Belgique Photographique

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Un billet « on s’fait plaisir » légèrement hors du cadre…

Le Framablog est en vacance, et moi aussi, pour une petite semaine en Belgique. Que tous ceux qui ont eu à subir un jour l’interminable diaporama de sombres connaissances tout frais rentrées de voyage (et fiers d’exhiber leurs trophées photographiques à ceux qui n’y étaient pas) passent illico leur chemin. Rendez-vous, si tout va bien, pour le prochain billet qui devrait reparler des joies et des affres du logiciel, du libre voire même des deux réunies.

Bon, ceci posé, me voici donc avec un nouvel appareil photo dans les mains. Oh, c’est un petit compact fort modeste et pas bien performant mais c’est suffisant pour prendre à la volée quelques instantanées.

Pourquoi la Belgique au mois d’août ? D’abord parce que pourquoi pas, ensuite pour voir un peu comment va ce pays frère qui traverse actuellement quelques petites perturbations communautaires, et enfin parce qu’en ces temps de pouvoir d’achat difficile, je suis de ceux qui sautent sur les occasions d’appartements d’amis qui se libèrent en été (sachant qu’il faut bien quelqu’un pour arroser les plantes et nourrir le chat). L’année dernière c’était Berlin (que je vous recommande), cette fois-ci ce sera donc Bruxelles (que je vous recommande également). Un jour, promis, j’arrête la bière…

On a commencé par Ostende. Histoire de voir un peu la mer du côté du Nord. Histoire de voir aussi un peu le pays du côté flamand.

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Le chanteur Arno vient de là-bas. Il convenait donc de vérifier au plus près si effectivement c’était chouette les filles du bord de mer.

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Au plus près j’ai dit…

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Voilà, c’est mieux !

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La côte flamande, comment dire, c’est loin d’être inintéressant mais c’est un brin monotone. Pour un œil non exercé, rien ne ressemble plus à une station balnéaire de la côte flamande qu’une autre station balnéaire de la côte flamande. Faut dire que géométriquement parlant c’est pas la fractale bretonne, c’est la pure ligne droite d’une plage qui n’en finit pas.

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Il y a un tram qui longe toute la côte (2h23 et 70 arrêts). Ici c’est le terminus, De Panne, où une petite colonie bigarrée s’amusait dans l’eau sous un ciel que Brel n’aurait pas renié.

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Nous sommes aussi passés par Gand (ou Gent pour être plus précis). Une ville d’eau, une ville vélo, tout pour me plaire en fait. Le seul bémol de la journée c’est quand N. a décidé d’entrer dans le H&M de la grand-rue commerçante du coin. Me voici donc avec une bonne demi-heure devant moi (évaluation basse), mais j’ai mon petit appareil photo pour m’occuper.

Un petit couple par-ci…

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…une solitaire par-là…

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…et une icône floue dans la foulée.

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Elle en met du temps tout d’même, N., à sortir du magasin…

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Sinon c’était donc Bruxelles dans la plus pure tradition du tourisme bobo (le touriste bobo se reconnait facilement : c’est celui qui se croit ni touriste ni bobo).

Ville tout à fait charmante et accueillante au demeurant. Un peu humide parfois certes…

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Mais le soleil pointe le bout de son nez de temps en temps, faut pas exagérer !

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Je sais pas vous mais moi les vacances urbaines c’est souvent d’un café à un autre café (et dans les intervalles, un peu de musées, un peu de marchés, quelques places célèbres et… emballé c’est pesé !).

Vais en profiter, tiens, pour vous faire partager mes bonnes adresses sous la forme de liens vers l’exraordinaire projet OpenStreetMap (comme quoi y’a quand même un peu de libre dans ce billet).

Ici on se trouve autour de l’incontournable place Saint-Géry. Avec mes voisins de droite…

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…et mes voisins d’en face (dont l’un a visiblement un penchant pour l’autre).

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Juste à côté, le café Au Soleil, rue du Marché au Charbon.

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Sans oublier le célèbre Café Bota (dans le parc du Botanique).

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Et si pas de café dans les environs y’a qu’à en improviser un comme ici Place Poelaert.

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Et pour conclure, retour sur Arno avec cette petite citation qui illustre bien la tradition surréaliste locale : « La Belgique n’existe pas. Je le sais, j’y habite ! »




Tous les jeudis rendez-vous à la médiathèque de Perpignan

Une petite vidéo pour vous présenter à la volée une initiative tout à fait intéressante d’Annexe 21, centre de ressources en logiciels libres, à la médiathèque de Perpignan.

—> La vidéo au format webm

Ce n’est pas autrement que nous finirons par déplacer des montagnes




Le journal d’un novice ou THE feuilleton de l’été

Illustration exemplaire et grand public des trois slogans historiques de Framasoft : « Partir de Windows pour découvrir le Libre », « Les aventures d’un peuple migrateur » et « La route est longue mais la voie est libre ». Un billet qui aurait pu s’intituler « Pas de pièges au pays des bisounours ! »

Copie d'écran - Journal d'un novice - Erwan Cario

Quand bien même la communauté du logiciel libre porte depuis longtemps un certains discours, il est toujours non seulement agréable mais également fort utile de le voir repris, expérience concrète à l’appui, par certains de nos Grand Médias sous la plume de journalistes qui, excusez mon outrecuidance, ont la bonne idée de faire leur métier.

Faire le métier c’est ici partir à la découverte de Linux[1] sans a priori, sans taire les difficultés rencontrées, mais en mettant réellement les mains dans le camboui. C’est également être capable de raconter l’épopée dans un style simple, clair, précis et non dénué d’un certain humour à la Candide qui ne gâche rien.

Tout ça pour dire (péremptoirement) qu’Erwan Cario nous livre avec sa chronique de l’été Linux : Le journal d’un novice un témoignage précieux à marquer d’une pierre blanche. Témoignage dont l’objectivité est assurément le meilleur avocat du logiciel libre, le tout sur un site à forte audience[2] (en l’occurrence les Écrans de Libération).

À faire passer à son voisin… histoire de montrer à ce dernier qu’il n’y a pas que les pro-libres qui sont enthousiasmés par le libre. Histoire de lui montrer également plus prosaïquement que Linux ça marche et ça marche pour tout le monde vu que même un utilisateur Windows 15-ans-d’âge arrive fort bien à se dépatouiller avec. Histoire de lui montrer qu’en attendant l’abolition de la vente liée il n’y a pas que l’alternative Mac à la (bien réelle) déception Vista. Histoire de lui montrer in fine qu’avec Linux vous avez Linux plus peut-être un petit supplément d’âme que certains appellent liberté…

Conclusion : merci Monsieur Erwan Cario 🙂

Copie d'écran - Journal d'un novice - Erwan Cario

Et pour vous donner envie d’aller y voir de plus près[3], voici quelques (parfois savoureux) morceaux choisis.

