Mais comment faire pour que la famille Dupuis-Morizeau s’empare de ce magnifique outil offert par la communauté et se dégooglise un grand coup ? Notre réponse : Framacarte.
Vous offrir le monde au pied du sapin.
Avoir une carte en ligne, c’est très pratique pour tracer sa route d’un point A à un point B. C’est très exactement ce que vous propose Framacarte : placez votre point A, votre point B, votre tracé… et le tour est joué ! Vous n’avez qu’à cliquer sur « plus » puis sur l’icône « partager » pour avoir l’adresse web à partager à vos ami-e-s ou le code d’intégration afin de placer cette carte sur votre site web.
Framacarte ne s’arrête pas là. Vous pouvez bien entendu placer des étapes entre votre point A et votre point B… jusqu’à dessiner tout l’alphabet si cela vous chante (n’en déplaise à google, ce mot ne leur appartient pas :p).
Framacarte vous permet aussi de colorier des zones, changer les pictogrammes de vos épingles, utiliser plusieurs calques, changer les fonds de cartes (plutôt ville ou plutôt nature ?) importer ou exporter vos données… Bref, de créer des cartes vraiment personnalisées.
Ne réinventons pas la Frama-roue
Framacarte s’appuie sur deux projets Libres : les fonds de cartes sont ceux d’OpenStreetMap, tandis que l’outil d’édition et de partage des cartes n’est autre que le projet Umap. Oui, nous hébergeons tout simplement un clone de ce projet Libre déjà connu des barbu-e-s. Il faut dire que Framacarte n’était pas, à l’origine, dans nos projets de Dégooglisations.
C’est Yohan Boniface, contributeur de OpenStreetMap France et développeur de Umap, qui nous a contacté pour mettre en place cette Frama-version de Umap. L’occasion pour nous de lui poser 3 questions :
Question 1 : Bonjour Yohan, tout d’abord, est-ce que tu peux nous présenter Umap, ses origines, et comment il est développé ?
uMap est bâti sur Django (un framework python), et j’ai cherché à le rendre modulaire : le frontend et le backend sont deux projets séparés, ce qui a permis à d’autres développeurs d’utiliser la même interface que uMap mais sur leur propre back-end.
À l’exception d’une demande financée par Ixxi (filiale tech de la RATP), je développe uMap sur mon temps libre, et j’y tiens!
Question 42 : Umap existe déjà et marche très bien… pourquoi cette envie de le doubler d’un Framachin ? C’est pas mieux de tout garder en un seul endroit ?
La centralisation coûte très cher, et ce coût induit une dépendance aux entrées financières. Dans le libre, on essaie autant que possible d’éviter le scénario alla Wikipedia, c’est-à-dire où le service à l’utilisateur est centralisé. On finit par passer son temps à chercher de l’argent pour financer le projet. Côté OpenStreetMap, on tâche autant que possible de laisser la communauté prendre en charge les services à l’utilisateur final.
Donc plus y a d’instances différentes, plus les coûts sont partagés, et plus le modèle est durable.
Il faut un peu connaître python pour installer uMap chez soi, mais quand c’est le cas on le fait tourner en 15 minutes, donc j’invite les motivés à installer d’autres instances! J’en connais déjà une bonne dizaine, notamment en Suisse, en Colombie, en Argentine, en Éthiopie, et aussi dans des intranets.
Question 1337 : À Framasoft, on espère que ce projet apportera du monde aux communautés Umap et OpenStreetMap… Mais du coup, comment y entrer et faut-il obligatoirement coder pour contribuer ?
Utiliser uMap, c’est déjà contribuer.
Parce que ça aide à le faire connaître, et donc à étendre ses utilisateurs, et donc à augmenter les instances disponibles, et donc à « dégoogliser » Internet.
Pour aller un peu plus loin dans la contribution, il y a plusieurs options. Faire des rapports de bugs ou des demandes d’amélioration est une façon d’aider à prioriser les développements. Il y a aussi un gros besoin de documentation et tutoriels.
On peut aussi participer à la traduction (on a récemment ajouté une traduction en amharique !). Enfin, y a de l’espace pour améliorer le graphisme et l’ergonomie.
Et bien sûr, quand on code en python (backend) ou en javascript (frontend), il y a de quoi faire ! La page du projet pour en savoir plus : http://wiki.openstreetmap.org/wiki/UMap
Libre à vous de dessiner sur le monde
Révolu, le temps des atlas coûteux (et autres cartes IGN) qu’il était illégal de photocopier et que l’on stabilotait à grands frissons. Désormais, avec Framacartes, vous pouvez laisser libre cours à votre imagination et partager en quelques clics ce parcours de trail avec l’ensemble de votre club…
… ou mettre en ligne sur le site de votre office de tourisme l’ensemble des restos, hébergements et lieux à visiter de votre ville…
…ou encore détourner Framacarte pour dessiner un Tux, un Chaton ou un GNU sur le pays de votre choix (la première personne qui réalisera ce défi gagnera notre éternelle admiration déclarée officiellement sur nos réseaux sociaux !)
Car, encore une fois, le succès de cet outil ne dépendra que de vous. À vous donc de vous en emparer, de le partager et de nous soutenir par vos dons afin que nous préparions de nouvelles alternatives à GAFAM tout au long de 2016.
« 2° avant la fin du monde » : un documentaire écolo à traduire Librement
Il y a peu de temps, les journalistes auteurs de #DataGueule ont appelé à l’aide la communauté Framalang. Leur long métrage « 2° avant la fin du monde », un documentaire critiquant la COP 21 et expliquant les enjeux du réchauffement climatique, est déjà un succès francophone. Ils aimeraient proposer des sous-titres en anglais, espagnol, etc. pour que d’autres audiences puissent en profiter… mais voilà : ce long-métrage n’est pas Libre.
Quand les communs nous rassemblent…
Qu’on soit bien d’accord : profiter des communautés bénévoles pour augmenter la valeur de son travail propriétaire, c’est moche. Sauf que là, on n’est pas dans un modèle aussi manichéen. Déjà parce que les équipes de #DataGueule, bien qu’officiant sur YouTube (attention les liens suivants vous y mènent ^^), ce sont celles qui ont créé des vidéos vulgarisant avec brio des sujets complexes comme :
les Communs (42e épisode… une référence à LA réponse ?)
Bref : autant d’outils pour sensibiliser les Dupuis-Morizeau de notre entourage aux sujets qui nous sont chers. Sans compter toutes leurs autres vidéos, dont les thèmes et l’angle défendent souvent cette idée des communs… ou montrent les enclosures des systèmes dans lesquels nous vivons. C’est une nouvelle fois le cas avec ce pamphlet écologique qu’est « 2° C avant la fin du monde. »
Car ce n’est pas pour rien si la coalition entre militant-e-s écologistes, libristes, personnes engagé-e-s dans l’ESS ou la lutte des classes a fait tomber ACTA. Ce n’est pas pour rien si Framasoft (aux côtés de nos ami-e-s de l’APRIL et de biens d’autres) a défendu les valeurs du Libre dans de nombreuses villes accueillant un Alternatiba : cette notion qui nous rassemble, c’est celle de communs. Le Libre et l’Écologie ont tout intérêt à tisser des ponts entre eux, et nous y voyons là une magnifique occasion.
…le droit d’auteur nous divise.
Seulement voilà : ces vidéos comme leur documentaire ne sont pas sous licence Libre. Vous demander de participer à ajouter de la valeur à une création de l’esprit qui ne respecte pas vos libertés, c’est un peu comme vous proposer de participer au financement participatif d’une production qui restera l’entière propriété de ses auteurs : vous prenez tous les risques et il faut une certaine dose de confiance.
Le débat a eu lieu chez Framalang. DataGueule, ce sont visiblement des gens qui partagent nombre des valeurs-clés du Libre et des Communs. Ce sont des journalistes issus du malheureusement défunt OWNI, qui ont co-écrit l’excellent documentaire « Une contre-histoire de l’Internet ». Bref, des gens biens. C’est une production qui n’hésite pas à diffuser son long métrage sur YouTube avant même qu’il ne passe à la télévision (est-ce pour cette raison qu’il n’y a pas de budget pour la traduction ?), ce qui nous permet de vous le faire découvrir dans cet article :
cliquez sur l’image pour visionner le documentaire (YouTube)
Dans nos équipes s’est fait le choix de la main tendue. Chers DataGueule (et chère prod d’IRL Nouvelles Écritures), celles et ceux d’entre nous qui le veulent vont tenter de traduire votre documentaire. Cette traduction sera libre, proposée sous la licence CC-BY-SA. Nous espérons qu’en vous faisant goûter aux joies du Libre, vous envisagerez de passer vos productions sous ces licences (même YouTube propose une CC-BY, c’est facile !) et de parler encore plus de ces sujets qui nous rassemblent.
