À propos du portail ministériel sur les associations

Victoriapeckham - CC byDans la série « le courrier des lecteurs/trices », Isabelle nous écrit pour nous signaler ce qu’elle considère être un problème : la visibilité du Libre sur le site gouvernemental dédié aux associations. « Vous serez à même de réaliser une étude plus poussée que la mienne », nous dit-elle.

Merci pour le crédit et la confiance que vous nous accordez mais nous manquons de temps actuellement (en fait nous manquons toujours de temps) alors plutôt qu’attendre une hypothétique future enquête digne de ce nom, nous avons choisi la voie de la facilité en reproduisant l’intégralité de son message à même ce billet, en espérant que les commentaires viennent enrichir et préciser le propos[1].

J’en profite au passage pour signaler trois ressources intéressantes sur le sujet. Le groupe de travail LibreAssociation de l’April. Le logiciel libre Galette (pour Gestionnaire d’Adhérents en Ligne Extrêmement Tarabiscoté mais Tellement Efficace) qui comme son nom l’indique vous permet de gérer en ligne vos adhérents. Et le livre Réussir un site web d’association… avec des outils libres dans la collection Accès Libre d’Eyrolles (pour l’anecdote ce livre s’appelait avant Réussir un site web d’association… avec des outils gratuits).

Mail d’Isabelle

Bonjour,

Membre de l’association Musique Libre (Dogmazic) et du collectif Gironde Logiciel Libre, je lis avec plaisir et intérêt un bon nombre de vos articles comme par exemple ceux qui décortiquent certains sites à but éducatif.
J’aurais un sujet de ce type à vous soumettre et je pense que vous serez à même de réaliser une étude plus poussée que la mienne. Voilà, lors de mes pérégrinations webesques concernant la gestion d’une association, je suis fatalement tombée sur ce site institutionnel associations.gouv.fr.

Lors de ma (rapide) navigation j’ai pu constater la chose suivante : il semble que le site est en Spip, mais cela n’apparaît clairement quasiment nulle part, en tout cas pas sur l’accueil… il faut cliquer tout en bas sur le petit lien administration.

Il y a beaucoup de rubriques qui parlent de droits d’auteurs et beaucoup de références à la SACEM… rien au sujet des licences ouvertes et libre diffusion… je n’en ai vu aucune, même en faisant une recherche.

Donc pour un site très prompt à rappeler les obligations des associations en matière de droits d’auteur et surtout pécuniaire… je trouve proprement scandaleux que :

  1. Ce site gouvernemental ne respecte pas ces mêmes droits en ne citant pas le logiciel utilisé pour la réalisation du site.
  2. Ce site ne fasse aucune allusion sur la possibilité pour les associations d’utiliser du contenu libre. Il n’existe qu’un seul article datant de 2004 pour promouvoir le logiciel libre où Framasoft est cité (je n’ai pas vu cet article tout de suite : il a fallu que je fasse une recherche sur le mot libre, je crois, il faut dire que pour le trouver on doit faire le chemin suivant pas évident : Accueil > Guide d’informations pratiques > Associations et Internet > Accéder à Internet >). Et puis il y a surtout la rubrique L’association et les droits d’auteur, extrêmement partiale puisque les trois articles qu’elle contient (La propriété littéraire et artistique : le principe, Les sociétés d’auteur, percepteurs des droits, La SACEM) ne font aucune mention de la possibilité d’utiliser des contenus sous licences ouvertes.
  3. Je ne puisse faire toutes ses remarques directement aux responsables de ce site puisque la page contact me donne une page vide.

En espérant que ce sujet retienne votre attention,
Cordialement.

Notes

[1] Crédit photo : Victoriapeckham (Creative Commons By)




VoD : l’interopérabilité selon TF1

J - CC by-saCe billet d’humeur aurait pu s’intituler « TF1 Vision : parcours du combattant », ou « TF1 Vision / Microsoft, descente aux enfers d’un candide linuxien », et pour développer je vais vous conter les déboires que m’a valu mon addiction aux séries TV.

Plantons le décor. Je n’ai pas la télé et je ne regarde que des DVDs, notamment des séries. Parmi ces séries, il y a LOST, et récemment, j’ai découvert que la saison 5 était disponible sur TF1 Vision, le site de vidéo à la demande (ou VoD) de TF1. Enthousiaste, je me voyais déjà passer quelques soirées à me repaître de vidéos. C’était sans compter sur les efforts conjugués de TF1 et de Microsoft[1] pour me mettre des bâtons dans les roues…

L’autre soir, donc, je m’installe derrière mon PC dans l’idée de télécharger deux épisodes de LOST. Le site de TF1 Vision passe bien sous Ubuntu Hardy, malgré une architecture truffée d’éléments en Flash, et l’inscription au service se déroule sans accroc. Mais lorsqu’on arrive sur la page de téléchargement, ça se gâte.

Un assistant de vérification de compatibilité m’annonce que mon système d’exploitation n’est pas pris en charge :

  1. Système d’exloitation : Votre système d’exploitation est incompatible avec notre service. Nos contenus sont accessibles sous Windows XP uniquement.
  2. Navigateur Internet
  3. Lecteur vidéo
  4. Activation des cookies

Copie d'écran - TF1 Vision

Qu’ils n’aient pas pensé à GNU/Linux ne m’étonne guère, mais qu’en est-il de Mac, qui est quand même en train de tailler de sérieuses croupières à Microsoft ? Le service commercial de TF1 devrait se tenir au courant de l’actualité informatique : Apple avait atteint début 2008 les 4% de part de marché en France et bénéficie depuis d’une progression fulgurante, GNU/Linux reste marginal mais connaît un succès croissant, et arrive en bonne place sur les mini-PC. Étrange de se couper ainsi de dizaines de milliers de clients potentiels…

Ayant gardé une partition sous XP au cas où l’on me confierait une traduction nécessitant un programme n’existant que pour Windows, je reboote et retourne sur le site de TF1 Vision. De retour sur la page de téléchargement, je clique sur le teaser de la saison 5 de LOST, pour un essai gratuit (pas fou, non plus…).