Extrait de l’introduction :

« Je n’ai jamais eu de religion en ce qui concerne les systèmes d’exploitation. Du coup, j’ai toujours utilisé Windows. Par défaut. (…) C’est d’ailleurs pour cette dernière raison que mon PC de bureau personnel tourne actuellement sous Vista. Encore un choix par défaut lors de l’achat de la machine. »

« Mais ça va changer. La révolution est en marche. Je me suis acheté un ordinateur portable… sous Linux. Pourquoi ? Pas vraiment un acte militant, en fait. Je me suis rendu compte que l’énorme majorité des logiciels que j’utilise quotidiennement sont soit libres (…), soit accessibles via un navigateur (…). Il y a encore quelques exceptions (…) mais rien d’insurmontable. Dans ces conditions, il paraît presque saugrenu de vouloir payer une licence pour un système d’exploitation. Et puis, il faut l’avouer, partir à l’inconnu, c’est plutôt excitant. Le seul danger : finir en t-shirt avec un pingouin dessus. Mais je prends le risque. »

Extrait de l’épisode 1 :

« L’utilisateur de Windows que je suis n’est pas vraiment perdu. (…) Presque trop familier tout ça. (…) Il doit y avoir un piège. Si c’était vraiment aussi simple, plus personne n’utiliserait Windows. »

Extrait de l’épisode 2 :

« Mais pourquoi ça n’avance plus ? Tout semblait aller pour le mieux, et puis là, plus rien depuis dix minutes. »

Extrait de l’épisode 3 :

« Maintenant, je pourrai dire que j’utilise Bittorent pour récupérer des distributions Linux. »

Extrait de l’épisode 4 :

« Ça fait vraiment une impression étrange d’être étonné à ce point après tant d’années passées devant un écran d’ordinateur. Je n’ai rien eu à aller chercher. Rien à télécharger sur le bureau, à dézipper, à exécuter, à choisir entre « Installation standard » ou « Installation personnalisée », à valider trois fois, à supprimer les fichiers d’installation qui ne servent plus à rien. Rien de tout ça. Vlc est là, dans le menu « Applications », n’attendant qu’un clic de ma part pour se lancer. »

Extrait de l’épisode 5 :

« A ce point de l’expérience, j’ai un ordinateur qui fonctionne très bien, avec 95% des programmes nécessaires à son utilisation quotidienne. Ce n’était pas bien sorcier, vous l’aurez remarqué. Presque un peu décevant. Passer à Ubuntu n’est même pas un défi, c’est juste un choix. Mais arrive forcément un moment où la bidouille et la découverte un peu au hasard de fonctionnalités (…) trouvent leurs limites. (…) La solution la plus évidente, c’est l’ami qui-s’y-connaît. (…) Sous Linux, en fait, il y a mieux. Il y a la communauté qui-s’y-connaît. C’est sans doute un des trucs les plus impressionnants de l’univers du libre : la solidarité et l’entraide. (…) »

« Sur ubuntu-fr, il y a généralement déjà la réponse à la question qu’on se pose, c’est assez magique. (…) On cherche d’abord dans la documentation (…) Sinon, on recherche dans les forums. Et là, c’est dingue le nombre de gens qui ont déjà eu le même souci ! Et plusieurs bons samaritains auront déjà expliqué comment s’en sortir. (…) Je suis conscient que cette description ressemble un peu à « L’informatique au pays des bisounours », mais ça n’en est pas si éloigné. Bon, les bisounours en question parlent un langage étrange, sont quelque fois un petit peu sectaires et souvent sur-motivés par leur sujet de prédilection, quand ils ne finissent pas par s’engueuler pour des raisons obscures. Mais pour le novice, c’est l’assurance de pouvoir réussir ses premiers pas dans l’univers d’Ubuntu. »

Extrait de l’épisode 6 :

« Croyez-le ou non, si j’avais voulu, j’aurais pu ouvrir un terminal et taper « sudo apt-get install myfreetv ». Mais ça aurait été pour faire mon intéressant. Je préfère quand même cliquer sur des boutons. Il est trop tôt encore pour en être sûr, mais je commence à croire qu’on peut utiliser Ubuntu sans avoir à taper une ligne de commande. Et c’est sans doute un des plus grand progrès des dernières années. N’en déplaise aux bisounours puristes. »

Extrait de l’épisode 7 :

« On ne rigole pas, avec Linux. Attention, C’est du sérieux ! C’est une philosophie, même, qui trouve ses racines en 1984 avec le lancement par Richard Stallman du projet GNU. Donc, si Linux (oups, GNU/Linux) est austère, c’est normal. Quand des développeurs du monde entier réunissent leurs forces pour réaliser un système libre en face de multinationales puissantes qui dépensent des milliards pour la même chose, on peut se réjouir d’avoir quelque chose de stable et d’efficace. L’interface bling bling de Vista, avec ses fenêtres qui virevoltent dans tous les sens, on n’en a pas besoin, sous Linux. On est au dessus de ça. »

« Sous Linux, on peut travailler sur différents bureaux virtuels. Un bureau virtuel, c’est un peu comme si vous aviez plusieurs écrans avec à chaque fois un bureau utilisable, ce qui permet d’avoir plusieurs espaces de travail. Et avec Compiz-Fusion, on peut basculer très simplement d’un bureau à l’autre grâce à un cube qui tourne. Ca ne sert pas à grand-chose, certes, mais qu’est-ce que c’est classe ! (…) Evidemment, rien de tout ceci n’est vraiment capital, mais c’est presque obligatoire pour ouvrir le système Linux au grand public. »

Extrait de l’épisode 8 :

« On ne va pas tarder à en voir le bout, de ce journal. Maintenant que j’ai un Linux qui tourne (au sens propre comme au figuré), je ne vais pas continuer indéfiniment à raconter comment j’ai enfin réussi à traiter une image sur The Gimp, ou comment le système de mise à jour fonctionne au quotidien (…) Une fois le contrat rempli, on se fout un peu de savoir comment s’appelle le système. Bon, en fait non. Il reste toujours cette petite fierté (bien compréhensible tant qu’elle ne tourne pas au snobisme) de tourner sur un système libre. C’est vrai que c’est quand même agréable.. »

« Mais j’ai encore quelques détails à régler. Matériels, entre autres. (…) Jean-Baptiste Théou débarque dans les commentaires de ce journal et explique : « J’ai vu aussi vos soucis avec votre webcam. Je vous propose sans prétention ma modeste participation. Je développe actuellement un logiciel, Easycam, qui a pour but de faciliter l’installation de webcams sous Ubuntu. Ce logiciel s’oriente véritablement pour le débutant. Ce logiciel détecte pour le moment un peu moins de 500 webcams. La vôtre sera peut-être dans le lot. Si elle ne l’est pas, je ferai en sorte de la rendre compatible, si possible. » Fichtre. Je veux quand même préciser que je n’ai pas fait ce journal pour bénéficier d’une assistance à domicile, mais depuis le début de l’aventure, je suis impressionné par la solidarité et la gentillesse des quelques fondu(e)s de Linux qui traînent dans le coin. Et là, j’avoue que j’en suis resté un peu bouche bée. »

Extrait de l’épisode 9 :