Libre à vous de traduire (ou pas)
Alors voilà : libristes de tous poils, linguistes polyglottes, fan-subbeurs acharné-e-s et/ou écolos de tous bords : la balle est dans votre camp. Libre à vous de décider si les enjeux, le sujet et l’œuvre méritent votre participation. Libre à vous de venir participer à cette collaboration entre libristes, écolos… bref : entre commoners.
Vous y trouverez à chaque fois la liste des pads où vous pourrez traduire (c’est déjà bien entamé), relire, amender, participer, etc. Pensez à respecter les façons de faire, à bien entrer votre nom (et à choisir votre couleur) dans l’icône « bonhomme » en haut à droite, et à faire un coucou sur le chat (en bas à droite).
Je ne publierai plus chez toi (lettre ouverte à Apple)
Yann Houry est un professeur de français et auteur de manuels numériques dont nous avions encouragé la libération en 2014.
Nous reproduisons ici, avec son accord, la lettre ouverte (publiée initialement sur son blog), qu’il a adressée à un de nos GAFAM préféré dans laquelle il explique pourquoi il ne publiera plus chez Apple. Celle-ci est extrêmement instructive sur les conditions qu’ils peuvent imposer sur les contenus publiés.
En effet, la situation pourrait être comique si elle n’était kafkaïenne : Yann Houry se voit refuser – une n-ième fois – la publication d’un de ses manuels libres de grammaire sur la plate-forme iTunes au prétexte que « l’orthographe et la grammaire sont incorrects » ! (Le signalement est fait en anglais, en plus…)
Ce genre de pratique montre à notre sens bien les limites d’une trop grande concentration des pouvoirs des plate-formes sur internet : pour être vu, il faudrait publier sur ses plate-formes et pas ailleurs. Or ces dernières gèrent un tel volume de données publiées par leurs utilisateurs, qu’il devient impossible de les valider par des humains. C’est donc la machine qui prend le relais. Et on se retrouve alors avec des cas absurdes, comme celui de la peinture de Courbet, « L’origine du monde », censurée par Facebook.
Yann a finalement décidé de ne plus publier sur iTunes (tout en continuant – nous le regrettons – à publier chez Amazon ou Google Play, avec le risque que le problème se reproduise). Preuve supplémentaire que le secteur de l’édition a décidément bien besoin de se « dégoogliser » lui aussi. Framasoft propose par exemple le catalogue Framabookin.org pour partager, parmi des milliers d’autres œuvres, les ouvrages de sa collection Framabook. À quand le développement de ces « micro-catalogues », qui pourraient très bien être agrégées par des « moissonneurs » afin de proposer une recherche globale, et qui seraient surtout à l’écoute de leurs auteurs ?
Chère Apple,
Ma pomme préférée (alors que c’est moi la pomme), je t’écris pour te dire que je ne publierai plus chez toi.
Depuis que tu t’es amusée, en 2012, à retirer mon livre de ton store parce que j’avais mis « libre et gratuit » sur la couverture, on s’est franchement bien marré ! Souviens-toi, tu m’avais dit : « Si tu veux revoir ton livre sur mon beau magasin, il faut retirer lesdits mots. Ils sont laids. Comment ? Tu l’as déjà fait, petit écrivaillon conciliant ? Eh bien retire « pour iPad » maintenant ! ».
Et je l’avais fait.
Ce n’était qu’un début.
Dernièrement, j’avais écrit « Kobo » dans la préface du livre de grammaire et de littérature (mon dieu, quand j’y repense…). Encore plus récemment, j’ai dû oublier un truc dans la table des matières. Je t’ai envoyé des photos de mon dos que j’ai fouetté. J’espère que tu as aimé.
Et il y en a eu d’autres encore ! À propos du petit recueil que j’avais fait des fables de La Fontaine, j’avais dit que je m’appelais Yann Houry ! Grossière erreur ! Hop, on ne publie pas le livre !
Une fois, une vidéo ne fonctionnait pas ! Et hop ! on retire le livre. Une autre fois, tu as même retiré un livre parce que le « spelling and grammar must be correct » ! Ah ! tu t’es bien foutue de ma gueule ! Et ce en anglais ! Bah oui, tu ne vas quand même pas condescendre à t’exprimer dans la langue de ton interlocuteur ! Enfin ! Rien ne vaudra les mois que tu as mis à publier mon Manuel de 5e pour une raison que toi seule tu es incapable de donner.
Enfin bref. C’en est trop.
Je ne supporte plus. Raison pour quoi, je me barre ! Je m’en vais (et tes larmes – si tu étais capable d’émotion – n’y pourraient rien changer).
Imagine-t-on un éditeur publier puis retirer puis republier puis retirer à nouveau un livre de la vente ? C’est pourtant ce que tu viens de faire avec mon manuel de grammaire. C’est complètement insensé !
Je retire donc tous mes livres de ton store. J’imagine que tu t’en fiches comme de l’an quarante, mais moi ça me fait un bien fou.
Adieu.
Yann
Vieux Flic et Vieux Voyou : un polar tout neuf dans le Domaine Public !
Y a des jours où on a envie d’un bon vieux polar. Une enquête bien ficelée, une intrigue qui nous titille le ciboulot avec des personnages jubilatoires dont les déboires et les victoires nous chatouillent les zygomatiques.
La recette du roman policier est connue. De San-Antonio aux NCIS, elle fait littéralement partie de notre culture, de notre domaine public. Pourtant, aucun auteur (à notre connaissance) n’avait encore placé son polar flambant neuf dans le Domaine Public Vivant, livrant ses personnages et son univers aux fantaisies de vos imaginaires pour que vous puissiez jouer avec.
Voilà qui est chose faite grâce à Fred Urbain, auteur d’un nouvel opus paru chez Framabook : Vieux Flic et Vieux Voyou.
Quand Lucien, ancien flic et toujours amateur de bon pinard, tire son pote Maxime (ancien pickpocket) de la maison de retraite de la Pinède où ils coulent des jours paisibles… Ce n’est pas pour aller fricoter de la veuve dans un thé dansant !
Ces deux octogénaires vont mener tambour battant une enquête mêlant drogue, meurtres et kébabs avec toute l’insouciance, l’espièglerie et l’expérience que leur confèrent leurs quatre-vingts balais…
L’occasion donc d’une interview avec Fred, heureux papa de ces deux vieux… et d’un polar jubilatoire.
(entretien goupillé par Pouhiou, avec l’aide des relecteurs et relectrices du groupe Framabook)
Salut Fred… Je peux te présenter comme « Le monsieur qui m’a permis de changer le prénom d’un personnage »…
Eh eh, c’est vrai que je suis entré chez Framabook comme correcteur, à l’époque où il n’y avait pas beaucoup d’œuvres de fiction. À part les BD de Simon…
Je cherchais à aider dans le Libre, mais je ne suis pas informaticien. Relire des ouvrages, c’était dans mes cordes.
Et en effet, je me suis enthousiasmé pour tes romans, Pouhiou, au point de te proposer carrément des évolutions dans tes intrigues.
… mais comment te présenterais-tu à Béatrice Dupuis-Morizeau ?
Je suis un contemplatif. J’adore me mettre en retrait et observer le monde, noter les travers, les grandeurs, les beautés et les laideurs des personnes que je croise. Je me fais un album photo avec tous ces morceaux de vie, et ça ressort à l’improviste, ça s’assemble comme ça peut, ce sont les briques de mon petit jeu de construction intime.
Venons-en à ton polar. Les deux personnages principaux, Lucien et Maxime, ont dans les 80 piges… Pourquoi ne pas avoir fait dans le jeunisme ? Il arrive encore des choses aux gens à cet âge-là ? Ou c’est juste pour vendre plus d’ebooks gratuits à Mamie Dupuis-Morizeau qui va avoir une nouvelle liseuse pour Noël ?
Justement… Toute une partie de mon propos est là : on met les gens à la retraite comme s’ils avaient une date de péremption, comme s’ils n’avaient plus rien à vivre, plus rien à ressentir, plus rien à découvrir, plus rien à enseigner… On a tant à apprendre de nos anciens. Je ne suis pas le seul à jouer avec cette idée, regarde Gilles Legardinier, ou Jonas Jonasson. J’adore aussi Les vieux fourneaux. Et ta Madame Marquet, elle n’est pas de la première jeunesse !
Tous les codes du polar semblent délicieusement respectés dans cette enquête… comme si tu les avais étudiés. Tu peux nous expliquer la recette d’un bon roman policier ?
C’est que j’en ai lu beaucoup. Et je suis exigeant ! Ce n’est pas pour rien que je cite Agatha Christie et Alfred Hitchcock dans le bouquin. Je déteste les intrigues qui ne tiennent pas la route, les polars qui ne respectent pas les jalons du genre. Et en effet, j’ai étudié le scénario à la fac et j’en ai écrit pas mal quand je faisais du jeu de rôles.
