Geektionnerd : Google Je t’aime Moi non plus

Il y a peu nous avions traduit un article de la FSF souhaitant voir Google libérer la vidéo sur le Web. Et c’est ce qu’ils viennent de faire !

Mais encore plus récemment nous avons évoqué le possible déclin de Firefox croisant l’ascension de Google Chrome, une billet qui fit couler beaucoup de commentaires.

J’aime Google : un peu, beaucoup, passionnément, à la folie… pas du tout !

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Google Chrome m’a tuer ou le probable déclin de Firefox si nous n’y faisons rien

Jasen Miller - CC byCe billet d’anticipation se demande si le navigateur Google Chrome n’est pas en route pour doucement mais sûrement tout écraser sur son passage et si la communauté du Libre peut ou doit y faire quelque chose, sachant que l’une des principales victimes collatérales pourrait bien être Firefox.

Je me souviens des premières interventions de Tristan Nitot, il y a quatre ans de cela, quand Firefox a commencé à émerger. Il s’agissait de casser le monopole de Microsoft qui avec son tristement célèbre Internet Explorer 6 ralentissait le Web tout entier en bloquant l’innovation. Ouvert, communautaire et, last but not least, de meilleure qualité, force est de constater que Firefox a parfaitement relevé le défi en devenant l’un des exemples emblématiques de la réussite du logiciel libre[1].

À Firefox le Web reconnaissant

On est ainsi passé d’une situation où Internet Explorer culminait à 95% de parts de marché et des miettes pour les autres à celle actuelle qui voit en Europe Internet Explorer à 57%, Firefox à 30%, Google Chrome à 6% et Safari à 5%.

Extraordinaire succès pour le navigateur de Mozilla et grands progrès pour les utilisateurs puisque Firefox a également directement participé à ce que toute la concurrence tende à respecter les standards d’Internet, facilitant ainsi la vie de tous les créateurs et lecteurs de pages Web. Et si on a pu parler d’un « Web 2.0 », avec ses riches et complexes applications en ligne, c’est aussi à Firefox qu’on le doit.

Contrat rempli haut la main. Firefox nous a effectivement et indéniablement offert un meilleur Internet. Et c’est un logiciel libre conduit par une fondation à but non lucratif qui nous a fait ce cadeau-là. Merci Firefox, merci Mozilla et derrière la fondation, merci à toute sa communauté.

Sauf que la situation a tant et si bien évolué que l’on peut légitiment se demander aujourd’hui si Firefox n’est pas en train, contre sa volonté, de vivre ses ultimes heures de gloire. N’assiste-t-on pas aux prémisses de la fin d’un cycle ? Son déclin aurait-il déjà commencé ? Doit-on s’y résoudre et quelles conséquences cela peut-il bien avoir pour le logiciel libre ?

Accusé levez-vous !

Pourquoi toutes ces questions qui peuvent sembler exagérées voire provocatrices ?

Parce que Google Chrome.

Le navigateur de la firme de Mountain View a beau ne réaliser aujourd’hui que 6% malheureuses petites parts de marché, il peut potentiellement faire très mal à Firefox. Jusqu’à devenir un « Firefox-killer » si la tendance actuelle persiste.

Car c’est bien cette tendance qui inquiète. Sur la dernière année en Europe et dans le monde, Internet Explorer a encore baissé mais, pour la première fois, Firefox a stagné, tandis que Google Chrome, en pleine phase d’ascension, a plus que triplé le nombre de ses utilisateurs.

Firefox, en croissance continue ces dernières années, se trouve donc si ce n’est stoppé dans son élan tout du moins fortement ralenti. On se dit alors que ce n’est pas forcément bien grave puisque Chrome capte avant tout des utilisateurs d’Internet Explorer sur le principe des vases communicants. Certes mais ce sont autant d’utilisateurs Windows qui, faisant l’effort de changer de navigateur, ne migrent pas vers Firefox.

Et puis, il ne faut pas se le cacher, il y a également des nouveaux venus chez Chrome provenant directement de Firefox. Je vous épargne les liens vers des billets de blogs anglophones ou francophones titrant « Pourquoi j’ai choisi de remplacer Firefox par Google Chrome », mais ils existent et seraient même de plus en plus nombreux, surtout depuis que Chrome accepte les extensions.

Le grand perdant est donc clairement Internet Explorer, ce dont on ne se plaindra pas. Mais on a un nouveau gagnant, c’est inédit et cela interpelle. Y a-t-il de la place pour ces deux rivaux déclarés de Microsoft dans un secteur qui a longtemps souffert d’une absence de concurrence ? Oui à court terme mais à long terme rien n’est moins sûr, malgré les rassurants discours officiels de Google et Mozilla qui prennent bien soin de ne jamais se critiquer mutuellement.

On ne vous le dira pas publiquement mais on se marche un peu sur les pieds (puisque les deux applications se ressemblent et se positionnent comme des alternatives à Internet Explorer). Pour s’en convaincre il suffit de chercher à comprendre ce qui a bien pu motiver Google à carrément sortir un nouveau navigateur plutôt que de contribuer avec Mozilla à l’amélioration de Firefox.

Pourquoi un tel succès ?

Google Chrome soufflera sa deuxième bougie en septembre prochain. Comment une application si jeune a-t-elle pu se faire si rapidement une place dans l’espace à priori sursaturé des navigateurs ?

Il y a bien sûr la force de frappe de Google. Pour la première fois on a vu la société se payer un peu partout d’agressives campagnes de publicité. On a vu également des invitations à le télécharger apparaître sur ses propres sites (YouTube, accueil du moteur de recherche…). À n’en pas douter ça aide à faire connaitre et diffuser son logiciel.

Mais il y a surtout la qualité du produit.

Là aussi il ne faut pas se le cacher, Google a réussi à innover en débarquant avec Chrome, directement sur les trois plateformes Windows, Mac et GNU/Linux. Sécurité, interface épurée (fidèle à la tradition Google), affichage fluide et agréable, onglets indépendants, moins gourmand en ressources, une très pratique recherche à même la barre d’adresses, la présence d’extensions dans la dernière version… et puis cet argument massue : la rapidité.

