Une vidéo de 3 minutes pour entrer dans l’univers des Creative Commons

Pour faire référence à un récent (et édifiant) billet, si j’avais été à la place du conférencier de Calysto, j’aurais peut-être commencé pour montrer aux élèves la ressource ci-dessous que nous venons de sous-titrer.

Il s’agit d’une vidéo de présentation des Creative Commons. Et nous ne sommes plus alors dans un « Internet de tous les dangers » mais dans un « Internet de tous les possibles ». Pas de risque alors que les élèves en concluent qu’il faille « arrêter de vivre et interdire Internet ». Ce sera alors plutôt l’envie de participer qui prédominera.

On n’apprendra rien ici aux lecteurs familiers du Framablog mais n’hésitez pas à relayer l’information à tous ceux qui ne connaissent pas ou peu les Creative Commons.

—> La vidéo au format webm
—> Le fichier de sous-titres

La page d’origine de la vidéo comprenant toutes les sources des médias utilisés.




Quand Calysto passe au lycée, les élèves se demandent s’il ne faut pas arrêter Internet !

Prakhar Amba - CC byIl est des billets que l’on n’aime pas avoir à publier. Celui-ci en fait clairement partie tant il m’irrite au plus haut point !

Il illustre malheureusement une nouvelle fois l’incapacité chronique de l’école à comprendre et former aux nouvelles technologies et aux enjeux de demain.

C’est donc l’histoire d’un lycée qui souhaite organiser une journée de sensibilisation sur le thème « Réseaux sociaux, gérer son identité numérique ». Louable intention s’il en est. Et l’on imagine fort bien que derrière ce titre se cache l’ombre de Facebook, devenu effectivement omniprésent chez les ados avec toutes les questions et conséquences que cela implique[1].

Soit, les enseignants ne sont pas tous des spécialistes du numérique, mais il doit bien y avoir dans une équipe pédagogique quelques compétences en la matière. Donc logiquement cela devrait pouvoir se préparer en interne. Mais non, on fait appel à une société privée.

Calysto se définit comme « une agence qui concentre son activité dans la maîtrise des enjeux liés aux usages de l’Internet et aux Technologies de l’Information et de la Communication ». Et, via son site TousConnectes.fr, elle propose aux établissements scolaires des journées d’information « dans le cadre de son partenariat avec le ministère de l’Education nationale ».

Voici la page de présentation de l’offre pour le lycée, sachant qu’il en coûtera à l’établissement (et donc au contribuable) 376 euros par jour. Elle commence ainsi : « Les lycéens se sont largement appropriés l’univers de l’Internet et du téléphone mobile dont les usages sont en constante évolution. S’ils en sont très souvent les prescripteurs, certaines notions leur échappent et nécessitent d’être approfondies. »

Calysto propose également de conférences pour les parents et se targue d’avoir déjà organisé plus de 230 conférences ayant touché plus de 22 000 adultes.

J’ai fait une rapide recherche Web et il semblerait que beaucoup établissements scolaires aient déjà fait appel aux services de Calysto, qui, il y a à peine une semaine, a même eu l’honneur d’un article dans le journal Sud Ouest. Extrait : « De nombreux contenus multimédias sont soumis à des droits d’auteur, la récente loi Hadopi a été mise en place pour les protéger (…) On peut retrouver n’importe quel internaute par son adresse IP ».

Cet extrait anxiogène n’est qu’un avant-goût de ce qui va suivre.

Calysto est passée tout dernièrement dans un lycée dont nous tairons le nom. C’est le témoignage édifiant d’un enseignant présent ce jour-là que nous vous proposons ci-dessous.

Parents vous pouvez dormir tranquille, la police de la pensée veille sur vos enfants ! Sauf que les enfants ne sont pas dupes, et leurs réactions radicales au sortir de la journée donnent paradoxalement espoir : « On fait quoi ? Il faut tout arrêter ? On ne va pas arrêter de vivre quand-même. Dans ce cas il faut interdire Internet ».

Quant à nous (nous Framasoft, mais aussi April, Quadrature, Wikipédia, etc.), il faut absolument que l’on s’organise pour proposer des journées alternatives, bénévoles et gratuites, afin d’opposer à un tel discours notre propre approche et culture du Net.

La plus belle c’est Calysto !

Par un enseignant, quelque part en France

À l’initiative des documentalistes et des CPE dans mon lycée se sont tenus des débats-conférences autour des dangers de l’internet et des réseaux sociaux. Ils ont fait appel à la société privée Calysto qui propose des solutions « clé en main ».

J’y ai assisté avec mes élèves de Seconde, et là je dois dire que j’ai été atterré.Le débat n’avait rien de participatif, l’intervenant faisait réagir les élèves avec des images chocs mais ne poussait pas la réflexion. Nous avons eu droit à une succession à un rythme effréné de faits divers et d’anecdotes. Le discours était très culpabilisant, ce qui est contre-productif avec les ados, « C’est interdit, c’est pas bien, vous n’avez pas lu les conditions d’utilisations, et oui, faut lire ».

Voici mon témoignage mais je dois préalablement dire que parmi mes collègues certains trouvaient d’une part que ça avait le mérite de lancer le débat et qu’il fallait donner une suite avec les profs, et que d’autre part tout le monde n’est pas spécialiste du sujet et qu’il faut passer par des simplifications et des abus de langage. Et qu’un discours policé de spécialiste n’aurait pas eu d’effet sur le public ado.

Lors de la conférence il y a  des oppositions franches sur des faits précis. L’intervenant soutenait certains propos que je lui disais être faux. Il a insisté et à aucun moment n’a montré le moindre doute du genre « je ne suis plus sûr du chiffre exact, il faudrait vérifier ». J’ai du prouver mon point de vue sourcé  a posteriori à mes collègues pour démontrer qu’il s’était manifestement trompé et qu’il a soutenu le contraire, quitte à me faire passer pour un incompétent.

