Il voit du logiciel libre partout !

Paris Vélib (cool) - Carlosfpardo - CC-By

Lu (sur la plage) sous la plume de Laurent Joffrin dans Libération du 15 juillet[1].

« Ce succès n’est pas seulement de mode ou de commodité : il recouvre un phénomène politique. Comme le bouddhisme du même nom, nous avons désormais affaire à un urbanisme du petit véhicule, qui échappe, de surcroît, à la classique dichotomie droite-gauche. Chimère bien réelle, le Vélib’ est un transport en commun individuel, un objet gratuit et néanmoins payant, un outil de la personne et de la collectivité à la fois, un service en même temps public et privé. Il n’appartient ni au libéralisme, ni au socialisme, ni à l’individu, ni à l’Etat. Il procède, en fait, d’une sorte d’altermondialisme passé dans les mœurs, autant que d’un boboïsme pour tous. Il annonce surtout, par son prosélytisme calme, une société différente : celle où l’on préfère l’accès à la propriété, la location à l’achat et, somme toute, une forme de partage tranquille à la fièvre de la possession. A la vitesse de la bicyclette, une idée fait son chemin : celle d’une ville moins arrogante et un peu plus humaine. »

Vélib’ et logiciel libre : même combat ?

Vélib'girls - Malias - CC-By

Notes

[1] Crédit photos : Paris-Vélib (cool) par Carlosfpardo sous licence Creative Commons By et Vélib’girls par Malias sous licence Creative Commons By.




Vista et MS Office 2007 – Rapport Becta – Extraits et Recommandations

Rapport Becta - CouvertureNous avons tout récemment mis en ligne notre traduction du Rapport Becta dont nous espérons beaucoup comme cela a été dit dans le billet de présentation.

Il ne s’agit nullement de faire une sorte de guerre à Microsoft aussi puérile que contre-productive. Il s’agit de faire en sorte que, comme en Grande-Bretagne, l’école française se pose de bonnes questions.

  • Mon établissement scolaire a-t-il réellement besoin de migrer vers Vista ? vers MS Office 2007 ?
  • Les coûts d’une telle opération seront-ils compensés par la qualité de ces nouveaux produits ? A l’échelle nationale, les coûts globaux d’une telle opération ne pourraient-ils pas être épargnés et affectés ailleurs ?
  • Un parc hétérogène Windows XP et Windows Vista ne va-t-il pas créer de la confusion chez mes utilisateurs ? ne va-t-il compliquer la tâche de l’administrateur du réseau ?
  • Si je me retrouve avec MS Office 2007, dois-je utiliser par défaut le nouveau format de Microsoft Open XML (OOXML) ?
  • Est-ce que tout a été fait pour garantir une bonne interopérabilité ? Est-ce je facilite la vie numérique de mes élèves dans leur liaison école/domicile ?
  • La collectivité territoriale qui me fournit en machines neuves a-t-elle prévue d’intégrer nativement une suite bureautique libre ? A-t-elle prévue que je puisse sans entraves lire et écrire par défaut au format OpenDocument ODF ?
  • Si Windows Vista et MS Office 2007 ne sont pas recommandés, n’est-il pas temps d’évaluer sérieusement si Linux (associé à OpenOffice.org) pourrait constituer une réelle alternative ?

Voici, entre autres, quelques question d’importance qu’aborde ce rapport.

Et pour vous en faire tout de suite une meilleure idée, et donner envie d’en savoir en plus en parcourant l’intégralité du rapport, nous vous proposons ci-dessous quelques extraits.

Rapport Becta - Recommandations

Les recommandations

p.18 – § 4.29 « Les nouvelles fonctions de Vista apportent une certaine valeur ajoutée mais, si l’on prend en compte les coûts de déploiement et les bénéfices potentiels, une mise à jour généralisée du parc informatique des écoles et des universités n’est pas recommandée. »

p.19 – § 4.31 « Le mélange des systèmes d’exploitation peut très bien se faire dans les écoles ou le réseau informatique fonctionne déjà avec plusieurs systèmes d’exploitation comme Windows, Mac et Linux quand cette mixité est adaptée. Nous recommandons cependant que les écoles et universités ayant un parc informatique cohérent sous Windows XP faisant l’acquisition de systèmes avec Vista préinstallé exercent, lorsque c’est possible, leur droit du choix du système d’exploitation et maintiennent la cohésion de leur installation avec Windows XP. »

p.20 – § 4.32 « Les écoles et les universités ne devraient envisager le passage à Vista seulement s’il est question d’installer un nouveau parc informatique complet et ne devraient pas envisager la mise à jour des systèmes existants ou faire cohabiter les deux environnements. »

p.21 – § 4.36 « Aucun déploiement de grande ampleur de Office 2007 ne devrait avoir lieu tant que les écoles et les universités ne sont pas certaines d’avoir mis en place tous les mécanismes permettant l’interopérabilité et permettant d’éviter toute fracture numérique possible comme celles citées plus tôt dans ce rapport. »

p.21 – § 4.37 « Les écoles et les universités qui envisagent le passage à Microsoft Office 2007 ne devrait le faire que dans un contexte de renouvellement complet pour n’utiliser qu’une seule version de la suite bureautique dans un établissement/environnement donné. »

p.35 – § 6.15 « Quand cela est possible, les écoles et les universités devraient s’assurer que les étudiants, les professeurs et les parents connaissent l’existence de l’ensemble des suites bureautiques "libres d’utilisation" disponibles, qu’ils savent comment se les procurer et comment les utiliser. Les écoles et les universités devraient configurer les outils de bureautique de manière à ne pas créer d’obstacles pour les élèves, les enseignants et les parents qui utilisent ces produits alternatifs (y compris les produits "libres d’utilisation") à domicile. »

p.36 – § 6.17 « Les entreprises des TIC devraient prendre les devants et configurer les produits qu’ils envoient aux écoles et aux universités pour faciliter l’accès à une suite bureautique « libres d’utilisation », idéalement une suite sous licence libre. Lors de l’achat de nouveaux systèmes, les écoles et les universités devraient normalement exiger qu’une suite bureautique capable d’ouvrir, d’éditer et de sauvegarder les documents au format standard international ODF soit installée et que ce format soit configuré par défaut. De tels produits devraient être choisis avec comme critère la possibilité pour les étudiants, les professeurs et les parents de s’en procurer une version sans avoir à payer de frais de licence supplémentaire. Les écoles et les universités devraient être prudentes lorsqu’elles utilisent une version d’essai d’un logiciel commercial, particulièrement lorsque les étudiants, les professeurs et les parents peuvent avoir l’impression que la seule manière pour eux d’accéder aux fichiers créés est d’acheter une copie du logiciel. »

