Protection vidéo et Web ouvert, par Tim Berners-Lee #DRM #HTML5

La question de l’implémentation des DRM à même le HTML5 fait couler beaucoup d’encre actuellement. Nous l’avions évoqué dans nos colonnes : Mobilisons-nous ! Pas de DRM dans le HTML5 et les standards W3C et DRM dans HTML5 : la réponse de Cory Doctorow à Tim Berners-Lee (le Geektionnerd n’étant pas en reste non plus : DRM et HTML5 et DRM HTML5, c’est fait).

Il faut dire que la simple évocation de ces 3 majuscules fait hérisser le poil de bon nombre d’entre nous. Alors vous imaginez, les DRM validés et implémentés par le W3C ! Ce serait crime de haute trahison…

Pour en quelque sorte éteindre l’incendie, Sir Tim Berners-Lee himself répond ici à ses détracteurs en voulant se montrer rassurant quant à sa préoccupation constante et prioritaire qui demeure un Web libre et ouvert pour ses utilisateurs. Il rappelle que pour le moment nous n’en sommes qu’à la phase de discussion et que celle-ci s’annonce d’autant plus longue qu’il y a de nombreuses parties à tenter de concilier.

Convaincant et convaincu ?

À propos de la protection vidéo et du Web ouvert

On Encrypted Video and the Open Web

Tim Berbers-Lee – 9 octobre 2013 – W3 Blog
(Traduction : Paul, Penguin, Garburst, Alexis, Norore, ZeHiro, Armos, genma + anonymes)

Il y a eu beaucoup de réactions suite au message annonçant que le W3C considère que le sujet de la protection des vidéos devait être abordé au sein de son Groupe de Travail HTML. Dans cet article, je voudrais donner quelques arguments pour expliquer cela.

Nous entendons l’explosion de critiques (et quelques soutiens) concernant les récents changements d’orientation du W3C qui ouvrent la discussion à l’intégration de la protection du contenu vidéo au sein du Groupe de Travail HTML. Nous entendons cette critique comme un signal : que de nombreuses personnes attachent de l’importance aux choix du W3C, et se sentent trahies par cette décision. Je veux qu’il soit clair que toute l’équipe du W3C et moi-même sommes plus passionnés que jamais au sujet de l’ouverture du Web. De plus, aucun d’entre nous, en tant qu’utilisateur, n’apprécie certaines formes de protection des contenus telles que les DRM. Ni les contraintes qu’ils imposent aux utilisateurs et aux développeurs, ni la législation bien trop sévère que cela entraîne dans des pays comme les États-Unis.

Nous avons tous envie d’un Web ouvert, riche et fiable. Nous voulons un Web ouvert aux innovateurs et aux bidouilleurs, aux créateurs de ressources et aux explorateurs de culture. Nous voulons un Web qui soit riche en contenu, à prendre dans le double sens de la lecture mais aussi de l’écriture. Nous voulons un Web qui soit universel, dans le sens qu’il puisse tout contenir. Comme Michael Dertouzos, un ancien responsable du Laboratoire de sciences informatiques ici au MIT, avait l’habitude de le dire : un marché de l’information, où les gens peuvent acheter, vendre ou échanger librement de l’information. Pour être universel, le Web doit être ouvert à toutes sortes d’entreprises et de modèles d’entreprise.

Les principes de conception d’HTML donnent une aide précieuse sur les priorités des parties concernées : « en cas de conflit, prenez d’abord en compte les utilisateurs puis les auteurs, ensuite les développeurs, puis ceux qui élaborent les spécifications et enfin l’aspect purement théorique. En d’autres termes, le coût (ou les difficultés) supporté par l’utilisateur doit avoir la priorité sur celui supporté par les auteurs, qui aura à son tour la priorité sur celui associé à l’implémentation, lequel aura la priorité sur le coût pour les rédacteurs de spécifications, lui-même devant avoir plus de poids que les propositions de modification fondées sur de seules considérations théoriques. Il va de soi que les améliorations qui apportent satisfaction à plusieurs parties simultanément sont préférables.

Ainsi mettons-nous l’utilisateur au premier plan. Mais des utilisateurs différents ont des préférences différentes voire parfois incompatibles : certains utilisateurs du Web aiment regarder des films à succès, d’autres aiment jouer avec le code. La meilleure solution sera celle qui satisfera tout le monde, et nous la cherchons encore. Si nous ne pouvons pas la trouver, nous recherchons au moins la solution qui portera le moins préjudice aux besoins exprimés, qu’il s’agisse des utilisateurs, auteurs, développeurs, et tout autre partie de l’écosystème.

Les débats à propos de l’intégration de la protection des contenus vidéos en général et d’EME en particulier, à la standardisation du W3C sont nombreux et variés. Lorsque nous avons discuté du problème au sein du Groupe Architecture Technique du W3C plus tôt cette année, j’ai noté sur le tableau une liste des différents arguments, qui était déjà relativement longue, et cette liste ne s’est pas réduite avec le temps. Ces réflexions s’appuient sur le comportement supposé des utilisateurs, concepteurs de navigateur, distributeurs de contenu multimédia, etc. selon différents scénarios qui ne peuvent être que des hypothèses. De plus elles impliquent de comparer des choses très différentes : la fluidité d’une interface utilisateur et le danger que les programmeurs puissent être emprisonnés. Il n’y aura donc pas d’issue pour nombre de ces discussions avant un long moment. Je voudrais remercier ici tout ceux qui, avec écoute et considération, se sont investis dans cette discussion et j’espère que vous continuerez ainsi.

Permettez-moi de prendre quelques éléments, en aucun cas une liste exhaustive.

Le W3C est un lieu où l’on discute des évolutions potentielles de la technologie. Et c’est la charte du Groupe de travail HTML qui cadre le champ de la discussion. Le W3C n’a ni l’intention ni le pouvoir de dicter ce que les navigateurs ou les distributeurs de contenu peuvent faire. Exclure cette question de la discussion n’a pas pour effet qu’elle cesse de se poser pour les systèmes de tout un chacun.

Certains arguments en faveur de l’inclusion peuvent se résumer comme suit : si protection du contenu des vidéos il doit y avoir, mieux vaut que cette protection soit discutée de manière ouverte au sein du W3C, que chacun utilise autant que possible un standard ouvert et interopérable, qu’elle soit intégrée dans un navigateur dont le code source soit ouvert, et disponible dans un ordinateur classique plutôt que dans un appareil spécialisé. Ce sont là des arguments clés en faveur de l’inclusion de ce sujet aux discussions.

En tant qu’utilisateur, personne n’aime les DRM, quel que soit l’endroit où ils surgissent. Toutefois, ça vaut le coup de réfléchir à ce que nous n’aimons pas dans les systèmes de DRM existants, et comment l’on pourrait construire un système plus ouvert et plus juste. Si nous, les programmeurs qui concevons et construisons les systèmes Web, devons étudier quelque chose qui sera très coûteux à de nombreux niveaux, que pouvons-nous demander en échange ?

Le débat vient à peine de commencer. Le Restricted Media Community Group est un forum pour discuter de cela. La liste de diffusion www-tag@w3.org est un bon moyen de parler de l’architecture du Web en général, et il y a aussi le HTML Working Group et le Web Copyright Community Group. Et puis il y a également tous ces commentaires au message de Jeff ou à cet article, bien que je ne puisse pas être en mesure de répondre à tout le monde.

Continuons tous à participer à la création d’une plateforme Web puissante, reposant sur des standards ouverts. Le cas de l’utilisation d’un contenu vidéo protégé est un défi à relever. Nous pensons que cette discussion nous aidera à atteindre ce but, même s’il reste encore beaucoup à faire pour arriver au niveau d’ouverture que j’ai personnellement tenté d’atteindre depuis 25 ans et que le W3C poursuit depuis sa création.

