Même si ce n’est pas le cas, ils peuvent ne pas savoir exactement qui vous êtes. Soyez clair sur ce que vous avez à offrir. Quelle est l’accroche pour la presse — quelle est la nouvelle ? Assurez-vous qu’elle est vraiment nouvelle. Soyez direct et venez-en rapidement au fait. Vous devez être prêt à répondre aux questions suivantes : « et alors ? », « En quoi ça pourrait m’intéresser ? » et « Qu’est-ce qu’il y a là-dedans pour moi ? ». Cela veut dire que vous devez vous poser des questions sur vous-même et sur votre produit. Les gens achètent des idées, pas des produits. Faire la promotion des avantages de ce que vous lancez vous aidera à améliorer vos chances d’obtenir une couverture médiatique. Faites un pas de côté : qu’êtes-vous vraiment en train de vendre ?

Jamais le vendredi

Le pire des jours pour lancer un nouveau site web, diffuser un communiqué de presse ou informer les médias, c’est le vendredi. La probabilité qu’il se passe quelque chose et que personne ne soit disponible pour gérer les retombées est plus importante que vous ne pouvez l’imaginer. J’en ai eu une cuisante expérience dès le début de ma carrière. J’avais lancé la nouvelle page d’accueil du W3C un vendredi soir puis quitté le bureau et embarqué dans un avion pour Paris. Comme je venais du monde de la publication commerciale sur Internet, utiliser un tag propriétaire ne me posait aucun problème à partir du moment où il faisait le travail. Faire de même sur le site internet d’une organisation vouée à l’interopérabilité, en revanche, n’était pas une bonne idée. En quelques minutes, des douzaines de messages arrivèrent, demandant comment la <balise-aujourd’hui-dépréciée> était arrivée sur notre site. Et non, ça n’était pas <blink>…

N’imaginez jamais que cela n’a aucune importance

La crédibilité est essentielle. Même si vous êtes surchargé de travail, dévoué corps et âme ou partout à la fois, vous ne pouvez pas empêcher l’heure de sonner. Essayez de produire autant que vos capacités vous le permettent et demandez de l’aide si vous le pouvez. Certaines échéances doivent être négociées, et beaucoup d’éditeurs peuvent s’accommoder d’un retard dans le calendrier mais cela n’aura probablement pas (autant) d’importance une fois l’urgence passée si vous n’êtes pas capable de finir le travail. Tout comme pour l’art, le développement de standards et la relecture-correction, le processus peut se poursuivre et recommencer ad nauseam. Tandis que la créativité ne peut pas être gérée par le temps, des dates butoir strictes obligent à tracer une limite à un moment donné. Mais vous devez vous soucier des détails. Arrêtez-vous. Révisez tout et testez tous les liens. Assurez-vous que cela correspond parfaitement à la stratégie de la campagne ou de la marque. Les cycles de répétition font partie des grands principes structurants de la communication et le travail continuera à s’accumuler. Organisez-le et protégez votre réputation.

Allez-y seul

Il est important d’avoir confiance en vos instincts, spécialement lorsque vous sortez des sentiers battus. Aux premiers jours du Web supercool et ultramoderne, tout le monde semblait s’en remettre aux stratégies habituelles des marques/relations publiques/marketing qui consistaient à faire des sites vitrines. Puis tout le monde « suivait le meneur » (le meneur est « le premier à l’avoir fait », dans de nombreux cas). Les tendances sont une chose, les attentes et les besoins de l’industrie en sont une autre : « c’est comme ça que tout le monde fait » ne veut pas dire que c’est bien pour vous, votre projet ou votre communauté. Ma carrière dans la communication a commencé lorsque j’ai renvoyé le sous-traitant que nous avions choisi et tout ramené en interne.

Nous avons été parmi les premières organisations à mettre une adresse URL sur notre plaquette commerciale, et nous avons été les premiers à utiliser une URL comme source d’un communiqué de presse alors que les agences de presse nous disaient que cela n’était pas conforme et contraire aux règles. Faites confiance à vos connaissances. Allez à contre-courant et bousculez les règles de manière responsable. Sachez vous différencier. Il est permis d’être un dissident tant que vous pouvez soutenir vos idées.

Offrez vraiment des perspectives

Bon nombre des technologies dans lesquelles je suis impliquée finissent en produits au bout de trois à cinq ans. Ceci signifie que, dans bien des cas, il est difficile d’établir une quelconque relation à un produit comparable. Il est crucial que vous expliquiez clairement votre position en utilisant le moins de jargon possible. La plupart des journalistes et analystes non-développeurs avec lesquels je suis en contact ne suivent pas les activités d’une certaine communauté au quotidien et ne savent pourquoi telle fonctionnalité est meilleure qu’une autre, même si c’est une évidence pour vous.

Dire qu’on va « privilégier la forme plutôt que le fond » est plus pertinent aujourd’hui que jamais. Forme. Fond. Je marque toujours une séparation à ce sujet lorsque je fais de la formation aux médias : présentez trop le fond ou trop la forme et votre campagne risque d’échouer. La perception est fondamentale et la cause de bien des conflits. Tout sur la forme = « branché + hyperbole » = « Ah, ces marketeux ! ». Tout sur le fond = « des zéros et des uns » = « Ah, ces geeks ! ».

Il vous faut comprendre et pouvoir expliquer clairement quel est le problème que résout votre produit. En sachant mieux présenter le problème, vous pourrez mieux en expliquer la solution. Les détails accessoires, les anecdotes et les succès, voilà ce qui donne à la presse un moyen d’attirer l’attention de son lectorat. Vous devez savoir répondre à la question « Qu’y a-t-il pour moi là-dedans ? », parce que c’est ce qui incite les journalistes à fouiller un peu plus dans votre histoire, qui, en retour, permet aux lecteurs d’en savoir plus sur vous. La forme répond à la question « Qu’y a-t-il pour moi là-dedans ? », c’est donc l’hameçon. Le fond est le comment on y parvient.

Ayez des porte-parole sur la brèche

Ayez toujours quelqu’un de disponible pour parler à la presse. Oui, ça peut être vous, mais sachez qu’il y aura un moment où, même si vous avez une histoire bien planifiée à raconter, vous pourriez ne pas être disponible. Avec qui d’autre travaillez-vous ? Qui vous connaît ? Qui vous soutient ? Définir ces personnes et distribuer les rôles pour clarifier qui dit quoi contribue beaucoup à diminuer les maux de tête potentiels. J’agis habituellement en tant que porte-parole d’arrière-plan afin de pouvoir passer du temps avec un journaliste pour trouver ce qu’il recherche spécifiquement et comment nous pouvons lui donner les informations pertinentes du mieux possible.