Rapport Becta - Extraits

Morceaux choisis

p.3 – § 1.2 « Les nouvelles fonctionnalités de Microsoft Vista présentent certes un intérêt, mais ne justifient pas une implantation immédiate dans le domaine de l’éducation : les coûts seraient élevés et les avantages loin d’être évidents. »

p.3 – § 1.2 « Office 2007 n’apporte aucune fonctionnalité indispensable et il faudrait que Microsoft présente une étude d’impact bien étayée pour justifier son implémentation dans le secteur de l’éducation. »

p.3 – § 1.2 « Il existe des problèmes d’incompatibilité concernant Office 2007 ; de plus, Microsoft devrait assurer au plus vite la compatibilité de sa suite bureautique avec le format OpenDocument (ODF). »

p.4 – § 1.4 « Dans notre rapport intermédiaire nous exprimions le souhait que Microsoft facilite la conduite de quelques activités pilotes permettant de mettre plus en évidence les avantages du déploiement de Vista dans un établissement scolaire et de mieux appréhender le coût qu’aurait ce déploiement. Becta n’a pas eu connaissance d’une telle analyse de rentabilité effectuée par Microsoft.. »

p.4 – § 1.8 « Alors qu’on estime à 66% le nombre de machines du parc informatique scolaire pouvant fonctionner avec Vista (d’après la définition de Microsoft), nous estimons quant à nous à 22% le nombre de machines répondant aux critères pour faire fonctionner Vista de manière correcte. »

p.5 – § 1.10 « Notre rapport intermédiaire recommandait que Microsoft présente une étude d’impact bien étayée pour justifier l’implantation d’Office 2007 dans l’éducation nationale en Grande-Bretagne. Aucun document de ce type n’a été porté à notre connaissance. Le rapport final confirme que son déploiement n’est pas absolument nécessaire. Il confirme également que l’utilisation d’Office 2007 pourrait avoir un effet pervers sur l’interopérabilité entre l’école ou l’université et le domicile. »

p.5 – § 1.11 « Nous conseillons de ne pas effectuer de déploiement massif d’Office 2007 avant que les écoles et les universités ne soient certaines d’avoir mis en place tous les mécanismes nécessaires pour assurer l’interopérabilité et éviter un potentiel « fossé numérique » mis en évidence lors des tests. Agir à l’encontre de ce conseil entraînerait des difficultés inutiles et restreindrait le choix offert aux étudiants, aux professeurs et aux familles qui doivent échanger des documents entre le domicile et l’école. De plus, cela imposerait également aux parents une contrainte financière. »

p.5 – § 1.13 « une standardisation de fait (par l’utilisation généralisée de produits d’un même fournisseur) peut être néfaste pour la concurrence et le choix, ce qui revient à augmenter les coûts. De plus en plus, les gouvernements, les entreprises et le système d’éducation refusent de voir leurs informations contrôlées par un fournisseur unique. Il en résulte un mouvement qui tend à délaisser les formats de fichiers propriétaires pour s’intéresser aux nouveaux formats de fichiers, plus ouverts, sous le contrôle d’un organisme de normalisation efficace. »

p.5 – § 1.14 « Nous avons identifié un certain nombre de points critiques concernant les capacités d’interopératibilité d’Office 2007. Ces points sont les suivants : l’adoption par Office 2007 d’un nouveau format de fichier qui n’est compatible avec aucun autre produit, et le manque de prise en charge du format de document standard international (ODF) qui est de plus en plus utilisé par les produits concurrents. »

p.6 – § 1.16 « Microsoft n’a rien fait pour répondre aux demandes concernant l’interopérabilité exprimées dans notre rapport intermédiaire. Office 2007 ne gère toujours pas efficacement le format de document standard international ODF. Microsoft a continué à chercher à obtenir la normalisation de son format de fichier Office 2007, ce qui ferait cohabiter deux formats standards. Cette opération a soulevé une importante controverse. »

p.6 – § 1.18 « Nous ressentons une certaine incompréhension vis-à-vis de l’approche adoptée pour le support de l’ODF dans Office 2007. Alors que le produit permet de lire quasiment tous les autres formats attendus nativement, les manipulations à effectuer pour utiliser les fichiers ODF sont vraiment fastidieuses. Nous avons dénombré 10 étapes qu’un utilisateur devrait suivre pour trouver et installer le convertisseur permettant à Office 2007 d’accéder aux fichiers ODF et nous avons également noté que les procédures pour ouvrir ou enregistrer des fichiers ODF dans Microsoft Office 2007 ne sont pas intuitives car elles diffèrent des procédures familières aux utilisateurs. D’après nous, ces procédures présentent suffisamment de difficultés techniques pour la plupart des utilisateurs pour qu’ils soient découragés d’utiliser des produits concurrents, ce qui pourrait affaiblir la compétition. »

p.6 – § 1.20 « Nous pensons que les obstacles que Microsoft a placés sur le chemin des utilisateurs qui voudraient utiliser le format de fichier qui devient de plus en plus commun dans les produits de la concurrence auront pour effet de limiter l’utilisation de ces produits. La compatibilité que Microsoft propose dans Office 2007 avec les produits concurrents est moindre que celle qu’il offre pour sa propre famille de produits. Nous nous sommes plaints à l’Office of Fair Trading (OFT) du risque que cela fait courir à la concurrence et que cela constitue un abus de position dominante par Microsoft. Notre plainte est considérée par l’OFT. »

p.7 – § 1.21 « Si les établissements scolaires devaient faire la mise à jour vers Office 2007 maintenant, nous ne pensons pas que cela apporterait un plus au niveau de l’interopérabilité (indépendamment des standards) mais, au contraire, cela se ferait au détriment de l’interopérabilité et que cela introduirait des difficultés supplémentaires dans le travail quotidien. La mise en œuvre de l’interopérabilité dans un usage à domicile et à l’école ne peut pas être considéré comme facile, que ce soit pour une utilisation directe ou après configuration des éléments nécessaires (packs de compatibilité, modifications des formats de fichiers par défaut ou extensions ODF). »

p.7 – § 1.24 « Sans faire de jugement sur les avantages techniques du format de document standard international (ODF) ou du deuxième format de document proposé pour devenir un standard international (OOXML), nous pensons toujours que la cohabitation de plusieurs normes internationales incompatibles offrant globalement les mêmes fonctionnalités n’est pas dans l’intérêt des utilisateurs. Cela ne fera qu’apporter confusion et complexité et introduira un surcoût inutile. Cela constituera une formidable occasion manquée qui sera préjudiciable au marché, au monde de l’enseignement et au concept lui-même de norme internationale. »

p.9 – § 1.33 « Nous recommandions que les fournisseurs facilitent le choix aux écoles en s’assurant que les ordinateurs pour ce marché soient proposés avec un choix de suites bureautiques et que ces offres devraient idéalement comprendre une solution en logiciels libres. Nos entretiens avec l’industrie ont confirmé qu’il n’y a pas de raison concrète pour que la mise à en œuvre de cette proposition pose problème. »

p.9 – § 1.34 « Nous proposons que les écoles et les universités, lorsqu’elles établissent le cahier des charges, devraient insister pour que leurs fournisseurs leur proposent une suite bureautique capable d’ouvrir, d’éditer et de sauvegarder des documents au format ODF et permettant de définir l’ODF comme format de fichier par défaut. »

p.14 – § 4.4 « Les essais ont confirmé qu’Office 2007 fonctionne toujours bien sous Windows XP, ce qui veut dire qu’il n’est pas absolument nécessaire de migrer vers Vista avant une mise à jour vers Office 2007. »

p.15 – § 4.9 « Office 2007 introduit un nouveau format de fichier par défaut et, comme le souligne notre rapport intermédiaire, cette évolution pose quelques problèmes de compatibilité. L’interopérabilité entre Office 2007 et les versions précédentes de Microsoft Office ainsi qu’avec les suites bureautiques d’autres fournisseurs n’est pas satisfaisante. »