Il faut être de mauvaise foi pour ne pas reconnaitre que cette rapidité est réelle. Et elle est décisive parce que c’était et cela demeure, malgré les récents progrès de la version 3.6, l’un des défauts majeurs de Firefox.

On me reprochera la radicalité de ce qui va suivre, car tout est relatif dans ce bas monde, mais la raison principale de la croissance de Google Chrome est finalement d’une limpide simplicité : c’est techniquement parlant aujourd’hui le « meilleur » navigateur du marché.

Voilà ce que les ingénieurs de chez Google ont réussi à produire en à peine plus d’un an et demi ! Et l’essayer, c’est réellement prendre le risque de l’adopter.

Çà n’est qu’un début…

Oui, 6% de parts de marché pour Chrome, c’est aujourd’hui ridicule. Mais la dynamique est clairement en faveur du navigateur de Google.

Le rythme de développement de Chrome reste impressionnant. Ainsi on apprend aujourd’hui que la prochaine version 5 de Chrome sera 35% plus rapide que la précédente, c’est-à-dire l’actuelle, qui est déjà la plus rapide du marché ! Cette avance-là n’est pas prête d’être rattrapée…

Quant à la toute récente rumeur qui verrait pour la première fois Chrome (ou plutôt sa déclinaison libre Chromium) remplacer Firefox par défaut dans la prochaine version netbook de la distribution Ubuntu 10.10, elle fera à n’en pas douter jaser dans les chaumières ubunteros. L’exemple a valeur de symbole. Et si Chromium équipait par défaut toutes les versions d’Ubuntu demain ?

Et puis surtout il y a l’avènement annoncé de Google Chrome OS, ce système d’exploitation d’un nouveau genre que l’on trouvera pré-installé dans des ordinateurs neufs, et peut-être bien plus tôt que prévu. Ils ne remplaceront pas Windows du jour au lendemain, mais nul doute qu’ils trouveront leur public en augmentant d’autant l’effectif des utilisateurs du navigateur Chrome.

La gêne manifeste de la communauté du logiciel libre

Aujourd’hui que répondre à Tata Janine qui a comparé Firefox à Chrome et lui préfère ce dernier ? Quel navigateur installer sur le vieil ordinateur de Tonton Jacques alors qu’on sait très bien que Chrome ramera bien moins que Firefox ?

Qu’il est déjà loin le temps où Firefox n’avait que l’horrible Internet Explorer 6 en face de lui. Et qu’il était facile pour la communauté du Libre de trouver des arguments pour inciter à passer de l’un à l’autre. Google Chrome est un compétiteur d’un tout autre calibre pour Firefox.

Il y a donc sa redoutable qualité technique mais il y a aussi le fait que Google Chrome repose sur la couche libre Chromium. Ne l’oublions pas, Google Chrome n’est pas un logiciel libre mais presque !

Pour ne rien arranger, rappelons également la situation schizophrénique et paradoxale des ressources de la Mozilla Foundation apportées à plus de 90% par l’accord avec… Google ! Quand vous dépendez financièrement d’un partenaire qui se transforme jour après jour en votre principal concurrent, vous vous sentez légèrement coincé aux entournures !

Toujours est-il que Google soutient donc indirectement le développement de Firefox et nous propose, pour tout OS, le plus véloce des navigateurs dont la base est libre par dessus le marché. On comprendra alors aisément l’embarras de certains d’entre nous.

J’y vais ou j’y vais pas ? D’aucuns « résistent » mais d’autres « craquent ». Coupons la poire en deux en adoptant Chromium plutôt que Chrome ? C’est se donner momentanément bonne conscience, mais ne nous-y trompons pas, cela fait quand même le jeu de Google. Peut-être retrouve-t-on d’ailleurs ici la fameuse différence d’approche entre « ceux du logiciel libre » (éthique) et « ceux de l’open source » (technique), les seconds étant plus enclins que les premiers à franchir le pas.

Le débat est du reste également présent chez nous à Framasoft, puisqu’au sein de l’équipe Framakey certains ont récemment évoqué l’éventualité d’une clé plus rapide ne reposant plus sur Firefox mais sur Chromium.

En tout cas les statistiques du Framablog ne viennent pas contredire cette valse hésitation. Il y a un an on avait du Firefox à 71%, Internet Explorer à 16% et Chrome à 2%. Aujourd’hui, c’est du Firefox à 66%, Chrome à 11% et Internet Explorer à 9%. On peut supposer, chers et tendres lecteurs, que vous êtes un public averti, ce que tend à prouver les 35% qui arrivent ici sous GNU/Linux, mais cela n’empêche en rien un certain nombre d’entre vous d’avoir déjà adopté Chrome (ou Chromium ou Iron), visiblement parfois en lieu et place de Firefox.

Ce qu’il y a de caractéristique lorsque l’on discute avec quelques uns de ces nouveaux transfuges, c’est qu’il ne sentent pas forcément très fiers d’être passés à Google Chrome/Chromium. Jusqu’à éprouver comme un étrange sentiment de culpabilité d’avoir ainsi sacrifié leur fidélité à Mozilla sur l’autel du confort de leur navigation. Parce que, quand bien même aurait-on préféré Chromium à Chrome, on sait très bien que l’on se fait complice d’un Google toujours plus présent et puissant alors qu’on a plus que jamais besoin de structures comme Mozilla pour lui donner le change.

Passer de Thunderbird à Gmail n’était déjà par forcément très glorieux mais cela ne portait pas, pensait-on, à grande conséquence. Il en va différemment ici.

Au revoir et merci Firefox ?

Va-t-on se réveiller un jour en surfant plus agréablement mais en ayant perdu l’un des fleurons du logiciel libre ?

Firefox est potentiellement en danger car il est effectivement momentanément détrôné. La force marketing de Google conjuguée à l’impressionnante qualité du logiciel font aujourd’hui de Google Chrome la principale solution alternative à Internet Explorer sous Windows. Cette qualité est telle qu’elle réussit de plus à faire en sorte que même des membres aguerris de la communauté du Libre décident de l’adopter.

La belle affaire, me diriez-vous. Chrome est innovant, respectueux des standards et se base sur du libre, alors que le meilleur gagne et ainsi va la vie. Certes, sauf que nos choix ne sont pas anodins et à l’heure de l’informatique dans les nuages et de l’exploitation souvent trouble des données personnelles, nous aurions beaucoup à perdre à consolider encore davantage Google et affaiblir d’autant Mozilla.

