Réédition du catalogue : 20 objets à réaliser en design libre

L’association Entropie réédite un catalogue de vingt objets à réaliser en design libre via une souscription sur la plate-forme de financement participatif Kisskissbankbank.

Un projet à l’esprit libre, à soutenir, à lire et à construire 😉

L’équipe de Framasoft est allée interviewer les membres de l’association pour en savoir plus sur leurs activités.

Cover 20 objets Design Libre

Pouvez-vous présenter les activités de l’association Entropie ?

L’association Entropie effectue des recherches sur un modèle de société plus écologique et plus démocratique basé sur la libre circulation des connaissances, l’entraide et une remise en question du système industriel.

Nous avons plusieurs axes de recherches :

  • L’autonomie politique : comment pouvons-nous nous organiser de manière plus démocratique ? Comment rétablir une équité dans la répartition des richesses ? Ces recherches ont donné lieu à la création du festival Vivre l’utopie qui a pour but de faire connaître des alternatives existantes au public étudiant.
  • Dans le cadre du pôle de recherche sur le design libre, nous créons des objets et réfléchissons à un système technique basé sur la libre circulation des connaissances.
  • Pour accompagner ce changement de système, nous avons créé des outils pédagogiques d’éducation à l’écologie et au travail manuel: ce sont les ateliers bricolo-écolo, nous y apprenons à y fabriquer des fours solaires, des éoliennes, des composteurs…Nous accompagnons également des personnes dans la construction de mobilier ou d’outil de travail adapté à leur besoin spécifique, dans le cadre des ateliers d’autoproduction accompagnée.

Nous appliquons la philosophie des logiciels libre à tous nos projets en les documentant et en les diffusant pour la plupart sous licence libre. C’est le cas des captations vidéo du festival Vivre l’utopie, des notices pédagogiques des ateliers bricolo-écolo ou des notices d’objets réalisées dans le cadre des ateliers d’autoproduction accompagnée.

Qu’est ce que vous entendez par un système technique plus démocratique ? En quoi consiste un atelier d’autoproduction accompagnée ?

La démocratisation de la technique ne consiste pas en l’autoconstruction généralisée à tout le monde : ceci, c’est le mythe du Do It Yourself, qui nie le savoir-faire des professionnels. Mais c’est plutôt donner l’accès au code source des objets pour comprendre la conception et la fabrication de l’objet à tous ceux qui en ont les compétences ou qui veulent les acquérir. Nous pensons aussi que l’usager peut participer à la conception et à la production de certains objets et acquérir des savoir-faire. Cela change le rapport entre profane et professionnel et demande un effort pédagogique. C’est ce que nous mettons en application lors des ateliers d’autoproduction accompagnée. Des usagers nous sollicitent avec un besoin, nous concevons et fabriquons avec eux un objet qui y répond, et bien sûr nous documentons cette expérience pour qu’elle rentre dans le pot commun de la connaissance.

Le fait de documenter notre travail et de le diffuser sous une licence libre permet de démocratiser les rapports entre les participants à nos projets. Par exemple si un employé de l’association est en désaccord avec les orientations de la structure et décide de partir, il peut le faire (forker comme on dit dans le monde du logiciel libre) en emportant toute la propriété intellectuelle et s’en resservir lors d’un autre projet. Dans le cas d’une entreprise classique, vous ne pouvez pas repartir avec les brevets auxquels vous avez participés.

Pouvez-vous nous présenter ce catalogue que vous rééditez ?

Ce catalogue est composé de 20 notices, chacune donnant accès au « code source » d’un objet, c’est-à-dire à la méthode de fabrication illustrée par des plans et des photos mais aussi au choix de conception qui, comme les commentaires d’un programme, permettent de mieux comprendre ces choix voire de modifier la conception. Et enfin on a rajouté une rubrique sur les avantages, les inconvénients et les optimisations possibles car, contrairement au modèle marchand où on va cacher les problèmes, on a ici intérêt à les dévoiler pour permettre à d’autres personnes de travailler dessus et de nous faire des retours pour l’amélioration de l’objet.

Le catalogue contient aussi un texte théorique sur les changements de société qui sont nécessaires pour démocratiser la technique et libérer la connaissance.

Il est possible de commander le catalogue sur la plate-forme de financement participatif, le projet court jusqu’au 30 octobre. On peut aussi se procurer l’un des objets libres conçus et réalisés par Entropie si l’on souhaite encore plus soutenir l’association.

Vous avez choisi de diffuser ce catalogue sous la licence Art Libre, pourquoi ce choix de cette licence ?

Troll !!! (rires)

Nous aurions pu aussi utiliser la licence Creative Commons BY-SA qui offre les mêmes libertés. Comme dirait Antoine Moreau, nous avons fait le choix du libre et non le libre choix. En effet sur les six licences CC, seulement deux sont libres alors que la licence Art libre est unique et libre, ce qui évite toute confusion. De plus cette licence a été rédigée en français, ce qui lui donne plus de reconnaissance par le droit français. Voilà pourquoi nous avons fait le choix de la licence Art Libre, mais cette décision est toujours en débat : nous nous penchons actuellement sur l’utilisation de la licence OHL du CERN, qui s’appliquerait sur le matériel et les solutions technologiques et non seulement sur le contenu des notices.

Jusqu’où va votre philosophie du libre, avez-vous par exemple utilisé un logiciel libre pour réaliser le graphisme du catalogue ?

