Chapitre IV — Où notre graphomane fait le coup de la panne

Quand Pouhiou s’arrête à Rennes, il y retrouve des connaissances et donc des occasions d’échanges et de découvertes. Le défi d’écriture est en roue libre mais continue sa trajectoire par à-coups : une fois qu’il a négocié un virage délicat, le vaillant écrivain relance la machine et hop, reprend la route.

Si vous souhaitez retrouver les grandes heures de la geste Pouhiouesque, voici le lien magique. Et n’oubliez pas de lui envoyer un petit message d’encouragement @pouhiou.

J’irai écrire chez vous épisode 4 : Rennes (10-13 novembre)

Le mois dernier j’ai participé à Rennes en Biens Communs, pour une conférence, un atelier d’écriture et une rencontre au CGLBT. Il était impensable que je n’y revienne pas.

Les porcs tiquent entre Brest et Rennes.

Dans le covoiturage intensément breton, nous avons repéré les portiques des radars. Ceux qui se sont fait brûler par des bonnets rouges. Ceux qui tiennent encore debout, avec des gendarmes en faction à leurs pieds. C’est marrant, sur la route on a beaucoup parlé de péages. Les péages d’écotaxe, bien sûr, mais aussi les péages pour l’accès à la culture. Payer un livre ou un CD semble normal, j’achète un objet culturel. Un objet auquel je peux accéder gratuitement en bibliothèque (mais je l’achète malgré tout, tiens donc !).

Or, tout notre rapport à l’appropriation des œuvres s’est construit sur ce principe de posséder un objet-support de l’œuvre. Le droit d’auteur, lui même, fut créé pour favoriser les auteurs-éditeur-imprimeurs-libraires (Beaumarchais était en plus de tout cela un industriel papetier).

Et les péages dans nos têtes

Un fichier ne se possède pas : il se transfère par la copie. Du coup, me faire payer pour accéder à un fichier (epub, mp3, avi…) c’est mettre un mur d’argent entre un roman, un album, un film… et moi. Et vu tous les chatons qui trainent sur YouTube, tous les 10 conseils pour… en embuscade sur facebook, toutes les œuvres accessibles par torrents : je vais naturellement aller là où je circule librement. C’est curieux comme peu de créateurs se souviennent qu’avant d’être payé (et pour l’être) mieux vaut être lu, entendu, vu. Que la monétisation d’une œuvre dépendra directement de son rayonnement, et que c’est donc celui-ci qu’il faut favoriser. Le péage, c’est la meilleure solution pour ne pas être payé, en fait… Comme quoi, si les créateurs étaient un peu plus vénaux, stratèges et opportunistes, ils fonceraient vers la culture libre.

J’ai écrit chez Orianne…

J’ai rencontré Orianne au centre gay, lesbien bi et trans de Rennes, lorsque je suis venu y parler culture libérée dans la culture gay. Elle a adoré papoter sur ces sujets. Et elle a fini par me dire : « si tu reviens à Rennes, passe chez moi ! » Orianne est une jeune femme discrète, classieuse, mais d’une espièglerie et d’une sagacité rares. Chez elle, les livres de psycho et les grands classiques côtoient les BD de Buffy (parce que Josh Whedon c’est le bien). Et puis chez elle, j’ai trouvé la meilleure machine de l’univers intergalactique : l’épluche-vide-tranche pommes.

C’est marrant : Orianne et moi on a pris le temps de se respecter, de se laisser geeker l’un-e l’autre… mais on finissait toujours les soirées à parler et refaire le monde.

…enfin presque.

Je sais bien que ça arrive à tout homme à un moment ou à un autre, mais ça fait bizarre : j’ai eu une panne. Mon premier jour à Rennes, je n’ai pas écrit. Ou quasiment pas : une pauvre relecture où, à force de quelques retouches, j’ai ajouté 270 mots au compteur… bien loin des 1667 quotidiens du défi. Alors je sais que je dois me faire confiance. Je sais bien que c’est l’histoire qui m’impose son rythme, et non l’inverse. Toute exigence est futile, toute résistance une perte de temps. Je n’écris pas, je laisse un roman s’écrire, se dévoiler à moi, en un strip-tease excitant et frustrant… Eh ben on a beau savoir tout ça, il reste la croyance que « je maîtrise ». #EpicFail.

L’histoire avait besoin de se nourrir. J’ai fait des recherches. Plein de détails, de jalons, de repères se sont construits. Le roman avait besoin de faire une pause pour prendre forme. Le lendemain, je fais mon quota. les jours suivants je tourne à 2000 mots. Là j’ai hâte de finir ce billet et m’y remettre.

Retrouver les ami-e-s

C’est compliqué de trouver le temps pour tout faire. Écrire les scènes du roman. Écrire ces billets de blog, ce journal de bord. Organiser les trajets et voyager. Parler, échanger avec mes accueillant-e-s. Et retrouver des gens. Mais ça se goupille. Un restau avec Yann, Antonin, Orianne et Camille (la bande du CGLBT de Rennes). Un thé avec miss @Auregann, la wikipédienne qui m’a permis de venir sur Rennes le mois dernier. La découverte de son boss, de ses amis, et de MuséoMix. Puis une soirée finale avec le scooby-gang du CGBLT immortalisée par cette photo.

Ce ne sont pas de simples lecteurices, juste un prénom sur une dédicace. Ce sont des gens avec qui j’ai parlé, bu, refait le monde. Des gens que j’aime et dont je sais qu’illes m’apprécient. Je me demande combien d’auteurs peuvent dire ça… Mais moi, perso, je kiffe !

Et recevoir d’autres dons.

L’épisode 3 de mes aventures a dû donner des idées. J’ai reçu un don par paypal, et un en liquide, de la main à la main. Recevoir un billet comme don, c’est très concret. Étrangement, à ce moment là, le moraliste en moi me dit « tu devrais être gêné ». Ce moraliste croit que ça relève de la mendicité, et la condamne. Ce serait renier l’échange véritable qui sous-tend ces gestes, renier l’envie de soutenir une démarche, une œuvre. J’apporte des histoires : que ce soit celles que j’écris ou celles que je vis et fait vivre, les dons viennent encourager ces histoires à grandir. Croire que ça relève d’une « mendicité immorale » c’est croire que produire des histoires, qu’expérimenter d’autres façons de faire/vivre/interagir n’est pas un « vrai travail ». C’est aussi croire que l’argent salit l’échange, donnant une importance grandiloquente et morale à un simple outil : le fric.

