Framasoft fights everyday back

The Day We Fight Back

Avec La Quadrature, Mozilla et tant d’autres organisations, nous nous associons à l’opération de riposte The Day We Fight Back[1], journée de mobilisation contre la surveillance de masse, également journée hommage à Aaron Swartz[2] et date anniversaire du succès remporté contre SOPA.

Nous n’avons pas prévu d’actions d’éclat particulières aujourd’hui dans la mesure où nous estimons, comme l’April en campagne actuellement, que nous y participons au quotidien, par la défense et la promotion du Libre en général et du logiciel libre en particulier.

Nous agissons pour re-décentraliser le Web[3] en offrant nos libres services en ligne que chacun peut installer sur son propre serveur ou utiliser librement sur notre portail. Ils sont regroupées sous le projet global « Framacloud » : Framapad, Framadate, Framindmap, Framanews, le petit dernier Framabag, etc.
Comme annoncé, nous avons aussi récemment entrepris notre « libération de Google », en commençant par le mail.
Brique après brique, construisons des alternatives à GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon), ces géants du Net parfaitement transparents pour la NSA.

Tous ensemble, faisons en sorte que notre optimiste slogan se concrétise chaque jour davantage : La route est longue mais la voie est libre.

Le jour de la riposte - Simon Gee Giraudot - CC by-sa




Pourquoi les jeux vidéos devraient entrer dans le domaine public plus tôt

Une traduction initialement publiée sur Romaine Lubrique, le projet soutenu par Framasoft dédié au domaine public.

Nous nous sommes permis d’en modifier le titre original pour plus de clarté.

Pourquoi les jeux devraient entrer dans le domaine public

Why Games Should Enter The Public Domain

John Walker – 3 février 2014 – Rock Paper Shotgun
(Traduction : Lamessen, Penguin, Laurent, RemyG, Isammoc, Asta, Diin, Gnujeremie, Scailyna, Goofy, Mecrof, KoS, sinma + anonymes)

Il y a quelques jours, j’ai provoqué sans le vouloir une polémique en m’exprimant sur les ventes de l’opération GOG Time Machine (NdT, GOG est un site spécialisé dans les vieux jeux vidéos, Good Old Games). J’ai évoqué à ce sujet le plaisir de sauver ainsi d’anciens jeux de l’oubli et mon souhait de les voir rejoindre le domaine public. Cela a entraîné une discussion enflammée dans les commentaires, et a poussé un développeur renommé à carrément en appeler à mon licenciement sur Twitter.

J’ai voulu ici développer plus avant mon propos plutôt que de le laisser en état de courtes et désinvoltes réflexions. Mais je tiens à préciser qu’il s’agit de mon avis personnel et non celui de RPS (NdT, Rock Paper Shotgun, le site original de publication de l’article). Ce n’est pas un manifeste ou une pétition, juste un approfondissement de mon avis sur le sujet. Gardons cela à l’esprit lorsque nous déciderons si je dois ou non me mettre à la porte.

J’ai dit, en ouverture de l’article en question, que cela me frustrait que les jeux vieux de plus de deux décennies ne soient pas dans le domaine public. Vingt ans est un nombre tout à fait arbitraire, bien qu’il semble avoir du sens dans le contexte de la durée de vie d’un jeu vidéo, mais cela peut tout autant être vingt-cinq ou trente ans. Ce n’est pas le sujet de ce texte. Mon idée était, et est toujours, que je souhaite que les créations artistiques entrent plus rapidement dans le domaine public, après une période de temps pendant laquelle le créateur peut engranger du profit.

Réaction de l’illustre George Broussard (des studios 3D Realms), un homme directement impliqué dans l’histoire de Duke Nukem Forever : cet article « débute avec la phrase la plus stupide que j’ai jamais lue ».

« Celui qui s’est permis de publier cela devrait être viré », a poursuivi George.

Cela peut sembler une réaction excessive. Mais d’autres ont surenchéri. Ainsi Cliff Bleszinski (NdT, autre célèbre concepteur de jeux vidéos) a retweeté en précisant : « Je ne me ferai jamais à cette culture qui ne comprend pas que les développeurs ont besoin de manger, qu’ils ont des crédits, et que développer un jeu coûte de l’argent. »

Zut alors !

Avant de rentrer dans les détails des différents points de vue, mettons une chose au clair : exprimer le souhait qu’un jeu entre dans le domaine public, disons vingt ans après publication, ne suggère en aucun cas que les développeurs ne soient pas payés pour leur travail. Et je n’apprécie pas avoir à préciser cela. C’est un peu comme si vous vous retrouviez à devoir dire que vous êtes contre l’idée d’affamer des enfants, juste parce vous avez émis l’idée qu’ils ne devraient pas manger exclusivement chez McDonald’s. Voici ce que je dis en fait : « les développeurs devraient être payés pour leur travail, et ensuite continuer à être payés pour ce même travail, encore et encore, sur les vingt années qui suivent, même s’ils ont arrêté tout travail lié à ce projet d’il y a plusieurs années. ». Comment y a-t-il pu y avoir ici raccourci et confusion ? Ce n’est pas très clair.

Je vous taquine parce qu’en vérité c’est bien clair. Les deux sont volontairement confondus par un groupe qui considère la possibilité même que des artéfacts culturels retournent à la culture dont ils sont nés comme une idée repoussante. Une idée si repoussante qu’ils doivent éliminer tout ce qui s’approche de près ou de loin à remettre en question ce qu’ils perçoivent comme des droits perpétuels sur leurs vieux projets. (Et soyons francs ici ? des créateurs comme le tumescent Phil Collins ou notre très cher Broussard argumentent ici en faveur du copyright perpétuel, ce qui est bien au-delà de ce que prévoit la loi elle-même.)

« N’importe quoi. Les créateurs ont le droit d’être payés de manière illimitée pour leur travail tant que leur marché existe. Point. »

Je pense que la meilleure approche est de répondre calmement aux questions les plus fréquemment posées.

Les gens ont besoin d’une motivation financière pour créer. Si vous l’enlevez, ça menacera la créativité.

Cet argument est si astronomiquement faux que mon chapeau m’en tombe de la tête. Une telle vision si misérable des être humains, extraordinaires créatures créatives, me donne envie de pleurer. Que la créativité soit possible uniquement s’il y a une récompense financière à la clé est une idée fausse qui a été démontrées à de nombreuses reprises. Que quelqu’un puisse gagner sa vie grâce à des œuvres créatives, oui. Mais la créativité n’implique pas nécessairement qu’on en fasse son gagne-pain. Il est crucial de s’en souvenir. Et si l’on se restreint à ceux qui cherchent à gagner leur vie avec, le fait de conserver l’exploitation exclusive de son œuvre pendant un temps non pas infini mais borné ne va empêcher personne de devenir multi-millionnaire grâce au fruit son travail. Une transition éventuelle dans le domaine public n’entrave pas la motivation financière.

Non seulement un argumentaire en faveur d’une durée moins longue du copyright que les monstruosités actuelles telles que « pour la vie + 70 ans » n’empêche pas quelqu’un de gagner sa vie, mais cela ne signifie même pas qu’ils ne puisse continuer à le faire grâce à leurs œuvres après que le copyright ait expiré. C’est la magie du domaine public ! Ils partagent juste l’opportunité de faire des profits avec les autres. J’aurai l’occasion d’y revenir.

Alors certes, cela pourrait éventuellement empêcher Cliff Richard de changer tous les lustres dans ses manoirs grâce aux droits sur une chanson enregistrée il y a soixante ans. Mais, je me répète, l’entrée potentielle dans le domaine public ne va appauvrir personne. (Je pense d’ailleurs qu’au moment où il enregistrait ladite chanson, il aurait été d’accord pour qu’elle soit dans le domaine public aujourd’hui.)

Mais pourquoi, les individus ne seraient-ils pas propriétaires de leurs propres idées ? Ce sont eux qui les ont créées après tout.

C’est ici que les choses deviennent quelque peu philosophico-métaphysiques. Cela revient à accepter qu’il existe (littéralement) une différence entre un jeu et une table, une chanson et une voiture. L’un existe physiquement. L’autre non. L’un est une chose, l’autre est une idée. Et tout se rapporte aux idées ici.

Tout le monde a eu l’expérience de ces diverses industries du copyright qui nous hurlent au visage « MAIS VOUS NE VOLERIEZ PAS UNE VOITURE ! »[1], lorsque, assis dans une salle de cinéma, on nous explique que c’est de notre faute si personne ne va plus au cinéma pour regarder un film (ou le regarder avec un DVD acheté légalement). Cette comparaison est fausse. Et c’est une fausse comparaison qui sert les intérêts des compagnies en rendant volontairement les choses confuses. Non, je ne volerais pas plus une voiture que je n’accepterais qu’une entreprise m’explique qu’elle détient les droits exclusifs sur l’idée des voitures elle-même. Toutefois, je suis heureux de « voler » certaines choses, telles que la connaissance, l’inspiration ou les bonnes idées. Et jusqu’à récemment, la littérature et la musique faisaient partie de cette connaissance, cette inspiration et ces bonnes idées.

La guerre des idées menée par les industries du copyright pendant les cent dernières années a été tellement efficace qu’aujourd’hui, la seule suggestion que les idées ne sont pas comparables aux objets physiques rencontre immédiatement une violente colère de leur part. Dans un monde où les lois sont faites par Disney, il n’est guère surprenant qu’un tel avis soit repoussé avec violence. Ce qui a été perçu à une époque comme un sérieux abus est aujourd’hui défendu par ceux-là mêmes qui en ont été les victimes.

Un changement brusque a eu lieu au tournant du siècle dernier, lorsque les idées qui étaient partagées de bouche à oreille, ou effectivement sur des textes recopiés, ont été confinées dans des morceaux de plastique. Quelques générations plus tard, ces emprisonnements ont été acceptés comme l’unique possibilité. Puis, l’ubiquité relativement récente d’Internet a soudainement révélé la nature transitoire et éthérée que les idées ont toujours eue. Mais, dans l’intervalle, de vastes industries ont été bâties autour de cet emprisonnement temporaire des idées, et elles n’ont aucune envie de voir leur règne arriver naturellement à sa fin.