D’un côté Google, multinationale à la taille démesurée, qui force peut-être l’admiration mais dont les contrats d’utilisation restent plus qu’ambigus. De l’autre côté Mozilla, fondation à but non lucratif dont le Manifeste aura d’autant plus de chances d’être influent que ses applications seront diffusées et utilisées.

À qui accorderiez-vous votre confiance ? Qui avez-vous envie de soutenir pour participer à rendre le Web tel que vous le souhaitez ?

J’ai évoqué plus haut ces blogs qui titrent : « Pourquoi je suis passé (la mort dans l’âme) de Firefox à Google Chrome ». Mais au sein de la même communauté on voit également fleurir en ce moment de nombreux billets diamétralement opposés qui pourraient se résumer ainsi : « Pourquoi j’ai fermé tous mes comptes Google en migrant vers des alternatives libres ». La préoccupation est là, la division également.

Oui, Firefox stagne et les indicateurs sont pour la première fois à la baisse. Mais rien n’est inéluctable et la tendance aura d’autant plus de chances de s’inverser que nous ne nous montrerons ni passifs ni complices.

Même si la différence de rapidité est flagrante au démarrage mais moins évidente à la navigation, même si les extensions lui donnent encore une longueur d’avance, il faut impérativement que Mozilla et sa communauté améliorent rapidement Firefox sinon le soutien deviendra de plus en plus délicat. La version 3.6 montre le chemin et la prochaine version 4.0 promet beaucoup et pourrait bien combler son retard voire passer devant.

Mais il convient également de se serrer les coudes et d’être solidaires face à l’adversité en ne quittant pas forcément le navire à la première vague venue. Ne dit-on pas que c’est dans les moments difficiles qu’on reconnaît ses vrais amis ?

Notes

[1] Crédit photo : Jasen Miller (Creative Commons By)




Geektionnerd : Google Chrome

En référence à notre billet : Google Chrome OS ou l’ordinateur de moins en moins personnel.

Scénario catastrophe ou réalité en marche ?

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Google Chrome OS ou l’ordinateur de moins en moins personnel

Doug Siefken - CC byReposant sur le véloce navigateur Chrome et un noyau Linux, Chrome OS est le très original système d’exploitation de Google qui devrait voir officiellement le jour avant la fin de l’année.

Si le succès est au rendez-vous, il révolutionnera notre perception même de l’informatique et de l’ordinateur (victimes collatérales : Microsoft mais aussi le logiciel libre).

Et puisque cela ne pose aucun problème à la majorité de nos concitoyens de confier leurs données personnelles dans les nuages de Facebook[1] sans se soucier le moins du monde des termes du contrat, il en ira de même avec Google. Je lève donc l’incertitude du paragraphe précédent : le succès sera au rendez-vous et, autant s’y préparer dès maintenant, la petite révolution aura bien lieu.

Un ordinateur moins personnel

A Less Personal Computer

Simson L. Garfinkel – Mai 2010 – Technology Review
(Traduction Framalang : Olivier Rosseler)

Le futur système d’exploitation de Google sera rapide et sécurisé. Mais en retour il exploitera vos données personnelles.

Dans le jargon du Web, est dit chrome tout ce qui, dans la navigateur, encadre la page : la barre d’adresse, le bouton Précédent et les fameux marques pages. Chrome, c’est aussi le nom du navigateur lancé par Google en septembre 2008, et, loin de simplifier les choses, Chrome OS est le nom du système d’exploitation annoncé par Google en juillet 2009 et qui devrait sortir avant la fin de cette année.

La confusion des noms est tout sauf fortuite. Elle reflète l’ambition de Google de créer un système d’exploitation fondu dans le navigateur. Adieu fichiers, répertoires et programmes. Chrome OS permettra à Google de mettre son infrastructure dans les nuages, des services et des applications en ligne hébergés sur leurs fermes de serveurs, au cœur de quasiment toutes vos activités. En quelques années, Chrome OS pourrait devenir l’environnement le plus simple, le plus rapide et le plus sûr pour l’informatique personnelle. Mais tout n’est pas rose : il fera de Google le dépositaire de toutes vos informations personnelles. C’est la possibilité pour Google d’exploiter encore un peu plus vos données pour rendre plus lucrative encore sa vente de publicité.

Chrome OS représente un virage important dans notre manière de concevoir l’informatique. Les principaux systèmes d’exploitation aujourd’hui, Windows, Mac OS et Linux, reposent toujours sur le modèle de la station de travail hérité des années 80. Ils sont fait pour tourner sur du matériel puissant, le stockage des données personnelles et des programmes se faisant sur un disque dur local. Même le Web, inventé en 1989 par Tim Berners-Lee, n’est qu’une simple extension de ce modèle, un outil plus performant pour trouver des informations sur le réseau et les rapatrier sur votre ordinateur. Mais plus personne n’utilise son ordinateur ainsi de nos jours. En tout cas, pas ceux qui usent et abusent des populaires applications Web que sont Facebook, Gmail ou Youtube. Avec ces applications, vos données sont stockées dans un ou plusieurs datacenters quelque part dans le monde, décomposées dans le nuage et copiée momentanément sur votre ordinateur seulement pour les lire.

Vous pouvez télécharger le navigateur Chrome et le faire fonctionner sur Mac, Windows ou Linux. Si vous le faites, vous remarquerez qu’il est visiblement plus rapide que Safari d’Apple, Internet Explorer de Microsoft ou Firefox de Mozilla. Chrome intègre moins de chrome que ces navigateurs : pas de bordure épaisse, pas de barre de boutons ou de ligne de statut. Pour Google, le navigateur doit se faire oublier pour vous rapprocher de vos données. le Chrome OS pousse le concept plus loin. Il s’agira d’un navigateur Web et un noyau Linux pour contrôler toute la partie matérielle, pas grand chose de plus. Chrome OS ne devrait pas dépasser le gigaoctet sur le disque dur et le système d’exploitation démarrera en quelques secondes. Il n’y aura pas de bouton Démarrer, seulement la page d’accueil de Google et les liens vers vos applications Internet favorites. Des panneaux s’ouvriront sur les côtés de la page principale lorsque vous branchez un appareil photo numérique ou qu’un réseau sans-fil est détecté.