« Aujourd’hui, j’ai travaillé toute la journée sur mon portable sous Ubuntu. Ça se passe plutôt très bien. C’est vrai que le fait de s’occuper d’un site web, et donc de passer son temps sur un navigateur web simplifie grandement les choses. La boutade de Tristan Nitot, président de Mozilla Europe, s’applique très bien à mon cas : « le système d’exploitation n’est qu’une collection de drivers qui sert à faire tourner un navigateur ». Mais bon, j’ai quand même mis The Gimp sur un bureau et Firefox sur un autre rien que pour le plaisir de faire tourner le cube. »

« Bref, aucun problème durant cette journée de travail. Si, j’en vois un poindre à l’horizon : je ne vais pas ramener tous les jours mon portable à Libé, et je vais donc continuer à travailler sous Windows. Et si je m’habitue trop à Ubuntu, et à tous ces sympathiques petits bidules, mon cerveau risque peut-être d’avoir du mal à supporter la transition quotidienne. »

Extrait de l’épisode 10 :

« Si j’avais fait une liste des trucs à faire avant de déclarer mon ordinateur comme étant complètement fonctionnel, avec des cases à cocher en face de chaque élément, je pense que je viendrais de cocher la dernière. »

Extrait de l’épisode 11 :

« Je sais bien que tout ne sera jamais parfait. Il y aura toujours ces petits trucs pénibles. Même sous Ubuntu. Mais je les avais déjà avant. En bien pire, souvent. Pour l’instant, la simplicité d’accès au quotidien et tous ces petits trucs qui simplifient la vie font que je ne suis pas prêt de lâcher mon héron. »

Extrait de l’épilogue :

« Il est donc temps de conclure ce journal. Si vous avez lu les différents épisodes, vous aurez compris que se mettre à Linux n’a rien d’éprouvant. C’est même une expérience plutôt amusante faite de découvertes et de surprises. Je n’avais pas, c’est vrai, de grandes craintes avant de m’attaquer à ce nouveau système. Mais quand même. Je ne m’attendais pas à autant de convivialité. Je pensais tomber sur quelque chose de plus rugueux. Un système sans doute très intéressant au bout de quelques semaines d’utilisation, mais nécessitant un certain apprentissage, surtout pour l’utilisateur de Windows que je suis. Et puis, finalement, non. J’ai tout de suite eu l’impression d’être en territoire ami. »

« S’il reste un obstacle pour passer à Linux, c’est sans doute la peur des ordinateurs. Elle n’est pas liée à Linux, évidemment. Elle existe aussi pour Windows. Il ne faut pas avoir peur de la machine pour partir à la découverte d’un système (…) Si j’ai pu réussir cette transition, c’est que je n’ai pas eu peur de me planter, de cliquer sur le mauvais bouton, de faire des erreurs. Et que je connais plutôt bien les ordinateurs (par rapport à la moyenne, pas vraiment en comparaison de quelques linuxiens qui ont commenté les épisodes de ce journal !). Dans ces conditions, passer à Ubuntu est un jeu d’enfant. Même s’il faut lire quelques modes d’emploi de temps en temps. »

« S’il fallait aujourd’hui que j’installe un système pour un ami qui n’est pas fondu de jeux vidéo, je pense qu’Ubuntu serait le choix le plus judicieux. »

Rien à ajouter 😉

Notes

[1] L’option choisie est donc ici la distribution GNU/Linux Ubuntu. On aura beau dire (et nous verrons ce que donneront les commentaires de ce billet) mais c’est effectivement selon moi le meilleur des choix possibles à l’heure actuelle. Bien moins à cause des qualités intrinsèques d’Ubuntu que du dynamisme intrinsèque de la communauté aggregée autour du site Ubuntu-fr.org, qui n’a clairement pas d’équivalent dans le monde francophone et qui aura été partie prenante dans l’aventure d’Erwan Cario.

[2] Pour ce qui concerne cette forte audience, il n’y a qu’à voir le nombre impressionnant de commentaires présents sous chaque épisode !

[3] On notera qu’il existe un autre fort intéressant feuilleton estival sur Ecran.fr : invitation à l’intérieur de Wikipédia pour voir un peu « comment un projet aussi pharaonique peut fonctionner au quotidien ».




A Bamako je m’abreuve à La Source

—> La vidéo au format webm

En mai dernier paraissait une info très intéressante sur DLFP, titrée Une borne de distribution de logiciels libres à Bamako, dont on possède désormais deux petits reportages vidéos que nous vous présentons ci-dessus et ci-dessous.

L’association Kunnafoni et l’équipe Ubuntu Mali présentent La Source, un distributeur de contenus numériques : logiciels libres mais aussi d’autres ressources comme des livres, l’encyclopédie Wikipedia, des documentaires, des ressources éducatives et des clips vidéo d’artistes locaux.

Le fonctionnement est simple. Conçu comme un kiosque l’utilisateur se déplace dans les menus à l’aide de trois boutons et choisit le contenu qu’il veut transférer sur sa clé USB.

La Source répond à un besoin de diffusion de contenus qui soit bon marché et accessible au plus grand nombre. Si les connexions internet se démocratisent au Mali, elles restent inaccessibles au plus grand nombre et la seule alternative est d’utiliser les cyber cafés, et télécharger une distribution Ubuntu, ou les 500 Mo qui constituent Wikipedia dans un cyber n’est pas à la portée de toutes les bourses. De plus bien souvent les personnes ne savent pas qu’il existe des logiciels et des ressources libres et de bonnes qualité qui sont disponibles. Ce sont ces freins à la diffusion des ressources libres que La Source entend supprimer.

—> La vidéo au format webm




J.O. de Pékin : pas sans ma Framakey !

Pissed off guard - Montrasio International - CC-By

Les Rencontres Mondiales du Logiciel Libre portent parfois bien leur nom. Ainsi le mois dernier à Mont de Marsan, avons-nous fait la connaissance de Nathalie qui, tel un cadeau, nous a raconté une belle petite anecdote autour de la Framakey.

Il y a deux ans, la voici partie pour un séjour en Chine, avec décision de raconter son voyage au jour le jour sur un blog. Mais une fois sur place, problème : le surf sur internet dans les cybercafés visités semble soumis à une liberté contrôlée[1].

Extrait issu du billet Cinquième jour : Arrivée a Fengkai du 16 juillet 2006 :

« Nous n’avons pas donné de nouvelles depuis deux jours. Pas faute de cybercafé. Dans le premier cybercafé où nous sommes allés, le proxy du navigateur empêchait d’envoyer quoique ce soit vers des sites européens, et même en lançant Firefox de ma clé USB, je n’ai pas réussi a contourner le problème, donc il devait aussi y avoir barrage par firewall. Le cybercafé essaye le lendemain semblait être encore plus bloqué au niveau des accès disque et du bureau mais ce n’était qu’en apparence. Ma petite clé a été reconnue et j’ai pu accéder au blog en écriture avec Firefox de Framakey. Génial, quel soulagement. Au passage, une pub pour Framakey car sans le concept de logiciels libres portables, nous ne serions en train d’écrire ni ce billet ni les suivants ; le blog était off pour quelques jours, et peut-être même jusqu’au séjour final a Pékin !!! Voila pour le point technique du blog, jure que ce n’est pas simple. Entre les menus de Windows, tous écrits en chinois, les sécurités locales imposées, cookies interdits par le navigateur local (accès aux options de IE interdits évidemment, firewall hyper blindé dès qu’il s’agit de sortir de Chine). Bref, cela relève presque du miracle si ce blog continue a exister 🙂 »

Vous vous rendez très bientôt à Pékin pour participer, couvrir ou assister à la grande messe olympique ?

