C’est bien joli, mais si on n’accompagne pas ces sites des savoir-faire et outils pour mieux vous aider à vous en emparer… c’est triste, non ?
Un peu de cathédrale dans notre joli bazar…
Depuis près de trois ans que nous Dégooglisons Internet, nous n’aurions rien pu faire sans votre aide. Nous savons que proposer des outils c’est bien, et que cela ne suffit pas. Il faut aussi les présenter, donner des tutoriels, des outils pour les comprendre et les prendre en main.
Bien entendu, ces logiciels sont déjà souvent soutenus par leurs propres communautés, qui proposent leur propre documentation dont chacun·e peut bénéficier. Il nous fallait, néanmoins, un endroit où rassembler tout cela.
Et depuis trois ans, nombre d’entre nous (contributeurs et contributrices, bénévoles et salarié·e·s…) ont apporté leur petite pierre à l’édifice. Il fallait nous voir, à chaque nouvelle contribution, nous émerveiller :
« Ah ! je me suis bien marré devant la présentation de Framapack que Pyves vient de nous proposer. J’espère que de plus en plus de windowsiens l’utiliseront pour télécharger des logiciels libres… »
« Sérieusement, le groupe Framalang s’est encore surpassé en traduisant la doc de Mattermost… Ça va bien aider à ce que les gens s’emparent de Framateam pour abandonner leurs groupes Facebook. »
(L’est-y pas belle, la vidéo Framalistes de Nicolas Geiger pour le site Colecti.cc ?)
Au départ, nous avons essayé de mettre les liens vers ces outils de documentation dans chaque page d’accueil de chacun de nos projets, afin que vous ayez tout sous la main dès que vous commencez à vous y intéresser… Mais souvent, une fois que vous êtes dans le service, vous n’allez plus voir la page d’accueil. On le sait, parce que nous, on fait pareil.
Alors nous avons lancé le défi à JosephK de mettre un peu de cathédrale dans ce merveilleux bazar, et de rassembler nos documentations en un seul et même endroit. N’écoutant que les clapotis de son clavier, ce dernier a décidé de collecter, d’organiser et de présenter tout cela sous la forme d’un gitbook, afin d’avoir un outil que l’on puisse modifier, amender et mettre à jour de façon collaborative (et pas trop ardue).
Demandez la doc !
Le principe est simple : vous cherchez comment utiliser un de nos services ? Pourquoi choisir tel Frama-bidule ? À quoi sert tel Framachin ? rendez-vous sur docs.framasoft.org.
Vous y serez accueillies par un choix de langue (parce qu’un jour, peut-être, on pourrait avoir des versions en anglais, breton ou espéranto).
Puis sur la page d’accueil, vous verrez une barre latérale qui vous permet de vous guider dans l’ensemble de notre documentation (elle s’adapte selon la rubrique dans laquelle vous vous trouvez). C’est dans la colonne principale, à droite, que se trouvent l’accès aux informations. Tout en haut, vous y trouverez des guides pratiques.
Ce sont des guides à destination du grand public, regorgeant d’informations aussi pratiques qu’indispensables. Pour l’instant, nous y avons inclus :
(si vous voulez nous proposer le vôtre, rendez-vous dans la prochaine partie de cet article)
Ensuite, toujours sur cette page, vous y trouverez une liste des services Framasoft.
Ce sont l’ensemble des services Dégooglisons Internet sur lesquels nous avons une documentation en Français et (plus ou moins ^^) à jour à proposer.
Il vous suffit de cliquer sur le service qui vous intéresse pour découvrir les outils que nous avons pu récolter à son sujet.
Bien entendu, si vous ne trouvez pas votre service préféré et/ou que vous souhaitez proposer un élément de documentation, nous sommes preneurs (voir plus bas).
Enfin, toujours sur cette page, vous y verrez une rubrique « Culture et Logiciels Libres »
Ici, vous aurez des savoirs et savoir-faire sur les projets Framasoft qui ne sont pas des services Dégooglisons, qui tendent à promouvoir le logiciel libre et sa culture.
Libre à vous de cliquer et de consulter ce que bon vous semble, et de faire passer les liens à vos ami·e·s, collaborateurs et collaboratrices !
Une documentation qui n’attend que vous
Bien entendu, l’ensemble de ces documents sont libres. Par défaut, la licence utilisée pour les productions Framasoft est la CC-BY-SA, mais prenez soin de vérifier pour chaque outil de documentation, car leurs auteurs et autrices peuvent tout à fait les avoir placé sous une autre licence libre ^^ !
C’est néanmoins une des grandes forces du Libre : n’importe qui peut y participer.
Vous cherchez à soutenir le (logiciel) libre sans forcément savoir coder ? Présentez votre service ou projet favori avec une petite vidéo, une présentation animée, un texte avec captures d’images… Nous vous l’assurons, cela aidera énormément de monde à passer le pas et à adopter du libre dans ses habitudes numériques.
Pour participer, deux cas de figure :
Vous connaissez le git, les push et pull request ne vous font pas peur ? : rendez-vous sur la forge de notre gitbook pour proposer vos commits afin que l’on merge tout cela ensemble.
Vous n’avez rien compris à la phrase ci dessus ? (ne vous inquiétez pas, celui qui l’a écrite est comme vous !) Rendez-vous sur notre forum des bénévoles, partie tutoriels, pour proposer vos tutos, vidéos, et autres trucs en -os !
Enfin, une manière toute simple de participer, c’est simplement d’aller lire ces petits bouts de savoirs qui aident à mieux se dégoogliser… et de les partager avec son entourage !
Les Rencontres mondiales du logiciel libre se mettent au vert
Les Rencontres mondiales du logiciel libre sont organisées, chaque année dans une ville différente, par le groupe d’utilisateurs de logiciels libres local.
C’est un grand pouvoir et une grande responsabilité pour le GULL qui s’y colle. Il s’agit de proposer une formule qui fera le bonheur des geeks purs et durs comme des quidams souhaitant sentir le vent de la liberté. Cette fois-ci, ce sont les copains d’Alolise, le chaton stéphanois, qui assument cette lourde tâche. Plongée dans le chaudron.
Salut les amis ! Vous pouvez nous présenter Alolise ?
C’est une chouette association. 🙂
Alolise existe depuis plus de 12 ans ! Les débuts étaient très « underground« , puis petit à petit sous l’impulsion des différents présidents et du petit noyau d’irréductibles, Alolise a su se créer une identité et commence à être connue.
Notre avenir (hors RMLL) est orienté vers la communication autour des CHATONS (Collectif d’Hébergeurs Alternatifs Transparents Ouverts Neutres et Solidaires), car nous offrons une véritable AMAP Numérique sur Saint-Étienne et sa région, et aussi vers la poursuite du combat EDUNATHON contre les accords Microsoft – Éducation Nation, en proposant en partenariat avec la mairie des ordinateurs libres comme alternative auprès des écoles de la métropole.
On a aussi un gros projet de formation, mais chut … plus tard.
Vous organisez les Rencontres mondiales du logiciel libre à Saint-Étienne du premier au 7 juillet prochains. Ça va, la pression ?
Ça va. C’est une pression motivante. L’événement est pour bientôt, on a la tête dans le guidon mais on tient la barre et on avance en équipe.
Il faut savoir que pour certains d’entre nous c’est un combat pied à pied de plus de 18 mois…
Il nous tarde de retrouver une vie normale et de nous tenir éloignés de toute réunion pendant une période de convalescence d’au moins 6 mois…
On savait qu’on ne savait pas à l’époque exactement dans quoi on s’engageait (oui oui cette phrase a un sens )… On savait que ce serait dur, mais on ne voyait pas vraiment quels seraient les embûches et les barrières… Aujourd’hui c’est bon, on a bien fait le tour 😀 on sait assez précisément ce que ça représente en terme de blocages, de renonciations, de travail, de présence, de sacrifices familiaux ou amicaux… et ne parlons pas des carences de sommeil ou des montées de stress…
Le groupe qui n’a vraiment rien lâché tient dans les doigts d’une main, c’est les pitbulls, les teigneux ceux qui veulent que ça ait lieu coûte que coûte ! Ils me font monter les larmes aux yeux car on sait chacun ce qu’on a eu à traverser… Après le cercle s’étend avec la montée de l’intensité du dilettantisme. 🙂
Mais c’est un phénomène normal, je remercie chacun de ceux qui nous a consacré du temps même si c’est un quart d’heure, parfois c’est ce petit morceau de temps qui a fait la différence…
Dites, ces RMLL, comme on dit, c’est quoi finalement ? Si je suis nouveau (ou nouvelle) dans le milieu libriste, en quoi est-ce que ça m’intéresse ?
Les RMLL c’est un cycle de conférences, débats, ateliers, spectacles et concerts réunissant débutants passionnés et professionnels du Libre. Cette année on souhaite en outre faire venir le grand public, les gens qui n’ont même jamais entendu cette association de mots : Logiciel Libre.
Les conférenciers viennent du monde entier, c’est l’objectif principal de ces « rencontres », faire se rencontrer les gens, discuter, apprendre, partager et en sortir avec de nouvelles idées et motivations pour le logiciel libre.
Cette année on veut faire se rencontrer : le monde professionnel (la couleur fuchsia du logo), le grand public, le politique (la couleur jaune), et la communauté libriste, les enseignants, les chercheurs (la couleur verte).
Si tu viens d’arriver dans le milieu libriste c’est un immense festival autour de la question d’une philosophie née dans le numérique avec une approche éthique et participative. Si tu viens d’arriver dans le milieu libriste peut-être que tu sais déjà que ce n’est pas un fantasme, mais que ça fait une quarantaine d’années que ce monde existe et que les RMLL, elles, sont présentes en France depuis 17 ans.
Enfin c’est un moment, une semaine plutôt, assez conviviale, où l’on peut apprendre beaucoup, beaucoup de chose et s’ouvrir à beaucoup, beaucoup de domaines (par exemple l’écologie dans le numérique, ou le théâtre libre, ou alors l’internet des objets, ou même la production artistique en creative commons, ou la sécurité informatique, de l’urbanisme, de la spéléologie, du management, enfin bon, va voir le programme ou viens échanger sur les réseaux sociaux ou par mail.