L’apparence minimaliste de Chrome OS en fait le système d’exploitation idéal pour les netbooks aux spécifications modestes. Certains d’entre eux sont déjà livrés avec un système d’exploitation léger centré sur le navigateur qui peut être utilisé en lieu et place de Windows. Chrome OS est similaire, mais il sera intimement lié aux services dans les nuages de Google. Après avoir entré votre nom d’utilisateur et votre mot de passe Google pour vous connecter à Chrome OS, Google Docs vous permettra d’éditer et de sauvegarder vos documents et Gmail se chargera de vos e-mails.

Vous pouvez déjà télécharger et faire fonctionner Chromium OS pour obtenir un avant-goût de ce qu’il sera dans quelque mois. Mais je ne vous le conseille pas : Chromium OS n’est pas encore prêt. Mais plusieurs fabricants d’ordinateurs, dont Samsung et Acer, prévoient de mettre sur le marché des netbooks sous Chrome OS et Google pourrait même sortir son propre netbook sous Chrome OS construit, un peu comme le smartphone Nexus One, autour de spécifications matérielles déterminées par l’entreprise.

D’après les ingénieurs de Google, Chrome OS utilisera le disque dur de votre ordinateur comme un simple cache où il stockera des copies de ce sur quoi vous travaillez afin de ne pas communiquer sans arrêt avec les serveurs et ainsi épargner votre abonnement 3G (et accessoirement votre batterie). Toutes ces données personnelles seront chiffrées, pas de risque en cas de perte de votre machine. Et si pour une raison ou une autre votre ordinateur était corrompu, par exemple par un virus, vous pourrez le remettre à 0 et recommencer votre travail sans rien perdre, puisque vos données sont dans les nuages.

Si vous faites parti des fans de Google, ou des employés ou encore des actionnaires de la firme, Chrome OS représente alors pour vous la dernière innovation de Google pour améliorer l’expérience utilisateur. Si vous êtes un concurrent, vous ne verrez pas forcément d’un bon œil le nouveau tentacule de Google s’étendre vers les systèmes d’exploitation. Et si vous êtes pour la défense de la vie privée, comme moi, voilà qui devrait renforcer vos inquiétudes les plus profondes quant au géant de l’Internet : en cohérence avec ses déclarations, il cherche vraiment à répertorier toutes les informations du monde.

Souvenez-vous de la tentative de Microsoft de s’appuyer sur sa position de plus grand fournisseur de logiciel au monde pour s’accaparer le marché des navigateurs Internet, des serveurs Web et des services Internet dans les années 1990. L’histoire pourrait bien se répéter, mais dans l’autre sens. Google, roi de la recherche et de la publicité sur Internet pourrait s’appuyer sur la force de ses applications Internet pour se faire une place sur votre prochain netbook et, de là, sur votre ordinateur de bureau. Tous les services Google fonctionneront mieux avec Chrome OS, pas à cause d’un abus de position dominante de la part de Google, mais parce que le système aura été construit spécialement pour faire fonctionner des applications Web complexes. Et si tous vos besoins sont couverts par un navigateur Web, pourquoi devriez-vous payer pour un ordinateur plus gros, plus lent et qui demande une maintenance importante ?

La convergence entre Chrome, Chrome OS et les services dans les nuages représente aussi un grand chamboulement dans le monde de la vie privée. Cela fait maintenant 20 ans que je m’intéresse à ce sujet ; à l’origine des plus grandes menaces sur notre vie privée, on retrouve toujours les grandes entreprises qui essaient de collecter et de revendre des données personnelles et les gouvernements qui tentent d’y accéder. Chrome OS modifie largement les paramètres de l’équation. Pour la première fois, les utilisateurs seront encouragés à confier leurs données personnelles à une seule et même entreprise, une entreprise qui génère de l’argent en disséquant ces données. Et toutes ces informations ne seront protégées que par un identifiant et un mot de passe unique. Si tant est qu’elles soient véritablement protégées : après tout, Google a bien décidé d’inscrire des millions d’utilisateurs de Gmail à Google Buzz sans leur permission, rendant public une grande partie de leurs contacts par la même occasion. Enregistrer, ranger ou sauvegarder ses données ne sera bientôt plus qu’un lointain souvenir pour les utilisateurs de Chrome OS. Mais qu’adviendra-t-il si les banques de données de Google sont piratées, révélées accidentellement ou partagées avec un gouvernement pernicieux ?

On pense en général, à tort, que l’activité principale de Google est la recherche et que nous sommes les clients de l’entreprise. Mais en fait, du chiffre d’affaire de 23,7 milliards de dollars réalisé en 2009 par Google, 22,9 milliards proviennent de la vente de publicité. Google enregistre et exploite le comportement de ses utilisateurs pour cibler plus efficacement les publicités. Google produit des clics de souris et ses clients sont les publicitaires. Chrome et Chrome OS inciteront plus encore les utilisateurs à fournir leurs données personnelles au Googleplex, pour enrichir l’inventaire de Google et augmenter son taux de clics. Ces informations personnelles permettront à Google de mieux cibler encore les publicités pour des utilisateurs qui seront encore plus enclins à cliquer.

Les vrais clients de Google, vous savez, ces entreprises qui sont prêtes à dépenser des milliards tous les mois pour utiliser ses services de placement de publicité, seront heureux, soyez en sûrs. Plus d’espace et de visibilité pour afficher des publicités se traduit par un coût au clic plus faible. Mais pour les utilisateurs ordinaires, ça n’est pas forcément bon. Aujourd’hui, il vous est toujours possible de lancer une application sur votre ordinateur et conserver vos données exactement où vous le souhaitez. Dans le futur, si vous décidez de prendre part à la révolution de l’informatique personnelle selon la vision de Google, vous n’aurez peut-être plus ce choix.

Simson L. Garfinkel est chercheur et auteur, il habite en Californie. Ses sujets de recherches incluent des travaux en informatique légale, sur la vie privée et la gestion des informations personnelles.

Notes

[1] Crédit photo : Doug Siefken (Creative Commons By-Sa)




Mozilla, le H264 ne doit pas passer par toi !