Le copyright est revenu à ses origines. Créé au XVIIe siècle dans une ambiance de censure, volonté de la monarchie d’empêcher la presse émergente de répandre trop facilement des informations libres, il a pourtant évolué, deux siècles durant, en quelque chose de globalement utile. Il servait alors à défendre le droit d’un auteur à jouir de ses créations pendant une période de temps limitée, avant qu’elles entrent à nouveau dans le domaine public. Basé sur l’idée qu’une création n’est pas uniquement l’œuvre d’une seule personne, mais plutôt le résultat d’un partage et maillage massif d’idées culturelles pendant plusieurs millénaires, il paraissait alors logique que les créations retournent dans le domaine public après une certaine durée. Ceux qui ont trouvé un marché pour leurs créations, quand ils ont utilisé cette culture partagée dans leurs propres projets, se voyaient donc recevoir une récompense, soit par patronage soit par rétribution sur leurs ventes ou leurs représentations. Et ils pouvaient (et peuvent encore) continuer à faire cela ad vitam æternam. À ceci près qu’à la fin de cette période convenue (de différente longueur selon les pays), ils n’ont plus l’exclusivité des droits sur cette idée.

Mais aujourd’hui le copyright sert à protéger les individus, non les idées. En fait, son but est de limiter le flux libre des idées, d’empêcher l’échange culturel, au profit d’une minorité. Le copyright en lui-même est une menace pour la créativité future car il essaie de réduire la plus humaine des actions : partager nos idées. Il est revenu à ses origines et correspond à une forme de censure. Pas une censure reconnue par beaucoup en tant que telle, tellement le lavage de cerveaux des industries du copyright est réussi et contagieux, mais une censure des idées tout de même.

Pourquoi donc ne pas acheter et devenir propriétaire d’une idée comme on est propriétaire d’une table ? Parce qu’on ne possède pas une idée. Elles sont nées de la masse culturelle de l’humanité et vous ne pouvez pas poser une tasse de café sur une idée.

Mais pourquoi est-ce qu’une personne ne pourrait pas tirer profit de son idée tant qu’elle est en vie ?

En mettant de côté le fait qu’adhérer au domaine public n’empêche nullement de gagner de l’argent de son idée, ma réponse à cette question est : pourquoi le devrait-elle ?

Ce qui me semble intéressant avec cette question est que personne n’y a jamais vraiment répondu. Soit on me demande de me justifier de remettre ceci en cause. soit on me répond de manière lapidaire que c’est ainsi et pas autrement. J’ai remarqué un total manque de volonté de la part des gens de seulement prendre le temps de réfléchir à cette question. Pourquoi donc une personne aurait-elle le droit de gagner de l’argent sur une chose réalisée il y a plus de cinquante ans ? Dans quels autres domaines considère-t-on ce ce même principe comme acquis ? Si un policier demandait à continuer d’être payé pour avoir capturé un certain criminel notoire il y a trente-cinq ans, on lui demanderait de sortir de la salle et d’arrêter de faire l’idiot. « Mais le prisonnier est toujours en prison ! » pleurnicherait-il, en sortant du commissariat, les poches vides de n’avoir rien fait d’autre comme travail au cours de ces trente-cinq dernières années, et se demandant pourquoi il ne vit toujours pas dans un château en Espagne pour ce fait de gloire.

Et que dire de l’électricien qui a installé l’éclairage dans votre maison. Il va alors vous demander une taxe à chaque fois que vous allumez la lumière. C’est normal, c’est comme ça. Vous devez la payer, parce qu’il en a toujours été ainsi, aussi loin que vous vous en souvenez. Vous ne voulez tout de même pas qu’il passe sa vie à installer des lumières dans d’autres maisons ? Et les redevances du chirurgien sur ce cœur qu’il a opéré ? Le système est fait ainsi. Pourquoi est-ce qu’il ne serait pas payé à chaque fois que vous l’utilisez ?

Alors, pourquoi est-ce qu’un chanteur a le droit de tirer profit d’un enregistrement effectué il y a plus de trente-cinq ans ? La réponse sibylline « parce que c’est sa chanson » ne suffit pas. « Mais créer cette chanson a pu prendre des années ! » non plus. En effet notre policier a perdu des années à enquêter sur les crimes avant qu’il n’attrape ce sale criminel ! L’électricien doit étudier pendant des années afin de devenir assez compétent pour installer l’éclairage. Le médecin a perdu sept années dans une faculté… Imaginez si ce conditionnement des industries culturelles que nous acceptons tous était accepté ailleurs, le chaos qui en résulterait serait extraordinaire. Prenons la revendication de Broussard, cité plus haut, qui stipule que « les créateurs ont le droit d’être rémunérées indéfiniment pour leur travail » et changez « créateurs » par n’importe quel autre métier : dentistes, professeurs, bibliothécaires, paléontologues… Ça commence à sembler assez ridicule.

« Parce que c’est normal » ne répond simplement pas à la question. Cette réponse instinctive est née de la capture de la culture par l’industrie, instillée en nous depuis la naissance. Y mettre fin, s’en débarrasser, et approcher à nouveau la question, nécessite un effort considérable. Mais une fois que table rase est faite, la lumière se met soudainement à briller.

Pourquoi, en tant que personnes qui gagnent de l’argent en travaillant régulièrement et qui sommes payés pour le temps qu’ils passent à le faire, défendons-nous si vigoureusement ce modèle étrange qui est l’antithèse de notre existence ?

Je ne peux pas croire que vous puissiez dire que les développeurs ne devraient pas tirer profit de leurs propres jeux.

Ma pauvre tête. Mais oui, appliquons cela aux jeux vidéo. Les jeux sont différents des chansons et des films, n’est-ce pas ? Ils sont modernes. Ils n’étaient même pas un concept lorsque le copyright les a si grotesquement transformés en leur forme actuelle. L’industrie du jeu vidéo est née dans un monde où les créateurs prétendaient déjà à une possession à vie de leur manipulation personnelle d’une culture héritée pourtant d’autres personnes. Plus encore que pour les films, la musique ou la littérature, c’est une industrie qui a grandi en contradiction avec la notion de domaine public. (Ce que toute personne de plus de 30 ans verra comme une sinistre ironie, en se rappelant des jours où les jeux étaient dans le domaine public au début des années 90.)

Et, contrairement à la musique, aux productions théâtrales ou aux histoires, ils n’ont jamais pré-existé dans une forme matérielle gratuite. (On peut évidement évoquer des jeux comme « la Marelle » et « Chat perché » mais par souci de simplicité, nous ne le ferons pas, nous bornant aux jeux vidéos) Je concède alors que cela peut être un gros décalage culturel que d’accepter que des explosions et autres graphiques ultramodernes, qui ne sont après tout que des 0 et des 1 correctement agencés, se rangent dans ces catégories culturelles. Mais bien qu’on le ne ressente pas instinctivement ainsi, cela n’en demeure pas moins vrai.

Mais surtout les jeux, contrairement à d’autres activités créatives, sont souvent développés par d’importantes équipes de personnes. C’est une véritable entreprise non comparable à l’unique auteur d’un livre. Les gens sont payés pour faire leur travail, c’est-à-dire concevoir le jeu. Les droits du jeu, la propriété, revient à l’éditeur qui le finance et pas aux auteurs qui l’ont créé. Quand un jeu de 20 ou 30 ans fait toujours de l’argent, pas une seule personne impliquée dans sa création ne reçoit de dîme.

Dans certains cas oui, cela peut ressembler aux livres, avec un développeur indépendant et ses projets auto-publiés. Et il peut alors espérer toucher quelque chose. Mais alors nous retournons à mon plus significatif argument : après des décennies à être payés pour cela, il est temps que son jeu entre dans la culture commune.

Mais les gens qui travaillent méritent un salaire.

Je suis aussi patient que possible. Et c’est ici que des lois raisonnables de copyright protégeant les activités créatives peuvent intervenir. Car contrairement à ce que veulent bien croire certaines personnes, je n’ai rien contre l’idée, communément admise, de rémunérer le créateur pour ses créations. J’ADORE voir des personnes créatives être payées.

J’adore même l’idée que des personnes soient payées pour leur travail après que leur copyright ait expiré. Je crois ainsi qu’il est juste et équitable que quiconque fasse en sorte de mettre à ma disposition ses ressources du domaine public sous une forme pratique soit rétribué pour le faire. À ceux qui interprètent mon article précédent comme revendiquant que le site GOG ne devrait pas me faire payer son catalogue de vieux jeux, ce n’est absolument pas le cas. Je voudrais juste que mon argent aille entièrement à GOG pour le service qu’il me propose et non aux sociétés qui détiennent les licences de jeux dont ils n’ont rien à voir avec leur création.

Tu es hypocrite, toi-même, le journaliste, car l’écriture est une industrie créative, et tu ne donnes pas tes écrits gratuitement, et tu es payé, et tu es moche.

Il est poli de se demander en quoi cette personne est hypocrite avant de l’injurier ainsi. Bien qu’il y ait peu de demandes pour des articles sur les jeux vidéos écrits il y a vingt ans, et donc c’est quelque chose à laquelle je ne fais pas souvent face, je considère que mon ancien travail est dans le domaine public. J’ai écrit pour Future Publishing pendant environ dix ans, où mon contrat spécifiait qu’ils avaient les droits exclusifs des travaux pour six mois, et qu’après nous partagions les droits. J’ai toujours renoncé à ces droits mais je garde celui d’être reconnu comme étant le créateur dudit travail, et je suis ravi que quiconque qui me crédite utilise ce travail comme bon lui semble. Si cette personne veux me payer pour le faire, vous m’en voyez d’autant plus ravi. Et je suis on ne peut plus sincère lorsque j’affirme cela.

Bon, que voulez-vous voir modifié alors, excepté que les développeurs ne soient pas payés pour leur travail ?