Ce qui donne alors :

  1. Système d’exloitation : OK
  2. Navigateur Internet : Votre navigateur Internet est incompatible avec notre service. Nos contenus sont accessibles avec Internet Exporer 6.0 ou plus.
  3. Lecteur vidéo
  4. Activation des cookies

Copie d'écran - TF1 Vision

Firefox n’est pas pris en charge. Apparemment, Safari, Chrome et Opera non plus. Pour TF1, c’est IE ou rien. Là encore, les concepteurs du site et les types du service commercial sont en retard de quelques années. Ignorent-ils que Firefox représente 25% de parts de marché en France, que Safari et Opera représentent malgré tout un nombre non négligeable d’utilisateurs ?

Désirant pousser le vice jusqu’au bout, je ferme Firefox et ouvre Internet Explorer 7. Encore une fois, ça coince :

  1. Système d’exloitation : OK
  2. Navigateur Internet : OK
  3. Lecteur vidéo : La version de votre lecteur vidéo est incompatible avec notre service. Nos contenus sont accessibles avec Windows Media 10 ou plus.
  4. Activation des cookies

Copie d'écran - TF1 Vision

N’en ayant pas l’utilité, je n’avais pas installé WMP version 11. Bien entendu, nulle mention d’un autre lecteur, même propriétaire. Il est pourtant loin le temps où Windows Media Player régnait sur le marché des lecteurs multimédia. Quicktime, ne serait que pour le streaming, ou VLC et Miro,comptent un bon paquet d’utilisateurs.

En tant qu’utilisateur de Linux, et même en tant qu’ancien utilisateur de Windows XP, je suis révolté qu’on ne me laisse aucun choix pour les programmes à utiliser. Comble de malchance, un bug de Windows Media Player m’a empêché de voir le fichier téléchargé à grand peine.

Avouez que l’on fait mieux comme expérience utilisateur. Certes, je n’attendais pas de TF1 qu’elle publie ses vidéos au format Ogg et sous licence Creative Commons, mais en arriver à un tel point de mépris de l’interopérabilité est attérant. Pour une entreprise commerciale, se couper d’une part grandissante des consommateurs est par ailleurs une stratégie pour le moins singulière. Mais TF1 n’est hélas pas la seule, de nombreux sites ou plateformes de téléchargement ne respectant pas les standards et l’interopérabilité, Apple et iTunes en tête.

Comment faire lorsqu’on est utilisateur de Linux, que l’on utilise Firefox ou Epiphany pour l’Internet et Totem ou VLC pour le multimédia ? Lorsqu’on est utilisateur de Mac et qu’on utilise Safari et Quicktime, sans parler de logiciels libres ? Et même lorsqu’on est sous Windows mais qu’on préfère surfer avec Firefox ou Opera, et lire ses fichiers vidéo avec VLC ou Miro ?

A-t-on alors d’autre choix que l’abstinence ou le téléchargement illégal lorsqu’on est utilisateur de Linux ? En ce qui me concerne, j’ai une furieuse envie d’installer eMule ou d’aller traîner sur The Pirate Bay… Les entreprises privées qui sont les premières à diaboliser le téléchargement illégal devraient peut-être d’abord faire sauter les verrous (au lieu d’en rajouter, on a vu la pirouette qu’a dû exécuter Apple face à l’ineptie et à l’impopularité des DRM) qui empêchent bon nombre d’entre nous d’accéder à leurs services.

Notes

[1] Crédit photo : J (Creative Commons By-Sa)




Allongement des droits de 50 à 95 ans : bon pour les artistes, les Majors, l’Europe ?

Gisela Giardino - CC by-sa« La Commission européenne, par la voix du libéral-rigide Charlie McGreevy, veut allonger la durée des droits des artistes-interprètes à 95 ans contre 50 ans aujourd’hui. Champagne chez Charles Aznavour, Johnny Hallyday et autres chanteurs dont la carrière a débuté à un époque où la télévision était encore un objet de luxe. Leurs premiers tubes, encore vendus aujourd’hui, ne tomberont pas dans le domaine public, selon l’expression dépréciative commune. Ils ne pourront circuler sur des CD pressés par tout un chacun ou être téléchargés sur le Net sans qu’ils puissent réclamer leur dîme. Sur le papier, ce n’est que justice : pourquoi Charles Aznavour devrait-il ne plus toucher un centime de la vente de ses premiers enregistrements ?[1] Comme bien souvent en matière de propriété intellectuelle, les bons sentiments masquent de mauvaises arrière-pensées. »

C’est ainsi que début un éclairant (et édifiant) article de Florent Latrive Qui veut la peau du domaine public pour faire plaisir à Aznavour ? paru il y a près d’un an sur le site des Écrans. Deux autres articles ont suivi sur le même site permettant d’affiner encore la question et son décryptage : Pétition : Contre l’allongement des droits des artistes-interprètes et Musique : 95 ans de droits pour les interprètes.

Quant à nous, dans la mesure où il n’est pas encore trop tard, nous avons décidé de relayer cet appel à mobilisation de l’Electronic Frontier Foundation en traduisant non seulement le récent communiqué ci-dessous mais en sous-titrant également une vidéo expliquant bien de quoi il en retourne et pourquoi il est important de manifester notre réprobation.

Faites passer et n’oubliez pas de visiter le site Sound Copyright pour signer la pétition !

Prolongement des droits d’auteur dans l’UE : aidez les eurodéputés à entendre un autre son de cloche

EU Copyright Extension: Help MEPs Hear the Other Side

Danny O’Brien – 20 janvier 2009 – Electronic Frontier Foundation
(Traduction et sous-titrage Framalang : Olivier, Don Rico, Xavier et Yostral)

À la lecture de la documentation officielle de la Commission européenne sur la directive prévoyant l’allongement du copyright, on pourrait croire que porter la durée des droits des artistes à 95 ans au lieu de 50 en Europe est une décision généreuse sans aucun effet néfaste. C’est sans doute l’image que souhaite en donner le membre de la commission Charlie McCreevy, lui qui incite le Parlement à mettre au vote cette directive au mois de mars de cette année.

