Musique, industrie et industrie musicale

Notsogoodphotography - CC byNous le savions déjà : « musique » et « industrie musicale » sont deux entités distinctes. La révolution numérique n’a fait que nous le rappeler mais en apportant un petit quelque chose en plus : la possibilité pour le premier de ne pas être obligé d’en passer forcément par le second pour exister. Surtout si cette industrie musicale renonce à s’adapter et préfère mettre son énergie à chercher des mesures coercitives pour ramener ses clients dans le droit chemin de la rassurante situation d’avant (qui n’est déjà plus).

Et si nous commencions par prendre conscience des évolutions avant que d’envisager une éventuellement réconciliation ?

La traduction de ce court extrait du blog de Seth Godin y participe modestement.[1].

Musique vs L’Industrie Musicale

Music vs. the music industry

Seth Godin – 13 février 2009 – Blog
(Traduction Framalang : Claude le Paih)

Quelques extraits d’une interview sur le futur de l’industrie musicale. J’abordais une industrie spécifique, mais je pense que cela peut être généralisé.

L’industrie musicale privilégie surtout l’aspect « industrie » et moins l’aspect « musique ». C’est le meilleur moment de l’histoire de la musique si votre rêve est de distribuer autant de musique que possible à un maximum de personnes, ou si votre objectif en tant que musicien est d’être écouté par une large audience. Il n’y a jamais eu une telle époque auparavant. Donc si votre intérêt est la musique, c’est génial.
Mais si votre intérêt penche vers le côté industriel et ses limousines, ses acomptes, ses juristes, son polycarbonate et ses vynils, c’est tout simplement horrible. Le changement actuel étant que les personnes persistant à vouloir garder le monde tel qu’il était avant, seront de plus en plus contrariées par la nouvelle donne, ce qui peut aller jusqu’à la perte de leur emploi. Ceux qui veulent inventer un nouveau cadre, de nouvelles de règles du jeu, un nouveau paradigme, n’en reviennent pas de leur bonne fortune et réalisent combien ils sont chanceux que le monde de l’industrie ne remarque pas une telle opportunité…

Je définis une tribu comme un groupe de personnes partageant une culture, un but, une mission commune, et aussi souvent un leader commun. Il y a des tribus de gens, sortant parfois des sentiers battus, qui se sentent en phase parce qu’ils veulent repenser l’industrie musicale. Il y a ainsi la tribu de ceux qui suivent Bruce Springsteen et paient des sommes déraisonnables pour l’écouter en concert et comparer les titres.
Cela n’a plus rien à voir avec les anciennes habitudes des labels musicaux occupés à conquérir de l’espace commercial à la radio et dans les magasins de disques. L’industrie musicale a désormais besoin de se redéfinir et d’œuvrer à la recherche, l’interconnexion et la direction de tribus d’individus désirant suivre un musicien et se connecter avec ceux qui souhaitent en faire de même…

Dans les années soixante-dix et quatre-vingt, vous écoutiez une chanson car « tous les autres » l’écoutaient aussi. C’est la définition de la pop music. À cette époque, nous définissions « les autres » comme des personnes de notre université ou des gens écoutant la radio WPLJ[2].
Aujourd’hui, « les autres » ne sont pas définis par le lieu de résidence ou la radio écoutée. Ils sont définis par le segment vertical ou horizontal du monde auquel vous vous connectez. Je peux écouter Keller Williams[3] parce que ma tribu connaît des Deadheads désenchantés[4]. N’ayant plus de nouveau Grateful Dead à écouter, nous écoutons Keller Williams : c’est de la pop music pour nous. Il n’est pas populaire chez les jeunes du collège qui n’ont jamais entendu parler de lui, n’est-ce pas ? Ainsi vous vous retrouvez avec une multitude de niches qui sont autant de manières différentes de regarder le monde…

Le tout numérique est en train de surpasser le CD, et une fois le mouvement amorcé cela va de plus en plus vite. Le plus intéressant pour moi est de connaître celui qui contrôlera la programmation musicale (NdT : la playlist). S’il y a une quantité infinie de musique offerte (et dès que la quantité de musique excède le temps disponible d’une vie, elle est infinie !), quelqu’un sera-t-il assez influent pour me suggérer quoi écouter ? Ce quelqu’un sera-t-il payé pour me le dire ou bien paiera-t-il pour me le dire ? La question reste pour le moment ouverte mais les réponses sont dans toutes ces niches. Qui sont les personnes influentes et comment se diffusent cette influence ?
L’analogie que j’aime donner est que si vous êtes un écrivain et qu’Oprah Winfrey[5] vous appelle, vous ne dites pas : « combien allez vous me payer pour participer à votre show et présenter mon livre ? » En fait, si vous le pouviez, vous paieriez pour collaborer avec Oprah.
Pendant très longtemps, l’industrie musicale a eu deux grandes idées : d’un côté, payer pour passer sur Clear Channel[6] ou MTV, de l’autre, faire payer pour écouter sa musique en concert ou sur votre chaîne Hi-Fi. Ces temps sont tous en train de se diluer actuellement. « Si je suis le directeur des programmes de ma propre radio, que devient mon bakchich ? »[7].

Notes

[1] Crédit photo : Notsogoodphotography (Creative Commons)

[2] Radio populaire aux USA

[3] Keller Williams est un chanteur américain un peu « décalé »

[4] Les Deadheads sont des fans du groupe Grateful Dead

[5] Oprah Winfrey est l’animatrice du célèbre talk-show qui porte son nom

[6] Clear Channel est un groupe de médias américains possédant de nombreuses radios et télévisions

[7] Bakchich ou payola dans le texte




Largage de liens en vrac #12

Marcelo Alves - CC by-saDites, vous n’avez pas mieux à faire que de venir fouiner par ici ? En plus c’est comme d’habitude, des logiciels non testés, mal classés et de qualité disparate.

Non, franchement, vous devriez plutôt parcourir notre magnifique dossier sur Wikipédia ou alors, je ne sais pas moi, acheter un framabook pour l’offrir à votre ami(e) déçu(e) de n’avoir rien reçu(e) à la Saint-Valentin.

Vous êtes toujours là ? Bon ben tant pis pour vous. On aura tenté de vous dissuader mais c’était sans compter sur votre légendaire entêtement[1].