J’explique comment les choses fonctionnent, principalement sur les processus ; cela met mes « vrais » porte-parole en meilleure position pour dire quels sont leurs besoins et minimise le risque de perdre leur participation en chemin. Préparer les bonnes personnes est aussi important que de les rendre disponibles. Pendant mes cours de formation aux médias, je mets quelques diapositives « surprenantes » qui soulignent les leçons particulièrement intéressantes apprises au fil des ans.

Nous avons par exemple connu une pagaille de représentants dans les premiers jours de l’incubateur Apache, où 15 personnes ont répondu à une demande de la presse en 48 heures… beaucoup d’opinions, mais qui était la « bonne » personne à citer ? Ne laissez pas la presse en décider ! Un autre scénario suprenant comprenait une fête de lancement globale avec des centaines d’invités, des représentants de la presse partout, des DJ, de la musique à fond, des cocktails à flot, et tout ça durerait jusqu’à très tard dans la nuit avec des rumeurs de soirées en after.

Très tôt le matin suivant, la presse a débarqué (oui, bien sûr, j’accepte les appels du Financial Times à quatre heures du matin !). J’ai accepté avec excitation. Cependant, il s’avéra que nous n’avions pas de représentant disponible : le président était dans un avion à destination du Japon, le téléphone portable du directeur était éteint (avec une bonne raison, apparemment) ; les membres du conseil d’administration indisponibles, l’équipe non préparée. Des dizaines d’occasions manquées. Rappelez-vous : quand le communiqué de presse est diffusé, le travail commence tout juste.

Ne soyez pas surpris de le voir affluer de partout

Ils ont tous un avis. Et ils vont probablement vous le donner.

Ne compliquez pas les choses à outrance

Si vous pensez que vous avez trop de choses à dire, c’est probablement le cas. Les facultés d’attention ne sont plus ce qu’elles étaient ; la distraction/l’échec est à portée de clic. Rappelez-vous que vous pouvez toujours travailler par étapes. Décomposez votre histoire si nécessaire. Coupez un long communiqué de presse et utilisez des supports documentaires comme des fiches de description technique et des pages de témoignages à la place. Le principe de segmentation (« cinq plus ou moins deux ») est quelque chose que j’utilise encore et encore. Créez votre propre cycle de publication pour vos messages et renforcez régulièrement votre présence. Créez une FAQ ; si une question mérite d’être posée et n’y est pas, trouvez le moyen de compléter votre message. La répétion engendre la familiarité. Le renforcement progressif de votre appel à l’action est une bonne chose.

N’y touchez plus pendant 24 heures

Parfois, vous avez besoin de prendre du champ. Vous éloigner d’un projet, d’un raisonnement, du travail en général. Accordez-vous une pause et essayez de garder un certain rythme. Prenez une journée pour laisser décanter et vous permettre de souffler. Bien que ce ne soit pas possible dans une entreprise gouvernée par les dates butoir, c’est un but à viser. La course effrénée, les courriels incessants et les tweets en continu déclenchent souvent des réactions à des urgences qui n’existent pas. Laissez le projet de côté, videz-vous la tête et revenez avec des idées claires. Faites un pas de côté et reprenez votre vie en main.

Visez haut

Placez haut la barre et soyez conscient de votre valeur.




À petits pas vers le succès (Libres conseils 32/42)

Chaque jeudi à 21h, rendez-vous sur le framapad de traduction, le travail collaboratif sera ensuite publié ici même.

Traduction Framalang : Ouve, merlin8282, Julius22, fubik, lamessen, okramgoofyMunrek, Asta, Jej, Alpha

Les projets trop ambitieux échouent

Jos Poortvliet

Jos Poortvliet travaille en tant que gestionnaire de communauté pour SUSE Linux. Auparavant, il était actif dans la communauté KDE internationale en tant que responsable de l’équipe marketing. Dans sa « vie hors-ligne », il a travaillé dans différentes entreprises en tant que conseiller en stratégie d’entreprise. Il passe son temps libre à expérimenter dans sa cuisine, où il tente de parvenir à quelque chose de comestible.

« Mieux vaut faire beaucoup de petits pas dans la bonne direction qu’un grand bond en avant pour retomber en arrière. » (Vieux proverbe chinois)

Une idée géniale…

Il était une fois, au sein de l’équipe marketing d’un projet de logiciel libre, quelqu’un qui eut une idée géniale pour faire se développer le projet. Un programme serait mis en place pour permettre à des étudiants en informatique de prendre connaissance du projet et de le rejoindre. Des universités seraient contactées et quelqu’un s’adresserait à elles pour susciter leur intérêt. Des ambassadeurs iraient alors dans ces universités pour y donner des cours et encadrer les premiers pas des étudiants dans le monde du logiciel libre. Une fois qu’ils auraient rejoint le projet en ligne, ils seraient encadrés sur des tâches simples et deviendraient finalement des contributeurs chevronnés ! Les universités adoreraient ce programme, bien sûr, et, avec un peu de chance, commenceraient à participer plus activement, en donnant à leurs étudiants du code à écrire pour le projet et bien plus encore.

… qui n’a pas fonctionné…

J’ai vu l’idée développée dans la fiction ci-dessus sous bien des formes dans de nombreuses communautés et projets. C’est une idée géniale et d’un fort potentiel ! Nous savons tous qu’il faut commencer tôt — nos concurrents du logiciel propriétaire sont très bons pour ça. Nous savons également que nous disposons de suffisamment d’arguments pour convaincre les universités et les étudiants de participer — le logiciel libre et open source représente le futur, il offre de très belles possibilités de développement des compétences. Les compétences en programmation ou en administration sous Linux sont davantage demandées que des développeurs Java ou .NET ou que des administrateurs système Windows. Et surtout : c’est plus amusant. Quoi qu’il en soit, si vous allez dans des universités, vous ne verrez pas beaucoup d’affiches vous invitant à rejoindre des projets de logiciels libres. La plupart des professeurs n’en ont jamais entendu parler. Que s’est-il passé ? Permettez-moi de continuer mon histoire.

… pas à cause d’un manque d’efforts…

L’équipe en a discuté longtemps. D’abord en mettant des idées en commun — de nombreuses idées concernant la concrétisation du concept ont fusé. Le responsable de l’équipe les a rassemblées et mises sur le wiki. Un calendrier a été établi avec des échéances et le responsable a réparti les tâches, pour certaines parties. Certains ont commencé à rédiger des supports de cours, d’autres à lister les références des universités. Ils ont régulièrement demandé des suggestions et des idées sur la liste de diffusion et ont reçu beaucoup de réponses proposant d’autres supports de cours, que le responsable a ajoutés à la liste des choses à rédiger. Tout devait être fait pendant le temps libre des volontaires, mais on pouvait toujours compter sur le responsable pour rappeler les échéances aux volontaires.