Il y a vraiment très peu de cas de développeurs gagnant leur pain avec des jeux créés il y a 20 ans. Le jeu vidéo, en tant que média culturel, a une date d’expiration beaucoup plus rapide que la musique, les films ou n’importe quelle autre activité créative. Malgré la mode rétro et tous ces projets d’émulateurs dédiés, faire en sorte qu’un vieux jeu fonctionne sur nos périphériques d’aujourd’hui peut devenir un véritable supplice. Les sites comme GOG font un travail admirable en préservant et diffusant ces vieux jeux mais cela ne se traduit pas directement en ventes trébuchantes qui garantiront au développeur original sa Jaguar remplie de caviar pour le reste de ses jours. En fait, il y a extrêmement peu de chance qu’un seul penny de la plupart des ventes atteignent le créateur du jeu. D’autres sites, qui tentent de donner une seconde vie à des jeux oubliés, connus sous le nom d’abandonwares, sont violemment menacés de fermeture et effectivement fermés non par les créateurs qui ont conçu les jeux, mais par les sociétés qui ont acheté la société qui a été fusionnée avec la société qui avait les droits originaux. Et si vous n’aimez pas 20 ans, parce qu’on arrive à la moitié des années 90 et que cela semble dangereusement proche, alors mettez la barre à 30 ans. Déterminez une durée qui assure aux développeurs d’être richement récompensés de leurs efforts, et ensuite, remettez le tout dans la culture populaire. Ce sera alors au tour des personnes qui partagent, copient, remixent, ajoutent à leur catalogue des projets rétros, font un réel travail pour les rendre jouables, de toucher quelque chose sans demander autorisation ou avoir peur d’un procès.

Et non, bien sûr, je ne crois pas que le jeu doive être traité différemment des autres médias. Je crois que les autres médias devraient être rapidement régis par les mêmes normes, avant de voir les sources culturelles se tarir et disparaître.

Mais, hey, voilà un truc : je n’ai aucun pouvoir. Mes dires, mes croyances et mon souhait d’un retour plus de la créativité à ses origines, n’obligent personne à s’y contraindre. Autre stupéfiante révélation, je n’ai pas l’illusion que mes modestes réflexions vont déclencher une révolution mondiale dans les lois du copyright. Mais ce que j’espère, c’est que certaines personnes, même une infime minorité, puissent, d’une manière ou d’une autre, se sentir connectées et concernées, et fassent en sorte de laisser leurs jeux entrer dans le domaine public. Ou qu’elles publient leur jeux avec la promesse de le faire après un certain temps (et qu’elles le fassent réellement). Ou encore qu’elles choisissent de publier leurs jeux sous une licence Creative Commons, dans le but de maintenir tous les droits légaux et de protections dont elles ont besoin, sans étouffer le monde culturel dans lequel elles ont si abondamment puisé.

Je suis un romantique.

Répétons-nous s’il en était besoin : j’adore voir des personnes talentueuses justement récompensées pourr leur excellent travail créatif. Des histoires comme celles de Garry Newman ou Marcus Persson, devenus fantastiquement riches suite à leurs brillantes créations, m’apportent de la joie au cœur. Rien ne me fait autant sourire dans une banale journée de travail que de lire le témoignage d’un développeur indépendant qui constate que les ventes de son jeu lui permettent dorénavant de quitter son boulot pour se tourner vers ce qu’il aime réellement faire à plein temps.

Enfin, j’aimerais vraiment voir émerger une situation de réels financements créatifs de la part de mécènes et de communautés de joueurs offrant de l’argent pour que les auteurs puissent produire des jeux vraiment géniaux sans avoir besoin d’un énorme succès commercial.

Je veux voir l’argent arriver massivement vers ceux dont le talent le mérite. Je veux que les développeurs soient payés.

Notes

[1] Je me demande du reste s’il ne s’agit pas de la campagne la plus efficace contre le vol de voitures.




Les filles et le logiciel

Le témoignage ci-dessous ne devrait pas laisser indifférent ni faire consensus.

Il s’agit de Susan Sons, fille hacker avant d’être femme hacker, qui semble regretter le temps où l’on ne s’enflammait pas sur la théorie du genre (troll inside).

« Je suis venue au monde de l’open source car j’aimais faire partie d’une communauté où mes idées, mes capacités et mon expérience comptaient, pas mes seins. Cela a changé, et ce changement est dû à l’action de gens qui disent vouloir une communauté où les idées, les capacités et l’expérience comptent plus que des seins. »

Remarque : On pourra lire sur le sujet, les autres articles du Framablog.

Les filles et le logiciel

Girls and Software

Susan Sons – 4 février 2014 – LinuxJournal
(Traduction : Eve, RemyG, lyn, RyDroid, Asta, Kifferand, Wan, Diin, numahell, KoS, MFolschette)

L’article EOF de décembre 2013 nommé « Mars a Besoin de Femmes » a exploré un sujet intéressant : celui du rapport hommes/femmes parmi les lecteurs de Linux Journal, et parmi les développeurs du noyau Linux. Ce rapport est si déséquilibré (beaucoup d’hommes, peu de femmes) qu’en faire un graphe reviendrait presque à tracer une ligne verticale. J’espérais que l’article amènerait un hacker Linux du côté féminin de ce graphe à se mettre en avant et à faire avancer la conversation. Chose dite chose faite, voici Susan Sons aka @HedgeMage. À lire ci-dessous. — Doc Searls

Les filles et le logiciel. Oui, j’ai bien dit « les filles ». Sachant que les hommes ont d’abord été des garçons, mais que les femmes ont jailli de la tête de Zeus, à leur taille adulte, et en se battant comme des Athéna des temps modernes, vous pouvez commencer à m’insulter maintenant pour avoir utilisé ce mot… à moins que vous ne préfériez voir l’industrie à travers les yeux d’une fille qui est devenue femme au sein d’un ensemble de communautés open source.

Quand je pense aux hackers de mon entourage, les meilleurs ont commencé avant la puberté. Même s’il n’avaient pas d’ordinateurs, ils démontaient leurs réveils, réparaient leurs taille-crayons ou jouaient les radio-amateurs. Certains ont construit des lance-citrouilles ou des trains en LEGO. J’ai commencé à coder quand j’avais six ans, dans le bureau de mon père au sous-sol, sur la machine qu’il utilisait pour suivre l’inventaire de son entreprise de réparations. Après un été marqué par des essais et des erreurs, j’ai finalement réussi à faire jeter à des gorilles autre chose que des bananes explosives. Ça avait un goût de victoire ! (NdT : sans doute une référence au jeu Gorilla)

Quand j’ai eu 12 ans, j’ai mis les mains sur un disque d’une distribution Slackware et je l’ai installé sur mon ordinateur — un cadeau de Noël de mes parents après une année particulièrement bonne pour l’entreprise de mon père — et j’ai trouvé un bogue dans un programme. Le programme était en C, un langage que je n’avais jamais vu. J’ai frayé mon chemin vers IRC et expliqué le problème : ce qui n’allait pas, comment le reproduire, et l’endroit d’où semblait venir le problème.

J’étais vraiment naïve à cette époque — je n’avais même pas réalisé que la raison pour laquelle je n’arrivais pas à bien lire le code était qu’il existait plusieurs langages de programmation — mais les résidents du salon IRC m’ont dirigée vers le gestionnaire de tickets du projet, m’ont expliqué son intérêt et m’ont aidée à soumettre mon premier rapport de bogue.

Ce dont je n’avais pas connaissance à l’époque, c’était cet échange privé entre un des vétérans qui m’avait aidée et un des résidents du salon qui avait reconnu mon surnom sur une mailing list :

développeur0 : C’était une question vraiment bien posée… mais pourquoi est-ce que j’ai l’impression que c’est un gamin de 16 ans ?

développeur1 : Parce que c’est une fille de 12 ans.

développeur0 : Wow… Qu’est-ce que ses parents font, pour qu’elle pense comme ça ?

développeur1 : Je pense qu’elle vit dans une ferme, en fait.

Quand développeur1 m’a parlé de cette conversation, j’ai été convaincue par l’open source. Étant une petite fille d’une région rurale, qui avait été exclue encore et encore de toute activité intellectuelle, sous prétexte que je n’étais pas assez riche, trop campagnarde, pas assez âgée pour être désirée, je ne pouvais pas croire la facilité avec laquelle j’avais été acceptée et traitée comme tout le monde sur le salon, même s’ils savaient qui j’étais. Et j’ai été encore plus impressionnée quand j’ai appris que développeur0 n’était autre que Eric S. Raymond, dont j’avais dévoré les textes peu après avoir découvert Linux.

L’open source était mon refuge parce que c’était un endroit où personne ne prêtait attention à mes « ancêtres » ou ce à quoi je ressemblais — les gens s’intéressaient uniquement à ce que je faisais. Je me faisais bien voir des gens qui pouvaient m’aider en m’occupant de tâches ingrates : trier les tickets pour garder les listes propres, rédiger de la documentation et corriger les commentaires dans le code. J’aidais tout le monde, donc quand j’avais besoin d’aide, la communauté était là. Je n’avais encore jamais rencontré un autre développeur dans le monde réel, mais j’en savais plus sur le développement que certains étudiants.

C’est vraiment une question de filles (et de garçons)

Les filles de 12 ans d’aujourd’hui ne vivent généralement pas les expériences que j’ai vécues. On conseille généralement aux parents d’éloigner leurs enfants de l’ordinateur, de peur qu’ils se fassent attraper par des prédateurs sexuels, ou pire encore — deviennent obèses ! Cela vaut d’autant plus pour les filles, qui finissent diplômées en sciences humaines et sociales. Plus tard, à l’approche de leur vingt ans, quand quelqu’un trouve que le déficit de filles dans les communautés technologiques est un problème, on vient les chercher par la manche et on les emmène à une rencontre LUG (NdT : Linux User Group / Groupe des utilisateurs de Linux) ou sur un salon IRC. Étonnamment, cela ne fait pas de ces jeunes femmes des hackers.

Pourquoi croit-on que cela va marcher ? Prenez une jeune femme qui a déjà construit son identité. Jetez-la dans un monde qui est construit sur des schémas sociaux différents de ceux dont elle a l’habitude, où plein de gens parlent d’un sujet qu’elle ne comprend pas encore. Dites-lui ensuite qu’il existe une hostilité de la communauté envers les femmes et que c’est pour cela qu’il n’y en a pas assez, tout en la mettant en avant comme une bête de concours en expliquant que vous êtes ravi d’avoir recruté une femme. C’est la recette de l’échec.