p.17 – § 4.22 « Le coût total du déploiement de Vista dans les écoles anglaises et galloises se situe autour de 175 millions de livres sterling (environ 230 millions d’euros). Si cette estimation n’inclut pas les cartes graphiques supplémentaires nécessaires au fonctionnement de l’interface Aero (ce qui augmenterait nettement le montant minimum) elle tient compte des mises à niveau matérielles nécessaires, du coût des licences, des tests ainsi que du coût de la configuration et du déploiement. Environ un tiers de cette somme est imputable au prix des licences Microsoft. »

p.17 – § 4.23 « Le coût d’une mise à jour de Vista sur tout le parc informatique d’une école primaire typique serait de l’ordre de £5000 (environ 6500€) (environ £125 (160€) par machine). Pour un lycée, le coût d’une mise à jour semblable serait de l’ordre de £24000 (31200€), ce qui revient à un coût par machine d’environ £75 (98€). »

p.19 – § 4.30 « Nous suggérons que les nouvelles machines achetées avec Windows Vista pré-installé soient remises sous Windows XP en attendant que tout le réseau puisse être mis à jour. »

p.19 – § 4.31 « L’interface utilisateur différente de Vista par rapport à Windows XP peut impliquer que le personnel et les élèves aient besoin d’un entraînement ou d’une familiarisation avec le nouveau système d’exploitation. Cela pourrait être source de confusion si un cours ou un enseignement clé utilise les deux systèmes. »

p.19 – § 4.31 « Les machines sous Vista pourraient ne fonctionner qu’avec une autre version d’une application voir même seulement avec des produits différents. Cela peut être source de confusion si le personnel ou les élèves doivent travailler avec les deux systèmes d’exploitation. Il pourrait aussi être nécessaire de dupliquer le travail pour certaines leçons ou pour certains projets pour les adapter à Windows Vista et Windows XP. »

p.21 – § 4.36 « Il est important de ne pas placer d’obstacles inutiles sur le chemin des élèves, des professeurs et des familles lorsque des documents doivent faire le va-et-vient entre le domicile et l’école ou l’université. De tels obstacles pourraient restreindre l’utilisation de systèmes utilisant des formats de documents différents ou aboutir à des contraintes financières inutiles. »

p.22 – § 5.2 « Une véritable interopérabilité entre documents réduit les coûts, améliore la productivité des utilisateurs et permet d’éviter de se retrouver piégé par une technologie. »

p.23 – § 5.6 « Microsoft n’a pas cherché à remédier aux préoccupations relatives à l’interopérabilité que nous avions identifiées quant au support de la norme internationale existante. Au contraire, Microsoft a continué à rechercher l’approbation pour la création d’une seconde norme internationale de documents (Office Open XML) basée sur ses propres formats de fichiers Office 2007. »

p.23 – § 5.10 « L’approche actuelle de Microsoft pour assurer l’interopérabilité avec le standard ODF est de faciliter le développement par de tierces parties de modules ou de convertisseurs pour Office 2007 plutôt que réaliser le développement elle-même et de l’intégrer complètement dans son produit. Cette approche soulève des questions en ce qui concerne les utilisateurs béotiens, comment vont-ils accéder à la fonctionnalité nécessaire et quel va être son niveau d’ergonomie. »

p.23 – § 5.11 « Sous certaines conditions, inhérentes à la date de l’étude, les utilisateurs devaient aller sur un site web tiers et effectuer une série de tâches techniques avant de pouvoir de manière satisfaisante ouvrir, modifier et enregistrer des documents au format de fichier ODF. »

p.25 – § 5.14 « Nous pensons que ces bricolages pour accéder et utiliser la possibilité d’interopérer avec les produits concurrents de Microsoft Office 2007 présentent des difficultés techniques. Ces difficultés sont susceptibles de rendre les utilisateurs moins enclins à se servir des produits concurrents et donc de fausser la compétition. »

p.26 – § 5.19 « L’interoperabilité entre Microsoft Office 2007 et des versions antérieures de Microsoft Office n’est pas supporté de façon native. Malgré tout, Microsoft a publié une mise à jour de l’ensemble de ses modules de compatibilité qui devrait permettre aux versions antérieures de Microsoft Office d’ouvrir les formats de fichiers Office 2007. Cette solution est la plupart du temps suffisante mais, en fonction de l’application bureautique utilisée et dans certaines circonstances, elle va provoquer divers degrés de dégradation ou de perte de fidélité. »

p.28 – § 5.28 « Si l’on n’intervient pas, ces évolutions vont créer, pour les utilisateurs béotiens, une vision de l’intéropérabilité des documents qui sera complexe et partisane, ce qui serait un échec de l’objectif initial d’aller vers des standards ouverts. Microsoft a une position dominante sur le segment des systèmes d’exploitation pour PC et cette position risque d’être renforcée par son approche actuelle des standards de documents ouverts. »

p.30 – § 5.33 « Les utilisateurs d’Office 2003 ou antérieur devraient installer le pack de compatibilité afin de pouvoir ouvrir n’importe quel document OOXML Office 2007. Ils ne devraient pas enregistrer leurs documents dans le format OOXML. Comme les utilisateurs d’Office 2007, ils devraient les enregistrer dans les anciens formats Microsoft (.doc pour les documents texte, .xls pour les tableurs et .ppt pour les présentations). »

p.30 – § 5.34 « Les utilisateurs d’OpenOffice.org ou de Star Office (ou d’ailleurs de n’importe quelle suite bureautique basée sur les standards libres) auront plus besoin d’être conscients de la technologie utilisée par la personne à qui ils destinent leur document pour pouvoir tenir compte des limitations d’Office 2007. Pour permettre la compatibilité, ces utilisateurs devraient toujours enregistrer leurs documents dans les anciens formats Microsoft car c’est le plus petit dénominateur commun, entre ces produits disparates, qui peut permettre l’interopérabilité . »

p.30 – § 5.36 « Les fournisseurs doivent développer des applications qui sont capables de traiter toutes les normes internationales pertinentes, en laissant aux utilisateurs le choix de savoir quel sera leur format "par défaut". »

p.31 – § 5.38 « Nous ne sommes pas convaincus que le développement de plusieurs standards internationaux traitant essentiellement du même champ d’activité soit de l’intérêt du milieu éducatif. Comme nous l’avons précédemment exprimé, nous estimons qu’une telle approche va introduire confusion, complexité et coûts inutiles. Elle constitue une formidable occasion manquée qui risque de perturber le marché, la communauté éducative et le concept même de standards internationaux. »

p.32 – § 6.4 « Ces évolutions mettent en avant le nombre grandissant de concurrents dans le domaine des suites bureautiques et montrent que des systèmes innovants basés sur des alternatives à Windows commencent à voir le jour. »

p.32 – § 6.5 « Cependant, afin que ces innovations se développent sur le marché de l’éducation il ne faut pas que des barrières réduisent la concurrence, que ce soit par des restrictions liées aux licences ou par des obstacles liés à l’interopérabilité. Ainsi, par exemple, Becta considère qu’un arrangement par lequel un appareil fonctionnant sous Linux est sujet à un paiement annuel à Microsoft selon les termes d’un programme de licence Accord School, même si cet appareil n’utilise aucun logiciel de Microsoft, n’est pas acceptable. De tels arrangements font partis des pratiques qui font l’objet de notre plainte à l’OFT. »