Timbl




Ce que j’aime chez Mozilla

Ce que j’aime chez Mozilla va bien au-delà du code… Le témoignage enthousiaste et caractéristique d’un contributeur.

Ce ne sont pas les développeurs sur des projets non libres qui peuvent en dire autant.

I love Mozilla

Ce que j’aime chez Mozilla

What I Love about Mozilla

Mihnea Dobrescu-Balaur – 6 octobre 2013 – Blog personnel
(Traduction : Asta, Penguin, goofy, Isammoc, FF255, nclm, GregR, greygjhart, Isammoc)

Je me suis pas mal impliqué pour Mozilla ces derniers temps et, entre mon dernier stage et le MozSummit de ce week-end, plusieurs pensées ont commencé à germer à propos de ce que j’aime le plus à son sujet. Ne perdez pas de vue que ces mots traduisent uniquement mes impressions.

Quand je parle de Mozilla aux gens, ils pensent en général « ah, Firefox ! ». Même si Firefox est notre projet le plus populaire actuellement, Mozilla représente bien plus que ça ; voici pourquoi j’écris cela.

Tout commence avec notre mission qui, comme Mitchell l’a expliqué au Summit, peut être réduite à trois principes de base :

  1. Le Web doit être ouvert : Internet est une source d’information publique qui doit être ouverte et accessible à chacun dans le monde entier.
  2. Le Web doit être interopérable : les gens ne doivent pas être enfermés dans un écosystème et doivent pouvoir utiliser la technologie qu’ils préfèrent pour accéder à Internet.
  3. Le Web doit être nôtre : les gens doivent avoir la possibilité de façonner leur expérience d’Internet et de contribuer à son contenu sans demander la permission à une instance centrale.

Il n’y a rien ici concernant les performances de JavaScript, le temps de démarrage des app, la fluidité du défilement ou d’autres mots à la mode ; bien que ceux-ci ne soient clairement pas ignorés, cela montre que Mozilla a des priorités différentes.

À chaque fois que je vois une démo ou que je lis un sujet sur un nouveau projet en cours, je suis impressionné de voir à quel point les gens recherchent la standardisation et maintiennent le choix de l’utilisateur au premier plan à tout moment. Cela montre encore que nous ne sommes pas dans une course à la fonctionnalité, essayant de nous démarquer au travers de fonctionnalités que les autres n’ont pas. Si vous avez fait attention aux principes, vous saurez que c’est en fait impensable… Le Web doit être interopérable, vous vous souvenez ?

La mission est ce qui guide la communauté. Je pense que nous avons là une communauté fantastique : développeurs, designers, testeurs, reps (NdT : des « représentants » Mozilla bénévoles qui organisent des événements), travaillant tous ensemble pour s’assurer, et là encore pour paraphraser Mitchell, qu’Internet soit ce que le monde a besoin qu’il soit. Contrairement à d’autres projets, où la communauté environnante ne joue qu’un (petit) rôle de soutien mineur, Mozilla telle qu’on la connaît ne serait pas pareille sans sa cohorte de volontaires.

Outre Firefox, nous travaillons sur d’autres projets qui rendent le Web plus accessible et le font avancer. Firefox OS et Webmaker me viennent à l’esprit. Firefox OS rapproche Internet des personnes qui n’ont pas actuellement de smartphone. En même temps, il fait avancer les technologies Web en procurant un support semblable à celui que les développeurs sur des plateformes fermées, propriétaires à travers des applications natives peuvent avoir. Webmaker a pour objet de forger notre Internet – il permet aux gens de contribuer au Web avec leur propre contenu.

Avec sa mission, ses super volontaires et ses projets tournés vers la communauté, Mozilla est différente. Elle est spéciale. C’est quelque chose que beaucoup n’auraient pas pensé possible. Il n’y a pas si longtemps, personne n’aurait pensé qu’un logiciel libre, gratuit et open source puisse atteindre une part de marché significative. Firefox l’a fait et c’est grâce à son influence déterminante que nous en sommes arrivés à disposer d’autres choix que seulement Internet Explorer pour naviguer sur le Web.

Notre communauté démontre qu’un groupe de gens dispersés à travers le monde peut faire du beau travail ensemble. Firefox OS amène le Web encore plus loin, plus proche des terminaux mobiles de plus en plus populaires. Tout cela et bien d’autres choses encore est réalisé en toute transparence par des contributeurs passionnés. Comment ne pas l’aimer !?

Crédit photo : Beyond the Code




Emmabuntüs est plus qu’une distribution GNU/Linux

En janvier 2011 nous réalisions une interview intitulée Ne pas subir, toujours agir ! Rencontre avec Patrick d’Emmaüs.

Près de 3 ans plus tard, il nous a semblé intéressant de prendre des nouvelles du projet qu’il porte tant son histoire et son évolution nous semblent exemplaires.

Cette interview a été initialement publiée en anglais le 24 septembre 2013 sur Linux notes from DarkDuck sous le titre « Patrick d’Emmabuntüs: Emmabuntüs is more than a Linux distribution ».

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Entretien avec Patrick d’Emmabuntüs

1. Bonjour Patrick. Je pense que vous n’êtes pas encore connu dans le monde Linux. Pourriez-vous vous présenter ?

Je suis Patrick d’Emmabuntüs et je suis venu dans le monde Linux par hasard en voulant aider pour le reconditionnement d’ordinateurs la communauté Emmaüs de Neuilly-Plaisance (Communauté de naissance du Mouvement Emmaüs en 1949), à la suite de cela j’ai participé à la création du Collectif Emmabuntüs qui œuvre à la promotion de la distribution Linux Emmabuntüs.

2. Vous travaillez sur le projet Emmabuntüs. Késako ?

Cette distribution a été conçue pour faciliter le reconditionnement des ordinateurs donnés aux associations humanitaires, en particulier aux communautés Emmaüs (d’où son nom) et favoriser la découverte de Linux par les débutants, mais aussi prolonger la durée de vie du matériel pour limiter le gaspillage entraîné par la surconsommation de matières premières(*).

3. Quel âge a le projet ?

En mai 2010, j’ai participé en tant que bénévole au reconditionnement d’ordinateurs au sein de la communauté Emmaüs de Neuilly-Plaisance. En voyant l’ampleur du travail nécessaire pour remettre en état des ordinateurs de façon manuelle, j’ai commencé à développer un ensemble de scripts pour automatiser cette tâche sous Windows XP, afin de ne pas altérer la licence initiale.

Par la suite, constatant que de nombreuses machines étaient données sans disque dur, j’ai eu l’idée de faire un script pour installer cet ensemble de logiciels Libres ainsi que le Dock sur une distribution Linux Ubuntu 10.04, en reprenant les idées de base utilisées pour la réalisation du reconditionnement des machines sous Windows XP.

J’ai alors présenté ce travail lors de l’Ubuntu-Party 10.10 de Paris (Octobre 2010), afin de sensibiliser d’autres personnes à la nécessité :

  • de développer et promouvoir une distribution Libre adaptée au reconditionnement de machines dans les communautés Emmaüs de la région parisienne,
  • d’aider ces communautés à remettre en état et à vendre des machines pour un public majoritairement débutant qui ne connaît pas les distributions Linux.

Lors de cette Ubuntu-Party j’ai eu la chance de rencontrer Gérard et Hervé, qui m’ont convaincu de créer une ISO pour installer la distribution sans connexion Internet, puis Quentin de Framasoft a proposé de faire une interview pour présenter le travail réalisé sur le Framablog, en janvier 2011. Après cette interview le noyau qui allait former le Collectif Emmabuntüs a été rejoint par David qui a aidé à diffuser cette ISO sur Sourceforge et, à partir de mars 2011, par Morgan pour la diffusion sur Freetorrent.