Exemple 1 : Les conditions d’utilisation

Lui – Vous avez un compte Facebook par exemple ? Mains levées. Avez-vous lu les conditions d’utilisation ? Mains baissées. Eh oui faut lire !

Moi, me mettant dans la peau d’un élève – Mais encore ? Une fois qu’on l’a lu, on fait quoi s’il y a un truc qui nous gène ? On n’a pas le choix ?

Lui, véhément – Je ne peux vous laisser dire ça, on a toujours le choix, il faut lire les clauses c’est votre responsabilité, blabla…

C’était ma première intervention je ne pensais vraiment pas à mal, au contraire c’était pour lancer le débat.

Moi, dans mon idée faire émerger l’e-citoyen – Bien sûr mais ce que je veux dire, c’est s’il y a parfois des clauses abusives on fait quoi, les CLUF sont rédigés par des armées d’avocats qui se sont blindés ! N’est-ce pas à la loi, à nos députés, aux associations de consommateurs de nous protéger ?

(Et je ne parle même pas de class-action qu’on n’a pas en France.)

Lui, impatient ne voulant pas aller dans cette direction et voulant reprendre le fil de son intervention formatée et bien rodée – Non vous avez accepté c’est trop tard.

À partir de là il me suggère franchement de me taire, je lui réponds que j’ai été invité avec mes élèves et l’intitulé de l’invitation était Conférence, débat et échanges, là-dessus, il me mouche en me disant « oui, mais avec les élèves. » Je suis passablement énervé. J’ironise en disant que j’avais bien lu les CLUF pourtant.

Exemple 2 : L’HADOPI

Lui – L’Hadopi a faim, ils veulent rentrer dans leurs frais ça coûte cher, elle a condamné 75 000 internautes depuis le mois d’août.

Moi – Personne n’a été condamné, des mails d’avertissements ont été envoyés mais à ce jour aucun accès internet n’a été coupé !

Lui – Si il y a eu 75 000 condamnations et pas plus tard que …. il y a avait un jeune de 19 ans qui s’est fait coupé son accès.

Moi – Il y a eu 75 000 mails envoyés je vous l’accorde mais aucune coupure.

Lui – Nous avons les chiffres, mon collègue de Calysto va à l’ALPA (Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle) tout le temps alors…

Grosso-modo on sait mieux que vous.

À ce moment là j’abandonne vu la réaction d’un de mes collègues (mais c’est du détail les batailles de chiffres), au même moment un autre collègue avec son iPhone se connecte sur le site de l’Hadopi et me dit qu’il doit confondre condamnations et recommandations ! Effarant.

Là en se moquant de moi il me demande si je n’ai pas une pause à aller prendre.

On passe à des copies d’écrans de sites pro-ana, les images choquent et font réagir les élèves. Il demande le silence, les menace de ne plus laisser parler si ils sont aussi bruyants.

Exemple 3 : La LOPPSI

Un autre prof pose la question suite aux diapos concernant le streaming et le direct download, peut-on (les autorités) aller voir dans mon disque dur ?

Lui – Oui bien sûr !

Moi, me sentant obligé de réagir alors que je ne voulais plus – Non c’est faux, il faut l’avis d’un juge, la police ou la gendarmerie doit avoir une commision rogatoire pour examiner le contenu de votre ordinateur.

Lui – Et non monsieur c’est LOPPSI 2, vous n’avez pas lu dans le journal : Les dictateurs en rêvaient Sarkozy l’a fait ! ?

Moi, j’ai un doute j’avoue que je n’avais pas potassé la loi LOPPSI2 – La LOPPSI2 n’est pas encore entrée en vigueur, elle vient juste d’être votée, aucun décret d’application n’a été publié.

Lui poursuit sans tenir compte de ma réponse, alors dans la tête des élèves ça donne ceci : « la police, les gendarmes peuvent se connecter même de l’extérieur comme ils veulent à notre ordinateur et accéder à son contenu ».

Après avoir fait quelques recherches ils se trouve que la LOPPSI 2 est actuellement visée par le Conseil constitutionnel et sur Wikipédia (à vérifier) j’ai pu lire que : « La police, sur autorisation du juge des libertés, pourrait utiliser tout moyen (physiquement ou à distance) pour s’introduire dans des ordinateurs et en extraire des données dans diverses affaires, allant de crimes graves (pédophilie, meurtre, etc.) au trafic d’armes, de stupéfiants, au blanchiment d’argent, mais aussi au délit « d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irrégulier d’un étranger en France commis en bande organisée », sans le consentement des propriétaires des ordinateurs. »

Nos ados téléchargeurs illégaux seraient-ils des terroristes trafiquants de stupéfiants ?

Après ça, c’en était trop je suis sorti une dizaine de minutes de la salle, puis je suis revenu m’installer tout au fond pour ne plus rien dire jusqu’à la fin. Pendant ce temps on assistait à d’autre passes d’armes moins intenses avec un autre collègue.

Et le libre dans tout ça ?

Et bien surprise il y en avait un peu. C’était pas le top mais quand même. On a eu droit à une diapo sur les contenus Creative Commons, mais sans rentrer dans les détails. « Il existe des contenus libres de droits comme le portail Jamendo pour la musique. »

Lui – Jamendo où ce sont des artistes pas connus qui partagent le contenu, c’est financé par la pub.

Moi – On peut aussi donner pour soutenir un artiste qu’on aime… aller à ses concerts.

Lui – Oui c’est comme Grégoire, vous misez sur un artiste en espérant que…

j’ai voulu dire que MyMajorCompany et Jamendo ce n’était pas la même chose, mais je n’ai pu le confier qu’à mon voisin car il était déjà reparti sur un autre sujet.