p.33 – § 6.9 « Contrairement à d’autres secteurs ou la demande pour des solutions en logiciels libres est visible et croissante, les estimations dans le secteur éducatif montrent une demande faible, Becta est vu comme un facteur clé dans l’instauration de cette demande. »

p.34 – § 6.11 « Au cours des douze prochains mois Becta prendra un certain nombre de mesures pour encourager un choix plus efficace dans le cadre d’un usage éducatif. Ce travail inclura la publication d’un programme de travail dont le but sera de :
– fournir plus d’informations sur le site de Becta sur ce qu’est un logiciel libre et quels sont ses avantages pour l’éducation en Grande-Bretagne
– compléter la base de recherche actuelle qui recense les usages des logiciels libres dans le secteur éducatif et identifier des déploiements modèles de logiciels libres. Cela engloberait également l’esquisse d’un tableau national des usages des logiciels libres dans les écoles et les universités
– travailler avec la communauté du logiciel libre pour établir un catalogue en ligne des logiciels libres appropriés pour l’usage dans les écoles de Grande-Bretagne. Parmi les informations disponibles on retrouvera les moyens d’obtenir une assistance dédiée à ces logiciels et comment contribuer à leur développement futur. Ce catalogue sera publié sous une licence Creative Commons afin que les fournisseurs puissent le modifier pour leur propre usage
– donner des indications aux sociétés de services en logiciels libres pour qu’elles puissent efficacement participer dans de nouvelles structures compétitives et pour qu’elles puissent proposer des logiciels libres via la structure de fournisseurs existante de Becta »

p.34 – § 6.12 « Le point de vue de certaines écoles et universités est qu’elles doivent utiliser des logiciels propriétaires particuliers car ces produits sont les plus utilisés dans l’industrie et le commerce et que, d’après cet argument, les élèves doivent se familiariser avec ce qu’ils rencontreront dans la "vraie vie". »

p.34 – § 6.13 « Les étudiants aujourd’hui sont cependant en général à l’aise avec les TIC et ils sont capables d’utiliser une large gamme de logiciels à l’école ou à l’université et certainement plus encore à leur domicile. Ils peuvent également passer sans problème de l’ordinateur de l’école à celui à la maison ou celui de la bibliothèque de quartier ou encore à celui du cybercafé. Il est très peu probable qu’ils se retrouvent démunis devant une suite bureautique particulière après leurs études parce qu’ils auront été habitués à utiliser, par exemple, OpenOffice.org à l’école. »

p.35 – § 6.14 « En résumé, l’argument de la "familiarité" est recevable pour les élèves des années 80 et 90 mais moins pour ceux du 21ème siècle. Ce serait en effet un triste constat pour l’éducation aujourd’hui en matière de TIC si, dès qu’ils s’éloignaient de leur apprentissage, les élèves n’étaient pas capables d’utiliser des programmes basiques (comme les suites bureautiques ou les navigateurs) simplement à cause de différences de fonctionnement ou entre les interfaces utilisateurs. Posséder des compétences multiples devrait faciliter la recherche d’emploi au 21ème siècle, pas la compliquer. »

Rapport Becta - Standards




Et pendant ce temps là à Jalapa…

Séquence évasion avec ces quelques photos d’une récente installation de la toute dernière version de GNU/Linux Ubuntu, la 8.04 du Hardy Heron, dans un village du Nicaragua.

Une (courte) traduction signée GaeliX pour Framalang.

Ubuntu - Nicaragua

Parier sur l’avenir

Bet on the future

Blog comuNIdad – 19 juin 2008

Jalapa est une commune du département de Nueva Segovia, Nicaragua, située près de la frontière avec le Honduras.

Ubuntu - Nicaragua

Jalapa est une région très pauvre et a été une de celles qui ont le plus souffert de la guerre civile dans les années 80.

Aujourd’hui, le gouvernement local fait un pari sur l’avenir en migrant toutes ses stations de travail et ses serveurs vers des logiciels libres et en particulier vers Ubuntu Linux.

Ubuntu - Nicaragua

C’est une occasion unique de réduire la fracture numérique et d’amener le progrès dans les zones rurales. Un grand merci à l’équipe locale Ubuntu d’avoir travaillé dur pendant plusieurs mois pour faire de cette initiative une réalité.

Ubuntu - Nicaragua




Le code issu de Venus est-il meilleur que celui de Mars ?

LoosePunctuation - CC byLe code informatique écrit par des femmes serait-il plus « utile » que celui des hommes ?

C’est en tout cas ce qui ressort de ce récent article d’un blog du Wall Street Journal.

Il serait en effet mieux documenté et par là-même plus facilement exploitable par d’autres développeurs[1].

L’occasion d’évoquer aussi peut-être dans les commentaires la problématique de l’écart des sexes dans le secteur informatique en général et dans la communauté du logiciel libre en particulier…

Les hommes écrivent du code provenant de Mars, et les femmes du code plus utile venant de Vénus.

Men Write Code from Mars, Women Write More Helpful Code from Venus

Rebecca Buckman – 6 juin 2008 – The Wall Street Journal
(Traduction Framalang : GaeliX et Burbumpa)

Nous savons tous que les hommes détestent demander leur chemin. Apparemment, ils détestent tout autant indiquer les directions dans le code informatique.

Emma McGrattan, première vice-présidente en ingénierie de la société Ingres spécialisée en bases de données, l’une des femmes développeuses les plus cotées de la Silicon Valley, insiste sur le fait qu’hommes et femmes ne codent pas de la même façon. Les femmes sont plus sensibles et plus attentives à ceux qui pourraient utiliser leur code ultérieurement. Elles parsèment leur code, vous savez, ces lignes d’instructions qui donneront naissance à d’astucieuses applications et programmes, de commentaires et consignes, expliquant avec précision pourquoi elles ont écrit leur code de cette façon là.

Le code devient alors une sorte de « feuille de route » pour ceux qui voudraient le modifier ou l’étendre par la suite, ajoute McGrattan, irlandaise de souche ayant rejoint Ingres en 1992.

Les hommes, d’un autre côté, n’ont pas les mêmes motivations. Souvent, « ils essayent de montrer combien ils sont intelligent en produisant du code cabalistique » dit-elle sur le blog Business Technology. « Ils essayent de dissimuler des choses dans le code », et ne laissent pas de consignes claires pour les futurs utilisateurs. McGrattan se targue de pouvoir, dans 70% à 80% des cas, déterminer à partir d’un morceau de code s’il a été écrit par un homme ou par une femme.

Par souci de rendre le code d’Ingres plus facile à utiliser et dépourvu de genre sexuel, McGrattan a aidé à la mise en œuvre de nouveaux standards de programmation au sein de la société. Elle demande aux développeurs d’inclure un certain nombre de commentaires précis avant chaque portion de code, expliquant ce que chacun fait et pourquoi; les développeurs doivent aussi fournir un historique détaillé de chaque changement effectué. Ces règles s’appliquent aussi bien aux employés d’Ingres qu’aux membres de la communauté Open Source qui participent au code des produits Ingres.