Quand je reçois des dons, je ne suis pas gêné : je suis reconnaissant. Reconnaissant que mes propositions entraînent des élans de générosité. Heureux de voir que le courant est passé, qu’on a envie que ça continue. Comme quand je reçois un mot, un commentaire. Donc : merci. Et si tu veux donner des sous, fais-le à Framasoft. Frama travaille à défendre et soutenir des initiatives aussi tarées que les miennes, parce que ce sont les fous qui changent le monde. Or il est grand temps qu’on apporte un peu plus de Libres dingueries dans nos vies et celles de la famille Michu. Bref : on a besoin de sous pour perpétuer et améliorer les projets en cours, donc n’hésite pas : http://soutenir.framasoft.org !

À dans 3 jours pour conter des soirées parisiennes,

— Pouhiou.




Quand la communauté OpenStreetMap aide à sauver des vies aux Philippines

La forte mobilisation de la communauté OpenStreetMap après le passage du terrible typhon Haiyan aux Philippines fournit une aide précieuse à la la Croix-Rouge sur le terrain.

« Quand les défenseurs des données ouvertes discutent à propos des licences de données, ils discutent rarement en termes de vie ou de mort. »

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Comment les éditeurs de cartes en ligne aident la Croix-Rouge à sauver des vies aux Philippines

How Online Mapmakers Are Helping the Red Cross Save Lives in the Philippines

Robinson Meyer – 12 novembre 2013 – The Atlantic
(Traduction : Garburst, Penguin, Genma, goofy, MFolschette, JLoDoesIT, fcharton, bob, Lydie, Mooshka, aKa, Omegax)

Des bénévoles à travers le monde sont en train de construire une infrastructure géo-numérique pour aider l’organisation des secours aux victimes du typhon Haiyan.

Il faudra des mois avant que nous ne connaissions les réels dégâts provoqués par le terrible typhon Haiyan. Les pertes actuelles de vies humaines liées à la tempête ne sont pour l’instant qu’une estimation. Les humanitaires venant du monde entier s’envolent maintenant vers l’archipel, ou sont seulement en train d’arriver. Avec les Philippins, ils vont venir en aide aux survivants et commencer à reconstruire.

Mais ils pourront être aidés par une technologie formidable, une collaboration humanitaire mondiale et massive rendue possible par le biais d’Internet.

De quoi s’agit-il ? D’une carte détaillée des zones touchées par le typhon Haiyan, qui n’existait pas il y a trois jours lorsque le typhon a frappé.

Depuis samedi, plus de 400 contributeurs ont effectué près de 750 000 ajouts sur la carte en ligne libre des Philippines et de ses environs.

Ces contributions reflètent l’état de la carte avant le passage du typhon, mais elles aideront les sauveteurs de la Croix-Rouge et les bénévoles à prendre des décisions cruciales afin de savoir où envoyer de la nourriture, de l’eau , des équipements.

Il est très facile ici d’exagérer, mais il est très probable qu’aux Philippines à l’heure actuelle, les données et logiciels de cartographie libres — ainsi que la communauté qui les supporte — sauveront des vies.

Le Wikipédia des cartes

Les changements ont été faits dans OpenStreetMap (OSM), une sorte de Wikipédia des cartes. OSM se veut être une carte complète du monde, libre d’utilisation et modifiable par tous. Créée en 2004, la plateforme a maintenant plus d’un million d’utilisateurs.

J’ai parlé avec Dale Kunce, un ingénieur de géolocalisation senior de la Croix-Rouge américaine, sur la façon dont l’aide apportée par les volontaires créant les cartes pouvait améliorer la situation aux Philippines.

La Croix-Rouge, à l’échelle internationale, a commencé récemment à utiliser des logiciels et des données libres au sein de ses différents projets, dit-il. Les logiciels libres réduisent ou éliminent les coûts cachés, ou le montant nécessaire pour que les choses continuent de fonctionner après le départ de la Croix-Rouge. N’importe quel logiciel ou donnée issu de la Croix-Rouge est aujourd’hui sous licence libre ou Creative Commons.

Bien qu’OpenStreetMap ait déjà été utilisé dans des crises humanitaires, c’est ici la première fois où la Croix-Rouge coordonne son utilisation avec celle des volontaires.

Comment les modifications ont-elles été effectuées ?

Les quelques 400 bénévoles qui ont édité OSM ces derniers trois jours ne sont pas tous des cartographes professionnels. À l’initiative de la branche humanitaire d’OpenStreetMap sur Twitter, l’appel fut lancé pour cartographier les zones qui se sont trouvées sur le chemin de la tempête.

À quoi ressemble la cartographie ? Généralement, il s’agit de « traçage » des routes dans OSM en se basant sur des données satellitaires. L’éditeur d’OSM met les images satellite en arrière-plan — sur lesquelles les infrastructures comme les routes sont clairement visibles — et au-dessus, la représentation du monde tel qu’il est cartographié par OSM. Les bénévoles peuvent alors tracer le chemin d’une route, comme cela est montré dans cette image GIF animée, créé par MapBox, une startup originaire de Washington :

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Les bénévoles peuvent également dessiner les immeubles dans la partie Mapbox, en utilisant le même éditeur visuel. Depuis que Haiyan a frappé, les bénévoles ont ainsi retracé quelque 30 000 bâtiments.

Les cartes, sur le terrain

Comment des données cartographiques aident-elles les personnes sur le sol des Philippines ? Tout d’abord, elles leur permettent d’imprimer sur place des cartes en utilisant les donnée d’OSM pour ensuite les redistribuer sur le terrain. La Croix-Rouge américaine a envoyé quatre responsables de haut niveau aux Philippines, et parmi eux, Helen Welch, une spécialiste de la gestion de l’information, a apporté avec elle plus de 50 cartes papier décrivant la ville de Tacloban et d’autres zones fortement touchées.