On a vu aussi un slide sur le P2P avec trois contenus Batman_origin.avi, Firefox, Adobe Reader et il a demandé si c’était du piratage ? Oui pour Batman mais non pour Firefox et Acrobat Reader qui sont gratuits mais nous ne sommes pas rentrés dans les différences entre ces deux contenus « gratuits ».

Lui qui disait qu’il fallait absolument lire les CLUF pour savoir à quoi s’en tenir apparemment ne le savait pas. Et préalablement il a bien dit que l’outil P2P avait été conçu pour partager des fichiers et que ce sont certains utilisateurs qui s’en servent pour partager des contenus qui ne respectent pas le droit d’auteur.

Pour conclure

Je pense  vraiment que l’intervenant était un animateur commercial formé sur le sujet à la va-vite, utilisant des techniques de communication éprouvées : frapper les esprits, faire réagir (rires) puis engueuler méchamment, culpabiliser, provoquer un sentiment de honte (en invoquant par exemple la sexualité hésitante des ados), affirmer sa connaissance sans faille en invoquant des sources bétons mais invérifiables, et abuser des arguments d’autorité sans justifier leur raison d’être.

Le thème que nous voulions traiter était « Réseaux sociaux, gérer son identité numérique ». J’ai eu l’occasion de parler avec quelques élèves par la suite, ils sont sortis de là en se disant « On fait quoi ? Il faut tout arrêter ? On ne va pas arrêter de vivre quand-même. Dans ce cas il faut interdire Internet ».

Peut-être que c’est ce qui nous attend si ce genre d’idées simplistes continue à se diffuser.

Bientôt on aura le droit un avertissement du type : « Internet tue, provoque la dépendance, l’isolement ».

Et nous rajouterons : « et libère des peuples ».

Notes

[1] Crédit photo : Prakhar Amba (Creative Commons By)




Quand Max, 11 ans, met Inkscape dans sa liste au Père Noël

Inkscape à l'écoleVous voyez les petits personnages sur le dessin ci-contre ? Ils ont tous été réalisés par des enfants d’une dizaine d’années à partir du logiciel libre Inkscape.

C’est l’histoire simple et belle de ces dessins que nous raconte ici le blogueur Phil Shapiro, qui n’oublie pas de remercier au passage le principal développeur d’Inkscape.

En espérant que nombreux seront les enseignants francophones à s’inspirer du projet de Sheena Vaidyanathan.

Je ne sais pas vous, mais moi je trouve cela réconfortant qu’un enfant de 11 ans préfère recevoir Inkscape plutôt qu’une horrible Zhu Zhu Pets comme cadeau de Noël 😉

Les étudiants de Los Altos apprécient le logiciel de dessin Inkscape

Students in Los Altos delight in using Inkscape drawing program

Phil Shapiro – 23 février 2011 – OpenSource.com
(Traduction Framalang : Khyl, Penguin et Naar)

L’un des aspects les plus amusants de mon blog à PCWorld.com est de lire les réactions envoyées par email en provenance du monde entier. Vous ne savez jamais qui va consulter ce que vous écrivez. Parfois, ils vont repérer un billet du blog sur la page d’accueil de PCWorld.com, ou dans le lien d’un message envoyé via Twitter, voire même dans un résultat de recherche sur Google plusieurs mois après que le billet ait été publié.

J’ai ainsi écrit un jour un billet sur Inkscape, l’éditeur de graphisme vectoriel libre pour Linux, Macintosh et Windows, et j’ai été alors ravi de recevoir un email de Sheena Vaidyanathan, qui enseigne l’utilisation d’Inkscape à ses élèves du primaire de Los Altos en Californie, au cœur de la Silicon Valley.

Voici comment Sheena m’a expliqué sa façon d’enseigner : « J’ai commencé à utiliser Inkscape en tant qu’outil de base pour le travail artistique, puis comme logiciel à utiliser après l’école et il est devenu si populaire que l’académie m’a demandé de l’associer à un programme appelé Digital Design pour les 7 écoles élémentaires. J’enseigne à 20 classes chaque semaine allant du CM1 à la 6e et chaque classe compte en moyenne 25 élèves. Après un trimestre, j’ai eu un nouveau groupe d’étudiants, et en un an, j’ai enseigné à tous les élèves de CM1 a la 6e, soit au bas mot 1500 étudiants ! C’est beaucoup de travail, mais j’adore enseigner et partager mon goût pour l’art et la technologie avec les enfants. J’adore utiliser Inkscape et d’autres logiciels libres (j’utilise aussi SketchUp et Scratch) parce que les enfants peuvent tout à fait les installer chez eux et les utiliser en dehors des heures de cours. Je ne suis pas sûre qu’il y ait d’autres écoles publiques qui aient un enseignement comme celui-ci, mais c’est un levier formidable pour motiver les enfants à la technologie et leur apprendre à utiliser les ordinateurs pour exprimer leur créativité. »

L’email de Sheena décrit un scénario qui est le rêve de tout éducateur : libérer les apprentissages par la créativité et les arts. J’ai demandé à Sheena si elle pouvait rédiger une note plus détaillée sur son projet, chose qu’elle a tenu à faire avec beaucoup de gentillesse et que l’on peut voir dans le contenu de ce billet qui comprend des liens vers les dessins de ses élèves réalisés sous Inkscape.