Mais les législateurs de Bruxelles n’entendent qu’un seul son de cloche de la part de ce commissaire. C’est pourquoi, dans le cadre de la campagne contre l’allongement de la durée des droits d’auteur, une réunion va être organisée à Bruxelles où vous et vos eurodéputés êtes cordialement conviés.

Les experts en droits d’auteur européens les plus réputés affirment eux-mêmes que la Commission induit en erreur les Conseil et Parlement européens. Nul n’a encore expliqué aux eurodéputés en quoi cette mesure coûterait des milliards d’euros aux consommateurs européens, alors qu’elle ne rapporterait à la plupart des artistes concernés guère plus de trente euros par an, le plus gros des bénéfices revenant aux plus grosses maisons de disques, les majors. Ils ne se sont pas non plus inquiété des dégâts qu’elle infligerait à un domaine public solide et à l’accès démocratique à l’héritage culturel des pays membres.

En tant qu’acteur de la campagne Sound Copyright, l’Open Rights Group organise une réunion publique le 27 janvier à Bruxelles pour fournir aux eurodéputés des informations objectives sur l’allongement de la durée des droits d’auteur. Écrivez à votre eurodéputé pour lui demander d’y assister, ou mieux encore, faites le déplacement et venez donner vous-même votre avis sur la question.

Si vous désirez connaître davantage de détails sur les dangers de l’allongement de la durée des droits d’auteur, rendez-vous sur le site Sound Copyright, ou regardez le guide vidéo ci-après. Envoyez ensuite ces liens à vos amis européens, et écrivez sans plus tarder à votre eurodéputé.

—> La vidéo au format webm

Notes

[1] Crédit photo : Gisela Giardino (Creative Commons By-Sa)




L’ex-chanteur des Tears for Fears explique son choix des Creative Commons

Curt Smith Official - CC byIl y a ceux qui se morfondent à constater la crise actuelle de l’industrie musicale et qui croient naïvement que la loi Hadopi[1] va résoudre leurs problèmes. Et puis il y a les autres, comme le chanteur Curt Smith, qui nous explique calmement et sereinement en quoi les licences Creative Commons sont un choix contemporain simple et pertinent, pour ne pas dire « naturel », quand on souhaite autoriser la diffusion de sa musique sous certaines condition (ici la non exploitation commerciale).

Curt Smith (à ne pas confondre avec Robert Smith) ne vous dira peut-être rien, mais certains vieux (comme moi) se souviennent de son groupe Tears for Fears dont les quelques chansons suivantes bercèrent la jeunesse new wave des années quatre-vingts : Mad Word, Change, Shout ou encore Sowing the seeds of love.

Depuis Curt Smith[2] poursuit une carrière solo et a donc placé son dernier album Halfway, pleased sous licence Creative Commons By-Nc-Sa. Il s’en explique dans cette interview vidéo donnée le mois de novembre dernier sur le site de Dave Harris RetroRewind. La clarté de ses propos associée au climat tendu que fait régner la « menace Hadopi » nous ont donné envie de faire acte de résistance et de subversion en traduisant et sous-titrant[3] ci-dessous le début de l’entretien.

—> La vidéo au format webm

Notes

[1] La loi Hadopi, rebaptisée « Création et Internet », devrait arriver à l’Assemblée nationale fin février. Nous vous suggérons deux sites pour suivre son hacktualité et mieux en décrypter ses tenants et aboutissants : La Quadrature du Net et Numerama.

[2] Crédit Photo : Curt Smith Official (Creative Commons By)

[3] Remerciements Framalang : Olivier pour la transcription, Don Rico pour la traduction, Xavier pour le sous-titrage et Yostral pour le montage final (sacré travail d’équipe !)




Logiciel libre et éducation : quand le Royaume-Uni montre le chemin…

Kifo - CC by-saOn s’active de l’autre côté de la Manche. Preuve en est cette fort bienvenue nouvelle initiative de l’agence britannique Becta, à savoir l’ouverture récente du très prometteur site Open Source Schools dédié, comme son nom l’indique, aux logiciels libres à l’école.

Ce site est l’une des conséquences du rapport Becta Microsoft Vista et Microsoft Office 2007, rédigé il y a un an, que nous avions traduit cet été. Ses conclusions étaient limpides et il en allait selon nous de la responsabilité des autres pays si ce n’est d’adopter la même posture tout du moins de se poser les mêmes questions en évaluant sérieusement la pertinence des produits Microsoft mais surtout des alternatives libres[1].

On pouvait notamment lire ceci en page 34 § 6.11 :

Au cours des douze prochains mois Becta prendra un certain nombre de mesures pour encourager un choix plus efficace dans le cadre d’un usage éducatif. Ce travail inclura la publication d’un programme de travail dont le but sera de :

– fournir plus d’informations sur le site de Becta sur ce qu’est un logiciel libre et quels sont ses avantages pour l’éducation en Grande-Bretagne;

– compléter la base de recherche actuelle qui recense les usages des logiciels libres dans le secteur éducatif et identifier des déploiements modèles de logiciels libres. Cela engloberait également l’esquisse d’un tableau national des usages des logiciels libres dans les écoles et les universités;ourceschools-montre-la-voie-a-suivre

– travailler avec la communauté du logiciel libre pour établir un catalogue en ligne des logiciels libres appropriés pour l’usage dans les écoles de Grande-Bretagne. Parmi les informations disponibles on retrouvera les moyens d’obtenir une assistance dédiée à ces logiciels et comment contribuer à leur développement futur. Ce catalogue sera publié sous une licence Creative Commons afin que les fournisseurs puissent le modifier pour leur propre usage;

– donner des indications aux sociétés de services en logiciels libres pour qu’elles puissent efficacement participer dans de nouvelles structures compétitives et pour qu’elles puissent proposer des logiciels libres via la structure de fournisseurs existante de Becta.