De plus cette année nous avons vraiment tenu à réunir 3 publics : le grand public, le monde professionnel et la communauté libriste,
Mais du coup, ces rencontres sont réservées à un public qui connaît déjà le logiciel libre ou bien…? (demande-t-on d’une voix innocente :p)
Tant d’innocence dans cette voix 🙂
Oui et non. Non ce n’est pas réservé à un public initié parce que le premier week-end est axé découverte et initiation. De grandes figures du libre viendront en parler et un bon nombre d’interventions (la majorité en fait) sont prévues pour un public qui ne connaît pas ce milieu (ou débute). Puis pendant la semaine les activités alterneront entre « pour les pros » et « découverte, pour débuter ». De toute façon, si un moment vous êtes perdus, sachez que le monde du Libre se construit autour du partage, vous pourrez demander autour de vous. Et si vous passez sur le Framablog, vous le savez certainement déjà.
Enfin les soirées sont bien évidemment grand public, c’est des concerts et du théâtre. D’ailleurs on vous invite à venir en famille ou avec vos proches.
Ceux qui connaissent le Logiciel Libre ne seront pas en reste. Il y a un bon nombre d’interventions pour eux, certaines sont même très très techniques. De plus il y a le 4 et 5 juillet le salon pro à la Manufacture. Ce sont les entreprises du libre de la région qui se réunissent pour des rencontres professionnelles. Et pour ajouter un peu de poids dans la balance, il se trouve que le 5 juillet se déroule à la Cité du Design (donc juste en face) la 27eme journée de l’ANSSI (où la c’est les pros de la sécurité informatique qui se réunissent).
La programmation est riche, avec beaucoup d’intervenants et de conférences. Elles seront rediffusées pour celles et ceux qui ne pourront pas venir (ou qui ne pourront pas se couper en trois) ?
Normalement oui, diffusées en direct et accessible ensuite sans problème. On devrait avoir quelques conférences traduites en langue des signes aussi.
Donc pas de panique là dessus. De plus ceux qui nous ont soutenu lors du financement participatif auront droit à une clef usb élaborée par nos soins.
Vous réussissez un coup de maître en invitant Cédric Villani qui est au top de sa popularité. 😉 Comment avez-vous fait ?
C’est pas encore fait en réalité. Cédric est très motivé pour venir, mais à ce stade il ne sait pas encore si son emploi du temps pourra lui permettre de le faire.
Sinon pour le faire venir, un peu d’audace et un grand sourire, le duo gagnant qui ouvre les portes.
Les RMLL ont traditionnellement du mal à attirer le grand public. Vous avez l’air bien décidés à y parvenir. Vous parlez d’un parcours ludique. Vous pouvez en dire plus ou c’est secret ?
Eh bien depuis début juin les stéphanois voient leurs bars et lieux de sortie envahis par des outils Libres. Une bonne entrée en matière pour le week-end du 1-2 juillet où tout le monde pourra suivre un parcours dans la ville de Saint-Étienne. Les grandes places de la ville seront alors investies pour inviter le public à découvrir le Libre, en apprendre plus et échanger sur le sujet.
L’organisation des RMLL demande beaucoup de temps, d’énergie, de disponibilité de la part des associations comme Alolise, mais demande aussi des moyens techniques, de l’espace et des moyens financiers. Avez-vous eu du mal à mobiliser et faire contribuer des partenaires institutionnels (municipalité, département, région…), des entreprises et des associations ?
Tu as raison, c’est un projet qui mobilise énormément de ressources, que ce soit technique, organisationnelles, financières et même sociales ou psychologiques. C’est un peu une course d’endurance, mais sur 18 mois. Certains partenaires ont été très volontaires dès le début du projet (notamment la mairie et les autres associations libristes), du côté institutionnel c’est plus long à bouger (ce qui est normal d’ailleurs) mais au final on nous suit et on nous soutien. Par exemple la ville de Saint-Étienne nous aide beaucoup par son soutien, son aide, ses conseils, on sent de l’investissement et ça fait plaisir.
De manière générale oui on a eu des difficultés (qu’on aurait aimé ne pas avoir) mais tout rentre dans l’ordre, et c’est un peu le parcours de projets tels que celui-ci de rencontrer des obstacles. On fait front en équipe et on avance.
Combien de réunions avez-vous déjà organisées pour mettre en place cet événement, sous quelle forme ? Combien de bénévoles vont se lancer dans cette aventure?
Euh, beaucoup.
L’équipe se réunit tous les mercredis soirs depuis maintenant plusieurs mois. De plus on échange pas mal sur des réseaux tel que Mattermost. Donc réunion in vivo dès qu’on peut se retrouver sur Saint-Étienne, sinon vocale le mercredi pour ceux qui sont loin de la métropole (de Saint-Etienne 🙂 ) et compte-rendu écrit pour ceux qui ne pouvaient pas être là. Enfin, on est toute la journée à discuter ensemble par clavier interposé. C’est un peu une colocation mais sans la vaisselle.
Pour ce qui est des bénévoles, nous aurions besoin idéalement d’environ 80 personnes pour vivre une semaine sereine. Pour l’instant nous en sommes encore assez loin…
Quels sont les moments, animations, conférences que vous attendez avec impatience ? (oui, on le sait, c’est dur de choisir…)
C’est dur de choisir 🙂
Pour ma part je n’ai jamais vu Richard Stallman en vrai, donc je suis assez impatient de le voir (et aussi très angoissé de le rencontrer). Puis il y a une conférence sur la modélisation pour la spéléo (Therion, c’est long). J’adore ça, et l’intervenant, J-P Cassou, est une sacrée personnalité dans le milieu (son parcours est aussi impressionnant). Il y a aussi une intervention sur la méthode AGILE, je ne suis pas un grand fan des méthodes de management, mais justement ça me rend curieux. Si je n’aime pas, peut-être que je ne comprends pas bien ? non 🙂 ?
Les soirées : c’est une première d’avoir des soirées prévues DANS la programmation.
Les RPLL : c’est une première d’avoir « institutionnalisé » un salon pro pendant les RMLL, on sera très attentif à la réaction des gens et à leurs retours. L’atelier CHATONS le vendredi : c’est une occasion unique de réunir un maximum de GULL ayant fait le choix de devenir chatons et de passer une journée de workshop pour faire décoller ce mouvement.
Avez-vous besoin d’aide dans les jours qui viennent ? Pour faire quoi, comment, par qui et à quel moment ?
OUI ! On a besoin de bénévoles pendant l’événement, ça c’est sûr. Les lieux sont assez grands et il nous faut du monde pour accueillir le public. Nous avons ouvert un framaform pour ça.
On a aussi besoin de vous tous, visiteurs, avec la meilleure énergie sur les lieux à partir du 1er juillet. N’hésitez pas à en parler autour de vous, à en discuter entre vous que ce soit en bien ou en mal d’ailleurs, c’est comme ça qu’on avance.
Enfin nous vous invitons à nous suivre sur les réseaux sociaux, (@rmll2017 sur Twitter, Mastodon et Diaspora*). On passe aussi à la radio sur les prochaines semaines, le 22 sur Radio Loire à 11h et sur Radio Dio le 14 à partir de 19h. La semaine du 19 nous aurons plusieurs vidéos à partager aussi.
Enfin, comme toujours sur le Framablog, on vous laisse le mot de la fin !
42 ! Et vous pouvez pas encore savoir combien ce chiffre sera important pendant les RMLL2017 !
Plus sérieusement : un immense merci à tout ceux qui nous ont soutenu pour le crowdfunding, un immense bravo à l’équipe de 70 personnes qui fourmille dans l’organisation (attention c’est pas encore fini 🙂 ), à tout ceux qui nous relaient sur les réseaux, et courage à ceux qui nous supportent au quotidien (c’est bientôt terminé promis).
On se décarcasse pour faire de chouettes RMLL et on espère très sincèrement être à la hauteur.
Calimaq analysait déjà en 2012, à l’occasion de la revente de données à des tierces parties, les multiples entorses au respect de la vie privée dont Twitter est familier.
Un pas nouveau est sur le point d’être franchi, Twitter annonce qu’il va renoncer au Do Not Track.
Do Not Track ? Cette sorte d’avertissement figure dans l’en-tête de requête HTTP, et revient un peu à déclarer « Hep, je ne veux pas être pisté par vos régies publicitaires ». Emboîtant le pas à d’autres entreprises du Web bien décidées à ne pas tenir compte de cette demande des utilisateurs et utilisatrices, Twitter préfère un autre protocole hypocrite et malcommode et prend date : le DNT, c’est fini à partir du 18 juin.
18 juin… Bon sang, voilà qui nous rappelle les heures les plus sombres de… euh non, justement ce serait plutôt le contraire : voilà une date marquante de l’Histoire de France, celle du fameux Appel de Londres du général de Gaulle.
Et si nous profitions de cette coïncidence pour ranimer la flamme de la résistance à Twittter ? OK les trolls, Twitter n’est pas une armée d’occupation, mais avouez que ce serait assez drôle si nous lancions une campagne avec un appel à quitter Twitter pile le 18 juin ?
Ça vous dirait d’y participer un peu partout sur les réseaux sociaux ? Ouvrez l’œil et le bon, on va s’organiser 😉
Le billet s’achève par quelques recommandations pour échapper au pistage de Twitter. Mais la meilleure solution ne serait-elle pas de fermer son compte Twitter et d’aller retrouver les copains sur des réseaux sociaux plus respectueux comme Mastodon et Diaspora* ?
La nouvelle politique de Twitter abandonne un engagement de confidentialité longtemps maintenu
par Jacob Hoffman-Andrews
Twitter a l’intention de mettre en œuvre sa nouvelle politique de confidentialité à partir du 18 juin 2017, et, dans le même élan, reviendra probablement sur son engagement pris depuis longtemps de se conformer à la politique de confidentialité associée à l’en-tête DNT. L’entreprise préfère adopter le programme d’auto-régulation Digital Advertising Alliance, boiteux et inefficace. L’entreprise profite aussi de cette l’occasion pour ajouter une nouvelle option de pistage et deux nouvelles possibilités de ciblage, qui seront l’une et l’autre activées par défaut. Cette méthode est indigne d’une entreprise censée respecter les choix de confidentialité des personnes.
Twitter implémente diverses méthodes de pistage dont l’une des plus importantes est l’utilisation de boutons : Tweet, Suivre, et les Tweets embarqués pour enregistrer une bonne partie de votre historique de navigation. Lorsque vous visitez une page dotée de l’un de ces éléments, votre navigateur envoie une requête aux serveurs de Twitter. Cette requête contient un en-tête qui dit à Twitter quel est le site que vous visitez. En vous attribuant un cookie unique, Twitter peut construire un résumé de votre historique de navigation, même si vous n’utilisez pas Twitter. Twitter a été le premier à mettre en place ce pistage : à l’époque, Facebook et Google+ étaient prudents et n’utilisaient pas leurs boutons sociaux pour pister, dû aux préoccupations sur la vie privée. Twitter a adouci sa nouvelle initiative de pistage pour les internautes soucieux du respect de leur vie privée en adoptant Do Not Track. Cependant, quand les autres réseaux sociaux ont discrètement emboîté le pas à Twitter, l’oiseau bleu a décidé d’ignorer Do Not Track.