C’était une des conditions du choix de notre graphiste. Nous avons travaillé avec Clara Chambon qui a accepté d’utiliser le logiciel libre de mise en page Scribus. Sachant que Clara travaillait depuis toujours sur le logiciel propriétaire Indesign, ce changement de logiciel a été un gros effort de sa part. De plus notre budget n’étant pas assez important pour qu’elle réalise l’intégralité du catalogue, elle nous a proposé une maquette et nous a formé pendant une journée à Scribus. Nous avons introduit le contenu dans cette maquette nous-même, ce qui nous a permis d’économiser 2000 euros sur les frais de graphisme.

Dans votre catalogue il y a beaucoup de notices de mobilier, est-ce que c’est un choix, avez-vous d’autres projets ?

Jusqu’à présent nos principaux clients étaient des particuliers qui avaient des besoins liés à de l’aménagement d’intérieur. Cependant nous avons eu dernièrement un projet d’un particulier qui souhaite s’installer en tant qu’apiculteur professionnel. Or pour vivre d’une activité d’apiculture, il faut un minimum de 400 ruches, ce qui représente un gros budget. Cette personne désire qu’on lui apprenne à fabriquer ses ruches ainsi que de l’outillage. Une fois les premières ruches fabriquées, elle sera autonome pour fabriquer les suivantes dans un atelier bois collectif.

Un dernier mot que vous aimeriez rajouter ?

L’entraide vaincra !!!

Cover 20 objets Design Libre




Valentina, logiciel libre de création de vêtements (et Gucci devint GNUcci)

Le monde du logiciel libre manque d’applications dédiées à la création de vêtements. D’autant qu’avec le boom des fab labs, on formerait plein de stylistes en herbe qui proposeraient autre chose que des produits chinois.

Raison de plus pour mettre en lumière ci-dessous le projet émergent qu’est Valentina.

Pour illustrer ce qu’il peut potentiellement réaliser, voici trois images chronologiques :

Valentina

Valentina

Valentina

Remarque : si le sujet intéresse, on pourra aussi lire Nous avons enfin compris pourquoi le diable s’habillait en Prada.

http://valentina-project.blogspot.ru/2013/12/blog-post_10.html

Présentation de « Valentina », un logiciel libre de création de vêtements

Introducing Valentina, free fashion design software

Alexandre Prokoudine – 31 décembre 2013 -LibreGraphicsWorld
(Traduction : GregR, @cartron, Mooshka, Scailyna, Asta, Lolo le 13 + anonymes)

Au fil du temps, nous avons assisté à de nombreuses discussions sur la viabilité du logiciel libre pour le graphisme, le design graphique et la conception de plans. Mais qu’en est-il de la création de vêtements ?

Tout d’abord, quel est le problème avec le logiciel commercial ? Comme beaucoup de systèmes de CAO (Conception Assistée par Ordinateur), c’est cher. Même si certains éditeurs, comme TUKAtech, proposent en option des abonnements mensuels à 145 $ pour répartir le coût de possession dans le temps (ce qui rend plus obscur le TCO/coût total de possession), d’autres éditeurs sont moins libéraux.

Par exemple, le département de relations publiques de Optitex n’a pas peur de rediffuser des études de cas qui mettent en évidence les éléments suivants :

Les prix ne sont pas du tout abordables pour une jeune société qui vient de se monter : environ 16.000 $, sans formation, et sans compter le coût de l’ordinateur, du scanner (si vous avez besoin de dessiner vos modèles à la main), et du traceur (si vous voulez imprimer le modèle en taille réelle).

OK, vous comprenez l’idée. Le résultat, c’est que les stylistes qui démarrent leur activité sont bloqués entre des logiciels chers qu’ils ne peuvent pas se permettre d’acheter, des applications simplistes, et des systèmes de CAO génériques divers et variés (de l’abordable aux versions chères piratées). Tout cela ne rend pas les choses faciles.

Vous êtes déjà en train d’aller dans en bas de cet article, pour y laisser un commentaire acide disant qu’on ferait mieux de parler de liberté ? Eh bien, disons qu’il serait assez génial de donner aux gens un outil libre et gratuit qui fonctionne et qui fournisse une grande flexibilité.

Donc, un logiciel de mode libre du coup ?

Susan Spencer Conklin a été la première à aborder le sujet (non existant) du logiciel libre pour le design de mode, au « Libre Graphics Meetings 2010 », avec l’intention de démarrer une conversation avec la communauté. Un an plus tard, à la même conférence, elle montrait déjà son propre logiciel, qui fait partie du projet Tau Meta Tau Physica (TMTP).

Vous pouvez lire cette entretien avec Susan pour avoir plus de détails sur son projet. Pour résumer, Susan se concentre sur le développement d’un système qui génère un modèle de taille unique qui ira à n’importe qui avec très peu d’ajustements à faire.

Bien que Susan ait aussi réussi à faire quelque chose qui marchotte avec Inkscape, il y a toujours de la place pour un outil de design de modèle dans l’écosystème. Et c’est là que Valentina rentre en jeu.

Valentina

Bien que ce projet soit assez récent, Roman Telezhinsky a commencé à travailler sur son propre outil de création de modèle quand il était étudiant.

Cette version de l’application fonctionne sur Linux et Windows, et supporte le design et le classement de modèles. Vous pouvez faire pas mal de choses, comme créer manuellement des agencements pour exporter en SVG et PNG, puis les couper avec un traceur.

En fait, il est déjà possible d’utiliser Valentina pour créer de vrais vêtements à partir d’un patron de couture, comme illustré sur le blog du projet. Et si on créait GNUcci ? 🙂

Cependant, à ce stade du développement, Roman suggère humblement de ne pas traiter Valentina comme un outil de production, car il manque toujours des fonctionnalités importantes, et le format de fichier interne n’est pas encore stabilisé.

Une collaboration entre Susan et Roman est tout à fait possible. Ils ont beaucoup discuté en 2013, et il y a pas mal de choses intéressantes à porter de TMTP à Valentina.

