La FIFA ne veut pas qu’on danse de joie devant sa télé

Le football déclenche en ce moment même de féroces passions, mais aussi la rapacité de la FIFA. Voici un fait-divers qui l’illustre, il est digne de figurer dans le célèbre Copyright Madness de Numerama… c’est à la fois drôle et consternant.

Danser devant sa télé ? Pas question, dit la FIFA 

Source : FIFA Is Not Okay With Dancing In Front of the TV

Traduction Framalang : wyatt, simon, goofy

Nous voilà en pleine Coupe du monde de foot. Ça veut dire qu’on marque des buts. Et chaque but marqué donne lieu à une célébration enthousiaste. Voici par exemple une compilation (lien vers YouTube) de fans de football aux États-Unis qui fêtent un but de la dernière minute pendant la Coupe du monde de 2010. Ah, que de souvenirs.

Eh bien pourtant, la FIFA ne semble pas aimer que les fans de foot fêtent les victoires devant leur écran de télé. Cet organisme vient d’envoyer une mise en demeure de retrait pour une vidéo de 5 secondes montrant un petit garçon qui danse de joie dans le salon familial.

On distingue à l’arrière-plan l’écran de télévision dont l’image a été floutée depuis

 

Suite à un but marqué pendant le match Angleterre-Tunisie, Kathryn Conn a mis en ligne une vidéo de 5 secondes de son fils de 7 ans qui fête le but. Mrs Conn a expliqué que son fils est un« fan absolu des Spurs et qu’il voue littéralement un culte à Harry Kane, donc il s’est mis à danser de joie dans le salon. Malheureusement, la danse s’est déroulée devant l’écran de télévision qui diffusait encore le match. Et s’il y a une chose avec laquelle la FIFA ne rigole pas du tout, c’est bien leur copyright.

Mrs Conn raconte que le lendemain matin au réveil elle s’est rendu compte que la vidéo avait été supprimée de Twitter accompagnée d’un avertissement indiquant que c’était dû à une demande de retrait relative au DMCA (Digital Millennium Copyright Act) venant de la FIFA, laquelle était apparemment très ennuyée qu’une image floue en arrière-plan d’une partie de football dans une vidéo de 5 secondes puisse influer sur l’audience de l’événement sportif le plus attendu à la télé britannique en 2018.

Hmmm. un gamin qui danse dans une brève vidéo avec du matériel sous copyright en arrière-plan ? Nous espérons que ça ne prendra pas 10 ans de procédure comme dans l’affaire du bébé dansant pour que la FIFA en tire la leçon. La FIFA devrait respecter le fair use (usage raisonnable et acceptable) et respecter ses propres fans aussi…

 




Au revoir Revolv, bonjour obsolescence imposée

Pendant longtemps, acheter un objet signifiait pouvoir en disposer pleinement. Mais l’ère Google est arrivée, et les temps ont bel et bien changé.

Désormais, il faut composer avec des objets toujours connectés à leurs fabricants et à leur nouveau credo : l’obsolescence imposée, ou comment vous vendre un produit tout en gardant les pleins droits dessus. Quand il est possible de ne pas se contenter de l’argent du beurre, certains semblent ne pas se priver.

Google s’introduit au domicile de ses clients et neutralise leurs appareils connectés.

par Cory Doctorow

Source : Google reaches into customers’ homes and bricks their gadgets
Traduction Framalang : Piup, touriste, teromene, MagicFab, lumi, morgane, Pouhiou, simon, Blanchot, line, Diab, Penguin, herodor, lamessen, scailyna, tripou et quelques valeureux anonymes

Dave Bleasdale – CC-BY
Dave BleasdaleCC-BY

Revolv est une centrale de contrôle pour maison connectée dont Google a fait l’acquisition il y a 17 mois. Hier, Google a annoncé qu’à partir du 15 mai (2016, NdT), tous les Revolvs, où qu’ils soient, seraient mis hors-service et deviendraient inutilisables. La section 1201 de la loi américaine sur les droits d’auteur numériques (Digital Millennium Copyright Act, DMCA) précise que toute personne essayant de créer un système d’exploitation alternatif pour le Revolv commettrait un délit et risquerait jusqu’à 5 ans de prison.

Revolv est apparemment mis hors service parce qu’il n’a pas sa place dans les projets que Google prévoit pour Nest, son autre acquisition en matière de technologie domestique. La foire aux questions (FAQ) de Google indique à ses clients que tout cela est normal, car la garantie de ces objets a expiré, et que de toute manière, tout était indiqué en petits caractères dans les conditions qu’ils ont lues, ou au moins vues, ou pour lesquelles ils ont au minimum vu un lien quelque part.