Maintenant Twitter envisage d’abandonner le standard Do Not Track pour utiliser l’outil « WebChoices », qui fait partie du programme d’auto-régulation Digital Advertising Alliance (DAA), c’est-à-dire une alliance d’entreprises pour la publicité numérique. Ce programme est inefficace car le seul choix qu’il permet à ses utilisateurs et utilisatrices est de refuser les « publicités personnalisées » alors que la plupart souhaitent refuser carrément le pistage. Beaucoup d’entreprises qui participent au DAA, et Twitter en fait partie, continuent de collecter vos informations même si vous avez manifesté votre refus, mais cacheront cette pratique car ne vous seront proposées que des publicités non ciblées. C’est comme demander à quelqu’un d’arrêter d’espionner ouvertement vos conversations et le voir se cacher derrière un rideau pour continuer à vous écouter.
De plus, WebChoices est déficient : il est incompatible avec les autres outils de gestion de la vie privée et nécessite une vigilance constante pour être utilisé. Il repose sur l’utilisation d’un cookie tiers de désinscription sur 131 sites publicitaires. Ce qui est incompatible avec l’une des fonctionnalités les plus basiques des navigateurs web : la désactivation des cookies tiers. D’ailleurs, même si vous acceptez les cookies tiers, votre désinscription ne durera que jusqu’à la prochaine fois où vous effacerez vos cookies, autre comportement habituel que beaucoup utilisent pour protéger leur vie privée en ligne. Sans compter que de nouveaux sites de publicité apparaissent tout le temps. Vous devrez donc recommencer et répéter votre désinscription lorsque le 132e site sera ajouté à WebChoices, ce dont, à moins de suivre la presse sur les publicitaires, vous ne serez pas au courant.
Ces problèmes avec le programme DAA sont justement la raison pour laquelle Do Not Track existe. Il est simple, compatible avec les autres mesures de protection de la vie privée et fonctionne sur tous les navigateurs.
Twitter connaît la différence entre une vraie désinscription et une fausse : pendant des années, Twitter a implémenté DNT comme une véritable option de « stop au pistage », et vous pouvez toujours choisir cette option dans l’onglet « Données » des paramètres Twitter, que vous soyez ou non utilisateur ou utilisatrice de Twitter. Cependant, si vous utilisez la nouvelle option de désinscription DAA que Twitter envisage de proposer à la place de DNT, l’entreprise traitera ce choix comme une fausse désinscription : Twitter continuera de vous pister, mais ne vous montrera pas de publicités en rapport avec les données collectées.
Que pouvez-vous faire à titre individuel pour vous protéger du pistage de Twitter ? Pour commencer, allez dans les paramètres de votre compte Twitter pour tout désactiver :
Ensuite, installez Privacy Badger, l’extension pour navigateur de l’Electronic Frontier Foundation qui, en plus d’activer DNT, essaie de détecter et de bloquer automatiquement tout comportement de pistage sur un site provenant de tierces parties. Privacy Badger remplace aussi certains widgets des réseaux sociaux par des versions statiques non-intrusives.
Twitter fait faire un grand bond en arrière à la confidentialité des internautes en abandonnant Do Not Track. L’entreprise devrait plutôt envisager une nouvelle politique de confidentialité avant le 18 juin pour conserver le respect de DNT et considérer tant DNT que DAA comme de vraies options clairement destinées à dire STOP au pistage.
Addictions en série
Gouvernements européens, il est temps de chasser le colon Microsoft
Une enquête réalisée par un consortium de neuf journalistes européens met à jour les risques qui dérivent de la dépendance des gouvernements à Microsoft — aucun n’est indemne…
Même si çà et là des efforts sont notés pour migrer vers des solutions open source voire libres, l’adversaire est impitoyable et utilise un arsenal bien rodé.
Combien faudra-t-il encore de telles enquêtes pour provoquer une prise de conscience et pour que les décisions nécessaires soient prises et mises en œuvre ?
L’addiction de l’Europe à Microsoft, un énorme risque pour la sécurité
Nous vous proposons ici une traduction de l’article paru dans Der Tagesspiegel, qui correspond à une partie de l’enquête menée par neuf journalistes européens dans leurs pays respectifs sur les relations entre Microsoft et les institutions publiques, chacun traitant de la situation particulière dans son pays (voir les différents articles déjà publiés ici). L’hebdomadaire Marianne a publié l’article de de Leila Minano dans son édition du 19 mai sur la situation française, intitulé Microsoft : menace sur la sécurité de l’État.
Le 13 mai 2017
par Crina Boros, Wojciech Ciesla, Elisa Simantke, Ingeborg Eliassen, Leila Minano, Nikolas Leontopoulos, Maria Maggiore, Paulo Pena et Harald Schumann
Le 12 mai 2017, des hackeurs ont frappé plus d’une centaine de pays à l’aide d’un outil volé à la NSA, en ciblant des vulnérabilités des logiciels Microsoft. Les attaques ont infecté uniquement des appareils fonctionnant avec le système d’exploitation Windows. Parmi les victimes, on compte plusieurs organismes publics, par exemple les hôpitaux du NHS (National Health Service, Service national de santé) au Royaume-Uni. Investigate Europe a passé des mois à enquêter sur l’extrême dépendance des pays européens envers Microsoft et les risques que cela implique pour la sécurité. Lisez notre enquête complète.
Nota bene : cet article est une traduction de la version anglaise d’un billet d’Investigate Europe publiée le 13 mai 2017. Pour savoir dans quelles publications de presse, pays et langues le billet est disponible, veuillez consulter cette page.
En général, lorsque le conseil municipal de Munich se réunit, ça n’intéresse pas grand-monde en dehors du périmètre de la ville. Mais en ce jour de février, tout est différent. Dans le grand hall du magnifique hôtel de ville néogothique, tous les sièges réservés à la presse et aux spectateurs sont occupés. Ceux qui n’ont pas trouvé de place se tiennent debout dans les allées. Des membres du conseil rapportent qu’ils ont reçu des courriels et des demandes de médias en provenance de toute l’Allemagne et de toute l’Europe.
Et pourtant l’événement semble purement technique. Pendant dix ans, des experts ont travaillé à migrer le système informatique de la ville vers des logiciels libres et ouverts. Les coûteux logiciels de l’entreprise américaine Microsoft ne sont désormais plus utilisés qu’exceptionnellement. Cela n’a pas seulement permis à la ville d’économiser plusieurs millions d’euros de frais de licences, mais a aussi rendu le système plus sûr – « un franc succès », ainsi que l’annonçaient en 2014 les responsables politiques de la ville. Mais, aujourd’hui, le maire, Dieter Reiter, et sa grande coalition rassemblant le Parti Social-Démocrate (SPD), de centre-gauche, et l’Union Chrétienne Sociale (CSU), de centre-droit, souhaitent ramener chez Microsoft les 24 000 ordinateurs de la ville.
Les débats sont animés. M Reiter et ses sympathisants ne réussissent pas à donner d’arguments convaincants – ni à dire combien pourrait coûter la transition. La décision est donc reportée. Le chef du groupe parlementaire des Verts, Florian Roth, est agacé : « Cela ne semble être rien de plus qu’un jeu de pouvoir politique, dit-il, mais un jeu à haut risque ». Il ajoute en guise d’avertissement : « Voulons-nous vraiment rendre notre administration éternellement dépendante du monopole de l’américain Microsoft ? »
Dans toute l’Europe, les systèmes informatiques des administrations publiques reposent sur les programmes de Microsoft
Le problème n’est absolument pas exagéré et ne se limite pas à Munich. Dans l’Europe entière, de la Finlande au Portugal, de l’Irlande à la Grèce, les technologies informatiques dans les administrations publiques reposent sur les programmes de l’éditeur de logiciels états-unien. Et puisque les systèmes numériques continuent à grandir et à prendre de plus en plus d’importance, les États deviennent de plus en plus dépendants de cette unique entreprise. La Commission européenne a même admis qu’elle était « concrètement captive de Microsoft ».
Quelles sont les conséquences de ce lock-in, comme on l’appelle dans le jargon technique, qui nous attache à un seul fournisseur ? Et comment les gouvernements peuvent-ils gérer cela ? L’équipe de journalistes d’Investigate Europe s’est lancée pendant trois mois dans une mission d’exploration pour établir des faits et interviewer des économistes, des responsables informatiques, des experts en sécurité et des politiciens dans douze pays européens, ainsi qu’à la Commission et au Parlement européens. Les résultats sont inquiétants.
La dépendance des États envers Microsoft :
engendre des coûts en hausse constante et bloque le progrès technique au sein des autorités publiques ;
contourne systématiquement les lois européennes en matière de passation des marchés et de règles de concurrence ;
introduit une influence politique étouffante de la part de cette entreprise ;
crée pour les systèmes informatiques étatiques, ainsi que pour les données de leurs citoyens, un grand risque technique et de sécurité politique.
Microsoft n’a souhaité répondre à aucune des questions d’Investigate Europe sur ces sujets. Et les personnels qui travaillent au sein des services informatiques des administrations savent pourquoi.
« De nombreuses administrations publiques sont tellement dépendantes de cet unique fournisseur qu’elles n’ont plus aucune liberté quand il s’agit de choisir un logiciel. Cela signifie que les États européens risquent de perdre le contrôle sur leurs propres infrastructures informatiques », avertit l’ingénieur informaticien et avocat Martin Schallbruch. Jusqu’à 2016, il était directeur du département des nouvelles technologies et de la cybersécurité au ministère de l’Intérieur fédéral allemand. Schallbruch n’est que trop familier de cette situation précaire. Si on voulait écarter ce danger et « basculer vers une architecture numérique indépendante, cela demanderait d’énormes investissements », déclare ce responsable informatique expérimenté, qui mène désormais des recherches au sein de l’école de commerce de Berlin ESMT.
Le problème n’est pas seulement grave, il est aussi complexe. Au cœur des enjeux se trouve le modèle économique de Microsoft. Le géant des logiciels, basé à Redmond dans l’État de Washington aux États-Unis, vend ses logiciels, en particulier le système d’exploitation Windows et les programmes de bureautique tels que Word, Excel, Powerpoint et Outlook, en tant que produits sous licence. Dans le métier, on qualifie ce type de logiciel de « propriétaire », ce qui signifie qu’il interdit à tout concurrent d’utiliser ses propres logiciels pour interpréter correctement les données encodées par les programmes de Microsoft. Concrètement, ce seront, par exemple, des titres, des tableaux ou des dates dont les données de mise en forme ou en page seront modifiées ou perdues.
