La fabuleuse histoire d’une pièce de 5 euros

Une pièce de 5 euros commémorative entièrement réalisée avec des logiciels libres, cela n’arrive pas tous les jours.

Quand, de plus, son auteur prend le soin de nous expliquer en détail sa démarche technique mais surtout artistique, cela donne un article tout à fait passionnant qu’il eut été grand dommage de ne pas traduire[1].

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Stani – 29 octobre 2008 – Creative Commons By

Le ministère des finances néerlandais a organisé un concours d’architecture pour lequel un groupe de cabinet d’architectes trié sur le volet (unstudio, nox, etc.) et des artistes étaient conviés, moi y compris. Le but de la compétition n’était pas d’ériger un bâtiment mais de réaliser le design de la nouvelle pièce de 5 euros commémorative sur le thème « Les Pays-Bas et l’architecture ». Le gagnant se verra offrir un beau prix, mais sa récompense sera surtout d’avoir l’honneur de voir son design concrétisé sur une pièce qui aura cours au sein des Pays-Bas.

J’ai abordé le sujet « Les Pays-Bas et l’architecture » sous deux aspects. J’ai voulu rendre hommage aussi bien à la riche histoire architecturale des Pays-Bas qu’à la qualité de l’architecture néerlandaise contemporaine. Voilà les idées pour chaque face de ma pièce. Traditionnellement le portrait de la reine doit apparaître sur le côté face tandis qu’on retrouve la valeur de la pièce sur le côté pile.

Côté face

Architectuur_5_2008_vz_v5.jpg

Si l’on regarde de près mon portrait de la reine (cliquez sur l’image pour un agrandissement) vous verrez clairement qu’il est constitué de noms d’architectes néerlandais majeurs. Quand on part de l’extérieur les noms sont clairement lisibles et ils deviennent plus petit au centre. Grâce à une loupe tous les noms sont lisibles, mais pas tous à l’œil nu. Je trouve cela fascinant qu’un vieux support comme une pièce de monnaie puisse devenir en quelque sorte un « disque compact » d’informations.

La tension entre ce qui est lisible et ce qui ne l’est pas est aussi une métaphore du temps qui façonne l’histoire. Quelques grands noms du passé peuvent devenir moins influents et réciproquement. Pour retranscrire cette idée j’ai décidé non pas de classer les architectes par ordre alphabétique ou chronologique mais d’utiliser Internet comme un sismographe et de les classer par nombre de références trouvées.

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Évidemment cet ordre évolue dans le temps et il constitue donc un repère temporel supplémentaire par rapport au nombre « 2008 » gravé. Je ne pouvais faire entrer que 109 noms d’architectes sur la pièce, ma sélection a donc été simple. Apparemment, la célébrité est exponentielle :

architects_yahoo.png

Pour réaliser l’image j’ai développé ma propre police. La largeur des lignes au sein d’une même lettre est variable afin de pouvoir recréer l’image :

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Côté Pile

Architectuur_5_2008_kz_v5.jpg

De nos jours l’architecture néerlandaise est connue pour sa forte approche conceptuelle. Cela se traduit par le fait que non seulement il y a beaucoup de livres à propos des architectes néerlandais, mais aussi beaucoup d’ouvrages rédigés par des architectes néerlandais.

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Du côté pile j’ai imaginé le bord de la pièce comme une bibliothèque. Les livres s’élèvent comme des immeubles vers le centre de la pièce. Leur disposition n’est pas laissée au hasard puisqu’ils recréent les contours des Pays-Bas tandis que les silhouettes d’oiseaux rappellent la capitale de chaque province. Le dessin ci-dessous dévoile le cheminement de l’idée :

scheme_books.jpg

Un des problèmes était alors de choisir le nombre de livres : beaucoup de livres fins ou seulement quelques gros livres ? Avec un gros livre on ne peut que faire un cercle. Pour réussir à découper la silhouette la plus précise des Pays-Bas il faudrait des livres d’une page, ce qui n’est pas idéal non plus. Il fallait donc trouver un juste milieu et vous pouvez voir le résultat sur les ébauches ci-dessous. A gauche vous trouverez l’approximation des Pays-Bas, au milieu la « skyline » (NdT : ligne de crête) dessinée par les livres et à droite la différence entre la « skyline » dessinée par les livres et la silhouette des Pays-Bas :

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Ensuite vient le croquis de l’idée avec les oiseaux. Chaque oiseau vole au dessus de la capitale d’une province néerlandaise. Sur la pièce finale ces oiseaux choisis aléatoirement sont remplacés par des oiseaux typiques de chaque province.