Je ne sais si la situation a positivement évolué depuis mais, dans le doute, ne vous abstenez pas de glisser subrepticement une Framakey dans la valise 🙂

Notes

[1] Crédit photo : détail de Pissed off guard par Montrasio International sous licence Creative Commons By.




Il voit du logiciel libre partout !

Paris Vélib (cool) - Carlosfpardo - CC-By

Lu (sur la plage) sous la plume de Laurent Joffrin dans Libération du 15 juillet[1].

« Ce succès n’est pas seulement de mode ou de commodité : il recouvre un phénomène politique. Comme le bouddhisme du même nom, nous avons désormais affaire à un urbanisme du petit véhicule, qui échappe, de surcroît, à la classique dichotomie droite-gauche. Chimère bien réelle, le Vélib’ est un transport en commun individuel, un objet gratuit et néanmoins payant, un outil de la personne et de la collectivité à la fois, un service en même temps public et privé. Il n’appartient ni au libéralisme, ni au socialisme, ni à l’individu, ni à l’Etat. Il procède, en fait, d’une sorte d’altermondialisme passé dans les mœurs, autant que d’un boboïsme pour tous. Il annonce surtout, par son prosélytisme calme, une société différente : celle où l’on préfère l’accès à la propriété, la location à l’achat et, somme toute, une forme de partage tranquille à la fièvre de la possession. A la vitesse de la bicyclette, une idée fait son chemin : celle d’une ville moins arrogante et un peu plus humaine. »

Vélib’ et logiciel libre : même combat ?

Vélib'girls - Malias - CC-By

Notes

[1] Crédit photos : Paris-Vélib (cool) par Carlosfpardo sous licence Creative Commons By et Vélib’girls par Malias sous licence Creative Commons By.




Il était une fois un développeur de logiciel libre

« Beaucoup d’utilisateurs étaient vraiment sympathiques, ils me remerciaient et m’encourageaient ! À chaque fois, cela ensoleillait toute ma journée… »

Ainsi s’exprime Laurent Cohen dans ce court mais enthousiaste témoignage d’un développeur de logiciel libre[1].

Et puis, loin de moi l’idée d’idéaliser les choses[2], mais pas une fois il n’est question d’argent. Parce qu’il est clair que, quand bien même de nombreux projets libres aient fortement besoin de soutiens financiers, ce n’est ni une fin en soi ni la principale source de motivation. La vérité est ailleurs, n’en déplaisent à certains…

Got milk? - OLD SKOOL Cora - CC-By-Nc-Sa

Que signifie être un développeur Open Source ? Une histoire vécue de l’intérieur

What does it mean to be an Open Source author? A story from the inside

Laurent Cohen – 23 juin 2008 – JPPF Blog

J’entends parler tous les jours des projets Open Source, du modèle économique de l’Open Source, de ce que cela signifie en terme de liberté, de choix, de risques, d’investissements, etc. Ce dont je n’entends pas souvent parler, c’est à quoi ressemble la vie de ceux qui contribuent réellement et vouent une partie de leur vie à l’Open Source.

Je ne prétends pas comprendre comment cela se passe pour la plupart des contributeurs ou dire qu’il y a des modèles à suivre. Mais je crois sincèrement qu’il y a des histoires qui valent le coup d’être racontées. Voici la mienne, je vous laisse l’apprécier… ou pas 🙂

Tout d’abord, le projet s’appelle JPPF (Java Parallel Processing Framework) et c’est tout ce que j’en dirai. Cet article ne parle pas du projet lui-même, mais de ce qui lui est particulier et des conséquences que cela a sur la vie de gens, y compris la mienne.

La Génèse

Il était une fois un geek, avec une idée et un bout de code. Il se disait, « Hé, ça a l’air chouette, pourquoi est-ce que je ne mettrais pas ça à disposition des autres librement/gratuitement ? » (NdT : toujours la même ambigüité sur le mot « free », je vous laisse choisir !)

C’est une de ces idées farfelues qui vous viennent l’esprit sans raison.

Ainsi, le projet était né, et dûment enregistré sur Sourceforge. Cela semblait déjà fort passionnant à l’époque, et vous savez quoi ? Après trois ans de travail parfois harassant, c’est plus passionnant que jamais.

Le travail en solitaire

Longtemps, il n’y eut qu’un seul gars dessus, travaillant seul, faisant ce qu’il avait envie de faire, un électron libre qui n’avait qu’une vague idée de son objectif et une vision bien à lui de ce qu’était le temps libre.

C’était une époque où les heures étaient longues, les réveils matinaux, les couchers tardifs, les weekends qui passaient sans que je m’en aperçoive, les cigarettes et les cafés nombreux. Mais depuis j’ai élargi mon horizon, et je bois aussi du thé au jasmin.

Enfin voilà, c’était moi. J’adorais coder, j’aime toujours ça et j’aimerai toujours.

De 0 à plus d’1 utilisateur

Puis vint l’époque du codage, de la mise à disposition, du codage, de la mise à disposition. Le projet prenait un peu d’ampleur, et une petite communauté commençait à l’utiliser. Il était beaucoup question de « mais pourquoi ça ne marche pas dans ce cas-là ? », « pourquoi n’y a-t-il pas cette fonctionnalité ? » ou « comment pourrais-je faire ceci et cela ? » etc. Vous voyez le genre…

Et là je me suis dit : « Mon dieu, il va falloir interagir avec d’autres gars ! Comment m’y prendre ? »

Ce fut le début d’une période (brève, heureusement) d’intense introspection existentielle. Quel était le but de ce projet ? Pourquoi l’avais-je mis en Open Source ? Je résolvais le problème en décidant unilatéralement qu’il serait libre, pour tous ceux qui seraient suffisamment intéressés pour s’y pencher dessus. J’ai aussi décidé qu’il serait de ma responsabilité d’aider ces braves gens à utiliser ce projet, et tant qu’à faire, que ce soit une expérience positive pour eux.

Des utilisateurs qui participent

J’ai donc commencé à communiquer avec les autres, et j’ai vraiment été bluffé. Ces gens sont formidables ! Je ne peux pas vous dire à quel point ils ont été importants pour le projet. Voici, brièvement, en quoi :

  • Ils viennent de tous les coins de la planète, c’est cool non ? J’ai eu des questions, des commentaires et des critiques des cinq continents;
  • Chaque question posée correspondait à une fonctionnalité potentielle, et est souvent devenue une fonctionnalité réelle;
  • Chaque bug découvert a participé à l’amélioration du projet;
  • La plupart des demandes d’éclaircissement sont devenues des rubriques de la documentation;
  • Beaucoup d’utilisateurs étaient vraiment sympathiques, ils me remerciaient et m’encourageaient ! À chaque fois, cela ensoleillait toute ma journée.