Les jeunes femmes ne deviennent pas magiquement des technophiles à 22 ans. Les jeunes hommes non plus. Les hackeurs sont nés dans l’enfance, parce que c’est à cet âge que l’envie de résoudre des puzzles ou de créer quelque chose apparait chez ceux qui ont connu ce moment de « Victoire ! », comme la fois où j’ai réussi à imposer ma volonté à un couple de primates électroniques.

Malheureusement, notre société a conditionné les filles à ne pas être technophiles. Mon fils est à l’école primaire. L’année dernière, son école a fait un cours sur la robotique uniquement pour les filles. Quand mon fils a demandé pourquoi il ne pouvait pas y participer, on lui a expliqué que les filles ont besoin d’une aide spéciale pour s’intéresser à la technologie, et que s’il y a des garçons autour, les filles auront trop peur d’essayer.

Mon fils est rentré à la maison très perturbé. Vous voyez, il a grandi avec une mère qui codait en l’allaitant et l’a amené à sa première réunion du LUG à l’âge de sept semaines. La première fois qu’il a vu un robot fait maison, il lui a été montré par un membre d’un hackerspace local, une femme qui administre un des plus gros super-ordinateurs du pays. Pourquoi son école agissait comme si les filles étaient stupides ?

Merci beaucoup, « féminisme » moderne, pour avoir mis des idées pas très féministes dans la tête de mon fils.

Il y a un autre endroit dans ma vie, autre que ma maison, où l’idée selon laquelle la technologie est « un truc de gars » est complètement absente : ma ville natale. De temps en temps, je retourne à l’école de Sandridge, le plus récemment c’était quand mon professeur de mathématiques m’a invitée à une discussion avec les étudiants sur les carrières dans les Sciences, la Technologie, l’Ingénierie et les Mathématiques (NdT : STEM en anglais). Je suis presque sûre que je suis le seul programmeur que quiconque ait jamais vu dans cette ville… Je suis donc une sorte de représentante des geeks pour eux. Et certains considèrent même que c’est un « truc de filles ».

Pourtant, je ne peux pas dire que la région produise des quantités de hackeuses. Même en mettant de côté la pauvreté, l’urbanisation et la hausse de la criminalité, les filles ne sont pas plus portées à hacker dans ma ville natale que partout ailleurs. Quand j’ai parlé à des classes de mathématiques de CM2, les garçons m’ont expliqué qu’ils réparaient leurs consoles de jeux, ou débridaient leurs téléphones. Les filles n’ont pas fait de projets, elles ont parlé de mode ou de quête de popularité, pas de construire des choses.

Qu’est-ce qui a changé?

Je n’ai jamais eu de problème avec les hackers de la vieille école. Ils me traitent comme l’un d’eux, plutôt que comme « la femme du groupe », et beaucoup sont assez âgés pour se souvenir d’avoir travaillé dans des équipes composées d’un tiers de femmes, et personne ne trouvait cela bizarre. Bien sûr, le mot clé ici est « âgé » (désolée les gars). La plupart des programmeurs dont j’apprécie la compagnie sont plus proches de l’âge de mon père que du mien.

La nouvelle génération de développeurs open source n’est pas comme l’ancienne. Ils ont changé les règles à tel point que mon sexe est sous les projecteurs pour la première fois en 18 ans passés dans cette communauté.

Lorsque nous appelons un homme un « technicien », cela signifie qu’il est programmeur, administrateur système, ingénieur électrique ou quelque chose du même genre. C’était également le cas lorsqu’on appelait une femme une « technicienne ». Cependant, selon la nouvelle génération, une femme technicienne peut être également une graphiste ou quelqu’un qui gagne sa vie en tweetant. Cela dit, je suis contente de savoir qu’il y a des gens spécialisés dans les médias — cela veut dire que je n’ai pas à m’occuper de cet aspect des choses — mais les mettre à côté des programmeurs donne l’impression que ces « femmes techos » sont la partie handisport des JOs de la programmation.

Avant, je me sentais à l’aise avec les hommes, et personne ne se souciait de mon apparence. Aujourd’hui, j’ai l’impression de perdre mon temps à parler de genre plutôt que de technologies… Ceci dit, il y a plusieurs visions :

  • La vision « il n’y a aucune femme dans l’assemblée ». Je suis dans l’assemblée, mais on me dit que je ne compte pas puisque je porte t-shirt, jeans, bottes, et que je n’ai pas de maquillage.
  • La vision « tu nies ta féminité pour rentrer dans le moule ; c’est une forme d’oppression ! ». On me dit que c’est dans ma nature de femme d’aimer absolument le maquillage et la mode. Alors que je suis simplement une geek qui se soucie peu de son apparence.
  • La vision « tu ne représentes pas les femmes ; tu serais un meilleur modèle pour les filles si tu avais le bon look ». Marrant, le reste du monde semble très occupé à dire aux filles d’être à la mode (il suffit de regarder un magazine ou marcher dans le rayon fille d’un magasin de jouets). Je ne pense pas que quelqu’un d’aussi peu doué que moi dans ce domaine doive s’en occuper.

À une exception près, j’ai entendu ces réprimandes venir uniquement de femmes, et de femmes qui ne savent pas coder. Quelquefois, j’ai envie de crier « vous n’êtes pas une programmeuse, vous faites quoi ici ?! »

J’en suis aussi venue à réaliser que j’ai un avantage que les nouvelles arrivantes n’ont pas : j’étais ici avant le début de la panique morale autour du sexisme. Quand une douzaine de mecs décident de boire et hacker dans la chambre d’hôtel de quelqu’un, je suis invitée. Ils me connaissent depuis des années, donc je suis sûre. Les nouvelles, quelles que soient leurs compétences, ne sont pas invitées à moins que je ne sois là tout du long. Une accusation de harcèlement sexuel potentielle plane, et personne ne veut se risquer à avoir 12 hommes seuls avec une seule femme et des boissons alcoolisées. Du coup, les nouvelles restent dehors.

Je n’ai jamais été mise dans un groupe « Les femmes dans X », à l’écart de l’action réelle d’un projet. J’ai assez d’influence pour dire non quand on me dit que je devrais être loyale et réserver mon temps de travail pour des groupes féminins au lieu de le consacrer à la technologie. Je ne suis pas assez jeune ou impressionnable pour écouter les goûts de l’Initiative Ada[1], qui m’aurait tenue de donner de façon passive-agressive des cartons rouges à quiconque me dérange, ou m’aurait fait ressentir tous les hommes comme une menace, ou encore m’aurait fait comprendre que n’importe quel différend que je peux avoir serait causé par mon sexe.

Voici une nouvelle pour vous : à l’exception des polymathes dans le groupe, les hackers sont généralement socialement inadaptés. Si quelqu’un de n’importe quel sexe fait quelque chose qui viole mes limites, je suppose que c’est un malentendu. J’explique calmement et précisément ce qui m’a dérangé et comment éviter le franchissement de cette limite, je tiens à ce que la personne sache que je ne suis pas en colère contre elle, je veux juste m’assurer qu’elle est au courant, de sorte que cela ne se reproduise pas. C’est ce que font les adultes, et cela fonctionne. Les adultes ne cherchent pas à tout prix à se vexer, à donner des « creeper cards », et ne s’attendent pas à ce qu’on lise dans leurs esprits. Je ne suis pas un enfant, je suis un adulte, et j’agis comme tel.

On s’en fout de mes nibards

Je suis venue au monde de l’open source car j’aimais faire partie d’une communauté où mes idées, mes capacités et mon expérience comptaient, pas mes seins. Cela a changé, et ce changement est dû à l’action de gens qui disent vouloir une communauté où les idées, les capacités et l’expérience comptent plus que des seins.

Il y a très peu de filles qui veulent hacker. J’imagine que ça a beaucoup à voir avec le fait que l’on donne aux filles des poupées de mode et du maquillage et qu’on leur dit de fantasmer à propos d’amour et de popularité, alors qu’on donne aux garçons des LEGO et des boites à outils et qu’on leur dit d’en faire quelque chose. J’imagine que ça a beaucoup à voir avec le genre de femmes qui roucoulaient « mais elle pourrait être tellement belle si seulement elle ne passait pas autant de temps avec les ordinateurs ». J’imagine que ça a beaucoup à voir avec la manière dont les filles sont associées à l’éphémère — popularité, beauté et bien-être — alors qu’on enseigne aux garçons à se délecter de la réalisation. Donnez-moi une jeune personne de n’importe quel sexe avec une mentalité de hacker, et je vais m’assurer qu’elle aura le soutien dont elle a besoin pour devenir incroyable. Pendant ce temps, achetez à votre nièce ou votre fille une boite de LEGO et apprenez-lui à souder. J’aime voir des enfants aux rencontres de LUG et aux hackerspaces — amenez-les ! Il n’y aura jamais trop de hackers.

Ne blâmez pas les hommes simplement parce qu’ils sont là. Le « privilège des hommes » est une manière de dire « tu te sens coupable car tu n’as pas de seins, honte à toi, même si tu ne fais rien de mal », et j’ai perdu trop de mon temps à protéger des mecs sympas de cette idée. Oui, certaines personnes sont des ordures. Appelez-les des ordures, et ne reprochez à personne ayant la même anatomie d’avoir ce comportement. L’amalgame entre les bons mecs et les mauvais n’aide personne, ça empêche juste les mecs sympas d’interagir avec les femmes car ils sentent qu’ils ne pourront pas s’en tirer. Je suis fatiguée de dépenser mon temps et mon énergie à protéger les mecs bien de ce drame.

Ne blâmez pas les hackers d’avoir des défauts de non-hackers. Ce n’est pas ma faute si certaines personnes ne lisent pas les pages du manuel, pas plus que c’est mon travail de leur tenir la main étape après étape pour qu’ils n’aient pas à les lire. Ça n’est pas à moi d’amener de force des femmes aux rencontres de LUG et de tenter de leur laver le cerveau de manière à vous rendre plus à l’aise avec le ratio homme/femme, et de toute manière procéder ainsi ne marcherait pas.