Il y a encore beaucoup de travail en perspective. En mettant de côté les fonctionnalités Design Patern, il y a toute la question de la 3D. De plus en plus d’applications pour la conception de mode permettent de tester simplement votre création sur des personnages virtuels et voir le résultat dans des poses différentes. Réécrire ce type de fonctionnalités entièrement peut être un énorme chantier.

Une façon de voir cela est d’estimer quelles parties pourraient êtres déléguées à des logiciels comme l’add-on MakeClothes pour Blender, puis de voir s’il serait facile d’intégrer Valentina, Blender + MakeClothes, et MakeHuman. Ceci permettrait d’attirer l’attention des développeurs sur l’utilisation de Blender pour la simulation de vêtements.

Maintenant, vous souhaitez sans doute voir du concret : vous trouverez un fichier d’installation de Valentina à côté des Tarball du code source sur Bitbucket. Pour commencer, lisez le tutoriel par Roman Telezhinsky et Christine Neupert.

Donnons sa chance à Valentina.




Savoir utiliser images et couleurs (Libres conseils 24/42)

Chaque jeudi à 21h, rendez-vous sur le framapad de traduction, le travail collaboratif sera ensuite publié ici même.

Traduction Framasoft :peupleLà, elquan, tcit, Julius22, Garburst, okram, Jej, Cyrille L., lerouge, Lycoris, Goofy, CoudCoud, vvision, lamessen

Du bon usage de la couleur et des images dans le design

Eugene Trounev

Membre actif du logiciel libre et de KDE depuis près de six ans, Eugene Trounev a commencé chez KDEGames et a poursuivi pendant l’ensemble de la transition de KDE3 à KDE4. Il a participé à toute la transition de KDE3 vers KDE4. Actuellement, il s’occupe principalement de la présence de KDE sur le Web et de l’apparence du bureau principal.

Depuis la nuit des temps, les hommes ont utilisé la puissance des images et de la couleur pour transmettre des informations, attirer l’attention ou la détourner. Un célèbre dicton dit « une image vaut mille mots » et on ne saurait mieux dire. Depuis la façon dont nous nous habillons jusqu’aux néons criards des magasins de centre-ville dans le monde entier, chaque couleur, chaque forme et chaque courbe joue un rôle.

Connaître ce rôle n’est cependant pas si difficile, puisque toutes ces variations de teintes et de lignes sont assemblées pour être lues et ressenties par chacun de nous. Il est donc vrai qu’un design génial doit venir droit du cœur, étant donné qu’il est censé parler d’abord au cœur. Néanmoins, le cœur seul ne pourrait pas produire un design génial si quelques règles n’étaient pas d’abord définies et respectées.

Il existe plusieurs façons de classer les couleurs, mais la plupart mettent en avant les propriétés physiques ou chimiques de la lumière ou de l’encre. Bien que cela soit important pour le résultat final, ces propriétés ne vous aideront pas à faire un design attrayant. Ce qui fonctionne le mieux, selon moi, est de séparer entre couleurs chaudes et couleurs froides. Pour faire simple, les couleurs chaudes sont celles qui sont les plus proches de la teinte rouge : le rouge, l’orange et le jaune. Les couleurs froides, à l’opposée du spectre, sont celles qui se rapprochent du bleu : le vert, le bleu et, dans une moindre mesure, le violet. Il est important de se rappeler que « froid » représente aussi le calme et la respiration, tandis que « chaud » est impulsif et dangereux. Ainsi, en fonction des sentiments que vous souhaitez éveiller au sein de votre public, vous devriez utiliser des couleurs plus chaudes ou plus froides. Des couleurs chaudes pour attirer l’attention ; des couleurs froides pour informer. Une utilisation excessive de l’une ou de l’autre aboutira soit à une surchauffe — provoquant des sentiments négatifs chez votre public — soit à un refroidissement — ce qui causera son indifférence.

Il est important de se souvenir que le noir, le blanc et les nuances de gris sont aussi des couleurs. Celles-ci, toutefois, sont neutres. Elles ne provoquent aucun sentiment mais établissent plutôt une atmosphère. Leurs propriétés seront discutées plus loin.

Chaque image est d’abord et avant tout une collection de couleurs et, en tant que telle, suivra les règles de la gestion des couleurs. Déterminer la couleur dominante de votre image est la clé du succès. Essayez d’avoir une vue d’ensemble, sans vous concentrer sur les détails. Une bonne manière de le faire consiste à placer une image sur un fond sombre, puis à se reculer de quelques pas et de l’observer de loin. Quelle couleur percevez-vous le plus ?

Toutefois, toutes les images n’ont pas une couleur dominante. Quelquefois, vous rencontrez un amas de couleurs dont vous ne pouvez déterminer la teinte dominante, quelle que soit l’intensité avec laquelle vous le regardez. Essayez d’éviter de telles illustrations car elles vont inévitablement déconcerter vos utilisateurs. Confrontés à des images de ce type, les gens auront tendance à rapidement regarder ailleurs et cela ne leur laissera pas bonne impression, quel que soit le sujet abordé.

Au delà de la couleur, les images ont aussi une texture car, en fin de compte, elles ne sont rien de plus qu’un ensemble de couleurs texturées. Identifier la texture dominante d’une image n’est pas aussi simple que de percevoir sa couleur car les textures sont rarement évidentes, particulièrement dans les photographies. Il existe néanmoins quelques indicateurs pouvant vous aider. La nature humaine fait que nous sommes attirés par les formes incurvées (aussi appelées formes « naturelles ») tandis que les formes anguleuses et effilées sont considérées comme moins attirantes. C’est pour cela que l’image d’une feuille verte et incurvée sera plus attirante que celle d’un pic en métal. Pour résumer : la clé d’un design réussi et séduisant est une bonne combinaison, correctement équilibrée, entre couleurs et textures au sein des images utilisées.