Je me suis amusé avec les codes, par exemple l’obligatoire passage érotique, la poursuite, le super flic…
La recette d’un bon polar, c’est quand le lecteur croit avoir tout compris pour finalement se rendre compte que l’auteur a tout le temps gardé une longueur d’avance. Je me suis vraiment efforcé de tenir ça tout du long et de surprendre mon public, jusqu’à l’épilogue qui est une pirouette un peu facile, mais je l’assume.
[Yann] Comment conçois-tu ton récit ? Est-ce que tu as un plan détaillé ? Est-ce que tu « joues » les dialogues ? Bref, quels sont tes secrets pour élaborer ton histoire, construire ton intrigue ?
C’est bien mon problème… Je suis à la fois perfectionniste et laborieux. Je traînais cet ouvrage inachevé depuis dix ans. J’avais le début et la fin, l’ambiance générale, des personnages attachants, des idées rigolotes… Mais je galérais avec la chronologie, et je m’étais imposé des contraintes, comme notamment l’alternance des chapitres. J’ai eu la chance de discuter avec des auteurs, des gens de cinéma, de théâtre, qui m’ont tous dit la même chose : d’accord, il faut bosser, mais il s’agit aussi de savoir se laisser embarquer, se faire plaisir, permettre à l’histoire de monter toute seule.
Alors je m’y suis remis et je suis allé au bout, en acceptant d’y laisser des passages moins travaillés.
Je pense aussi que je me marrais tellement avec mes deux loustics, que je répugnais à terminer leur histoire.
Franchement, je peux l’offrir, le bouquin, j’ai déjà été largement payé !
Tu allies un humour (et une verve argotique) à la Audiard et San Antonio avec des éléments résolument modernes et geek-friendly… Comment as-tu géré ce grand écart ? Que font un flic et un voyou de la vieille école quand l’enquête mêle ordinateurs, tracking GPS, et autres codes de notre modernitude ?
Eh bien, ça m’est assez naturel. Je suis un geek avec une culture somme toute plutôt classique. Je suis fan des films de la période Audiard, des Gabin, Ventura, Bourvil, Blier, Darc, Belmondo. Pour moi, Lucien, c’est Julien Guiomar ! Alors ça se mélange sans trop de problème. Les gens de ma génération ont roulé en deux-chevaux, mais ils utilisent un PC depuis vingt-cinq ans.
[Goofy] Tu reconnais volontiers ta dette et ton admiration pour des écrivains dont la langue est charnue et savoureuse comme René Fallet, tu pourrais mentionner tes trois bouquins préférés (je sais, c’est dur de choisir quand on aime) ?
Ça, c’est très difficile, comme exercice. Parce que mes préférences fluctuent en fonction de mes états d’âme et des périodes de ma vie.
Il y a un bouquin qui reste tout en haut de mon estime, toujours, c’est Kim, de Kipling. Justement à cause des dialogues, de l’impertinence du personnage principal dont la verve est fabuleuse.
Je vais citer aussi La vieille qui marchait dans la mer, de San-Antonio. C’est curieux, je n’ai pas pensé à ce livre en écrivant, et pourtant il a des similitudes avec le mien. Cette vieille saloperie qui, malgré tout, est croyante, juge inutile de prendre des gants quand elle s’adresse à Dieu. Alors elle prie comme un charretier. Ses soliloques sont extraordinaires.
Le troisième, c’est La folie Forcalquier, de Pierre Magnan. Là aussi, une langue magnifique. Je suis un admirateur éperdu de Monsieur Magnan, j’ai emmené toute ma famille en vacances dans ses montagnes. J’ai adapté un de ses romans pour l’écran, avec l’autorisation de son épouse. Mais vous ne le verrez probablement jamais, faute de sous pour le produire. Je n’ai pas tout lu, de lui, je m’en garde sous le pied pour quand j’aurai besoin de me faire du bien.
Revenons un poil sur la langue… Tu ne mégotes pas sur les argots, que ce soit dans la bouche de tes personnages ou dans les lignes du narrateur… D’où ça te vient cet amour pour ces langues ? Comment se sont-elles insérées dans ton écriture ?
J’ai surtout une passion pour les dialogues. Les mots qu’on s’échange, les histoires qu’on se raconte, c’est la vie ! Ça m’arrive tout le temps, de rencontrer des inconnu-es, et en trois minutes je sais tout de leur existence.
Alors, quand je fais parler un personnage, j’aime que ça roule.
[Mireille] Comment se fait-il qu’un (relativement) jeune comme toi jaspine aussi bien l’argomuche ? Moi-même, qui suis jeune seulement dans ma tête et dont la daronne est née dans l’faubourg St D’nis, je ne le jaspine pas aussi bien que toi… Chuis jalmince !
Au final, l’argot, je l’ai plus lu que parlé. J’ai grandi en province, moi ! Je connais bien quelques authentiques « titis » parisiens, mais j’ai surtout pratiqué l’argot des poètes, celui de San-Antonio, de Renaud, de Cavanna. C’est un langage très métaphorique, qui parle avec des images, parfois triviales, souvent astucieuses. C’est la créativité des petites gens qui se manifeste au détour d’une phrase. Et elle est loin d’être moribonde, la langue des rues de Paris. Je fais dire « daron » à un jeune dans la cité, c’est pas du chiqué, ce terme ancien est encore utilisé, je l’ai souvent entendu. Daron, on le lit dans Les Misérables !
Ce qui m’a surpris, c’est qu’au final, quand je testais le manuscrit, certains termes que je pensais passés dans le langage courant ont bloqué mes lecteurices. J’ai réfléchi à mettre un glossaire, ou des notes de bas de page, mais bon c’est un polar, pas un dictionnaire d’argomuche. J’ai fait le pari que le contexte suffirait à éclairer le sens des mots. Sinon, allez demander à Boudard, Le Breton, Perret.
Dis-moi, quand tu as commencé l’écriture de ce roman, tu envisageais déjà de l’élever dans le Domaine Public ?
Pas du tout ! Je pensais faire un polar bien classique, et aller le proposer sans grand espoir à un éditeur traditionnel, finir sans doute par le publier à compte d’auteur, avoir des centaines d’invendus dans ma cave, mangés par la moisissure… Je bricolais déjà avec des logiciels libres, mais je n’étais pas imprégné de culture libre.
Alors comment t’est venu ce choix de licence ? C’est juste pour faire comme moi et me piquer mes followers :p ?
Exactement ! C’est ton discours sur la confiance qui m’a influencé. Étant dans le groupe Framabook, je ne pensais plus le publier autrement que sous licence libre, mais je réfléchissais à une CC-BY standard. Et puis je me suis demandé quelle différence ça pouvait bien faire, une fois qu’on avait accepté la démarche, autant aller au bout du militantisme.
Ce qui m’a fait marrer, ce sont les copains qui me demandaient « tu l’as protégé, au moins, ton manuscrit ? Comment tu vas gagner des sous, si on peut le télécharger librement ? »
C’était l’occasion d’expliquer le partage, le domaine public vivant.
Cela fait quelques années maintenant que tu participes au projet d’édition collaborative Framabook… Qu’est-ce que ça t’a fait de te retrouver de l’autre coté des corrections ? [Goofy] Ils sont vraiment aussi ch*ants qu’on le dit, les relecteurs ?
Le plus pénible de la bande, je ne le craignais pas, c’est moi ! J’avais surtout peur que vous ne soyez trop indulgents avec un auteur « de la maison », que vous me fassiez trop confiance et que vous n’osiez pas me pousser à me dépasser comme on le fait avec d’autres postulants. Malgré la qualité de son texte original, qu’est-ce qu’on a enquiquiné Lilly, par exemple !
Je tiens absolument à ce que Framabook reste une vraie maison d’édition, exigeante, qui ne publie pas n’importe quoi sous prétexte que c’est du libre. Il y va de sa crédibilité. Moi qui, en comité de lecture, ai voté contre la publication de certains ouvrages, je ne voulais pas qu’on sorte mon bouquin parce que c’était le mien. Ça va peut-être vous faire rigoler, mais j’ai sérieusement envisagé de vous monter un bateau et de proposer le roman sous un pseudo, avec une fausse adresse mail. Et puis je me suis dit que de toute façon je me ferais vite gauler, vu que j’avais déjà parlé de mon projet à plusieurs d’entre vous.
Donc, bon, un soir j’ai pris mon courage et j’ai mis mon texte dans un mail.
Bon, c’est pas tout ça mais… la suite des aventures de Lucien et Maxime, elle te titille le ravioli ou bien tu vas partir sur d’autres projets ?
Je vais les laisser se reposer un peu, à leur âge ce ne serait pas raisonnable de recommencer à courir après les méchants tout de suite.
Mais j’ai bien un autre projet, encore un polar, dans lequel je vais encore jongler avec la langue.
Bon, pas d’affolement, je suis bien capable de le laisser mariner dix ans aussi, celui-là.