Très chers utilisateurs, vous êtes l’unique raison pour laquelle ce projet existe encore. Si ce projet a eu une importance quelconque dans votre vie, n’ayez aucun doute qu’il en a eu une énorme dans la mienne. Je vous aime.

D’un gars à une équipe

Un autre des effets merveilleux de l’interaction avec les utilisateurs, c’est que certains sautèrent le pas et passèrent de contributeur à membre actif. Je n’étais plus seul sur scène. Je n’étais plus libre de faire tout ce que je voulais et était responsable, non seulement envers moi-même, mais aussi envers chaque membre de l’équipe. Cela a généré du travail supplémentaire : nous avons du mettre en place quelques procédures, partager des idées sur l’architecture, la conception et l’implémentation, la montée en compétence des nouveaux venus etc.

Presque immédiatement, le flot d’idées a influencé ce qu’il était possible de faire avec le projet, pas seulement dans le futur, mais ici et maintenant. Le projet grossissait, en même temps que la vision que nous en avions. En conséquence, l’équipe s’est agrandie, ce qui a généré son lot de problèmes et de questions…

La question du leadership

La notion d’équipe et de communauté est intimement liée à celle du leadership. Qu’est-ce qu’un meneur ? Voici la définition que j’ai employée : « un meneur, c’est quelqu’un qui est capable de pousser les gens à agir en les faisant adhérer à une idée, de telle façon qu’ils seront touchés, émus et inspirés par cette idée ».

Avec cette définition, je dois honnêtement avouer que j’ai connu de nombreux succès mais aussi beaucoup d’échecs. Il y a deux échecs que je n’ai pas encore surmontés :

  • J’ai échoué à garder une équipe motivée et inspirée. À l’heure actuelle je suis le seul contributeur actif et je n’ai pas entendu parler des autres depuis des mois. Quelle qu’en soit la raison, je dois l’accepter. Chaque membre de l’équipe aura toujours sa place au sein du projet, et je vous remercie les gars pour tout ce que vous avez fait, je vous remercie mille fois;
  • J’ai échoué à trouver un autre meneur pour le projet. Ou est-ce juste que je n’ai pas réussi à me mettre suffisamment de coté ? En tout cas, je trouve ça effrayant de penser que le projet pourrait tout simplement s’arrêter, si je faisais un accident cérébral, par exemple, qui détruirait mon dernier (et unique) neurone restant.

Présenter une vitrine au monde

Ce projet est hebergé et vit sur le net. Cela veut dire qu’il doit y avoir un site web pour le présenter, expliquer ce qu’il fait, le documenter, aider les utilisateurs etc. Et aussi, pour attirer de nouveaux utilisateurs et fidéliser ceux qui le sont, ce site doit être sexy, confortable et facile à parcourir.

Je suis un développeur, et franchement… pas un concepteur de site web ! Oui, je connais le HTML, CSS et un peu de PHP. Oui, j’ai développé mes propres templates pour les pages qui rendent la maintenance du site plus facile. Mais comment cela ce fait-il que les différentes versions du site que j’ai pu faire aient toujours été nulles, moches, ennuyeuses voire plus souvent les trois en à la fois ? Bah… Je n’ai définitivement pas de talent artistique, et j’ai besoin d’une aide professionnelle dans ce domaine.

Je n’ai pas eu à chercher très loin : ma sœur est conceptrice graphique de profession et en quelques heures elle m’a conçu un site à des années lumière de ce que j’aurais pu faire en plusieurs semaines (voire mois, voire années… je n’ai tout simplement pas ce talent). Isa : merci pour ta générosité et pour avoir partagé ton talent !

Promotion, marketing, relations publiques, publication

Ok ! Le projet est vivant, il a un beau site web, beaucoup de documentations et des forums d’aide. Mais à quoi bon, si personne n’est au courant ?

C’est là que le concept de promotion d’un projet entre en jeu. Comment est-ce que cela marche ? Je ne pense pas que cela soit un secret : on doit savoir quel contenu les rédacteurs aiment lire. Cela prend du temps, il faut faire des essais, des erreurs, trouver les bons canaux de communication, et parfois … être courageux et audacieux. Vous ne saurez jamais si la grande nouvelle sur votre projet peut être publiée, tant que vous ne l’aurez pas soumise à ceux dont le métier est de publier ce genre de chose.

Voici quelques-uns des canaux de communications avec lesquels j’ai eu du succès :

  • Les magazines en ligne;
  • Les blogs;
  • Les sites qui traitent de technologie;
  • Les web-séminaires;
  • Les présentations que j’ai effectuées moi même.

Je ne saurais trop insister sur combien ce travail de promotion permet à un projet de décoller et de faire la différence, et ce à tous les niveaux.

Très chers éditeurs en ligne et journalistes, merci pour le travail épatant que vous faites en écrivant sur les gens, la technologie et l’Open Source. Je vous aime également.

Remerciements

Je tiens à remercier :

  • Toi, très cher lecteur, de m’avoir lu jusqu’ici ;
  • Tous ceux qui travaillent ou contribuent aux logiciels Open Source. Garder la flamme vivante !
  • Tous ceux qui utilisent l’Open Source. Sans vous les gars, il n’y aurait rien à utiliser.

Restez à l’écoute…

Notes

[1] Merci à GaeliX et Siltaar pour la traduction Framalang. Choix a été fait de conserver tout du long l’expression Open Source, conformément à l’article d’origine.

[2] Crédit photo : Got milk? par OLD SKOOL Cora sous licence Creative Commons By-Nc-Sa.




Stallman, Torvalds, Brown et Zemlin : mais que pensent-ils donc de Microsoft ?

Encore un article de Bruce Byfield que nous avons trouvé ma foi fort intéressant de traduire. Il s’agit de l’avis sur Microsoft de quatre fortes personnalités de la communauté du logiciel libre : Peter Brown (Free Software Foundation), Jim Zemlin (Linux Foundation), Richard Stallman et Linus Torvalds.

Enfin, pour être plus précis, de deux éminents représentants du logiciel libre (Peter Brown et Richard Stallman) et deux éminents représentants de l‘open source (Jim Zemlin et Linux Torvalds). Difficile en effet de passer ici à côté de cette distinction, importante pour certains, de l’ordre de la nuance pour d’autres. Toujours est-il que si l’on veut alors regrouper ces deux mouvements, on parlera de FOSS.

L’accent a été mis sur les questions suivantes :

  • Comment Microsoft affecte votre travail et votre informatique personnelle ?
  • Quelle menace représente Microsoft pour le logiciel libre ?
  • Quelles sont les chances pour que Microsoft devienne un membre apprécié de la communauté ?