Il y a grand besoin de modifier le code à haute teneur en testostérone chez Ingres car seulement 20% des ingénieurs sont des femmes, précise McGrattan, la plupart d’entre elles ayant des postes liés à l’assurance qualité ou à l’adaptation à un nouveau pays et non à la programmation de haut vol.

Elle s’est donnée comme mission d’intéresser plus de femmes aux carrières dans le développement. Mais « cela s’avère très difficile » conclut-elle.

Notes

[1] Crédit photo : LoosePunctuation (Creative Commons By)




Firefox : Et 1, et 2, et 3.0 !

Le titre de ce billet est inversement proportionnel aux qualités de la très attendue nouvelle version de Firefox (d’autant que ce n’est pas forcément le moment d’abuser des références footballistiques). J’aurais peut-être mieux fait de choisir un plus classique Firefox 3, très bientôt sur vos écrans !

Toujours est-il que demain (soir) c’est donc la sortie officielle et planétaire de Firefox 3.0. Un évènement majeur qui méritait bien un passage en revue détaillé des principales nouveautés.

Et comme on n’avait pas envie de réinventer la roue, il s’agit d’une nouvelle traduction Framalang (Yonnel, relecture assurée par Olivier et Yostral).

Firefox 3

Petit guide de Firefox 3

Field Guide to Firefox 3

Deb Richardson – 12 juin 2008 – Dria.org

Nous y voilà. Firefox 3 sera lancé dans très peu de temps. Avant cet événement tant attendu, les membres de la communauté Mozilla ont beaucoup écrit à propos des nouvelles fonctionnalités et des améliorations que vous allez voir avec ce navigateur. Les nouvelles fonctionnalités sont pour certaines énormes et innovantes et pour d’autres si subtiles que vous ne les remarquerez peut-être pas avant de vous dire que l’utilisation de Firefox est d’une certaine manière plus simple et plus performante. La gamme des fonctionnalités améliorées est tout aussi large, des pans entiers de traitement des données ont été repris à zéro, alors que des fonctionnalités ont été légèrement modifiées ou redéfinies dans de petites proportions. Globalement le résultat est la version de Firefox la plus rapide, la plus sûre, la plus légère et la plus facile à utiliser qui soit. Nous espérons qu’il vous plaira.

Voici la liste des fonctionnalités traitées dans ce guide :

Gestionnaire de modules complémentaires

Firefox 3

Le gestionnaire de modules complémentaires dans Firefox 3 a été étendu pour inclure un nouvel onglet "Catalogue" où vous pouvez voir les modules complémentaires recommandés, en chercher de nouveaux, voir les descriptions et les notes, mais aussi installer des modules complémentaires d’un simple clic. Le gestionnaire de modules complémentaires est maintenant complètement intégré au site addons.mozilla.org (AMO), ce qui rend plus facile que jamais la recherche et l’expérimentation de nouvelles extensions et de nouveaux thèmes pour votre navigateur.

Pour en savoir plus Get Add-ons in Firefox 3 de Madhava Enros.

Marque-pages

Firefox 3

Firefox 3 introduit de nouvelles fonctionnalités pour les marque-pages qui les rend beaucoup plus faciles à utiliser, plus utiles en général et beaucoup plus utiles pour les cancres de l’organisation. Les trois principales fonctionnalités sont les étoiles de marque-pages, les tags de marque-pages et les dossiers de marque-pages intelligents.

Les étoiles sont une façon facile et rapide de marquer une page en un simple clic. Les tags sont une façon d’ajouter "plus" d’informations à un marque-page, ce qui vous permet de les organiser de manière beaucoup plus flexible qu’avec les dossiers à l’ancienne. Les dossiers intelligents sont les "recherches sauvegardées" qui sont automatiquement mis à jour quand vous ajoutez de nouveaux items qui correspondent à cette recherche dans vos marque-pages.

Pour en savoir plus Firefox 3: Bookmarks de Deb Richardson.

Feuilles de style (CSS)

Firefox 3

Un grand nombre d’améliorations pour les CSS ont été apportées à Firefox 3 dont le support de : inline-block et inline-table, font-size-adjust sur toutes les plate-formes, la pseudo-classe :default, les soft-hyphen HTML (­) (barre de césure semi-automatique), la propriété ime-mode, la valeur pre-wrap de l’attibut white-space, ainsi que la mise à jour dynamique des sélecteurs tels :first-child, :only-child, :last-child et :empty. Le Mozilla Developer Center a une liste complète et une documentation pour tous les changements de CSS de Firefox 3, que vous trouverez ici : CSS improvements in Firefox 3.

Pour en savoir plus Some new CSS features in Firefox 3 de David Baron.

Support des profils de couleurs

Firefox 3

Firefox 2 n’inclut pas le support des profils de couleurs, donc le navigateur interprète les couleurs du mieux qu’il peut, sans adaptations spéciales selon le système ou les profils de couleurs personnalisés. Firefox 3 supporte parfaitement les profils de couleurs, ce qui donne une gamme de couleurs plus riche et plus vivante affichée par le navigateur. Toutefois, pour nombre de raisons, le support des profils de couleurs est désactivé par défaut, il doit être activé dans les préférences du navigateur. Il est probable que dans une future version de Firefox, cette fonctionnalité sera activée par défaut, ce qui devrait faire plaisir à tous les photographes et graphistes.

Pour en savoir plus Firefox 3: Color profile support de Deb Richardson.

Gestionnaire de téléchargements

Firefox 3

Le gestionnaire de téléchargements a pas mal changé pour Firefox 3 et peut maintenant, comme on nous l’a souvent réclamé, mettre les téléchargements en pause et les reprendre, manuellement ou automatiquement. Parmi les autres changements, on note l’ajout d’un indicateur de statut de téléchargement dans la barre de statut en bas de fenêtre, la possibilité de faire une recherche dans les fichiers téléchargés, un affichage amélioré des fichiers qui inclut des informations plus détaillées et la possibilité de retourner sur la page originale du téléchargement par un clic droit sur le fichier dans le gestionnaire de téléchargements.

Pour en savoir plus Download Manager in Firefox 3 de Madhava Enros.

Rendu des polices et des textes

Firefox 3

Lorsque les développeurs de Mozilla ont décidé d’incorporer le sous-système Cairo et de repartir de zéro pour une nouvelle couche graphique, ils ont aussi décidé de retravailler complètement le système qui affiche le texte dans le navigateur. Le résultat est que Firefox 3 supporte mieux le crénage des polices, les ligatures, les textes internationaux, les ligatures partielles, les indices pour afficher les caractères, l’anti-crénelage, les types et la sélection de polices. Firefox 3 représente un énorme pas en avant dans le support des polices et le rendu des textes et les développeurs de Mozilla travaillent déjà sur de nouvelles améliorations pour les versions futures.

Pour en savoir plus Firefox 3: Fonts and text de Stuart Parmenter et Deb Richardson.

Zoom plein écran

Firefox 3

Le zoom a été complètement retravaillé pour Firefox 3 et inclut maintenant à la fois le zoom plein écran et le zoom texte seulement.