Après quelques mois, une structure était visible et de nombreuses pages étaient créées sur le wiki.

Entre-temps, néanmoins, le nombre de personnes impliquées depuis la discussion initiale a diminué, passant de plus de 30 à environ cinq qui faisaient encore mine de travailler. Le responsable a décidé de revoir la feuille de route avec des dates butoirs et, après quelques appels lancés sur la liste de diffusion, 10 nouveaux volontaires s’engagèrent à réaliser diverses tâches. Le rythme s’est à nouveau un peu accéléré. Un certain nombre de choses qui avaient déjà été faites ont dû être mises à jour et il y avait d’autres ajustements à faire. Malheureusement, les choses ont continué à s’aggraver et le nombre de personnes impliquées a continué à diminuer. Des sprints mensuels furent mis en place, et ils ont en effet abouti à terminer davantage de choses. Mais il y avait simplement trop à faire. Au bout d’environ un an, les dernières personnes ont jeté l’éponge. Il n’en reste qu’une page wiki obsolète et quelques ressources dépassées…

… mais parce qu’elle était trop ambitieuse

Alors pourquoi ça n’a pas marché ? L’équipe avait pourtant appliqué les meilleures techniques de gestion de projet qu’il est possible de trouver sur le Web : brainstorming, puis mise en place d’un planning avec un échéancier, des objectifs précis ainsi que des responsabilités. Ils ont fait ce qu’il fallait faire sur un projet bénévole : solliciter les personnes, les impliquer, donner la possibilité à chacun d’exprimer son opinion. Ça aurait dû fonctionner !

Ce ne fut pas le cas pour une raison simple : c’était trop ambitieux. C’est une tendance. Des idées géniales reçoivent beaucoup de commentaires, sont inscrites dans de grands plannings qui se terminent en pages wiki incomplètes amenant à une faible implémentation qui finit par s’évanouir dans le néant.

Les responsables doivent admettre que la manière de travailler d’une équipe dans le domaine du logiciel libre et open source n’est pas la même que dans un environnement structuré et dirigé comme peut l’être une entreprise. Les gens ont tendance à être présents lorsque quelque chose d’excitant se produit, comme lors de la sortie d’une version majeure, puis à disparaître jusqu’au prochain gros événement. La création d’une équipe communautaire ne devrait jamais supposer que les gens resteront pleinement impliqués jusqu’à la fin. Il faut prendre en compte le fait qu’ils seront présents pendant un certain temps, puis s’absenteront durant de plus longues périodes avant de revenir. Les arrivées et les départs font qu’il y a beaucoup d’agitation superflue et que le travail avance lentement. Oui, il est possible de diriger des gens, mais il n’est pas possible de les gérer. Dès que vous apprenez à laisser l’aspect gestion de côté, vous pouvez davantage vous concentrer sur les choses à faire dans les plus brefs délais.

Ainsi, au lieu de prévoir les grandes étapes, trouvez quelque chose de plus modeste qui soit réalisable et utile en soi. Non pas une page wiki avec un planning, mais la première étape de ce que vous voulez accomplir. Et ensuite donnez l’impulsion en faisant les choses. Faites le premier brouillon d’un article. Créez la première version d’un dossier. Copiez-collez à partir de n’importe quoi d’existant ou améliorez quelque chose qui existe déjà. Ensuite, présentez le résultat à l’équipe, aussi brouillon qu’il puisse être, et demandez si quelqu’un souhaite l’améliorer. Faites une petite chose et ça fonctionnera.

Ne planifiez pas, agissez…

Comment alors allez-vous réaliser quelque chose d’aussi énorme qu’un programme de recrutement des étudiants avec le concours des universités ? Ne le faites pas ! Du moins, pas directement. Il faut en discuter avec toute l’équipe et le planifier — ça donnera certainement lieu à une discussion sympathique pouvant durer des semaines. Mais ça ne vous mènera pas loin. Gardez plutôt le plan pour vous-même. Sérieusement.

Je ne suis pas en train de dire qu’il ne faudrait pas en parler — vous le pouvez. Faites part de votre ambitieux projet à tous ceux qui sont intéressés. Et c’est tant mieux s’ils font des propositions. Mais n’en attendez pas trop, ne faites pas de plans au-delà de la première ou des deux premières étapes. Allez plutôt de l’avant, construisez sur ce qui existe déjà. Envoyez le brouillon d’un support de communication fraîchement créé ou amélioré à la liste de diffusion. Demandez à quelqu’un ayant donné un cours sur votre projet de partager son support et améliorez-le un peu. Qui sait, les personnes dont le travail vous sert de base pourraient vous venir en aide ! Les gens avec qui vous avez discuté de votre projet et qui partagent votre vision pourraient également vous aider. De cette façon, vous terminerez souvent quelque chose — un prospectus, un site web amélioré ou une présentation utilisable. Et les gens peuvent, peu à peu, commencer à les utiliser. Des ambassadeurs peuvent se rendre dans leur université et utilisant une des choses que vous avez déjà créées. Pour cela, ils auront certainement besoin de créer des éléments manquants — qui pourront ensuite se retrouver sur le wiki. Et vous progressez.

… et vous aurez votre château en Espagne !

En marketing communautaire, la bonne stratégie ne réside pas dans le wiki. Elle ne dépend pas d’un programme ni d’un planning. Elle n’est pas non plus discutée chaque semaine avec l’équipe complète. Elle fait partie d’une vision qui s’est développée au cours du temps. Elle est portée par quelques personnes-clés qui indiquent le planning à court terme ainsi que les objectifs et elle est partagée par l’équipe. Mais elle n’a pas de date butoir ni de risque d’échouer. Elle est flexible et ne dépend de rien ni de personne en particulier. Et ça restera toujours un château en Espagne…

En conséquence, si vous voulez piloter un effort marketing pour une communauté de logiciel libre, faites en sorte que la vision d’ensemble reste une vision d’ensemble. Ne planifiez pas trop, mais faites en sorte que des choses se réalisent !




Un salon de beauté conçu avec Blender et Cycles (en lieu et place de 3ds Max)

Dans le milieu du design et de la CAO, la part belle est encore trop souvent faite aux logiciels propriétaires.

Mais il n’y pas que 3ds Max & co dans la vie logicielle. On peut faire tout aussi bien, voire mieux, avec le libre Blender et son moteur de rendu Cycles.

C’est que ne nous prouve par l’exemple cet entretien du talentueux ukrainien Igor Shevchenko.