On ne vous en dit pas plus mais la conclusion est réconfortante…

Un grand merci à Claude Le Paih pour le traduction. Il a choisi de ne pas traduire proprietary par propriétaire et il s’en explique ainsi : « Mon choix personnel va au néologisme privateur, privatrice plutôt que propriétaire. J’assume cette non-orthodoxie opposée à la doxa par le fait que propriétaire ne peut être adjectif car c’est un nom commun désignant une personne, laquelle possède… quelque chose. On ne peut donc dire une chaussure propriétaire, une chaîne hi-fi propriétaire, une guitare propriétaire…etc ! Par contre, proprietary est bien un adjectif, en américain, désignant une chose sous marque déposée. Le néologisme privateur fut trouvé par Richard Stallman lors d’un voyage en Espagne en référence au privador employé en espagnol. Richard Stallman préconise l’emploi de privateur. »

Copie d'écran - Datamation

Que pensent de Microsoft les leaders du logiciel libre et de l’open source ?

What do Free and Open Source Software Leaders Think of Microsoft?

Bruce Byfield – 16 juin – Datamation

Aucun utilisateur de logiciels libres (NdT : FOSS) ne peut éviter d’avoir une opinion sur Microsoft : les produits et la technologie Microsoft représentent ce qu’ils ont délaissé. Certains les considèrent de plus en plus sans intérêt, d’autres comme une entité informe comparable à Satan au Moyen Âge ou à l’Union Soviétique au temps de la guerre froide. A la limite peu importe ce que les autres membres de la communauté FOSS pensent de Microsoft, nous avons tous une opinion bien définie sur le sujet que nous pouvons exprimer sur le champ avec éloquence.

Mais quelle attitude ont les dirigeants du FOSS vis à vis de Microsoft ? Ce n’est pas qu’une question de commérage ou un test de confiance : leurs réponses peuvent indiquer leurs valeurs et priorités, mais aussi si elles méritent d’être suivis à la lettre. De plus, malgré (ou peut être à cause de) la grande menace que fait peser Microsoft sur le monde du logiciel libre, le majorité d’entre nous entrevoit rarement le point de vue des acteurs et agitateurs (NdT : "movers and shakers", terme désignant les personnes exerçant un pouvoir ou influentes dans une sphère d’activité) à son sujet.

Pour aider à donner un meilleur éclairage, j’ai demandé à quelques dirigeants bien en vue du FOSS comment Microsoft affecte leur travail et leur informatique personnelle, quelle menace représente Microsoft pour le FOSS, et quelle sont les chances pour que la compagnie devienne un membre apprécié de la communauté FOSS.

Ceux qui ont répondu sont Peter Brown de la Free Software Fondation (NdT : Fondation pour le Logiciel Libre), Jim Zemlin de la Linux Foundation (NdT : Fondation Linux), Richard Stallman , fondateur du mouvement du logiciel libre, et Linus Torvalds. Tous ont donné des réponses non seulement complexes et nuancées, mais parfois étonnantes comparées aux attitudes qu’ils assument souvent.

Peter Brown, Directeur Général de Free Software Foundation

De lui même, Peter Brown n’aurait quasiment pas de contact avec les produits ou la technologie Microsoft. « Il y a beaucoup de sites avec de la camelote privatrice, et certaines agences gouvernementales demandent toujours des systèmes d’exploitation précis. Mais j’évite généralement ce genre de chose, ou je trouve des alternatives », dit il. En parlant de l’évolution des systèmes d’opérations libres comme GNU/Linux depuis le passage du dernier millénaire, il ajoute : « je dois admettre que je ne ressens aucun inconvénient maintenant. »

De plus, suivre les pistes des menaces touchant les libertés des utilisateurs de logiciels fait partie de son travail. Avec ce mandat, il porte une attention particulière à ce que disent les cadres de Microsoft et quelle technologie est utilisée dans leurs produits. « Ce n’est qu’une chose naturelle de suivre les fournisseurs de logiciels privateurs et le Digital Right Management (DRM) » dit il. Il ajoute cependant : « Nous n’examinons pas tous les coins et recoins car une fois que vous êtes dans le monde privateur, il n’y a pas grand chose à dire hormis la nécessité de le quitter. »

Le problème avec Microsoft, selon Brown, est que c’est une entreprise comme les autres, et « les sociétés n’ont pas de valeurs intrinsèques. La seule déclaration de mission, dont il faut être conscient en ce qui concerne une société, est celle qui dit : nous sommes ici pour faire de l’argent. » Avec cette manière de penser, Brown n’a pas confiance en Microsoft, ni particulièrement aux autres entreprises, qu’elles soient privatrices comme Apple ou qu’elles aient un modèle d’affaire incluant l’open source, comme Google ou Red Hat.

Quand une société est amicale envers les FOSS, il attribue en grande partie cette attitude à une individualité qui défend les valeurs du FOSS. « Vous avez vu ce qui est arrivé à Sun ? » dit il, se référant au remplacement de Scott McNealy par Jonathan Schwartz en tant que CEO (NdT : Chief Executive Officer = chef de direction) de Sun Microsystems. « D’abord, c’est privateur et n’aime pas les logiciels libres, un changement de directeur et on aime les logiciels libres. » Dans l’ensemble, il considère les individus plus dignes de confiance que les entreprises, mais seulement « jusqu’à un certain point. »

Dans cette perspective, Brown pense que Microsoft pourrait devenir un jour un participant accepté du logiciel libre, mais non sans changements majeurs dans son modèle d’affaire et son équipe de direction. A la différence de Sun, dont les revenus proviennent d’abord du matériel, Microsoft, dit Brown, est quasiment dépendant de la vente de son système d’exploitation et de sa suite bureautique.

« Ce qui empêche Microsoft d’être un acteur important du logiciel libre », dit Brown, « est le fait qu’ils ne peuvent le faire d’une manière significative en raison de leur flux monétaire. Si vous y réfléchissez, ils vont se battre bec et ongles là où ces deux produits sont concernés, ce qui veux dire en plein dans notre poire. Je ne vois pas Microsoft être différente de n’importe quelle autre entreprise concernant ses intérêts économiques ».

A présent, Brown pense que tout ce que peut faire Microsoft est de tâter du logiciel libre dans l’espoir d’attirer les forces vives du développement vers la plate-forme Windows et d’essayer de ralentir leur adoption. Quoiqu’il en soit, il rejette l’éventuelle destruction du FOSS par Microsoft comme seulement « théoriquement » possible. Sa préoccupation principale est que Microsoft « peut présenter un danger pour la liberté des utilisateurs car elle est capable d’empêcher ceux-ci d’utiliser les logiciels libres par des ruses comme la création de plates-formes séduisantes, les obligeant à rester du fait des inconvénients importants liés au changement ».

Brown est particulièrement inquiet à l’idée qu’en rejetant Microsoft des utilisateurs ne se tournent vers une autre compagnie.« Il est important que les gens ne disent pas : Oh , Apple est bien mieux que Microsoft ! » dit-il. « Je pense réellement que ce n’est pas l’objectif. Si Apple avait ces deux produits, Windows et la suite Office, ils se comporteraient de la même manière vue la direction en place. Avec l’iPhone, ils montrent déjà exactement la même conduite. Ce sera donc son dernier mot : ne pas imaginer que Microsoft soit différente des autres entreprises ».