La cerise sur le gâteau dans cette histoire était dans le mail suivant que j’ai reçu de Sheena. Un de ses élèves de 6e, Max Jarrel, a dit à ses parents que ce qu’il souhaitait vraiment pour Noël était le logiciel Inkscape ! Voici le témoignage de son père : « Mon fils, Max, était fasciné par Inkscape et il a dit que c’était ça qu’il voulait pour Noël. J’ai ensuite découvert que le téléchargement du logiciel était facile et gratuit. Et il n’a pas arrrêté de jouer avec. » J’imagine Max sur son Inkscape, essayant chaque jour de créer des œuvres artistiques de plus en plus intéressantes.

Je fais partie de ceux qui croient que l’université ne commence pas une fois que vous avez achevé vos études secondaires. L’université débute au collège, quand vous commencez à prendre conscience de vos talents naturels et de vos sources d’intérêt. Le lycée permet de développer ces talents et ces centres d’intérêts. L’université est la strcuture qui permet de finaliser cela. Les étudiants développent rarement de nouveaux intérêts après avoir quitté le lycée. C’est formidable quand cela arrive, mais c’est l’exception plutôt que la règle.

Ainsi, ce que font Sheena Vaidyanathan et l’académie de Los Altos, c’est d’offrir des possibilités de conception graphique à un grand nombre d’étudiants. En combinaison avec les formations qu’elle dispense dans Google SketchUp et le langage de programmation Scratch, du MIT, ces étudiants font très tôt l’acquisition de solides compétences numériques qui leur rendront d’excellents services plus tard, quelle que soit la carrière qu’ils pourront choisir. De plus tous les logiciels mentionnés ci-dessus sont libres ou gratuits, ce qui signifie que cette académie lutte également contre la fracture numérique.

Quand j’ai lu le best-seller de Daniel Pink, A Whole New Mind (NdT : L’homme aux deux cerveaux), j’ai imaginé à quoi pourrait ressembler l’école du futur avec des élèves occupés à exploiter leurs créations sous la bienveillante direction d’un enseignant sage et attentionné. Sheena Vaidyanathan et ses étudiants sont une preuve vivante que ce futur est déjà là. Teresa Amabile, psychosociologue spécialiste de la créativité et de l’innovation, avait déjà clairement entrevu cela il y a 20 ans dans son livre Growing Up Creative: Nurturing a Lifetime of Creativity (NdT : Grandir créatif ou comment éduquer sa vie à la créativité). Tous les élèves et enseignants ont quelques part une dette envers Daniel Pink et Teresa Amabile. Leurs réflexions nous ont emmenés très loin dans la conception humaine et enrichissante d’une éducation pour nos enfants.

Ce billet ne saurait être complet sans mentionner l’incroyable dévotion et le talent des développeurs bénévoles qui ont conçu Inkscape. Je suis particulièrement impressionné par Jon A. Cruz, qui n’est pas seulement un artiste et un programmeur d’Inkscape, mais qui prend aussi beaucoup de son temps à répondre patiemment aux demandes des utilisateurs sur Twitter. Dans mon esprit, Jon Cruz ressemble un peu à un agriculteur qui dispose de son propre restaurant. Il ne fait pas simplement que produire de la nourriture et la cuisiner, il vient jusqu’à votre table et vous demande si vous l’appréciez. Tel est l’esprit du logiciel libre et du mouvement open source (NdT : FOSS en anglais, pour Free Open Source Software). Si vous n’y avez pas encore goûté, asseyez-vous. Vous êtes ici pour faire un festin !

Par ailleurs, vous pourrez rencontrer et discuter avec Jon Cruz en personne lors du prochain salon Linux (également dénommé SCALE 9x), qui aura lieu fin février 2011 à Los Angeles, en Californie du sud. Il sera présent sur le stand Inkscape. Voici une courte vidéo de Jon Cruz parlant de Inkscape en Australie, au début du mois. Si vous assistez au congrès SCALE 9x, arrêtez-vous également pour dire bonjour à Jonathan Thomas, le programmeur au talent immense d’OpenShot, l’excellent éditeur libre de vidéos pour Linux. Devinez ce qu’OpenShot utilise comme technologie avancée pour ses titres vidéos ? Vous l’avez deviné : Inkscape.




Et si Internet et le Libre réalisaient la société sans école d’Ivan Illitch ?

Une société sans école - Ivan Illich - Couverture PointsJe suis en train de lire Une société sans école du prêtre catholique et iconoclaste Ivan Illich.

Rédigé en 1971, c’est un ouvrage que je conseille à tous ceux qui s’intéressent de près ou de loin à la question éducative (autant dire à tout le monde).

Si j’avais lu ce livre au jour de sa sortie, je me serais certainement dit que j’étais en face d’un bel utopiste, aussi brillant soit-il.

En le découvrant quarante ans plus tard, à l’ère d’Internet et de tous ses possibles, je crois plutôt avoir à faire à un grand visionnaire.

Voici ce qu’en dit la quatrième de couverture de mon édition de poche collection Points Essais : « L’école obligatoire, la scolarité prolongée, la course aux diplômes, autant de faux progrès qui consistent à produire des élèves dociles, prêts à consommer des programmes tout fait préparés par les autorités et à obéir aux institutions. À cela il faut substituer des échanges entre égaux et une véritable éducation qui prépare à la vie dans la vie, qui donne le goût d’inventer et d’expérimenter. »

Il convient de déscolariser la société pour libérer l’apprentissage de cette structure unique, standardisée et rigide qui sépare artificiellement les individus ainsi que le temps où l’on travaille et celui où l’on consomme du loisir.

Et page 128, il y a cette citation que je trouve absolument remarquable et qui a motivé la rédaction de ce court billet :

« Un véritable système éducatif devrait se proposer trois objectifs. À tous ceux qui veulent apprendre, il faut donner accès aux ressources existantes, et ce à n’importe quelle époque de leur existence. Il faut ensuite que ceux qui désirent partager leurs connaissances puissent rencontrer toute autre personne qui souhaite les acquérir. Enfin, il s’agit de permettre aux porteurs d’idées nouvelles, à ceux qui veulent affronter l’opinion publique, de se faire entendre. »

À mettre en parallèle avec ce que cherchent à réaliser Le Libre et son allié Internet aujourd’hui…




Aujourd’hui ma soeur a décidé de se mettre à l’informatique et… mauvaise surprise !