Le site Open Source Schools est donc clairement l’une des concrétisations de ce rapport. Nous vous proposons ci-dessous la traduction du communiqué de presse mis en ligne pour l’occasion sur le site du Becta :

Un service de support pour les établissements scolaires qui utilisent des logiciels libres

Support for schools on using open source software

Becta – 13 janvier 2009
(Traduction Framalang : Don Rico)

Les établissements scolaires peuvent à présent trouver des conseils sur un nouveau site communautaire leur permettant de mieux savoir en quoi l’utilisation de logiciels libres pourrait leur être avantageuse.

Le site Open Source Schools propose des ressources pour montrer en quoi les logiciels libres peuvent profiter à l’enseignement et à l’apprentissage, favoriser l’implication des élèves et des parents, faciliter la gestion des informations et des ressources, et simplifier l’administration de l’établissement.

On y accorde une place centrale à une série d’études de cas sur la mise en place et le développement des logiciels libres dans le milieu scolaire. On y trouve aussi des forums où proviseurs, enseignants, techniciens informatiques et d’autres encore peuvent partager leur expérience de ce modèle alternatif d’acquisition, de distribution et de développement de logiciel. Le site met en exergue des blogs qui traitent des logiciels libres dans l’éducation, des actualités et des liens vers des sites de développeurs de logiciels Open Source.

Ce site s’inscrit dans un projet soutenu par Becta, qui vise à faire connaître les logiciels libres.

Promenons-nous quelques instant sur Open Source Schools

On remarquera tout d’abord que le site est sous Drupal (avec inscription autorisant l’OpenID) mais on remarquera surtout que la licence par défaut est la Creative Commons By-Sa. Droit d’usage, de copie, de distribution, de modification, droit d’exploitation commerciale… autrement dit une licence qui offre à ses utilisateurs les mêmes droits que les licences des logiciels libres (et qui est donc approved for free cultural works).

Il y a un forum, un annuaire sélectif de logiciels libres (où l’on recense la crème de la crème sans oublier la spécificité éducative), et des études de cas (qui sont autant de témoignages d’expériences réussies susceptibles d’influencer positivement les collègues),

Une attention toute particulière a été donnée à l’entrée About OSS (à propos du logiciel libre). Outre une page d’accueil conséquente nous expliquant ce qu’est un logiciel libre, on y trouve également une dizaine d’autres articles abordant des sujets comme la pertinence du logiciel libre en milieu scolaire, le logiciel libre et la gratuité, la différence entre logiciel libre et web 2.0, une information sur les licences, etc.

Parmi ces articles Becta negotiations with Microsoft explique calmement et sereinement entre autres pourquoi il y a des problèmes avec la politique de licences et d’interopérabilité des produits Microsoft (rappelant au passage l’existence du fameux rapport), pourquoi le Becta s’en est plaint auprès de l’Office of Fair Trading, et pourquoi le Becta pousse à ce que Microsoft adopte réellement le format ODF.

On notera enfin que l’on ne craint pas (dans la colonne de droite) de référencer des fils d’actualités de sites ou blogs non institutionnels qui évoquent l’actualité du logiciel libre et sa culture.

Quant à la page About Us (qui sommes-nous ?), il nous a semblé qu’elle méritait elle aussi sa petite traduction :

Notre initiative Open Source Schools Community a pour but de sensibiliser les établissements scolaires aux logiciels libres (LL), de les aider à les adopter, à les utiliser et à les développer. De nombreux établissements ont déjà compris en quoi les LL étaient bénéfiques à leur stratégie TIC. Ce projet s’attachera donc à faire partager leur expérience (appuyée par des exemples de mise en pratique des LL réussie dans d’autres secteurs, aux personnels de l’éducation dans leur ensemble) parmi lesquels enseignants, décisionnaires et spécialistes des technologies de l’information.

Open Source Schools est un projet qui doit durer deux ans et qui bénéficie du soutien de Becta. L’objectif étant qu’au terme de cette période la communauté comptera suffisamment de membres actifs pour qu’elle se suffise à elle-même.

Notre site se veut un site d’information objectif visant à montrer quels avantages les LL peuvent apporter à l’apprentissage, à l’enseignement et aux infrastructures scolaires. Notre projet consiste à développer et à soutenir une communauté de pratiques impliquant ceux qui utilisent déjà les LL, accueillant et apportant de l’aide aux nouveaux membres qui souhaitent découvrir le potentiel des LL.

Notre but est de créer un site Internet centré sur l’éducation et dont le contenu sera dicté par les besoins de la communauté – on y répondra aux questions, fournira des conseils sur mesure, ouvrira les perspectives, encouragera les contributions et les débats au sein de la communauté, et donnera les moyens à ceux qui le souhaitent de prendre des décisions en ayant toutes les cartes en main et de devenir des utilisateurs confiants des LL qui répondront à leurs besoins. Pour commencer, il s’agit de développer des ressources avec l’aide de défenseurs chevronnés des LL, en les encourageant à partager leur expérience avec les nouveaux membres désireux de s’initier aux logiciels libres.

Nous sommes là pour compléter des initiatives déjà existantes de la communauté du logiciel libre au sein des établissements scolaires et ailleurs. Nous mettons à disposition un annuaire de logiciels libres et fournisseurs de services dans le domaine des LL, ainsi que des cas d’études de mises en pratique réussies fournis par la communauté, en mettant l’accent sur les bénéfices concrets qu’apportent les LL aux établissements.

Bien qu’il existe déjà une grande quantité d’informations disponibles, le cœur de ce projet consiste à développer une communauté de pratique en ligne rassemblant ceux qui souhaitent découvrir les solutions qu’offrent les logiciels libres pour améliorer l’apprentissage et l’enseignement dans les écoles, et en faire profiter la vie des établissements.

Impressionnant non ? Surtout si l’on envisage ce site tout jeune comme une sorte de version 1.0 sujet à de futures améliorations mais surtout de futures collaborations. Le souci d’accueillir les nouveaux entrants est bien là, tout comme celui de le rendre autonome via une communauté à construire.

Du coup la participation des acteurs éducatifs (enseignants, administrateurs, techniciens) est clairement encouragée. D’abord en permettant à quiconque de commenter et de poster dans les forums sans inscription (et avec modération a posteriori) mais également en invitant les visiteurs à s’inscrire pour rejoindre l’équipe constituée, s’impliquer et bonifier eux-mêmes le site de leur propre contenu

En un mot comme en cent : c’est bien pensé tout ça, chapeau bas le Becta !