CBS Fan - CC by-saOn l’a évoqué longuement dans un précédent billet, l’avenir de la vidéo en lecture continue sur le Web est à un tournant de son histoire. Mais plus encore que le logiciel libre, il est fort difficile de sensibiliser le grand public sur ce sujet il est vrai technique et complexe.

L’évènement qui redistribue les cartes est le passage progressif de tous les navigateurs à la nouvelle version 5 du HTML permettant de lire directement une vidéo. C’est une bonne nouvelle parce que nous allons enfin pouvoir nous affranchir du format Flash qui était fermé et nécessitait l’installation d’un plugin propriétaire dédié (et mal supporté sur des OS libres comme GNU/Linux).

Mais si le HTML5 autorise donc les navigateurs à lire directement une vidéo, elle ne dit rien sur le format (ou le codec) dans lequel doit être publiée cette vidéo. Or aujourd’hui deux formats bien différents font acte de candidature : le format Ogg Theora et le format H.264.

Le premier problème c’est que si le Ogg Theora est libre (et gratuit), le H.264 est breveté et demande plusieurs millions par an aux navigateurs qui voudraient l’inclure et le supporter[1].

Le second problème c’est qu’à l’heure actuelle la balance penche nettement en faveur du H.264 qui, avec la future version 9 d’Internet Explorer sera lu par tous les navigateurs sauf Mozilla et Opera.

Il y a alors un double risque. Celui de quitter un format breveté (Flash) pour un autre format breveté (H.264) et celui d’ostraciser les navigateurs Opera et surtout Firefox (qui a déjà fort à faire actuellement avec la concurrence inavouée mais bien réelle de Chrome).

La pression est alors clairement sur les épaules de Mozilla. La fondation va-t-elle persister à refuser le H.264 pour des raisons économiques mais surtout éthiques, en devenant en quelque sorte le porte-drapeau de l’Ogg Theora ? Ou bien va-t-elle abdiquer pour ne pas voir ses parts de marché grignoter par d’autres navigateurs, et c’en sera alors fini des espoirs suscités par le Ogg Theora ?

On sait que l’on peut compter sur Wikimedia (qui a ouvert tout récemment le très opportun site Let’s get video on Wikipedia). Mais qu’adviendra-t-il de Google qui a pour le moment adopté le H.264 pour YouTube alors que la firme peut potentiellement mettre tout le monde d’accord en proposant un troisième format issu d’une récente acquisition ?

Dans l’article traduit ci-dessous, le journaliste Thom Holwerda ne cache pas sa préférence : il souhaite voir Mozilla résister. Mais il nous rappelle fort justement que la décision est également suspendue au choix du format des utilisateurs et développeurs Web lorsqu’ils mettront en ligne leurs futures vidéos.

Au nom du « pragmatisme », certains voudraient privilégier le H.264 ? N’oublions pas que pour les mêmes raisons nous nous enchainâmes à Internet Explorer 6 qui fit stagner pendant de longues années le Web tout entier.

Mozilla : reste fidèle à tes idéaux, tiens-toi à l’écart de H264

Mozilla: Stick to Your Ideals, Shun H264

Thom Holwerda – 19 mars 2010 – OSNews.com
(Traduction Framalang : Antistress, Goofy et Quentin)

A présent que les caractéristiques d’Internet Explorer 9 ont été rendues publiques, nous connaissons mieux la position de Microsoft quant au codec vidéo à associer à la balise video de HTML5. Microsoft a choisi H264, un codec qu’il fournit déjà avec Windows de toute façon. Cela signifie que, Firefox et Opera mis à part, tous les principaux navigateurs prendront en charge le H264. D’aucuns y voient une raison pour que Mozilla abandonne ses idéaux et ajoute le support de H264. Je dis : Mozilla, reste fidèle à tes idéaux. Les dernières personnes à écouter en cette matière sont les développeurs Web.

« Mozilla devrait souscrire une licence d’utilisation de H264 »

Nous connaissons tous la situation de la vidéo via HTML5. Nous avons cette solution merveilleuse – une balise pour la vidéo aussi simple que pour les images – qui permet à chacun d’intégrer facilement des séquences vidéo sur son site Web sans avoir à recourir à la technologie propriétaire Flash. Il y a toutefois un problème.

Le problème est qu’il n’y a pas de codec standard pour HTML5. Les principaux compétiteurs sont H264 et Theora et il semble que ce dernier l’emporte pour le moment du côté des navigateurs. Une vidéo encodée avec Theora peut être vue à la fois des utilisateurs de Firefox, Chrome et Opera alors qu’avec H264 il vous manque les utilisateurs de Firefox et Opera. Si l’on considère que Firefox est, de loin, le plus répandu des navigateurs implémentant HTML5, encoder votre vidéo exclusivement en H264 revient à vous tirer une balle dans le pied.

Il y a une raison simple qui explique que Mozilla soit vent debout contre H264 : le codec est criblé de brevets. Cela signifie que, si vous utilisez le codec dans certaines parties du monde, vous vous exposez à devoir verser une redevance à la MPEG-LA qui gère les brevets de H264 (entre autres). Et, en effet, la MPEG-LA a clairement indiqué fin janvier que les utilisateurs finaux pouvaient eux aussi être la cible de contentieux relatifs aux brevets.

« J’aimerais aussi préciser que, bien que nos licences ne soient pas souscrites par les utilisateurs finaux, toute personne de la chaîne d’utilisation est responsable si un produit est utilisé sans licence » explique Allen Harkness, en charge des licences pour la MPEG-LA. « En conséquence, la redevance acquittée par le fournisseur d’un produit couvre l’utilisateur final, mais, lorsque la redevance n’a pas été acquittée, le produit est utilisé sans autorisation et toute personne de la chaîne (fournisseur ou utilisateur) peut en être tenue pour responsable ».

Étant donné que H264 est clairement incompatible avec les idéaux du logiciel libre, Mozilla a décidé de s’y opposer farouchement. Le refus d’Opera de souscrire une licence pour H264 n’a, de toute évidence, rien à voir avec un quelconque idéal (Opera étant un logiciel propriétaire après tout) mais la société norvégienne considère que le montant de la redevance est simplement trop élevé.