Le zoom plein écran agrandit à l’échelle la mise en page et la structure de la page tout en permettant de garder parfaitement le contrôle sur la taille du contenu affiché. Par contre, le zoom uniquement sur le texte laisse les images et la mise en page telles quelles.

Une fonctionnalité nouvelle et extrêmement utile du zoom de page est que Firefox garde maintenant automatiquement en mémoire le niveau de zoom que vous avez réglé site par site. Une fois que vous agrandissez (ou que vous réduisez) une page d’un site, Firefox s’en rappellera et restaurera ce niveau de zoom la prochaine fois que vous vous rendrez sur toute page qui fait partie de ce site.

Pour en savoir plus Full Page Zoom de Seth Bindernagel.

Historique

Firefox 3

Firefox 3 rend l’historique du navigateur incroyablement utile. Non seulement l’historique est une source essentielle d’information pour la nouvelle barre de navigation intelligente, mais il a été amélioré de plusieurs autres façons. L’historique garde maintenant les favicons des sites (des petits logos identifiants) ainsi que les autres données de localisation, pour rendre beaucoup plus aisées la recherche et l’identification des entrées de l’historique. Le panneau d’historique et le menu ont aussi été modifiés et une toute nouvelle bibliothèque d’historique a été ajoutée à la bibliothèque de Firefox (autrefois le gestionnaire de marque-pages). Dans l’ensemble, Firefox 3 a fait passer l’historique d’occasionnellement utile à absolument essentiel dans l’usage quotidien du navigateur.

Pour en savoir plus Firefox 3: History de Deb Richardson.

Canvas HTML

Firefox 3

L’implémentation du canvas HTML de Firefox 3 a été améliorée et comprend maintenant une interface expérimentale d’affichage du texte. Cette interface est décrite en détail dans l’article Dessiner avec canvas du Mozilla Developer Center (MDC). Une autre nouveauté est le support des méthodes de transformation transform() et setTransform() dont la documentation fait partie du fantastique Tutoriel canvas du MDC. La performance en deux dimensions de canvas a également été améliorée, le résultat est plus rapide sur toutes les plate-formes.

En voici deux excellents démonstrations : John Resig’s Processing.js et Aza Raskin’s Algorithm Ink.

Pour en savoir plus HTML Canvas in Firefox 3 de Vlad Vukicevic.

Support UTF-8 dans la barre de navigation

Firefox 3

Ceux qui utilisent principalement le web US-ASCII ne remarqueront peut-être pas un des gros changements de la barre de navigation de Firefox 3 : le support multi-octets de l’UTF-8. C’est une très grande victoire en termes d’accessibilité, parce que les URI en langue non-ASCII étaient du code machine illisible dans Firefox 2, alors que maintenant dans Firefox 3 ils sont interprétés comme des polices lisibles.

Pour en savoir plus Firefox 3: UTF-8 support in location bar de Gen Kenai.

Protection contre les malwares

Firefox 3

Les "malwares" sont notre appellation pour les sites web qui essaient d’installer des logiciels non souhaités ou encore faire des choses non autorisées sur votre ordinateur. Firefox 3 garde une trace de tous les sites sur lesquels ont été vus des malwares et vous protège en les bloquant avant même que les pages ne soient chargées pour s’assurer que votre ordinateur ne courre jamais un risque. Vous pouvez ignorer les avertissements si vous le voulez, c’est votre navigateur, après tout, mais nous espérons que cette sécurité supplémentaire aidera à protéger les utilisateurs et à rendre le Web plus sûr pour tous.

Pour en savoir plus Mal-what? Firefox 3 vs. Bad People de Johnathan Nightingale.

Interface microformats

Firefox 3

Les microformats sont des formats simples, avec des données ouvertes, construits sur des standards existants. Firefox 3 inclut une nouvelle interface de microformats (API) qui peut être utilisée pour construire des greffons, mais sinon ils ne sont pas montrés dans l’interface utilisateur de Firefox 3.

Pour en savoir plus Use the new microformats API in Firefox 3 extensions du site d’IBM et Where are the microformats in Firefox 3? de Mike Kaply.

Support des applications web hors connexion

Firefox 3

Firefox 3 implémente des événements online et offline selon la spécification 1.0 des applications Web WHATWG. Cela signifie que les développeurs Web peuvent créer de nouvelles applications Web qui fonctionneront dans Firefox même quand l’ordinateur n’est pas connecté. Dans le mode "offline", les données d’une application Web sont stockées localement sur votre ordinateur qui est ensuite synchronisé avec le serveur quand la connexion est rétablie.

Pour en savoir plus Online and offline events, Offline resources in Firefox et Firefox 3: Offline App Demo de Mark Finkle et Offline Web Applications de Robert O’Callahan.

Gestionnaire de mots de passe

Firefox 3

Dans Firefox 3, les fonctionnalités du gestionnaire de mots de passe sont significativement améliorées et beaucoup mieux pensées. La boite de dialogue qui vous demande si vous voulez que Firefox sauvegarde un mot de passe est complètement remplacée, au lieu d’un pop-up auquel vous êtes forcé(e) de répondre avant que le login ait réussi, Firefox 3 donne le choix d’enregistrer un mot de passe donné grâce à une barre d’information qui se déroule depuis le haut de l’écran après que vous ayez entré votre mot de passe. Cette barre d’information n’est pas modale, vous pouvez donc continuer à utiliser le web normalement sans avoir à la supprimer préalablement. Cette barre restera jusqu’à ce que vous lui disiez que faire ou que vous quittiez le site sur lequel vous êtes.

En plus, le gestionnaire de mots de passe vous offre la possibilité de filtrer et de rechercher ce qui rend significativement plus facile de trouver et de gérer les mots de passe pour des sites particuliers. Ces changements sont relativement subtils, mais si vous avez des centaines de mots de passe stockés au bout du compte ces petits changements peuvent faire une énorme différence.

Pour en savoir plus Firefox 3: Password Management de Deb Richardson.

Améliorations de performance

Firefox 3

Firefox 3 est la version la plus rapide et la plus légère de Firefox à ce jour. Les tests de vitesse montrent une amélioration d’un facteur 2 à 4 par rapport à Firefox 2 et d’un facteur 9 par rapport à Internet Explorer 7. Les tests d’utilisation mémoire montrent que Firefox est 2 fois plus efficace que Firefox 2 et 4,7 fois plus efficace que IE7. L’accent a vraiment été mis sur les performances pour cette version et d’incroyables efforts ont été consacrés à l’obtention de ces chiffres.

Pour en savoir plus Firefox 3 Memory Usage de Stuart Parmenter.

Protection contre le phishing

Firefox 3

En plus de la nouvelle protection contre les malwares qui a été ajoutée à cette version, Firefox 3 protège également mieux contre le phishing. Les sites identifiés comme phishing sont maintenant bloqués tout de suite, avant même que les pages ne soient chargées, pour que votre navigateur ne soit jamais en danger. Firefox 2 chargeait la page, mais vous prévenait que c’était un site identifié comme dangereux en le mettant en gris et en affichant un message d’avertissement. La méthode de Firefox 3, qui correspond au comportement de protection contre les malwares, est plus sûre et vous expose à globalement moins de risques.

Pour en savoir plus Mal-what? Firefox 3 vs. Bad People de Johnathan Nightingale.