La première version d’Emmabuntüs a été mise en ligne le 29 mars 2011, elle était basée sur une Ubuntu 10.04.

4. Quels sont les buts principaux de votre projet ? Quelle est la cible de ceux-ci ?

Le but que nous poursuivons est la mise en place de structures d’aide au reconditionnement de machines pour les associations humanitaires et d’inciter d’autres personnes à suivre notre démarche pour permettre de lutter contre les trois fléaux suivants :

  • La pauvreté au sein de certaines couches de la population, par l’apport de nouvelles sources de revenus à des associations humanitaires grâce à la revente de ces machines.
  • La fracture numérique en France et dans le monde, en particulier en Afrique, par la diffusion d’une distribution complétée de données libres.

5. Combien avez-vous de membres dans votre équipe ?

C’est difficile de dire exactement combien de personnes composent le collectif Emmabuntüs, car ce n’est pas une association ou il y a une cotisation à verser, et dans ce cas il suffit de comptabiliser le nombres adhérents. Ce que nous pouvons dire, c’est qu’il y a plus de 50 personnes dans notre mailling-list, et que depuis cette année nous avons énormément de partenariat informel avec des associations dans les domaines suivants :

Et surtout notre collaboration avec le projet Jerry DIT (Jerry est un ordinateur assemblé dans un bidon en plastique avec des composants informatiques de récupération), qui a choisi depuis un an Emmabuntüs comme distribution favorite sur la version du Jerry Desktop, puis aussi le travail accompli sur une base Emmabuntüs par le JerryClan Côte d’Ivoire.

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Le Jerry Clan Côte d’Ivoire a développé sur une base Jerry et Emmabuntüs 2 un ensemble de services destinés à l’aide médicale. Ce service est basé sur une application mobile libre de suivi par SMS des malades de la tuberculose, ainsi que sur M-Pregnancy pour le suivi des grossesses et des femmes enceintes, voir cette vidéo en français qui présente le dernier Jerry-Marathon à Bouaké.

6. Quelles sont les différences entre Emmabuntüs et les autres variantes d’Ubuntu Pinguy, Zorin, Mint ?

La grande particularité de cette distribution est qu’elle se veut « simple, ouverte, et équitable » : simple pour l’installation et l’utilisation, ouverte pour échanger des données avec des systèmes ayant des formats propriétaires, équitable dans le choix de l’installation ou non des formats propriétaires, mais c’est aussi une allusion à la raison de la naissance de cette distribution : l’aide aux communautés Emmaüs. Des blogueurs indépendants ont traduit cela en parlant d’Emmabuntüs 2 : « El Xubuntu humanitario », « All-Inclusive French Resort », « Multifunktional Kompakter Allrounder für ältere Computer » ou bien « Emmabuntüs 2 pour tous et pour tout faire ».

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Voici en détail les particularités de cette distribution ?:

  • Utilisation des versions stables pour bénéficier des mises à jour pendant le plus longtemps possible. Depuis le début, nous avons utilisé les versions LTS des variantes d’Ubuntu (Ubuntu 10.04, Lubuntu 10.04, et maintenant Xubuntu 12.04). Cela ne veut pas dire que ce sera toujours le cas, bien que nous apprécions particulièrement Ubuntu.
  • Utilisation d’un dock (Cairo-Dock) pour rendre l’utilisation plus simple en particulier pour la très chère Madame Michu. En un mot, l’accessibilité est un critère important dans les choix qui composent la distribution Emmabuntüs. Cela nous oblige à inclure parfois des applications non libres comme le sulfureux Skype, et Flash. Nous préférons ne pas rester sur une position idéologique et les intégrer plutôt que risquer de décevoir des personnes habituées à utiliser ces logiciels non libres. Elles ne comprendraient pas que le monde des logiciels Libres soit plus contraignant qu’un monde dit privé ou privateur. Ces logiciels non libres sont inclus dans l’ISO et sont installables par l’utilisateur final, soit au premier redémarrage après l’installation de la distribution, soit ultérieurement à partir d’icônes dans le dock.

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  • Profusion de logiciels (plus d’une soixantaine), pour que les futurs utilisateurs disposent de tous les outils dont ils ont besoin à portée de clic dans le dock (ou plusieurs versions de dock en fonction de l’utilisateur (expert, débutant, enfant, dans la version Emmabuntüs 2) sans avoir à chercher celui qui manque dans la logithèque.

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  • Configuration des navigateurs Internet Firefox et Chromium pour la protection des mineurs, contre la publicité et le Phishing (ou Fishing).

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  • Compatibilité bureautique prise en compte en permettant l’installation de fontes non Libres au choix de l’utilisateur final.
  • Non utilisation d’Internet pour faire l’installation, pour pouvoir diffuser ce travail dans des lieux où les connexions Internet sont lentes, instables ou inexistantes. A Koupela au Burkina-Faso ou à Bouaké en Côte d’Ivoire, il n’est pas question de télécharger une distribution ou des applications de plusieurs gigaoctets. En revanche, il est possible d’envoyer un DVD ou une clé USB contenant l’ISO d’Emmabuntüs 2.
  • La dernière particularité est un fichier d’automatisation pour plusieurs modes d’installation, pour diminuer le travail dans les ateliers de reconditionnement.

8. Combien avez-vous d’utilisateurs ? Avez-vous des estimations démographiques ?

Ce qui compte pour nous ce n’est pas le nombre d’utilisateurs, mais quels utilisateurs nous avons !!! car notre travail étant orienté vers les associations, et combien nous avons vendu de machines sous Emmabuntüs au profit d’associations, ou de machines reconditionnées pour des associations.

Nous pouvons estimer que de l’ordre de 250 à 400 machines sous Emmabuntüs ont été vendues au profit d’Emmaüs dans les 6 communautés d’Emmaüs qui utilisent Emmabuntüs : Liberté à Ivry-sur-Seine, Villers-les-Pots, Montpellier, Catalogne à Perpignan-Polletres, Avenir à Neuilly-Plaisance et Neuilly-sur-Marne, et Cabriès.

Mais aussi Emmabuntüs est utilisée dans 6 espaces numériques, le premier à Koupela au Burkina Faso, puis le C@FISOL (L’Aigle, Orne), Sati 21 (Venarey-les-Laumes, Côte d’Or), CASA Poblano (Montreuil, Seine-Saint-Denis), Jerry Agor@ (Saint-Etienne, Loire)), Médiathèque d’Agneaux (Agneaux, Manche).

Et la grande fierté du collectif Emmabuntus, et d’être utilisé par le JerryClan de Côte d’Ivoire sur la quinzaine de Jerry SMS, qui a eux seuls incarnent les 3 buts poursuivis pas notre collectif :

  • aide aux associations humanitaires ;
  • réduire de la fracture numérique ;
  • prolonger la durée de vie du matériel informatique.

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Pour les statistiques sur le nombre et la répartition géographique des téléchargements qui ont été effectués à partir du nouveau compte Sourceforge (créé Septembre 2012 avec le 2 1.02 question Emmabuntüs), et les anciennes versions ici.

9. A l’heure actuelle vous être au alentour de la 150 ème position sur Distrowatch. Quels sont vos plans pour monter ?

Pour essayer d’augmenter notre score dans le but d’avoir une meilleure visibilité internationale pour toucher des associations en particulier en Afrique et en Amérique latine, nous allons essayer de travailler notre communication par le biais d’article dans les diverses langues incluses dans notre distribution. Nous avons depuis le début de l’année travaillé sur une page sur Wikipédia présentant Emmabuntüs, sur ces différentes traductions en Anglais, Espagnol, Portugais, et maintenant Italien.