Hygiene Matters - CC byNous avons recopié ci-dessous un mail que nous avons reçu hier d’un de nos lecteurs suisses. Il raconte l’histoire d’une « association de trois malfaiteurs » : Google, Microsoft et l’État français, qui trompent indûment les néophytes souhaitant découvrir l’informatique.

En effet, en voulant aider sa sœur à (enfin) s’initier aux nouvelles technologies, Florian a naïvement tapé « débuter en informatique » dans Google.

Et il est tombé en deuxième lien sur une horrible page du très officiel site gouvernemental de la Délégation aux Usages de l’Internet (DUI)[1].

Horrible parce que n’ayant visiblement pas été mise à jour depuis 2006, on se retrouve avec des informations totalement obsolètes qui font la part belle à Word et Windows !

Aucune référence explicite au logiciel libre. On y trouve bien une petite mention de notre OS favori mais l’unique lien est un LUG canadien : « Windows reste le système d’exploitation le plus répandu, ceux qui souhaitent s’initier à Linux peuvent consulter le site GULUS (groupe d’utilisateurs Linux de l’Université de Sherbrooke), destiné aux débutants ».

Le problème c’est que l’obsolescence de cette page n’est pas le problème de l’algorithme de Google, et il continue donc de proposer cette page en tête de gondole lorsque l’on cherche à débuter en informatique. Du coup j’ai bien peur que la sœur de Florian n’ait pas été la seule à tomber sur ce lien qu’il serait responsable de supprimer ou de mettre immédiatement à jour en n’oubliant pas cette fois-ci le logiciel libre.

PS : Si vous avez envie de le leur suggérer directement, vous trouverez quelques adresses de courriel sur cette page du site.

Un courriel de Florian S.

Titre : Un gouvernement aux bottes de Microsoft

Bonjour à vous chers responsables du site Framasoft,

Tout d’abord je tiens à vous remercier pour tout le travail que vous faites sur les différents projets (j’ai un faible pour les Framabook), je suis rarement actif dans la communauté cependant je suis un libriste convaincu, je préfère peut-être en parler autour de moi plutôt que sur Internet qui regorge assez d’informations.

Aujourd’hui ma sœur a décidé de se mettre à l’informatique, elle va endurer un apprentissage relativement long puisqu’elle a toujours refusé de s’y mettre et qu’elle doit donc apprendre depuis zéro, il est évident que je vais de suite la mener au monde du Libre.

Pour cela j’ai fais une requête sur Google, digne d’un débutant (sans méchanceté aucune) afin de me fournir en documentation pour savoir quel aspect de l’informatique je devrais mettre en valeur pour commencer, il m’a suffit de taper « débuter en informatique » pour avoir une vision globale du gouvernement français (grâce à mon oeil libriste), si comme moi, le deuxième lien de Google pointe sur cette page je pense à juste titre, que cela est un sujet à mettre en valeur chez Framasoft et partout ailleurs dans la culture libre, les possibilités de débuter en informatique sans être enchaîné, je pense que c’est un point qui nous manque de manière cruciale.

Par la même occasion, étant suisse je ne peux rien pour changer le gouvernement français, je vous sollicitais afin de mettre en pratique les mots Liberté – Égalité – Fraternité situé sur l’image en haut de la page Web pour peut-être changer le monde…

Ce petit message, destiné aux responsables de ce site est pour émettre une petite attention sur les débutants, car actuellement, de par ma requête, tout débutant est voué à tomber entre les mains de gourmands monopoles. Je suis aussi dégoûté du manque de réflexion qu’ont les gens face à l’informatique, le manque de recul, ce qui donne évidemment la page telle que vous la voyez sur le site de votre gouvernement.

Si il faut de l’aide, pour rédiger des notices, tutoriels pour débuter en informatique, je tenterai de mettre à contribution le peu de temps libre que j’ai.

Merci à vous Framasoft et les autres de m’avoir permis de découvrir l’informatique, la vraie !

Meilleures salutations, Florian S.

Notes

[1] Crédit photo : Hygiene Matters (Creative Commons By)




Wikipédia ou quand prendre soin peut faire des miracles

Alice Popkorn - CC by-saComme tout miracle il était imprévu, mais en l’occurrence il a bien eu lieu.

C’est que nous rappelle ici Clay Shirky, considéré comme l’une des têtes pensantes du Web.

Parce que « si on pose un regard traditionnel sur le fonctionnement du monde, Wikipédia ne devrait même pas exister ».

Et pourtant cette encyclopédie tourne. Et elle tourne parce que suffisamment de gens se sentent concernés et veulent en prendre soin. C’est le double et joli sens du verbe « to care » (plus proche ici de Bernard Stiegler que de Martine Aubry !).

« Imaginez un mur sur lequel il serait plus facile d’effacer des graffitis que d’en rajouter. La quantité de graffitis dépendrait alors du degré de motivation de ses défenseurs. Il en va de même pour Wikipédia : Si tous ses fervents participants ne se sentaient plus concernés, tout le projet s’écroulerait en moins d’une semaine, envahie par les vandales et autres spammers. Si vous pouvez continuer à voir Wikipédia en ce moment même, cela veut dire qu’une fois de plus le bien a triomphé du mal. »[1]

Cet article vient clore en beauté notre petite série d’articles consacrés à Wikipédia à l’occasion de la célébration de son dixième anniversaire.