Ce n’est pas encore un tremblement de terre, mais une secousse annonciatrice. Qu’il s’agisse de votre voiture, de vos ampoules ou de votre stimulateur cardiaque, les objets que vous possédez reposent de plus en plus sur des logiciels en réseau. Supprimez ces logiciels et ils deviennent des déchets électroniques inutilisables. Une entreprise vendant uniquement du matériel n’existe pas : les marges de profits ridiculement faibles sur le matériel obligent chaque entreprise de ce secteur à s’orienter vers le domaine du service et des données, et presque sans exception, ces entreprises utilisent les DRM (gestion des droits numériques) pour obtenir le droit de poursuivre en justice les concurrents qui fournissent les mêmes services, ou qui donnent à leurs clients la possibilité d’accéder à leurs propres données sur le matériel d’une entreprise concurrente.

Nous venons d’entrer dans une ère où les lave-vaisselle peuvent refuser de laver la vaisselle d’un autre fournisseur, et où leurs fabricants peuvent poursuivre en justice quiconque essayerait de fabriquer de la « vaisselle compatible ». Vous vendre un grille-pain n’avait jamais donné le droit au fabricant de vous dicter le choix de votre pain, pas plus que fabriquer un lecteur CD n’accordait à un fabricant le droit de contrôler le type de disque que vous souhaitez lire.

Si la dernière loi sur les droits d’auteur numériques (DMCA) a réussi à perdurer, c’est parce que nous considérons simplement comme une arnaque à la petite semaine des pratiques nous obligeant, par exemple, à acheter à nouveau un film que l’on a en DVD pour pouvoir le regarder sur son téléphone. Dans les faits, les règles du DMCA créent un système qui permet aux entreprises d’être les réels propriétaires de ce que vous achetez ; vous pensez acheter un objet, mais en réalité vous n’achetez tout simplement que le droit d’utiliser cet objet : c’est-à-dire une licence régie par des conditions d’utilisation que vous n’avez jamais lues, et encore moins approuvées, mais qui octroient à ces entreprises le droit de pénétrer chez vous et d’y faire ce qu’elles veulent avec le matériel que vous avez payé.

En somme, c’est un aimable et retentissant « Allez vous faire foutre » envoyé à toutes les personnes qui leur ont fait confiance en achetant leur matériel. Cette annonce a été faite longtemps après le rachat de l’entreprise par Google, il s’agit donc bien des paroles de Google sous la direction de Tony Fadell. Il faut également relever que pour les utilisateurs de ces objets connectés, la seule façon d’être informé de leur mutinerie est de se rendre sur le site Internet de Revolv alors même que Google dispose de l’adresse mail de ses clients.

Écoutez, je suis un grand garçon. Ce n’est pas la fin du monde. Il se trouve que je peux résoudre le problème en achetant un appareil de remplacement, tel que la centrale de contrôle produite par SmartThing, une entreprise appartenant à Samsung. Cet appareil n’est pas très cher, quelques centaines de dollars. Mais je suis vraiment inquiet. Cette initiative de Google soulève une série d’interrogations inhérentes à tout le matériel vendu par cette même société.

Quel sera le prochain appareil que Google décidera de neutraliser ? S’ils arrêtent le support d’Android, vont-ils décider que dès le lendemain de l’expiration de la dernière garantie, votre téléphone va s’éteindre à jamais ? Votre appareil Nexus est-il à l’abri ? Quid de votre alarme incendie ou de votre détecteur de fumée Nest ? Quid de votre Dropcam ? Et votre appareil Chromecast ? Google/Nest ne risque-t-il pas un jour de mettre votre famille en danger ?

Dans tous ces appareils, les aspects logiciels et matériels sont inextricablement liés. En vertu de quoi l’expiration d’une garantie donnerait-elle le droit de désactiver le fonctionnement d’un appareil ?

Arlo Gilbert/Medium, The time that Tony Fadell sold me a container of hummus.