Jim Zemlin, Directeur de la Linux Foundation

Comme Peter Brown, Jim Zemlin considère l’observation de Microsoft comme faisant partie de son travail. Cependant, tandis que Brown à la Free Software Foundation surveille les menaces pesant sur les libertés des utilisateurs, Zemlin dit : « Une partie de mon travail en tant que directeur de la Linux_Foundation est de contrôler les annonces de Microsoft. Notre équipe fournit un important service à nos membres et au marché en traduisant les actions parfois ambigües de Microsoft. Nous étudions les changements dans la technologie Microsoft qui rendent plus facile l’interopérabilité avec leur plate-forme pour les applications Linux et open source. L’intention de Microsoft de supporter le format ODF dans MS Office est un bon exemple de ce que nous suivons. Nous veillons à ce qu’ils publient leurs protocoles techniques sous des termes compatibles avec le développement et les pratiques des licences open source. »

Quoiqu’il en soit, en ce qui concerne l’informatique personnelle de Zemlin, Microsoft « n’est pas important du tout ». Sa description d’un jour typique est une litanie d’applications web et de produits utilisant GNU/Linux: « Mes journées commencent en écoutant de la musique à la maison sur un système Sonos basé sur Linux. Je peux enregistrer un spectacle TV sur mon DVR Linux et ensuite foncer au bureau où je travaille sur un bureau Linux. Je passe la plupart de ma journée sur un navigateur : accédant à des applications Google, utilisant notre application SugarCRM sur le web, me connectant à Facebook ou lisant un livre sur un lecteur Kindle, tout cela tournant sous Linux. La seule fois où je suis concerné par Microsoft c’est quand je reçois un fichier Microsoft Office que j’ouvre dans OpenOffice qui le convertit au format ODF.

Zemlin remarque que la participation à la communauté est possible pour tout le monde, mais ajoute que « cela demande un désir sincère de collaboration et de vouloir faire de meilleurs logiciels. Quand cela fera réellement partie de la vision de Microsoft, j’espère que cette société deviendra un membre de la communauté. Le modèle open source est dominant pour le développement de logiciels et ne fera que s’accroître en influence dans les années à venir. »

Zemlin refuse de spéculer sur les intentions de Microsoft à l’égard du FOSS, mais clairement, il ne le voit pas comme une grande menace. « Microsoft est une société intelligente et un excellent concurrent » dit il, « ils rendent Linux meilleur chaque jour, rien qu’en étant un opposant acharné. Mais ils opèrent selon un modèle de développement dépassé qui ne tiendra pas longtemps dans l’actuelle économie du logiciel. Les consommateurs demandent une ouverture et un choix de vendeur, quelque chose que Microsoft met du temps à comprendre. Linux, un des premiers exemples de ce que l’on peut atteindre avec le modèle de développement open source, est en position naturelle pour saisir ces nouvelles dynamiques du marché. Microsoft va continuer à lutter. »

Richard Stallman, Président fondateur de la Free Software Foundation.

En tant que personnage principal du mouvement pour le logiciel libre, Richard Stallman fait une distinction entre la technologie et les actions de Microsoft. « Je n’essaie pas de suivre la technologie Microsoft », dit-il, « car dans la plupart des cas, les changements dans la technologie Microsoft n’ont pas d’effet immédiat sur la communauté du logiciel libre. Je suis plus concerné par les menaces légales de Microsoft à l’encontre des logiciels libres et ses tentatives pour recruter dans les écoles, gouvernements et entreprises afin d’orienter et contraindre le public à une utilisation de Windows. »

Interrogé sur la manière dont Microsoft affecte ses objectifs, Stallman répond, « Mon but à long-terme est un monde dans lequel tous les utilisateurs de logiciels sont libres de partager et échanger les programmes qu’ils utilisent. En d’autres mots, un monde dans lequel tous les logiciels sont libres. Tant que des sociétés comme Microsoft ou Apple se consacrent à distribuer des programmes refusant l’utilisation de ces libertés, elles s’opposent à ces objectifs. »

Cela dit, Stallman peut imaginer qu’un jour Microsoft puisse contribuer au logiciel libre, mais seulement si « elle retire des services comme Hotmail, et abandonne les programmes privateurs comme Windows et MS Office. Alors, elle pourrait contribuer au logiciel libre de façon à faire progresser la communauté à une plus ou moins grande échelle. Cependant, sans ces changements fondamentaux, j’espère que toute contribution faite par Microsoft n’aura qu’une portée marginale sur qui que ce soit dans le monde libre. »

En attendant, Stallman remarque que « Microsoft fait de grands efforts pour empêcher l’adoption du système GNU/Linux et OpenOffice.org ». Il donne trois exemples.

D’abord, il commente la récente annonce au sujet du projet One Laptop Per Child (OLPC) qui, originellement pensé pour donner des ressources technologiques aux nations en développement, va commencer à embarquer Windows. Selon Stallman, avec cette annonce, « Microsoft subordonne le projet OLPC en le convertissant en une campagne massive de formation Windows. Le projet dit que cela donne plus de choix aux gouvernement acquéreurs en supportant tant Windows que GNU/Linux, mais ces gouvernements vont avoir tendance à choisir Windows par défaut. Dans certains pays, des gens vont faire campagne pour empêcher cela. Si celles-ci réussissent, le projet OLPC représenterait alors une contribution positive au monde, sinon, cela fera avant tout du mal. »

Ensuite, parlant de la bataille des standards où Microsoft réussit à faire accepter son format OOXML comme ouvert face au format ODF favorisé par OpenOffice.org et d’autres applications bureautiques libres, Stallman note que « Microsoft a corrompu beaucoup de membres de l’ISO afin de gagner l’approbation de son format bidon de document ouvert OOXML. Ainsi, les gouvernements qui gardent leurs documents sous format exclusif Microsoft peuvent prétendre utiliser des formats ouverts. Le gouvernement d’Afrique du Sud a déposé un appel contre cette décision, mentionnant les irrégularités de la procédure. »

Stallman poursuit en disant « Même dans les parties moins cruciales du secteur, Microsoft essaie d’affaiblir la communauté. Par exemple, elle contribua par un substantiel montant à un projet, SAGE, lequel en conséquence décida de ne pas passer à la version 3 de la GPL ». La seule consolation dans ce cas, nous dit Stallman, est que cette affaire montre « que Microsoft considère la version 3 de la GPL comme une défense efficace de la liberté des utilisateurs. »

En complément de ces exemples, Stallman condamne Microsoft pour les portes ouvertes de sa sécurité. « Windows Vista permet à Microsoft d’installer des modifications de logiciels sans l’autorisation de l’utilisateur », observe-t-il, « vous ne pouvez pas avoir plus faux que cela ».