Plugins

Firefox 3

Les plugins sont de petits programmes de tierce-parties qui peuvent être ajoutés à Firefox pour gérer du contenu que Firefox ne gère pas lui-même. Sans le plugin Flash, par exemple, vous ne pourriez pas regarder des vidéos de YouTube. Firefox 3 propose une nouvelle fonctionnalité faisant partie du gestionnaire de modules complémentaires remanié que vous pouvez utiliser pour voir, activer et désactiver tout plugin que vous avez installé. Vous pouvez aussi utiliser l’affichage des plugins pour visiter la page d’origine du plugin (si elle est spécifiée) en faisant un clic droit sur le nom du plugin et en sélectionnant "Visiter la page Web".

De la même façon que d’autres greffons de Firefox 3, si un plugin est détecté comme contenant une vulnérabilité, Firefox le désactivera automatiquement et vous dira où obtenir une version à jour. C’est une amélioration de sécurité significative pour Firefox qui auparavant n’avait aucun moyen pour vous dire que vous aviez installé des plugins dangereux.

Pour en savoir plus Firefox 3: Plugins de Deb Richardson.

Bouton d’identification de site

Firefox 3

S’assurer que les utilisateurs sont en sécurité, à l’abri et protégés lorqu’ils naviguent sur le web est l’un des plus grands défis pour les concepteurs de navigateurs. Firefox 3 présente une nouvelle fonctionnalité de sécurité extrêmement importante, connue sous le nom de bouton d’identification de site. Ce bouton remplace et s’appuie sur l’omniprésente icône de "cadenas" qui était depuis si longtemps le premier indicateur de sécurité utilisé par les navigateurs. Plutôt que d’afficher simplement un petit cadenas quelque part, Firefox trouve tout ce qu’il peut sur le site que vous visitez et rend ces informations facilement accessibles grâce à un bouton à l’extrêmité gauche de la barre de navigation.

Firefox 3

Le bouton peut être dans une des trois couleurs – gris, bleu ou vert – et affiche le nouveau message d’identification de site quand on clique. Le message inclut une icône correspondante "Passport Officer" en gris, bleu ou vert et affiche un sommaire des informations disponibles sur l’identité du site. Maintenant, au lieu d’avoir un seul indicateur de l’état de cryptage (le cadenas), Firefox 3 vous fournit beaucoup plus de renseignements sur un large panel de niveaux de sécurité et de situations.

Pour en savoir plus Firefox 3: Site Identification button de Deb Richardson.

Barre d’adresse intelligente

Firefox 3

Dans Firefox 3 la barre d’adresse a été complètement refondue de manière extrêmement excitante. Surnommée affectueusement "AwesomeBar" (NdT : "Barre Géniale"), la nouvelle barre d’adresse intelligente vous laisse utiliser le champ d’URL de votre navigateur pour faire une recherche sur un mot clé dans votre historique et vos marque-pages. Vous n’avez plus à vous souvenir du nom de domaine de la page que vous cherchez, la barre d’adresse intelligente affichera les URL, les titres de pages et les tags de vos marque-pages et de votre historique correspondants à ce que vous tapez (même en plusieurs mots !) et trie les résultats selon un algorithme qui combine la fréquence et la nouveauté.

Les résultats montrent également les favicons des pages, les titres en entier, les URL et si vous avez marqué ou tagué le site précédemment. Alors que le passage de Firefox 2 à Firefox 3 peut être un petit peu dérangeant pour certains, une fois que vous aurez utilisé la barre d’adresse intelligente un moment vous vous demanderez comment vous faisiez pour vivre sans.

Pour en savoir plus AwesomeBar is awesome de Deb Richardson ainsi que ce petit screencast de Mike Beltzner.

Onglets

Firefox 3

Les onglets n’ont pas tant changé que ça entre Firefox 2 et 3 sauf en ce qui concerne l’ajout de nouvelles animations de défilement doux. Lorsque vous faisiez défiler votre barre d’onglets dans Firefox 2, les onglets changeaient un à un. Cela rendait le défilement un petit peu haché et brouillon. Avec le défilement doux, il est beaucoup plus facile de comprendre le mouvement et où les onglets vont. Cela se voit très clairement avec un film de démonstration, j’en ai donc créé un rapide, que vous pouvez voir ici : Smooth tab scrolling (.swf).

Thèmes

Firefox 3

Un des premiers buts du rafraîchissement visuel de Firefox 3 était de mieux intégrer le navigateur sur chaque plate-forme, tout en conservant une identité visuelle et une présence uniques. Firefox 2 ressemblait plus ou moins à la même chose sous Windows, Mac et Linux, mais ce n’est pas le cas de Firefox 3. Il y a quatre nouveaux thèmes distincts pour Firefox 3 – un pour Linux, Mac OS X, Windows XP et Windows Vista – et le changement touche chaque aspect de l’application. Chaque bouton, fenêtre, onglet, icone et boite de dialogue s’intègre maintenant à la plate-forme native, ce qui donne l’impression que Firefox fait naturellement partie de l’environnement de votre ordinateur.

Pour en savoir plus Firefox 3 Themes de Alex Faaborg et Firefox 3 for theme developers de Gavin Sharp..

Flux vidéo et audio

Firefox 3

Firefox 3 comprend une page améliorée de prévisualisation de flux qui détecte et affiche maintenant le contexte à côté des entrées de blog associées. De plus, Firefox 3 peut associer les podcasts vidéo avec une application, les podcasts audio avec une autre et tous les autres types de flux avec une troisième. Ces modifications sont relativement subtiles, mais fantastiquement utiles une fois que vous commencez à en tirer avantage.

Pour en savoir plus Firefox 3 and enclosures de Will Guaraldi.

Support des contrôles parentaux de Vista

Firefox 3

Windows Vista inclut des contrôles parentaux qui vous aident à gérer ce que vos enfants ont le droit de faire sur l’ordinateur. Firefox 3 inclut le support de ces contrôles parentaux, le gestionnaire de téléchargements est informé des situations où le contenu est bloqué par des proxys et les téléchargements bloqués déclenchent maintenant les bons messages de l’interface pour indiquer ce qui s’est produit. Cette fonctionnalité n’est disponible que sur la plate-forme Vista et sera développée et améliorée dans les futures versions de Firefox.

Pour en savoir plus Firefox 3: Parental controls de Jim Mathies et Mark Finkle.

Gestion des protocoles par des applications web

Firefox 3

La gestion des protocoles par des applications web est une nouvelle fonctionnalité de Firefox 3 qui donne plus de puissance aux applications web. Lorsque vous cliquez sur un liens avec un protocole spécifique Firefox peut maintenant envoyer les informations de ce lien à une application Web définie si cette application web dispose de cette fonctionnalité. Par exemple, les liens "mailto:" peuvent maintenant être gérées par une application web comme Yahoo! mail à la place du client de messagerie par défaut de votre ordinateur. Parmi d’autres protocoles actuellement supportés, on trouve "webcal:", "tel:" et "fax:".

Les développeurs qui sont intéressés par l’ajout du support de protocoles par des applications web devraient lire l’article Gestionnaires de protocoles web du Mozilla Developer Center.

Pour en savoir plus Firefox 3: Web protocol handlers de Mark Finkle.