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La ligne rouge montre la trajectoire du super-typhon Haiyan et les zones colorées montrent où les volontaires ont complété OpenStreetMap ce week-end. Notez l’étendue des modifications à Tacloban, une ville de plus de 220 000 habitants et qui est la plus touchée par le phénomène climatique.

Ces cartes ont été imprimées le samedi, avant que les volontaires n’aient fait la majorité des changements dans les zones concernées sur OSM. Quand ces nouvelles données seront imprimées sur le terrain, elles incluront presque tous les tracés des bâtiments, et les secouristes auront une meilleure représentation de l’endroit où les bâtiments « fantômes » devraient se trouver. Elles seront aussi sur papier, de manière à ce que les sauveteurs puissent y écrire, y dessiner et y indiquer des lieux.

Welch a atterri il y a 12 heures, et Kunce a dit qu’on lui avait déjà envoyé trois ou quatre cartes actualisées.

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Une partie de la ville de Tacloban avant puis après sa cartographie par l’équipe d’OpenStreetMap Humanitarian (HOT). Les routes, les immeubles et les plans d’eau n’existaient pas avant que les contributeurs les ajoutent (@RBanick).

La Croix-Rouge a commencé à vouloir utiliser des données géospatiales après le gigantesque tremblement de terre en Haïti en 2010. En utilisant des données satellitaires pré-existantes, les volontaires ont cartographié la quasi totalité de Port-au-Prince dans OSM, créant des données qui devinrent la colonne vertébrale pour le logiciel qui a aidé à organiser l’aide et à gérer les opérations de recherche.

Les efforts considérables des volontaires ont convaincu les dirigeants de la Croix-Rouge américaine d’augmenter les équipes travaillant sur la cartographie numérique et les systèmes d’information géographique (SIG). Depuis cette décision, ils ont constaté une augmentation énorme de la qualité et de la quantité de cartes.

Mais ce n’est pas tout ce que les cartes peuvent faire.

La National Geospatial-Intelligence Agency (NGA, agence nationale de renseignement géospatiale), gérée par le département de la Défense des États-Unis, a déjà récupéré des images satellitaires des Philippines. Cette agence a décidé où se situaient les dégâts les plus importants, et a envoyé les coordonnées de ces zones à la Croix-Rouge. Mais, ce lundi à 19 h, la Croix-Rouge n’avait toujours pas les images pour ces zones.

Le but de l’équipe géospatiale de la Croix-Rouge, déclare Kunce, était d’aider les hommes sur le terrain à « prendre des décisions basées sur des preuves, pas des intuitions ». L’équipe « leur a fourni toutes les données possibles ». Qu’est-ce que cela signifie ? Grâce aux volontaires, la Croix-Rouge sait où les routes et bâtiments devraient être. Mais jusqu’à ce qu’ils aient le second jeu de données, décrivant la zone après le typhon, ils ne savent pas où se trouvent effectivement les routes et bâtiments. Tant qu’ils n’ont pas ces nouvelles données, les volontaires ne peuvent décider, par exemple, quel itinéraire parmi trois ils peuvent utiliser pour envoyer de l’eau à un village isolé.

À l’heure actuelle, ils ne peuvent pas prendre ces décisions.

Kunce a déclaré que le Département d’État américain était en négociation avec la NGA pour que les images satellites puissent être mises à la disposition de la Croix-Rouge. Mais, pour le moment, rien n’a encore été publié.

Quand les défenseurs des données ouvertes discutent à propos des licences de données, ils discutent rarement en termes de vie ou de mort. Mais à chaque heure qui passe pendant lesquelles la Croix-Rouge ne reçoit pas d’images satellite, ce sont des décisions optimales qui ne peuvent pas être prises, pour savoir où envoyer des équipements ou encore où mener des opérations de sauvetage.

Et une fois que les images satellites seront arrivées, les bénévoles OSM à travers le monde pourront alors les comparer aux structures d’avant la tempête, marquant chacun des 30 000 bâtiments comme indemnes, endommagés ou détruits. Cette phase, qui n’a pas encore commencé, va aider les secouristes à hiérarchiser leurs efforts.

OSM n’est pas la seule organisation à solliciter l’aide de volontaires en ligne afin d’aider les Philippines : MicroMappers, dirigé par un vétéran des efforts d’OSM en Haïti, a également fait des appels à des bénévoles pour trier des tweets, et ainsi déterminer les zones où les secours étaient les plus nécessaires.

Kunce m’a dit que la plus large diffusion commerciale des cartes électroniques a contribué de manière générale à leur croissance tant en quantité qu’en qualité au travers des différentes organisations humanitaires.

« Si vous mettez une carte entre les mains des gens, ils vont vous en demander une autre », a déclaré Kunce. Espérons que le gouvernement va fournir de meilleures cartes à la Croix-Rouge — et aux secours qui sont sur le terrain — et ce aussi vite que possible.




Chapitre III — Post-it, grands maîtres et menue monnaie

Toujours plus à l’ouest, notre écriveur de fond est de passage à Brest, où l’on trouve par ailleurs des initiatives et des activités libristes bien intéressantes.

Le monde qui l’entoure, le Pouhiou le reluque et le relooke, il fait son équi-libriste sans fil et sans filet entre les rencontres roboratives, les jouissances de l’écriture et les fins de mois difficiles qui commencent le 10 novembre. Accompagnez Pouhiou, envoyez-lui de gros poutous et de petits touittes, encouragez-le tandis qu’il en est bientôt à mi-parcours de son défi graphomane.

Lisez-le.

J’irai écrire chez vous épisode 3 : Brest (7-10 novembre)

3 jours à Brest… c’est un peu frustrant tant ça passe vite. Les rencontres, les échanges sont si riches que j’ai parfois du mal à trouver le temps d’écrire. Mais mine de rien, on avance…

5 heures de blabla entre Rouen en Brest : check.