Sauf que inévitablement on en vient à se poser la question de la situation française. Comparaison n’est pas raison, mais y aurait-il chez nous quelque chose qui ait l’ambition de ressembler de près ou de loin à ce que nous proposent ici nos amis anglais ?

La réponse à cette question fera l’objet d’un prochain billet où, contrairement à l’habitude, nous irons au delà de simple constat alarmant pour être source de concrètes propositions…

Notes

[1] Crédit photo : Kifo (Creative Commons By-Sa)




Un exemple de cinéma libre (au sens des logiciels libres)

Zara - CC by-saQu’est-ce qu’un « film libre » ? Est-ce qu’une œuvre cinématographique qui interdit la modification et la commercialisation (typiquement sous licence Creative Commons By-Nd) peut encore se considérer comme tel alors même qu’elle assure pourtant le « minimum syndical » de la libre circulation ? On pourrait alors penser qu’il suffit de lever ces clauses (typiquement avec une licence Creative Commons By-Sa) par avoir à faire avec certitude à du « cinéma libre ». Mais là encore ça peut coincer car quid d’une telle œuvre qui ne fournirait pas ses « sources » (rushes en haute définition, musiques, textes…) ? Le logiciel libre n’a pas le monopole de la liberté mais si l’on se réfère uniquement à la définition donnée par les fameuses quatre libertés du logiciel libre (dont deux nécessitent le code source) alors non nous ne sommes toujours pas en présence d’un « film libre ».

C’est pourquoi, au delà de ses qualités artistiques intrinsèques[1], nous avons trouvé intéressant d’évoquer le film anglophone « en construction » Valkaama en traduisant le billet dédié du blog des Creative Commons (et en ajoutant la bande-annonce ci-dessous). L’occasion de rappeler qu’en France nous avons Ralamax Prod qui tente de faire quelque chose de similaire avec leur projet de film sous licence Art Libre Varsovie-Express.

Les sources du film libre Valkaama disponibles en téléchargement

Files seeded for Valkaama, "open source movie"

Michelle Thorne – 16 janvier 2009 – Creative Commons Blog
(Traduction Framalang : Don Rico)

Les fichiers sources de Valkaama, tout nouveau « film Open Source » collaboratif filmé à Cracovie, en Pologne, ont été mis en ligne. Tim Baumann, son réalisateur, a choisi de de procéder à toute la post-production de ce long métrage de façon ouverte, avec l’aide de bénévoles, qu’ils soient amateurs ou professionnels.

Nous publions sur cette page toutes nos sources audio et vidéo afin de vous donner la possibilité de les utiliser comme matière de base. Si vous souhaitez participer à ce projet, en nous aidant à terminer le film, en créant des montages, en proposant une nouvelle bande-annonce, ou si vous voulez publier quoi que ce soit en rapport avec Valkaama, veuillez nous contacter.

Valkaama est une comédie dramatique qui se déroule en Suède et en Finlande, tournée par les élèves d’une école de théâtre et des amateurs venus de Cracovie et ses environs. On y suit les pérégrinations de deux jeunes gens très différents l’un de l’autre, que le destin pousse sur la route de Valkaama. Leurs chemins finissent par se croiser, mais ils ne se rendent pas compte combien leur voyage est déjà déterminé par leurs passés respectifs.

Les films open-source et à contenu libre restent rares. Valkaama est un des premiers films à être distribué gratuitement, et à garantir en outre l’accès libre à tous les matériaux sources utilisés et créés au cours de sa production. Ce projet est placé sous des licences Creative Commons By-Sa 3.0 afin d’assurer une utilisation et réutilisation très souple du matériau produit. À presque chaque texte, image et vidéo, ainsi que qu’à tous les médias téléchargeables, est associé une licence. Les licences sont même parfois incluses dans les fichiers médias eux-mêmes.

Remixez bien !

Notes

[1] Crédit photo : Zara (Creative Commons By)




iPhone 3G : tout ce qui brille n’est pas or

Inottawa - CC byLa communauté du Libre perd parait-il souvent son sens critique lorsqu’il s’agit de promouvoir et défendre le logiciel libre, mais ce n’est rien à côté des adorateurs de l’église Apple dont la lumière est tellement forte qu’elle réussit même à aveugler des geeks venus de l’Open Source.

Tel un lendemain de fête où nous aurions la gueule de bois, cette traduction issue du site de la Free Software Foundation vient fort à propos nous rappeler que nous ne vivons pas forcément dans le meilleur des mondes possibles…[1]

5 raisons d’éviter l’iPhone 3G

5 reasons to avoid iPhone 3G

Johns – 10 juillet 2008 – FSF.org
(Traduction Framalang :Olivier, Goofy et Don Rico)

Les 5 bonnes raisons d’éviter l’iPhone 3G :

  • L’iPhone ferme complètement la porte aux logiciels libres. Les développeurs doivent payer une taxe à Apple qui se retrouve seul à décider de ce qui peut être installé ou non sur les téléphones des utilisateurs.
  • L’iPhone approuve et soutient les Mesures Techniques de Privation (MTP, ou DRM en anglais pour Digital Rights Management).
  • L’iPhone révèle votre position et permet à d’autres de vous suivre à la trace à votre insu.
  • L’iPhone est incapable de lire les formats qui ne sont pas bardés de brevets ou de MTP comme Ogg Vorbis et Theora.
  • L’iPhone n’est pas le seul choix possible. De meilleures alternatives existent sur le marché et elles respectent votre liberté, ne vous espionnent pas, savent lire les formats libres et sont compatibles avec les logiciels libres, comme le FreeRunner par exemple.

« Voici le téléphone qui a changé les téléphones à tout jamais », disait M. Jobs.

On ne saurait être plus d’accord ! Non content d’avoir fait entrer les logiciels propriétaires et les Mesures Techniques de Privation (MTP) dans vos foyers, ce vautour de Jobs s’est maintenant mis en tête de glisser les MTP et les logiciels propriétaires jusque dans vos poches.