Backstage - Blender

Un salon de beauté conçu et visualisé grâce à Blender et Cycles

Beauty salon designed and visualized with Blender and Cycles

Alexandre Prokoudine – 25 février 2013 – LibreGraphicsWorld.org
(Traduction : Alpha, Max, KoS + anonymes)

Parmi toutes les choses intéressantes qui sont réalisables à l’aide de logiciels libres, ce que LGW aime faire le plus, c’est produire un travail commandé qui soit reconnu. Parlons d’un cas particulier, celui de l’utilisation de Blender et Cycles pour la visualisation d’architectures commerciales.

Je suis récemment tombé sur ce travail sur Behance (NdT : une plateforme de partage de projets de design pour les professionnels) et je n’ai pas pu résister à l’envie de contacter Igor Shevchenko, son auteur.

Igor travaille pour une entreprise ukrainienne appelée « Magis ». Il s’occupe de la modélisation, du texturage et du rendu d’intérieur. « Backstage », le salon de beauté en question, est un véritable établissement qui a ouvert à Kiev en septembre 2012.

Igor, s’agit-il de ton premier projet sérieux réalisé à l’aide de Blender ? Le reste de ton album sur Behance semble porter les étiquettes de 3DS Max, Adobe Photoshop et d’autres logiciels du même genre.

Oui, c’est vrai, c’est le premier vrai projet que l’on m’a commandé et que j’ai réalisé avec Blender. J’étais vraiment curieux de savoir s’il allait être possible de réaliser un tel projet uniquement avec un logiciel libre et de voir les difficultés auxquelles on pouvait s’attendre. Lorsque j’ai commencé à travailler sur le projet, j’ai eu peur que ma connaissance de Blender ne soit pas suffisante pour le mener à bien et de devoir retourner sous 3DS Max. Ça ne s’est pas produit.

Combien de temps cela a-t-il pris ?

Le travail sur le design intérieur a été fait en 3 mois. Mais les rendus du portfolio pour Behance ont été une toute autre affaire. Je suis parti de rien, surtout pour Behance.

Vraiment ?

L’année dernière, en novembre, notre administrateur système m’a demandé de lui envoyer quelques rendus de ce que j’avais fait avec Blender. Il souhaitait les montrer à un ami qu’il tentait de convaincre que Blender était en fait un outil très correct. J’ai donc fouillé parmi mes fichiers et je fus horrifié de constater que je n’avais aucun rendu lissé. J’ai alors décidé de repartir de zéro pour refaire les rendus du projet « Backstage ».

Attends, donc tu n’as pas fait ces visualisations pour le client ?

Le client ne voulait pas des rendus de haute qualité dans un premier temps. Nous avons juste fait le design et décrit le reste avec des mots.

OK, donc de combien de temps as-tu eu besoin pour réaliser la version portfolio du projet ?

Je n’avais aucune date limite, ça ne pressait donc pas, je l’ai fait pendant mon temps libre. Je pense qu’en m’y mettant et en ne faisant rien d’autre, ça m’aurait pris une journée pour faire la modélisation, une autre pour peaufiner les détails et encore une autre pour effectuer le rendu global.

Backstage - Blender

D’où vient ton intérêt pour Blender ?

Il y a environ trois ans, j’ai fini par en avoir marre d’utiliser 3DS Max, j’ai donc commencé à chercher des alternatives. J’ai d’abord essayé Maya et Cinema 4D et j’ai opté pour Maya. Cependant, je me suis rendu compte que soit je n’arrivais pas à trouver le temps pour apprendre à l’utiliser, soit il ne me convenait pas. Peut-être un peu des deux.

J’ai fini par revenir à 3DS Max, faute d’autre chose. Notre administrateur système, qui est un grand adepte du logiciel libre m’a suggéré d’utiliser Blender, mais il s’agissait de la version 2.49 que je n’ai vraiment pas appréciée.

Fin 2011, j’ai lu un article sur « Sintel » le film libre, je l’ai alors regardé. J’ai adoré à la fois l’histoire et les visuels, j’ai donc donné une seconde chance à Blender : j’ai téléchargé une version plus récente et je me suis mis à lire les tutoriels d’Andrew Price, j’ai alors commencé à comprendre comment ce logiciel fonctionnait.

Puis, Cycles est arrivé, et ça a achevé de me convaincre. Mi-2012, j’étais déjà en train de réaliser des petits projets avec Blender, puis « Backstage » est devenu le premier grand projet pour lequel je m’en suis servi. Ça n’a pas été facile, mais je ne suis pas déçu. Avant je considérais que les logiciels libres performants ne pouvaient pas exister. Blender est une exception remarquable dans ce domaine.

L’un dans l’autre, une expérience positive ?

Oui. Mes collègues ont remarqué que je travaillais plus rapidement. Blender a une logique réellement différente, pas comme dans 3DS Max :

  • manipulation d’objets,
  • personnalisation facile de l’interface,
  • approche différente de la modélisation de polygone,
  • paramétrage nodal des matériaux,
  • traitement « post-processing » intégré,
  • modificateurs (il n’y en pas beaucoup, mais ils sont très efficaces pour accélérer le processus de modélisation),
  • raccourcis clavier (il y en a beaucoup et ils améliorent grandement mon efficacité).

Blender possède des fonctionnalités sans lesquelles je ne m’imagine pas travailler aujourd’hui. 3DS Max n’en possède pas autant.

Cette liste pourrait s’allonger mais le plus important est que Blender est tout simplement mon type d’application.

Et Cycles ?

Cycles est un formidable moteur de rendu. J’ai récemment implémenté le matériau caoutchouc dans 3DS Max pour les pneus, et c’était vraiment la misère : paramétrage, rendu, paramétrage, rendu ainsi de suite… Dans Cycles, j’ai juste ajusté les paramètres et vu le résultat immédiatement.

Vois-tu une utilité au moteur de rendu interne de Blender dans ton travail quotidien ?

Non, c’est plutôt inutile en ce qui me concerne.

Est-ce que l’aspect libre et gratuit, en plus de la faible taille du fichier à télécharger a joué un rôle ?

Tout à fait. À plusieurs reprises, j’ai eu besoin de télécharger Blender lors d’un rendez-vous avec un client sur son ordinateur (5 minutes), de le lancer (2 secondes) et de travailler sur un projet. Ça fait une grande différence.

Au vu de tout ça, est-ce que l’un de tes collègues a déjà eu envie d’utiliser Blender ?

Non, et je ne m’attends pas à ce qu’ils le fassent. Soyons réalistes, la seule façon pour que cela arrive, c’est de les forcer à l’utiliser, et rien de bon n’en sortira. En réalité, les gens n’ont soit pas le temps, soit pas l’envie d’apprendre de nouvelles choses, et certains ne savent même pas que des alternatives existent.