Wikipédia – un miracle imprévu

Wikipedia – an unplanned miracle

Clay Shirky – 14 janvier 2011 – The Guardian
(Traduction Framalang : DaphneK)

Depuis sa naissance il y a tout juste dix ans, Wikipédia s’améliore de jour en jour. C’est pourtant incroyable qu’il puisse même exister.

Wikipédia est l’outil de référence le plus utilisé au monde. Cette affirmation est à la fois ordinaire et stupéfiante : c’est le simple reflet du nombre considérable de ses lecteurs et pourtant, si on pose un regard traditionnel sur le fonctionnement du monde, Wikipédia ne devrait même pas exister. Et encore moins avoir atteint un succès aussi spectaculaire en à peine une dizaine d’années.

Grâce à l’effort cumulé des millions de contributeurs de Wikipédia, il suffit d’un clic pour savoir ce qu’est un infarctus du myocarde, connaître les causes de la guerre de la Bande d’Agacher, ou encore découvrir qui était Spangles Muldoon.

Il s’agit d’un miracle imprévu, comme lorsque « le marché » décide de la quantité de pain disponible en magasin. Wikipédia est cependant encore plus bizarre que le marché : Non seulement tout le contenu est rédigé gratuitement, mais il est aussi disponible gratuitement. Même les serveurs et systèmes d’administration sont financés par des dons. On aurait pourtant eu du mal à imaginer un tel miracle à ses débuts. C’est pourquoi, à l’occasion du dixième anniversaire du site, cela vaut la peine de revenir sur l’invraisemblable histoire de sa genèse.

Il y a dix ans jour pour jour, Jimmy Wales et Larry Sanger s’efforçaient en vain de créer Nupedia, une encyclopédie en ligne dotée d’un système de publication en sept étapes. Malheureusement, cela représentait aussi sept endroits où les choses pouvaient s’immobiliser. Et après presque un an de travail, pratiquement aucun article n’avait encore été publié.

Alors il y a dix ans et un jour, Wales et Sanger décidèrent d’opter pour un wiki, afin de raccourcir une partie du processus. Sanger a alors envoyé un mail aux collaborateurs de Nupedia en les informant de cette nouveauté : « Faites-moi plaisir. Allez-y et ajoutez un petit article. Cela prendra cinq ou dix minutes, grand maximum. »

Le « Faites-moi plaisir » était nécessaire car le wiki est le média social par excellence. Inventé au milieu des années 90 par Ward Cunningham, le wiki n’a qu’une fonction primordiale : produire immédiatement du contenu. Pas besoin de permission pour ajouter, modifier ou supprimer du texte, et une fois le travail terminé, pas besoin de permission non plus pour le publier.

Mais ce qui est plus intéressant, c’est qu’au centre du wiki se trouve une seule action sociale qui pourrait se résumer à : je me sens concerné (NdT : I care, que l’on aurait aussi pu traduire par « J’en prends soin »). Les gens qui rédigent des pages sont ceux qui se sentent assez concernés pour les rédiger. Confier le travail à ces gens plutôt qu’aux sacro-saints experts était quelque chose de tellement audacieux, que Wales et Sanger décidèrent de ne pas remplacer Nupedia par le wiki, ce dernier n’étant là que comme une sorte de brouillon pour Nupedia.

Les participants, cependant, ne l’entendaient pas ainsi. La possibilité de créer un article en cinq minutes et d’en améliorer un autre encore plus rapidement devint une pratique si communicative qu’en quelques jours à peine, il y eut plus d’articles sur le wiki nouveau-né que sur Nupedia. Le wiki fut tellement performant et si différent de Nupedia qu’il migra vite sur un site à part entière. Wikipédia était né (quelques mois plus tard, Nupedia ferma définitivement et Sanger abandonna le projet).

C’est ce processus qui se poursuit aujourd’hui, transformant Wikipédia en un miracle ordinaire pour plus de 250 millions de personnes par mois. Chaque jour de ces dix dernières années, Wikipédia s’est amélioré car quelqu’un – plusieurs millions de quelqu’un en tout – a décidé de l’améliorer.

Parfois il s’agit de commencer un nouvel article. La plus souvent il faut juste retoucher un texte déjà rédigé. Parfois il faut défendre Wikipédia contre le vandalisme. Mais il faut toujours se sentir concerné. La plupart des participants se sentent un peu concernés, ne rédigeant qu’un article. Une poignée se sent toutefois très concernée, produisant des centaines de milliers de lignes à travers des milliers d’articles au fil des années. Le plus important c’est que dans l’ensemble, nous avons tous produit assez pour faire de Wikipédia ce qu’il est aujourd’hui. Ce qui nous apparaît comme quelque chose de stable est en fait le résultat d’incessantes tentatives pour préserver ce qui est bon et améliorer ce qui ne l’est pas. Ainsi, Wikipédia ne se définit pas comme un objet, fut-il virtuel, soutenu par une organisation, mais comme une activité qui entraîne une encyclopédie dans son sillage.

Ce glissement de l’objet vers l’activité a entraîné une des plus incroyables expansions de révisions jamais vue : Le rédacteur en chef de Wikipédia est un quorum tournant composé d’individus particulièrement attentifs. Beaucoup de critiques de Wikipédia se sont concentrées sur le fait que le logiciel laisse n’importe qui écrire n’importe quoi. Ce qui leur échappe, c’est que les liens sociaux entre ces éditeurs motivés permet justement de contrôler cette fonctionnalité. Si le logiciel permet facilement de causer des dégâts, il permet tout aussi facilement de les réparer.