Pour aller de Rouen à Brest, j’ai retrouvé le bon vieux covoiturage. Avec la question qui tue : « qu’est-ce que tu vas faire là bas ? » — Je vais écrire. Mon 3e roman. Qui est libre de droits. Et je passe novembre à l’écrire chez les gens… Le voyage avec Eric, Cynthia et les autres fut une longue discussion passionnante : est-ce que le Libre, si ça se généralise, ça peut marcher ? Et là on rêve du monde de demain, genre relooking sociétal. Sous la pluie entre Rouen et Brest. On a envie d’y croire. On a peur des abus. On découvre que nous on n’a pas envie d’abuser. On réalise que certains (genre Apple) abusent. On s’échange des séries à télécharger, aussi. Et on partage la voiture d’Eric. C’est marrant comme parfois, le monde de demain s’invite dans aujourd’hui.

J’ai écrit chez Moosh

pouhiou chez moosh Arrivé à Brest, je suis rejoint par Moosh et Igor. Qui crient « Ninjaaa ! » pour traverser le passage piéton me séparant d’eux. Avec ses longs cheveux et sa frange encadrant son visage, Moosh pourrait avoir l’air d’une maîtresse d’école. Si ce n’était la joie pure, la gourmandise et la malice qui l’habitent constamment. Igor, lui, est un matou à la jolie barbe. Moosh et Igor, chez eux, illes se parlent avec des voix kawaï. Ils ont un panneau Keep Calm and Eat Cupcake et un grrros chat qui semble avoir suivi le conseil. Et tout leur décor est à l’avenant : coloré, épicé de petites touches qui, simplement, mettent en joie. Moosh et Igor semblent jouer à vivre, mais jouent avec le sérieux d’enfants espiègles et appliqués. Du coup, je leur ai fait des Outrageous Cookies.

On vit entouré de créativité.

Plus je voyage, et plus je rencontre des gens qui, à leur niveau, parfois même sans s’en rendre compte, créent. Peut-être que ça vient de moi. Il est possible que je n’attire que de dangereux esprits fertiles qui goupillent du code, des images, des histoires (et autres artisanaleries) dans leur coin. Mais n’empêche. C’est beau à voir. Les amis étudiants en cinéma. Le pote webdéveloppeur et photographe (résultat à suivre). La Moosh qui travaille à son roman à grand renfort de post-it sur de grandes feuilles. Moosh, elle, écrit comme un besoin : un besoin aussi impitoyable que la hauteur des barres qu’elle veut atteindre. Écrire c’est un jeu, et jouer est une affaire sérieuse. Moi, j’ai juste hâte de la lire.

Qui me dira comment qu’on fait ?

Moosh me fait découvrir des grands noms du story-telling. Des théoriciens qui ont passé beaucoup d’énergie à développer leur méthode pour expliquer le racontage d’histoire. La scénarisation. La caractérisation. Je sais que ce sont des outils passionnants. Quand j’ai fait du théâtre, j’ai fait le tour des méthodes : Jouvet, Stanislavsky, Artaud, Boal… Et je n’y arrive toujours pas. À chaque fois que je lis une théorie, je ne vois qu’un enfermement. Un angle toujours trop fermé, une formalisation forcément étriquée. Parce que personne n’est capable de couvrir toutes les façons de créer. Car aucune rationalisation n’a assez de mots et de concepts pour y parvenir. Un metteur en scène / prof de théâtre me disait : « on n’enseigne que soi ». Du coup, les maîtres qu’on présente comme des autorités : ça m’énerve. C’est marrant, c’est justement le thème du livre III : grands maitres et petits disciples.

Avancées…

Le livre III se porte bien. Je viens de finir le chapitre 2 (sur huit) et je suis vraiment surpris par les formes qu’il prend. Il visite l’histoire des NoéNautes à contre-courant, et c’est assez jouissif. Je sais maintenant que le premier jet ne sera probablement pas achevé au 30 novembre. Je crois réussir à écrire 50 000 mots, mais je vois que ce roman sera plus long. J’essaie de prendre le temps, mais le temps de vivre et le temps d’écrire ne sont pas séparables : ils se nourrissent. Et c’est là le nerf de la guerre : le temps. Du temps libéré par l’argent, comme toujours. On devrait pouvoir avoir le temps de vivre, d’écrire, d’échanger… sans qu’une journée ne coûte forcément X heures de SMIC. Mais non. Le revenu de base n’est pas à l’ordre du jour. Quoiqu’il y ait des citoyen-ne-s d’Europe qui croient que ça peut changer.

…et sous.

Donc je regarde le compte en banque. Il me reste 200 € (et le découvert ˆˆ) pour finir le mois. Trajets inclus. Ooops. Et là je reçois un email qui fait chaud au cœur. Un mec qui souhaite me faire un don, mais ne veut pas passer par des intermédiaires type paypal ou Flattr. Qui souhaite me faire un virement. Je lui envoie mon RIB. Et je découvre peu après qu’il m’a soutenu comme si tu achetais 30 livres des NoéNautes. Juste parce que (à l’instar de Ploum qu’il te FAUT suivre) j’expérimente des manières de se libérer de l’emploi. Voilà une aide inespérée qui tombe à point ! Ça et tous les flattr reçus le mois dernier (encore une fois : essaie flattr, teste le web payant et la reconnaissance directe !), et je suis paré pour continuer !
N’oublie pas que tu peux aussi (et surtout) faire un don à Framasoft, qui offre un cadre, un soutien et une voix aux expériences comme les miennes.
Moi, je file écrire et découvrir le chapitre III !

À tout biental,

— Pouhiou. keep clam eat a cupcake




Les Anonymous doivent-ils laisser tomber le masque ?

Une traduction un brin polémique autour du fameux masque symbolisant les Anonymous.

Aussi joli soit-il, il pose quelques problèmes qui peuvent effectivement contrarier la posture et brouiller le message des actions de cet étrange et fuyant collectif.

Le masque fait référence à Guy Fawkes, personne historique anglais du XVIIe siècle, mais il a pour auteur le dessinateur contemporain David Lloyd de V pour Vendetta. Il est devenu célèbre après l’adaptation de la BD au cinéma. Film produit par Time Warner qui détient les droits à l’image sur le masque et à qui on doit payer une obole à chaque exemplaire du masque vendu (légalement).

Premier problème, le masque est sous copyright classique. Deuxième problème, il appartient à l’une de ces multinationales souvent prises pour cible par les Anonymous. Et, dernier problème, il semblerait qu’il soit produit dans les pires conditions du capitalisme mondialisé, c’est en tout cas ce que le laisse croire cette photo qui a semé le trouble et provoqué l’article très critique ci-dessous.