Cela a payé car Igor a rejoint le projet Emmabuntüs, et il a mis en place un Blog dédié à Emmabuntüs Brasil en portugais, mais aussi nous avons le Blog Cartas de Linux qui nous soutient, ainsi que Miguel Parada qui a fait de très beaux articles sur Emmabuntüs & Jerry.

Si vos lecteurs veulent voir les différentes publications faite sur notre travail nous les encourageons de lire les différents articles sur Emmabuntüs dans leurs langues natales : http://reviews.emmabuntus.org

Sinon pour augmenter notre score il suffit simplement que tous vos lecteurs cliquent sur ce lien une fois par jour, et nous serons les premiers rapidement 😉

10. Quel système exploitation utilisez-vous pour votre ordinateur ?

Pour ma part j’utilise Ubuntu depuis environ 2009, après avoir essayé deux ou trois d’autres distributions Linux qui ne m’ont pas convenu, donc très peu de temps avant de créer Emmabuntüs. A l’heure actuelle j’utilise exactement une Ubuntu 10.04, machine sur laquelle je réalise toujours les Emmabuntüs, et pour mes ordinateurs portables, ils sont équipés des différentes versions d’Emmabuntüs, afin de faire des évaluations, de surveiller les passages de mise à jour, etc.

Par contre les membres de notre collectif pour leur usage personnel utilisent Ubuntu, Debian, Archlinux, mais aussi Windows et Mac OS X. Cette grande diversité permet des échanges plus constructifs dans les choix de développement pour Emmabuntüs.

11. Quelle est votre application favorite ?

Mon application favorite est sans conteste Cairo-Dock, car c’est vraiment cela qui est la pierre angulaire d’Emmabuntüs, et qui apporte cette indépendance à notre distribution par rapport aux versions de base que nous utilisons.

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Nous l’avons fait évoluer entre la première version Emmabuntüs 10.04 et la version 12.04, maintenant il est multilingue, se décline en 3 niveaux d’utilisation, et en fonction du format de l’écran est escamotable ou pas.

12. Lisez-vous Linux notes from DarkDuck ? Que devrions nous changer ou améliorer ?

Désolé mais je n’ai malheureusement pas le temps de lire DarkDuck, ni de suivre le reste de l’actualité du monde Libre. Par contre des membres du collectif font de la veille technologique et c’est eux qui n’informent sur d’éventuels logiciels intéressants pouvant être intégrés à Emmabuntüs.

13. En de dehors de l’informatique, avez-vous d’autres passions ou centres d’intérêts ? (peut-être la famille ?)

Oui, j’avais d’autres passions avant de commencer cette aventure d’Emmabuntüs, et maintenant je n’ai malheureusement plus le temps de me consacrer à ces activités peinture, jogging, escalade.

Emmabuntus, cela a été un tournant dans ma vie, et maintenant à cause de cela ou grâce à cela je suis passé dans des loisirs engagés pour essayer de changer notre société, car Emmabuntus c’est plus qu’une distribution Linux, c’est un collectif qui n’accepte pas la société de consommation que l’on veut nous imposer, et qui est basé sur une économique de croissance dont le modèle économique n’est pas viable à long terme pour notre planète, et donc pour nous 🙁

Et la question que nous voulons résoudre est : « Serions-nous dans une parenthèse de l’humanité qui en l’espace de quatre-cinq générations a consommé l’énergie accumulée pendant des dizaines de millions d’années » 🙁

Merci pour cette interview ! Je vous souhaite de réussir vous et votre projet !

Merci Dmitry pour cette interview, et d’avoir fait la première revue internationale sur Emmabuntüs il y a juste un an. Je souhaite bonne continuation au site du gentil petit Canard, ainsi que pour tes projets personnels, et je te dis à l’année prochaine 😉

Je tiens aussi à remercier Jean-Marie pour le relecture et les corrections de la version Française et David pour la relecture et la traduction de cette interview en Anglais, mais aussi tous les membres du collectif Emmabuntüs ainsi que ceux des JerryClan, qui œuvrent pour d’« Un jour, le monde sera libre ! ».

Notes

D’après l’ADEME de la fabrication à la mise au rebut, en passant par son utilisation, chaque étape de la vie de ces équipements informatiques peut être quantifiée en impact environnemental : la fabrication d’un ordinateur et son écran nécessite 1,8 tonnes de ressources (240 kg d’énergie fossile, 22 kg de produits chimiques, 1 500 litres d’eau).

Pour le groupe Ecoinfo, la priorité est d’agir. Chacun des membres du groupe le fait à son niveau (achat, maintenance, développement de réseaux) mais chacun d’entre nous peut aussi y contribuer par ses comportements. Leur conclusion : « s’il est déjà possible d’intervenir à toutes les étapes du cycle d’un matériel informatique, l’action la plus efficace que vous puissiez avoir pour limiter l’impact écologique de ces matériels, c’est de réduire les achats et augmenter leur durée de vie ! ».




Le logiciel libre a fait de moi l’homme que je suis

Le témoignage simple et percutant d’un développeur qui a visiblement fait le bon choix 😉

Beshef - CC by

L‘open source a fait de moi l’homme que je suis

Open Source made me the man I am

Matteo Spinelli – 6 octobre 2013 – Cubiq.org
(Traduction : Asta, Joseph, GregR, aKa, Cyb, Spanti Nicola, Lydie + anonymes)

De la conception de sites web pour les entreprises nationales au développement d’applications web haut de gamme pour les plus grands acteurs internationaux, tout cela grâce aux logiciels libres.

J’ai longtemps été un (triste) programmeur PHP en freelance ayant quelques compétences en front-end. Je travaillais pour de petites boîtes locales. Mon job le plus sympa en ce temps-là a été avec un distributeur de jeux vidéo, chez moi, en Italie. Le client était sympa, mais le boulot était chiant, et si frustrant parfois.

Je savais que je pouvais donner plus, mais je me sentais pris dans des sables mouvants.

La décision la plus importante que j’ai prise dans ma carrière a été de commencer à développer un logiciel libre et de bloguer sur ce sujet. J’ai commencé avec des trucs un peu stupides, comme un générateur d’URL épuré en PHP ou la suppression du délai sur l’évènement onClick et j’ai fini avec iScroll et l’ajout de widgets à l’écran d’accueil.

J’ai choisi pour eux la licence la plus libre que j’ai pu trouver (MIT) et les entreprises à travers le monde m’ont contacté pour me demander de la personnalisation et des nouvelles fonctionnalités. Mon tarif horaire était autour de 60 $ et j’ai dû l’augmenter sur une base à la journée parce que je ne pouvais pas suivre avec l’augmentation des demandes. Maintenant je suis toujours travailleur indépendant mais je travaille pour Microsoft et Google et mon tarif horaire est de 150 $ .

L‘open source a augmenté ma visibilité mais ce n’est pas qu’une question d’audience. L‘open source fait généralement de vous un meilleur développeur. Cela vous force à vous comparer vous-même avec d’autres développeurs et c’est le meilleur entrainement pour votre cerveau de codeur.

J’ai plus appris sur le JavaScript des gens postant des suggestions sur le rapporteur de bogues que sur n’importe quel guide, tutoriel ou livre que j’aie jamais lu.

Les logiciels libres m’ont fait également devenir un développeur plus modeste. Je sais comment patcher de petites portions de code et je suis moins sévère quand je remonte des bogues sur les dépôts des autres.

Mais c’est juste une partie de l’histoire.

Vous ne faites pas des logiciels libres juste pour la gloire (et l’argent). Peut-être qu’au début c’était mon intention, mais une fois que vous êtes impliqué vous comprenez que vous faites bien plus.