Ce n’est pas pour rien que la lumière des projecteurs a été braquée sur l’aspect visuel de l’iPhone. Ce n’est pas pour rien qu’il est si important aux yeux d’Apple d’avoir créé un produit si bien conçu qu’on n’en voit pas les coutures… au point que vous ne pouvez même pas changer la batterie de votre propre téléphone.

Apple, grâce à son savoir-faire en marketing et en design, crée l’illusion que le simple fait d’acheter un produit Apple fait de vous un membre d’une communauté alternative. Mais la technologie qu’ils emploient est délibérément choisie pour maintenir les gens isolés dans leur petite cellule numérique dont Apple est le seul et unique gardien. Si votre fond de commerce repose sur ceux qui paient pour avoir le privilège d’être enfermés, il vaut mieux que la prison ressemble à une prison dorée et que les barreaux ne soient pas trop visibles.

Une seconde, enfermés ? Prison ? C’est un téléphone. Ne va-t-on pas un peu trop loin ?

Malheureusement, non. Ceux qui vont trop loin, ce sont Jobs et Apple. L’iPhone représente une attaque contre des valeurs ancestrales et fondamentales, le droit que nous avons de contrôler ce que nous possédons plutôt que d’être contrôlés par ce que nous possédons, le droit de communiquer et de partager librement avec d’autres, et ce dans le respect de notre vie privée.

L’iPhone sait passer des appels, mais ce n’est pas qu’un simple téléphone. C’est un ordinateur à tout faire, un ordinateur plus puissant que ceux qui trônaient sur nos bureaux il y a tout juste quelques années. C’est également un appareil de repérage, et comme tous les téléphones propriétaires disposant de la fonction GPS il peut transmettre votre position sans que vous n’en sachiez rien.

En novembre 2007, 3,3 milliards d’êtres humains dans le monde possédaient déjà un téléphone mobile et ce nombre continue de croître rapidement. Pour nombre d’entre eux, le téléphone devient leur ordinateur principal. Ils en ont un besoin vital pour communiquer et le gardent sur eux en permanence. De toutes les technologies qui pourraient se retourner contre leurs usagers, celle-ci se révèle une des plus inquiétantes.

Mais il y a une différence majeure entre l’iPhone et les anciens ordinateurs à tout faire : l’iPhone est défectueux, il a été créé ainsi. En théorie il est capable de faire fonctionner toutes sortes de programmes, mais les logiciels et les fichiers qu’il peut lire sont limités par les MTP qu’Apple a nommées FairPlay – ironique n’est-ce pas ?

FoulPlay

(NdT : nous avons gardé le titre original du paragraphe pour qu’il fasse sens avec le « FairPlay » d’Apple, on pourrait le traduire par « Antijeu »)

Les MTP implantées par Apple surveillent votre activité et vous dictent ce que vous avez le droit de faire ou pas. Vous n’êtes pas en droit par exemple d’installer un logiciel qu’Apple n’aurait pas approuvé. Cette restriction vous empêche d’installer des logiciels libres, des logiciels que vous êtes libre de partager, copier et modifier comme le souhaitent leurs auteurs.

Les logiciels libres nous ont apporté des choses passionnantes pour l’ordinateur de bureau, des choses telles que le système d’exploitation GNU/Linux, le navigateur Web Firefox, la suite bureautique OpenOffice.org, le serveur Web Apache qui se cache derrière la majorité des sites Web sur Internet. Pourquoi voudrions-nous acheter un ordinateur qui outrepasse son rôle pour faire obstruction à la liberté de ces créateurs ?

Mais ce système n’est pas la seule action déloyale d’Apple. Les iPhones ne peuvent plus être activés qu’en magasin, bien qu’aux États-Unis la loi stipule que les consommateurs ont le droit de déverrouiller leur téléphone et d’utiliser l’opérateur de leur choix.

Montrer du doigt (et, non, nous ne parlons pas de l’écran tactile)

Jobs voudrait nous faire croire que toutes ces restrictions sont nécessaires. Il prend un air compréhensif et compatissant lorsque nous nous en plaignons et dit qu’elles ne lui plaisent pas non plus. D’après lui, Apple doit les implanter pour notre bien, pour la sécurité de tout le réseau téléphonique et pour nous permettre l’accès à toute la musique et à tous les films que nous voulons.

Mais cela fait maintenant un an et demi que Jobs, sous la pression du public, a pris clairement position contre les MTP et en faveur de la liberté. Et c’est un peu à reculons qu’il a autorisé une poignée de fichiers à être libérés de leurs MTP sur iTunes, mais il n’a par contre pas touché au fait qu’il faille les acheter sur la plateforme propriétaire et infectée de MTP qu’est iTunes. Depuis, il n’a absolument rien fait pour transformer ses paroles en actes concrets. Il continue d’imposer des MTP à travers ses entreprises cinématographiques. Et à présent il les porte aussi sur les logiciels pour téléphones mobiles. On se rend bien compte désormais que ce discours n’était qu’un stratagème pour amadouer l’opposition.

En vérité, des milliers de créateurs de logiciels, de musique et de contenu multimédia désirent partager leur travail plus librement. C’est ironique – avec un i comme inadmissible – car le système d’exploitation d’Apple, OS X, est en grande partie construit sur les bases posées par des personnes qui ont eu la volonté de mettre leur travail librement à la disposition de tout le monde pour qu’il puisse être copié, modifié et amélioré. Quand on laisse aux gens la liberté de bricoler, créer et innover, il en ressort des créations passionnantes et utiles. Certains ont déjà écrit leurs propres logiciels libres pour les plateformes mobiles. Le réseau téléphonique ne s’est toujours pas effondré.