On aurait aimé qu’il fut dans le domaine public. Chiche qu’on demande tous à Time Warner combien ils veulent pour qu’il en soit ainsi et qu’on monte un crowdfunding dans la foulée pour récolter la somme 😉

Vincent Diamante - CC by-sa

L’hypocrisie des Anonymous a été dévoilée. Et maintenant ils font des pieds et des mains pour se défendre.

Anonymous have been exposed as hypocrites. Watch them try to wriggle out of it

Martha Gill – 6 novembre 2013 – The Telegraph (blog)
”(Traduction : lyn, Eiyeron, MFolschette, Catalaburro, Sky, M0tty + anonymes)’

Anonymous est une organisation définie surtout par ce que ses membres ont choisi de se mettre sur la tête, le fameux masque de V pour Vendetta. Mais depuis hier le masque a connu quelques problèmes techniques. Il semblerait qu’il défigure celui qui le porte.

Le jour de Guy Fawkes, juste à temps pour l’opération Million Mask March, cette photo de Reuters est apparue en page d’accueil de Reddit. Elle montre les masques fabriqués en masse dans une usine au Brésil. Ce n’est peut-être pas un atelier clandestin, mais c’est pourtant le mot que beaucoup ont à la bouche actuellement (d’autres photographies en suivant ce lien).

Cela ne correspond guère avec l’image du groupe. Anonymous lutte contre les effets du capitalisme globalisé – protestant contre de grandes entreprises menant la vie dure aux ouvriers. Et pourtant, on peut voir ces ouvriers, dans de mauvaises conditions de travail, fabriquant les masques des protestataires. Par ailleurs, on sait depuis pas mal de temps que Time Warner, une des plus grandes entreprises audiovisuelles au monde, fait du bénéfice chaque fois qu’un de ces masques est vendu.

Tout cela n’est-il pas légèrement… hypocrite ?

Le compte pro-Anomymous @youranoncentral a essayé de calmer Twitter : « Ecoutez tous, nos masques ont été fabriqués dans un pays en voie de développement. Nous sommes les seuls hypocrites. »

Et plusieurs personnes partagèrent des points de vue similaires à sayheykid24 sur Reddit : « Comment les gens pensent que ces masques ont été faits ? Pensaient-ils qu’ils étaient fait à la main et avec amour par des artisans opposés au grand capital ? »

En effet, que croyions-nous ? Il serait plus simple, plus économique et plus efficace pour les Anonymous de faire fabriquer des masques à la chaîne dans des pays en voie de développement. C’est généralement comme ça que de tels objets sont fabriqués. Cela serait également beaucoup demander à Anonymous que de s’assurer qu’aucune grande entreprise ne tire profit de leurs protestations. Et forcément, étant donné qu’Anonymous est un petit groupe faisant face à de grosses organisations sans scrupules, ils voudront réaliser l’opération la plus percutante possible, quitte à être aussi sans scrupules. Ils peuvent difficilement se permettre de ne pas l’être.

Mais si nous pensions cela nous aurions tort. Ces pressions économiques sont la raison pour laquelle l’industrie du disque a réprimé le piratage numérique et aussi pourquoi Mastercard et Visa ont mal agi envers certains clients – tous des ennemis, tous des Anonymous attaqués pour ces mêmes raisons. Étant donné qu’Anonymous demande aux entreprises de prendre une position inconfortable mais morale contre le système auquel elles sont soumises, si eux-mêmes n’y parviennent pas, ils sont alors eux-mêmes hypocrites. (Fabriquer un masque de Guy Fawkes est plus simple à réaliser chez soi, non ?)

Est-ce important ?

Bien sûr que ça l’est. C’est vrai que les Anonymous ne sont pas les seuls hypocrites. Mais tous les hypocrites ne sont pas entièrement dépendants de leur posture morale. Le fait de punir le mauvais comportement d’autrui fait partie intégrante du message des Anonymous – ils suggèrent de les rejoindre pour être de côté des gentils. Cela signifie que le groupe repose uniquement sur son intégrité morale – et s’ils ne peuvent se permettre de jouer selon leurs propres règles, ils ne peuvent certainement pas non plus se permettre de les enfreindre.

Le dernier problème avec le masque recensé à cette date a montré son (pas si vilain) visage hier. Il s’avère que, bien que cet accessoire soit pratique pour les vendettas masquées, il l’est moins pour se mettre publiquement en valeur. Que se passe-t-il quand la marche organisée, basée sur la notion d’anonymat, attire une célébrité tel que Russel Brand parmi ses rangs ? Brand a résolu le problème en tweetant des photos de lui-même portant son masque. Encore une fois, quelle ironie…




Geektionnerd : TVA sur les eBooks

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Source :

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Chapitre II — Où Pouhiou touche le nœud du truc

Avant de poursuivre vers l’ouest, le vrai, son périple scriptural et libérateur, le sémillant Pouhiou est passé par Rouen. Dans le sprint final, il a disposé facilement du régional de l’étape, un néophyte du nom de Flaubert, sponsorisé par Charpentier, Le voici maintenant moulinant du mot par milliers, un peu inquiet tout de même à l’idée de ne pas tenir la cadence. Mais qu’importe ! Retrouver un forçat de la route qui comme lui s’est donné le défi du nanowrimo lui a permis de comprendre que compter les mots n’est pas très sérieux et que beaucoup d’auteurs sont encore capables de dire : « Madame Marquet, c’est moi ».

J’irai écrire chez vous épisode 2 : Rouen (4-7 novembre)

Me voilà tout juste parti de Rouen, arrivé à Brest. Rouen, où j’ai été hébergé chez un NaNoteur : autant dire que les échanges furent riches.