C’est là la clé du monopole global de Microsoft – un business de rêve aussi ! Année après année, ce sont ainsi quelques 50 milliards de dollars que la multinationale empoche sous la forme de redevances de licences qui ne couvrent rien d’autre que la distribution de copies de ses programmes. Et parce que vos collègues, vos relations commerciales ou personnelles utilisent des fichiers Microsoft, cela paraît logique de faire de même, même si cela engage des frais, encore et toujours. La plupart des utilisateurs d’ordinateurs Apple, eux aussi, continuent d’acheter la suite Microsoft Office.
Les autorités administratives à la merci de Microsoft
Les administrateurs des services informatiques de l’État sont parfaitement avertis de cet état de fait. Cette monoculture présente de sérieux désavantages. Dans d’autres secteurs, le développement logiciel adhère depuis longtemps à un principe complètement différent. Google ou Siemens, par exemple, travaillent en priorité avec des programmes dits open source, en d’autres termes des programmes dont le code est partagé librement. Dans ce cadre, n’importe quel programmeur ou entreprise peut utiliser le code, à la condition que le dernier arrivé mette chaque amélioration qu’il apporte au code à la disposition de tous. Cela signifie que les entreprises ne peuvent pas gagner d’argent en vendant ce genre de logiciel. Mais, dans le même temps, elles bénéficient du travail des programmeurs du monde entier sans avoir à les rémunérer.
Quels que soient les produits, de la centrale électrique à l’appareil de radiographie, Siemens a besoin d’un ensemble étendu de logiciels. « Or, 90 % d’entre eux réalisent des tâches de pure routine », explique Karsten Gerloff, informaticien du service concerné au sein de l’entreprise. « Pour cela, nous utilisons bien sûr des solutions open source ». L’entreprise utilise du « code propriétaire » uniquement pour des fonctionnalités précises, propres aux machines de Siemens. Si tous les logiciels devaient être mis au point par des équipes de l’entreprise, « ce sont 1 000 programmeurs de plus que nous devrions employer et nous ne serions plus compétitifs », indique M. Gerloff.
Le recours à la créativité d’une masse de cerveaux de par le monde engendre une dynamique bien plus forte que celui qui serait restreint aux seuls cerveaux d’une entreprise. C’est pourquoi « l’open source est maintenant la norme dans le domaine scientifique et économique » pour Matthias Kirschner, président de la Free Software Foundation Europe (FSFE), qui plaide pour une plus grande autonomie dans l’usage des technologies de l’information. Cela s’applique autant aux smartphones qu’aux superordinateurs, systèmes de commande des machines ou serveurs web. L’ancien modèle du monopole ne concerne plus que les logiciels d’ordinateurs de bureau et les suites bureautiques.
Il n’en reste pas moins que les administrations publiques s’appuient toujours sur ce vieux monopole, et pas uniquement pour la bureautique. Il existe des milliers d’applications dont seules les autorités ont l’usage. Qu’il s’agisse d’augmenter les impôts, de payer les retraites ou de calculer le coût de la collecte des déchets, que ce soit dans la police, à la sécurité sociale ou dans les services de l’urbanisme, pour quasiment chaque service que rend l’État, il existe un logiciel opérationnel spécifiquement conçu pour cette tâche. Or, parce que le système d’exploitation Windows est utilisé partout, la plupart de ces « applications spécifiques » reposent sur ce système, mettant les autorités à la merci de son éditeur.
On a vu jusqu’où cela pouvait aller quand, à la fin de l’année 2014, Microsoft a cessé de fournir des mises à jour de sécurité pour Windows XP. Du jour au lendemain, des services publics partout en Europe se sont vus contraints de souscrire des contrats de service onéreux avec Microsoft afin de s’assurer que l’entreprise continuerait de colmater les failles de sécurité de son vieux système d’exploitation. Le gouvernement britannique a ainsi déboursé 6,5 millions de livres afin de disposer d’une année supplémentaire pour migrer ses ordinateurs vers Windows 7. Les Pays-Bas, ainsi que les länder allemands de Basse-Saxe et de Berlin, ont, eux aussi, payé plusieurs millions d’euros pour disposer d’un délai. « Il s’est passé la même chose dans toute l’Europe », confirme un expert de la Commission européenne. Et cela risque de se reproduire, vu que dans trois ans, c’en sera terminé des mises à jour de Windows 7.
La Commission européenne n’écoute pas ses propres experts
Dans le même temps, les États prennent du retard à cause du verrouillage de Microsoft. « Il n’existe pas de preuves formelles de ceci actuellement, mais il est logique de supposer que la dépendance envers un fournisseur unique ralentit le progrès technique dans le secteur public », prévient Dietmar Harhoff, directeur de l’institut Max-Planck pour l’innovation et la concurrence à Munich. Par exemple, si les municipalités pouvaient développer leurs centaines d’applications dédiées sur la base de programmes open source, chaque innovation pourrait être immédiatement utilisée par les services d’autres villes sans coût supplémentaire. « Ce potentiel est énorme pour le secteur public », selon D. Harhoff.
Dès 2012, la Commission européenne avait, par conséquent, lancé un programme au nom évocateur : « Contre le verrouillage ». L’idée était que les futurs appels d’offres publics portant sur l’achat de technologies informatiques et de logiciels ne comporteraient plus la mention explicite de noms d’entreprises et de technologies « propriétaires » de ces dernières. À la place, les administrations publiques devaient s’astreindre à demander le recours à des « normes ouvertes » accessibles à l’ensemble des fabricants et éditeurs logiciels. Ce faisant, le monopole de Microsoft disparaîtrait au fil du temps dans la mesure où les problèmes de compatibilité ne se poseraient plus : les fichiers pourraient être lus par des logiciels concurrents, et cela sans perte de données. Si tous les services administratifs publics utilisaient les mêmes formats ouverts, on économiserait le prix des licences. « Les normes ouvertes créent de la concurrence, mènent à l’innovation et font économiser de l’argent », expliquait la commissaire à la Concurrence d’alors, Nellie Kroes. Selon ses experts, « le manque de concurrence » dans le secteur informatique et télécoms « coûte à lui seul 1,1 milliards d’euros par an au secteur public ».
Mais l’inertie des bureaucrates de l’État a eu raison des bonnes intentions, et l’initiative n’a abouti à rien. Pourtant, la législation européenne définit désormais des règles précises. Les administrations publiques nationales sont tenues de passer par des appels d’offres européens pour toute commande dont le montant excède 135 000 euros. Pour les autres organismes publics, cette règle s’applique pour des montants supérieurs à 209 000 euros. Quand ils achètent des logiciels standards pour leurs administrations, les gouvernements des États membres, comme un seul homme, passent outre la loi en vigueur et privilégient le fournisseur habituel Microsoft.
La mise en concurrence remplacée par de curieuses procédures
Une curieuse façon de procéder. Sans passer d’appel d’offres publics, les administrations négocient des réductions avec l’entreprise états-unienne et concluent des contrats-cadres sur cette base. Tous les groupements publics peuvent ensuite en profiter. Dans les offres ultérieures, ils cherchent uniquement des revendeurs qui leur vendront des licences Microsoft selon ces conditions. Il n’y a de facto aucune concurrence pour ces contrats publics.
En Allemagne aussi. En 2015, le ministère de l’Intérieur a convenu de nouvelles « conditions contractuelles » avec la filiale irlandaise de Microsoft, d’où la firme conduit ses affaires européennes pour optimiser ses impôts. Les rabais identifiés dans le nouvel accord peuvent être utilisés par tous les pouvoirs publics, du ministère fédéral jusqu’à la petite municipalité. La ville de Dortmund a ainsi passé un appel d’offres, par exemple pour trouver un « distributeur pour le contrat BMI de licences Microsoft en volume ».
« C’est comme si l’État publiait une offre pour acheter des voitures, mais uniquement de revendeurs Volkswagen », se moque l’avocat néerlandais Matthieu Paapst, dont le doctorat à l’Université de Groningen a porté sur l’achat de logiciels dans le secteur public. Sa conclusion : « Se fournir en produits Microsoft, pour une administration publique, sans passer d’appel d’offres ouverts, viole la législation européenne en vigueur ». En vérité, selon l’avocat, la Commission européenne devrait engager des poursuites contre ce phénomène. L’unique raison pour laquelle elle s’en garde bien, c’est qu’elle n’applique pas elle-même les recommandations.
En effet, la Commission européenne a un contrat exclusif avec Microsoft, valable pour toutes les institutions de l’UE – elle ignore de ce fait les recommandations de ses propres experts. C’est aussi « parfaitement légal » se défend Gertrud Ingestad, qui est responsable de la Direction générale pour l’Informatique (DG Digit), dans une interview à Investigate Europe. Il n’y aurait « pas d’autres possibilités » de garantir la continuité du travail de l’Union européenne. Et, dans ce cas, la législation permet explicitement le recours à une « procédure de négociation » non publique. Mais ce n’est pas exact : cette exception est explicitement valable « seulement quand il n’existe pas d’alternative raisonnable ou de solution de remplacement », selon l’article 32 du livret de recommandations de l’UE. Et c’est justement ce que la Directrice générale G. Ingestad et ses collègues ne peuvent pas prouver. Il existe des alternatives viables.
Le général italien Camillo Sileo, par exemple, a beaucoup à dire sur ce sujet. Ce militaire, qui travaille au ministère de la Défense, à Rome, reçoit dans une petite bibliothèque. Là, un sourire aux lèvres, d’une voix douce, il parle de son projet comme d’une affaire mineure. Pourtant, il est à la tête d’une opération peu commune, voire révolutionnaire, l’opération «Libre Défense ». Son objectif est de migrer les quelques 100 000 ordinateurs de l’armée italienne vers des logiciels open source. « Nous avons constaté que les deux types de logiciels sont capables de satisfaire de la même façon nos besoins », explique le général. « Voyez par vous-même », dit-il en montrant à l’écran la première page d’une étude récente du ministère. « Ici, vous avez un fichier Microsoft Word », dit-il avant de cliquer, « Et, ici, la version open source LibreOffice. Le logo, le titre, la structure, tout est là. Aucune différence, » dit-il, radieux. «La migration permettra une économie de 28 millions d’euros d’ici 2020 », a prévu le général. Par temps de crise en Italie, l’armée, elle aussi, doit faire des économies.