Beaucoup de gens utilisent votre code, vous aidez les startups dans leur projet en créant potentiellement de nouveaux emplois. Avec peut-être 48h de votre vie, vous pouvez possiblement aider des dizaines d’entreprises et leurs employés. Une personne a fait un plugin pour WordPress qui était essentiellement une couverture PHP pour mon Ajouter à l’écran d’accueil et il a levé 50k$ de fonds (peut-être plus maintenant). Vous pouvez penser que je suis jaloux de lui, mais je suis en fait heureux pour lui (et tous ses utilisateurs).

En outre, plus je développe du logiciel libre plus j’apprécie les autres logiciels libres et j’en deviens accro. Je comprends ce que signifie coder pour la sécurité et, plus particulièrement, l’importance de la vie privée de l’utilisateur (et la mienne).

J’étais un fervent utilisateur d’Apple parce que c’est joli et bien rangé et cela fonctionne simplement, mais peut-être qu’il y a des choses plus importantes qu’une interface de qualité et un dégradé parfait de pixels. J’utilise maintenant les produits Apple seulement pour tester et ma plateforme principale est Linux.

Je peux sans hésiter dire que l‘open source a fait de moi un homme meilleur et je vous encourage à publier votre code sous une licence libre, parce que si ça a marché avec moi, ça marchera probablement avec vous aussi.

Crédit photo : Beshef (Creative Commons By)




Pourquoi le logiciel libre est plus important que jamais, par Richard Stallman

Richard Stallman a publié un article important dans le magazine Wired à l’occasion des 30 ans du projet GNU.

Article que nous avons traduit collaborativement avec la relecture attentive du groupe de travail « trad-gnu » de l’April et l’accord final de Richard himself.

Pour l’anecdote Stallman commence désormais toujours ses emails ainsi : « À l’attention des agents de la NSA ou du FBI qui liraient ce courriel : veuillez envisager l’idée que la défense de la constitution des États-Unis contre tous ses ennemis, étrangers ou nationaux, nécessite que vous suiviez l’exemple de Snowden. » (cf ce tweet)

Medialab Prado - CC by-sa

Pourquoi le logiciel libre est plus important que jamais

Why Free Software Is More Important Now Than Ever Before

Richard Stallman – 28 septembre 2013 – Wired (Opinion)
(Traduction Framalang : Asta, ckiw, Penguin, Amine Brikci-N, lgodard, Feadurn, Thérèse, aKa, Paul, Scailyna, Armos, genma, Figue + anonymes)
Licence : CC By-Nd – Version de la traduction : 5 octobre 2013

Cela fait maintenant 30 ans que j’ai lancé la campagne pour la liberté en informatique, c’est-à-dire pour que le logiciel soit free ou « libre » (NdT : en français dans le texte — RMS utilise ce mot pour souligner le fait que l’on parle de liberté et non de prix). Certains programmes privateurs, tels que Photoshop, sont vraiment coûteux ; d’autres, tels que Flash Player, sont disponibles gratuitement — dans les deux cas, ils soumettent leurs utilisateurs au pouvoir de quelqu’un d’autre.

Beaucoup de choses ont changé depuis le début du mouvement du logiciel libre : la plupart des gens dans les pays développés possèdent maintenant des ordinateurs — parfois appelés « téléphones » — et utilisent internet avec. Si les logiciels non libres continuent de forcer les utilisateurs à abandonner à un tiers le pouvoir sur leur informatique, il existe à présent un autre moyen de perdre ce pouvoir : le « service se substituant au logiciel » ou SaaSS (Service as a Software Substitute), qui consiste à laisser le serveur d’un tiers prendre en charge vos tâches informatiques.

Tant les logiciels non libres que le SaaSS peuvent espionner l’utilisateur, enchaîner l’utilisateur et même attaquer l’utilisateur. Les logiciels malveillants sont monnaie courante dans les services et logiciels privateurs parce que les utilisateurs n’ont pas de contrôle sur ceux-ci. C’est là le coeur de la question : alors que logiciels non libres et SaaSS sont contrôlés par une entité externe (généralement une société privée ou un État), les logiciels libres sont contrôlés par les utilisateurs.

Pourquoi ce contrôle est-il important ? Parce que liberté signifie avoir le contrôle sur sa propre vie.

Si vous utilisez un programme pour mener à bien des tâches affectant votre vie, votre liberté dépend du contrôle que vous avez sur ce programme. Vous méritez d’avoir un contrôle sur les programmes que vous utilisez, d’autant plus quand vous les utilisez pour quelque chose d’important pour vous.

Votre contrôle sur le programme requiert quatre libertés essentielles. Si l’une d’elles fait défaut ou est inadaptée, le programme est privateur (ou « non libre ») :

(0) La liberté d’exécuter le programme, pour tous les usages.

(1) La liberté d’étudier le fonctionnement du programme, et de le modifier pour qu’il effectue vos tâches informatiques comme vous le souhaitez ; l’accès au code source est une condition nécessaire. Les programmes sont écrits par des programmeurs dans un language de programmation — comme de l’anglais combiné avec de l’algèbre — et sous cette forme le programme est le code source. Toute personne connaissant la programmation, et ayant le programme sous forme de code source, peut le lire, comprendre son fonctionnement, et aussi le modifier. Quand tout ce que vous avez est la forme exécutable, une série de nombres qui est optimisée pour fonctionner sur un ordinateur mais extrêmement difficile à comprendre pour un être humain, la compréhension et la modification du programme sous cette forme sont d’une difficulté redoutable.

(2) La liberté de redistribuer des copies, donc d’aider votre voisin. (Ce n’est pas une obligation ; c’est votre choix. Si le programme est libre, cela ne signifie pas que quelqu’un a l’obligation de vous en offrir une copie, ou que vous avez l’obligation de lui en offrir une copie. Distribuer un programme à des utilisateurs sans liberté, c’est les maltraiter ; cependant, choisir de ne pas distribuer le programme — en l’utilisant de manière privée — ce n’est maltraiter personne.)

(3) La liberté de distribuer aux autres des copies de vos versions modifiées; en faisant cela, vous donnez à toute la communauté une possibilité de profiter de vos changements ; l’accès au code source est une condition nécessaire.

Les deux premières libertés signifient que chaque utilisateur a un contrôle individuel sur le programme. Avec les deux autres libertés, n’importe quel groupe d’utilisateurs peuvent exercer ensemble un contrôle collectif sur le programme. Ce sont alors les utilisateurs qui contrôlent le programme.

Si les utilisateurs ne contrôlent pas le programme, le programme contrôle les utilisateurs.

Avec le logiciel privateur, il y a toujours une entité, le « propriétaire » du programme, qui en a le contrôle — et qui exerce, par ce biais, un pouvoir sur les utilisateurs. Un programme non libre est un joug, un instrument de pouvoir injuste. Dans des cas extrêmes (devenus aujourd’hui fréquents), les programmes privateurs sont conçus pour espionner les utilisateurs, leur imposer des restrictions, les censurer et abuser d’eux. Le système d’exploitation des iChoses d’Apple, par exemple, fait tout cela. Windows, le micrologiciel des téléphones mobiles et Google Chrome pour Windows comportent chacun une porte dérobée universelle qui permet à l’entreprise de modifier le programme à distance sans requérir de permission. Le Kindle d’Amazon a une porte dérobée qui peut effacer des livres.

Dans le but d’en finir avec l’injustice des programmes non libres, le mouvement du logiciel libre développe des logiciels libres qui donnent aux utilisateurs la possibilité de se libérer eux-mêmes. Nous avons commencé en 1984 par le développement du système d’exploitation libre GNU. Aujourd’hui, des millions d’ordinateurs tournent sous GNU, principalement sous la combinaison GNU/Linux.