Et comme toujours lors de nos interviews, on te laisse le mot de la fin et/ou la question que tu aurais voulu qu’on te pose 😉
Difficile de sortir un roman rigolo en plein état d’urgence, mais si on attend que ça aille mieux on n’est pas sortis des roseaux !
Et puis, le vivre ensemble, c’est bien l’un de mes sujets, finalement.
J’ai retravaillé une description parce qu’une lectrice trouvait racistes les propos du narrateur.
En revanche, les préjugés sur les vieux que je balance à longueur de bouquin (au second degré, évidemment), les rhumatismes, les cors aux pieds, la prostate, les charentaises, ça n’a choqué personne.
L’intolérance est partout, et chacun essaie de se dépatouiller avec ses peurs, sa conscience, et le regard des autres.
SI on arrive à en rire, on a déjà fait un grand pas.
Ils liquident la démocratie, si nous la rendions liquide ?
Avec un pourcentage très important d’abstentions, les dernières élections ont fait apparaître une fois encore l’insatisfaction éprouvée par tous ceux qui estiment que le mode de scrutin ne leur convient pas : pas de prise en compte des votes blancs dans les suffrages exprimés, candidats choisis et présentés par les partis et souvent parfaitement inconnus des électeurs, offre électorale réduite au choix du « moins pire » par l’élimination arithmétique des « petites listes » au deuxième tour, etc. Plus largement, et sans entrer dans les débats sur la tumultueuse situation actuelle, de gros doutes sur la représentativité des politiques une fois élus se sont durablement installés, au point que certains en viennent à souhaiter tourner la page de la démocratie représentative (notre framasoftien Gee est lui-même étonné d’avoir touché juste) et expliquent avec de solides arguments qu’ils n’ont pas voté et ne le feront pas.
L’article que Framalang a traduit pour vous détaille l’intérêt de la démocratie liquide, processus peu connu mais utilisé par plusieurs Partis Pirates avec l’outil LiquidFeedback (notez qu’il nécessite toutefois un tutoriel assez dense). Dans la même catégorie, il existe Loomio qui propose d’optimiser les prises de décision collectives et qui pourrait être proposé au cours de l’année prochaine dans le cadre de notre campagne Degooglisons.
Il se peut que vous trouviez la démocratie liquide une possibilité intéressante et à mettre en pratique, ou au contraire irréaliste, voire dangereuse (proposer le vote électronique même chiffré peut susciter des inquiétudes), nous souhaitons seulement en publiant cette traduction vous inviter à nous faire part librement de vos réactions.
La démocratie liquide : une véritable démocratie pour le 21e siècle
La démocratie liquide, aussi appelée démocratie par délégation, est un puissant modèle de scrutin pour la prise de décision collective au sein de grandes communautés. La démocratie liquide combine les avantages de la démocratie directe et ceux de la démocratie représentative. Elle crée un type de scrutin réellement démocratique, qui confère aux électeurs le pouvoir de voter directement sur un sujet ou de déléguer leur droit de vote à un tiers de confiance.
Au travers de la délégation, les personnes qui disposent d’un savoir dans un domaine spécifique sont capables d’influencer davantage le résultat des décisions, ce qui de fait mène à une meilleure gouvernance de l’État. Grâce à cela, la démocratie liquide se transforme naturellement en une méritocratie, dans laquelle les décisions sont principalement prises par ceux qui ont le type de connaissances et d’expériences requis pour prendre des décisions éclairées sur les sujets concernés.
Globalement, la démocratie liquide dispose d’un gros potentiel pour constituer le socle de la prise de décision, non seulement dans des communautés virtuelles, mais aussi dans des communautés locales et des gouvernements tout entiers. L’objectif de cet article de blog est de donner au lecteur un aperçu de ce qu’est la démocratie liquide et des avantages qu’elle offre à ses participants. D’autres articles sur le même sujet suivront.
Qu’est qui ne va pas dans la démocratie aujourd’hui ?
Même s’il existe de nombreuses formes de démocratie, les deux seules actuellement en place sont la démocratie directe et la démocratie représentative (et un hybride des deux). Décrivons-les :
La démocratie directe : les électeurs sont directement impliqués dans le processus de prise de décision de l’État. Ils expriment continuellement leurs opinions en votant sur des sujets. Les démocraties directes offrent le contrôle total à leurs citoyens et une égalité dans la responsabilité. Malheureusement, les démocraties directes ne fonctionnent pas à une grande échelle en raison principalement la loi du moindre effort et du renoncement au droit de vote, à cause du nombre sans cesse croissant de sujets réclamant l’attention des électeurs à mesure que la communauté s’agrandit. Il devient tout simplement impossible pour chaque électeur de se tenir informé sur tous les sujets, que ce soit par manque de temps, d’envie ou d’expertise. Cela conduit à une faible participation électorale et à une insatisfaction des électeurs au sein de la communauté. Les démocraties directes dans leur forme pure ne sont tout simplement pas applicables dans les communautés de grande taille.
La démocratie représentative : la forme de démocratie la plus répandue implique le fait de confier son droit de vote à des représentants qui agissent au nom des citoyens pour prendre des décisions. Les représentants sont généralement (du moins, on l’espère) des experts dans le domaine dont ils sont disposés à s’occuper et ils représentent les intérêts de la communauté au sein d’un organe représentatif (par exemple, le parlement). Les démocraties représentatives fonctionnent à grande échelle mais elles échouent à servir les intérêts de leurs citoyens. Les problèmes des démocraties représentatives sont nombreux mais pour résumer, en voici trois des principaux :
Tout d’abord, les citoyens ne peuvent choisir leurs représentants que parmi un nombre restreint de candidats qui bien souvent ne partagent pas leurs idéologies ni leurs intérêts. La plupart du temps, les électeurs sont forcés de renoncer à leur préférence personnelle et doivent voter pour le candidat ayant le plus de chances d’être élu. Cela exclut en particulier les minorités du débat politique, qui perdent ainsi la possibilité de voir leurs opinions et leurs points de vue représentés au sein du gouvernement. De plus, il s’agit d’une des raisons principales expliquant pourquoi les jeunes aujourd’hui se désintéressent tant de la politique. [2] Si vous êtes jeune et que personne ne partage vos opinions, la seule solution est de protester et de ne pas voter du tout. Le fait que seuls 20 % des jeunes Américains aient voté aux élections de 2014 en est un signe fort.
Ensuite, les représentants n’ont pas (ou peu) à rendre de comptes pour leurs actions pendant leur mandat. Les promesses faites pendant la période électorale n’ont pas à être appliquées et ne sont majoritairement rien de plus qu’un appât pour attirer des électeurs. Cela mène à des « cycles politiques électoraux », où les représentants élus essaient de convaincre les électeurs qu’ils sont compétents avant les prochaines élections, soit en faisant de nouvelles propositions qui sont appréciées par la population (mais qui ne seront probablement pas mises en place), soit en distribuant des Wahlgeschenke (cadeaux pré-électoraux) coûteux.
Enfin, les démocraties représentatives peuvent mener à la corruption en raison de la concentration des pouvoirs. Considérer que les États-Unis sont vus comme une oligarchie suffit à démontrer que les démocraties représentatives constituent un terreau fertile à la corruption et aux conflits d’intérêts. En l’absence de sens des responsabilités et de comptes à rendre aux électeurs, agir pour l’intérêt du mieux-disant est plus facile que d’agir pour le bien de la population.
En dehors de ces failles évidentes dans les démocraties directes et représentatives, une autre, moins évidente celle-là, se situe dans les procédés de vote actuellement en place, qui sont complètement dépassés et ne sont plus en phase avec les technologies disponibles. Au lieu de mettre en place, sécuriser et faciliter le vote en ligne, les électeurs doivent se déplacer dans des bureaux de vote éloignés de leur domicile juste pour remplir un bulletin en papier [1]. Cela leur demande un effort supplémentaire et peut les inciter à renoncer à aller voter.
Ironiquement, c’est exactement ce que la démocratie essaie d’empêcher. L’opinion de chacun compte et devrait être incluse dans le processus de prise de décision collectif. Toutefois, les obstacles au processus de vote qui sont toujours présents aujourd’hui empêchent cela de se produire.
Qu’est-ce que la démocratie liquide ?
La démocratie liquide est une nouvelle forme de prise de décision collective qui offre aux électeurs un contrôle décisionnel complet. Ils peuvent soit voter directement sur des sujets, soit déléguer leur droit de vote à des délégués (c’est-à-dire des représentants) qui votent à leur place. La délégation peut être spécifique à un domaine, ce qui signifie que les électeurs peuvent déléguer leurs votes à différents experts de différents domaines.
Voilà qui change de la démocratie directe, où les participants doivent voter en personne sur tous les sujets, et de la démocratie représentative où les participants votent pour des représentants une seule fois par cycle électoral, pour ne plus avoir à se soucier de devoir voter de nouveau.