Quels types de difficultés as-tu rencontrés lorsque tu travaillais avec Blender sur le projet « Backstage » ?

Le principal défaut de Blender est que la phase de développement actif a commencé assez récemment et beaucoup de fonctionnalités de base ne sont pas encore présentes. Il y a aussi les problèmes de compatibilité avec les formats de fichiers : c’est difficile d’ouvrir des fichiers Blender dans AutoCAD et dans 3DS Max, c’est même quasiment impossible.

As-tu rencontré des problèmes purement techniques avec Cycles ? Quelque chose qui manque ?

J’ai un peu de mal à me rappeler ce qui manque. De manière générale, les fonctionnalités compatibles par défaut dans les autres moteurs de rendu. La gestion des fichiers IES (NdT : qui gèrent la répartition de la lumière) en faisait partie il y a peu, mais ça a été résolu.

D’un autre côté, j’ai trouvé des méthodes parfaitement fonctionnelles pour contourner la plupart — sinon toutes — des fonctionnalités manquantes. La seule chose que je n’arrive pas à contourner c’est que Cycles est plutôt inutile sans une carte graphique chère.

Penses-tu que la fréquence des mises à jour de versions interfère avec les méthodes de travail en entreprise ? Les studios seraient plus enclins à n’utiliser que des mises à jour importantes et à ne les mettre à jour que pour corriger les bugs, c’est assez connu.

La fréquence d’apparition des nouvelles versions semble être une des principales particularités des logiciels libres. Je pense qu’en réalité, Blender en tire profit, parce qu’il reste beaucoup de choses à faire.

En plus, Blender a une bonne compatbilité ascendante et, de cette manière, rien n’empêche un studio de se limiter à une version particulière et à l’utiliser pendant quelques années.

Backstage - Blender

La galerie complète du projet « Backstage » est disponible sur Behance.




S’intégrer au projet par l’action, sans attendre (Libres Conseils 31/42)

Chaque jeudi à 21h, rendez-vous sur le framapad de traduction, le travail collaboratif sera ensuite publié ici même.

Traduction Framalang : merlin8282, goofy, Corentin, lerouge, Asta, peupleLà, Alpha, lamessen, Julius22

Trouver ses marques dans une équipe de promotion

Stuart Jarvis

Stuart Jarvis a commencé à travailler avec l’équipe de promotion de KDE en 2008 en écrivant des articles pour le site web d’actualités de KDE. Il a appris à la dure comment faire bouger les choses dans une communauté du logiciel libre et participe davantage aux activités de l’équipe de promotion en écrivant les annonces des nouvelles versions de KDE et en rédigeant des articles sur les logiciels KDE dans la presse Linux. Il siège maintenant dans le groupe de travail marketing de KDE, contribue à définir la ligne de conduite pour la promotion de KDE et les activités marketing et aide les nouveaux contributeurs à trouver leurs marques. Il fait maintenant aussi partie de l’équipe éditoriale de KDE.News, là où il a commencé à participer.

« C’est celui qui code qui décide » est le mantra du développement dans le logiciel libre. Mais que faire quand il n’y a pas de code ?

Rejoindre l’équipe de promotion et de marketing de votre projet de logiciel libre préféré représente un défi particulier. Pour les nouveaux codeurs, la plupart des projets ont des systèmes de révision du code, des mainteneurs et des pré-versions du logiciel qui les aident à mettre en évidence les erreurs dans le code, ce qui rend moins effrayante la contribution à leur premier correctif.

La promotion peut nécessiter que votre travail soit visible par le public, après une relecture minimale, parfois immédiatement. La nature non-hiérarchisée des communautés de logiciel libre implique qu’il y a rarement une unique personne vers qui vous pouvez vous tourner et qui pourra vous dire si vos idées sont bonnes et prendre des responsabilités à votre place.

Obtenir un consensus versus obtenir des résultats

J’ai d’abord commencé à contribuer à KDE en écrivant des articles pour le site d’actus officiel, KDE.News. J’avais déjà écrit pour des organes de presse, mais j’avais toujours affaire à une personne bien identifiée à qui j’envoyais un brouillon pour avoir un retour et faire les corrections demandées. Dans l’équipe de promotion de KDE, il n’y avait pas une seule personne ou un seul groupe de personnes pour assumer cette tâche. Je devais essayer, juger aux réponses que j’avais sur les brouillons d’articles et décider si j’avais tous les retours dont j’avais besoin et si l’article était prêt pour une publication.

Avec les conseils de contributeurs plus expérimentés, j’ai finalement appris à proposer quelque chose et à le publier en quelques jours s’il n’y avait pas d’objection majeure. Cette approche peut être utilisée par n’importe quel contributeur d’une équipe de promotion de logiciel libre, qu’il soit nouveau ou ancien.

Tout d’abord, travaillez sur la façon dont vous feriez quelque chose, que ce soit écrire un article, changer le texte d’un site web ou donner une conférence dans votre école locale. Planifiez, écrivez l’article ou le nouveau texte. Envoyez vos idées, pour relecture, sur la liste de diffusion de l’équipe de promotion de votre organisation. Surtout, ne demandez pas aux gens ce qu’ils en pensent — vous pourriez attendre des jours ou des semaines sans obtenir de réponse définitive. Signalez plutôt que vous allez publier ou soumettre votre texte, ou mettre en œuvre votre programme à telle date précise, en attendant les objections d’ici là.

Lorsque vous soumettez une date limite, pensez au temps nécessaire à chaque membre actif de l’équipe pour lire ses messages et évaluer votre proposition. Vingt-quatre heures est un minimum absolu pour un simple oui ou non en réponse à une question fermée. Lorsqu’il s’agit de quelque chose nécessitant une lecture ou une recherche, vous devriez envisager un délai de réponse de plusieurs jours.

Si la date limite que vous fixez ne rencontre pas une forte opposition, vous pouvez avancer. S’il existe de gros problèmes par rapport à votre projet, quelqu’un vous le dira. Les choses se font, en réalité. Vous ne serez pas frustré par un manque de progrès et vous aurez la réputation de mener à bien les tâches.

Finalement, c’est vous qui décidez

Les communautés du logiciel libre peuvent facilement devenir des groupes de discussion. Tout le monde a son opinion. Si vous n’êtes pas prudent, les discussions peuvent s’éterniser, s’évanouir au fur et à mesure que les personnes s’en désintéressent et finir sans conclusion convaincante. Cela peut paraître assez difficile à gérer lorsque vous faites partie de la communauté depuis quelque temps : vous avez l’habitude de prendre vos propres décisions et d’avoir votre propre idée sur ceux dont les avis vous importent. Quand vous débutez, cela peut être très déroutant.