Où se situe le SaaSS dans tout cela ? Le recours à un Service se substituant à un logiciel n’implique pas que les programmes exécutés sur le serveur soient non libres (même si c’est souvent le cas) . Mais l’utilisation d’un SaaSS ou celle d’un programme non libre produisent les mêmes injustices : deux voies différentes mènent à la même situation indésirable. Prenez l’exemple d’un service de traduction SaaSS : l’utilisateur envoie un texte à traduire, disons, de l’anglais vers l’espagnol, au serveur ; ce dernier traduit le texte et renvoie la traduction à l’utilisateur. La tâche de traduction est sous le contrôle de l’opérateur du serveur et non plus de l’utilisateur.

Si vous utilisez un SaaSS, l’opérateur du serveur contrôle votre informatique. Cela nécessite de confier toutes les données concernées à cet opérateur, qui sera à son tour obligé de les fournir à l’État. Qui ce serveur sert-il réellement ?

Quand vous utilisez des logiciels privateurs ou des SaaSS, avant tout vous vous faites du tort car vous donnez à autrui un pouvoir injuste sur vous. Il est de votre propre intérêt de vous y soustraire. Vous faites aussi du tort aux autres si vous faites la promesse de ne pas partager. C’est mal de tenir une telle promesse, et c’est un moindre mal de la rompre ; pour être vraiment honnête, vous ne devriez pas faire du tout cette promesse.

Il y a des cas où l’utilisation de logiciel non libre exerce une pression directe sur les autres pour qu’ils agissent de même. Skype en est un exemple évident : quand une personne utilise le logiciel client non libre Skype, cela nécessite qu’une autre personne utilise ce logiciel également — abandonnant ainsi ses libertés en même temps que les vôtres (les Hangouts de Google posent le même problème). Nous devons refuser d’utiliser ces programmes, même brièvement, même sur l’ordinateur de quelqu’un d’autre.

Un autre dommage causé par l’utilisation de programmes non libres ou de SaaSS est que cela récompense son coupable auteur et encourage le développement du programme ou « service » concerné, ce qui conduit à leur tour de nouvelles personnes à tomber sous la coupe de l’entreprise qui le développe.

Le dommage indirect est amplifié lorsque l’utilisateur est une institution publique ou une école. Les services publics existent pour les citoyens — et non pour eux-mêmes. Lorsqu’ils utilisent l’informatique, ils le font pour les citoyens. Ils ont le devoir de garder un contrôle total sur cette informatique au nom des citoyens. C’est pourquoi ils doivent utiliser uniquement des logiciels libres et rejeter les SaaSS.

La souveraineté des ressources informatiques d’un pays l’exige également. D’après Bloomberg, Microsoft montre les bogues de Windows à la NSA avant de les corriger. Nous ne savons pas si Apple procède pareillement, mais il subit la même pression du gouvernement américain que Microsoft. Pour un gouvernement, utiliser de tels logiciels met en danger la sécurité nationale.

Les écoles — et toutes les activités d’éducation — influencent le futur de la société par l’intermédiaire de leur enseignement. C’est pourquoi les écoles doivent enseigner exclusivement du logiciel libre, pour transmettre les valeurs démocratiques et la bonne habitude d’aider autrui (sans mentionner le fait que cela permet à une future génération de programmeurs de maîtriser leur art). Enseigner l’utilisation d’un programme non libre, c’est implanter la dépendance à l’égard de son propriétaire, en contradiction avec la mission sociale de l’école.

Pour les développeurs de logiciels privateurs, nous devrions punir les étudiants assez généreux pour partager leurs logiciels ou assez curieux pour chercher à les modifier. Ils élaborent même de la propagande contre le partage à l’usage des écoles. Chaque classe devrait au contraire suivre la règle suivante :

« Élèves et étudiants, cette classe est un endroit où nous partageons nos connaissances. Si vous apportez des logiciels, ne les gardez pas pour vous. Au contraire, vous devez en partager des copies avec le reste de la classe, de même que le code source du programme au cas où quelqu’un voudrait s’instruire. En conséquence, apporter des logiciels privateurs en classe n’est pas autorisé, sauf pour les exercices de rétroingénierie. »

En informatique, la coopération comprend la redistribution de copies identiques d’un programme aux autres utilisateurs. Elle comprend aussi la redistribution des versions modifiées. Le logiciel libre encourage ces formes de coopération quand le logiciel privateur les prohibe. Ce dernier interdit la redistribution de copies du logiciel et, en privant les utilisateurs du code source, il empêche ceux-ci d’apporter des modifications. Le SaaSS a les même effets : si vos tâches informatiques sont exécutées au travers du web, sur le serveur d’un tiers, au moyen d’un exemplaire du programme d’un tiers, vous ne pouvez ni voir ni toucher le logiciel qui fait le travail et vous ne pouvez, par conséquent, ni le redistribuer ni le modifier.

D’autres types d’œuvres sont exploitées pour accomplir des tâches pratiques ; parmi celles-ci, les recettes de cuisine, les matériels didactiques tels les manuels, les ouvrages de référence tels les dictionnaires et les encyclopédies, les polices de caractère pour l’affichage de texte formaté, les schémas électriques pour le matériel à faire soi-même, et les patrons pour fabriquer des objets utiles (et pas uniquement décoratifs) à l’aide d’une imprimante 3D. Il ne s’agit pas de logiciels et le mouvement du logiciel libre ne les couvre donc pas au sens strict. Mais le même raisonnement s’applique et conduit aux mêmes conclusions : ces œuvres devraient être distribuées avec les quatre libertés.

On me demande souvent de décrire les « avantages » du logiciel libre. Mais le mot « avantages » est trop faible quand il s’agit de liberté.

La vie sans liberté est une oppression, et cela s’applique à l’informatique comme à toute autre activité de nos vies quotidiennes.

Nous devons gagner le contrôle sur tous les logiciels que nous employons. Comment y arriver ? en refusant les SaaSS et les logiciels privateurs sur les ordinateurs que nous possédons ou utilisons au quotidien. En développant des logiciels libres (pour ceux d’entre nous qui sont programmeurs). En refusant de développer ou de promouvoir les logiciels privateurs ou les SaaSS. En partageant ces idées avec les autres. Rendons leur liberté à tous les utilisateurs d’ordinateurs.

Crédit photo : Medialab Prado (Creative Commons By-Sa)




Quand l’Inde montre l’exemple en éducation (et en France ?)

Le gouvernement indien a inauguré cet été une plateforme de ressources éducatives.

Nous en avons aussi en France, comme par exemple l’Académie en ligne. Sauf que, comme il a été dit dans ces mêmes colonnes à son lancement, cette dernière plateforme est totalement verrouillée par le choix de sa licence (lire les Conditions d’utilisation du site pour comprendre d’un seul coup d’oeil où se situe le problème).

En Inde, par contre, on a tout compris. On a fait le choix par défaut de la licence Creative Commons By-Sa et on demande explicitement des formats ouverts pour les documents déposés.

Longue vie au National Repository of Open Educational Resources et ses ressources éducatives vraiment libres. Quant à nous, on va continuer à pousser pour qu’il en aille de même un jour en France, sachant que l’espoir fait vivre et que la route est longue mais la voie est libre.

On pourra également lire sur le Framablog (en faisant le rêve que nos décideurs tombent dessus) :

NROER logo

L’Inde lance un dépôt national de ressources éducatives libres

India launches National Repository of Open Educational Resources

Jane Park – 14 août 2013 – Creative Commons Blog
(Traduction : lamessen, pol, ProgVal, Asta)

L’Inde a lancé un nouveau dépôt d’apprentissage destiné à accueillir les ressources éducatives libres (RÉL). Le ministère de l’Éducation et de l’alphabétisation, le ministère du Développement des ressources humaines, le gouvernement indien, l’Institut central des technologies de l’éducation et le Conseil national de la recherche et de la formation pour l’éducation (NCERT) se sont associés pour développer le Dépôt national des ressources éducatives libres (NROER). Pallam Raju, ministre indien du Développement des ressources humaines, a lancé ce dépôt mardi. Shashi Tharoor, ministre d’État indien en charge des ressources et du développement humain, a annoncé que la licence par défaut de toutes les ressources du dépôt serait la Creative Commons Attributions-Partage à l’identique (CC BY-SA).