Nous savons que Jobs craint la concurrence, ce pourquoi il fabrique toutes ces menaces et ces excuses. C’est une décision purement économique, et c’est le genre d’économie que nous ne pouvons encourager. Jobs souhaite que l’iPhone vous restreigne car il veut votre argent, et accroître son contrôle est un moyen d’y parvenir. Il veut tirer de vous le maximum et vous en rendre le moins possible tout en maintenant ses coûts au minimum. Il tente d’empêcher les gens d’écrire des logiciels pour l’iPhone pour conserver le contrôle sur les possibilités de l’iPhone. De tels logiciels pourraient corriger les défauts volontaires de l’iPhone, lire des formats alternatifs, montrer aux utilisateurs ce qui est vraiment envoyé par leur téléphone à ceux qui le surveillent ou même empêcher la transmission de ces informations.

À nous de prendre notre futur en main

Heureusement, il nous sera bientôt possible de jouir d’un ordinateur mobile qui sait aussi téléphoner sans avoir à vendre notre liberté à Apple, Microsoft, Blackberry ou qui que ce soit d’autre. Le Neo FreeRunner est un téléphone libre prometteur, développé en coopération avec la communauté mondiale qui est aussi derrière le système d’exploitation GNU/Linux. Ce sont des créateurs qui veulent partager leur travail et qui veulent que vous – comme tous les autres – puissiez faire ce qu’ils ont fait : vous appuyer sur le travail de vos prédécesseurs pour créer de nouveaux appareils qui vous donnent le contrôle.

Jobs s’est lui aussi appuyé sur le travail de ses prédécesseurs, à la différence que lui a fait le choix de couper les ponts pour éviter que d’autres personnes fassent de même. Ses clients se rebiffent : d’après les chiffres d’Apple, en octobre 2007, plus de 250000 iPhones sur les 1,4 millions vendus ont été débloqués par leurs utilisateurs. Jobs pense que cette tendance doit être stoppée plutôt qu’encouragée.

Nous avons le choix. Le FreeRunner n’est pas encore aussi abouti que l’iPhone et il n’est pas aussi beau. Mais en termes de potentiel, le fait qu’il soit soutenu par une communauté mondiale et non par une compagnie avide, malhonnête et obscure lui donne des années-lumière d’avance. Nous pouvons abandonner notre liberté et notre argent pour quelque chose d’attirant en apparence ou bien dépenser un peu plus d’argent, conserver notre liberté et montrer notre soutien à un meilleur modèle économique. Si nous voulons ramener la notion d’éthique dans l’économie, nous devons encourager de telles initiatives. Nous nous construirons un meilleur futur en enrichissant les entreprises qui nous respectent plutôt que celles qui s’en prennent à notre liberté.

Notes

[1] Crédit photo : Inottawa (Creative Commons By)




L’informatique doit-elle rester un simple outil à l’école ?

Laihiu - CC byIl y a un réel débat actuellement qui traverse l’Éducation Nationale autour de la « culture informatique » à transmettre à nos enfants. Pour les uns, on donne une culture à travers l’utilisation des outils (savoir se servir de la messagerie, du traitement de texte…) et c’est ce qui est proposé actuellement, notamment avec le B2i. Pour les autres cela ne suffit pas et il faut un enseignement en tant que tel, comme il y a un cours de français ou de mathématiques. J’en suis,(même si après il convient de voir avec précision ce que l’on met dedans).

Jean-Pierre Archambault, que le monde du libre éducatif français connait bien, fait clairement partie lui aussi de la deuxième catégorie comme en témoignent les deux articles que nous avons choisi de reproduire ci-dessous[1].

Rappelons que Xavier Darcos a dans l’intervalle finalement reporté sa réforme du lycée. Le module informatique dont il est question dans ces deux articles se trouve donc lui aussi suspendu aux futures décisions.

L’acquisition par les lycéens des fondements de la science informatique…

URL d’origine : Médialog (décembre 2008)

Le Ministre de l’Éducation nationale, Xavier Darcos, a annoncé le 21 octobre dernier, lors d’un point d’étape sur la réforme du lycée, qu’un module « Informatique et société numérique » sera proposé en classe de seconde à la rentrée 2009. Nous nous félicitons de cette initiative qui correspond à un besoin profond de la société du XXIème siècle dans laquelle l’ordinateur, l’informatique et le numérique sont omniprésents.

L’informatique irrigue la vie quotidienne de tout un chacun. Elle modifie progressivement, et de manière irréversible, notre manière de poser et de résoudre les questions dans quasiment toutes les sciences expérimentales ou théoriques qui ne peuvent se concevoir aujourd’hui sans ordinateurs et réseaux. Juristes, architectes, écrivains, musiciens, stylistes, photographes, médecins, pour ne citer qu’eux, sont tout aussi concernés.

L’informatique s’invite également au Parlement. Ainsi, on s’en souvient, en 2006, la transposition de la directive européenne sur les Droits d’auteur et les droits voisins dans la société de l’information (DADVSI), suscitait des débats complexes dans lesquels exercice de la citoyenneté rimait avec technicité et culture scientifique. S’il fut abondamment question de copie privée, de propriété intellectuelle, ce fut sur fond d’interopérabilité, de DRM (Digital rights management), de code source… La question est posée des représentations mentales, des connaissances incontournables qui permettent d’être un citoyen à part entière.

Par ailleurs, il y a de plus en plus d’informatique dans la société, mais les entreprises ont du mal à recruter les informaticiens qualifiés dont elles ont besoin, et cela vaut pour l’ensemble des pays développés. Le Syntec, la chambre syndicale des sociétés de service en informatique et des éditeurs de logiciels, se plaint du manque d’attractivité chez les jeunes pour les métiers de l’informatique.

Il y a donc pour le système éducatif, au nom de ses missions traditionnelles, un enjeu fort de culture générale scientifique et technique qui passe par une discipline scolaire en tant que telle, en complémentarité avec l’informatique outil pédagogique, de plus en plus présente dans les autres disciplines.

Répondant à une commande du Recteur Jean-Paul de Gaudemar, qui pilote la mission sur la réforme du lycée, le groupe « Informatique et TIC » de l’ASTI (Fédération des Associations françaises des Sciences et Technologies de l’Information) et l’EPI (Enseignement public et informatique) ont élaboré, pour ce module « Informatique et société numérique », une proposition de programme qui se veut contribution constructive. Elle comprend de l’algorithmique et de la programmation, la représentation des informations, l’architecture des ordinateurs et des réseaux, et vise également à ce que les élèves aient une idée plus globale de ce qu’est l’informatique.