Si vous voulez que votre propre travail aboutisse, vous allez probablement devoir faire des choix entre des points de vue opposés. Vous pouvez mettre un terme au débat en donnant un résumé des points principaux et en donnant votre opinion sur ces points. Essayez de ne pas laisser de questions ouvertes en suspens, à moins que vous ne souhaitiez un débat plus long — donnez simplement vos conclusions et dites ce que vous allez faire. Dès lors que vous êtes correct, les autres personnes respecteront probablement votre avis, même si elles ne sont pas d’accord.

Soyez proactif – n’attendez pas qu’on vous demande

Le premier contact avec l’équipe de promotion que vous voulez rejoindre peut très bien être l’envoi d’un courriel sur leur liste de diffusion leur offrant vos compétences. Je pensais pouvoir énumérer mes points forts et espérer que les gens me suggéreraient des choses à faire. En pratique, ça ne fonctionne pas tout à fait comme ça.

La plupart des communautés manquent de volontaires et ont vraiment besoin de vos compétences. Mais comme elles manquent de volontaires, elles peuvent aussi manquer de temps pour donner de bons conseils et encadrer. Si vous voulez travailler sur une partie spécifique du projet, dites-le. Il est beaucoup plus facile pour quelqu’un du projet de dire simplement « Vas-y ! » plutôt que d’essayer d’arriver avec un projet qui correspond à vos compétences.

Même quand vous avez travaillé sur quelques projets et prouvé vos compétences, il y a peu de chances que vous soyez contacté directement pour une tâche. Ceux qui coordonnent l’équipe marketing ne connaîtront pas votre situation personnelle et peuvent donc être mal à l’aise à l’idée de vous demander quelque chose de particulier sur votre temps libre, gratuitement. Une communauté idéale va poster régulièrement — que ce soit sur une liste de diffusion ou une page web — les tâches que des volontaires peuvent prendre en charge. Si ce n’est pas le cas, trouvez vous-même des choses à faire et prévenez la liste de diffusion que vous êtes en train de les faire. Les gens vont le remarquer et cela augmente les chances que vous soyez directement contacté dans le futur.

Si vous êtes proactif, vous pouvez rapidement vous rendre compte que vous êtes l’une des personnes expérimentées de la communauté vers qui les nouveaux venus se tourneront pour avoir des conseils ou du travail à réaliser. Essayez de vous souvenir comment c’était quand vous avez commencé et faites en sorte de faciliter au maximum leur vie de nouveau contributeur.




Coordonner les flux de contributions (Libres Conseils 30/42)

Chaque jeudi à 21h, rendez-vous sur le framapad de traduction, le travail collaboratif sera ensuite publié ici même.

Traduction Framasoft : merlin8282, Sphinx, Julius22, goofy, Corentin, lerouge, Asta, peupleLà, okram, Alpha, lamessen

Au confluent de l’amont et de l’aval

Vincent Untz

Vincent Untz est un activiste passionné du logiciel libre, un amoureux partisan de GNOME, ainsi qu’un élément moteur d’openSUSE. Il a été responsable des versions de GNOME de 2008 à 2011, jusqu’à la sortie de GNOME 3.0 ; il a été directeur exécutif de la fondation GNOME (2006-2010) et il dirige l’équipe GNOME chez openSUSE. Quoi qu’il en soit, il trouve plus simple de se décrire comme un « touche-à-tout » (NdT : en français dans le texte) et il travaille dans divers services (certains diraient au petit bonheur la chance) du bureau pour aider openSUSE à rester extraordinaire. Vincent continue à faire du forcing pour que le français soit la langue officielle de GNOME et espère bien réussir bientôt. Sinon, il aime la crème glacée.

Il y a bien longtemps, dans une chambre, la nuit…

J’étais en train de jeter un dernier coup d’œil sur une liste de bogues pour voir si je n’avais pas oublié de fusionner un correctif. Je m’étais bien assuré d’écrire ce que je pensais être une entrée NOUVEAUTÉS au sujet de la nouvelle version. J’ai entré make distcheck (NdT : commande GNU permettant de créer un paquet et de le tester automatiquement dans un répertoire différent de celui de développement pour démarrer le processus de diffusion) et je regardais la console afficher des centaines de lignes. Une archive avait été créée, et j’ai à nouveau vérifié que l’archive se construisait correctement. J’ai vérifié, encore et encore : j’étais inquiet. D’une certaine manière, je ne faisais pas totalement confiance à la commande make distcheck. Après avoir tout vérifié plusieurs fois, j’ai envoyé l’archive sur le serveur et expédié un courriel d’annonce.

J’avais réussi à le faire : j’avais sorti ma première archive d’un logiciel sur le développement dont j’étais récemment devenu co-responsable. Et j’ai certainement pensé : « Ah, maintenant les utilisateurs vont pouvoir apprécier un bon truc ! ». Mais à peine quelques secondes après le chargement de mon archive, quelques personnes l’ont téléchargée et ont rendu ma version réellement accessible aux utilisateurs.

C’est une chose que je tenais pour acquise, car je pensais que c’était une tâche banale. J’avais tort.

Amont et aval

De nombreuses personnes participent au processus d’acheminement du logiciel. Et cet effort se répartit généralement entre deux groupes de personnes d’égale importance dans la manière dont fonctionne le logiciel libre aujourd’hui.

En amont : c’est le groupe qui crée le logiciel. Il inclut évidemment les programmeurs mais, en fonction du projet, d’autres catégories de contributeurs sont également essentielles : designers, traducteurs, rédacteurs de documentation, testeurs, trieurs de bogues, etc. En général, l’amont se charge seulement de livrer le code source sous forme d’archive.

En aval : c’est le groupe responsable de la distribution du logiciel aux utilisateurs. Tout comme en amont, les contributeurs ont une gamme de profils très variée et travaillent à la traduction, la documentation, les tests, le triage de bogues, etc. Il y a cependant un profil qui, jusqu’à présent, est spécifique au travail en aval : le packager, qui prépare le logiciel afin de le rendre disponible sous forme de paquet, un format mieux adapté à un usage facile que le seul code source.

Chose intéressante, les utilisateurs ont plutôt bien l’intuition de cette séparation également, bien que nous n’en soyons pas conscients : nous supposons souvent que les développeurs de logiciels sont inaccessibles et nous envoyons plutôt nos retours et demandes d’aide aux distributeurs.

Pour éclairer cette séparation entre amont et aval, une analogie parlante et classique est celle du circuit des biens de consommation, avec les magasins de détail (« l’aval ») qui distribuent des produits manufacturés (« l’amont ») et jouent un rôle important pour les clients (« les utilisateurs »).