Un autre aspect aussi important de tout design réussi est la mise en forme du texte et la disposition des espaces autour de celui-ci. Tout comme pour les textures et les couleurs, vous devriez toujours garder à l’esprit que les gens aiment respirer. Cela signifie qu’il devrait y avoir suffisamment d’espace dans et autour du texte pour le rendre plus facilement repérable, lisible et compréhensible.

Imaginez un exemple constitué de deux pages — l’une venant d’un roman d’amour tandis que l’autre est tirée d’un document légal. Vous préféreriez très probablement le roman d’amour par rapport à un document légal quel que soit le moment. Mais savez-vous pourquoi ? La réponse est simplement que vous aimez respirer. Une page de roman d’amour contient vraisemblablement trois éléments importants : des dialogues, des paragraphes et des marges extra-larges, tandis que la plupart des documents légaux ne comportent d’ordinaire aucun des trois. Tous les éléments mentionnés ci-dessus font vivre la page et la rendent dynamique, tandis qu’en leur absence, la page ressemble à un gros pavé de texte. L’œil humain, étant plus habitué à un certain degré de variation de formes, se sent plus à l’aise lorsque les pages bénéficient d’une mise en page aérée et fluide.

Toutefois, cela n’implique pas que chaque texte doive avoir ces trois éléments pour avoir l’air plus attrayant, loin de là. Tout texte peut être rendu facile et agréable à lire en l’aérant suffisamment.

Un peu de respiration ou d’espace peut être injecté au texte de plusieurs manières, telles que l’espacement des lettres, des lignes et des paragraphes ; les marges du contenu, de la section et de la page ; et pour finir, la taille de la police. Essayez de garder une espace d’au moins un caractère de haut entre vos paragraphes et vos lignes ainsi que des espaces de deux caractères de haut entre vos sections. Autorisez-vous des espaces généreux autour du texte sur une page en cadrant assez largement vos marges. Essayez de ne jamais avoir une taille de police inférieure à 10 points pour vos paragraphes tout en gardant les titres assez gros pour les faire ressortir.

Tout comme les animaux, les êtres humains sont souvent attirés par les éclats de couleurs brillantes et les textures inhabituelles. Plus le regard est attiré, plus les personnes ignoreront d’autres points d’intérêt potentiels. Cette simple règle de l’attraction est utilisée indifféremment par les hommes et les femmes pour canaliser l’attention des autres loin de certains éléments qui doivent selon eux passer inaperçus. Le meilleur exemple d’une telle supercherie est celui d’un magicien de rue qui distrait souvent l’attention des spectateurs par l’utilisation de fumée, de flammes ou de tenues tape-à-l’œil.

Il est important, ici, de se rappeler que les mots sont aussi visuels puisqu’ils créent des images et des associations spécifiques. La supercherie qui peut être réalisée avec de la fumée et du feu peut également être accomplie par le biais d’une utilisation créative des mots. Le meilleur exemple de supercherie quotidiennement réalisée grâce aux mots est, de loin, celle des étiquettes de prix. Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi les commerçants aimaient autant les 99 et les 95 centimes ? C’est parce que les 9,95€, ou même les 9,99€, semblent plus attractifs que 10€, même si, dans la réalité, ils ont le même impact sur votre porte-monnaie. Ajoutez-y une « vieille » étiquette de prix à 10€ ostensiblement barrée d’une épaisse ligne rouge et vous aurez un bon aimant à clients.

Conclusion

L’obtention d’un design à la fois beau et attractif passe par ces règles de base : soyez judicieux dans vos choix iconographiques ; faites un bon usage des couleurs et des textures pour créer une atmosphère ; donnez à votre lecteur des espaces pour respirer ; détournez l’attention des parties qui comptent le moins pour l’amener sur celles qui sont importantes.

Ce court article n’entend pas couvrir toute l’étendue du spectre des différents styles et techniques de design. Il s’agit plutôt de vous donner à vous lecteur une base sur laquelle vous pourrez vous appuyer pour construire.




Intégrer un projet en se faisant connaître (Libres conseils 23/42)

Chaque jeudi à 21h, rendez-vous sur le framapad de traduction, le travail collaboratif sera ensuite publié ici même.

Traduction Framasoft : Miki, peupleLà, dabou, Astaelquan, Goofy, Julius22, okram, lamessen, Jej, lerouge, SaSha_01, Lycorismeumeul, vvision

Ne soyez pas timide

Máirín Duffy Strode

Máirín Duffy Strode utilise des logiciels libres et open source depuis le lycée et y contribue depuis huit ans. Elle contribue aux communautés Fedora et GNOME et a travaillé sur l’identité visuelle des interactions, l’image de marque ou l’iconographie de plusieurs applications libres et open source importantes telles que Spacewalk, Anaconda, virt-manager, SELinux et SSSD. Elle s’est également engagée dans des activités de sensibilisation en enseignant les techniques de design à des enfants à l’aide d’outils libres et open source tels que GIMP et Inkscape qu’elle défend ardemment. Elle est à la tête de l’équipe de conception graphique de Fedora et designer d’interaction senior chez Red Hat, Inc.

Je connaissais et utilisais des logiciels libres et open source bien avant de devenir contributrice. Ce n’est pas faute d’avoir essayé — il y a eu quelques faux départs auxquels je n’ai pas donné suite principalement parce que j’étais trop timide et que j’ai eu peur d’aller plus loin. Sur la base de ces tentatives avortées et de ce que m’ont rapporté d’autres designers qui se sont embarqués dans des projets libres et open source, j’ai cinq astuces à vous offrir si vous êtes un designer aspirant au statut de contributeur au logiciel libre et open source.