Ce dépôt contient actuellement des vidéos, de l’audio, des médias interactifs, des images et des documents. Il vise à « rassembler toutes les ressources numériques et numérisables pour le système éducatif indien, pour toutes les classes, toutes les matières et toutes les langues ».

D’après l’annonce du ministre Sashi Tharoor,

Cette initiative est également une étape importante vers une éducation inclusive. Ouvrir l’accès à tous nécessite un débat sur la question de la propriété, du copyright, des licences et un équilibrage des objectifs avec les intérêts commerciaux légitimes. C’est particulièrement important pour les institutions publiques et les projets financés sur fonds publics. Je suis heureux que le NCERT ait pris l’initiative de déclarer que le NROER utiliserait la licence CC BY-SA… Cette décision du NCERT est en accord avec la déclaration de Paris sur les ressources éducatives libres de l’Unesco et permettra de garantir que les ressources seront librement accessibles à tous. Pour le dire dans les termes des Creative Commons — pour réutiliser, réviser, modifier et redistribuer.

Pour contribuer au dépôt, chacun devra garantir qu’il « accepte de placer ces ressources sous licence Creative Commons » (CC BY-SA) et « que les documents chargés sont encodés en utilisant des standards ouverts, non privatifs ».

Pour en savoir plus sur la manière de contribuer au projet avec vos ressources éducatives libres, visitez http://nroer.in/Contribute/.




Il libère ses logiciels et c’est la catastrophe !

Bryan Lunduke est développeur. En faisant passer ses logiciels de propriétaires à libres, il a fait une bien triste constatation.

Non seulement il ne gagne plus assez d’argent pour trouver le temps de continuer à les développer (et personne d’autres ne semble intéressé à le faire sauf lui) mais en plus les téléchargements ont drastiquement baissé, alors même qu’ils sont mis gratuitement à disposition.

Un billet un peu troll qui se demande quand même si on peut faire de ce cas particulier une généralité.

Retis - CC by

Regard attristé sur les chiffres de l’open source

Very sad looking Open Source charts

Bryan Lunduke – 27 août 2013 – Blog personnel
(Traduction : schiste, Genma, brihx, mokas01, @zessx, MFolschette, Asta, elfabixx, La goule, Beij, goofy, Penguin + anonymes)

Depuis un certain temps déjà, chaque ligne de code que j’écris est placée sous licence libre GPL (la plupart de ce que j’ai publié avant était sous licence propriétaire) parce que j’aime l’open source. Mais il y a un souci sur lequel je planche et bloque. Et j’ai besoin de votre avis. Je vous explique rapidement :

Lorsque mes logiciels étaient sous licences privatives, et leur développement financé à l’ancienne par la vente de copies, les mises à jour étaient plutôt fréquentes (en général plusieurs versions par mois). Les bénéfices retirés des ventes allaient directement dans le financement de temps de développement dédié. Ça fonctionnait assez bien. Pas 100 % parfait, mais le développement avançait à un bon rythme.

Maintenant que le logiciel est libre, on ne peut espérer plus de 200 $ par mois en dons. Je ne peux du coup raisonnablement passer que quelques heures par mois sur ce logiciel. Ce qui n’est même pas assez pour tester une version et en faire un package à publier (et certainement pas assez pour ajouter des fonctionnalités notables).

Donc, pour faire simple, ma production de code s’est tout bonnement arrêtée (par nécessité).

Mais j’ai choisi de laisser le logiciel libre dans l’espoir que d’autres personnes se plongent dedans et aident à faire avancer les choses en donnant de leur temps et de leur énergie.

Malheureusement, ça ne s’est pas produit. Une personne plutôt sympa a filé un coup de main en créant des packages pour plusieurs distributions Linux. Mais c’est tout. En fait, personne n’a exprimé le moindre intérêt à coder activement sur l’un de ces projets.

Et maintenant, les téléchargements ont également chuté. De manière significative. Regardons quelques graphiques sur l’évolution des statistiques.

MonthlyDownloads.jpg

Ce chiffre représente le nombre total de téléchargements pour tous mes logiciels (jeux, outils de développement, tout). Ce qu’il faut retenir :

  1. Quand le logiciel est propriétaire (et vendu comme shareware), les téléchargements sont bons.
  2. Quand le logiciel est open source (et disponible gratuitement), les téléchargements chutent à 1/30e de ce qu’ils étaient pour du logiciel propriétaire.
  3. Curieusement, les téléchargements des versions Linux sont les plus touchés (ils ont chuté à 1/50e de ce qu’ils étaient).

MonthlyRevenue.jpg

Le revenu mensuel a aussi pris un sacré coup. Voilà ce qu’on peut déduire de ces chiffres :

  1. Lorsque le logiciel était propriétaire (et un shareware), les ventes étaient suffisantes pour financer le développement à temps plein.
  2. Maintenant que le logiciel est open source, le financement (en grande partie par les dons) a chuté à, et je ne blague pas, à peine plus de 2 % des ventes moyennes par mois du logiciel propriétaire. 2. Pour. Cent.

Aujourd’hui, je peux clairement comprendre la raison de la chute des revenus. Le logiciel est disponible gratuitement – supprimant ainsi l’incitation à dépenser de l’argent. Ce que je ne comprends pas, c’est la chute significative des téléchargements. Peut-être y a-t-il un aspect psychologique en jeu.

Donc la question est, que puis-je faire ?

Si je laisse le logiciel en open source, comme c’est le cas actuellement, il va complètement stagner.

Je suppose que je pourrais essayer encore une autre méthode de financement open source… mais cela me semble un peu être une cause perdue, pour être honnête. J’aime l’open source. Vraiment. Je pourrais y passer toute la nuit. Mais il n’y a pas vraiment beaucoup d’histoires où de petits développeurs indépendants arrivent à vivre de l’open source sans avoir à intégrer une entreprise beaucoup plus grande (qui est souvent financée par la vente de logiciels propriétaires ou par des contrats de maintenance/support utilisateurs – ce qui n’a aucun sens pour le logiciel que je développe).

Je pourrais toujours revenir à une licence propriétaire pour les futures versions du logiciel. Cela permettrait au moins d’avoir les fonds nécessaires pour financer du développement concret – ce financement pourrait être utilisé pour payer des gens pour travailler dessus (à temps plein ou à temps partiel). Mais dans ce cas… ce ne serait pas de l’open source.

C’est un problème difficile. Un problème pour lequel je ne trouve pas de solution évidente.

L’avantage pour moi est qu’aujourd’hui je ne dépends pas des ventes du logiciel (ou des dons) pour vivre (mes revenus proviennent de l’écriture). Ce qui m’enlève une bonne part de stress. Néanmoins, je détesterais voir ce logiciel qui, quand il était propriétaire, était utilisé par des dizaines de milliers de personnes, disparaître. J’ai fait ce logiciel parce que personnellement, j’en avais besoin. Et ça me dépiterait de le voir mourir.

Alors… que faire ? Que feriez-vous pour être sûr que ce genre de logiciel indépendant continue d’être régulièrement mis à jour? Si vous avez des idées, je suis tout ouïe.

Crédit photo : Retis (Creative Commons By)




Tux Paint, interview du créateur du célèbre logiciel libre de dessin pour enfants

C’est la rentrée !