  • GimpPhoto : « GimPhoto is GIMP modification with new menu layout, great selection of plugins, and many additional resources for more professional look and feel as digital photo retouching and image editing application package. » Est-ce clair ou je traduis ? En tout cas c’est du GIMP dans sa dernière version 2.4.3, avec toujours cette idée fixe de séduire les photoshopeurs, à comparer (dans les commentaires ?) avec Gimpshop (dont le site a subi une invasion de sauterelles pubs ces derniers jours). Tant qu’à parle de GIMP voici 50 tutoriels (en anglais).
  • Flowplayer : Des lecteurs pour lire les vidéos .flv en streaming flash, il en existe pas mal (et même en libre) mais celui-là, sous GPL, est peut-être le meilleur qu’il m’ait été donné de voir (comme ça, a priori). Tout est configurable et la version playlist a vraiment de la gueule.
  • Chevreto : Un script espagnol prometteur pour proposer à vos internautes une site pour déposer facilement et très joliment (Ajax inside) vos images, qu’elles proviennent de votre ordi ou du Net (+ redimensionnement à la volée). Pourrait donc devenir le ImageShack du libre en quelque sorte.
  • Burning Mill Express : Pour Windows only, un logiciel de gravure (CD, DVD, ISO…) qui semble bien réalisé. Je ne suis vraiment pas un spécialiste, quelqu’un peut nous dire ce qu’il vaut pa rapport à la concurrence libre sur cet OS ?
  • AribaWeb : Un framework pour nous faire de puissantes applications Web en Ajax et tout le toutim. Si vous arrivez à nous pondre un Gmail du libre avec, merci de nous prévenir dans les commentaires.
  • Dicts.info : C’est pas du libre mais c’est bien pratique. Des tonnes de dictionnaires pour traduire un peu dans toutes les langues (par exemple de l’estonien au coréen). Typiquement le genre de sites qui attend que les gens viennent pour nous coller de la pub mais évitons le procès d’intention…
  • iPodME : Celui-là je ne sais pas trop si il mérite le référencement mais bon… il s’agit de convertir ses vidéos pour son iPod (sources disponibles mais j’ai pas vu la licence). Que pour Windows avec .NET dedans (c’est bien ce que je vous disais).
  • Twitter sur Pidgin : Pour suivre Twitter (mais aussi Identi.ca) sur le célèbre logiciel de messagerie instantané. L’occasion de rappeler les liens vers le compte Framasoft de Twitter et Identi.ca (nos derniers tweets sont dans la colonne de droite de cette page du reste).
  • Open Web Messenger : Application de chat en ligne permettant à vos visiteurs de discuter avec vos techniciens, commerciaux ou tout autre intervenant, sous licence Eclipse.
  • Lavoisier : Une bien belle police Open Source signalée par theClimber.
  • 10 obscure Linux applications you need to try : À ne lire que si vous êtes geek, admin et sous GNU/Linux (et que vous comprenez l’anglais mais, bon, si vous répondez aux trois premiers critères le quatrième devrait naturellement suivre).

Notes

[1] Crédit photo : Marcelo Alves (Creative Commons By-Sa)




Projet de loi Création et Internet : l’April s’insurge et appelle à la mobilisation

Qualifié, malheureusement à juste titre, de DADVSI 2, le projet de loi « Création et Internet » (ou Hadopi) vient de chauffer aux oreilles de l’April. Il faut dire qu’il y a de quoi et le rapporteur (et benjamin) de l’UMP Franck Riester d’en prendre pour son grade.

Je vous laisse, je dois contacter mon député…

Riposte graduée : le rapporteur s’oppose à l’interopérabilité, l’April appelle à la mobilisation

URL d’origine du document

APRIL – 23 février 2009 – Communiqué de presse

Trois ans après DADVSI, le gouvernement et la majorité semblent n’avoir rien retenu des débats sur l’interopérabilité[1] et le logiciel libre. Lors de l’examen du texte « Création et Internet » en commission des lois de l’Assemblée nationale, le rapporteur UMP Franck Riester s’est opposé à l’interopérabilité des moyens de sécurisation imposés par le projet de loi, au motif que l’interopérabilité empêcherait le libre choix de l’utilisateur ! L’April s’insurge et appelle chacun à contacter son député pour l’alerter.

Véritable DADVSI 2, le projet de loi « Création et Internet » déjà validé par le Sénat est actuellement programmé à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Après un examen en commissions, le texte sera examiné en séance à partir du 10 mars 2009.

L’essentiel du projet de loi est bien d’échafauder une nouvelle autorité administrative – l’Hadopi[2] – qui aura pour but de faire une répression de masse sur la base de relevés informatiques. Mais il prévoit également d’imposer aux titulaires d’un accès à Internet des « moyens de sécurisation » visant à empêcher que leur connexion soit utilisée pour commettre des infractions.

« On ignore tout de la nature de ces moyens de sécurisation : on ne sait pas ce qu’ils font, ni où ils s’installent, et quelle est la maîtrise que l’utilisateur pourra en avoir, » déplore Alix Cazenave, responsable des affaires publiques de l’April. « Qu’ils ne fassent pas le jeu d’éditeurs pratiquant la vente liée serait un minimum ! » L’April a d’ailleurs été reçue par des députés de tous les groupes pour leur faire part de ses questions et de ses inquiétudes[3].

Pourtant sur la question précise de l’interopérabilité, les députés Jean Dionis du Séjour (Nouveau Centre) et Patrick Bloche (Socialiste, Radical et Citoyen) se sont heurtés à un refus catégorique du rapporteur, motivé par un argument que nul n’aurait imaginé : il est simplement défavorable à l’interopérabilité[4] ! Il s’est de même opposé à ce que l’abonné soit exonéré de sa responsabilité lorsqu’il n’existe pas de moyens de sécurisation adaptés à sa configuration. L’April avait pourtant, dès le 6 mars 2008[5], alerté le conseiller juridique de la ministre de la culture sur le risque que comporte ce genre de mesures pour l’interopérabilité et le logiciel libre. À l’époque déjà, aucune réponse n’avait été apportée quant à la nature de ces moyens de sécurisation, le conseiller Henrard se contentant d’affirmer que la loi créerait le marché (sic).

« Ce que Franck Riester ne comprend pas, c’est que l’interopérabilité est le libre choix des consommateurs. On se croirait de retour en 2006 avec le benjamin de l’époque, Laurent Wauquiez, qui avait au moins eu l’honnêteté de reconnaître son incompétence[6]. En 2005, la SACEM voulait nous faire changer nos licences[7] ; Franck Riester voudrait-il nous obliger à changer de système d’exploitation ?», s’interroge Frédéric Couchet, délégué général de l’April.

« Monsieur Riester est la preuve qu’il reste encore à l’Assemblée nationale des députés opposés à l’interopérabilité et au logiciel libre[8]. Il soutient un dispositif qui va, une fois de plus, pénaliser sans aucune justification les auteurs et utilisateurs de logiciels libres, les mettant dans une situation d’insécurité juridique absolument inacceptable. Le groupe UMP a décidément bien choisi son rapporteur : tout comme cette loi, il nie la réalité technique, protège des intérêts particuliers et souffre d’un archaïsme affligeant » s’insurge Benoît Sibaud, président de l’April.

Comme pour DADVSI, l’urgence est déclarée. Comme pour DADVSI, ce texte est annoncé comme le remède miracle contre le téléchargement non autorisé d’œuvres en peer-to-peer. Comme pour DADVSI, des mesures « techniques » de contrôle d’usage sont imposées. Comme pour DADVSI, l’interopérabilité est méprisée. Comme pour DADVSI, le logiciel libre est ignoré, et ses utilisateurs menacés.

C’est pourquoi, comme pour la loi DADVSI, l’April appelle tous les citoyens attachés au logiciel libre à contacter leurs députés[9] et à les alerter afin qu’ils s’opposent à cette nouvelle menace. Elle les invite également à écrire au rapporteur Riester pour lui demander de revenir sur ses positions inacceptables.

Notes

[1] rappelons au passage l’article 7, adopté le 16 mars en seconde délibération à l’unanimité, faisant de la France le premier pays d’Europe à véritablement défendre activement l’interopérabilité, première mondiale saluée Outre-Atlantique. Communiqué du 18 avril 2006 « Projet de loi "DADVSI" : à contre-courant, le Sénat rejette l’interopérabilité et prône la brevetabilité du logiciel ».

[2] Haute Autorité pour la diffusion et la protection des œuvres sur Internet, créée à partir de l’Autorité de régulation des mesures techniques de la loi DADVSI.

[3] Notamment les porte-paroles des groupes Nouveau Centre (NC), Socialiste, Radical et Citoyen (SRC), Gauche Démocratique et Républicaine (GDR), ainsi que par la rapporteure pour avis (UMP) de la commission des affaires culturelles. Elle doit également être auditionnée par le rapporteur pour avis (UMP) de la commission des affaires économiques.