Avant tout, je suis déçue. J’avais un havre, un endroit où personne n’accordait d’importance à mon apparence, à ce à quoi mon corps ressemblait ou à n’importe quel attribut éphémère — car ils s’intéressaient à ce que je pouvais faire — et ce décalage de culture m’a volé mon havre. Au moins, je l’ai eu. Les filles qui me suivent ont raté cela.

Je me rappelle qu’à cette époque, dans mon havre, si quelqu’un était désagréable ou essayait de m’intimider, les gens autour de moi réagissaient avec un retentissant « Comment oses-tu être désagréable avec quelqu’un qu’on apprécie ! ». Aujourd’hui, si un homme se comporte mal, on s’embourbe dans un raisonnement beaucoup plus complexe : « Est-ce que c’est parce qu’elle est une femme ? », « Est-ce que je vais passer pour un héros si j’interviens ? », « Est-ce que je suis misogyne si je n’interviens pas ? », « Qu’est-ce que ça implique pour les femmes dans le monde de la technologie ? », « Est-ce que je veux vraiment participer à un énième débat sur la politique des sexes ? ». C’était tellement plus simple lorsqu’on n’avait pas besoin de tout analyser, et qu’on tombait sur des gens désagréables seulement parce qu’ils étaient désagréables.

La passion de Susan Sons pour l’éducation l’a conduite vers l’open source avec Debian Edu, Edubuntu, et elle a aussi initié Frog et Owl qui aident les technophiles à interagir avec les enseignants pour développer des outils éducatifs plus utiles.

Notes

[1] Source: wikipedia: Ada Initiative est une organisation américaine visant à accroître la participation des femmes dans la culture libre et l’open source. Elle a été fondée en 2011 par les informaticiennes et défenseurs de l’open source Valerie Aurora et Mary Gardiner.




Bye bye Gmail !

Nous l’avions dit lors de notre campagne de don 2013 : 2014 sera l’année du « Moins de Google et plus de Libre »

Un semblant de planning a été dévoilé dans le récent billet intitulé « Manger la pâtée de son chien ». C’est le 1er février que nous devions nous séparer de Gmail, et nous l’avons fait !

L'enregistrement MX de framasoft.org

Nous sommes maintenant complètement autonomes pour la gestion de nos mails. Comme annoncé précédemment, nous avons choisi la solution BlueMind.

Il nous fallait un groupware pour remplacer Gmail : nous avions besoin de la gestion des mails, mais aussi de celle des agendas et des contacts, le tout en permettant le partage de ceux-ci, au moins entre nous.

Pendant notre recherche du Graal du groupware libre kivabien, nous en avons testé un bon nombre. Si certains n’étaient pas sans attraits, aucun n’avait la simplicité d’installation, de configuration et de maintenance de BlueMind tout en proposant une interface sympa et une synchronisation Exchange Active Sync[1] sans devoir allonger la monnaie[2].

Après avoir choisi BlueMind, un tweet de ma part nous a réservé une belle surprise : la souscription — facultative — auprès de BlueMind est offerte pour les associations du libre.
Même si nous étions partis pour nous débrouiller seuls, cette nouvelle était bienvenue car la souscription apporte un outil permettant de faire les mises à jour aussi simplement que l’installation[3] (qui tient en deux lignes de commande).

Du temps en moins pour des mises à jour, c’est autant de temps en plus pour nos projets :D.

Les framasoftiens au travail

Bref, séduits par Bluemind, nous l’avons installé sur une machine virtuelle de notre nouvelle infrastructure[4].

La formation des utilisateurs framasoftiens à la nouvelle interface ainsi que leur migration fut longue et pleine de mails de questions, de réponses, d’incompréhension… mais couronnée de succès.
La possibilité (récente) de pouvoir exporter sa boîte Gmail au format mbox a même donné lieu à une petite séance de modification d’un script python, IMAP Upload pour l’adapter aux labels de Gmail : les labels deviennent des dossiers lorsqu’ils passent dans gmail-mbox-to-imap et les mails y sont consciencieusement rangés. Peut-être ce script vous sera-t-il utile ?

Ce fut une belle migration. L’adminsys et le serveur se portent bien 😉 Nous pouvons donc aujourd’hui vous annoncer fièrement que nos mails sont libres et nous espérons que vous aurez envie de nous suivre dans cette voie.

Ce premier jalon dans notre entreprise de libération ne fait qu’ouvrir la voie à la ribambelle de changements que nous opérerons cette année.
Le prochain épisode sera celui du passage des Google Groups à notre propre serveur de listes de diffusion basé sur Sympa (1er mars si tout se passe comme prévu).

Librement,
Sky, pour Framasoft

Crédits photo:

Notes

[1] Oui, le protocole a été inventé par Microsoft, mais c’est le meilleur protocole de synchronisation avec les téléphones et on peut implémenter son propre serveur Exchange Active Sync.

[2] Nous vous rappelons que Framasoft ne vit que par vos dons (déductibles des impôts). Merci d’avance pour votre soutien.

[3] Ainsi que d’autres choses, mais dont nous n’avions pas besoin. Un connecteur Outlook par exemple :p

[4] Notre nouvelle infrastructure de virtualisation repose sur Ganeti, comme évoqué dans le billet « Manger la pâtée de son chien »




No Es Una Crisis : un web-documentaire (enfin) libre !

Le 21 novembre dernier, nous annoncions sur le Framablog une « opération de libération » du web-documentaire « No Es Una Crisis ». En effet, les ressources de ce documentaire produit par ‘‘La Société des Apaches” sont libres (CC BY-SA), malheureusement sa réalisation utilisant la technologie Flash empêchait sa visualisation sur bon nombre de supports (smartphones, tablettes, systèmes d’exploitation libres, anciennes versions de Windows, etc.).

L’objectif était d’arriver, en un week-end, à produire collectivement et bénévolement, une version HTML5 du webdoc permettant sa visualisation sur tous les supports disposant d’un navigateur web récent.

Pierre-Yves Gosset était, avec Fabien Bourgeois, le co-organisateur de ce « marathon de libération ».

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Bonjour Pierre-Yves. La première question qui me vient à l’esprit est « Alors, l’objectif a-t-il été atteint ? »

La réponse est : malheureusement non, puisque nous n’avons pas été en mesure de publier la version HTML5 le 15 au soir.

Heureusement, « la route est longue, mais la voie est libre ». Et ne pas avoir atteint l’objectif fixé le dimanche soir ne signifiait pas pour autant la mise au placard du travail effectué le week-end.
Ce qui me permet aujourd’hui d’annoncer qu’une version – non-finalisée, mais fonctionnelle – est en ligne.

Que s’est-il passé ?

Il faut d’abord préciser quelques éléments de contexte.

Nous nous sommes réunis les 14 et 15 décembre 2013, à Lyon, à Locaux Motiv (qui héberge le local de Framasoft).
Suite à l’appel lancé via le Framablog, nous étions 7 le samedi : Adrien, Fabien, Sheetal, tonton, JosephK, Luc, pyg (+ Julien et Frib pour l’équipe du webdoc). Nous avons eu deux désistements de dernière minute. Le dimanche, nous étions 5 : Fabien, tonton, Luc, JosephK et pyg.
Pour la plupart, ces personnes n’avaient jamais travaillé ensemble et ne se connaissaient pas.

Concernant le déroulé, après un présentation du projet de webdoc par les Apaches, nous avons réparti les participants en différentes équipes : vidéos (JosephK et Adrien), panneaux interactifs (Fabien et Luc), panneau « portraits » (tonton, avec l’aide ponctuelle de Luc et Fabien), et « petites mains » (Sheetal et pyg).

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Le rendez-vous était donné à 10h, mais je pense que nous n’avons commencé à prendre nos marques que vers 14h, après les traditionnelles pizzas-bières.
Le choix était fait dès le départ de combiner le libérathon avec une soirée « détente » : l’anniversaire de l’association Locaux Motiv (qui nous accueillait). Donc, à 21H, nous avons troqué nos claviers contre des pintes de bière (ou de jus de fruits) au bar De l’Autre Côté du Pont.
La soirée s’est transformée en nuit, puisque certains participants (dont votre serviteur) n’ont retrouvé leur lit que vers 5H du matin.
Cela ne nous a pas empêché de reprendre vaillamment le travail le dimanche vers 10 h 30.
Seulement, à 15 h, il fallait se rendre à l’évidence, nous n’aurions pas le temps d’atteindre notre objectif avec les choix techniques retenus (pourtant pertinents, mais la montre jouait contre nous).

Nous avons donc fait le choix stratégique de changer d’option technologique : l’agencement CSS des éléments des panneaux nous aurait pris trop de temps pour « boucler » à l’heure, et nous sommes donc partis sur une piste « dégradée » (une image par panneau, avec une imagemap, pas de vidéo/son de fond, etc.).

Ce choix s’est avéré payant, puisqu’à 21h, nous avions bien les 4 panneaux interactifs « fonctionnels », mais dans un mode relativement dégradé : peu d’interactivité, pas de titres de séquences, et plein de « petits détails » simples à régler mais dont le nombre ne permettait pas d’envisager une publication le soir même.

Cependant, il restait quelques points bloquants (la transition « accueil > vidéo intro > instructions » non fonctionnelle, certains fichiers json mal encodés empêchant le lancement de certaines vidéos, etc.).

Bref, il manquait peut-être 4 à 6h de travail pour avoir un rendu « publiable », mais l’équipe était épuisée (et affamée !).

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Quels sont les obstacles que vous avez rencontrés ?

Notre incapacité à publier le dimanche soir résulte d’une double cause.

D’abord, nous avons sous-estimé la phase de préparation. En effet, un webdoc de 3 heures, ce sont beaucoup de ressources diverses (des pictos, des logos, des images, des vidéos, des sons, etc.). Sans compter qu’il s’agit d’un webdoc multilingue (FR/ES/EN), ce qui complexifie encore les choses. Or, si nous avions bien accès aux sources, une partie de ces dernières étaient intégrées dans les fichiers .psd et .fla (Adobe Photoshop et Flash). Il a donc parfois fallu extraire des ressources de ces fichiers parfois très lourds et complexes (j’en profite pour remercier Sheetal et la société Mobiped pour leur aide précieuse et la mise à disposition d’une machine disposant de ces logiciels propriétaires, car Gimp refusait évidemment d’ouvrir des .psd de 2 Gio avec plus de 200 calques).
Pourtant, Fabien et moi avions passé plusieurs heures en amont à préparer ce libérathon (identifier les ressources, réfléchir à l’organisation, faire la mise en place, etc.).
Cependant, sans connaitre le nombre exact de participants (nous nous attendions à des défections) et leurs compétences, difficile d’être plus prêts.