Apple pousse depuis longtemps H264 dans l’ensemble de ses logiciels et produits tandis que, du point de vue de Google, la redevance à acquitter pour avoir le droit d’utiliser H264 représente des clopinettes. Le dernier grand acteur à ne pas s’être prononcé était Microsoft qui, comme on pouvait s’y attendre, vient de choisir H264 simplement parce que la licence et le codec sont déjà inclus dans Windows. Le fait que des processeurs spécialisés dans le décodage de H264 soient disponibles sur les appareils portables constitue un autre atout tandis que Theora (ainsi que tout autre codec libre de brevet comme Dirac) ne peut se permettre ce luxe.

Du coup, des développeurs Web et autres pontes commencent à soutenir que Mozilla devrait rentrer dans le rang et souscrire une licence pour H264 sinon ils risquent de tuer la vidéo via HTML5. « J’ai des raisons de croire que la décision de Mozilla de ne pas prendre en charge les vidéos encodées en H264 dans la balise video de HTML5 à cause des nombreux brevets de ce codec est une mauvaise décision qui, à moins qu’ils ne changent d’avis, détruira tout espoir d’inaugurer une nouvelle ère où la vidéo serait accessible en ligne sans plugin » écrit Brian Crescimanno, un développeur Web qui est dans le métier depuis 1997.

Il explique qu’en campant sur ses positions, Mozilla va obliger les gens à continuer à utiliser Flash pour la vidéo vu que personne ne va encoder la vidéo deux fois uniquement pour qu’elle soit lue aussi par Firefox et Opera ; ils vont juste proposer aux utilisateurs de Firefox et Opera la vidéo encodée en H264 via Flash au lieu de ré-encoder la vidéo en Theora. Il fait remarquer également que Mozilla prenait en charge le format GIF du temps où il était propriétaire.

« Je conteste l’idée que être idéaliste soit votre raison d’être », écrit Crescimanno. « Je crois que votre responsabilité première en tant qu’éditeur d’un navigateur Web est de rendre le Web meilleur. C’est certainement ce que vous pensez sincèrement faire mais honnêtement, soyons réaliste, la seule chose que vous allez réussir c’est rendre la balise video de HTML5 inutilisable ».

Le billet de Crescimanno a été repris par John Gruber qui, rien de surprenant, abonde dans son sens : « par conséquent même ceux qui utilisent la dernière version de Firefox seront traités comme s’ils utilisaient un navigateur antique » explique Gruber. « L’intransigeance au nom de l’ouverture aura pour résultat que les utilisateurs de Firefox se verront proposer de la vidéo au moyen du plugin fermé Flash tandis qu’en coulisses la vidéo sera de toutes façons encodée en H264 ».

Gruber et Crescimanno soutiennent en fait que Mozilla devrait laisser son idéal de côté et se montrer pragmatique en implémentant le H264.

Au nom du pragmatisme

Petit retour en arrière. Il y dix ans de cela, le Web n’était pas encore la formidable source d’informations et de divertissements que nous connaissons aujourd’hui, il était à peine en train d’émerger. C’est ce moment qu’ont choisi les développeurs Web pour prendre au nom du « pragmatisme » une série de décisions d’une stupidité monumentale, décisions dont nous payons encore le prix une décennie plus tard.

Quand les développeurs Web se sont retrouvés face aux gigantesques parts de marché d’Internet Explorer 6, ils ne sont soucié de rien d’autre que de rendre les sites visibles pour cette triste version du navigateur, en faisant fi des standards au nom du « pragmatisme ». À cause de cette attitude, les autres navigateurs ont éprouvé les pires difficultés à concurrencer IE6, simplement parce que leurs utilisateurs ne pouvaient consulter leurs sites préférés optimisés pour IE6.

Dix ans plus tard, nous en voulons encore à Microsoft pour son Internet Explorer 6 qui aura rendu le Web dépendant à son égard (le nombre de sites spécifiques à IE est aujourd’hui devenu très faible mais pas nul) alors que la véritable raison pour laquelle IE est devenu si dominant et difficile à renverser est que les développeurs ne se sont pas donnés la peine de penser au delà du « pragmatisme » et de coder pour autre chose qu’IE.

Puis il y a eu Flash. Est-ce Microsoft qui nous a imposé Flash ? Est-ce Adobe qui nous a mis un revolver sur la tempe pour nous forcer à télécharger le plugin ? Non. Là encore ce sont les développeurs Web qui l’ont déployé partout sur le Web au nom du pragmatisme. Nous, les utilisateurs, ne décidons pas de télécharger Flash : nous y sommes forcés parce que les développeurs Web utilisent Flash pour tout et n’importe quoi, depuis les boutons jusqu’au lettres capitales illustrées.

Dix ans plus tard, Flash est devenu lui aussi un boulet qui entrave le Web. Les plateformes minoritaires comme Linux et Mac OS X n’ont pas suffisamment d’importance aux yeux d’Adobe pour l’inciter à développer correctement Flash dessus, sans parler de plateformes plus confidentielles encore, comme Syllable ou Haiku, qui n’ont pas du tout accès à Flash, rendant ainsi des sites aussi populaires que YouTube complètement inutilisables.

Qui allons-nous blâmer cette fois ? Je vois des développeurs Web et des blogueurs de renom comme Gruber s’en prendre à Adobe alors qu’en réalité ce sont les développeurs Web qui ont choisi Flash et l’ont rendu omniprésent sur le Web.

Et nous voilà à nouveau devant un problème similaire. Nous avons le choix pour le codec vidéo de HTML5 : l’un est libre, gratuit et n’est pas soumis à brevet, l’autre est breveté jusqu’à l’os et est tout sauf libre ou gratuit. Il y beaucoup de discussions pour savoir lequel des deux est de meilleure qualité, et vous trouverez des gens intelligents détaillant tests et arguments en faveur de l’un ou l’autre des deux codecs. Le seul avantage du H264 est, de toute évidence, le support matériel.

Et tandis que nous nous tenons à la croisée des chemins, ce sont encore les développeurs Web qui veulent faire le mauvais choix simplement parce qu’ils sont incapables de voir plus loin que le bout de leur nez. Ils se fichent de savoir à quoi ressemblera le Web dans dix ou même seulement cinq ans (quand la période d’essai gratuite sur le Web de H264 aura expiré), ils ne sont intéressés que par le présent. Ils ont fait des choix plus désastreux les uns que les autres, des choix qui ont gravement nuit au Web, et, pourtant, il faudrait que nous les écoutions encore ?