[4] Extrait du compte-rendu n°28 de la réunion de la commission des lois, mercredi 18 février 2009, séance de 9h30 : — Art. L. 331-30 (nouveau) du code de la propriété intellectuelle : Liste des moyens de sécurisation efficaces : La Commission adopte un amendement du rapporteur précisant les consultations auxquelles la HADOPI devra procéder avant de rendre officielles les spécifications fonctionnelles des moyens de sécurisation et supprimant l’établissement d’une liste officielle de ces spécifications. Elle est ensuite saisie d’un amendement de M. Jean Dionis du Séjour précisant que les moyens de sécurisation devront être interopérables et mis à la disposition des consommateurs gratuitement. – M. le rapporteur : Les moyens de sécurisation mis en place ne sauraient être gratuits, à l’image des logiciels de contrôle parental, mis à la disposition des consommateurs à titre payant, même si leur prix est modique. – M. Jean Dionis du Séjour : J’accepte de supprimer de mon amendement la condition de gratuité. – M. le rapporteur : J’en viens au second objet de l’amendement : l’interopérabilité. Je n’y suis pas favorable. Il faut laisser au consommateur sa totale liberté de choix en fonction de son système d’exploitation. L’interopérabilité n’est pas nécessaire pour les consommateurs et elle est trop contraignante pour les éditeurs de logiciels. La Commission rejette l’amendement, puis adopte deux amendements du rapporteur, le premier visant à préciser que la HADOPI établit une liste labellisant les moyens de sécurisation, le second de nature rédactionnelle. Elle rejette ensuite, par cohérence, un amendement de M. Patrick Bloche précisant que les moyens de sécurisation devront être interopérables et mis à la disposition des consommateurs gratuitement.

[5] Voir le compte rendu de la réunion avec Laurent Ladouari et Olivier Henrard.

[6] « Nous devons reconnaître honnêtement les limites de nos compétences techniques – certains d’entre nous en ont apporté la preuve, moi le premier hier soir – sur des sujets extrêmement techniques comme le MP4 ou les fichiers MP3. » – Laurent Wauquiez, député UMP benjamin de l’AN sous la XIIème législature, porteur de la partie civile de l’amendement Vivendi, lors de l’examen du DADVSI. Franck Riester est « benjamin du groupe UMP et troisième plus jeune député de l’hémicycle » selon ce portrait.

[7] « Vendredi 18 novembre 2005, au ministère de la Culture, le SNEP et la SCPP déclarent aux auteurs de Logiciel Libre : « Vous allez changer vos licences. » La SACEM ajoute : « Vous allez arrêter de publier vos logiciels. » Et se déclare prête à « poursuivre les auteurs de logiciels libres continuant de divulguer leur code source » – Extrait du communiqué de presse de la FSF France du 25 novembre 2005.

[8] Contrairement au prédécesseur de Franck Riester sur la 5ème circonscription de Seine-et-Marne, Guy Drut, UMP lui aussi, qui a été un des questeurs à l’origine de la migration vers le logiciel libre du poste de travail des députés français.

[9] Pour une liste des députés, leurs fiches individuelles et leurs coordonnées, voir également le Mémoire Politique disponible sur le wiki de la Quadrature du Net.




L’allégorie du pingouin de l’Antarctique

Un pingouin inlassablement poursuivi par des orques (jeu ou danger ?) et qui vient trouver refuge sur le zodiac des hommes ! Belle métaphore non ?!

—> La vidéo au format webm

TsavenNava, qui a uploadé la vidéo sur YouTube, précise qu’il n’en est pas l’auteur (en se dédouanant par la même occasion de cette pénible bande sonore). Elle lui a été donnée, l’été dernier, par le chef de la station de recherche de Vernadsky en Antarctique.

PS : Au fait s’agit-il d’un pingouin ou d’un manchot ? Et de quelle famille exactement ? Y a-t-il des spécialistes dans la salle ?




« Vous êtes trop cons, je laisse tomber ! »

Nils Geylen - CC by-saDans notre récent billet Du choix risqué du logiciel propriétaire et étranger pour sa défense nationale, nous avions évoqué le cas de Conficker, ce ver informatique qui a récemment affecté (et infecté) bon nombre d’ordinateurs sous Windows.

Carla Schroder a fait sa petite revue de presse autour du sujet[1] et… les bras lui en sont tombés ! À dire vrai, elle en a carrément gros sur la patate. Tout y passe : les journalistes, les militaires, les sociétés d’antivirus, les clients de Microsoft et bien sûr ce « système d’exploitation de merde ».

Ce qui nous donne, vous l’aurez compris, un article coup de gueule et coup de sang un « brin » polémique qui ne manquera pas de faire réagir dans les commentaires[2].

J’abandonne. Windows ou la preuve que les gens sont trop cons pour utiliser des ordinateurs.

I Give Up. Windows Is Proof That People Are Too Stupid To Use Computers.

Carla Schroder – 12 février 2009 – LinuxToday Blog
(Traduction Framalang : Olivier et Don Rico)

Et trop cons ou faux-culs pour reconnaître en Windows l’échec qu’il est vraiment. S’il s’agissait de n’importe quel autre type de produit, on l’aurait banni de tous les pays du monde depuis des lustres. Pour parler de la dernière attaque virale affectant Windows, le ver Conficker, la BBC prend son ton nonchalant habituel, ne le décrit comme un ver spécifique à Windows qu’au bout de plusieurs paragraphes, cite des vendeurs d’antivirus comme si leur avis avait un quelconque intérêt, alors que ce ne sont que des nuisibles, pour finir par rejeter la faute sur les utilisateurs :

« Le ver se répand par les réseaux peu sécurisés, les cartes mémoires et les PC qui ne sont pas à jour (…) Microsoft a fait son travail en protégeant les ordinateurs familiaux, mais le ver continue sa progression dans les entreprises qui ont ignoré la mise à jour (…) Bien sûr, le vrai problème vient des utilisateurs n’ayant pas appliqué le correctif sur leurs ordinateurs », ajoute-t-il.

Veuillez m’excuser, il faut que j’aille me défouler sur quelque chose.

BIEN SÛR que c’est la faute des utilisateurs. Ils continuent à utiliser le pourriciel le plus cher et le plus mal conçu de tout le Système solaire. Mais ses défauts incurables ne leurs sont pas imputables. Abandonnez aussi l’idée que ces utilisateurs puissent être secourus par Linux, nous ne voulons PAS qu’ils utilisent Linux. « It is impossible to make anything foolproof, because fools are ingenious » (NdT : « Il est impossible de concevoir un produit infaillible, car les idiots sont ingénieux » Jeu de mots sur foolproof, infaillible et fool, imbécile).