J’ai écrit chez Mathias

La première chose qu’on remarque, chez Mathias, c’est son rire. Un rire franc, communicatif, un rire toujours content de se faire surprendre par la vie. J’ai connu Mathias chez Voisine (celle que je remercie à la fin de #MonOrchide). Il y couchsurfait pour pouvoir assister à un concert de Mars Volta. J’y connais rien en musique, mais je leur ai fait des pancakes avec de la pâte d’Ovomaltine. Et ça, ça facilite les échanges. Depuis, on se côtoie sur Facebook. On partage beaucoup des liens de féministes, LGBT, et autres infos qui font bondir les pensées bleu marine. Le 28 octobre, quand j’annonce que je me lance dans un NaNoWriMo, Mathias dit « cool ! on s’inscrit où ? » Et, sur un coup de tête, sans avoir la moindre foutue idée de où il va, ce mec se lance dans l’écriture d’un roman. Faut avoir une sacrée paire d’ovaires, quoi…

couverture roman de roussel

Quand je n’écris pas, je parle.

C’est un peu mon sport favori, et en côtoyant l’univers de Mathias, j’ai pu le pratiquer intensément. J’ai échangé avec Ben, dans une brasserie estudiantine, sur les radios associatives, les expériences prostatiques et les mises en scène. J’ai discuté avec JB (co-animateur de l’émission de musique de Mathias sur la radio Campus rouennaise sur la culture libre, le rôle prescripteur des bibliothécaires, les envies de mort et de bromure (sur lesquelles j’ai écrit deux pièces de théâtre librement diffusées sur http://pouhiou.com). Avec Anka, on a parlé de Roumanie, d’éducation, d’exigence et de chatons. On a rencontré Lutine, autre NaNoteuse rouennaise, qui se jugeait trop et n’arrivait plus à écrire. On lui a lancé le défi d’écrire une bonne grosse page de merde… Elle a échoué : ce qu’elle a écrit était bon. Et avec Mathias, on a partagé nos expériences de NaNoteurs…

C’est quoi être auteur ?

On avait tous deux déjà trois jours dans les pattes. Et Mathias commence à m’expliquer qu’il ressent déjà ses personnages lui échapper. Un en particulier, qui ne devait être que secondaire, une sorte de faire-valoir à son héroïne, mais qui prend de l’importance en lui et s’accapare le chapitre suivant. Moi, les voix de mes persos m’habitent. J’imagine des dialogues sous la douche puis je réalise où je suis et me demande si je n’ai pas vidé le ballon d’eau chaude. Plus tard, Mathias m’explique que le libre, c’est pas pour lui. Qu’il avait trop peur que l’on touche à son œuvre. Ça me semblait pas cohérent avec le côté avenant du gars, donc je le questionne…

— Mais tu as vraiment l’impression que c’est toi qui écris, que ça se fait dans l’effort ?

— Non… Je mets mon casque, de la bonne zique et je laisse le truc couler. J’ai un peu l’impression que l’histoire est par là et que j’en suis le scribe.

— Du coup, est-ce que ce que tu écris parle de toi ? Est-ce que ton histoire définit quel auteur, quelle personne que tu es ?

— Ah ben non, en fait… C’est juste une histoire que j’ai écrite, pas un morceau de moi…

Et là on touche le nœud du truc. Je comprends tous les auteurs qui sont d’un protectionnisme féroce avec leurs œuvres. Qui ont peur, qui ont des peurs, tant et si bien qu’ils arrivent à accepter la position de victime et celle de dragon-sur-son-tas-d’or. Des postures que le système, crée par et pour les industries de la culture, nous font prendre de manière insidieuse. Des poses que j’ai prises tant que j’ai eu peur, que j’ai eu des peurs. Des peurs qu’en touchant à mes histoires, mes contes, mes écrits… on touche à ma personne. Alors qu’aujourd’hui, ça n’a plus rien à voir…

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Le piège du WordCount

C’est bien beau de parler, rencontrer, échanger… D’aller voir Rouen qui est une ville magnifique, emplie de colombages et de toits en tuiles… Mais c’est pas ça qui va écrire le livre III. Alors j’écris. 2300 mots le lundi pour finir le premier chapitre qui développe une ambiance paisible très étrange. 1500 mots le jour suivant, ce qui me fait culpabiliser, un peu : je suis en dessous des 1667 quotidiens indispensables. 2200 mots le mercredi : ouf, on remonte et passe au dessus de la barre des 10 000, du cinquième. Sauf que Mathias est ingénieur en maths. Et que les maths sont impitoyables. On calcule : 8 chapitres d’environ 8000 mots. Je n’écrirai pas lors du Capitole du Libre (22-23 novembre sur Toulouse) ni lors des Journées Méditerranéennes du Logiciel Libre (29-30 novembre). Du coup, 64 000 mots en 26 jours, il faut écrire 2500 mots par jour (à une vache près, les maths c’est pas une science exacte). J’en suis méga loin. #MicroDéprime. C’est là que tu réalises que compter les mots, ce doit juste être un plaisir. Pas une tâche. J’écrirai ce que je peux. Si mon roman s’achève en décembre : ce n’est pas grave. Je ferai comme tous les auteurs, comme tous les NaNoteurs : de mon mieux.

Pouhiou regonflé. Des bisous, des mercis, une caresse à Kali (leur chatounette) et hop !

Co-voiturage direction Brest ! On se retrouve dans 3 jours ?

— Pouhiou.

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L’école selon Microsoft : comment j’ai appris à ne plus m’en faire et à aimer l’éducation privatrice et fermée

Paris, le 7 novembre 2013. Communiqué de presse.

Deux ans après la convocation d’une centaine d’inspecteurs de l’Éducation nationale au siège de Microsoft France, l’April, Framasoft, le CNLL, SavoirsCom1 et l’Aful s’étonnent d’une nouvelle entorse à la neutralité scolaire et à l’intérêt du service public d’éducation.

Le 19 novembre 2013, plusieurs responsables de l’Éducation nationale se déplacent au siège de la société Microsoft1. Michel Pérez, Inspecteur général de l’Éducation nationale, Catherine Becchetti-Bizot, Inspectrice générale, Directrice du Comité Stratégique pour le Numérique à l‘École ainsi que des représentations des associations de collectivités viennent découvrir une étude coordonnée par Ludovia Magazine, en association avec Microsoft, Intel et SFR2.

