MyBytes ou comment Microsoft éduque nos enfants à respecter (sa définition de) la propriété intellectuelle

Dans la série j’aimerais bien arrêter mes billets sur Microsoft mais…

D’aucuns me reprochent de me focaliser sur Microsoft en ce moment. Mais comment voulez-vous rester de marbre face à la nouvelle initiative « éducative » de Microsoft autour de la « propriété intellectuelle » ?!

Microsoft vient en effet de lancer une vaste campagne de sensibilisation en direction des enfants sur la notion de « propriété intellectuelle ». Ils s’en expliquent ici. Et un site dédié a été créé pour l’occasion en direction des djeunz jeunes : MyBytes.com.

Copie d'écran - MyBytes.com

Le pitch, du moins m’a-t-il semblé, c’est que les enfants sont dans la confusion (avec témoignages à l’appui) et qu’on va les aider à mieux comprendre tout ça (avec témoignages d’artistes à l’appui) si possible avec le concours des professeurs (avec documents pédagogiques à l’appui).

Moi qui croyais que Microsoft n’était qu’une société éditrice de logiciels. Pas du tout, ce sont aussi des experts juridiques qui connaissent les bonnes pratiques à transmettre à nos enfants notamment, comme on le voit ici, dans le domaine musical.

On va mettre nos juristes (et nos traducteurs) sur le coup et on vous en dira plus très bientôt.

Ce qui est certain c’est qu’il y a effectivement un problème autour de l’expression « propriété intellectuelle » et pas uniquement dans la tête de nos enfants. C’est une expression à géométrie variable pour le moins confuse dont on peut justement choisir l’angle qui nous arrange. Le problème principal venant du mot propriété que, consciemment ou non, on assimile encore trop souvent à la propriété des objets physiques[1].

Pour en savoir plus, je vous invite vivement à parcourir les ressources suivantes :

Mais ce qui est d’ores et déjà tout aussi certain c’est que l’on a affaire au même processus d’omission (et donc de propagande ?) que mon billet sur Projetice où je m’étonnais de l’absence de mention du logiciel libre.

Ici vous aurez beau chercher vous ne trouverez d’abord pas trace de la notion de Fair use mais surtout vous ne trouverez pas trace de l’existence des licences Creative Commons[2] qui ont justement été créées pour permettre aux internautes de diffuser et partager leurs créations en toute légalité. C’est bien simple la Culture libre n’existe pas !

Pour être honnête, on propose aussi aux enfants un module de création et de partage de sonneries de téléphone portable (les jeunes adorent personnaliser leur sonnerie !) qui nécessite une inscription (sans email mais impossible à faire avec mon Firefox). Ce module n’est pas inintéressant puisqu’il est demandé aux enfants de choisir les droits qu’ils accorderont à leurs sonneries. Par exemple je peux choisir Rights : Unrestricted ou Rights : For sale, can be used in other mixes. Mais là encore il eut été beaucoup plus simple et pédagogique de proposer directement une licence Creative Commons.

Il n’empêche que la vigilance est de mise face à cette nouvelle offensive non exempte d’arrière-pensées…

Notes

[1] « Les éditeurs et les juristes aiment assimiler le copyright à la « propriété intellectuelle », un terme qui inclut aussi les brevets, les marques déposées et d’autres zones plus obscures de la loi. Ces lois ont si peu de choses en commun, et diffèrent tant, qu’il serait mal-avisé de faire des généralisations. Il est beaucoup mieux de parler spécifiquement de « copyright », de « brevets » ou de « marques déposées ». Le terme « propriété intellectuelle » contient un postulat caché : que la façon naturelle de penser à ces divers problèmes est basée sur une analogie avec les objets physiques, et la façon dont nous les envisageons comme étant notre propriété. Quand il s’agit de copie, cette analogie néglige la différence cruciale entre des objets matériels et l’information : l’information peut être copiée et partagée presque sans effort, alors que ce n’est pas possible avec les objets matériels. » Richard Stallman sur gnu.org.

[2] « Les licences Creative Commons ont été créées en partant du principe que la propriété intellectuelle était fondamentalement différente de la propriété physique, et du constat selon lequel les lois actuelles sur le copyright étaient un frein à la diffusion de la culture. Leur but est de fournir un outil juridique qui garantit à la fois la protection des droits de l’auteur d’une œuvre artistique et la libre circulation du contenu culturel de cette œuvre, ceci afin de permettre aux auteurs de contribuer à un patrimoine d’œuvres accessibles dans le « domaine public » (notion prise au sens large). » Source : Wikipédia.