Quand on parle de logiciels malveillants, ce sont des logiciels malveillants pour WINDOWS, PAS des logiciels malveillants pour les ordinateurs

Les armées américaine et anglaise sont mises à mal par des logiciels malveillants pour WINDOWS. Pas des logiciels malveillants pour ordinateurs, des logiciels malveillants pour WINDOWS. Chers journalistes, prenez note. C’est un fait de la plus haute importance. Je sais à quel point vous détestez les faits et les recherches, je vous l’apporte donc sur un plateau. Ne me remerciez pas. Même Wired, dont on attend pourtant mieux, s’est fendu de ces quelques lignes, du mauvais journalisme de première classe :

« La progression rapide d’un ver au sein du réseau de la Défense donne des sueurs froides aux ingénieurs informaticiens du ministère de la Défense. L’utilisation des clés USB, des CD, des cartes mémoire et de tout autre support de stockage est donc prohibée sur leurs réseaux pour essayer d’enrayer la progression du ver. »

À aucun moment l’article ne fait mention de Windows ou de Microsoft. Ça nous a bien fait marrer quand la Royal Navy a mis Windows sur ses sous-marins il y a tout juste quelques semaines. Mais la plaisanterie a assez duré :

« Le ministère de la Défense a confirmé aujourd’hui qu’il a été victime d’un virus ayant causé l’arrêt d’un "petit nombre" de serveurs de la Défense dont, en particulier, le réseau d’administration des bâtiments de la Royal Navy. »

Ils minimisent évidemment le problème, ne vous faites pas de bile, ce n’est rien de grave, circulez il n’y a rien à voir. Après tout, les têtes nucléaires sont à jour avec le SP4 ou une autre connerie du genre. Et là non plus personne n’évoque le mot tabou Windows.

Des avions de chasse cloués au sol par une infection bénigne, sans importance

Celle-là, elle est à se tordre :

« Des avions de chasse français n’étaient pas en mesure de décoller après que des ordinateurs militaires ont été infectés par un virus… Les appareils étaient dans l’incapacité de télécharger leur plan de vol après que les bases de données ont été infectées par un virus Microsoft malgré une alerte donnée quelques mois auparavant. »

Et là encore le problème est minimisé : « L’échange d’informations a été affecté, mais aucune donnée n’a été perdue. C’est un problème de sécurité que nous avions déjà simulé. » Il faut reconnaître que le reporter a eu le courage de dire Microsoft et Windows. Mais malheureusement c’est encore l’utilisateur qui est pointé du doigt.

Microsoft ameute les troupes !

Je vous ai réservé la meilleure histoire pour la fin. Je n’invente RIEN ! Microsoft elle-même, la plus grosse entreprise de logiciel, connue pour les milliers de milliards de dollars qu’elle a engrangé dans ses coffres-forts, qui dépense des milliards de dollars pour le développement de Windows mais dont les codeurs ne parviennent pas à se sortir de ce pétrin, offre donc une récompense :

Microsoft ameute les troupes pour choper Conficker
« Dans un effort coordonné à l’échelle mondiale pour venir à bout de ce que les experts désignent comme ce qui pourrait être le pire logiciel malveillant, des grands noms de l’industrie, du monde universitaire et des services de police joignent leurs efforts dans la chasse au ver Conficker… Microsoft coordonne des actions visant à arracher la tête du ver – offrant une récompense de 250 000 dollars à quiconque pourrait fournir des informations menant à l’arrestation et à la condamnation des responsables de la propagation de Conficker sur Internet. »

Vous devez vraiment lire cet article, on le croirait extrait du Journal des aberrations. Il nous conte comment cette ligue d’experts s’est mise en branle pour combattre ce ver : vendeurs d’antivirus, services secrets, ICANN, Verisign et les universités. Voici la chute de l’histoire :

« Conficker utilise la fonction Autorun de Windows – celle qui lance automatiquement les CD-Rom ou les DVD quand on les insère dans l’ordinateur.
Autorun facilite la vie des utilisateurs, mais désactiver AutoRun, c’est enquiquinant, d’après Nazario. »

Enquiquinant ? J’ai bien lu ? ENQUIQUINANT ???

Je ne sais pas trop, je suis tiraillé entre l’envie d’utiliser un langage peu châtié et celle de me mettre à pleurer. J’imagine alors que Conficker n’est « qu’un léger désagrément ». Et j’imagine que s’ils finissent pas attraper et punir les auteurs de Conficker, les 36 millions d’autres vers Windows, chevaux de Troie Windows et autres logiciels malveillants Windows disparaîtront tous.

Personne ne rejette la faute sur Microsoft

Faut-il donc être un petit génie pour comprendre que « Tiens, si j’arrête d’utiliser ce système d’exploitation de merde je n’aurai plus ces problèmes ! Tiens, peut-être que le fabricant mérite bien un petit procès pour avoir fait subir au monde cette bouse, une bouse qui a engendré des milliards de dollars de dégâts et qui a mis en danger la sécurité publique ! »

Pensez-vous. Après avoir vu le même scénario se répéter des centaines de fois au cours des 13 dernières années, tout ce qu’on peut en conclure, c’est que :

  • Les journalistes sont des crétins.
  • Les militaires sont des crétins.
  • L’industrie des antivirus n’est qu’un énorme parasite qui se satisfait bien de son inefficacité.
  • Les clients de Microsoft sont des crétins.
  • Tout le monde est corrompu… des corrompus bon marché qui plus est.

La seule hypothétique lueur d’espoir que nous ayons, c’est que les milliers de vers Windows vont se mettre en guerre les uns contre les autres et détruiront chaque machine Windows sur Terre. Mais le remède ne serait que de courte durée, car même après un holocauste nucléaire Windows la première chose que les gens feraient serait de se relever, de s’épousseter et d’essayer de redémarrer leur machine pour voir si ça ressuscite leur système.

Notes

[1] Pour comparer, voici une revue de presse francophone (by Google) parlant de Conficker. Est-ce mieux décrit que ce qu’évoque Carla ?

[2] Crédit photo : Nils Geylen (Creative Commons By-Sa)




Plus de 100 vidéos autour du Libre avec Framatube et Blip.tv

La cola de mi perro - CC byFramatube, contraction pas forcément heureuse mais en tout cas signifiante de Framasoft et YouTube, a récemment franchi le cap symbolique des 100 vidéos (104 pour être précis), presque toutes en français ou sous-titrées, offrant par là-même un catalogue « spécialisé » qui pourra être utile à toute personne souhaitant s’informer et diffuser la « culture » et « l’état d’esprit » du logiciel libre, pris au sens large (et nébuleux) du terme.

Bien que toujours considéré en version bêta, nous le faisons aujourd’hui « sortir de l’ombre » pour vous le présenter plus en détail[1].

En version courte et flash

Si vous êtes un lecteur ou un webmaster pressé, et que le format flash ne vous fait pas peur, vous pouvez tout de suite visiter cette page pour avoir l’occasion de toutes les visionner d’un coup à même notre lecteur embarqué (dont vous obtiendrez le code pour en faire de même sur votre propre site si d’aventure vous le souhaitiez). Vous pouvez également sauter tout notre « inutile verbiage » pour accéder directement à une petite sélection bien sentie de ce que l’on pourrait tout aussi improprement qualifier de « Web TV du Libre » du réseau Framasoft.

Mais, comme nous le verrons ci-après, il est aussi possible (et conseillé) de se rendre sur notre compte hébergé par blip.tv.

Le choix blip.tv

À l’origine il s’agissait de stocker et d’archiver les vidéos présentées sur le Framablog. On avait commencé par les héberger sur nos propres serveurs mais par souci de charge (et d’économie de moyens) on a préféré externaliser le service en ouvrant donc un compte sur la plate-forme blip.tv.

Soit dit en passant ce point de départ explique également le caractère quelque peu éclectique de la sélection. Il n’y a pas eu volonté méthodique de référencer toutes les vidéos évoquant le logiciel libre francophone. Cela s’est fait petit à petit en fonction des sujets mis en ligne sur le blog.

Toujours est-il que pourquoi blip.tv et non pas YouTube ou Dailymotion ?

Pour plusieurs raisons à cela.