Imaginez un mur sur lequel il serait plus facile d’effacer des graffitis que d’en rajouter. La quantité de graffitis dépendrait alors du degré de motivation de ses défenseurs. Il en va de même pour Wikipédia : Si tous ses fervents participants ne se sentaient plus concernés, tout le projet s’écroulerait en moins d’une semaine, envahie par les vandales et autres spammers. Si vous pouvez continuer à voir Wikipédia en ce moment même, cela veut dire qu’une fois de plus le bien a triomphé du mal.

Bien sûr, Wikipédia n’est pas parfait. Beaucoup d’articles médiocres ont besoin d’être améliorés. L’âge, le sexe ou le groupe ethnique des rédacteurs ne sont pas assez variés et les biographies des personnes vivantes sont continuellement truffées d’erreurs. De plus, les protections mises en place contre les vandales et les spammers font bien souvent fuir les novices et épuisent les anciens. Mais Wikipédia n’est pas seulement une activité au niveau des articles. Partant de la production individuelle pour atteindre la culture de tous, Wikipédia est un bien commun créé par le public. C’est donc aux gens qui se sentent concernés d’essayer aussi de résoudre ces problèmes. Tant que cette culture continuera de considérer « soyez audacieux » comme valeur principale, le site demeurera l’un des actes collectifs de générosité les plus importants de l’Histoire.

Souhaitons donc un joyeux anniversaire à Wikipédia, accompagné de chaleureux remerciements aux millions de personnes qui ont ajouté, modifié, discuté, rectifié, ces gens qui ont créé l’outil de référence le plus utilisé au monde. Merci de nous raconter l’histoire des émeutes de Stonewall et comment Pluton a été reléguée au rang de « planète naine », merci de nous parler de la vallée du grand rift et du tsunami de l’Océan Indien, des rascasses volantes, des « Tiger teams » et du « Bear Market ».

Et avec nos meilleurs vœux pour ce dixième anniversaire, souhaitons d’être assez nombreux à nous sentir concernés pour permettre à Wikipédia de souffler ses vingt bougies en parfaite santé.

Notes

[1] Crédit photo : AlicePopkorn (Creative Commons By-Sa)




Produire du logiciel libre, le livre culte enfin en français chez Framabook !

Produire du logiciel libre - Framabook - CouvertureFramasoft est fier et heureux d’annoncer officiellement la sortie d’un nouveau volume à sa collection de livres libres Framabook. Il s’agit de la traduction d’un livre considéré comme une référence chez les développeurs anglophones : Producing Open Source Software, de Karl Fogel.

C’est une évidence, maintes fois constatées : il ne suffit pas de coller une licence libre au code source de son application pour en faire un logiciel libre à succès. Nombreux sont les paramètres à prendre en compte pour se donner les moyens de véritablement réussir votre projet. Cela ne coule pas de source, si j’ose dire, et c’est pourquoi un tel ouvrage peut rendre de grands services.

Ayant payé de sa personne, Karl Fogel n’hésite pas à affirmer lui-même que 95% des projets échouent. Et de rédiger alors ce livre pour contribuer à faire en sortie que le pourcentage restant remonte !

Dans la foulée du framabook sur Unix et sur le langage C, nous faisons un effort didactique tout particulier pour accompagner tous ceux qui souhaiteraient se lancer dans la création de logiciels libres ou rejoindre un projet existant. Nous pensons à ceux qui ne maîtrisent pas forcément d’emblée l’anglais.

Nous pensons également aux jeunes débutants. Parce que, comme cela a déjà été souligné, l’informatique est l’une des grandes absentes de l’enseignement secondaire français. Alors, fille ou garçon, l’étudiant motivé se retrouve bien souvent livré à lui-même et c’est à lui de se débrouiller pour extraire le bon grain de l’ivraie du Grand Internet. Nous espérons lui être utile en lui apportant notamment ici gain de temps et efficacité.

Voici comment le livre est présenté dans le communiqué de presse joint à ce billet :

« Teinté d’humour et de réflexions subtiles, ce livre prodigue de précieux conseils à ceux qui souhaitent commencer ou poursuivre un projet de développement en logiciel libre. Pour cela, Karl Fogel propose une description claire et détaillée des bonnes pratiques de développement. Il initie non seulement le lecteur à la méthode de travail collaboratif mais démontre aussi l’importance des relations humaines dans la réussite d’un projet, comme l’art d’équilibrer actions individuelles et intérêt commun. Identifiés à travers sa longue expérience en gestion de projet open source, différents aspects sont abordés : structurer l’ensemble de la communauté de développeurs, maintenir un système de gestion de versions, gérer les rapports de bugs et leurs corrections, bien communiquer à l’intérieur comme à l’extérieur du projet, choisir une licence adaptée au logiciel… »

Grâce à son expérience du développement open source, Karl Fogel nous livre ici bien davantage qu’une simple marche à suivre pour qu’un projet voit le jour et ait une chance d’aboutir. Il s’agit en effet de détailler les éléments stratégiques les plus importants comme la bonne pratique du courrier électronique et le choix du gestionnaire de versions, mais aussi la manière de rendre cohérents et harmonieux les rapports humains tout en ménageant les susceptibilités… En somme, dans le développement Open Source peut-être plus qu’ailleurs, et parce qu’il s’agit de trouver un bon équilibre entre coopération et collaboration, les qualités humaines sont aussi décisives que les compétences techniques. »

La traduction de cet ouvrage a obéi aux mêmes principes que ceux exposés par Karl Fogel. Elle fut le résultat de la convergence entre les travaux initiés par Bertrand Florat et Étienne Savard et ceux de Framasoft coordonnés par Christophe Masutti. Comme d’habitude, ce livre a été finalisé dans La Poule ou l’Œuf et peut se commander en version papier chez InLibroVeritas pour la modique somme de 15 euros.