Un chantier institutionnel majeur s’ouvre qui vise l’acquisition par les lycéens des fondements de la science informatique au service de leur compréhension et de leur action dans la société numérique : une ardente obligation !

Maurice Nivat
membre correspondant de l’Académie des Sciences
Jean-Pierre Archambault
président de l’EPI

Culture informatique et culture numérique

URL d’origine : EPI (décembre 2008)


L’année 2008 se termine qui a vu l’EPI prendre de nombreuses et diverses initiatives en faveur d’un enseignement disciplinaire de l’informatique au lycée. Nous pouvons donc exprimer notre satisfaction de la création à la rentrée 2009 d’un module « informatique et société numérique » en classe de seconde. Cette décision, annoncée le 21 octobre dernier par le Ministre de l’Éducation nationale, Xavier Darcos, correspond aux exigences de la société dans laquelle nous vivons. Elle s’inscrit dans une vision globale de l’informatique éducative. L’enjeu est clair, conforme aux missions traditionnelles de l’École : former l’homme, le travailleur et le citoyen de la société numérique.

Sur le plan économique, le défi est majeur. Lors de la table ronde organisée par notre association à l’occasion du salon Educatice 2008, Gérard Berry a souligné la différence essentielle qui existe entre la « consommation » et la « création » d’informatique. Il a rappelé que, dans le monde, plus de 30 % de la R&D était consacré à l’informatique (la France est en deçà). Il a posé la question de savoir si notre pays se destinait à utiliser des produits conçus et réalisés par d’autres. Dans cette même table ronde, Gilles Dowek a rappelé que les sciences physiques étaient devenues une matière scolaire car elles sous-tendaient les réalisations de la société industrielle (mécanique, électricité…). Or le monde moderne « se numérise » à grands pas. Ce qui a valu, et vaut toujours pour la physique, vaut aujourd’hui pour l’informatique (et ses fondamentaux : algorithmique, programmation, théorie de l’information, architecture des matériels et réseaux). Lors du récent Forum Mondial du libre, Roberto Di Cosmo indiquait qu’« écrire un programme » et « bien écrire un programme » étaient deux choses fort différentes ! Or l’on sait que le lycée est à la fois un moment de la vie et un lieu où naissent bien des vocations…

Il est bien connu que nous avons toujours considéré qu’un enseignement de l’informatique en tant que tel était indispensable et complémentaire de l’utilisation de l’informatique dans les autres disciplines. L’informatique est objet d’enseignement et outil pédagogique, mais aussi facteur d’évolution des autres disciplines, dans leur « essence », leurs objets et leurs méthodes, comme dans les enseignements techniques et professionnels ou dans les sciences expérimentales avec la simulation. L’informatique est aussi bien sûr outil de travail personnel et collectif de la communauté éducative dans son ensemble, par exemple avec les ENT. Ces différents statuts loin de s’opposer se renforcent mutuellement.

La culture informatique, scientifique et technique, est une composante nécessaire de la culture numérique.

Le citoyen éclairé participe aux débats de société sur le nucléaire ou les OGM. Pour cela il dispose d’un appareillage conceptuel que les enseignements des sciences de la vie et de la terre et des sciences physiques lui ont donné. Dans la société numérique, il doit pouvoir intervenir pleinement dans des problématiques comme les « droits d’auteurs et droits voisins dans la société de l’information » ou droits et libertés. Ce sont des domaines compliqués (interopérabilité, DRM, code source, adresse IP…), inaccessibles si l’on ne s’est pas approprié le noyau de connaissances stables et transmissibles qui sous-tendent la société numérique, si l’on ne s’en ait pas fabriqué une représentation mentale opérationnelle. Cela vaut également pour les usages des objets du quotidien qui intègrent de plus en plus des ordinateurs et de l’information numérique.

Répétons-le, en matière de formation solide et durable, la simple utilisation « spontanée » d’outils ne suffit pas. Il ne faut pas faire un sort particulier à l’informatique. Maîtriser sa langue maternelle, acquérir la culture mathématique nécessaire sont des processus longs où les élèves apprennent des notions que l’humanité a mis des siècles à élaborer. Les notions de lettre, mot ou nombre sont des abstractions difficiles pour un jeune enfant. Et pourtant… La culture scolaire au lycée est aussi faite de probabilités, de fonctions… et d’algorithmique, programmation, information, réseaux. Et, bien entendu, faut-il le répéter, la pédagogie impose de s’appuyer sur l’environnement des élèves, leurs pratiques du numérique, pour mieux les dépasser.

L’on entend parfois dire que, l’informatique ayant beaucoup changé en vingt ans, des concepts enseignés il y a vingt ans n’auraient plus cours aujourd’hui. Bizarre. Le monde bouge plus vite que les fondamentaux de la connaissance scolaire. C’est la nécessaire loi du genre. Le théorème de Pythagore est vieux de 25 siècles, ce qui n’empêche pas les collégiens d’encore l’étudier de nos jours ! Socrate et Platon n’ont pas été rendus caducs par Descartes et Kant. Molière est toujours très actuel car universel et « éternel ». La programmation est partie intégrante de l’informatique, moyen irremplaçable pour comprendre l’intelligence de la science informatique et outil pertinent pour les autres disciplines. Si elle s’enrichit en permanence, pour autant, du point de vue de la culture scolaire en classe de seconde, elle n’a pas vieilli.

L’EPI a été auditionnée par le groupe d’experts ministériel pour l’élaboration du module « Informatique et société numérique » pour la classe de seconde. La rencontre a donné lieu à des échanges riches et approfondis. L’EPI, association d’enseignants, se propose d’« accompagner », à sa manière et avec sa spécificité, la mise en œuvre du module de seconde. Avec l’objectif qu’il soit une « belle » réussite pérenne.

En attendant, bonnes fêtes de fin d’année à toutes et à tous.

Jean-Pierre Archambault
Président de l’EPI

Notes

[1] Crédit photo : Laihiu (Creative Commons By)