Un regard plus attentif sur l’aval

Si je devais résumer le rôle de l’aval en une phrase, voici comment je le décrirais :

L’aval est le pont entre les utilisateurs et l’amont.

Lorsque j’ai sorti ma première archive en amont, je supposais que, pour l’aval, le travail consisterait principalement à compiler la source pour construire un paquet avec, et rien d’autre. Construire un paquet est effectivement la première étape. Mais c’est seulement le début du voyage vers l’aval : différentes tâches viennent ensuite. Certaines sont purement techniques tandis que d’autres sont sociales. Je vais me contenter de décrire très brièvement ce voyage ici, de manière non-exhaustive, puisque ça pourrait faire l’objet d’un chapitre entier de ce livre (1).

La construction du paquet proprement dit peut se révéler moins triviale que prévu. Il n’est pas rare qu’un packager rencontre des problèmes qui étaient inconnus de l’amont. Comme lorsqu’une nouvelle version du compilateur est utilisée (avec de nouvelles erreurs), qu’une bibliothèque spécifique a d’abord besoin d’être mise à jour (parce que l’archive utilise de nouvelles interfaces de programmation) ou bien que le système de compilation de l’archive est conçu pour une certaine façon de fonctionner (qui ne suit pas les directives de la distribution cible). Ce qui est encore plus méconnu par beaucoup est le fait que tous ces problèmes peuvent également se produire après que l’archive a déjà été empaquetée, comme lors de la migration d’une distribution entière vers un nouveau compilateur ou bien une nouvelle chaîne de compilation. Aucun de ces problèmes techniques n’est vraiment compliqué à résoudre en lui-même, et l’amont est souvent content de contribuer à la solution. Mais sans l’aval, ces problèmes pourraient ne pas être remarqués par l’amont avant un long moment.

Ce qui selon moi est plus important que ces défis techniques, c’est que l’aval est généralement en contact avec davantage d’utilisateurs que l’amont. Cela se traduit par des rapports de bogue, des demandes de support, des requêtes de changement de la configuration par défaut ou bien d’autres choses encore. C’est là que la foule en aval donne la mesure éclatante de sa force : au lieu de simplement transférer ça en amont, l’aval va travailler sur les retours des utilisateurs afin de ne renvoyer que des synthèses qui seront utilisables en amont. Bien souvent, les rapports de bogue sont soumis avec trop peu d’informations sur le problème (auquel cas l’aval demandera plus de détails). Souvent, les demandes de support sont issues d’une incompréhension du côté de l’utilisateur (ce que l’aval peut, parfois, traduire par une suggestion visant à modifier le programme afin d’éviter cette incompréhension). Souvent, de nouveaux paramètres par défaut sont suggérés sans réflexion suffisante (l’aval travaillant alors avec les utilisateurs pour voir si le raisonnement est valide). À partir de cette énorme quantité de données, l’aval produira un ensemble d’informations plus compact que l’amont sera en mesure de digérer facilement. Ce qui amènera à des améliorations sur le logiciel.

Il existe généralement deux récompenses pour les contributeurs en aval : les contributions directes et indirectes vers le projet en amont grâce aux efforts effectués par l’aval sont suffisantes pour beaucoup. Mais plus important encore, le contact direct avec davantage d’utilisateurs amène à recueillir la satisfaction qu’ils expriment. Et une situation aussi gratifiante rend facilement heureux beaucoup de gens.

Une petite note au passage : lorsqu’on considère la quantité de travail fournie en aval, je ne serais pas surpris qu’au bout du compte, beaucoup de contributeurs en amont soient bien contents d’avoir des gens agissant comme intermédiaires : cela diminue significativement la quantité de retours tout en améliorant leur qualité (en évitant les commentaires en double, les problèmes non documentés, etc.). Cela permet à ceux qui travaillent en amont de rester focalisés sur le développement lui-même, au lieu de les obliger à soit trier les retours, soit les ignorer.

Rien qu’en regardant mon expérience en amont, je ne compte plus le nombre de correctifs que j’ai reçus de l’aval pour résoudre des problèmes de compilation. Je me rappelle aussi d’innombrables discussions que j’ai eues à propos des bogues qui affectaient le plus les utilisateurs et qui m’ont permis de prioriser mon travail. De fait, depuis que j’ai rejoint les équipes en aval, j’ai commencé à faire remonter des correctifs proches de ceux liés à des problèmes de compilation à l’amont et à discuter avec ma base en aval pour transmettre des retours d’expérience d’utilisateurs. Une telle collaboration amont-aval participe à l’amélioration de la qualité générale de notre écosystème du logiciel libre et je la considère comme essentielle à notre bonne santé.

Remonter de l’aval vers l’amont !

Je crois fermement que, pour qu’un projet réussisse, il faut qu’il y ait une forte collaboration amont-aval. Je doute que beaucoup désapprouvent. Cependant, par « aval », les gens pensent généralement au travail fait dans les distributions. Mais, particulièrement pour les applications, il devient de plus en plus viable de pousser ce travail fait en aval en dehors des distributions et de tirer parti d’un tel mouvement vers l’amont.

Des outils comme l’Open Build Service (NdT : distribution open source dédiée à la compilation de paquets pour diverses distributions GNU/Linux) permettent plus facilement d’avoir des personnes qui compilent et distribuent des paquets d’une application pour plusieurs distributions. Cela présente des avantages à la fois pour les utilisateurs (qui peuvent profiter plus rapidement et plus facilement des mises à jour de leurs applications préférées) et pour l’amont (qui peut aider à construire une relation plus forte avec sa base d’utilisateurs). Le seul défi qu’un tel mouvement représente est le besoin perpétuel d’avoir quelqu’un qui s’occupe de l’empaquetage, mais aussi qui gère des retours plus nombreux des utilisateurs. Dans les faits, il y a toujours besoin de quelqu’un pour faire le travail de l’aval, sauf qu’il serait fait au sein de la branche amont.

Pour moi, cela semble une perspective excitante et j’irais même plus loin en suggérant que nous, la communauté du logiciel libre, devrions migrer lentement le travail d’aval fait sur les distributions vers un travail d’aval fait directement, aussi souvent que possible, en amont. C’est souvent possible, au moins pour les applications. Cela requiert évidemment de penser différemment. Mais ça permettrait de partager un travail qui, actuellement, est le plus souvent dupliqué sur toutes les différentes branches en aval.

Pour ceux qui souhaitent actuellement commencer à contribuer aux applications qu’ils apprécient, ce travail sur les paquets en amont est une toute nouvelle approche qui pourrait vraiment être une réussite !

J’ai essayé, je suis resté. Pourquoi pas vous ?