Le titre de l’étude se veut neutre : « Investissement des collectivités en matière de numérique à l’école ». Le dispositif de communication ne l’est pas. Par leur présence à la table ronde organisée par Microsoft, les Inspecteurs généraux légitiment l’appropriation de l’Éducation nationale par une société privée. Les signataires de ce communiqué dénoncent fermement cette nouvelle entorse à la neutralité scolaire et à la mission de service public de l’éducation nationale.

Les collectivités territoriales souhaitent-elles vraiment favoriser l’exploitation commerciale de l’école par quelques grandes sociétés pour lesquelles l’éducation est exclusivement un marché captif ?

Ce n’est pas la première fois que des responsables de l’Éducation nationale se déplacent au siège de la société Microsoft. Lors du salon Éducatec-Éducatice 2011, les inspecteurs de l’Éducation nationale chargés de mission nouvelles technologies (IEN-TICE) s’étaient vu convoqués par leur hiérarchie pour tenir leur journée annuelle au siège de la société Microsoft. L’April et Framasoft avaient déjà dénoncé « une véritable entorse à la neutralité scolaire et vivement regretté que les programmes de ces journées ne mentionnaient pas les logiciels et ressources libres3. Malgré la circulaire du premier ministre « Pour l’usage des logiciels libres dans l’administration »4.

Ce n’est pas non plus qu’un accident de parcours. Les services de l’Éducation nationale envoient depuis plusieurs mois des signaux inquiétants. Le rapport de l’Inspection générale sur « La structuration de la filière du numérique éducatif : un enjeu pédagogique et industriel »5 est très peu documenté sur les logiciels et ressources libres ou, au mieux minimise leur apport. Et le rapport n’aborde que très succinctement l’une des dispositions importantes du texte de loi pour la refondation de l’école qui recommande : « l’incitation au développement de ressources numériques se fera notamment en faveur de logiciels libres et de contenus aux formats ouverts »6. Les signataires de ce communiqué auraient pu, avec d’autres, aider les rédacteurs dans leur travail afin d’arriver à un rapport plus exhaustif.

« L’école ne doit pas être un marché captif des éditeurs privateurs du numérique. L’école que nous appelons de nos vœux, ne doit pas enseigner « avec  » le numérique sur des produits privateurs dans une approche de type B2i qui forme avant tout des consommateurs passifs » déclare Rémi Boulle, vice-président de l’April, en charge du groupe de travail Éducation. Dans la continuité des principes hérités du siècle des Lumières, elle doit former des futurs citoyens responsables, capables de réfléchir de façon libre, indépendante voire les créateurs de demain.

Stefane Fermigier, Vice-Président du CNLL, rappelle pour sa part « La place du logiciel libre dans le système éducatif français est un enjeu majeur pour la compétitivité de notre économie. Pour continuer d’être à sa place de leader mondial du logiciel libre, la France doit aussi se doter d’une politique éducative forte dans ce domaine, en privilégiant l’usage d’outils pédagogiques libres, en fondant l’apprentissage du numérique à l’École sur les logiciels libres, et en enseignant les technologies et méthodologies propres au logiciel libre dans les filières informatiques et scientifiques ».

Enseigner « avec  » le « numérique » dans toutes les disciplines nécessiterait a minima :

  • un véritable enseignement de la science informatique ;
  • d’authentiques cours de technologie qui ne seraient plus limités, en collège, à la seule étude d’objets physiques dans lesquels l’informatique qu’ils pourraient incorporer est ignorée et traitée comme une boîte noire  ;
  • un authentique apprentissage raisonné des logiciels et de l’internet qui n’est actuellement enseigné nulle part ;
  • un enseignement des technologies et méthodologies propres au logiciel libre dans les filières scientifiques et informatiques ;
  • l’utilisation de logiciels libres et la diffusion sous licence libre des ressources utilisées dans le service public de l’éducation ;
  • une réflexion opérationnelle (approfondie) sur les contenus de cet enseignement, dès l’école primaire.

C’est également enseigner l’apprentissage du travail collaboratif, incompatible avec des ressources privatrices DRMisées, des formats de fichiers non interopérables, des licences qui ne permettent pas la libre circulation et le libre partage des savoirs. L’École ne doit plus être contrainte dans des systèmes privateurs et fermés.

Nous nous tenons à la disposition de l’Inspection générale et de Mme Catherine Becchetti-Bizot pour toute information complémentaire sur les logiciels et ressources libres pour l’éducation et leur souhaitons un riche salon Éducatec-Éducatice.

À propos de l’April

Pionnière du logiciel libre en France, l’April est depuis 1996 un acteur majeur de la démocratisation et de la diffusion du Logiciel Libre et des standards ouverts auprès du grand public, des professionnels et des institutions dans l’espace francophone. Elle veille aussi, dans leurre numérique, à sensibiliser l’opinion sur les dangers d’une appropriation exclusive de l’information et du savoir par des intérêts privés.

L’association est constituée de plus de 3 600 membres utilisateurs et producteurs de logiciels libres.

Pour plus d’informations, vous pouvez vous rendre sur le site Web à l’adresse suivante : http://www.april.org/, nous contacter par téléphone au +33 1 78 76 92 80 ou par notre formulaire de contact.

Contacts presse :

  • Rémi Boulle, vice-président de l’April, en charge du groupe de travail Éducation, rboulle@april.org>, 06 05 03 32 30
  • Frédéric Couchet, délégué général, fcouchet@april.org +33 6 60 68 89 31
  • Jeanne Tadeusz, responsable affaires publiques, jtadeusz@april.org +33 1 78 76 92 82

À propos de Framasoft

Issu du monde éducatif, Framasoft est un réseau d’éducation populaire consacré principalement au logiciel libre et s’organise en trois axes sur un mode collaboratif : promotion, diffusion et développement de logiciels libres, enrichissement de la culture libre et offre de services libres en ligne.

Pour plus d’informations, vous pouvez vous rendre sur le site Web à l’adresse suivante : http://www.framasoft.org/ et nous contacter par notre formulaire de contact.

Contact presse :

  • Alexis Kauffmann, fondateur et chargé de mission, aka@framasoft.org +33 6 95 01 04 55

À propos du CNLL

Le Conseil National du Logiciel Libre est l’instance représentative, au niveau national, des associations et groupements d’entreprises du logiciel libre en France. Le CNLL représente 13 associations et groupements, et par leur intermédiaire plus de 300 entreprises françaises spécialisées ou avec une activité significative dans le logiciel libre.