1. Sachez que l’on a besoin de vous et qu’on vous veut (très fort !)

Mon premier faux départ s’est produit alors que j’étais étudiante en première année d’informatique au Rensselaer Polytechnic Institute. Il y avait un projet particulier que j’utilisais beaucoup et auquel je voulais participer. Je ne connaissais personne au sein du projet (ni qui que ce soit investi dans le logiciel libre). J’ai donc fait une tentative à froid. Le site web du projet signalait que les contributeurs voulaient de l’aide et qu’ils avaient un canal IRC. J’y ai alors traîné pendant une semaine ou deux. Un jour, après une pause dans la conversation, j’ai osé élever la voix. J’ai dit que j’étais une étudiante en informatique intéressée par l’ergonomie et que j’adorerais participer.

On m’a répondu : « Dégage ! ». Qui plus est, on m’a fait comprendre que mon aide n’était ni nécessaire ni désirée.

Cela a retardé mon engagement de quelques années — il avait suffi de quelques mots un peu rudes sur IRC pour me dissuader de réessayer pendant près de cinq ans. Je ne découvris que bien plus tard que la personne qui m’avait plus ou moins expulsée du canal IRC de ce projet était en marge du projet, qu’elle avait un lourd passif de ce genre et que je n’avais vraiment rien fait de mal. Si seulement j’avais persévéré dans mes tentatives d’approche et conversé avec d’autres personnes, j’aurais pu commencer à ce moment-là.

Si vous souhaitez contribuer au logiciel libre et open source, je vous garantis qu’il y a un projet quelque part qui a vraiment besoin de votre aide, en particulier si vous êtes orienté design ! Faites-vous du design web ? De l’iconographie ? De l’ergonomie ? De l’habillage ? Des maquettes d’interface utilisateur ? J’ai parlé à de nombreux développeurs de logiciels libres et open source qui non seulement sont désespérément à la recherche d’aide dans ce domaine, mais qui en plus l’apprécieraient vraiment et vous vénéreraient pour l’avoir apportée.

Si vous rencontrez des résistances la première fois que vous essayez de participer dans un projet, apprenez de mon expérience et n’abandonnez pas tout de suite. Si, en définitive, le projet n’est pas fait pour vous, ne vous inquiétez pas et passez votre chemin. Il y a des chances pour que vous trouviez un projet que vous adorerez et qui vous adorera en retour.

2. Aidez le projet pour qu’il vous aide à aider les autres

Bien des projets libres et open source sont aujourd’hui dominés par les programmeurs et les ingénieurs. Et si certains ont la chance qu’une ou deux personnes créatives s’investissent, dans la plupart des projets, un designer, un artiste ou une autre présence créative représente un rêve souvent-caressé-mais-jamais-réalisé. En d’autres termes, même s’ils comprennent qu’ils ont besoin de vos compétences, ils peuvent ne pas savoir quelle sorte d’aide ils peuvent vous demander, quelle information ils doivent vous donner pour que vous puissiez être productif ni même les bases pour travailler avec vous efficacement.

Quand j’ai commencé à m’investir dans différents projets libres et open source, j’ai rencontré beaucoup de développeurs qui n’avaient jamais travaillé directement avec un designer auparavant. Au début, je me suis sentie un peu inutile. Je ne pouvais pas suivre toutes leurs conversations sur IRC parce qu’ils parlaient de leur cuisine interne et de détails techniques qui ne m’étaient pas familiers. Quand ils se sont donné la peine de me prêter attention, ils m’ont posé des questions comme « Quelle couleur dois-je mettre ici ? » ou « Quelle police dois-je utiliser ?  ». Ce que je voulais vraiment en tant que designer d’interactions, c’était d’être associée à la prise de décision lorsqu’on abordait les contraintes spécifiques du projet. Si un utilisateur voulait une fonctionnalité particulière, je voulais avoir mon mot à dire sur le design — mais je ne savais pas où ni quand ces décisions se prenaient et je me sentais exclue.

Le design couvre une gamme assez large de compétences : l’illustration, la typographie, la conception des interactions, la conception visuelle, la conception d’icônes, la conception graphique, la rédaction, etc. et il y a peu de chances qu’un seul concepteur les possède toutes. Il est alors compréhensible qu’un développeur ne soit pas sûr de ce qu’il peut vous demander. Ce n’est pas qu’ils essaient de vous faire obstacle — c’est seulement qu’ils ne savent pas dans quelle mesure vous avez besoin de vous investir ou le désirez.

Aidez-les à vous aider. Montrez-leur clairement le type de contributions que vous pouvez apporter en fournissant des exemples de contributions antérieures. Faites-leur comprendre vos besoins de sorte qu’ils comprennent mieux comment vous aider à vous engager dans leur projet. Par exemple, lorsque vous vous impliquez pour la première fois dans une initiative spécifique pour le projet, prenez le temps de présenter les grandes lignes de son processus de conception et postez cela dans la liste de développement principale afin que les autres contributeurs puissent vous accompagner. Si vous avez besoin d’idées sur des points particuliers, soulignez-les dans votre présentation. Si vous n’êtes pas certain de la façon dont certaines choses se produisent — comme le processus de développement d’une nouvelle fonctionnalité — entrez en contact avec quelqu’un en parallèle et demandez-lui de vous l’expliquer pas à pas. Si quelqu’un vous demande de faire quelque chose au-delà de vos capacités techniques — travailler sur de la gestion de versions, par exemple — et que vous n’êtes pas à l’aise avec ça, dites-le.