Comme d’habitude aussi ce livre est sous licence libre (Creative Commons By) et est intégralement consultable en ligne ou téléchargeable dans sa version numérique sur le site Framabook. Parce qu’ici comme ailleurs, et peut-être même plus qu’ailleurs, il nous apparaît fondamental de pouvoir en assurer sa plus large diffusion et participer ainsi à susciter des vocations.

Nous comptons sur vous pour signaler l’information 😉

Framasoft ne serait rien sans les développeurs de logiciels libres. Ce projet est en quelque sorte une manière pour nous de les remercier.




Promouvoir le logiciel libre dès la maternelle

Michelle Adcock - CC by-sa Il y a quelques temps nous recevions une question fort pertinente via le formulaire de contact du Framablog. Une question du genre de celles dont on n’improvise pas la réponse dans la foulée, et il arrive alors que les réponses se fassent attendre un moment. Toutefois, les réponses une fois construites peuvent valoir le coup d’être partagées… [1]

Le plus facile, en matière de réponses, est de demander à ceux qui savent. Et les forums sont là pour ça. Mais pour aider dans le processus, la piqûre de rappel est un instrument qui se révèle efficace, et ainsi, le jeune père d’élève dont émanait la question, croisé samedi dernier au cours de l’une des nombreuses manifestations d’opposition à la LOPPSI qui animèrent le pays, en usa avec talent…

Pour la petite histoire, c’est un candidat aux élections de parents d’élèves de son école qui posa la question et c’est entre autre à un élu que s’adresse cette réponse, avec toutes nos félicitations et nos encouragements.

La question se présentait de la manière suivante :

Bonjour

Je vais me présenter aux élections de parents d’élève pour ma fille de 3 ans, en maternelle des petits. J’ai souvent lu des articles très intéressants sur le libre à l’école dans le Framablog et je suis moi même pirate et libriste. Je me demande si vous pourriez me conseiller sur, au niveau maternelle des petits, quels sont les actions que je pourrais tenter et sensibilisations que je pourrais entreprendre au niveau de l’école et de la municipalité, depuis ce poste de représentant des parents d’élèves. […]

La réponse que nous avons à lui fournir, dans la droite lignée de la catégorie Éducation de ce blog, émane d’un directeur d’école et animateur TICE. Il l’a découpée en quatre volets que voici.

Des difficultés

À l’école, l’informatique pour les élèves ce sont les TICE (Technologie de l’Information et de la Communication à l’École) parfois appelées TUIC (« U » pour « usuelle »).

Eh bien les TICE, le matériel informatique, ne sont plus mentionnés pour le cycle maternel dans les programmes 2008 de l’Éducation Nationale. Pas interdits, mais pas mentionnés : même pas comme exemple de support d’écrit.

Le niveau de maîtrise de l’outil informatique est très inégal parmi les enseignant(e)s de maternelle.

La dotation en matériel, pour les écoles maternelles et élémentaires, est du ressort de la municipalité. Les écoles maternelles sont souvent les parents pauvres en matière d’équipement informatique : souvent un poste pour la direction d’école… et c’est tout. Les parents d’élèves peuvent apporter leur concours en trouvant du matériel de récupération.

Des aides

Une remarque préalable : les enseignant(e)s sont responsables de leur pédagogie. On peut les aider, voire les inciter, mais en aucun cas les contraindre à faire utiliser l’outil informatique par les élèves.

Le mode de fonctionnement de la plupart des classes maternelles (en ateliers à certains moments) est favorable à l’utilisation de postes, par petits groupes, parmi d’autres activités. Il est nécessaire que le matériel soit fiable, et que les logiciels soient adaptés pour permettre rapidement une autonomie des élèves à cet atelier.

Dans de nombreuses circonscriptions, il existe un animateur TICE : un enseignant partiellement détaché. Parmi ces missions, il doit apporter son concours aux enseignants désirant mettre en œuvre une pédagogie utilisant les TICE. Il serait judicieux de se rapprocher de lui.

Il existe des packs logiciels (regroupant système d’exploitation et logiciels ludo-éducatifs) très bien conçus, et utilisables dès la maternelle à l’école ou à la maison. Ils se présentent sous forme de live-CD (on fait démarrer la machine sur le lecteur de cédérom) et on est assuré que les données contenues sur le disque dur ne risquent rien. Pratique pour l’ordinateur familial. On peut aussi les copier sur une clé USB, et la rendre amorçable [2]. On peut enfin les copier sur le disque dur à la place du système d’exploitation déjà existant (intéressant dans le cas d’une vieille machine un peu à bout de souffle).

Des réalisations très intéressantes

Il existe aussi la version monoposte d’AbulEdu (notice Framasoft), l’excellent FramaDVD École (page projet) et enfin de très nombreuses applications pédagogiques libres fonctionnant sous Windows.

Une remarque pour finir

Il me semble très maladroit de se présenter comme «  pirate et libriste ». Ça ne peut que renforcer la confusion dans l’esprit de certains, qui assimilent les deux termes. Ça ne peut que rendre plus difficile votre démarche d’aide aux équipes enseignantes.

Soyons clairs : le piratage à l’école… on n’en veut pas.

Pour des raisons éthiques : nous avons une mission d’éducation civique et morale. Tricher, voler, utiliser des logiciels piratés est en contradiction totale avec une démarche éducative.

Item 2.3 du Brevet Informatique et Internet (B2i)
Si je souhaite récupérer un document, je vérifie que j’ai le droit de l’utiliser et à quelles conditions.

Pour des raisons militantes : on sait bien que les pirates de logiciels font le jeu des maisons d’édition en renforçant la présence de leurs produits, en les rendant plus utilisés, donc plus désirables.

Soyons fiers des logiciels libres !

Notes

[1] Crédit photo : Michelle Adcock Creative Commons By-Sa

[2] On devrait même dire : « amorçante »