Le CNLL a pour principale mission de représenter l’écosystème du logiciel libre auprès des pouvoirs publics et des organisations nationales et internationales existantes.

Contact Presse :

  • Amélie Vaysse, chargée de communication, relations presse. 01 41 40 11 42 – info@cnll.fr

À propos de SavoirsCom1

SavoirsCom1 est un collectif qui s”intéresse aux politiques des biens communs de la connaissance. Son action vise à faire en sorte que les politiques publiques favorisent la création, la diffusion et la mise en partage de biens communs informationnels. SavoirsCom1 défend lespositions exprimées dans son Manifeste.

Contact presse :

À propos de l’Aful

Association Francophone des Utilisateurs de Logiciels Libres, l’AFUL a pour principal objectif de promouvoir les logiciels libres ainsi que l’utilisation des standards ouverts. Ses membres, utilisateurs, professionnels du logiciel libre, entreprises ainsi que d’autres associations, sont issus d’une dizaine de pays ou de régions francophones (France, Belgique, Suisse, Afrique francophone, Québec).

Interlocuteur de nombreux médias, l’AFUL est présente sur nombre de salons, conférences et rencontres. Elle agit notamment activement contre la vente liée (site Non aux Racketiciels, comparatif bons-vendeurs-ordinateurs.info et bons-constructeurs-ordinateurs.info), pour l’interopérabilité (membre de l’AFNOR, participation aux référentiels d’interopérabilité et d’accessibilité de la DGME, site formats-ouverts.org, etc.), intervient sur les problématiques du droit d’auteur ainsi que pour la promotion de l’utilisation de logiciels et ressources pédagogiques libres pour l’éducation entendue au sens large.

Contacts presse :

Notes

1. Le Numérique à l’École : un enjeu partagé
2.Lancement de la deuxième édition de l’étude sur le numérique éducatif dans les collectivités territoriales
3.Les inspecteurs de l’éducation nationale convoqués chez Microsoft
4.Circulaire Ayrault sur le bon usage des logiciels libres dans l’administration française
5. Michel Pérez est le coordonnateur du rapport « La structuration de la filière du numérique éducatif : un enjeu pédagogique et industriel », 24/09/2013
6.Loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République publiée au Journal Officiel le mardi 9 juillet 2013  : « L’incitation au développement de ressources numériques se fera notamment en faveur de logiciels libres et de contenus aux formats ouverts ».




Le Brésil ne veut plus de logiciels impossibles à auditer

Avant Snowden, nous criions dans le désert.

Il en va tout autrement aujourd’hui. Et les gouvernements réalisent soudainement le danger d’avoir choisi des logiciels propriétaires qu’on ne peut évaluer et auditer faute d’accès au code source.

Il ne va pas être facile pour Microsoft, Apple et consorts de répondre ici aux exigences de transparence des autorités brésiliennes qui se tourneront naturellement vers le logiciel libre.

En attendant le tour de la France…

Edward Snowden - Laura Poitras - CC by

Le gouvernement brésilien va interdire l’achat des logiciels qui ne permettent pas leur plein contrôle

Governo vai barrar compra de software que impeça auditoria

Natuza Nery et Julia Borba – 5 novembre 2013 – Folha de S. Paolo
(Traduction : Ulan, Pierre, JonathanMM)

A partir de l’année prochaine, le gouvernement (brésilien) n’achètera plus d’ordinateurs ou de logiciels qui ne peuvent être pleinement audités par les pouvoirs publics. La directive a été publiée le 5 novembre dernier dans le journal officiel « Diario official da Uniao ».

Ainsi, les systèmes d’exploitation comme Windows (Microsoft) et MacOS (Apple) ne seront plus utilisés si les entreprises concernées font obstacle aux enquêtes sur l’espionnage informatique.

Actuellement, à l’installation d’un logiciel (propriétaire), les utilisateurs acceptent les termes d’utilisation de l’éditeur autorisant éventuellement celui-ci à accéder à leur ordinateur.

Le gouvernement brésilien souhaite avoir le droit de surveiller qui surveille ses concitoyens, et ce dans le but de pouvoir identifier et tracer les tentatives d’espionnage.

Selon le journal « Folha de São Paulo », l’intention n’est pas de promouvoir une conversion massive des parcs informatiques, mais prévenir que les produits actuels ne sont plus conformes aux nouvelles exigences.

De cette manière, il y aura un substitution graduelle des programmes traditionnels (propriétaires) pour des logiciels libres, comme Linux, si nous ne parvenons pas à négocier avec les grandes entreprises.

L’importance accordée par le gouvernement à l’espionnage a augmenté depuis qu’ont été publiés les dénonciations sur l’accès par les services américains aux archives des autorités et entreprises brésiliennes.

Économie

Le gouvernement considère que, en plus d’augmenter la sécurité, la directive entraînera des économies. L’utilisation de logiciels libres met un terme au renouvellement obligatoire des licences de ces programmes.

Interrogé pour la rédaction de cet article, Apple n’a pas souhaité répondre à cette décision.

Microsoft a informé qu’il fournit aux gouvernements « l’accès contrôlé au code source et aux autres informations techniques pour les aider à évaluer la sécurité des produits ». La société a également déclaré qu’elle se met à disposition du gouvernement brésilien pour discuter des détails de la mesure.

Valeur incertaine

Il n’y a pas encore d’estimation de l’impact de cette décision sur les dépenses gouvernementales. Les informations plus précises sur ces coûts ne seront dévoilées qu’après l’application de la directive, quand aura lieu une enquête sur les contrats actuellement en vigueur et les dates d’expirations de ceux-ci. Comme ces licences ont été obtenues à des moments différents, il n’est pas encore possible de faire d’estimation.

Le journal précise que le gouvernement de Dilma Rousseff étudie également avec détermination une autre mesure de sécurité informatique : installer le client de messagerie libre Expresso (Serpro) comme référence sur tout ordinateur public à la place de Outlook, ce qui engendrera des économies supérieures à 60 millions de reais par an (environ 20 millions d’euros).

Crédit photo : Laura Poitras (Creative Commons By)