Communiquer sur votre processus et vos besoins vous évitera de jouer aux devinettes dans le projet et ses membres seront au contraire capables d’utiliser au mieux vos talents.

3. Posez des questions, beaucoup de questions ; il n’y a pas de question idiote

Nous avons parfois remarqué chez Fedora que, lorsque de nouveaux designers arrivaient à bord, ils avaient peur de poser des questions techniques, par crainte de paraître stupides.

Ce qu’on ne vous dit pas, c’est que les développeurs peuvent être tellement spécialisés qu’il y a beaucoup de détails techniques qui sortent de leur domaine de compétence et qu’ils ne comprennent pas non plus — cela se produit même au sein du même projet. La différence, c’est qu’ils n’ont pas peur de demander — donc vous ne devriez pas avoir peur non plus ! Dans mon travail de design des interactions, par exemple, j’ai dû contacter de nombreuses personnes du même projet pour comprendre comment un processus se déroulait dans leur logiciel, car ce dernier comportait plusieurs sous-systèmes et tous les participants du projet ne comprenaient pas forcément comment chaque sous-système fonctionnait.

Si vous ne savez pas sur quoi travailler, que vous ne savez pas par quoi commencer ou que vous ne comprenez pas pourquoi ce que quelqu’un a dit sur le chat est si drôle — demandez. Vous avez des chances que quelqu’un vous réponde qu’il ne sait pas non plus et peu de risques de passer pour stupide. Dans la plupart des cas, vous allez apprendre quelque chose de nouveau qui vous aidera à devenir un meilleur contributeur. Il peut être particulièrement efficace de chercher un tuteur — certains projets ont même un programme de tutorat — et de lui demander s’il veut bien être votre référent quand vous avez des questions.

4. Partagez et partagez souvent, même si ce n’est pas encore prêt, surtout si ce n’est pas encore prêt

Nous avons aussi remarqué que de nouveaux designers pour Fedora et d’autres projets libres et open source sont un peu timides lorsqu’il est question de montrer leur travail. Je comprends qu’on ne veuille pas ruiner sa réputation en publiant quelque chose qui n’est pas ce qu’on peut faire de mieux ni même fini ; mais une grande partie du travail sur des projets libres et open source est de partager souvent et ouvertement.

Plus vous aurez avancé sur un élément avant de le partager, plus il sera difficile à d’autres de vous apporter un retour utilisable, de se lancer et de s’investir. Il est aussi plus difficile pour autrui de collaborer à votre travail et d’avoir un sentiment d’appartenance au projet, de le soutenir et de le pousser jusqu’à l’implémentation. Dans certains projets libres et open source, ne pas être communicatif avec vos ébauches, compositions et idées est même considéré comme offensant !

Publiez vos idées, maquettes ou compositions sur le Web plutôt que par courriel, afin qu’il soit plus aisé pour les autres collaborateurs de faire référence à votre contribution en faisant un copier-coller de l’URL — c’est particulièrement pratique au cours d’une discussion. Plus vos éléments de design seront faciles à trouver, plus il est probable qu’ils seront utilisés.

Essayez ce conseil et gardez l’esprit ouvert. Partagez votre travail tôt et souvent. Rendez disponibles vos fichiers sources. Vous serez peut-être agréablement surpris par ce qui va se passer !

5. Soyez aussi visible que possible au sein de la communauté du projet

Un outil qui — de manière totalement involontaire — a fini par m’aider énormément à démarrer en tant que contributeur de logiciels libres et open source a été mon blog. J’avais commencé à entretenir un blog, simplement pour moi, à l’image d’un portfolio grossier des choses sur lesquelles j’avais travaillé par le passé. Mon blog est un énorme atout pour moi, parce que :

  • En tant qu’enregistrement de l’historique des décisions de projet, il représente un moyen pratique pour rechercher d’anciennes décisions de design — comprendre pourquoi nous avons décidé de laisser tomber tel ou tel visuel à nouveau ou pourquoi une approche particulière, précédemment essayée, n’a pas fonctionné, par exemple ;
  • En tant que dispositif de communication, il aide les autres contributeurs associés à votre projet et même les utilisateurs à être au courant des travaux en cours et des changements à venir pour le projet. De nombreuses fois, j’ai omis quelque chose d’essentiel dans un design et ces personnes ont très rapidement posté un commentaire pour m’en informer !
  • Il m’a aidé à construire ma réputation en tant que designer de logiciels libres et open source, ce qui m’a aidé à gagner la confiance des autres envers mes choix de design avec le temps.

Vous bloguez ? Trouvez quels agrégateurs de blogs lisent les membres du projet auquel vous participez et demandez à ce que votre blog y soit ajouté (il y a en général un lien pour cela dans la barre latérale). Par exemple, l’agrégateur de blogs que vous devrez rejoindre pour faire partie de la communauté Fedora se nomme Planet Fedora. Écrivez un premier billet pour vous présenter aux autres et leur faire savoir ce que vous aimez une fois que vous y aurez été ajouté — des informations du genre de celles listées dans la première astuce.

Le projet aura certainement une liste de diffusion ou un forum où les discussions ont lieu. Rejoignez-les et présentez-vous là aussi. Quand vous apportez une contribution au projet — peu importe qu’elle soit petite ou loin d’être aboutie — postez des billets sur ce que vous faites, téléchargez-le vers le wiki du projet, tweetez à ce sujet et envoyez des liens aux membres importants de la communauté via IRC afin d’avoir leur retour.