  • Blip.tv reconnait et sait convertir le format libre Ogg Theora, on peut donc uploader directement dans ce format.
  • Au delà du streaming en flash, blip.tv propose explicitement le téléchargement, non seulement au format flash (.flv) mais aussi au format d’origine, donc pour ce qui nous concerne le Ogg. Ceci permet aux visiteurs qui ne possèdent pas le plugin flash de ne pas être pénalisés.
  • Blip.tv fait mention explicite de la licence des vidéos (lorsque l’on met en ligne une vidéo, il est en effet proposé un champ spécifique où figure par exemple toute la panoplie des Creative Commons).

À ma connaissance, tout ceci est absent des YouTube et autres Dailymotion. Même si l’un (voir ce billet) comme l’autre (site en Ogg dédié au projet OLPC) ont fait quelques progrès récemment. Le plus choquant restant l’absence de mention des licences qu’il aurait été facile d’inclure mais qui aurait alors posé quelques cas de conscience aux utilisateurs, quitte à ce qu’ils choisissent finalement de ne pas uploader la vidéo (ceci expliquant donc cela et aboutissant au fait qu’on trouve un nombre hallucinant de vidéos diffusées illégalement sur ces plate-formes).

Et puis il y a aussi tout ce qui tourne autour de quelque chose que l’on pourrait appeler la confiance. Les « Termes de services » contractés en vous inscrivant à la plate-forme sont plutôt clairs chez blip.tv (voir plus bas) et plutôt confus chez les autres (et je ne vous parle même pas des affres actuelles des utilisateurs, quelque part un peu naïfs, de Facebook). YouTube a ainsi récemment, et sans crier gare, fait apparaitre un moteur de recherche interne à même son lecteur embarqué (quand on passe la souris dessus, c’est très pénible à l’usage). Cela reste gentillet mais que se passera-t-il si un jour ils décident de mettre quelques secondes de pub au démarrage ? Ce sera assurément le pactole avec toutes les vidéos YouTube qui traînent sur des millions de blogs (et, même si ce n’est pas très « courtois » ce genre de petites manipulations doit être certainement prévues dans le « contrat que personne ne lit »). J’ajoute que sur blip.tv, on ne vient pas nous dire « Essayez YouTube dans un autre navigateur Web, téléchargez Google Chrome ».

Sur blip.tv, on lit plutôt ceci :

Nous croyons que le fruit de votre dur travail doit vous appartenir. Quand vous mettez en ligne sur blip.tv vous nous donnez le droit de distribuer votre vidéo tant que vous ne choisissez pas de la supprimer de notre système. Vous n’avez à nous céder aucun droit d’exclusivité, et nous ne vendrons pas votre œuvre, ni ne ferons de la publicité pour celle-ci sans votre autorisation expresse.

Mais surtout cela :

Nous sommes des adeptes convaincus des licences copyleft, telle que Creative Commons les propose. Nous incitons tout le monde à examiner les licences Creative Commons et à les adopter. Chaque vidéo publiée sous licence copyleft enrichit la création collective de façon significative.

Nous vivons à une époque que les historiens qualifieront de démocratisation de l’expression. Tandis qu’autrefois la production et la diffusion des médias étaient concentrées en quelques mains, maintenant elles sont partout : chacun peut proposer un spectacle, une ressource éducative, une expertise. Les contraintes traditionnelles imposées par les coûts de production élevés et la distribution restreinte n’existent plus : maintenant n’importe qui disposant d’une caméra et d’un ordinateur peut produire du contenu vidéo, la seule contrainte est celle qu’imposent les limites de la créativité humaine. Les utilisateurs de blip.tv ont démontré que de telles limites n’existaient pas.

Nous pensons que la libération des moyens de production est une des des choses les plus importantes qui soit arrivée dans l’histoire récente. Elle permet à tout le monde de créer la prochaine comédie géniale, de partager la réalité de la vie quotidienne par-delà les différences culturelles, d’échanger des points de vue politiques et des ressources éducatives. C’est une très bonne chose, et nous nous consacrons à élargir encore cette démocratisation d’une façon qui respecte toujours les droits à la propriété intellectuelle, sur une plateforme où chacun puisse se sentir à l’aise.

Nous sommes pour une nouvelle économie de l’abondance. Il n’est plus dans l’intérêt de quiconque de mettre des chaînes aux médias, de les attacher à un site Web particulier, ou d’être pieds et poings liés à des métadonnées. Nous ne construisons pas un jardin entouré de murailles, nous travaillons activement à faire tomber les murailles pour permettre la libération et le partage ouvert des médias et des contenus des médias sur le Web.

À comparer avec la philosophie générale de la prochaine loi « Internet et Création »…

Merci pour eux donc. J’aurais pu aussi évoquer le fait qu’avec blip.tv vous pouvez dans le même mouvement uploader chez eux mais aussi sur le beau projet qu’est Internet Archive, mais, bon, j’arrête là, on pourrait croire que je suis un VRP de blip.tv 😉

Framatube chez blipt.tv : petit mode d’emploi illustré

Comme cela a été mentionné plus haut, vous pouvez lire les vidéos ou les embarquer via notre lecteur flash disponible sur cette page. Mais se rendre directement sur notre compte blip.tv et y feuilleter le catalogue offre plus d’informations et d’options.

Voici comment se présente une page vidéo sur notre compte blip.tv. Il s’agit en l’occurrence du récent clip Firefox in Motion (découvert of course chez Tristan Nitot).

Copie d'écran - Framatube - Blip.tv

On notera que l’on peut donc embarquer les vidéos une par une plutôt que la « télévision » entière.

Simple et pratique. Sans oublier que vous pouvez vous abonner au flux Framatube de différentes façons :

Firefox 3.1 et sa nouvelle balise vidéo

Nous avons évoqué la prochaine version de Firefox, que nous attendons en version stable avec impatience, dans deux récents billets : Quand Mozilla participe à la libération de la vidéo et Building the world we want, not the one we have.

Retenons que nous pourrons alors lire les vidéos au format Ogg directement dans Firefox sans avoir besoin du moindre plugin. Il suffira, pour le webmaster, d’insérer quelque chose qui ressemblera, en version minimaliste, au code (en HTML 5) suivant :

 <video> <source src="http://framasoft.blip.tv/ma-super-video.ogg"></source> </video> 

(Pour de plus amples informations lire par exemple ce billet de Laurent Jouanneau)

Autrement dit, toutes « nos » vidéos disponibles au format Ogg sur blip.tv pourront être reprises directement par les autres sites, sans passer par la case flash et sans nécessiter de téléchargement pour le visiteur sous Firefox 3.1. Plutôt intéressant non ! Imaginez-vous par exemple, muni de votre Framakey et sa version portable de Firefox 3.1, montrant à votre assistance médusée quelques vidéos issues de Framatube se lançant directement depuis la navigateur, ça peut faire son petit effet…

Intérêt de Framatube

Outre l’avantage pour ce blog, et par extension pour tout le réseau de sites et de projets Framasoft, de proposer des vidéos qui ne tirent pas sur ses serveurs (mais sur celui de blip.tv), il n’est pas forcément inintéressant d’avoir ainsi centralisé de nombreuses ressources vidéos francophones autour du logiciel libre (ressources que nous comptons bien continuer à mettre à jour, voir plus bas le paragraphe qui invite à y participer avec nous).