Censurer un article en trollant le copyright : 25 000 $

À l’heure où la France a appliqué les premières censures administratives de sites web sans intervention d’un juge, on a besoin de bonne nouvelles. C’est chez WordPress, la célèbre plate-forme de blog basée sur le CMS éponyme, que l’on peut en trouver…

Abuser de l’arsenal judiciaire étasunien très coercitif qui permet aux ayants droit de faire plier les hébergeurs de contenus, le Digital Millenium Copyright Act (ou DMCA pour les intimes), aura coûté cher à ce troll du copyright… Et cette délibération nous prouve que la Justice sait encore faire la différence entre droits des auteurs et censure idéologique…

C’est étrange, car j’entends régulièrement un discours voulant faire des libristes des libéraux, réduisant les défenseurs des Internets à des bandits désirant une zone de non-droit… Alors que les libristes qui se battent contre les censures abusives sont, pour celles et ceux que je connais, des personnes éprises d’une chose simple : plus de justice.

Pouhiou

Image piquée à l'article "Putain de DNS menteurs" de reflets.info.
Image piquée à l’article « Putain de DNS menteurs » de reflets.info.

WordPress gagne 25 000 $ face à une demande de retrait abusive sous la loi DMCA

Traduction Framalang par : kl, r0u, KoS, simon, Omegax, Mcflyou + les anonymes
Source : torrentfreak

WordPress vient de remporter une importante victoire judiciaire contre un homme qui a abusé du DMCA pour censurer l’article d’un journaliste critique. Le tribunal a confirmé que la demande de retrait était illégitime et a accordé à WordPress environ 25.000$ de dommages et intérêts et de frais d’avocats.

Automattic, la compagnie derrière la célèbre plate-forme de blog WordPress, a fait face à une augmentation spectaculaire des demandes de retraits liées au DMCA au cours des dernières années.

La plupart des requêtes sont légitimes et ciblent bien du contenu piraté. Néanmoins, il y a également des cas où la demande de retrait est clairement abusive.

Afin d’endiguer ces requêtes frauduleuses, WordPress a décidé de saisir la justice aux côtés d’Oliver Hotham, un étudiant en journalisme qui a vu un de ses articles publié sur WordPress censuré à cause d’une demande de retrait infondée.

Hotham a écrit un article sur « Straight Pride UK » (NdT : groupuscule britannique prônant les valeurs hétérosexuelles, par opposition à Gay Pride), article incluant une réponse qu’il avait reçu de Nick Steiner, attaché de presse de cette organisation. Ce dernier, n’ayant pas apprécié l’article d’Hotham, a envoyé à WordPress une demande de retrait, au motif que celui-ci enfreignait son droit d’auteur.

WordPress et Hotham ont porté l’affaire devant une Cour fédérale de Californie, où ils ont demandé réparation pour les dommages que cet abus leur avait causé.

Cette affaire est l’une des rares où un fournisseur de services a intenté une action contre un abus DMCA. Le défenseur, toutefois, n’a pas répondu à la cour, qui a demandé à WordPress de déposer une requête pour jugement par défaut.

La compagnie a fait valoir le fait qu’elle était confrontée en tant que fournisseur de services en ligne à une responsabilité écrasante et entravante sur les droits d’auteur lorsqu’elle négligeait de retirer le contenu litigieux. Les gens comme Steiner exploitent cette faiblesse pour censurer les critiques ou les concurrents.
« L’avertissement de Steiner concernant le retrait du contenu frauduleux a obligé WordPress à enlever l’article d’Hotham sous peine de perdre la protection prévue dans les accords de sécurité du DMCA », souligne WordPress.

« Steiner n’a pas fait ça pour protéger une quelconque propriété intellectuelle légitime, mais dans le but de censurer la légitime expression critique de Hotham au sujet de Straight Pride UK. Il a forcé WordPress à supprimer un contenu totalement légal de son site internet. Le résultat est que la réputation de WordPress en a souffert. » rajoute la compagnie.

Après examen du cas, le magistrat américain Joseph Spero a écrit un rapport et une recommandation en faveur de WordPress et d’Hotham (pdf), et le juge de la cour de district Phyllis Hamilton a rendu un jugement par défaut cette semaine.
« Le tribunal a trouvé le rapport correct, bien motivé et approfondi, et l’a adopté en tous points, » écrit le juge Hamilton

« Il est ordonné et décrété que le défendeur Nick Steiner paie des dommages et intérêts à hauteur de 960.00 $ pour le travail et le temps d’Hotham, de 1,860.00 $ pour le temps passé par les salariés d’Automattic, et de 22,264.00 $ pour les frais d’avocat engagés par Automattic, pour une sanction arbitrale s’élevant au total à 25,084.00 $. »
Cette affaire est principalement une victoire symbolique, mais elle est importante. Elle devrait envoyer un signal clair aux autres détenteurs de copyright : les fausses demandes de recours DMCA ne restent pas toujours impunies.