Cher Mozilla, contemple l’histoire du Web et vois l’impact désastreux d’Internet Explorer et de Flash. Regarde bien ensuite qui a fait en sorte que ces technologies nous soient imposées. Alors, et seulement alors, prends en compte à leur juste valeur leur opinion sur cette question.

A défaut, je prédis de quoi nous discuterons dans cinq ou dix ans : les développeurs Web et les pontes comme Gruber se lamenteront en se demandant comment le Web a pu embrasser sans restriction H264 à présent que la MPEG-LA a décidé de faire respecter ses brevets. Ils trouveront quelqu’un à blâmer : Microsoft, Adobe ou la lune, et, encore une fois, ils refuseront d’assumer leurs responsabilités.

L’heure du bain

Parfois il faut se jeter à l’eau. Bien sûr la transition vers un codec libre et gratuit sera difficile, mais les bénéfices escomptés le justifient amplement. Je préfère avoir affaire à une situation compliquée maintenant plutôt que de devoir faire face dans cinq ou dix ans à une situation aussi inextricable que celle engendrée par IE6 et Flash.

Notes

[1] Crédit photo : CBS Fan (Creative Commons By-Sa)




Geektionnerd : la balise vidéo

Si Google is not evil alors qu’il le prouve en libérant le format vidéo du Web ! Tel était le titre d’un récent article évoquant la situation actuelle et future de la vidéo en lecture continue (ou streaming), avec l’apparition des navigateurs compatibles HTML5 et sa fameuse balise <video>.

Or, mauvaise nouvelle pour Firefox, c’est le H.264 qui sera lui aussi implémenté dans la prochaine version d’Internet Explorer, neuvième du nom. Tristan Nitot en parle dans son billet Internet Explorer 9 : à boire et à manger.

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Geektionnerd : Ballot Screen

« Toute la vie est une affaire de choix. Cela commence par : la tétine ou le téton ? Et cela s’achève par : Le chêne ou le sapin ? » Pierre Desproges

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Quand Google fait l’ange avec nos données

The Data Liberation Front - GoogleGoogle fait peur et Google le sait. Alors Google fait de gros efforts pour tenter de nous rassurer.

Mais cela sera-t-il suffisant ? Google n’est-il pas devenu intrinsèquement trop gros, quelle que soit la manière dont il brasse nos nombreuses données personnelles, quelle que soit l’indéniable qualité de sa myriade de services et de produits ?

Telle est la vaste question du jour, tapie derrière notre traduction évoquant leur projet du « Front de Libération des Données ».

La page d’accueil Google propose depuis peu un petit lien Confidentialité en bas du champ de recherche. Il vous mènera au portail google.fr/privacy qui a pour titre Centre de confidentialité : Transparence et liberté de choix.

Chez Google, nous sommes parfaitement conscients de la confiance que vous nous accordez, ainsi que de notre devoir de protéger la confidentialité de vos données. À cette fin, vous êtes informé des données qui sont collectées lorsque vous utilisez nos produits et services. Nous vous indiquons en quoi ces informations nous seront utiles et comment elles nous permettront d’améliorer les services que nous vous proposons.

On y décline alors la philosophie Google résumée en « cinq principes de confidentialité » et illustrée par cette vidéo que je vous invite à parcourir et qui témoigne une fois de plus de la maîtrise didactique de Google dans sa communication.

Du lard ou du cochon ? De l’art de faire l’ange quand on fait la bête ? Les commentaires accueilleront peut-être certaines de vos réactions.

En attendant la vidéo fait référence à un récent service, le Google Dashboard, qui est censé vous permettre de « savoir ce que Google sait de vous » en centralisant en un unique endroit toutes les informations collectées associées à votre compte Google (Gmail, Google Docs, Agenda, Maps, etc.) et à ses services connexes (YouTube, Picasa, etc.). Pour en avoir un bref aperçu, là encore, nouvelle et toujours efficace vidéo dédiée.

Cette initiative est louable parce qu’elle vous expose à priori la situation en vous facilitant la modification des paramétrages. Mais elle est à double tranchant parce que vous vous rendez compte d’un coup d’un seul de l’étendu de la pieuvre Google et de la quantité impressionnante de vos données que Google peut potentiellement manipuler. Et puis n’oublions jamais la force d’inertie du paramétrage par défaut.

La vidéo nous parle également du « Data Liberation Front », ou « Front de Libération des Données » en français, dont le logo ouvre ce billet. Ce n’est pas un nouveau mouvement révolutionnaire mais un projet interne qui œuvre à ce que l’assertion suivante devienne réalité :

Nous voulons que nos utilisateurs restent chez nous parce qu’ils le souhaitent, non parce qu’ils ne peuvent plus en sortir.

Il s’agit donc en théorie de pouvoir facilement quitter Google en listant sur un site, service par service, les procédures à suivre pour exporter nos fichiers et nos données depuis les serveurs de Google vers notre disque dur local dans des formats standards et ouverts. Les manipulations à réaliser ne sont pas toujours des plus simples (quand elles existent effectivement), mais le projet nous dit qu’il travaille justement à constamment améliorer cela.

On retrouve cette idée, lorsque Google nous affirme que « Competition is just one click away », autrement dit que tout est fait pour qu’il suffise d’un clic de souris pour s’en aller chez un concurrent, et que les autres devraient en faire autant pour que s’établisse une saine compétition. Pas sûr que Microsoft soit sensible à l’argument.

Centre de confidentialité, Google Dashboard, Data Liberation Front, One click away, Sens de l’ouverture… il n’y a pas à dire, Google met les bouchées doubles pour ne pas se mettre en porte-à-faux avec son fameux slogan « Don’t be evil ».

Alors, convaincu ?

Dans l’affirmative, remercions Google pour son souci de transparence et continuons à lui faire confiance, sachant alors que le futur et novateur système d’exploitation Google Chrome OS vous tend les bras. Point trop d’inquiétudes mal placées, vos données sont bien au chaud dans les nuages.