  • Le visiteur y trouvera matière à s’informer et se tenir au courant de l’actualité francophone en la matière (s’abonner au flux RSS peut être alors judicieux).
  • Le webmaster y puisera les vidéos de son choix dans le format de son choix et participera ainsi à la diffusion du contenu de Framatube, c’est-à-dire « le logiciel libre et son état d’esprit ».
  • Le « conférencier » y cherchera quelques ressources pour une intervention publique (pris au sens large, ça peut être tout aussi bien un éducateur, un associatif sur un stand, un atelier de LUG, un cinéma indépendant, etc.).

Il y aurait également un intérêt « sociologique », mais je marche sur des œufs là, en frisant la condescendance. Mon sentiment de prof, c’est que l’on se retrouve avec toute une catégorie d’internautes, appelons-la « génération YouTube », qui lisent peu (ou en tout cas vite et surtout pas trop long) mais consomment beaucoup de vidéos. Les mêmes, en gros, qui passaient beaucoup de temps devant la télévision avant l’avènement d’Internet. Il y a peut-être moyen ici d’arriver à les toucher pour leur proposer ponctuellement autre chose que les clips people et autres vidéogagueries à la chauffeur de buzz pour les sensibiliser à « nos » problématiques de libertés numériques (qui finissent par devenir des libertés tout court).

Une petite sélection

Vous trouverez la liste de toutes les vidéos, non seulement dans le player mais surtout sur notre compte blip.tv.

Dans la mesure où certaines vidéos n’ont pas pu, faute de temps, être présentées ici, dans la mesure où certains lecteurs du Framablog sont de nouveaux lecteurs (bienvenus, l’abonnement au flux RSS fait office de carte de fidélité), nous vous en proposons ci-dessous une petite sélection, bien entendu non exhaustive, puisque comme cela a été dit nous dépassons désormais la centaine.

Qu’il me soit permis de remercier vivement au passage le travail de JosephK qui aura patiemment converti la quasi-totalité des vidéos au format Ogg.

Conférences « ça, c’est du lourd ! »
  • Michel Serres – La révolution culturelle et cognitive engendrée par les nouvelles technologies
  • Thierry Stœhr – Et les formats ouvœrts
  • Benjamin Bayart – Internet libre ou Minitel 2.0 ? Vous ne l’avez pas encore vue ?
  • Richard Stallman – Parce qu’il faut bien en avoir vue au moins une !
  • Eben Moglen – Le logiciel et la communauté (ma préférée, vous ne l’avez pas encore vue ?)
  • Tim Morley – Espéranto et logiciel libre
Politique (ou apparenté)
  • [Obama et l’Open Source|http://framatube.org/media/cnn-obama-et-lopensource – Le modèle bottom-up et la référence au livre La cathédrale et le bazar
  • Citation de Jacques Attali – Révélatrice ?
  • Michel Rocard – À propos de Ségolène et… des logiciels libres !
  • Jérôme Relinger – PC et adjoint au Maire du 13e arrondissement de Paris
  • François Bayrou – Sa pertinente et éloquente vision des deux mondes
Communauté
  • Ubuntu – Christophe Sauthier, président de l’association francophone
  • Linux à Perpignan – Un exemple exemplaire de diffusion territoriale du logiciel libre
Free Culture
Éducation
Vu à la télé
Pause publicitaire
Les inclassables
Framasofteries

Voilà, c’est déjà pas mal ! Et n’oubliez pas bien entendu de vous rendre régulièrement sur les sites qui non plus diffusent mais directement produisent des vidéos. Je pense par exemple au dépôt de l’APRIL, à Kassandre, Ralamax ou encore Lprod (à compléter dans les commentaires).

Participer au projet Framatube

Si vous trouvez ce projet un tant soit peu pertinent et utile, vous êtes cordialement invité à vous joindre à nous. Nous sommes toujours en sous-effectif chronique (et toujours contents de faire de nouvelles rencontres). Pour ce faire il suffit de nous envoyer un message.

Ce ne sont pas les besoins qui manquent en effet. Il conviendrait d’abord d’améliorer les descriptions souvent trop succinctes des vidéos (il manque ainsi presque systématiquement pour le moment la mention de la source) mais également d’exercer un travail de veille pour évaluer les vidéos « candidates », sans oublier les éventuelles tâches techniques de conversion, montage, etc.

Merci de votre attention, de votre éventuelle participation et n’hésitez pas à nous proposer, dans les commentaires, des vidéos non référencées susceptibles de venir grossir le rang de notre canal (quitte à ce qu’elles ne soient pas en français mais tellement intéressantes que ça vaille le coup de déclencher la « procédure Framalang » de transcription, traduction, sous-titrage).

Notes

[1] Crédit photo : La cola de mi perro (Creative Commons By)




Les droits d’auteur pour les nuls (dont certains nous gouvernent)

Marfis75 - CC by-saMaître Eolas vient de nous pondre un excellent billet intitulé Les droits d’auteurs pour les nuls.

Les nuls en question, ce sont d’abord vous et moi, qui trouveront là l’occasion de découvrir, parfaire ou mettre à jour leurs connaissances sur le sujet. Mais ce sont aussi et surtout ceux qui nous gouvernent et qui s’apprêtent à faire voter une loi scélérate (n’ayons pas peur des mots), à savoir la loi Création et Internet (ou Hadopi)[1].

Arguant de mon « droit de courte citation sous réserve que soient indiqués clairement le nom de l’auteur et la source » (ce qui est déjà fait ci-dessus), je n’ai pu résister à vous en recopier les derniers paragraphes.

Deux mots pour conclure, comme disent les avocats qui en ont encore deux cent à dire : d’une part, la protection des œuvres de l’esprit, et le droit de leurs auteurs de les exploiter commercialement est pour moi tout à fait légitime. Permettre à un artiste de vivre de son art est normal et sain pour la vie artistique. Je ne suis pas en guerre contre les droits d’auteur. J’émets simplement des doutes sur la réalité de l’étendue du préjudice que les ayants-droits prétendent subir à cause du téléchargement par des particuliers (télécharger une œuvre ne fait pas obstacle à l’acheter par la suite pour l’avoir en meilleure qualité ou bénéficier des bonus, et rien ne permet d’affirmer que ceux qui ont téléchargé une œuvre l’aurait acheté s’ils avaient été mis dans l’impossibilité de se la procurer de cette façon), et constate que le conservatisme de cette industrie qui espère arrêter le court du temps et de la technologie plutôt que faire face aux défis que représentent l’évolution de la technique est proprement suicidaire. Nous sommes en 2009, et l’industrie musicale commence tout juste à proposer légalement des titres au format largement compatible, ayant semble-t-il compris la bêtise que constituaient les mesures techniques de protection qui protégeaient surtout contre l’écoute du morceau.

Car, et c’est là ma deuxième observation, rappelez vous ce que je vous ai dit. Le droit d’auteur est apparu pour protéger les auteurs contre les éditeurs qui s’enrichissaient sur leur dos, puis contre les producteurs de spectacle et les interprètes qui faisaient de même. Le combat des ayant-droits aujourd’hui présente une grande nouveauté : il oppose les ayant-droits à leur public, qui ne s’enrichit pas sur leur dos. Les musiciens insultent ceux qui apprécient leur musique en les traitant de voleurs, les réalisateurs font de même avec ceux qui apprécient leur film en les traitant de dealers.

Je ne suis pas expert en marketing, mais qu’il me soit permis d’émettre des doutes sur la viabilité de cette attitude, et même de sa simple rationalité.

Quelle est la différence entre la loi DADVSI et cette loi Hadopi qui s’invite trois ans plus tard à l’Assemblée ? Aucune, ou presque, du côté du législateur, qui n’a semble-t-il pas retenu la leçon. Par contre on sent bien que la « société civile » est plus impliquée, comme l’illustre justement cette intervention qui sort du champ des défenseurs du logiciel libre et sa culture.