Le diagramme ci-dessous montre une comparaison entre les trois systèmes de vote.
Dans le modèle de la démocratie directe, tous les électeurs votent directement sur les questions. Dans le modèle de la démocratie représentative, ils élisent d’abord des représentants qui votent ensuite en leur nom. Le point intéressant mis en évidence par le diagramme est bien évidemment le modèle de la démocratie liquide. Là, les électeurs peuvent voter directement sur certaines questions (comme les deux électeurs indépendants sur les bords droit et gauche), ou peuvent déléguer leur vote à des représentants qui ont plus de connaissances spécialisées sur la question, ou simplement plus de temps pour se tenir informés.
La délégation est un signe de confiance. Un électeur fait confiance à un délégué pour le représenter dans certaines décisions. Si cette confiance est rompue (par des divergences idéologiques croissantes, ou par la corruption du délégué), il peut simplement révoquer la délégation et soit voter directement, soit déléguer sa voix à quelqu’un d’autre. Comme nous le verrons plus tard, cette notion de confiance provisoire est importante pour créer un sens de la responsabilité chez les délégués et les inciter à rendre des comptes.
Une propriété importante de la démocratie liquide est la transitivité. La délégation peut ne pas avoir lieu en un seul saut, elle est parfaitement transitive. Cela signifie que les délégués peuvent déléguer à d’autres délégués pour qu’ils votent à leur place et à celle des électeurs précédents (qui avaient délégué leur vote) dans la chaîne. Cette transitivité assure que des experts peuvent déléguer la confiance qu’ils ont accumulée à d’autres délégués sur certaines questions pour lesquelles ils n’ont pas suffisamment de connaissances et de recul.
Il manque dans le diagramme précédent la délégation spécifique à un domaine. Un électeur peut ne pas déléguer sa voix à un seul délégué, mais peut la déléguer à plusieurs autres délégués qui recevront ce droit en fonction du domaine de la question. Avec un tel système, il y a de fortes chances pour que des experts parviennent à influencer positivement le résultat du scrutin et conduisent à un résultat globalement meilleur.
La catégorisation des sujets est laissée à la décision de la communauté toute entière, mais une catégorisation très simple à l’intérieur d’un gouvernement pourrait être la politique fiscale, la politique monétaire, la politique environnementale…
Pour vous donner un autre exemple, prenons un parti politique qui utiliserait la démocratie liquide pour prendre ses décisions en interne. Les catégories qui auraient du sens pour une telle organisation seraient : Finances, Marketing & diffusion, Programme politique et Décisions administratives. Les décisions à prendre seraient réparties entre ces quatre catégories. Les membres du parti politique pourraient soit voter directement pour ces décisions, soit déléguer leur droit de vote à des personnes possédant un savoir plus spécialisé nécessaire pour se forger une opinion éclairée.
Permettez-moi d’expliquer le diagramme en détail, il peut sembler un peu confus à première vue. Concentrons-nous sur celui qui concerne le Gouvernement, le diagramme concernant les partis politiques est très similaire. En tout, il y a 6 électeurs, dont 3 qui ont pris la responsabilité d’être délégués. Comme mentionné précédemment, il existe trois types de sujets (et donc 3 types de domaine d’expertise) : Politiques fiscales, Politiques monétaires et Politiques environnementales.
Comme vous pouvez le constater, les 6 électeurs ont pratiquement tous délégué leur vote d’une façon ou d’une autre, à l’exception de la déléguée en haut, qui a voté de façon indépendante sur tous les sujets (elle doit être une véritable experte). L’électeur B a délégué chaque vote, soit il est trop occupé ou pas intéressé, soit il ne possède pas les compétences requises sur les sujets concernés.
Globalement, la démocratie liquide est à peine plus complexe que les démocraties directe ou représentative. Mais les avantages qu’elle offre l’emportent largement sur cette difficulté initiale d’apprentissage. Voyons en détail quels sont ces avantages.
Pourquoi choisir la démocratie liquide ?
Maintenant que nous cernons mieux les problèmes soulevés par la démocratie de nos jours, et que nous avons un bon aperçu de la façon dont fonctionne la démocratie liquide, nous pouvons nous pencher davantage sur les raisons de préférer ce choix. Avant tout, nous devons fournir des arguments solides expliquant pourquoi la démocratie liquide est une bien meilleure solution que le statu quo. J’espère que nous y parviendrons en dressant une liste des caractéristiques et avantages principaux de la démocratie liquide par rapport aux démocraties directe et représentative.
La démocratie liquide est véritablement démocratique. Les électeurs ont le choix soit de voter en personne, soit de déléguer leur vote à quelqu’un d’autre. Cela tranche nettement avec les démocraties en place de nos jours, dans lesquelles les citoyens ne peuvent que voter systématiquement en leur nom propre (démocratie directe) ou pour un représentant à intervalles de quelques années (démocratie représentative). Dans ces deux modèles, les électeurs se retrouvent soit dépassés par le type de travail requis pour participer, soit déçus et pas suffisamment impliqués dans les prises de décision du gouvernement. La démocratie liquide leur fournit la liberté de décider de leur niveau d’engagement, tout en leur permettant de le moduler à tout moment. Cela signifie que la prise de décision d’un pays est confiée directement à la population tout entière.
La démocratie liquide présente peu d’obstacles à la participation. L’exigence minimale à satisfaire pour devenir délégué est d’obtenir la confiance d’une autre personne. Pratiquement toutes les personnes qui souhaitent endosser cette responsabilité peuvent avoir le statut de délégué. Aucun parti politique n’est nécessaire pour rallier des sympathisants à votre cause. À la place de campagnes électorales scandaleuses dans lesquelles les électeurs sont délibérément trompés, la compétence et les connaissances d’une personne sur un sujet suffisent à rallier des délégués. En limitant autant que possible les obstacles à la participation, le processus global de prise de décision, qui implique un échange d’idées, des commentaires et des débats, sera plus animé et il en jaillira davantage d’idées et de points de vue. Grâce à cela, le résultat du scrutin aura de plus fortes chances de satisfaire une grande partie de la population et d’entraîner une meilleure gouvernance globale du pays.
La démocratie liquide, c’est la coopération, pas la compétition. De nos jours, dans les démocraties représentatives, la compétition durant la course aux élections est dominée par des dépenses de campagne élevées et inutiles, des tentatives pour démasquer des adversaires politiques et des mensonges délibérés pour tromper les électeurs. Souvent, de nombreux candidats perdent plus de temps à organiser des campagnes électorales pour remporter les élections qu’à se concentrer réellement sur leur supposé programme politique et sur les systèmes à mettre en place pour diriger un pays. Si s’assurer le vote des électeurs est plus important que la propre gouvernance du pays, c’est le signe que le système est miné de l’intérieur. Tout remporter et être élu, ou tout perdre. Voilà la devise de la démocratie de nos jours. Dans la démocratie liquide, cette compétition pour être élu représentant est écartée. À la place, les délégués rivalisent uniquement pour gagner la confiance des électeurs, ce qui ne peut être obtenu qu’en fournissant des efforts continuels et en apportant la preuve de ses compétences. Il est impossible de tromper les électeurs (tout du moins pas à long terme) et le mérite, la volonté et la capacité à améliorer la situation du pays font toute la différence.
La démocratie liquide crée de la responsabilité. La délégation est un indice de confiance. Si cette confiance est trahie, un électeur peut immédiatement désigner un autre délégué ou voter pour lui-même. Cette confiance provisoire entraîne un sens des responsabilités et du devoir de rendre des comptes chez les délégués, car ils peuvent perdre leur droit de vote à tout moment. Grâce à cela, ils sont plus enclins à agir de façon honnête et à voter dans l’intérêt des citoyens plutôt que dans le leur.
La démocratie liquide, c’est la représentation directe des minorités. Grâce à la quasi-absence d’obstacles à la participation, il est plus facile pour les minorités d’être représentées au sein du gouvernement. Cela signifie qu’aucune loi supplémentaire nécessitant un minimum de représentants issus de certaines minorités ethniques n’est exigée. En effet, la démocratie liquide constitue une représentation directe des différentes couches de la société et permet aux minorités et aux groupes ethniques, quelle que soit leur taille, de participer au processus de prise de décision et à la gouvernance du pays.
La démocratie liquide mène à de meilleures décisions. En évoluant en un réseau d’échanges qui prennent des décisions éclairées dans des domaines spécifiques, la démocratie liquide mène à de meilleures décisions globales. La démocratie liquide finit par évoluer en une méritocratie où les électeurs les plus talentueux, expérimentés et les mieux informés prennent les décisions dans leur domaine d’expertise.