Cependant, malgré ces opinions, Stallman nous avertit aussi « qu’il est commun dans le champ de l’informatique de comparer Microsoft au diable, mais c’est une erreur. Cela conduit les gens à fermer les yeux sur les actions néfastes faites par les autres sociétés dont beaucoup sont simplement mauvaises. Microsoft n’est pas la seule entreprise dont les conduites en affaire piétinent la liberté des usagers. Des milliers de sociétés distribuent des logiciels privateurs, ce qui veut dire des utilisateurs divisés et impuissants. C’est mauvais, peu importe la société qui pratique cela. »

Linus Torvalds, Coordinateur du projet Linux Kernel (noyau Linux)

Linus Torvalds ne fait aucun effort pour suivre Microsoft. La plupart de ses informations sur la société sont de seconde main, en lisant les sites généraux traitant de technologie ou en recevant des mails de journalistes lui demandant un commentaire sur une action ou une annonce de Microsoft. Malgré tout, il confesse avoir lu occasionnellement le blog Mini-Microsoft « car c’était intéressant pour moi de voir un point de vue différent sur le monde tech world (NdT : monde la technologie) »

« J’ai simplement tendance à ne pas comparer Linux aux autres OS » dit-il, « je m’attache à rendre Linux meilleur que lui-même, et essayer de voir ce que font les autres n’est pas du tout pertinent. Évidemment, il est important que les choses fonctionnent bien avec d’autres systèmes d’exploitation, mais c’est un domaine ou je ne peux pas réellement aider car je n’ai pas d’autres systèmes à la maison. »

Torvalds admet que, pour un choix donné, il achètera un souris Logitech plutôt qu’une souris Microsoft car il préfère éviter de supporter Microsoft. Mais il appelle cela une préférence « irrationnelle ». Par ailleurs, il ajoute, « je ne me rappelle pas la dernière fois ou j’ai pris une décision qui ait à voir en quoi que ce soit avec Microsoft. »

Torvalds observe que Microsoft s’ouvre déjà à la communauté FOSS, mais il note que sa participation est limitée car « ils semblent avoir un complexe lié à la GPL, et ne travaillent qu’avec des projets, qu’ils ne voient pas être en concurrence directe, comme une infrastructure de serveur web, plutôt que tout autre projet central. Vont-ils s’étendre à d’autres domaines et vont-ils se débarrasser de leur peur irrationnelle de la GPL ? Je ne le sais pas. »

A propos d’un danger créé par Microsoft, Torvalds se dérobe en observant premièrement ceci : « je ne pense pas qu’il y ait un Microsoft. Je suspecte qu’il y a beaucoup d’ingénieurs MS qui aiment réellement le logiciel libre et, probablement, l’utilisent-ils à la maison même, en dehors de tout travaux en relation avec des tests de compatibilité. De plus, je suspecte que plusieurs secteurs de la société ont des idées divergentes à propos de l’open source, et je ne pense pas qu’ils approuvent. »

Il continue : « ceci dit, quelques membres de Microsoft sont assez clairement anti open source, et, oui, s’ils pouvaient le détruire, ils le feraient avec bonheur. »

Quoiqu’il en soit, Torvalds écarte l’idée qu’une tentative de démolition puisse avoir un quelconque succès. « Comment combattre réellement quelque chose qui est plus une idée et une façon de faire qu’un concurrent direct sur le marché ? » demande-t-il usant de rhétorique.

Torvalds ajoute qu’il ne se réfère plus à Microsoft en public comme cela lui arrivait auparavant. « Je faisais des plaisanteries sur Microsoft au cours d’entretiens » dit il, « Et j’ai simplement arrêté, car je ne pense pas que la peur et le dégoût (NdT : fear-and-loathing) qui sont si communs (ou peut être pas communs…ce ne sont probablement que des paroles) soient complètement sains. Je pense que si vous prenez des décisions basées sur la peur de ce que font les autres gens et sociétés, vous n’allez pas faire le meilleur travail. Je préfère voir le monde être pro-Linux plutôt qu’anti-Microsoft, parce que ce dernier groupe, en étant motivé par un sentiment négatif, n’est simplement pas constructif à long terme. »

Par dessus tout, le plus fort sentiment de Torvalds à propos de Microsoft semble être celui d’une société ayant perdu son orientation. « Alors que je ne suis évidemment pas un adorateur de Microsoft », dit-il, « je pense qu’ils ont sérieusement cassé la baraque il y a plus de dix ans car ils ont réellement donné aux gens ce qu’ils voulaient, et à bas prix. Voilà une bonne raison qui permit à Microsoft de surclasser les traditionnels vendeurs UNIX. Cela dit, ils semblent avoir oublié ces racines. Tout ce que je vois maintenant c’est qu’ils ne semblent pas essayer de servir leur clients mais de les contrôler (par exemple, tous les plans fous de locations de licences, tous leurs ridicules travaux sur les DRMs etc.) ».

Conclusion

Le premier point évident au sujet de ces réponses est que, bien qu’elles aient été données par les défenseurs des deux mouvements distincts, le logiciel libre et l’open source, les différences sont si mineures qu’elles pouvaient être attendues quelles que soient la personnalité ou la position. Toutes les personnes interrogées trouvent Microsoft complètement sans intérêt pour leur informatique personnelle, toutes suggèrent que Microsoft doit se transformer elle-même, mais n’écartent pas la possibilité que la société fasse de réelles contributions au FOSS si elle parvient à changer. Toutes également semblent voir le triomphe du FOSS comme plus ou moins inévitable. Les similarités sont un rappel que, malgré les différences réelles entre les priorités des deux mouvements, les deux camps sont alliés.

L’autre point qui ressort est combien les réponses sont dépassionnées comparées aux sentiments souvent exprimés par d’autres impliqués dans le FOSS. Tous ces interviewés voient en Microsoft un antagoniste, mais il le font sans la paranoïa qui dénature certains cercles FOSS. La raison pourrait être leur croyance que le FOSS gagnera au final, ou peut être simplement, l’impossibilité pour chacun de maintenir une rage bouillonnante chaque jour et minute de leur vie professionnelle.

Quelle qu’en soit la raison, cette impartialité relative les met potentiellement en marge de quelques uns à l’intérieur de la communauté, spécialement ceux qui voient Microsoft au centre d’une conspiration anti-FOSS. Jim Zemlin, dont les réponse sont plus souples que les autres, a été attaqué par le passé dans les médias pour ses opinions.

En refusant de voir leur adversaire principal comme une représentation unidimensionnelle du diable, ces leaders se sont mis librement entre parenthèses pour adopter une vue plus complexe de leur situation. Non seulement, ils voient Microsoft luttant en vain pour se redéfinir elle-même après tant d’années, mais ils soulignent aussi que Microsoft est simplement la plus grande des menaces privatrices envers le FOSS mais pas la seule, et que se focaliser avec trop d’attention sur Microsoft apporte ses propres dangers.

Certains lecteurs pourraient désapprouver telle ou telle vision exprimée ici. Je le fais moi même. Mais, en parlant plus généralement, je trouve dans ce mélange d’optimisme idéaliste et d’observation lucide, une garantie que la communauté est entre de bonnes mains.