Rendez votre travail visible et les gens commenceront à vous associer à votre travail et à vous proposer des projets sympas ou d’autres opportunités, simplement grâce à ça. C’est tout ce que j’aurais aimé savoir quand j’ai essayé de m’investir pour la première fois dans le logiciel libre et open source comme designer. Si vous ne deviez retenir qu’un message de tout cela, c’est que vous ne devriez pas être timide — faites-vous entendre haut et fort, faites connaître vos besoins, faites savoir aux autres quels sont vos capacités et ils vous aideront à les utiliser pour que le logiciel libre envoie du lourd.




La quête du logiciel de qualité — suite et fin (Libres conseils 22c/42)

Chaque jeudi à 21h, rendez-vous sur le framapad de traduction, le travail collaboratif sera ensuite publié ici même.

Traduction Framalang : peupleLà, lerouge, goofy, alpha, Sky, Julius22, vvision, okram, lamessen

Les transformations qui préservent la structure

Le deuxième tome de The Nature of Order décrit comment chacune de ces propriétés définit également une transformation. En voici des exemples.

  • Des frontières solides. Vous pouvez parfois transformer quelque chose positivement en lui adjoignant une frontière. Vous installez une palissade autour d’un jardin qui sert alors d’ornement, de coupe-vent afin que des vents forts ne viennent pas endommager le jardin, mais elle existe aussi comme structure en soi. Dans une interface graphique utilisateur, des boîtes à ascenseurs sans cadre sont difficiles à distinguer de l’arrière-plan de la fenêtre (pensez à toutes ces pages web blanches dont les formulaires d’entrée de texte n’ont pas de cadre). Vous placez une corniche sur le toit d’un immeuble afin que la transition entre l’immeuble et le ciel ne soit pas abrupte.
  • Des symétries locales. Il est plus facile de construire de petites parties de manière symétrique : parce qu’elles sont fabriquées sur un tour, parce qu’on doit y accéder des deux côtés, parce qu’elles se plient comme un livre. Faire des choses asymétriques, seulement pour l’intérêt de la chose, demande un travail supplémentaire et il est plus difficile d’obtenir quelque chose qui fonctionne bien.
  • Un espace positif. Vous vous sentez trop exposé quand vous êtes au bureau ? Ajoutez une étagère à mi-hauteur à côté de vous pour délimiter votre espace mais ne vous enfermez pas complètement. Est-ce que votre interface utilisateur donne l’impression qu’il y a beaucoup d’espace restant une fois que vous avez mis les contrôles en place ? Faites plutôt en sorte que les contrôles entourent l’espace utilisable.

Chacun des points qui précèdent est une transformation qui préserve la structure. Vous effectuez un changement dans la structure existante non pas en la démolissant et en la refaisant, mais en ajustant une chose après l’autre selon ces propriétés comme transformations.

En termes de logiciel, il s’avère que c’est ce en quoi le « Refactoring » consiste surtout, quand vous traduisez les concepts en code. Réorganiser, c’est seulement appliquer des transformations qui préservent la structure ou, comme Martin Fowler — l’auteur de Refactoring — l’aurait présenté, des transformations qui préservent le comportement. Vous ne changez pas ce que fait le programme ; vous changez seulement la manière dont il est construit à l’intérieur, morceau par morceau.

En extrayant un morceau de code et en l’insérant dans une fonction nommée, vous ajoutez essentiellement une frontière solide autour du code et créez un noyau robuste. En enlevant une variable globale et en ajoutant des variables de classe, vous permettez la robustesse, car chaque instance peut maintenant avoir une valeur différente dans cette variable, comme nécessaire. En ayant un producteur/consommateur, ou un émetteur/récepteur, vous avez des symétries locales, des imbrications fortes et ambiguës, et une bonne forme.

Richard Gabriel, l’une des principales personnalités du Common Lisp , a étudié comment appliquer les théories d’Alexander au logiciel (et aussi à la poésie ; le code n’est-il pas similaire à la poésie après tout ?). Il donne l’exemple suivant :

  1. Imaginez que vous créez la classe AppelTelephonique. C’est un objet central implicite, qui pourrait être beaucoup plus puissant.
  2. Gerard Meszaros dans le modèle DemiObjet + Protocole suggérait de séparer l’objet en deux demi-appels, liés par un protocole. On obtient ainsi une symétrie locale, un centre fort et un effet d’échelle.
  3. Maintenant, dessinons cela sous forme de diagramme. On obtient alors de la symétrie locale, de l’effet

    d’échelle, des frontières, une imbrication forte et de l’ambiguïté. C’est ici que Meszaros a arrêté sa démarche.

  4. Richard Gabriel suggère alors de renforcer les centres existants en appliquant d’autres transformations qui préservent la structure. Que faire de l’objet central implicite au milieu ? Vous lui ajoutez une frontière explicite (Appel) qui lie les demiAppels entre eux. Cela améliore les symétries locales, maintient l’imbrication forte et l’ambiguïté, et c’est composable.

  5. Oui, c’est composable. Des appels multidirectionnels, des conférences téléphoniques, tout cela s’effectue 

    grâce à la mise en œuvre de transformations qui préservent la structure.

Chaque développeur garde probablement une image mentale du programme qu’il est en train de créer ou de modifier. La partie la plus difficile dans la modification d’un code que vous n’avez pas écrit est de commencer par visualiser cette image mentale. Quand vous travaillez pour que le code affiche une image plus jolie, il s’améliore — et Alexander nous propose une bonne façon de le faire.

Le processus fondamental

Alexander argumente longuement pour expliquer l’intérêt de suivre ce processus : appliquer des transformations qui préservent la structure est la seule manière de réussir une conception de qualité et fonctionnelle. Cela ne vaut pas seulement pour les immeubles, mais pour tout ce que nous construisons. Peu importe que vous partiez de l’existant — un programme, un bâtiment ou une ville — ou que vous partiez de zéro. Nous imitons la nature dans ses processus d’évolution et de régénération, mais nous allons plus vite.