Ensuite, nous manquions d’un expert CSS3. Alors évidemment, le web est plein de ressources, d’informations, de bibliothèques préexistantes, etc. Mais même si la courbe d’apprentissage est rapide et relativement sans douleur, on ne peut échapper à quelques tâtonnements. Et ces tâtonnements nous auront fait perdre bien du temps le samedi. Un expert CSS3 nous aurait permis de gagner plusieurs heures, très précieuses dans le cadre d’un « sprint » comme celui-ci.

Ajoutez à cela que nous étions tous bénévoles, et que l’ambiance et la bière étaient bonnes, et vous comprendrez bien qu’un des objectifs était aussi d’apprendre en s’amusant. Nous nous étions lancé un défi, mais nous ne voulions pas non plus nous mettre trop la pression. Il fallait quand même que cela reste un moment de partage et de plaisir !

Souvent, dans ce type de projet, les gens restent coder pendant la nuit. Ce ne fut pas notre cas. Si nous avions préféré rester enfermés plutôt que de sortir, nous aurions sans doute fini dans les temps, mais il n’y a pas que le code dans la vie !

Mozilla_Firefox_056.png

Et aujourd’hui, où en est le webdoc ?

Il est en place !

Il nous aura fallu un peu de temps, car les vacances et les fêtes de fin d’année sont passées par là. Ainsi que l’assemblée générale de Framasoft. Le temps de pouvoir remettre les doigts dans le code, nous étions déjà fin janvier.

Le webdoc est donc accessible sur http://noesunacrisis.com. Ou directement sur http://noesunacrisis.framasoft.org/html5 (si vous avez Flash d’installé et que vous voulez accéder à la version HTML5)

Attention ! Je sens les critiques pleuvoir en commentaires :

  • Utiliser des images maps en 2014, c’est nul !
  • Le positionnement CSS n’est pas totalement responsive !
  • Sur mon smartphone, la navigation est difficile.
  • Vous auriez pu rajouter (un routeur javascript|les vidéos en fond d’écran|les transitions CSS entre les pages|etc), c’est franchement pas difficile !
  • Et l’accessibilité, runtudju !
  • etc.

Alors, croyez bien que nous sommes tout à fait conscient des (très grands) défauts de cette version. Mais il faut bien comprendre ce que je disais plus haut : nous avons dû faire un choix. Soit nous publiions une version « dégradée » mais fonctionnelle. Soit nous ne publiions pas du tout ! Tout simplement parce qu’aucune des personnes présentes à ce libérathon n’avait de temps à y consacrer après le week-end.

Donc, nous voyons bien tout ce qu’il aurait été possible de faire. Mais disons qu’on a privilégié le « release early » plutôt que de faire une version techniquement nickel en terme de code, de technologies employées, etc… Mais qui n’aurait probablement jamais été finalisée.

Par ailleurs, nous avons publié notre code (hors vidéos) sur notre compte Github : https://github.com/framasoft/noesunacrisis Vous pouvez donc signaler des bugs mais surtout proposer des améliorations du code (car on ne vous cache pas qu’il est assez peu probable qu’on ait beaucoup de temps à y consacrer).

Enfin, il y a des “effets de bord” positifs à ne plus utiliser Flash, en dehors du fait que cela évite d’utiliser un plugin propriétaire. Comme par exemple le fait de pouvoir pointer directement vers une vidéo ou un panneau. Ainsi, plutôt que de dire « Je te conseille de regarder la vidéo sur la comparaison entre la crise immobilière et la situation des clubs de football espagnols. Va sur http://noesunacrisis.com, puis clique sur “No Futur” (en bas), puis le dessin du stade de foot (à droite) », on peut se contenter de donner le lien
http://noesunacrisis.framasoft.org/html5/video.html#foot
(et on peut même changer les sous-titres en live, ce que ne permettait pas la version Flash).

Un dernier mot pour la fin ?

Comme il s’agit d’une œuvre culturelle, j’aimerais faire comme aux Oscars/Grammy/Césars et remercier tout plein de gens :

  • d’abord bien évidemment tous les bénévoles qui sont venus !
  • l’association Locaux Motiv pour avoir fourni une salle de réunion adaptée à notre petit sprint de code ;
  • la société Mobiped pour le prêt de son matériel ;
  • l’association Rézopole pour la mise à disposition de machines virtuelles, mais surtout de bande passante (ils hébergent pas mal de projets libres parmi lesquels des miroirs de LibreOffice ou d’OpenStreetMap, mais aussi notre miroir Abulédu, les vidéos du webdoc, et bientôt bien d’autres projets Framasoft) ;
  • la société Tonnerre Total, qui était en charge de la réalisation Flash du documentaire (ce n’est pas parce que cette technologie nous pose problème qu’on ne doit pas les féliciter pour leur travail) ;
  • et enfin, la Société des Apaches, pour avoir fait le choix de publier leur webdoc sous licence libre.

Cela aura vraiment été une expérience enrichissante !

IMG_20131214_150802__1_.jpg

Rappel des principaux liens :




Comment créer un blog anonyme (à l’heure de la surveillance généralisée)

Blog vraiment anonyme : mode d’emploi !

« Et si vous me trouvez, je serai vraiment très impressionné. »

AndyRobertsPhotos - CC by

Comment créer un blog anonyme

How to Start an Anonymous Blog

Anonyme (évidemment) – 26 janvier 2014 – Untraceable
(Traduction : crendipt, aKa, Diab, Penguin, Omegax, amha, nanoPlink, Paul, Scailyna, Scailyna, Asta, Unnamed, goofy, lamessen)

Introduction

Je crois qu’en suivant les étapes que j’expose dans ce billet, personne ne sera capable de dévoiler mon identité. Mon domaine peut être saisi et mon blog peut être fermé, mais je reste persuadé que mon identité restera un mystère.

Si je dis cela, c’est principalement parce que j’ai confiance dans un outil très important appelé Tor. Les développeurs et administrateurs des nœuds de Tor travaillent pour que chacun puisse être anonyme sur Internet. Tor est une sérieuse épine dans le pied pour la NSA et pour les autres organisations et pays qui font de l’espionnage sur Internet.

Vu que le réseau Tor rend très difficile l’identification des adresses IP et que l’enregistrement de domaines est désormais possible via Bitcoin, je n’ai à aucun moment besoin de fournir une quelconque information personnelle pour la mise en place de ce blog.

Outils et ressources

Tails / Tor

Tails est lancé depuis une clé USB qui inclut une partition chiffrée. Cette partition contient un porte-monnaie Bitcoin, le code source du blog et une base de données Keepass. Mes mots de passe pour des services tiers sont des mots de passe très forts générés aléatoirement. Avec Tails, il est difficile de se tromper, car toutes les connexions doivent obligatoirement passer par Tor. Par exemple, pour développer ce blog en local, je dois ajuster les règles du pare-feu pour autoriser les connexions locales au port 4000, télécharger un navigateur différent (Midori) et régler celui-ci pour qu’il n’utilise pas de serveur proxy. Le pare-feu bloque toutes les requêtes externes de Midori, mais je peux accéder à http://localhost:4000.

Donc, à moins d’agir de manière insensée, par exemple me connecter à StackOverflow au moyen de mon vrai compte Google et utiliser l’identifiant de « untraceableblog », je pense qu’il est quasiment impossible de me pister.

Je fais une sauvegarde de la clé USB sur mon ordinateur principal, sur un volume caché TrueCrypt. J’aime le concept des volumes cachés, j’ai l’impression d’être un putain d’espion. L’idée, c’est d’avoir un mot de passe factice qui déverrouille un faux dossier chiffré et un mot de passe réel pour déverrouiller le vrai dossier chiffré, sans qu’il y ait aucun moyen pour les autres de savoir lequel vous déverrouillez. Dans mon faux dossier chiffré, je garde ma base personnelle de Keypass, de cartes de crédit, et des scans de mon passeport et permis de conduire. Donc si quelqu’un me force à entrer mon mot de passe pour déverrouiller mon ordinateur et découvre que j’ai un volume TrueCrypt, il n’aura aucun moyen de savoir si j’ai entré le mot de passe réel ou bidon.

Cette fonctionnalité autorise une légère protection contre les tentatives d’extorsion de votre mot de passe par la force.

XKCD

La plupart du temps, je cache la clé dans un endroit secret de la maison. Quand je dois aller quelque part et que je veux pouvoir mettre à jour ce blog, je le sauvegarde sur le volume caché, puis j’efface la clé de manière sécurisée et je peux l’emporter avec moi sans aucune crainte. C’est ce que je devrai faire jusqu’à ce que Tails intègre sa propre fonction pour les « volumes cachés ».

Messagerie électronique

J’ai créé un compte de messagerie gratuit sur Outlook.com et j’utilise anonymousspeech.com pour la vérification et la sauvegarde.

J’ai d’abord essayé Gmail, mais Google rend la création de compte très difficile quand on utilise Tor, à cause de la vérification par téléphone. C’est compréhensible, à cause des gens qui aiment créer un grand nombre de faux comptes pour envoyer du spam.

Blog

Ce blog est libre sur les pages GitHub, il utilise Octopress pour créer un site statique et j’ai installé le thème Page Turner. J’ai envoyé le contenu sur GitHub avec une clé SSH, bien entendu chiffrée et stockée sur ma clé USB.