La démocratie liquide est évolutive. De nos jours, les gens disposent de trop peu de temps pour se tenir au courant en permanence de la manière dont l’État est gouverné. Les décisions qu’il est nécessaire de prendre sont en nombre croissant, tandis que le temps est si précieux que beaucoup ne veulent simplement plus le passer à prendre des décisions de gouvernance. De plus, nous sommes dans une société de la spécialisation, et peu de gens sont réellement vraiment bien informés dans différents domaines. Du coup, au travers de la délégation, la prise de décision est placée entre les mains d’experts bien informés, dont le temps et les connaissances peuvent être dédiés à la meilleure gouvernance globale de l’État.
L’état actuel de la démocratie liquide
La raison principale pour laquelle la démocratie liquide n’a pas été mise en pratique durant la dernière décennie est principalement liée aux obstacles à sa mise en place. Les démocraties liquides, comme les démocraties directes, nécessitent une infrastructure technique de fond qui permet aux participants de constamment pouvoir voter directement ou par délégation. C’est uniquement par le biais d’Internet et avec les avancées de la cryptographie que cela a été rendu possible durant les dernières décennies.
Au-delà des obstacles technologiques, un obstacle de plus grande ampleur aujourd’hui relève de l’éducation. Le sondage Avez-vous entendu parler de la démocratie liquide ? le montre bien : seule une petite frange de la population a au mieux entendu parler de la démocratie liquide. Par voie de conséquence, afin de réussir à implanter la démocratie liquide dans des communautés de grande envergure, des efforts bien plus importants sont nécessaires pour éduquer les citoyens sur les avantages et les possibilités que peut offrir la démocratie liquide. La seule réelle réponse à cela est la création de cas concrets intéressants qui montreraient à la population externe ou interne à la communauté ce que la démocratie liquide signifie et apporte concrètement.
Un gros effort est déjà mené par les partis pirates en Europe, qui utilisent des logiciels du genre Liquidfeedback pour certaines décisions et même au cours de certaines élections. En outre, Google a récemment publié des résultats d’expérimentations internes de démocratie liquide. Nous verrons beaucoup d’autres développements dans ce domaine, et je pense que la démocratie liquide va bien progresser, avec de nouvelles initiatives qui se mettent en place. Je travaillerai personnellement sur une implémentation de la démocratie liquide sur Ethereum, et collaborerai aussi à quelques autres solutions de vote pour créer de nouveaux cas représentatifs.
Conclusion
La démocratie liquide est le modèle démocratique qui correspond le mieux à notre société actuelle. La technologie est prête, le seul levier qui manque est l’effort dans l’implémentation concrète, tandis que la recherche dans ce domaine relève plus du détail. Plus important encore est le besoin de déterminer quels modèles sont applicables pour la gouvernance (exécutive ou administrative) concrète d’un pays.
Je suis confiant dans le fait que dans les années qui viennent, beaucoup de questions que je me pose, comme tant d’autres, trouveront leur réponse. Qui sait, peut-être verrons-nous une petite ville, ou même juste un village, adopter la démocratie liquide dans une ou deux décennies. C’est tout à fait possible.
3 auteurs de romans Framabook en dédicace à Paris !
Vous l’avez peut-être remarqué, mais la collection Framabook est active, et se diversifie de plus en plus… allant même défendre la Culture Libre dans la fiction !
Alors pour fêter cela, on s’est dit qu’on allait mettre nos auteur-e-s de romans Libre à l’honneur lors d’une dédicace… Car quoi de mieux pour faire découvrir le Libre aux Dupuis-Morizeau de notre entourage que de trouver au pied du sapin un roman dédicacé personnellement… Une histoire qu’ils peuvent adapter, reprendre, diffuser autour d’eux, voire dont ils peuvent écrire la suite…?
On connaît déjà 2 romancier-e-s Framabook…
#Apolog, de Pouhiou
Il y a bien entendu Pouhiou qui, quand il n’est pas Framaslave ou ne parle pas de sexe libre et open-source, continue de temps en temps d’écrire les aventures des NoéNautes, ses télépathes foutraques, aux bras cassés et pieds nickelés.
Le 3e roman de la série des NoéNautes, #Apolog, est sorti en août dernier, et bonne nouvelle : pas besoin d’avoir lu les deux tomes précédents pour l’apprécier !
En revenant aux origines de la prophétie qui pourrit la vie de ses personnages, Pouhiou se permet de réécrire l’Histoire avec l’irrévérence qu’on lui connaît…
Tout en balisant son roman d’un « code » littéraire nous méta-donnant des infos afin d’encore mieux jouer avec notre esprit.
Lilly, c’est notre auteure-prodige. Une jeune femme si talentueuse qu’elle a vu son premier roman édité avant même que d’aller passer son bac de Français.
Il faut dire qu’Avant de dormir est une œuvre singulière. Un conte initiatique, une épopée gothique à l’imaginaire dense qui ne dépaysera pas les amateurs de Lovecraft ou de Neil Gaiman.
C’est l’histoire d’Andreï, un adolescent de 13 ans qui emménage dans une ville où un mal mystérieux tue ses voisins par dizaine. Lorsqu’Andreï découvre sous son lit un passage vers une forêt et un monde peuplé de monstres, il décide de partir à la recherche de celle qui pourrait être à l’origine de ces malheurs : la Vouivre.
Une exclu dans le Libre, vraiment…? OK : parlons plutôt d’avant-première. À l’heure où nous écrivons ces lignes, le polar drôle et prenant de Frédéric Urbain est en cours d’édition, et n’est pas encore officiellement sorti. Vous l’aurez donc avant tout le monde lors de cette séance de dédicaces !
Frédéric est connu du groupe Framabook, puisqu’il en est l’un des correcteurs. Mais il n’a pas bénéficié de passe-droit pour autant : comme les autres, son roman est passé en comité de lecture et la qualité de son intrigue, l’humour des situations comme la langue enlevée de ces personnages nous ont séduits.
Vieux flic et vieux voyou est un polar dans la plus pure tradition de ces romans de gare qui nous font délicieusement frissonner. Deux papys (un flic à la retraite et un pickpocket rangé des affaires) s’embarquent dans une enquête au suspense maîtrisé, qui va leur faire traîner leur expérience, leurs rhumatismes et leur argot de titis dans les rues de Paname… entre meurtre, trafic de drogue, et tracking GPS.
Tous ces livres sont Libres (CC-0 pour les romans de Frédéric Urbain et Pouhiou, LAL pour celui de Lilly Bouriot). Ce qui signifie que vous pourrez venir dans la librairie avec votre clé USB et repartir avec tous les romans dans votre poche !
Le logiciel libre bénéficie déjà de communautés qui veillent à le faire connaître et adopter par un maximum de monde. La culture libre ne profite pas encore de ces prescripteurs et prescriptrices, et pourtant… Pourtant c’est une porte d’entrée formidable vers le Libre pour toutes les personnes qui angoissent à l’idée de changer leurs habitudes logicielles.
À vous donc de faire passer l’info autour de vous, et d’emmener un maximum de monde à cette rencontre avec des auteur-e-s qui remettent en question le paradigme vieillissant de la propriété intellectuelle classique 😉
C’est depuis les années 1970-1971 que le gouvernement français élabore et met en œuvre des plans informatiques (« numériques » dit-on aujourd’hui) pour l’Éducation Nationale. L’année la plus marquante, qui a fini par introduire vraiment des ordinateurs entre les murs de nos écoles, ce fut 1985 avec le lancement du plan Informatique Pour Tous (IPT) par L. Fabius.
La firme Microsoft a petit à petit avancé ses pions au cœur de l’Éducation nationale et, depuis lors, nous assistons à des accords réguliers entre le ministère et Microsoft, chiffrant l’usage de ses produits à plusieurs millions d’euros à chaque fois… avec un succès pour le moins mitigé. À tel point que les citoyens se sont récemment mobilisés autour de cette question en plébiscitant l’usage de logiciels libres dans les services publics lors de la consultation numérique initiée par la ministre Axelle Lemaire.
En somme, un pas supplémentaire est donc effectué par Microsoft dans le monopole de l’informatique à l’école, jusqu’à saturer les élèves et les enseignants de solutions exclusives, centralisant et analysant les données des élèves selon des algorithmes dont le ministère n’a pas réclamé les clés (pas d’engagement à l’interopérabilité, ni à l’ouverture du code source).
Or, les enseignants ne manquent pas pour expérimenter et mettre en œuvre des solutions basées sur des logiciels libres. Des solutions plus ouvertes, plus malléables, et plus efficaces pour atteindre les objectifs d’un réel apprentissage de l’informatique par les élèves et une appropriation des outils dans leurs diversités et leurs logiques. Par exemple, les tablettes Tabulédu sont une solution pensée pour les classes de primaire dans le respect des données et des libertés des élèves.
Pour le collège, c’est en Espagne qu’on peut trouver de l’inspiration. En Mai 2014, le Framablog publiait Fin du support XP, un collège espagnol migre vers Ubuntu. Ce samedi 24 novembre 2015, Fernando Lanero, l’enseignant à l’origine de cette migration était invité à l’Ubuntu party parisienne pour y donner une conférence, interprétée dans sa version Francophone par Framasoft en la personne de Genma.