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Technique

Tout le travail a été accompli à 100% avec des logiciels libres. La plupart sont des logiciels en Python adaptés à mes besoins grâce à l’éditeur SPE (Stani’s Python Editor). Pour la puissance visuelle j’ai employé PIL et pyCairo. De temps à autre Gimp, Inkscape et Phatch se sont révélés utiles. Tout le développement et le traitement ont été fait sur des machines sous GNU/Linux qui exécutaient Ubuntu/Debian. A la fin j’ai du travailler en étroite collaboration avec les techniciens de la Royal Dutch Mint (là où les pièces sont frappées) dans leurs ateliers. Les derniers détails ont donc été réglés sur mon Asus Eee PC (je ne comprends toujours pas pourquoi Asus ne livre pas ses netbooks sous Ubuntu). Générer la pièce sur le Eee prenait un peu plus de temps (30 secondes à la place de 3 secondes pour générer la pièce entière) mais faisait très bien l’affaire. Pour chercher le nombres de références sur Internet j’ai redécouvert Yahoo qui propose une api bien meilleure pour les requêtes automatiques que ses concurrents. Évidemment, le jury ne jugeait que le design et pas les logiciels utilisés et d’autres ont employé Maya, Illustrator, etc.

And the winner is…

Je suis fier de vous annoncer que j’ai gagné le concours ! Et donc prochainement 350 000 néerlandais feront usage du fruit de logiciels libres. J’aurai aimé pouvoir mettre la pièce sous licence GPL, ce qui aurait peut-être résolu la crise financière. Mais pour des raisons évidentes je n’ai pas eu la permission de le faire. Des versions spéciales seront aussi produites pour les collectionneurs du monde entier : une édition en argent pur pour 30,95€ et une édition en or pur pour 194,95€. Elles seront certainement rapidement en rupture de stock car ce sont des vrais objets de collection. La pièce sera mise en vente dans tous les bureaux de la poste néerlandaise le même jour que la sortie d’Intrepid Ibex : le 30 octobre 2008.

Voilà quelques images de la vraie pièce :

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Une publicité pour cette pièce sera diffusée une vingtaine de fois aux heures de forte audience à la télévision néerlandaise, c’est une belle réalisation (elle sera disponible prochainement) et des encarts publicitaires ont déjà été achetés dans plusieurs journaux. Ci-dessous le lancement officiel de la pièce aujourd’hui avec de gauche à droite : moi-même, le secrétaire d’Etat aux finances De Jager, l’architecte gouvernemental en chef Liesbeth van der Pol et le Maître de l’Hôtel des Monnaies Maarten Brouwer…

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Notes

[1] Grand merci à Olivier pour la traduction.




Soutenir le logiciel libre au Parlement européen

Lu sur LinuxFr.

Pour être adoptée, la déclaration ci-dessous doit recueillir 393 signatures d’ici le 25 septembre 2008. Toutes les personnes qui soutiennent le Logiciel Libre en France et en Europe sont appelées à contacter leurs eurodéputés pour leur demander de signer cette déclaration lors de la session plénière de la semaine prochaine.

Copie d'écran - LinuxFr

Déclaration écrite sur l’utilisation des "logiciels libres"

19.5.2008 – 0046/2008
Échéance : 25.9.2008

déposée conformément à l’article 116 du règlement par Jean Louis Cottigny, Pierre Pribetich, Michel Rocard, Bronislaw Geremek et Daniel Cohn-Bendit sur l’utilisation des "logiciels libres"

Le Parlement européen,

– vu l’article 116 de son règlement,

A. considérant les disparités croissantes d’accès aux nouvelles technologies de l’information et de la communication au sein de l’Union européenne, reflétées par l’établissement d’une fracture numérique, nouvelle cause de la disparité sociale contribuant à exclure une population déjà fragilisée,

B. considérant que ces nouvelles technologies sont devenues un outil essentiel dans des domaines aussi variés que l’emploi, la formation, l’information, etc…,

C. considérant aussi que les citoyens européens ont le droit inaliénable d’accéder sans contrainte aux documents et informations émanant des institutions les représentant,

D. considérant enfin que l’utilisation des "logiciels libres" apparaît comme un des moyens efficaces de réduction de cette fracture numérique et que cette solution mise en place par certains États membres au sein de leurs administrations apporte des résultats probants,

1. demande que l’Union européenne prenne les mesures nécessaires afin d’aider au financement de la recherche publique en matière de logiciels libres;

2. demande au Parlement de faire migrer l’ensemble de son réseau informatique vers ce type de logiciels;

3. charge son Président de transmettre la présente déclaration, accompagnée du nom des signataires, aux Parlements des États membres, au Conseil et à la Commission, afin qu’ils s’associent à cette démarche.