Il me vient à l’esprit deux vecteurs susceptibles de vous donner des informations sur mon identité :


L’horodatage des messages

Le système d’exploitation Tails dispose d’une bonne stratégie pour forcer l’heure du système à être systématiquement en UTC. Mais si j’écris une série de billets dans les années à venir, vous pourriez en analyser l’horodatage pour déterminer mon fuseau horaire. Cependant, le site compilé indique uniquement la date. Par ailleurs, je voyage beaucoup (ou pas ?) 😉

Analyse de la fréquence des mots et caractères

Vous pourriez être capables de déterminer mon pays d’origine ou mon identité grâce à mes mots et mes phrases. Vous pourriez même trouver une corrélation avec les autres contenus que j’ai publiés en ligne sous ma véritable identité. Je contre cette possibilité en passant tous mes billets dans Google Translate. Je traduis dans une autre langue, puis en anglais et je corrige ensuite les erreurs. C’est parfait pour diversifier mon vocabulaire, mais j’aurais aimé que ça ne casse pas autant le Markdown et le HTML. Jusqu’ici vous pourriez croire que l’anglais est ma seconde langue. Mais laissez-moi vous assurer d’une chose : je n’ai jamais affirmé ni infirmé ce point.

Un des problèmes, c’est que Google peut voir mes messages originaux et probablement aussi la NSA. Si je voulais l’éviter, je pourrais poster des demandes de traductions anonymes et payer les traducteurs en bitcoins.

Statistiques

Les raisons de l’indisponibilité de Google Analytics vous sont données sous « Messagerie électronique ». À la place, j’ai choisi StatCounter.

Mais même si Google Analytics avait été disponible, je n’aurais pas utilisé une ID de suivi liée à mon identité réelle. Beaucoup de blogueurs anonymes ont été trahis par l’annuaire d’ID inversé proposé par Google.

Acheter des bitcoins avec le maximum d’anonymat

J’ai acheté les bitcoins en utilisant un compte anonyme créé via Tor. J’ai trouvé un vendeur qui souhaitait me rencontrer en personne et nous avons convenu d’un rendez-vous. Nous nous sommes rencontrés, je lui ai donné l’argent et il m’a transféré les bitcoins en utilisant son téléphone.

Acheter un nom de domaine avec des bitcoins

IT Itch est un registrar qui accepte les paiements via BitPay. Leurs noms de domaine sont assez chers,15 USD chacun, mais permettent un enregistrement totalement anonyme. Ce fut une démarche facile, mais il a fallu du temps pour que le domaine devienne actif (plus d’une heure). Une fois activé, j’ai configuré les enregistrements DNS pour GitHub Pages, et ensuite mon blog était accessible sur http://untraceableblog.com.

IT Itch a fait la grosse erreur de m’envoyer mon mot de passe en texte clair après la création du compte. PAS BIEN ! Si quelqu’un parvient à accéder à mon compte Outlook, il peut se connecter et détruire mon site. Donc j’ai effacé le message et changé mon mot de passe, et heureusement ils ne l’ont pas renvoyé par e-mail.

Comment je pourrais être découvert, 1ère partie

Pister les Bitcoins

En théorie, vous pouvez suivre la trace des transactions Bitcoins et découvrir mon identité. Toutefois, dans ce cas, il est très peu probable que même l’organisation la plus sophistiquée et la mieux financée puisse me découvrir.

Voyez-vous, j’ai acheté ces Bitcoins en utilisant un compte anonyme sur localbitcoins.com (créé en utilisant Tor). Nous avons convenu, le vendeur et moi, de nous rencontrer en personne, et j’ai payé en liquide. Pour dévoiler mon identité, il faudrait que vous puissiez casser les défenses de tous les services que j’ai utilisés ou bien travailler chez eux. Il faudrait par exemple :

  1. Accéder à la base de données de ititch.com et trouver l’identifieur de la transaction BitPay pour untraceableblog.com
  2. Accéder à la base de données de BitPay et trouver l’adresse Bitcoin qui a envoyé les Bitcoins pour cette transaction
  3. Accéder à la base de données de localbitcoins.com. Trouver l’adresse Bitcoin qui a envoyé les Bitcoins à BitPay, retracer la transaction jusqu’à ce que vous trouviez l’adresse localbitcoins du dépôt fiduciaire.
  4. À partir de l’adresse du dépôt fiduciaire, vous pourrez trouver le compte localbitcoins, et retrouver les messages que nous avons échangés pour nous rencontrer.
  5. Vous devrez vous rendre au point de rendez-vous et espérer qu’il existe des caméras de surveillance qui auraient pu nous enregistrer ce jour-là.
  6. Vous aurez enfin besoin d’accéder à la société de sécurité qui possède les enregistrements des caméras de surveillance, obtenir une bonne image de mon visage et faire tourner d’une façon ou d’une autre un logiciel de reconnaissance faciale pour découvrir mon identité. Travailler pour Facebook ou la NSA pourrait aider si vous avez réussi à parvenir à ce point.
Comment je pourrais être découvert, 2ème partie
Tout est hacké. Absolument tout.

Internet est une machine basée sur la confiance et il existe de nombreuses manières de briser cette confiance. Quelqu’un peut générer des certificats SSL de confiance pour n’importe quel domaine, exiger que son FAI route l’intégralité du trafic au travers de ces certificats, ou contrôler un grand nombre de nœuds Tor et réaliser des attaques par analyse de trafic. Je n’entrerai pas dans les détails mais si vous êtes intéressés, vous pouvez en apprendre davantage sur les attaques Tor :

Conclusion

Je n’ai fait ce blog que comme un exercice amusant d’anonymat, même si j’y posterai probablement des choses dans le futur. J’ai simplement utilisé des outils créés par des gens bien plus intelligents que moi et je ne suis sûrement pas le premier blogueur anonyme, mais j’espère vous avoir appris quelque chose.

Bien évidemment, on peut aller beaucoup plus loin que ça. J’aurais pu héberger ce blog sur un VPS que j’aurais loué avec des Bitcoins et installer le serveur comme un service Tor masqué. L’adresse IP du serveur aurait été totalement protégée mais, de ce fait, vous n’auriez pu consulter ce blog qu’au travers du réseau Tor, et les liens de nœud Tor (TBR) ça ne fait pas très chouette en page d’accueil. J’aurais également pu faire toutes mes actions depuis un cybercafé, juste au cas où Tor serait compromis, mais je n’aurais pas été découvert. Enfin, j’aurais pu choisir un domaine en « .se » si j’avais eu peur de l’intervention du gouvernement américain. C’est ce qui est actuellement utilisé par The Pirate Bay, et les Suédois leur laissent toute liberté d’action.

N’hésitez pas à m’envoyer quelques Satoshis (fractions de Bitcoins) si vous aimez ce billet : 146g3vSB64KxxnjWbb2vnjeaom6WYevcQb.

Et si vous me trouvez, je serai vraiment très impressionné.

Crédit illustrations : AndyRobertsPhotos (Creative Commons By) et XKCD




Pourquoi j’aime être un community manager open source

La fonction, et parfois le métier, de community manager (gestionnaire de communauté en français) est relativement récente dans le paysage numérique.

Récent mais déjà à la mode et à toutes les sauces, parce que tout le monde, même Orange ou la SNCF, aime à dire qu’il est présent sur le réseaux sociaux et dialogue avec sa « communauté ».

Qu’en est-il dans le milieu bien spécifique du logiciel libre où l’existence d’une « communauté » est bien moins un adjuvant marketing qu’une condition de la réussite d’un projet ?

Des réponses parfois redondantes mais souvent vivifiantes 😉

Salvador Moreira - CC by-sa

Que préférez-vous dans votre métier de community manager de projet open source ?

What’s the best thing about being an open source community manager?

Jason Hibbets – 27 janvier 2014 – OpenSource.com
(Traduction : Zizi, alpha, GregR, Omegax, Scailyna, Asta, lamessen, Diin, ttoine + anonymes)

Il y a peu, j’avais dressé la liste des cinq meilleures pratiques pour les community managers en 2014. En ce jour de reconnaissance des community manager (NdT : Community Manager Appreciation Day), nous avons recueilli les réflexions de quatorze grands représentants issus de diverses communautés open source invités à répondre à la question suivante :


Quel est le meilleur aspect du métier de community manager ?


Voici ce qu’ils ont répondu.


Zohar Babin, directeur de la communauté chez Kaltura :

Étant community manager pour un projet open source de grande échelle, et ayant un grand succès commercial, je pense que le plus gros de mon boulot est de rassembler les deux choses que j’aime le plus : les relations humaines et la technologie. Ma responsabilité est d’équilibrer les deux, de garantir une bonne ambiance qui assure une communication harmonieuse, et une visibilité dans un environnement ouvert. Je suis une sorte de « jongleur-scientifique ». Je mesure, analyse et expérimente fréquemment, tandis que la performance quotidienne est purement artistique.

Jono Bacon, community manager pour Ubuntu :

Je pense que les communautés mettent en avant le plus bel atout que l’être humain possède : le sens du partage. Quand les gens collaborent ensemble, ils ont l’opportunité de créer de plus grandes et plus puissantes choses que quelqu’un pourrait accomplir seul dans son coin. Rallier différentes façons de penser et différentes motivations pour créer quelque chose déconcertant de simplicité est complexe. C’est un beau et vivifiant challenge, et quand le résultat de ce travail profite à de vraies personnes, je me dis que gérer une communauté est quelque chose à laquelle j’aimerais consacrer ma vie.

Ben van’t Ende, community manager pour TYPO3

Repérer les opportunités de coopération entre des groupes et des individus, faire correspondre ces initiatives et donner à ces individus la chance de partager leurs compétences au profit d’une communauté pour qu’ils soient appréciés pour leur savoir ou rien que pour leur effort. La plupart des membres d’une communauté veulent partager ce qu’ils savent avec le reste de cette communauté, mais ils ont souvent des difficultés à trouver où exactement aller pour partager leurs idées ou quand faut il le faire. En tant que community manager, vous avez le point de vue qui vous permet d’opérer cette magie, et je trouve ceci vraiment enrichissant.

Britta Gustafson, community manager pour Cydia (et aussi community manager bénévole d’OpenHatch) :

La meilleure chose en étant community manager est de créer le lien entre les personnes qui utilisent un projet et les personnes qui travaillent dessus, en aidant les deux parties à avoir de meilleures informations — ce qui signifie que j’aide à faire de meilleurs projets (et plus joyeux). J’aime me concentrer sur les personnes qui utilisent un projet, parler avec eux, et apprendre ce qu’ils découvrent et ce qu’ils demandent — c’est pratique et puissant de faire attention à la face extérieure et publique d’un projet.