Dans le cas contraire, c’est plutôt un « Google Liberation Front » qu’il va falloir songer à créer !

Pourquoi Google vous laisse facilement quitter Google

Why Google makes it easy to leave Google

Nate Anderson – 1 mars 2010 – Ars Technica
(Traduction Framalang : Goofy et Don Rico)

Nous avons déjà évoqué le Front de Libération des Données de Google (FLD) l’année dernière, lorsque ce projet a été rendu public, mais depuis, qu’a fait l’équipe interne de Google qui se consacre à l’exportation des données ? Eh bien… elle a créé des autocollants, pour commencer.

« DONNÉES ÉLEVÉES EN PLEIN AIR », proclament-ils, ce qui résume en quelques mots les efforts du Front de Libération des Données. L’objectif de l’équipe n’est rien moins que de permettre aux utilisateurs de quitter plus facilement Google et ses multiples services, en emportant avec eux leurs courriels, leurs photos et tous leurs documents.

Les travaux les plus récents concernaient Google Docs, qui propose désormais une option pour télécharger en masse. Sélectionnez les documents que vous désirez, cliquez sur un bouton, Google les archive en un seul fichier .zip (jusqu’à 2Go) et vous les envoie par e-mail.

Au cours d’une récente visite aux bureaux de Google à Chicago, où le FLD est basé, nous avons discuté avec Brian Fitzpatrick, qui dirige l’équipe, pour savoir plus en détail pourquoi il souhaite que l’on puisse s’affranchir facilement des services Google, et comment il compte s’y prendre.

Empêcher l’inertie

Il est certain que lancer cette initiative estampillée « ne faites pas le mal » au sein de l’entreprise est une bonne manœuvre de communication, mais le FLD ne découle pas d’une décision prise au sommet de la hiérarchie. Fitzpatrick déclare qu’en ce qui le concerne, il a « commencé en toute naïveté ». Après avoir écouté pendant des années le président Eric Schmidt déployer son éloquence pour expliquer combien il est important de ne pas enfermer les utilisateurs, Fitzpatrick a remarqué que certains produits Google compliquaient l’application de cette politique.

Le FLD est l’émanation de son travail de réflexion. L’équipe existe depuis deux ans maintenant, et depuis les choses ont changé : à ses débuts, c’est elle qui allait trouver les autres équipes d’ingénieurs, mais à présent, selon Fitzpatrick, ce sont ces dernières qui « viennent nous consulter » pour savoir comment elles s’en tirent.

La rétention des données n’est pas mauvaise que pour les utilisateurs ; Fitzpatrick estime qu’elle est aussi mauvaise pour Google. « Si l’on crée une base d’utilisateurs verrouillée, avance-t-il, on devient forcément complaisant avec soi-même ».

Rendre aussi facile l’abandon de Google Docs que celui du moteur de recherche de Google force Google à cultiver un de ses points forts : engager des collaborateurs brillants. Le travail du FLD « met en effervescence les équipes d’ingénieurs », explique Fitzpatrick, puisque les ingénieurs doivent satisfaire les utilisateurs en innovant, et non en les mettant en cage.

The Data Liberation Front - Google - Sticker

Les utilisateurs se préoccupent-ils vraiment de la libération de leurs données ? Certains, oui, mais l’utilisation des fonctions d’exportation demeure limitée. Google enregistre « un niveau constamment faible de l’usage de ces fonctions », déclare un ingénieur de l’équipe, particulièrement quand le géant de la recherche choisit d’abandonner des services peu performants.

Disposer d’outils d’exportation facilite également de telles interruptions de services ; souvenez-vous des problèmes rencontrés par les sites de vente de musique bardés de DRM, lorsqu’ils ont finalement tenté de fermer leurs serveurs de DRM. Grâce à l’ouverture des données de Google, l’entreprise évite ce genre de critiques publiques quand survient une fermeture de service, comme lorsque Google Notebook a été mis au rebut.

Nicole Wong, conseillère juridique adjointe de Google, nous a confié que Google prend le FLD au sérieux pour deux raisons : d’abord, il donne le contrôle aux utilisateurs, et ensuite, « quand nous déclarons qu’il suffit d’un clic pour passer à la concurrence, des initiatives telles que le FLD le prouvent ».

Ce dernier commentaire nous rappelle que l’ouverture représente un réel bénéfice stratégique pour l’entreprise qui va bien au-delà de la conception des produits et du pouvoir accordé à l’utilisateur. Google est de plus en plus en ligne de mire des investigations antitrust, de la part du ministère de la Justice américain, et subit déjà des enquêtes en Europe au nom de la lutte antitrust. Le FLD est ainsi un argument de plus que Google peut employer pour démontrer qu’il n’est pas un Cerbère pour usagers captifs.

Il arrive que l’équipe du FLD affronte les critiques de ceux qui accusent Google de ne rendre « libres » et exportables que les données à faible valeur marchande pour l’entreprise (voyez par exemple ce commentaire du chercheur Ben Edelman à propos de la récupération des données Adwords). Mais depuis sa création, le FLD a travaillé avec plus de vingt-cinq équipes de Google pour faciliter l’exportation des données, et nul doute que ses efforts concernant les applications comme Google Docs sont une bonne nouvelle pour les utilisateurs.

« Nous nous efforçons de provoquer une plus grande prise de conscience au sein de l’entreprise, » déclare Fitzpatrick, tout en admettant avec une petite grimace qu’il n’a aucun « pouvoir » réel sur les décisions des différents chefs de projet.

On peut toujours aller plus loin. L’équipe surveille la page du modérateur Google, sur laquelle les utilisateurs peuvent soumettre des suggestions – et elles sont nombreuses. « Mes contacts Gmail — pouvoir les exporter, et ré-importer une version modifiée, sans copier chaque élément un à un » propose l’un d’eux. « Ajouter les microformats hCalendar à l’agenda Google, pour pouvoir réutiliser partout ailleurs les rendez-vous enregistrés » suggère un autre. « Je veux récupérer l’historique de mon tchat avec Gmail », réclame un troisième.

Fitzpatrick promet que d’autres avancées vont suivre, bien qu’il ne puisse pas parler des projets qui sont dans les incubateurs. Ce qu’il peut faire, pour l’instant, c’est vous envoyer un autocollant.