L’occasion de mettre en avant Tux Paint, l’un des meilleurs logiciels (évidemment libre) de dessin à destination des petits, mais aussi des grands 😉

HeyGabe - CC by-sa

Tux Paint en appelle à l’aide

Desperate times call for Tux Paint

Jen Wike – 25 juin 2013 – OpenSource.com
(Traduction : Antoine, Shanx, Asta)

Bill Kendrick a codé Tux Paint en seulement quelques jours. Un ami lui avait demandé pourquoi il n’existait pas un programme de dessin pour enfants libre et gratuit, comme GIMP. Bill fit un grand sourire, parce que beaucoup d’adultes ont des difficultés à apprendre à utiliser GIMP, alors que les enfants en ont beaucoup moins. Il répondit : « Je peux probablement créer quelque chose. »

C’était il y a 11 ans (la première bêta a été publiée en juin 2002). Aujourd’hui, Tux Paint est largement utilisé à travers le monde, dans les maisons, à des goûters d’enfants, et plus évidemment dans les écoles en général et celles plus défavorisées en particulier.

Une nouvelle étude publiée cette année et menée par le Conseil des Relations Étrangères rapporte que les États-Unis ont perdus 10 places ces 30 dernières années dans le classement du taux d’élèves diplômés sortant des collèges et universités. « Le véritable fléau du système d’éducation étasunien, et sa plus grande faiblesse compétitive, est le profond écart entre les groupes socio-culturels. Les étudiants riches réussissent mieux, et l’influence de la situation sociale parentale est plus forte aux États-Unis que nulle part ailleurs dans le monde développé. » affirme ainsi Rebecca Strauss, directrice associée des publications CFR’S Renewing America.

Tux Paint est un programme simple avec de profondes implications car il est libre, gratuit et facile à utiliser. Récemment, un enseignant d’une école située dans une région défavorisée a utilisé le programme de crowdfunding EdBacker pour mettre sur pied un cours estival de remise à niveau en utilisant Tux Paint. Brenda Muench rappelle qu’avant Tux Paint, elle n’a jamais rencontré, au cours de ses 16 années d’enseignement à l’école élémentaire d’Iroquois West, de logiciels de dessin véritablement adaptés pour les enfants .

Les fonds publics devenant plus rares, Bill a remarqué que les systèmes scolaires sont désormais plus souples et favorables que par le passé lorsqu’il s’agit d’utiliser ce genre de logiciel. Et les éducateurs du monde entier discutent les uns avec les autres des ressources qu’ils utilisent se passant volontiers les bons tuyaux.

Entretien avec Bill Kendrick

Comment avez-vous créé Tux Paint ?

J’ai opté pour la bibliothèque Simple DirectMedia Layer (libSDL), que j’avais déjà utilisée pour la conception de mes jeux au cours des 2-3 années précédentes (avant cela, j’avais connu des difficultés avec Xlib), et basée sur une combinaison de limitations et capacités qui a bien fonctionné : une seule fenêtre (qui garde la simplicité) et la possibilité d’utiliser le plein écran (ce qui contribue à empêcher les enfants de faire autre chose et des bêtises sur le bureau).

Un autre avantage était que Tux Paint pouvait être facilement porté vers Windows, Mac OS X et d’autres plateformes, et c’est exactement ce qui est arrivé. Je n’imaginais pas que je pouvais avoir un impact pour ces plateformes, étant donné qu’il existait déjà un grand nombre de programmes pour enfants, notamment le populaire et ancien (depuis les premiers jours de Mac) Kid Pix. Ce que je n’avais pas vu tout de suite c’est que, comme Tux Paint est libre, il est devenu une alternative peu chère (comprendre : gratuite) aux applications commerciales pour toutes les plateformes, et non pas que pour GNU/Linux. Cela s’est avéré très pratique pour les écoles, dont nous connaissons tous les problèmes actuels de financement.

Pourquoi l’interface est-elle facile d’utilisation pour les enfants de la maternelle jusqu’au primaire ?

Il y a une variété de choses que j’ai appliquées pour garder une interface simple d’utilisation :

  • de gros boutons qui ne disparaissent pas, même si vous ne les utilisez pas ;
  • toutes les actions ont une icône, ainsi qu’un texte descriptif ;
  • Tux le Pengouin fournit quelques indices, infos et états en bas de la fenêtre ;
  • des effets sonores, qui ne sont pas juste amusants, mais qui fournissent un feedback ;
  • un seul type de pop-up de dialogue, avec seulement deux options (ex. « Oui, imprimer mon dessin », « Non, retour »)
  • pas de défilement.

La raison pour laquelle Tux Paint ne vous demande pas : « Quelle taille pour votre dessin ? » est que lorsque les enfants s’asseyent avec un morceau de papier pour dessiner, ils ne commencent pas par le couper à la bonne taille. La plupart du temps, ils se contentent de commencer, et si vous leur demandez de décider quelle taille de papier ils souhaitent avant de commencer à dessiner, ils vont se fâcher et vous dire que vous ne les laissez pas dessiner !

Des effets sonores amusants et une mascotte dessinée sont importants et motivants pour les enfants, mais est-ce que les adultes utilisent Tux Paint ?

Oui, j’ai eu certaines suggestions comme quoi on l’utiliserait davantage s’il y avait un moyen de désactiver le manchot Tux. Je comprends à quel point les logiciels pour enfants peuvent parfois être énervants, c’est pourquoi j’ai créé une option « couper le son » dès le premier jour.

Quelles belles histoires à nous raconter ?

Un hôpital pour enfants a mis en place une sorte de borne d’arcade utilisant Tux Paint avec des contrôleurs spéciaux (plutôt qu’une souris).

Des élèves de CP ont utilisé la vidéo-conférence et des screencasts pour apprendre aux enfants de maternelle d’une autre école comment utiliser Tux Paint. Ces mêmes écoles utilisent aussi Tux Paint pour créer ensemble des images à partir des histoires sur lesquelles les enfants travaillent. Ils font ensuite des vidéos en intégrant ces histoires.

J’ai mis en ligne les textes de présentation de ces histoires et d’autres travaux pour encourager d’autres éducateurs à essayer et utiliser Tux Paint : « Oui, ce truc fou, libre et gratuit est génial pour les écoles ! » Bien sûr, une décennie plus tard, ce n’est plus la même bataille que d’expliquer ce qu’est le logiciel libre et quels sont ses avantages, ce qui est excellent.

Est-ce que les éducateurs utilisent Tux Paint en dehors des arts plastiques ?

Oui, tout à fait, et c’est exactement ce que j’imaginais.

Je n’ai pas créé Tux Paint pour qu’il soit uniquement utilisé en cours de dessin. Je l’ai créé pour être un outil, comme une feuille de papier et un crayon. Certaines écoles réalisent donc des vidéos à partir de contes racontés. D’autres l’utilisent en mathématiques pour apprendre à compter.

Ironie du sort, ces jours-ci, après avoir vu des choses comme M. Crayon sauve Doodleburg sur le Leapster Explorer de mon fils (qui, en passant, tourne sous Linux !), je commence à penser que Tux Paint nécessite des fonctionnalités supplémentaires pour aider à enseigner les concepts de l’art et de la couleur.

Comment les enseignants, l’administration scolaire, les parents et les contributeurs intéressés peuvent s’investir dans Tux Paint ?

Par exemple, envoyez un message à Bill pour contribuer à Tux Paint sur Android.

Il y a une liste de diffusion pour les utilisateurs (parents, enseignants, etc.) et une page Facebook, mais il y a assez peu d’activité en général car Tux Paint est vraiment facile d’utilisation et tourne sur un large panel de plateformes.

Nous avons besoin d’aide :

  • chasse aux bogues ;
  • test d’assurance qualité ;
  • traductions ;
  • œuvres d’art ;
  • idées d’amélioration ;
  • documentation ;
  • cursus scolaire ;
  • faire passer le mot ;
  • portage vers d’autres plateformes.

Crédit photo : HeyGabe (Creative Commons By-Sa)