L’aval a toujours été essentiel à ma vie en tant qu’utilisateur de logiciels libres — après tout, seules quelques personnes installent manuellement leur système à partir de zéro et je n’en fais pas partie. Cependant, c’est aussi devenu un atout pour moi en tant que développeur en amont, étant donné que j’ai commencé à prendre plus de temps pour discuter avec des personnes en aval afin d’obtenir plus de retours sur les bogues, les fonctionnalités, la qualité générale et même les directions futures du logiciel sur lequel je travaillais.

C’est seulement lorsque j’ai commencé à être moi-même en aval que j’ai compris que cette position est en effet privilégiée afin de conseiller en amont, grâce au contact direct avec les utilisateurs et la perspective différente que l’on retient de cette position différente.

Sans l’aval, nous ne serions pas là où nous sommes aujourd’hui. Si vous souhaitez avoir un impact significatif, soyez persuadé qu’en participant en aval et en discutant avec l’amont, vous réussirez.

Et vous y prendrez du plaisir.

(1) Note de l’auteur : Il est bon de mentionner que je ne crois pas que l’aval devrait modifier significativement le logiciel mis à disposition par l’amont. Certains, en aval, le font tout de même et cela s’ajoute à leur charge de travail.




L’appel GNU/Linux d’un fanboy Microsoft dégoûté par la licence Office 2013

Comme le soulignait PCInpact récemment Microsoft interdit le transfert de la licence Office 2013 vers un autre PC.

L’arrivée de la nouvelle version de la célèbre suite bureautique s’accompagne en effet d’un contrat de licence encore plus restrictif qu’auparavant, ce qui revient bien moins à acheter un logiciel qu’à le louer sur un seul et unique ordinateur en priant pour que ce dernier n’expire pas tout de suite (malgré son obsolescence programmée, ce qui est un autre sujet).

Du coup, certains utilisateurs, même parmi les plus fidèles, réalisent (enfin) qu’on les prend vraiment pour des vaches à lait et lorgnent (enfin) du côté de GNU/Linux et LibreOffice.

Pcs007 - CC by-sa

Microsoft perd un fanboy de plus

Microsoft loses yet another fanboy

Jack Wallen – 19 février 2013 – TechRepublic.com
(Traduction : jay91, lukkas35, Goodbox, aKa, nepski, VIGNERON, RavageJo, goguette, Texmix, Kyriog, Penguin, QC, chdorb, Norore, maxlath + anonymes)

Un autre mord la poussière pendant que Microsoft (et son utilisation déplaisante des licences) fait fuir un fan de longue date. Jack Wallen jette un œil à ce qui attend Microsoft.

Non, ce n’est pas quelqu’un de connu. Ce n’est même pas quelqu’un qui soit déjà apparu dans les médias, dans un mème, ou qui aurait participé à un hashtag ou une flashmob. Microsoft a perdu un des fanboys avec lesquels je travaille. Cette personne est un de ces types qui comprennent les choses à plusieurs niveaux. Non seulement il est incroyablement intelligent, mais c’est aussi un brillant électronicien.

Mais lorsque Microsoft a commencé à annoncer leurs termes de licence pour Office 2013 — il a commencé à me poser des questions. Elles commençaient toutes par « Au fait Jack, parle moi de Linux ». Et c’est ce que j’ai fait. Il n’a pas fallu longtemps pour qu’il installe Ubuntu 12.10 à la place de Windows 7 et qu’il soit heureux de travailler, sans Microsoft, et ce sans perdre le rythme.

Vous devez vous demander en quoi exactement les nouveaux termes du contrat de licence d’Office 2013 peuvent faire changer d’avis un fan Microsoft de longue date ? Laissez-moi vous lister les points les plus importants :

  • Chaque licence est liée à un compte Microsoft Live (qu’il vous faut posséder) ;
  • Seules cinq licences peuvent être liées à un même compte (nous avons des clients qui en passent par une dizaine de versions d’Office par semaine — ça pourrait causer quelques problèmes) ;
  • Chaque licence sera définitivement assignée à une seule machine.

Ces points sont seulement les plus néfastes, des points qui vont faire mal aux utilisateurs à différents niveaux. Ces conditions de licence partent du principe que les machines ne tombent jamais en panne – et que si elles le font, les utilisateurs ne verront pas d’inconvénient à sortir à nouveau la liasse de billets pour racheter la licence.

Faux et archi faux.

Les ordinateurs tombent en panne, certains sont parfois d’emblée défectueux avec des défauts qui ne seront parfois visibles qu’après plusieurs jours (ou semaines) d’utilisation. Que vont faire ces utilisateurs là ? Acheter Office 2013 deux fois en l’espace de quelques semaines ?

À cela, Microsoft va répondre, « Vous pouvez souscrire à Office 365 ». À ça, je répondrai d’utiliser gratuitement Google Docs pour n’avoir plus aucun problème.

Au cours de l’année dernière, Microsoft en a fait plus pour pousser les gens vers des solutions alternatives qu’il ne l’avait fait pendant très longtemps. D’abord, il a mis sur le marché l’une des interfaces graphiques les moins intuitives qui soit. Aujourd’hui, c’est la licence de Microsoft Office qui change. En bref, Microsoft est en train de perdre des fans et des utilisateurs. Vers quoi se tournent-t-il ? Linux. De plus en plus de gens se rendent finalement compte qu’il y a une alternative et que cette alternative est en fait MEILLEURE !

« Toutes ces années gâchées. » disais-je, secouant ma tête, tentant de cacher ma joie.

Les entreprises et les consommateurs ont beaucoup dépensé dans les produits Microsoft. Comment sont-ils remerciés de leur fidélité ? Une baffe en plein visage, et un trou dans le porte-monnaie ! Cette pagaille ne va pas bien se finir pour Microsoft. En revanche, cela va dans le bon sens pour les systèmes d’exploitation et logiciels comme Ubuntu et LibreOffice.

Beaucoup d’entre nous ont dit qu’il serait inévitable d’en arriver là. À un moment, on a vu venir le côté binaire — Microsoft allait brûler le seul pont qu’il ne pouvait se permettre de brûler — celui qui se trouvait entre Redmond et ses légions de fanboys. Cela ne se fera sans doute pas en une nuit, mais les aficionados d’une des plus grosses entreprises à avoir jamais honoré les bits et les octets vont lui tourner le dos et chercher de plus (ou)vertes pâtures. Quand cela va se produire, Linux aura enfin ce qui lui est dû. L’effet cascade forcera Microsoft à re-calibrer ses pratiques commerciales dans l’urgence.

Bien sûr, on a déjà entendu cet air-là avant. Microsoft va probablement tenter de mener le combat devant les tribunaux, mais pas là où il devrait : dans les cœurs et les esprits de ses consommateurs.

Crédit photo : Pcs007 (Creative Commons By-Sa)