J’apprécie aussi la diversité des tâches que je fais en tant que « community manager » — du support, de la modération, un peu de publicité, un peu de gestion de produit, et toutes sortes d’écrits pour améliorer les choses et les coller ensemble. C’est assez créatif : devoir considérer l’ensemble du projet, comprendre comment le côté technique et le côté social s’assemblent, et être une personne qui fait des connexions et rempli des trous — en identifiant les problèmes intéressants et en trouvant une manière de les résoudre.

Daniel Hinojosa, community manager pour SourceForge :

J’adore écouter les gens, qu’ils utilisent SourceForge ou pas. J’aime entendre parler des difficultés qu’ils rencontrent en écrivant leur code, en développant leur propre communauté, et élaborant des stratégies pour résoudre des problèmes vraiment compliqués. Actuellement, mon but est de comprendre la division qui existe au sein de la communauté des logiciels libres entre publier tôt, et publier souvent (NdT ; release eraly, release often).

David Hurley, community manager en charge de la partie développement de Joomla :

La meilleure chose qui soit pour un community manager, est, sans aucun doute, la communauté. La possibilité qu’il y a de discuter, d’encourager et de permettre à des membres de plus s’engager dans un projet, une idée ou un rêve. J’ai pas mal appris en écoutant les autres partager leurs idées et, en tant que community manager, j’ai le privilège d’aider ces idées à être concrétisées en actions.

Francesca Krihely, senior manager en charge de la relation avec la communauté pour MongoDB :

Lorsque l’on est un community manager, la meilleure chose qui soit, ce sont les gens avec lesquels vous travaillez. Vous êtes amenés à rencontrer des personnes passionnées, intelligentes, stimulantes qui contribuent tout en restituant ce que les communautés dont ils font partie leur ont apportées. J’ai beaucoup de chance de travailler avec une communauté composée d’ingénieurs vraiment doués et intelligents qui sont aussi curieux et réactifs. J’apprécie vraiment lorsque je vois des membres de la communauté avec lesquels j’ai pu travailler pendant des années gagner des prix, lancer leurs entreprises, lever des fonds ou encore inventer leurs propres projets Open Source. C’est un boulot génial que d’aider des personnes brillantes et talentueuses à réussir.

Heathr Leson, Directrice de l’implication de la communauté pour l’Open Knowledge Foundation (elle est aussi membre du conseil d’administration au sein d’Humanitarian OpenStreetMap) :

L’étincelle. C’est cette étincelle qui se produit lorsque vous mettez en lien une personne avec une idée ou un parcours d’apprentissage ou que mettez les personnes en relation puis que vous vous retirez. Ce moment de beauté a lieu lorsque les gens trouvent leur voie ou leur passion avec un soupçon d’encouragement ou d’orientation. À ce moment, vous réalisez que votre travail, permettre l’émergence des prochains contributeurs ou représentants open source est la plus grande source de motivation qui soit.

Vincent Mayers, community manager open source chez inBloom :

Avoir une vision claire de l’avenir est tellement important pour le développement et l’évolution d’un projet open source, et tout le monde a la sienne ! En tant que community manager, j’ai la charge de propager auprès de nos équipes produits et de nos dirigeants la vision des communautés open source, afin que nous puissions l’intégrer dans notre feuille de route (NdT : « roadmap »). J’adore cette contribution venant de tant d’origines différentes. Et aussi, j’adore mon rôle qui combine tant de disciplines : vente, marketing, relations publiques, recrutement, évènementiel, gestion de projet, développement produit et bien sûr, le jonglage.

Angela Oduor, community manager open source chez Ushahidi :

Ce sont les gens qui font tourner le monde. La meilleure chose concernant le fait d’être un community manager à Ushahidi est que je peux être un pont entre la technologie et ces gens.

Nicolas Pastorino, community manager open source chez eZ Publish :

La meilleure chose que j’aime faire en tant que community manager est d’accompagner de l’intérieur un groupe de bénévoles motivés et engagés. Lorsque la mission et les objectifs d’une communauté sont largement partagés, une énergie inégalée est créé, qui converge vers sa réalisation, comme je l’ai rarement vu ailleurs.

Lydia Pintscher, community manager pour KDE :

La meilleure et la pire des choses pour un community manager dans une communauté de bénévoles est que vous ne pouvez forcer personne à faire quoi que ce soit. Vous devez rallier les membres de la communauté à votre cause encore et encore. Cela peut être un véritable défi, mais quand vous les avez enfin recrutés, vous savez qu’ils sont vraiment avec vous parce qu’ils le veulent et qu’ils veulent faire ce qu’ils font.

David Stokes, community manager pour Oracle / MySQL :

La meilleure chose à propos du fait d’être un gestionnaire de communauté MySQL c’est de voir ce que les gens font avec le produit ! Que ce soit une municipalité qui ouvre publiquement l’ensemble de ses données ou un chercheur qui utilise MySQL pour rassembler des données exotiques ou bien même une petite entreprise qui utilise notre système de base de données de manière innovante. Voir un outil aussi basique qu’une base de données être utilisé de millions de manières différentes pour aider des personnes à atteindre leurs objectifs ne me lasse pas de me surprendre.

Andreas Tille, développeur principal pour le projet DebianMed :

Le mieux, c’est lorsqu’il faut apprendre aux nouveaux arrivants comment rejoindre la communauté et abaisser toutes les barrières à l’entrée. Sur DebianMed, on travaille ainsi sur deux programmes : le meilleur tutorat du mois et le parrainage. Plus de détails sur ces thèmes sont accessibles via mes présentations.

Crédit photo : Salvador Moreira (Creative Commons By-Sa)




Manger la pâtée de son chien

Le titre de ce billet vient de l’expression « Eating your own dog food » signifiant qu’il est bon de suivre ses propres recommandations.

Crédit photo : Birhanb – CC by-sa
Crédit illustration : Framasoft Campagne 2013 – Simon Gee Giraudot – CC by-sa

Lors de notre campagne de dons 2013, nous avions proclamé « Moins de Google et plus de Libre ». En effet, cela fait un bout de temps que l’actualité tourne autour du géant du Web pour son côté « Don’t be Evil [mais un peu (beaucoup ?) quand même] » et que nous vous encourageons à vous méfier de lui et de ses semblables… sans que nous suivions pour autant nos propres recommandations !

Un chiot en train de manger du yaourt

Google Analytics pour nos statistiques, Google Groups pour nos listes de diffusion, Google Mail pour nos adresses mail associatives, etc. La liste est longue et nous accable chaque jour un peu plus. Nous ne comptons d’ailleurs plus le nombre de fois où l’on nous reproche — avec raison — d’utiliser les services Google.
Le cas de Google Groups est particulièrement parlant : si on peut s’abonner librement à une liste de diffusion de ce service, le faire sans disposer d’un compte Google relève du parcours du combattant.

Google nous a séduit à l’époque par sa facilité d’emploi, ses nombreux outils disponibles et son slogan que nous aimions croire. Notre croissance a été peut-être un peu rapide et nous avons choisi des solutions de facilité.
Il faut cependant noter, à notre décharge, que ces solutions présentaient au moins le mérite d’être gratuites, et ne nécessitaient aucune maintenance particulière si ce n’était un peu d’organisation. Pouvoir “compter” sur les serveurs de la Firme était clairement une question de confort et de disponibilité de main d’œuvre. Il faut aussi se souvenir qu’il y a peu de techniciens purs et durs dans nos rangs.

Google devient chaque jour de plus en plus omniprésent, intrusif et laissant de moins en moins de choix à ses utilisateurs, comme l’obligation récente d’avoir un compte Google+ pour commenter des vidéos Youtube. Sans parler de sa soumission à la NSA (#Prism, #Snowden), Voilà qui n’est vraiment pas dans l’esprit de Framasoft 🙁

Mais en 2014, nous nous libérons de nos chaînes ! Tel le fils prodigue, nous revenons à la maison. Nous quittons cette cathédrale si confortable pour rajouter de nouvelles pièces à notre auberge espagnole, ce joyeux bazar.

Framasoft Campagne 2013 - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Au menu de cette grande campagne de migration, nous remplacerons :

  • Google Mail par Bluemind ;
  • Google Groups par Sympa ;
  • Google Docs par un mélange d’Etherpad, d’Owncloud et peut-être aussi de WebODF ;
  • Google Analytics par Piwik ;
  • Github par GitLab (parce qu’il n’y a pas que Google qui n’est pas libre)[1].

Le calendrier de cette migration, s’il n’est pas gravé dans le marbre est tout de même plus ou moins déjà écrit.
Ainsi, le 1er février, nous aurons effectué la migration de nos boîtes mail vers notre propre infrastructure.

Chacune des étapes de notre libération fera l’objet d’un billet dédié pour vous tenir au courant de nos avancées et — pourquoi pas ? — vous donner envie de suivre notre exemple.

Cette année sera aussi celle du grand ménage dans nos serveurs. Un grand bric-à-brac monté au fil des années, pas forcément maintenu comme il faudrait, mélangeant les applications critiques et moins critiques. Nous allons nous doter d’outils nous permettant une plus grande souplesse d’utilisation, comme Ganeti[2] pour monter une infrastructure virtualisée.
Cette souplesse nous permettra par exemple d’expérimenter facilement de nouveaux services à vous proposer (Sneak preview) tout en réduisant le temps — relativement conséquent aujourd’hui — à consacrer à la maintenance de notre infrastructure.

Nous tenions à vous l’annoncer non seulement dans un souci de transparence, mais aussi pour vous permettre de suivre et vous montrer — au fil de nos avancées — comment nous répondons à notre défi « Quitter Google ». Peut-être cela pourra-t-il inspirer votre entreprise, votre administration, votre association… à se lancer ce même défi.

C’est en grande partie grâce à vos dons que nous pouvons dégager le temps et trouver les talents pour atteindre cet objectif. Si vous trouvez la démarche intéressante, n’hésitez pas à nous soutenir afin de nous permettre de continuer notre action.

L’équipe Framasoft

Notes

[1] Nous conserverons toutefois un miroir de nos projets sur Github, pour la visibilité

[2] Arrh, oui, on sait que c’est un outil développé par Google, mais c’est un outil libre quand même