Le fait est que si la migration s’est déroulée sans accroc jusqu’ici, c’est grâce à une solide planification, selon le général. Le logiciel libre de remplacement peut satisfaire tous les besoins, mais il se manipule différemment et les utilisateurs doivent donc être formés. Pour cela, des volontaires de l’association « LibreItalia » ont formé des personnels de tous les services de l’armée devenus à leur tour formateurs et conseillers pour former leurs collègues. Ainsi, il y aura bientôt assez d’experts dans tous les services de l’armée. « Bien communiquer est un préalable à la réussite du projet », précise le général Sileo. « Si les gens comprennent l’objectif du changement, ils sont capables de surmonter toutes leurs résistances mentales ». Il n’a pas encore été décidé si l’armée migrera aussi son système d’exploitation un jour, pour être totalement indépendante de Microsoft, mais la question sera examinée de très près », accorde le général Sileo.
La gendarmerie nationale française, l’une des deux forces de police nationales, a déjà mené à bien une opération de migration démarrée dès 2005. Aujourd’hui, 72 000 ordinateurs de la gendarmerie nationale sont équipés d’une version particularisée du système d’exploitation Linux, avec LibreOffice comme application principale. La gendarmerie affirme que l’économie réalisée depuis le début du projet s’élevait en 2014 à quelques 20 millions d’euros. Précisons que jusqu’à cette année-là, la migration s’était déroulée pratiquement dans le secret. « La migration vers Linux pourrait être vue par Microsoft comme une menace de son monopole », peut-on lire dans une note interne obtenue par Investigate Europe. Cela aurait pu « déclencher des actions visant à discréditer cette politique de la gendarmerie ». C’est pour cette raison que la migration s’est effectuée « sans publicité » jusqu’au moment où le processus est devenu irréversible.
Les institutions mettent la pression sur ceux qui se désengagent
Ces précautions étaient fondées. Encore aujourd’hui, 12 ans après le lancement du projet, la direction de la gendarmerie est sous « pression permanente » pour faire marche arrière, rapporte un membre de l’équipe du département Informatique et Télécom du ministère de l’Intérieur à Paris, qui ne souhaite pas être nommé de peur de représailles. « Chaque jour de fonctionnement du système est une gifle pour notre administration qui maintient que seul Microsoft fonctionne correctement » dit-il.
Le bras de fer entre le ministère de tutelle et les partisans de Linux au sein de la gendarmerie est confirmé par une lettre du ministre, d’avril 2016, qu’Investigate Europe a eue entre les mains. Dans cette lettre, le ministre demande aux fonctionnaires responsables de la gendarmerie un retour définitif et intégral à Windows – prescription dont la direction de la police n’a pas tenu compte jusqu’à présent. Interrogé sur la question, un porte-parole faisait savoir « avec regret » qu’il était dans « l’incapacité de fournir une explication ». En parallèle, cependant, il écrivait de façon clairement subversive que la migration vers le logiciel libre « se passait en douceur et pour longtemps ». « Nous avons choisi Linux parce que le rapport coût/bénéfice est meilleur et, au final, nous gagnons en indépendance».
Ce conflit est caractéristique de ce que vivent partout les pionniers d’une émancipation vis-à-vis du monopole. Partout en Europe, il y a eu et il y a des centaines d’administrations et de municipalités qui ont migré ou tentent de migrer vers des logiciels open source : que ce soit l’administration des retraites de l’État en Suède, les écoles de Jaworzno en Pologne, les services municipaux de la ville de Rome, l’arrondissement de Camden à Londres, la grande ville de Nantes en France, le gouvernement de la communauté autonome d’Estrémadure en Espagne ou encore la ville de Vieira do Minho au Portugal. Ces projets sont à ce jour autant d’îlots perdus dans l’océan Microsoft. Pour cette raison, nombreux sont ceux qui subissent régulièrement des pressions pour rentrer dans le rang, parce que les produits et les lobbyistes de Microsoft sont omniprésents et peuvent créer de nouveaux ennuis.
Des lobbyistes à l’œuvre au sein des ministères
Dans le différend concernant l’administration municipale de Munich, ce qui se passe en coulisses est aussi un élément à prendre en considération. Dans cette ville, le maire centre-gauche SPD a besoin des voix du centre-droit CSU. Or, ce dernier est étroitement lié à l’entreprise étasunienne. Dorothee Belz, par exemple, vice-présidente chez Microsoft Europe jusqu’en 2015, fait partie du comité exécutif du conseil économique du parti conservateur.
Des épisodes identiques « d’allers-retours » se constatent partout en Europe. En Italie, un ancien directeur chez Microsoft pilote aujourd’hui la « transformation numérique » des affaires de la ville de Milan. Au Portugal, c’est un cadre de Microsoft qui a organisé la campagne pour l’élection du président conservateur. Plus de six cadres et directeurs ont des liens étroits avec des ministres et des politiciens. Dans le même temps, des techniciens de Microsoft travaillent directement dans les services informatiques des administrations. Au moins cinq d’entre eux possèdent une adresse électronique qui les identifie comme s’ils faisaient partie du personnel administratif, ce qui leur permet de « faire leur travail de lobbying pour Microsoft à l’intérieur de l’administration », affirme un fonctionnaire à Investigate Europe. En Allemagne aussi, l’accès aux ordinateurs du gouvernement est largement ouvert. Il existe plusieurs milliers d’experts dans les centres informatiques du gouvernement, y compris des personnels de Microsoft et ses partenaires, indique l’ex-responsable informatique du gouvernement fédéral, Martin Schallbruch.
Microsoft peut également instrumentaliser sans restriction les écoles et les universités à des fins marketing. Les écoliers et les enseignants reçoivent en général les produits Microsoft gratuitement, de sorte que les enfants grandissent sans rien connaître d’autre. La stratégie veut qu’après leurs études ils payeront des frais de licence pendant le reste de leur existence. « Une telle méthode est un classique du modèle « crack », utilisé dans le trafic de drogue », explique Rufus Pollock du Centre pour la propriété Intellectuelle et les lois de l’information (CIPIL) à l’Université de Cambridge. Les produits sont gratuits jusqu’à ce que les utilisateurs soient rendus accros.
Cela démontre que les gouvernements européens approuvent tacitement leur propre dépendance envers Microsoft. Ainsi que le formule Anna Strezynska, ministre polonaise du numérique : « Oui, nous sommes dépendants, mais je pense que c’est raisonnable ».
Cela signifie aussi que ces décideurs exposent leurs pays et leurs citoyens à d’innombrables risques de sécurité, tant techniques que politiques.
Ce n’est pas un hasard si les attaques informatiques majeures qui, ces dernières années, ont pris pour cible des institutions de l’État comme le Bundestag allemand ou encore la Commission et le Parlement européens, ont systématiquement exploité des failles de sécurité des logiciels Microsoft. La suite bureautique de Microsoft, notamment, et les fichiers qu’elle permet de créer, sont une des portes d’entrée privilégiée par les hackeurs, selon le rapport 2011 du Bureau fédéral allemand pour la Sécurité des technologies de l’information (BSI). D’après ce rapport, la moitié des attaques ciblées avait pour origine des documents infectés de type Microsoft, tels les fichiers « .docx », dans lesquels les hackeurs avaient dissimulé leur logiciel malveillant. « La particulière complexité de ces fichiers facilite la tâche des hackeurs », affirment les experts du BSI. Ces fichiers contiennent bien plus de code que nécessaire, ne serait-ce que pour empêcher d’autres logiciels de les lire facilement. « Ce constat est toujours d’actualité, confirme Joachim Wagner, porte-parole du BSI. Le format des fichiers Microsoft est bien plus complexe que celui des logiciels open source, ce qui augmente d’autant la « surface d’attaque» de la cible pour les hackeurs ».
Italo Vignoli, un des experts qui travaillent sur le logiciel libre LibreOffice, l’a testé pour Investigate Europe avec un simple texte de 5 500 caractères. Sous la version courante de Microsoft Word, le code du fichier couvre 390 pages. Par comparaison, le format libre OpenDocumentText ne fait que onze pages.
Les programmes de Microsoft sont confus et vulnérables
La particulière vulnérabilité des logiciels de bureautique de Microsoft se voit au nombre de failles de sécurité. « Aux États-Unis, le National Institute for Standards and Technology (NIST, Institut national des normes et de la technologie) a repéré 188 nouvelles failles dans la suite Microsoft Office au cours des trois années précédant le mois d’avril 2017. Les trois quarts de ces failles font partie de la catégorie des failles les plus graves. Sur la même période, on n’a découvert que onze failles dans LibreOffice. D’après M. Vignoli, cela n’a rien à voir avec le fait que LibreOffice est moins répandu. Simplement, malgré tous leurs efforts, même les meilleurs experts n’ont pu dénicher d’autres failles dans LibreOffice.
Cela n’a rien de surprenant. N’importe quel utilisateur chevronné peut contrôler le code source de LibreOffice. Pour l’un des meilleurs experts européens, Michael Waidner, directeur de l’institut Fraunhofer pour la sécurité des technologies de l’information, c’est la clef de voûte : « Si l’Union européenne ou un État entend vraiment préserver sa souveraineté, il doit être en mesure de vérifier que ses matériels informatiques et ses logiciels font bien ce qu’ils sont censés faire et rien d’autre, explique-t-il. Cela ne revient pas à dire que l’Europe doit devenir autonome. « Mais nous devons faire en sorte que nos experts aient accès à toute l’information requise pour tester les logiciels là où la sécurité est en jeu. Il est essentiel d’avoir accès au code source », exige l’expert. Sans cela, affirme-t-il, il ne peut y avoir de « souveraineté numérique ».
Or, c’est précisément ce que Microsoft refuse de fournir. L’entreprise a créé un « centre de la transparence», à Bruxelles, où les représentants gouvernementaux sont invités à inspecter le code source. Mais le BSI allemand juge la proposition insuffisante. « Microsoft doit satisfaire à un éventail complet de prérequis techniques pour créer un climat de confiance », a expliqué le BSI au magazine spécialisé C’t. Or Microsoft n’autorise même pas les experts à conserver leurs notes écrites et exige la signature d’un accord de non-divulgation, a confirmé un expert de la BSI à Investigate Europe.
Même si une inspection du code était possible, les conclusions en seraient probablement obsolètes dès la mise à jour suivante. En outre, le risque que représentent les produits Microsoft n’est pas seulement technique, il est aussi politique.