Dans son discours, Fernando nous montre que la migration n’est pas une question technique (une personne ayant les compétences et le temps peut le faire), mais bel et bien un enjeu d’éducation. Quel modèle d’éducation voulons-nous pour les enfants? Quelles valeurs souhaitons nous leurs transmettre? Les valeurs du logiciel propriétaire et privateur, pour lequel copier c’est voler, comprendre c’est tricher ? Ou bien celles du logiciel libre, celle du partage et de l’appropriation des connaissances ?
Le texte ci-dessous est une synthèse de son discours, reprenant les principales idées.
Ubuntu pour libérer les écoles – Linux pour l’éducation
Utiliser Ubuntu au sein d’une école augmente grandement les ressources éducatives et emmène les élèves au sein d’une nouvelle dimension éducative.
Pourquoi choisir le logiciel libre ?
Le logiciel libre, c’est non seulement une question technique ; mais il s’agit avant tout d’une question d’éthique, sociale, et politique. Ces aspects-là sont beaucoup plus importants que l’aspect technique.
Pour des raisons techniques :
auditable : toute personne qui en a les connaissances peut lire le code source du logiciel libre;
résistant aux malwares : en optant pour Linux, les virus informatiques, la dégradation du système et de nombreux problèmes techniques divers ont disparu instantanément;
sain et sécurisé : parfait pour un usage par des enfants;
il permet de réutiliser du matériel. Ubuntu est en général bien plus performant que Windows sur du vieux matériel, nous n’avons pas de nécessité à être constamment en train d’acheter du nouveau matériel;
un grand support via sa communauté.
Ce changement permet également à l’école économiser de l’argent. Ne pas avoir à acheter des licences pour les systèmes d’exploitation propriétaires, les suites bureautiques et des outils anti-virus a déjà permis à l’école d’économiser environ 35 000 euros dans l’année 2014-2015.
« Évidemment, il est beaucoup plus intéressant d’investir cet argent dans l’éducation. »
Pour des raisons non-techniques :
augmentation de la dimension éducative de l’Informatique;
la liberté du logiciel joue un rôle fondamental dans l’éducation ; le logiciel libre diffuse la connaissance humaine;
le logiciel libre soutient l’éducation, le logiciel propriétaire au contraire l’interdit;
il y a transmission d’un esprit de collaboration et de coopération;
le code source et les méthodes du logiciel libre font partie de la connaissance humaine. Au contraire, le logiciel propriétaire est secret, la connaissance restreinte, ce qui est à l’opposé de la mission des établissements d’enseignement;
pour plus de cohérence avec les valeurs de l’école. Le choix du logiciel libre est non seulement une question technique ; il est également une question d’éthique, sociale et politique.
« La liberté et la coopération sont des valeurs essentielles du logiciel libre. Le système GNU implémente la valeur du partage ; le partage étant bon et bénéfique au progrès humain. »
Avec quoi ?
les logiciels libres permettent de comprendre notre environnement technique quotidien;
les logiciels libres sont une forme d’éducation en eux-mêmes, d’une certaine façon;
Ubuntu offre une large gamme de logiciels éducatifs et de matériels certifiés;
Ubuntu fournit un accès sécurisé et accessible aux étudiants, enseignants et administrateurs scolaires.
Quand changer ?
Maintenant.
Windows XP est un système propriétaire et obsolète;
la majorité des problèmes rencontrés avant la migration étaient liées à la transmission des virus via les clefs USB utilisées pour les documents.
« Pourquoi amener Ubuntu à l’école? Parce que les enfants sont l’avenir d’une société. S’ils savent ce qu’est Ubuntu, ils seront plus « ouverts » et plus « libres » quand ils deviendront adultes. »
Pour qui ?
pour les élèves les enfants sont naturellement curieux, ils ne sont pas du tout réticents au changement car ils cherchent la nouveauté et le changement;
pour les enseignants et professeurs
« Quand un professeur enseigne avec une application propriétaire, il est face à un véritable choix. Il oblige les élèves à acheter des logiciels ou à les copier illégalement. Avec les logiciels libres, les professeurs ont le contrôle de la situation et ils peuvent alors se concentrer sur l’éducation. »
Comment migrer ?
impliquer au sein du projet les personnes qui croient dans ce modèle d’éducation globale;
solliciter la communauté du logiciel libre;
utiliser toutes les ressources disponibles.
Quelles étapes ?
prendre une grande inspiration : une migration ce n’est pas facile et vous trouverez face à beaucoup plus de problèmes que vous n’imaginiez au début ;
évaluer les besoins, les coûts, les économies ;
commencer les migrations doucement, très doucement. Commencer en remplaçant programmes propriétaires sur Windows par du logiciel libre. Le changement pour Ubuntu se fera de façon naturelle ;
former les enseignants à l’utilisation d’Ubuntu et des nouvelles applications ;
faire de la pub (beaucoup) Vous devez expliquer ce que vous faites et pourquoi c’est une bonne chose.
Construire ?
Choisir la bonne option pour les besoins de votre école n’est pas facile, mais la mettre en œuvre est encore plus difficile :
évaluer les machines que vous allez migrer et la prise en charge du matériel ;
choisir la bonne version d’Ubuntu (envisager par exemple l’usage de la version dédiée à l’éducation, Edubuntu) ;
utiliser la même interface graphique sur chaque ordinateur ; l’interface utilisateur doit être homogène ;
il faut adapter la distribution aux besoins scolaires et toujours garder à l’esprit les besoins de l’école. Le plus important est l’expérience de l’utilisateur final ;
il faut toujours garder en tête que les utilisateurs finaux, ce sont les élèves. Ce qui compte vraiment, c’est leur éducation. Les changements doivent donc se concentrer sur eux. Le passage au logiciel libre doit permettre d’améliorer leur éducation.
Rappelez-vous, nous ne nous battons pas contre Microsoft. Nous nous battons contre une mauvaise expérience éducative. Notre mission est de diffuser la connaissance humaine et de préparer les élèves à être de bons membres de leur communauté.
Résultats de cette migration
Ce sont :
plus de 120 ordinateurs migrés durant 2014-2015;
plus de 1 200 étudiants ayant un contact avec Ubuntu par an;
autour de 35 000€ qui ont pu être investis dans l’éducation, et non plus dans des licences Microsoft ;
des ordinateurs plus fiables et donc cela laisse plus de temps pour faire de l’éducatif.
« L’open source est une puissante alternative aux logiciels propriétaires. La preuve en est que de nombreuses municipalités, de gouvernements et d’entreprises sont en train d’adopter les solutions open source. Il est donc temps que les écoles et les universités fassent de même. »
Merci à Fernando Loreno pour son partage d’expérience,
Cher ministère… mais surtout chères académies, rectorats, enseignant-e-s et personnel encadrant : ces solutions existent déjà et vous êtes à l’origine de nombre d’entre elles. Nous nous permettrons simplement d’en énumérer quelques unes avec ces liens :
« Il faut changer de logiciel », dirait-on dans la novlangue actuelle. Au-delà de la question – importante – de l’usage des logiciels libres à l’école, et des coûts de migration, l’Éducation Nationale doit se poser la question de son rôle : former de futurs citoyens éclairés libres de leurs opinions et de leurs choix, ou de futurs travailleurs-consommateurs ? Sous-traiter à Microsoft (ou Apple, ou Google) le champ du numérique éducatif, c’est refuser aux élèves la capacité d’être acteurs du numérique de demain, en leur proposant uniquement une place de figurants.
L’enjeu central se porte aujourd’hui sur les valeurs que l’école souhaite porter : le Ministère de l’Éducation Nationale est il prêt à encourager réellement le développement des ressources libres à l’école ? En accompagnant les enseignants à publier sous licence Creative Commons, en travaillant avec les communautés pour améliorer les logiciels existants ou en créer de nouveaux, en se positionnant clairement du côté du bien commun et du partage de la connaissance, etc.
Ou préfère-t-elle laisser la place à des acteurs – spécialistes de « l’optimisation fiscale » – dont l’objectif n’est pas l’émancipation des élèves et enseignants, mais au contraire leur enfermement dans des usages et des formats leur permettant de faire perdurer une économie de la rente ?
« Les Nouveaux Loups du Web » : venez assister à l’avant-première !
« Les Nouveaux Loup du Web » est un documentaire, et plus précisément la version française du documentaire « Terms and Conditions May Apply », qui démontre ce que les entreprises et les gouvernements peuvent apprendre sur vous au travers de votre vie numérique, le plus souvent à partir d’informations confiées volontairement à des services en ligne.
Nous vous proposons de venir découvrir ce film en avant première, ainsi qu’a participer au débat qui suivra, animé par des représentants de La Quadrature du Net et de Framasoft.