Quitte à faire momentanément le dos rond, il y a de quoi être optimisme pour l’avenir…

Notes

[1] Crédit photo : Marfis75 (Creative Commons (By-Sa)




La loi Création et Internet, le chant du cygne et le maquis

Tempo no tempo - CC byCette loi « Création et Internet » s’apparente de plus en plus au chant du cygne d’une industrie culturelle totalement dépassée par les événements et qui s’arc-boute sur ce qu’il lui reste encore de privilèges hérités du siècle dernier. Associée avec la politique web 1.0 d’un Sarkozy, tout est réuni pour casser la société numérique en deux et voir les éléments les plus progressistes du pays prendre le maquis virtuel pour tenter de sauver ce qui peut encore l’être tant que la neutralité du Net sera garantie.

Un peu emphatique ce premier paragraphe non ? Allez, tant, pis, je le garde quand même 😉

En fait il s’agissait juste d’introduire cet article du collectif Libre Accès, qui fait justement partie de ceux qui sont bien décidés à ne pas s’en laisser compter[1].

Edit : Dans un autre registre, on pourra également lire cette gore mais assez désopilante BD de Flock.

La libre circulation de l’Art est la garantie de notre liberté

Libre Accès – Lettre d’information – février 2009
Article sous Licence Art Libre

La préface de La crise de la culture d’Hannah Arendt commence par cette citation d’un poème de René Char : « Notre héritage n’est précédé d’aucun testament », faisant référence à son choix d’entrer en résistance, à la prise de conscience que lutter contre la tyrannie restitue à chacun, au sein de l’espace public, sa liberté.

La circulation des œuvres de l’esprit a toujours été un enjeu majeur ; les amateurs du totalitarisme ont une forte passion morbide pour brûler des livres et imposer leur pensée unique aux masses. Le hacker Soljenitsyne en a su quelque chose : la parution de L’Archipel du Goulag, qui arriva en Europe de l’Ouest sous la forme d’un microfilm, est un des premiers exemples de l’enjeu que représente la numérisation des livres pour notre civilisation.

Il reste encore des hommes et des femmes dans le monde pour qui les actes de création constituent autant d’actes de résistances à la tyrannie. Actes de dignité où écrire, filmer, peindre, peut constituer un véritable crime passible de la peine de mort. Il est important de garder cette idée présente à l’esprit et de ne pas oublier qu’Internet représente rien de moins que de notre liberté de créer, d’échanger et de partager.

L’essence et l’avantage d’Internet est sa décentralisation. C’est l’outil rêvé de tous les amoureux de la liberté, encyclopédistes des Lumières, amis de l’éducation populaire et de l’art, leur permettant de diffuser leurs idées et les conserver. Bibliothèque-monde de toutes les cultures, lieu de production et de circulation de la pensée, l’art pour tous accessible, outil de pair à pair par excellence, Internet est un idéal des Lumières. C’est un espace d’expression, de réciprocité, de critique et donc de création.

En termes économiques, il serait temps de prendre conscience de faits essentiels qui se dessinent depuis son apparition :

  • l’ancien modèle des médias était basé sur la diffusion et la consommation, tandis que le nouveau modèle s’est développé sur la participation et l’expression;
  • l’élément critique de l’ancienne chaîne de valeur reposait sur la distribution, tandis que la nouvelle chaîne de valeur est centrée sur la découverte et la propagation;
  • il faut porter son attention là où l’argent s’est déplacé, là où les gens dépensent leur argent, sans occulter dans le même temps que les circuits financiers et produits dérivés se sont globalisés, hors de tout contrôle des Etats-nations et des territoires.

Ce sont là des données de base, familières à tout acteur informé de l’économie numérique. Il est donc particulièrement inquiétant pour nos démocraties de constater que ces mêmes lobbies financiers n’ont de cesse de vouloir contrôler Internet par des méthodes non seulement arbitraires et irrationnelles mais également tout à fait dépassées.

Les arguments justifiant la mise sous contrôle du réseau se réclament paradoxalement de la défense de la culture, alors que c’est justement elle qui est attaquée ; au même titre qu’ils invoquent des raisons pseudo-économiques, alors que par essence l’économie numérique refuse radicalement un contrôle central. Ce paradoxe a d’ailleurs été brillamment dénoncé par les situationnistes qui écrivaient dès 1967 : « la fin de l’histoire de la culture se manifeste par deux côtés opposés : le projet de son dépassement dans l’histoire totale, et l’organisation de son maintien en tant qu’objet mort, dans la contemplation spectaculaire »

Ces objets morts, stars télévisuelles qui ont l’odeur des icônes des églises mais sans leur efficacité, sont mis en avant pour justifier tous les abus du contrôle d’Internet. La mort de notre liberté est préparée dans une tentative vaine et pitoyable de conjurer la mort de l’artiste télévisé.

La loi « Création et Internet » souhaiterait que l’on installât un logiciel sur chacun de nos ordinateurs pour prouver que nous ne sommes pas des copieurs d’œuvres numériques interdites. Absurdité fondamentale : l’informatique, Internet, sont intrinsèquement copie, comme le rappelait Intel Corporation dans son Amicus brief lors du procès MGM vs Grokster.

L’argument de la culture en danger, servi à satiété, est un mensonge. La culture foisonne, les créateurs, de plus en plus nombreux, ne cessent de créer. Le public a soif d’œuvres auxquelles il accède de plus en plus en amateur, participant, co-créateur, et non plus en consommateur. La dissémination et l’accès de tous et par tous à la culture, voilà ce qui est en danger.
Et il est déconcertant de voir que c’est au nom du droit d’auteur, pour défendre la création, que l’on s’apprête à faire voter le projet de loi « Création et Internet », loi liberticide par excellence. Les comités de censure sont-il en train d’être remplacés par les Majors à qui le gouvernement français veut déléguer des pouvoirs arbitraires de police de l’Internet ?
Le pouvoir oligopolistique des Majors renforcé par la puissance publique pourrait contrôler l’ensemble des diffusions culturelles par une intégration verticale anti-économique et anti-concurrentielle : des tuyaux Internet, des radios, des télévisions, des journaux, des salles de concert…

C’est donc bien la liberté de l’auteur et son indépendance qui sont attaquées. Il n’est guère étonnant que de plus en plus d’auteurs et d’interprètes, voulant expérimenter d’autres dispositifs de création, quittent la SACEM (dans la musique) et les circuits classiques de distribution, pour mieux maîtriser leurs créations. Tout le monde n’est pas un adepte de la chanson à 2 minutes 30. La SACEM, influencée par les Majors ne sait pas rémunérer équitablement les auteurs occasionnellement diffusés sur les radios, par exemple. Ses modèles de répartitions sont basés sur des données partielles, accordant une prime aux plus gros diffusés. La production de la création doit correspondre au moule marketing de l’industrie culturelle ou ne pas exister.

De fait, il y a de plus en plus d’artistes qui, pour être en accord avec leur processus créatif, s’auto-produisent et s’auto-diffusent via Internet. Pour protéger leurs œuvres et garantir le partage de celles-ci, ils utilisent différentes licences telles la Licence Art Libre ou les Creative Commons.
Ils retrouvent ainsi leurs libertés premières d’auteurs : choisir les possibilités de modification de leurs œuvres, d’utilisation, de collaboration, de rémunération. Certains auteurs souhaitent privilégier la diffusion et la pérennisation de leurs œuvres, plutôt que leur rétribution financière.