Déclasser l’Europe au rang de colonie numérique
L’entreprise est soumise aux lois des États-Unis. Cela signifie qu’à tout moment l’administration de ce pays peut la forcer à collaborer afin d’accéder aux données des citoyens et des pouvoirs publics d’autres pays. Pour satisfaire cet objectif, il existe ce qu’on appelle « la lettre du renseignement » dans la loi américaine, autorisant des tribunaux secrets à délivrer de telles instructions, avec obligation de se taire sous peine de poursuites légales. Les révélations de l’ancien agent Edward Snowden ont montré que les services de renseignement américain font un usage démesuré de leurs pouvoirs. Les documents qu’il a publiés révèlent que Microsoft coopère étroitement avec les services secrets de la NSA.
Un document de la NSA du 8 mars 2013 explique avec force détails que Microsoft a ouvert aux autorités américaines l’accès à ses services dans le nuage (cloud), autrement dit aux dispositifs de stockage de données auxquels recourent un nombre grandissant d’organisations privées, mais aussi publiques, qui confient ainsi à un prestataire externe leurs données informatiques par souci d’économiser sur les coûts de leur informatique interne. Les documents de Snowden ont aussi révélé que la NSA utilise une cyber-arme, Regin, en collaboration avec ses partenaires britanniques pour espionner la Commission et le Parlement européens via une faille de sécurité du programme Windows.
Wikileaks a publié des documents secrets qui prouvent que ce n’était pas un cas isolé. Ils montrent que la CIA a même développé un véritable arsenal de logiciels malveillants (malwares) ciblant exclusivement les logiciels de Windows. La NSA n’est pas en reste, un de ses outils exploitant, ainsi que l’a révélé récemment le groupe de hackeurs Shadow Brokers, quatre failles de sécurité du système d’exploitation Windows inconnues jusqu’alors (vulnérabilités Jour Zéro).
De fait, l’utilisation de produits Microsoft par les institutions de l’État « n’est plus compatible avec un État de droit », affirme le juriste et député Vert du Parlement européen Jan Philipp Albrecht. Beaucoup le considèrent comme le père de la loi européenne sur la protection des données. Albrecht précise qu’il y a pléthore de données individuelles stockées dans des ordinateurs appartenant à l’État, tels les montants acquittés pour les impôts, l’état de santé, les fichiers de police et les données sociales. « Cependant, les institutions ne peuvent garantir la confidentialité de ces données tant qu’elles travaillent avec des logiciels dont elles n’ont pas le contrôle », prévient Albrecht. Il va falloir changer cela, sous peine de « transformer l’Europe en une colonie numérique ».
M. Albrecht n’est pas le seul à exprimer ce genre d’opinion. En 2014, après les révélations d’E. Snowden, une grande majorité du Parlement européen appelait les États membres de l’UE à s’unir pour « développer des compétences-clés autonomes dans le domaine des technologies de l’information », qui devraient « être basées sur des standards ouverts et des logiciels open source », de manière à pouvoir « être testées ».
Un an plus tard, le Parlement nouvellement élu appelait à nouveau à l’adoption d’« une stratégie européenne pour l’indépendance du secteur des technologies de l’information ». Il indiquait aussi comment cela pouvait être acté : il est important d’établir « un code source publiquement accessible comme critère de sélection obligatoire dans toutes les procédures d’attribution des technologies de l’information du secteur public », ainsi que le préconisait l’expert en sécurité Michael Waidner.
Si l’open source devenait la norme obligatoire pour le développement logiciel, « les acteurs européens deviendraient immédiatement compétitifs ».
Si cela se faisait, M. Albrecht pense qu’il y aurait un effet sur les technologies de l’information « semblable à celui du projet Airbus ». De la même manière que l’Europe s’est autrefois affranchie de Boeing, elle pourrait s’affranchir aujourd’hui de sa dépendance à Microsoft, et cela pour un coût bien moindre, pense-t-il ; si l’open source devenait la norme obligatoire pour le développement logiciel, « les acteurs européens deviendraient immédiatement compétitifs, affirme Albrecht. Après tout, ajoute-t-il, les solutions alternatives sont développées depuis longtemps ».
Pourtant, aujourd’hui encore, les gouvernements européens s’avèrent incapables de chiffrer le montant du tribut versé au « seigneur » des licences de Redmond, aux États-Unis. De la Norvège au Portugal, la réponse des administrations compétentes aux demandes d’information d’Investigate Europe a invariablement été qu’il n’existe pas de statistiques en la matière. En Allemagne, le bureau des achats du ministère fédéral de l’Intérieur a précisé ne pouvoir fournir qu’une « estimation » des dépenses en licences Microsoft des autorités fédérales. Dix semaines après la demande, le bureau n’était toujours pas en mesure de fournir ces données.
Pierre Audoin Consultants, société spécialisée dans l’analyse des marchés IT, estime que, globalement, en Europe, Microsoft a tiré près de 2 milliards d’euros de revenus de ses opérations avec le secteur public pour l’exercice fiscal 2015-16. Cela voudrait dire que ce sont au moins 20 milliards d’euros de recettes fiscales européennes qui partent vers l’entreprise étasunienne tous les dix ans, assurément assez pour que l’Europe développe sa propre industrie du logiciel.
Jusqu’à présent, les dirigeants européens ne veulent rien entendre d’un « projet Airbus » pour le secteur des technologies de l’information. Andrus Ansip, commissaire européen au marché unique du numérique ne veut même pas en parler. Son directeur de cabinet, Roberto Viola, botte en touche en déclarant que ce n’est pas là leur principal souci
Les entreprises américaines de l’Internet, de leur côté, n’ont pas besoin d’un dessin. Que se soit Facebook, Google ou Amazon, leurs infrastructures informatiques fonctionnent exclusivement avec des logiciels libres à en croire leurs porte-paroles. C’est le seul moyen qu’elles ont de se protéger. C’est bien aussi l’intention des dirigeants chinois, qui ont commencé à se libérer du monopole de Microsoft après le scandale de la NSA.
Sous l’égide de l’Académie nationale d’ingénierie chinoise, un système d’exploitation ouvert, Neokylin, a été développé, accompagné de sa suite bureautique. L’opération de « déwindowsisation », comme l’appelle le professeur Ni Guangang, chef du projet, concernera au premier chef les secteurs les plus sensibles en termes de sécurité. C’est pourquoi l’usage de programmes libres/ouverts est en train de devenir obligatoire pour les militaires, l’administration d’État et le secteur financier. L’opération devrait se terminer en 2020.
La Chine prend le chemin de l’indépendance. Que fait l’Europe pendant ce temps-là ?
Cet article est une traduction de la version anglaise d’un billet d’Investigate Europe publiée le 13 mai 2017. Pour savoir dans quelles publications de presse, pays et langues le billet est disponible, veuillez consulter la page suivante.
Grise Bouille, tome 2 : lisez des BD moches !
Simon Giraudot nous les brise menu. Quand on a son talent, on arrête de faire le modeste, de prétendre à l’autodérision, de se faire tout petit face aux grands maîtres qu’on a adulés depuis tout petit (« Ahhh Gotlib, quel génie ! », etc.).
Mais c’est plus fort que lui : cette année encore le voilà qui récidive avec son pourtant génial Grise Bouille. Tiens, rien qu’avec un nom pareil, le gars se tire une roquette dans le pied. Passons. Et en plus c’est le même titre que le premier, juste « Grise Bouille 2 », même pas un effort pour le vendre, genre : « Grise Bouille revient, il va vous en coller plein la tronche », « Grise Bouille, l’alarme absolue contre la connerie » ou quelque autre slogan un peu chatouilleur.
Et les textes.
Vous vous rendez compte des textes ? Ce mec écrit avec une acuité et une verve dont nous sommes tous jaloux et il insère ça un peu au hasard dans des bulles et des sortes d’éditoriaux entre les dessins au lieu de chroniquer l’actu dans Fakir ou Rue89. Franchement, Simon, faut que t’arrêtes de pas te la péter.
Bon mais à quoi ça sert qu’on lui dise ça ? il est trop buté l’animal, nous on n’y arrive plus.
À moins que vous peut-être…
Vous qui allez télécharger et/ou acheter ce nouveau volume depuis sa page Framabook, vous, qui suivez ses petits chefs-d’œuvres depuis des années et vous qui peut-être allez au contraire les découvrir (tous ses albums sont disponibles chez Framabook), vous avez un rôle à jouer : lisez, diffusez, détournez ses albums, faites-les connaître et apprécier, inondez ses comptes twitter, mastodon et framasphère de compliments dithyrambiques, érigez à sa gloire un monument d’éloges, bref traitez-le comme il le mérite !
Nous, on sait plus quoi lui dire à part lui poser des questions…
Hello Gee !
Tu présentes le tome 2 de ton blog, qui rassemble les articles de l’année 2016… alors ce 2016, c’est un bon cru ?
Le tome 2, c’est moins d’articles mais plus de pages que le tome 1 : des articles souvent plus longs, plus étayés, qui prennent leur temps pour poser les choses. Je pense que c’est aussi une BD qui « se cherche » moins que pendant la première année. Il y a un côté plus affirmé, plus assuré. Quant à savoir si c’est un bon cru… c’est au lecteur de juger, non ?
À chaque bilan/rétrospective d’une année, on a envie de se dire « ouais, ça peut pas être pire, l’an prochain ça ira mieux… » Ce coup-là aussi ?
C’est plus compliqué que ça. D’un côté, faut pas se leurrer, c’est la merde intégrale, entre l’urgence sociale et environnementale que personne ne semble prendre en compte sérieusement (t’as qu’à voir les résultats du 1er tour de la présidentielle) et cet espèce de fatalisme qui s’insinue chez tout le monde. Et en même temps, il reste ce mouvement de fond, diffus, de gens qui s’informent et qui en s’informant se font de moins en moins avoir ; de gens qui essaient de construire, de faire des choses différemment ; de gens qui essaient d’insuffler un peu d’espoir dans cette société et, au passage, d’en retrouver pour eux-mêmes.
Et perso, le cynisme de convenance, j’ai donné, merci. Je préfère me concentrer sur ce qu’on va pouvoir faire, nous les gens, ensemble, ça me permet au moins de me lever le matin sans avoir envie de me recoucher immédiatement. Ça ne m’empêchera pas de gueuler sur les politiciens, hein, mais c’est pas mon mètre-étalon de ce qui est important dans notre société (sinon, t’imagines dans quelle merde on serait). Bref, pendant que les dominants encouragent un monde qui court à sa perte, nous on continue d’essayer autre chose. Et le pire, c’est que si ça trouve, on va y arriver.