Sorti aux États-Unis en 2013, « Terms and Conditions May Apply », réalisé par Cullen Hoback, a eu la « malchance » de sortir juste avant les révélations d’Edward Snowden qui mirent en évidence ce qui n’était qu’une suspicion dans le documentaire : la NSA peut demander — et demande — à GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) de lui fournir des informations concernant des utilisateurs de services en lignes.
Pourquoi sortir ce film en France en 2016, alors ? Parce qu’il démontre avec talent ce que nous dénonçons dans notre campagne « Dégooglisons internet », à savoir qu’accepter ces Conditions Générales d’Utilisation revient souvent pour les utilisateurs à perdre une part non négligeable de leurs libertés fondamentales (droit à l’intimité et à la vie privée, notamment).
Bien que la date de sortie officielle du film soit prévue pour le 6 janvier 2016, nous souhaiterions vous proposer d’assister à l’avant-première, le 15 novembre 2015 à Paris (11€, lien de réservation sur la page de Jupiter Films).
Le film sera suivi d’un débat en présence d’Adrienne Charmet (La Quadrature du Net) et Pierre-Yves Gosset (Framasoft).
Le succès de cette avant-première est important, car plus le film suscitera d’intérêt, plus il aura de chance d’être remarqué par les diffuseurs (cinémas, collectivités, enseignants, etc.), et pourra ainsi toucher un public plus large.
Framasoft accompagnera activement la sortie du film, en faisant le maximum pour « pousser » la diffusion de ce film (notamment dans les lycées, mais pas seulement) afin d’informer un public pas nécessairement sensibilisé aux questions du libre ou du respect de la vie privée.
En attendant de vous retrouver le 15 novembre prochain, nous vous proposons de retrouver ci-dessous une rapide entrevue avec Jan Roeloffs, fondateur de Jupiter Films.
Bonjour à toute l’équipe de Framasoft, et merci de votre soutien. J’ai crée Jupiter Films il y a 29 années après un parcours universitaire qui m’a fait passer par les sciences, la philosophie et l’apprentissage de plusieurs langues.
J’ai habité en Allemagne, en Suisse, aux États-Unis, au Canada et en Angleterre avant de choisir la France et Paris comme résidence. Après ce parcours qui m’a élargi l’horizon et muni d’un esprit critique loin de tout dogme mais aussi ouvert que possible, j’ai voulu investir ma passion dans une activité avec un « sens ».
Et, donc, qu’est-ce que Jupiter Films ?
Lorsque j’ai fondé Jupiter Films en 1986, j’ai commencé dans la distribution mondiale de films (plusieurs Belmondo et des films d’art et essai). Rapidement l’activité s’est diversifiée vers la coproduction, le montage financier, le négoce de droits de films et la réalisation ainsi que la distribution au cinéma et l’édition de DVD. Aujourd’hui nous allons refaire le site et lancer la VOD avant la fin de l’année. L’intention depuis l’origine est de présenter des films documentaires ou de fiction qui apportent un message, de l’espoir ou une connaissance, même si c’est ambitieux. Les films viennent de tous horizons, déjà tournés ou en production, parfois nous les réalisons, mais toujours nous les distribuons dans tous les médias. Nous voulons aider le spectateur à incarner le changement qu’il veut voir dans le monde, selon le mot de Gandhi.
Certains des films présentés par JF sont plutôt « inattendus », abordant la spiritualité, l’écologie, les médecines parallèles… Des sujets souvent ignorés, raillés ou dénigrés, notamment par les communautés techniques et scientifiques. Est-ce un parti pris ?
C’est résolument un parti pris que j’assume avec une bonne dose de sens critique, mais sans tomber dans des certitudes qui n’en sont plus. Un film documentaire de notre catalogue, tourné en six années, raconte la découverte du boson de Higgs. Ce film suscite des vocations auprès des élèves et étudiants scientifiques et un deuxième film vulgarise ce qu’est le boson de Higgs et quelques concepts autour. En interrogeant les scientifiques les plus représentatifs, il a été admis par tous que nous appréhendons environ 4% de ce qui est. Le reste s’appelle matière noire et énergie noire, représentant 96%. Les règles de notre physique actuelle vont évoluer ou être bouleversées par une « nouvelle » physique qui comportera moins de contradictions pour expliquer un environnement que nous ne comprenons pas dans sa totalité (c’est le moins qu’on puisse dire) et qui ne se limite plus à la matière (au sens classique). Par conséquent, il serait bien arrogant d’ignorer les 96% « invisibles » et rejeter dans tous les domaines des résultats constatés sans pour autant arriver à les expliquer. Pourtant la science nous confirme ces résultats.
Dans cette approche humble du « chercheur » qui ne sait pas tout, nous évitons le new-age, les dérives sectaires et autres pièges pour traiter de sujets passionnants avec une démarche scientifique et critique. La spiritualité, la mort (et l’au-delà qui nous attend tous), les médecines alternatives, nos facultés extra-sensorielles ou au contraire la découverte de tout l’univers de l’odorat prochainement, et bien d’autres sujets encore, nous collent à première vue une image ésotérique alors que ce sont toujours des enquêtes approfondies et sérieuses.
J’accepte que certains savent tout et rejettent parfois des films, sans les avoir vus. Et la joie que nous récoltons de nombreux retours de spectateurs qui se sont enrichis avec nos films compense largement ces cas isolés.
Alors, pourquoi avoir choisi de distribuer en France « Les nouveaux loups du web » ? Et en quoi a consisté votre travail ?
Ce film qui dévoile ce que l’acceptation des « conditions générales d’utilisation » dans le monde numérique implique, ne devait être présenté qu’à quelques heureux élus en France. Nous avons pensé à Jupiter Films que c’est un sujet d’avenir puisque le monde de demain sera en bonne partie lié au numérique, source d’évolution, de développement et de croissance bien nécessaire. Encore faut-il savoir et choisir en connaissance de cause ! Le film lève le voile sur les motivations de certains acteurs, que nous acceptons comme indispensables.
Afin de rendre le film accessible à tous, nous le distribuons en vo sous-titrée en français ou en version doublée au choix.
Quels espoirs porte-tu pour ce film ?
Il est très important pour nous d’avoir la salle de 400 places de l’Avant-première du dimanche 15 novembre à 13h pleine ! En effet, la distribution en cinéma dans le reste de la France en tiendra compte : le succès appelle le succès. Ensuite, j’ai vraiment envie de travailler les scolaires afin d’ouvrir les yeux aux jeunes, qui pour certains n’évaluent pas totalement leur exposition sur facebook et consorts et ignorent les conséquences très concrètes.
L’avant-première aura lieu le 15 novembre à Paris, et sera suivi d’un débat avec la salle, en présence d’Adrienne Charmet (La Quadrature du Net) et Pierre-Yves Gosset (Framasoft). A ton avis, quelles sont les attentes de la salle ?
Depuis que nous avons lancé cette série des Dimanches de la Connaissance où la projection d’un film est suivi d’un débat d’une heure trente environ, nous constatons la soif d’échanges du public sur ces sujets. Concernant le numérique, il est primordial de présenter les alternatives à une dérive opposée à nos intérêts citoyens. Il faut aussi lever les doutes et donner des informations précises à propos de notre comportement dans le numérique. Le public veut plus de clarté, afin de faire de vrais choix en connaissance de cause. Être des consomm’Acteurs et non des Cons’Ommateurs.
Si on souhaite diffuser ce film, comment s’y prendre ?
Nous accueillons toutes les demandes de projections ou de personnes qui souhaitent intervenir pour animer un débat dans toute la francophonie (France, Suisse, Belgique et Québec). Il suffit de nous contacter par email : info@jupiter-films.com
Nous connaissons les salles dans toutes les localités et aidons à la mise en place. Nous fournissons aussi du matériel publicitaire gracieusement et aidons à trouver le public. C’est aussi possible en dehors des cinéma pour un montant raisonnable en harmonie avec le nombre de spectateurs. Pour les projections scolaires, c’est la même démarche avec un prix réduit selon le nombre d’élèves et la localité.
Nous proposons aussi des flyers, films-annonce et des extraits gratuitement afin de faire connaître le film le plus largement possible. Cependant seuls les revenus du film complet nous permettent de continuer à offrir une sélection vraiment indépendante et libre, puisque nous n’avons ni subventions, ni autres aides pour le moment.
Habituellement, nous laissons la dernière question/réponse à l’invité : quelle est la question que tu aurais souhaité qu’on te pose ? (et qu’y répond tu ?)
Quel est le plus important dans la vie ? – De favoriser son propre épanouissement afin de rester proche du bonheur chaque jour.
Merci infiniment à Jan.
Rappels :
Sortie officielle du film : 6 janvier 2016
Avant première du film (venez nombreux-ses !) : 15 novembre 2015, 13H, PUBLICIS CINEMAS – 129 Avenue des Champs Elysées 75008 PARIS