Antoine Moreau, fondateur de la Licence Art Libre écrit : « Je crois pouvoir dire alors que le copyleft participe bien de ce récit des rêves ou des visions qui va à contre-temps de tout ce qui prétend dominer le cours de la création. C’est une liberté intempestive qui ne se soumet pas à l’injonction de l’actualité mais envisage un temps élargi, qui va très loin dans le passé, très loin dans l’avenir et très profondément dans le présent ».

Un musicien qui vient de terminer la création d’une œuvre musicale peut en un clic être écouté d’Afrique en Asie. Internet offre aux artistes un moyen de propagation inédit auquel les Majors ne s’étaient pas préparés. La plupart des plateformes de téléchargement d’œuvres sont multilingues. Il n’est plus rare qu’un artiste qui ne trouve pas son public localement le trouve à l’autre bout du monde.

C’est une vraie chance pour les auteurs, et pour l’humanité. Des groupes de musique comme Nine Inch Nails sont en passe de démontrer que la libre diffusion des œuvres n’empêche pas les artistes de trouver des modes de rémunérations concrets via la vente de places de concert ou de disques, avec toute une gamme possible de services et de produits dérivés.

Il y a bien un imaginaire défaillant dans les débats actuels sur la rémunération des auteurs et artistes-interprètes. Les moines copistes de l’industrie du DVD tentent d’imposer le même rapport de force que lors de la naissance de l’imprimerie, voulant casser une technologie brisant leur monopole. Frédéric Bastiat, économiste libéral français, les décrivit fort bien dans sa Pétition des Fabricants de Chandelles geignant contre la concurrence indue du soleil.

C’est l’auteur/artiste interprète à qui nous devons garantir une rémunération et non pas à l’industrie culturelle. La démocratisation des outils d’autoproduction et d’autodiffusion dans tous les Arts (cinématographique, musical, graphique, etc.) doit être prise en considération. Il appartient aux pouvoirs publics de savoir s’ils veulent soutenir les Majors ou les auteurs. N’en déplaise aux moines copistes de l’industrie du DVD et à leurs icônes télévisées, la création est foisonnante sur Internet et il est temps qu’elle soit reconnue.

S’il est fondamental de garantir cette liberté de choix de diffusion des œuvres et de leur circulation, nous devons être capables d’adapter le financement de l’art à l’heure d’Internet, sachant que sa défense ne peut être, ni en contradiction avec les valeurs démocratiques, ni avec les technologies actuelles. Comme le disait Michel Vivant en 2003 au Colloque de l’UNESCO ”Droit d’auteur et droits voisins dans la société de l’information” : « Il ne s’agit pas de s’incliner devant le fait. Il s’agit de ne pas nier la réalité. ».

La libre circulation de l’Art garantit notre humanité, le pouvoir de se penser homme, voire humanité. On a besoin de se connaître à travers les grottes de Lascaux, dans les ruines de Babel. Antoine Moreau rappelle : « Il n’y a pas d’ouvrages de Platon et il n’y en aura pas. Ce qu’à présent l’on désigne sous ce nom est de Socrate au temps de sa belle jeunesse. Adieu et obéis-moi. Aussitôt que tu auras lu et relu cette lettre, brûle-la. La notion d’auteur, qui n’existe pas dans la Grèce Antique ni au Moyen-Âge où l’autorité émanait des dieux ou de Dieu, apparut. ». Garantir la libre circulation des œuvres d’Art, avec comme seul propriétaire, en dernier ressort, l’humanité, est donc essentiel. Pas de Copyright sur les œuvres de Lascaux, mais des amateurs d’Art archéologues entretenant notre patrimoine.

Le devoir de garantir la circulation de l’Art comme patrimoine de l’humanité oblige à penser sa préservation. Pas les salaires mirobolant des icônes télévisés mais de ceux qui, en premiers garantissent une pratique artistique : professeurs d’Art (plastique, musique, cinéma…), Maisons de la Culture, bibliothèques, espaces de pratique artistique, cinémas indépendants, universités… Il s’agit de multiplier les lieux ou les Artistes et les amateurs d’Art peuvent créer, échanger, écouter, pour maintenir à chaque Art les amateurs éclairés qui soutiendront toujours les Artistes/Auteurs.

Le financement de l’Art (pour les artistes souhaitant en bénéficier), doit être repensé par les puissances publiques. Préserver le seul intérêt des Majors, quand le statut des intermittents est menacé et le statut des artistes peintres est presque inexistant, démontre l’abandon de toute politique culturelle ambitieuse.
Si l’on songe que nous, citoyens, par les impôts, taxes et redevances que nous payons, sommes certainement le plus grand producteur culturel français, comment expliquer que l’on nous dénie toute participation aux débats en cours, et que l’on prétende privatiser et nous faire payer des œuvres que nous avons déjà financées? Est-il par exemple normal que l’Éducation Nationale, selon les accords sectoriels post-DADVSI, paye 4 millions d’euro par an pour n’avoir le droit, en ce qui concerne les œuvres audiovisuelles, que d’utiliser les chaînes hertziennes classiques ? Cela doit changer.
C’est en tant qu’amateurs d’Art et citoyens exigeants que nous devons être comptables des politiques culturelles et de leur diffusion. Il en va de nos identités et cultures plurielles, dont il faut empêcher l’uniformisation par une industrie culturelle qui, de TF1, à France 2 ou M6, montre les mêmes séries télévisées et les mêmes discours autistes du Président du tout nouveau Conseil de la création artistique.

Il incombe de défendre nos libertés concomitantes d’un accès à l’art pour tous. De ce point de vue, il est intéressant de noter que les Majors essaient d’imposer, comme les semenciers de Monsanto, un catalogue des œuvres dites protégées, au mépris du droit d’auteur censé protéger tout auteur d’une oeuvre de l’esprit. Il y a donc bien des logiques de domination économique qui sont à l’œuvre pour la privatisation des biens communs, contre lesquelles nous devons résister.

L’aboutissement des projets de Monsanto, comme le fameux « catalogue des semences » interdisant aux agriculteurs et jardiniers le droit de conserver, utiliser, échanger et vendre les semences ou du matériel de multiplication reproduits à la ferme, doit nous rendre vigilants sur les tentatives des Majors d’imposer le leur, fait du même petit nombre d’œuvres et rééditions formatées et sans risque.

Il y a un foisonnement d’Auteurs/Artistes talentueux qui autorisent la diffusion de leurs œuvres via la Licence Art Libre et les Creative Commons, plus de 30 000 œuvres musicales sur la plateforme Dogmazic, 10 000 œuvres littéraires sur le site de la maison d’édition InLibroVeritas, et dans le monde, d’après des estimations minimales, 130 millions d’œuvres et documents sous Creative Commons en juin 2008. Il est de notre devoir de les soutenir, car ils sont à l’avant-garde d’un mouvement de résistance, se livrant à la lutte pour la libre circulation de l’Art et donc notre liberté.

Pour Libre Accès, Jérémie Nestel (MACAQ, Radio du Ministère de la Crise du Logement), Bituur Esztreym (co-fondateur de Musique Libre ! et de dogmazic.net), Eric Aouanès (président de l’association Musique Libre ! et co-fondateur de la plateforme Dogmazic), Didier Guillon-Cottard (Festival Art is chaud) Mathieu Pasquini (gérant et fondateur de la maison d’édition InLibroVeritas).

Notes

[1] Crédit photo : Tempo no tempo (Creative Commons By)