Mais bon, Grise Bouille ne parle pas que d’actualité, c’est même une petite part de ton blog… D’ailleurs qu’est-ce que tu préfères préparer : un article de vulgarisation informatique ou un article fun et fan sur Star Wars ou Harry Potter ?
Je vais te dire, ce que je préfère, ce sont les articles complètement débiles comme « Le grand cerf et le lapin » ou encore « Dragon & fine aigrette ». Parce qu’en fait, quand je commence à écrire un truc comme ça, y’a une espèce de liberté, je sais que je peux partir dans les délires les plus idiots et pousser le concept à fond. Peu importe, l’idée c’est qu’on se marre un peu plus à chaque case. Et c’est vachement jouissif d’écrire des trucs comme ça : c’est typiquement le genre d’article où je me marre moi-même en relisant (ouais je sais, faut pas dire ça normalement, ça fait mec content de lui, mais j’assume).
Le revers de la médaille, c’est que trouver un sujet qui me permette de partir dans des délires du genre, c’est pas si simple, du coup il y a assez peu d’articles comme ça. En général je fais comme Gotlib, je prends une histoire de la culture populaire / traditionnelle et je la triture dans tous les sens.
Note que ce sont aussi des articles qui sont en général moyennement lus / partagés (beaucoup moins que les articles politiques et scientifiques), donc peut-être que ça ne fait marrer que moi.
Euh l’autre ! Pourquoi tu fais des efforts pour qu’on te prenne pas au sérieux alors que tu dis des choses importantes ? Tu veux nous faire croire que tu fais seulement des petits mickeys ?
Enfin bon, j’ai jamais bien compris cette espèce de loi que certains voudraient mettre en place et qui dit qu’un dessin enfantin ne peut porter qu’un discours enfantin. Vous avez déjà regardé South Park ? Le dessin, sur mes blogs, ça a toujours été un support pour porter un discours : les deux traits tracés à l’arrache sur une tablette graphique minuscule, ça veut juste dire que je suis pressé de dire ce que j’ai à dire. Je pense que si je n’avais pas su dessiner du tout, j’aurais juste fait un blog avec du texte. D’ailleurs ça m’arrive de me passer des dessins.
Les dessins, l’avantage, c’est que ça apporte aussi une distance : Grise Bouille, c’est pas un type qui a la science infuse qui vous déverse la vérité absolue, ce sont des petits personnages qui taillent le bout de gras et à vous de voir ce que vous voulez en retirer. Oui je sais, ça sonne un peu comme « amis lecteurs, démerdez-vous », mais après tout c’est libre, ni repris ni échangé, et sans garantie.
Y’a une vraie évolution dans ton blog, on sent que tu as une envie de plus en plus appuyée que ton lectorat se détende ET réfléchisse… L’un va avec l’autre ?
Je pense que c’est dans la continuité du précédent. L’un ne va pas nécessairement avec l’autre, mais ça peut aider : tu retiens toujours mieux les paroles d’une chanson que tu aimes bien que les intégrales et dérivées usuelles… alors si ta chanson peut parler de maths, quelque part, ça peut t’aider à les retenir. Après, dans le blog, l’un va parfois sans l’autre aussi : les articles politiques de cette année sont parfois assez peu humoristiques tellement ils témoignent d’un sentiment d’écœurement ; à l’opposé, certains articles purement humoristiques n’ont pas franchement de valeur de réflexion (encore que 😉 ).
Dis donc, tu te fous de la gueule de tout le monde, finalement ! Tu serais pas un peu anarchisse ?
Ah parce que l’anarchisme, tu résumes à ça à se foutre de la gueule de tout le monde ? C’est vachement réducteur, non ? Disons que l’humour me semble avoir plus de sens et de poids lorsqu’il est dirigé contre les dominants et les puissants. De ce point de vue, il y a effectivement un aspect de refus de l’autorité (ou des autorités, voire même des figures d’autorité). Je vais pas jouer au chevalier blanc, moi aussi j’me suis marré devant les Deschiens et les Bidochons, mais j’ai de plus en plus de mal avec ça : y’a un vrai côté mépris de classe dans la moquerie du plus pauvre, du moins cultivé, du plus beauf, du plus prolo (rayez les mentions inutiles) qui, à mon sens, joue dans le sens du système qui a tout intérêt à monter les gens les uns contre les autres en bas de l’échelle.
Alors que c’est tellement plus amusant de se foutre de la gueule de la tripotée de branquignols qui ont les clefs du dit système, les Macron, les Hollande, les Sarko, les Arnault, les Bettencourt, etc. Se moquer d’un con, c’est bien, se moquer d’un con qui a du pouvoir, c’est mieux. Après, on va pas péter plus haut que nos culs (de peur d’avoir du caca derrière les oreilles), c’est pas avec mes gribouillages et mes jeux de mots pourris qu’on va faire la révolution, m’enfin si ça peut en donner l’ambiance (festive, cela va de soi), c’est déjà ça.
Non franchement, il est bien ton bouquin, là… mais c’est un peu mal dessiné, quand même, hein ? Genre bâclé, quoi.
J’suis bien d’accord, heureusement que la version numérique est gratos, sinon t’imagines le scandale ? D’ailleurs heureusement que Pouhiou a fait la préface, c’est ma caution intellectuelle pour arriver à vendre cette connerie. (Note de Pouhiou : « Eh ben on a pas le cul sorti des ronces. Pourtant mon cul… »)
Bon, après, même le titre dissimule à peine le fait que ce sont des gribouillages, alors faites pas comme si vous étiez pas prévenus. Pis au moins, vous souffrirez pas du syndrome d’infériorité en lisant mes bouquins, y’a un côté « dédramatisons le dessin ». Moi par exemple, j’ai arrêté de regarder les BD de David Revoy, attends, c’était trop joli, ça me déprimait en me renvoyant à ma propre médiocrité.
Framasoft sur les routes, et sur un nouveau T-shirt !
Un nouveau T-shirt Framasoft (et le mugounet qui va avec) pour briller lors des événements où nous pourrons nous rencontrer sous le soleil du printemps… et de l’été !
Nouveau T-shirt : la route est longue…
Soyons franc·he·s : on n’est pas foutu·e·s de faire un T-shirt.
Voilà plus de deux ans qu’on a changé de logo, et… rien. Ah ça, pour dégoogliser, y’a du monde, hein ! Mais quand il s’agit de pondre un visuel, contacter des fournisseurs, se mettre d’accord sur un modèle, créer et gérer un stock… y’a plus un GNU à l’horizon !
Alors nous avons choisi la solution de facilité et lancé une campagne chez Keewi.io, le « Ulule du T-shirt ». Le principe : on propose un visuel. Nous, on a choisi de le mettre sur un T-shirt unisexe et sur un mug. On s’est dit comme ça : « Si d’ici le 22 mai, y’a au moins 100 produits pré-commandés, la production est lancée. Sinon, tout le monde récupère ses sous et rentre chez soi. »
Le 3 mai, nous avons commencé à en parler… exclusivement sur les réseaux sociaux Libres : notre compte Framasphère*, et notre fil Framapiaf. En 24h, les 100 premières pré-commandes étaient atteintes ! Dès le 9 mai, on a fait circuler l’info sur notre fil Twitter et notre page Facebook. Et aujourd’hui : on vous en parle ici !
Après le 22 mai : y’en a plus !
Ben oui, c’est une campagne, et une campagne, ça se termine. Nous, le principe nous va assez bien… vu qu’on expérimente !
L’avantage pour nous est double : ne pas avoir toute la production/vente/distribution à gérer (donc avoir plus de temps pour Dégoogliser), et savoir si ce genre de goodies vous intéressent vraiment, ou si c’est juste un plaisir de l’entre-soi… Et pour l’instant, c’est un succès, plus spécifiquement un succès offert par les « vrai·e·s fans » de Framasoft, a priori.
Ce procédé nous offre en plus l’occasion de faire un prix tout petit (13 € 37, c’est pas un hasard). Nous savons que c’est pas avec des T-shirts qu’on va remplir la marmite, du coup on a choisi de pas beaucoup marger dessus. Là, c’est pour se faire plaisir et pour pouvoir porter des couleurs et une devise qui nous parlent, même si les cordons de la bourse sont assez serrés.
Alors voilà, c’est pas parfait hein, c’est une expérimentation, y’a des inconvénients et défauts, mais c’est mieux que ce que nous faisions jusqu’à présent (à savoir : rien depuis deux ans). Du coup, si vous en voulez, faut se bouger : vous avez jusqu’au 22 mai !
À propos de route : on sera dessus !
Avec les beaux jours arrivent les festivals qu’on aime bien et où on se retrouve avec délices.
Avec seulement 30 membres et 7 salarié·e·s, notre micro-association a beau se plier en quatre, on ne peut pas être partout !
Néanmoins, vous pourrez nous retrouver…
à Lyon (69), les 13 et 14 mai (atelier et conf Dégooglisons, atelier et conf Minetest, stad), lors du festival Super Demain ;
à Villeurbanne (69), les 14 et 15 mai (dédicaces des BD de Gee) lors du festival Bédéologies ;
à Selles sur Cher (41) les 1er et 2 juin, pour un village du Libre (stands, confs, et bien plus et avec les ami·e·s libristes !) au festival les Geek Faeries ;
à Genève (Suisse) le 7 juin pour une conférence « les alternatives informatiques » dans le cadre d’Alternatiba au fil de l’année ;
à Boulogne-sur-mer (62), le 24 juin, pour une conférence Dégooglisons Internet ;
Alors vu que la voie est Libre, on espère qu’elle sera assez dégagée pour que nous nous rencontrions sans encombres !
Quand les recommandations YouTube nous font tourner en bourrique…
Vous avez déjà perdu une soirée à errer de vidéo en vidéo suivante ? À cliquer play en se disant « OK c’est la dernière… » puis relever les yeux de votre écran 3 heures plus tard… ?
C’est grâce à (ou la faute de, au choix !) l’algorithme des recommandations, une petite recette qui prend plein d’éléments en compte pour vous signaler les vidéos qui peuvent vous intéresser.
Guillaume Chaslot a travaillé sur cet algorithme. Il a même créé un petit outil open-source pour le tester, afin de valider sa théorie : ces recommandations nous pousseraient de plus en plus vers les « faits alternatifs » (ça s’appelle aussi une légende urbaine, un complot, une fiction, du bullshit… vous voyez l’idée.)
Le groupe Framalang a décidé de traduire cet article passionnant.