  1. Commencez avec ce que vous avez : un espace vide, un immeuble déjà construit ou bien un programme qui ne ressemble à rien et difficile à utiliser.
  2. Identifiez les centres existant dans cet espace. Trouvez le centre le plus faible ou le moins cohérent.
  3. Voyez comment appliquer l’une au moins des quinze transformations qui préservent la structure afin de renforcer ce centre faible. A-t-il besoin d’être délimité ? A-t-il besoin de se confondre avec son entourage ? A-t-il besoin de plus de détails ? A-t-il besoin d’être dégagé ?
  4. Trouvez les nouveaux centres qui sont apparus quand vous avez appliqué les transformations à l’ancien centre. Cette nouvelle combinaison rend-elle les choses plus fortes ? Les rend-elle plus jolies ? Les rend-elle plus fonctionnelles ?
  5. Assurez-vous que vous avez fait la chose la plus simple possible.
  6. Retournez au début pour l’étape suivante.

Un résumé extrêmement simple pourrait être : trouvez les mauvaises parties, améliorez-les de la façon la plus simple possible, testez les résultats, réitérez.

Alexander ne tient pas à détruire les choses juste pour les reconstruire de façon différente. Il ne s’agit pas de pas démolir des quartiers d’une ville pour les reconstruire mais de les améliorer progressivement. Pour les logiciels, il est bien connu que vous n’allez pas réécrire quelque chose juste parce que vous ne le comprenez plus. Démolir quelque chose, c’est perdre toutes les connaissances qui avaient été incorporées à cette chose en train d’être détruite, même si elle semble étrange dans son état actuel.

De même, Alexander s’oppose à la création de modèles détaillés au préalable. Il donne un bon argument montrant pourquoi les modèles pré-établis ne peuvent pas fonctionner en fin de compte : parce qu’on ne peut pas prévoir de manière absolue tout ce qui va se passer lors de la construction et de l’implémentation ; parce qu’on oubliera forcément une partie des détails de l’environnement au sein duquel notre création évoluera ; parce que la nature en elle-même n’est pas pré-ordonnée et croît plutôt de manière libre et pousse sans pitié à l’évolution jusqu’à ce que les éléments qui la constituent survivent d’eux-mêmes.

De cette façon, vous ne concevez pas l’interface utilisateur en entier ou la structure complète, pour un grand programme, en une seule étape. Vous allez du grand au petit ou du petit au grand (niveaux d’échelle) ; vous testez chaque partie individuellement jusqu’à ce que ce soit bon (des centres solides) ; vous vous assurez que les parties ne sont pas trop déconnectées les unes des autres (interdépendance). Vous déplacez quelques widgets là où ils sont plus accessibles ou plus proches des données auxquelles ils se réfèrent. Vous enlevez quelques cadres et séparateurs pour réduire le désordre. Par dessus tout, vous évaluez continuellement ce que vous avez créé avec de vrais utilisateurs et des cas d’usage réels pour confronter les choses à la réalité, et non à votre imagination.

Un nom pour la qualité

Tout au long de The Nature of Order, Alexander parvient à montrer que les environnements ou les structures construites selon cette méthode finissent toutes par avoir la Qualité sans Nom. Il appelle cela une structure vivante. Cela peut être mesuré et comparé. Ce n’est plus sans nom ; on peut parler d’environnements ou de programmes qui ont une structure plus ou moins vivante par rapport à d’autres — et nous tendons à développer et à obtenir toujours plus de cette propriété.

J’ai seulement intitulé cet article « Le logiciel comme Qualité sans Nom » parce que ça semblait ainsi plus mystérieux.

Je ne peux prétendre connaître la façon parfaite de concevoir et écrire des logiciels. Mais au moins, j’ai une bonne méthode basée sur ce qui produit de bonnes choses ailleurs. Cela a fonctionné pour ma maison et, jusqu’à présent, ça a très bien marché pour mes logiciels. J’espère que ça fonctionnera bien pour vous aussi !

Références

  • Christopher Alexander, A Pattern Language. Version en ligne : http://bit.ly/8n6igg (NdÉ : lien invalide, le 1er février 2013).
  • Christopher Alexander, The Nature of Order. Une page web très moche http://www.natureoforder.com (NdÉ : visité le 1er février 2013).
  • Photos et dessins des 15 propriétés – http://bit.ly/b82Dxu (NdÉ : visité le 1er février 2013).
  • Richard Gabriel, Patterns of Software. Un superbe libre qui traite d’un grand nombre d’aspects du développement des logiciels, en transposant les idées de Christopher Alexander pour atteindre les meilleures techniques possibles en développement de logiciel. Version en ligne : http://bit.ly/dqGUp4 (NdÉ : visité le 1er février 2013).
  • Richard Gabriel, Christopher Alexander, the search for beauty. Une excellente présentation des idées de Christopher Alexander et une galerie de modèles dans le domaine du logiciel. http://bit.ly/ztE6cp (NdÉ : visité le 1er février 2013).
  • Richard Gabriel, The Nature of Order. Le monde post-modèles. Une autre très bonne présentation, qui fait suite à la précédente, explique les 15 propriétés, le processus fondamental et comment cela peut s’appliquer au logiciel. http://dreamsongs.com/Files/NatureOfOrder.pdf (NdÉ : visité le 1er février 2013).
  • Federico Mena Quintero, Software that has the Quality Without A Name. Présentation Desktop Summit de Berlin en 2011. http://bit.ly/oYgJUf (NdÉ : visité le 1er février 2013).