Ne soyons pas complotistes à notre tour. Cet article ne dit pas que Google veut nous remplir la tête de mensonges et autres légendes numériques. Il s’agirait là, plutôt, d’un effet de bord de son algorithme.
Nous ne doutons pas, en revanche, qu’un des buts premiers de Google avec ses recommandations YouTube est de captiver notre attention, afin de vendre à ses clients notre temps de cerveau disponible (et d’analyser nos comportements au passage pour remplir ses banques de données avec nos vies numériques).
Sauf qu’avec ce genre de vision (et de buts) à court/moyen terme, on ne réfléchit pas aux conséquences sur le long terme. Lorsque l’on représente l’endroit où une grande portion de notre civilisation passe la majeure partie de son temps… C’est problématique, non ?
Tout comme les révélations de Tristan Harris, ce témoignage nous rappelle que, même chez les géants du web, notre monde numérique est tout jeune, immature, et qu’il est grand temps de prendre du recul sur les constructions que nous y avons dressées : car chacun de ces systèmes implique ses propres conséquences.
Comment l’I.A. de YouTube favorise les « faits alternatifs »
Les I.A. sont conçues pour maximiser le temps que les utilisateurs passent en ligne… Et pour ce faire, la fiction, souvent, dépasse la réalité.
Tout le monde a déjà entendu parler des théories du complot, des faits alternatifs ou des fake news qui circulent sur Internet. Comment sont-ils devenus si répandus ? Quel est l’impact des algorithmes de pointe sur leur succès ?
Ayant moi-même travaillé sur l’algorithme de recommandation de YouTube, j’ai commencé à enquêter, et je suis arrivé à la conclusion que le puissant algorithme que j’avais contribué à concevoir joue un rôle important dans la propagation de fausses informations.
Pour voir ce que YouTube promeut actuellement le plus, j’ai développé un explorateur de recommandationsopen source qui extrait les vidéos les plus recommandées sur une requête donnée. Je les ai comparées aux 20 premiers résultats venant de requêtes identiques sur Google et Youtube Search.
Les résultats sur les 5 requêtes suivantes parlent d’eux-mêmes :
1 — Question élémentaire : « La Terre est-elle plate ou ronde ? »
2 — Religion : « Qui est le Pape ? »
3 —Science : « Le réchauffement climatique est-il une réalité ? »
4 —Conspirations : « Est-ce que le Pizzagate est vrai ? »
Le Pizzagate est une théorie du complot selon laquelle les Clinton auraient été à la tête d’un réseau pédophile en lien avec une pizzeria de Washington. Des vidéos faisant la promotion de cette théorie ont été recommandées des millions de fois sur YouTube pendant les mois précédant l’élection présidentielle américaine de 2016.
5 — Célébrités: « Qui est Michelle Obama ? »
Pourquoi les recommandations sont-elles différentes des résultats de recherche ?
Dans ces exemples, une recherche YouTube et une recommandation YouTube produisent des résultats étonnamment différents, alors que les deux algorithmes utilisent les mêmes données. Cela montre que de petites différences dans les algorithmes peuvent produire de grosses différences dans les résultats. La recherche est probablement optimisée dans un objectif de pertinence, alors que les recommandations prennent sûrement davantage en compte le temps de visionnage.
YouTube ne recommande pas ce que les gens « aiment »
Étonnamment, on remarque que les « j’aime » ou « je n’aime pas » (pouce bleu ou rouge) ont peu d’impact sur les recommandations. Par exemple, beaucoup de vidéos qui prétendent que Michelle Obama est « née homme » ont plus de pouces rouges que de bleus, et pourtant elles sont toujours fortement recommandées sur YouTube. Il semble que YouTube accorde davantage d’importance au temps de visionnage qu’aux « j’aime ».
Ainsi, si « la Terre est plate » maintient les utilisateurs connectés plus longtemps que « la Terre est ronde », cette théorie sera favorisée par l’algorithme de recommandation.
L’effet boule de neige favorise les théories du complot.
Une fois qu’une vidéo issue d’une théorie du complot est favorisée par l’I.A., cela incite les créateurs de contenus à charger des vidéos supplémentaires qui confirment le complot. En réponse, ces vidéos supplémentaires font augmenter les statistiques en faveur du complot. Et ainsi, le complot est d’autant plus recommandé.
Finalement, le nombre important de vidéos qui soutiennent une théorie du complot rend cette dernière plus crédible. Par exemple, dans l’une des vidéos sur le thème de « la terre plate », l’auteur a commenté
Il y a 2 millions de vidéos sur la « terre plate » sur YouTube, ça ne peut pas être des c***!
Ce que nous pouvons faire
L’idée ici n’est pas de juger YouTube. Ils ne le font pas intentionnellement, c’est une conséquence involontaire de l’algorithme. Mais chaque jour, les gens regardent plus d’un milliard d’heures de contenu YouTube.
Parce que YouTube a une grande influence sur ce que les gens regardent, il pourrait également jouer un rôle important en empêchant la propagation d’informations alternatives, et le premier pas vers une solution serait de mesurer cela.
Faites des expériences avec l’explorateur de recommandations si vous souhaitez découvrir ce que YouTube recommande le plus au sujet des thèmes qui vous tiennent à cœur.
Des nouvelles de notre ami Facebook – mai 2017
La revue de presse de Jonas, qui paraît quand il a le temps.
Tiens ça faisait un moment qu’on ne vous avait pas parlé de Facebook — Hein ? On en parle tout le temps ?
Oui bien sûr, mais son emprise est telle qu’on pourrait tenir une chronique quotidienne sur ce Léviathan. Dans la surabondante actualité de ce géant du Net, Jonas a prélevé trois petites choses :
1. C’est la grande forme
Quand nous nous réjouissons du rapide succès des instances de Mastodon en si peu de temps (venez sur Framapiaf, ou mieux installez votre propre instance et rejoignez le Fediverse) qui a dépassé les 600 000 utilisateurs en un mois, nous sommes bien loin de l’usage massif des réseaux sociaux propriétaires et centralisés. En ce qui concerne Facebook c’est « 1,94 milliard d’utilisateurs actifs mensuels, en hausse de 17 % par rapport au premier trimestre de 2016, avec un bénéfice net d’un peu plus de 3 milliards de dollars, en hausse de 76 pour cent par rapport à la même période l’an dernier », comme le rappelle le magazine the Verge.
2. À la conquête de ce qui reste du monde
Facebook va toujours plus loin dans l’offre du « tout compris », il s’agit maintenant de maintenir captive la clientèle en lui proposant un service de messagerie. C’est ce que résumait le mois dernier l’article de NextInpact : la Messenger Platform 2.0 veut conquérir le monde avec ses bots. Car il ne s’agit pas d’une messagerie comme les autres : les bots doivent faire l’essentiel du travail :
Des bots de traduction aidant les réfugiés, aux bots qui répondent aux questions de santé, aux occasions de soutenir les causes et même les expériences qui aident les élèves à faire leurs devoirs, la créativité, l’ingéniosité et la vision de notre communauté de développeurs de bot ont été géniaux.
Nous pensons que Messenger va devenir le nouveau salon social du monde, où les gens peuvent sortir, partager, discuter, jouer à des jeux ou acheter des choses, tout en pouvant atteindre presque tout le monde, où qu’ils se trouvent. Nous pensons maintenant que nous combinons deux outils du passé: l’annuaire téléphonique (comme nous l’avons utilisé pour trouver des personnes) avec les Pages Jaunes (la façon dont nous avons l’habitude de trouver des entreprises). (source : le Newsroom de Facebook)
On l’a compris : l’objectif de Facebook, comme celui des autres géants du web est d’investir l’espace privé comme l’espace public, à tout instant, en effaçant le plus possible la limite déjà peu perceptible entre service rendu et commerce, sans solution de continuité. Le monde que propose Facebook à ses milliards d’utilisateurs est celui des animaux en batterie dans une ferme industrielle.
3. L’intrusion est une vocation
Avec Facebook, c’est deux pas en avant, un pas en arrière… à chaque fois que Facebook est pris la main dans le sac pour une pratique douteuse, l’ineffable Mark Zuckerberg jure ses grands dieux, la main sur le cœur, que c’était pour la bonne cause, que toutes les précautions ont été prises, qu’aucune loi n’a été transgressée… et peu à peu nous baissons la garde et Facebook s’autorise à des pratiques de plus en plus douteuses.
Souvenez-vous, déjà en 2012, Facebook a mené une expérience qui avait déclenché la polémique sur certains de ses utilisateurs. Près de 700.000 d’entre eux ont servi de cobayes sans le savoir. Des scientifiques ont modifié les flux d’actualité des utilisateurs en bougeant le curseur du nombre de messages positifs et négatifs, pour observer les réactions sur « l’humeur » des cobayes… (source : magazine ZDNET 700 000 utilisateurs manipulés par une expérience sur la contagion émotionnelle).
Aujourd’hui, ces pratiques douteuses semblent n’avoir pas changé. En effet, le journal The Australian révèle que Facebook a mené des recherches pour cibler les adolescents émotionnellement vulnérables et insécurisés de manière à faciliter les pratiques publicitaires prédatrices.
En surveillant les messages, les commentaires et les interactions sur le site, Facebook peut savoir quand les personnes âgées de 14 ans se sentent « vaincues », « submergées », « stressées », « anxieuses », « nerveuses », « stupide », « idiot », « inutile » et « échec ».Ces informations recueillies au moyen d’un système sur l’analyse du sentiment pourraient être utilisées par les annonceurs pour cibler les jeunes utilisateurs de Facebook lorsqu’ils sont potentiellement plus vulnérables.
La politique d’utilisation des données de Facebook nous avertit que l’entreprise « peut utiliser les informations que nous recevons à propos de vous… pour les opérations internes, y compris le dépannage, l’analyse des données, les tests, la recherche et l’amélioration des services ».
Les informations telles que votre statut « relationnel », votre emplacement, votre âge, votre nombre d’amis et à la manière dont vous accédez au site sont vendus aux annonceurs.
Encore une fois, Facebook a rapidement présenté des excuses et a déclaré à l’Australian :
une enquête sera menée sur la question, nous admettons qu’il était inapproprié de cibler les jeunes enfants de cette manière.
— des excuses… jusqu’à la prochaine fois ?
Allez hop, on vous rappelle avec ce bon vieux Richard Stallman que…
Facebook n’est pas votre ami, c’est un système de surveillance (source)
Pour aller plus loin
Pour fuir Facebook et trouver une alternative libre et décentralisée, vous avez le réseau social Diaspora*, dont nous proposons une instance nommée Framasphère* !