Conclusion

Et voilà, un large tour du propriétaire (en aucun cas exhaustif) des nouvelles fonctionnalités et des améliorations de Firefox 3, des gestionnaires de modules complémentaires à la gestion de protocoles par des applications Web. Presque toutes les parties du navigateur ont été améliorées d’une manière ou d’une autre.

Firefox 3 a été développé sur approximativement trois ans en définitive et des milliers de développeurs, de designers, de localisateurs, de testeurs, de marketeurs et d’auteurs de documentation y ont contribué autour du monde. Le navigateur Firefox est produit par une des plus grandes communautés open source du monde et nous en sommes tous extrêmement fiers et enthousiastes d’enfin le mettre entre les mains de millions de gens.

Si vous ne l’avez pas encore fait vous devriez aller sur le site du Firefox Download Day pour aider à établir un nouveau record du monde Guinness. Une fois que c’est fait, rendez-vous sur le Mozilla Party Central pour trouver ou organiser un événement. Nous espérons que vous nous rejoindrez tous pour aider à fêter la sortie du meilleur Firefox de tous les temps.

Cet article (et ses copies d’écran) sont sous licence Creative Commons By-Sa.

Firefox 3 - Download Day

Cette dernière illustration est extraite de l’opération Download Day 2008 qui vise lors de la sortie de Firefox 3 à établir un nouveau record du monde Guinness du logiciel le plus téléchargé en 24h. J’avoue ne pas être un grand fan de ce type de marketing à l’américaine. Par contre parcourir la carte du monde de ceux qui se sont déjà enregistrés pour participer a quelques chose de fascinant. Ainsi ils sont déjà 61 au Tadjikistan. United Colors of a Free Software World en quelque sorte…




Microsoft Office 2007 désormais gratuite pour tous les enseignants

Copie d'écran - OfficePourLesEnseignants.frIl fallait s’y attendre, la suite bureautique propriétaire Office 2007 de Microsoft est désormais proposé gratuitement à tous les enseignants (ils ne disent pas gratuit mais téléchargeable sans frais ou accessible à tous mais c’est du pareil au même).

C’est annoncé en Une du Café Pédagogique dont j’ai déjà eu l’occasion de pointer les relations plus qu’étroites avec Microsoft.

Du coup sur le très ambitieux site de l’opération on apprend, entre autres choses intéressantes, qu’un forum dédié sera hébergé par le Café Pédagogique.

Il n’y a pour le moment que deux messages d’ouverture et de bienvenue sur ce forum. Ils ont été rédigés par un membre fondateur de l’association Projetice dont, désolé pour la répétition, j’ai déjà eu l’occasion de pointer les relations plus qu’étroites avec Microsoft.

Il n’y a pas à dire ils sont bien organisés…

« Que cache une offre aussi importante ? » demande le Café Pédagogique à Eric le Marois, Directeur Education & Recherche chez Microsoft France. Réponse de l’intéressé : « Rien ».

Bon, je retourne en cours (en salle informatique pour être plus précis, équipée de la suite bureautique libre OpenOffice.org pour être encore plus précis) et m’en irai poster un billet plus complet quand la cloche aura sonné.




La voie négative du Net-Art par Antoine Moreau

Lorsqu’Antoine Moreau prend sa plume pour nous parler d’Art Libre c’est encore de l’Art Libre quand bien même le sujet central de cet article soit l’Art à l’heure d’Internet.

C’est avec plaisir que nous lui ouvrons nos modestes colonnes histoire de partager sa réflexion. Parce qu’il est doux et peut-être salutaire d’entendre parler de forme gracieuse de don à une époque où l’Art peut se perdre dans sa marchandisation baigné dans une Culture qui ne serait plus que de l’entertainment.

L’illustration est une photographie de N. Frespech sous licence Art Libre issue du projet Echoppe Photographique. où les visiteurs sont invités à commander une photographie en laissant un texte dans un formulaire. Il s’agit ici de la Commande 1712 : Chirac en prison. Commandée le 22-11-2007 par Coralie Fonck et reçue le 04-12-2007.

Chirac en prison - Frespech - Licence Art Libre

La voie négative du Net-Art

Un texte d’Antoine Moreau paru dans la revue Terminal, n°101, Printemps 2008.

Que peut être le Net-Art en suite d’une histoire de l’Art traversée par la négation ? Nous tenterons de montrer qu’il est une pratique précise et sensible du réseau des réseaux en intelligence avec son écosystème. Nous ferons la distinction entre « l’Art sur le Net », le « Net-Art » et « l’art du net ». Il s’agira de montrer que le Net-Art, en réalité, n’est pas autre chose que l’art du net : une pratique à la fois ordinaire et éclairée de l’internet. Celle-ci a le souci de la beauté intrinsèque du réseau, elle en observe les qualités qu’on trouve dans les principes fondateurs de l’internet et dans ceux du logiciel libre.

Net-Art : Niet-Art ?

Commençons par une observation : il y a des artistes, reconnus comme tels, qui font de l’art sur le réseau internet. Ils font de l’art avec le net, pour le net et par le net. Ils sont qualifiés de « Net-Artistes ». Les oeuvres créées s’inscrivent dans le lieu où elles évoluent, elles sont très souvent interactives et n’existent que dans le « réseau des réseaux »[1].
En quoi relèvent-elles du « Net-Art » ? Ne persiste-t-il pas, dans ce lieu bouleversant qu’est l’internet, une A.O.A.C. (« Appellation d’Origine Artistique Contrôlée ») qui donne à penser que le Net-Art est le fait d’artistes reconnus comme tels et produisant de l’art lui-même reconnu comme tel ?
Qu’est-ce que le Net-Art en suite du ready-made de Duchamp, de l’exposition du vide de Klein ou des sculptures sociales de Beuys ? De quelle nature est la qualité artistique avec l’internet ? De quelle qualité pouvons-nous parler après qu’on ait pu déceler l’art contemporain comme étant un « Art sans qualités »[2] ?

Nous n’avons pas l’intention de nier aux oeuvres qualifiées de « Net-Art » leur indéniable intérêt. Nous voulons simplement tenter de comprendre comment et pourquoi il y a de l’art par et pour le Net. Que serait-il juste de qualifier de « Net-Art » ? Nous allons commencer par prendre en compte trois constats :

– Premièrement : selon Hegel, l’art est quelque chose de révolu[3]. Après avoir accompli sa tâche, à travers les différentes étapes de son histoire, l’activité artistique laisse la place à d’autres types de productions de l’esprit. Ainsi, la philosophie est, d’après le philosophe de la fin de l’histoire, seule capable désormais de penser l’humanité et d’en former le dessein. Non pas qu’il n’y ait plus d’art possible, mais que c’est à la pensée elle-même de réaliser ce que l’art ne peut plus atteindre.

– Deuxièmement : selon les artistes eux-mêmes, le non-art est l’accomplissement ultime de l’art. Non pas l’avènement de l’iconoclasme, mais de l’art lui-même quand « l’art, c’est ce qui rend la vie plus intéressante que l’art » selon la formule célèbre de Robert Filliou[4]. Ce n’est pas la négation de l’art, mais sa voie négative qui, par un mouvement dialectique, affirme l’art par excellence comme étant l’art de vivre.

– Troisièmement : selon certains observateurs de l’art contemporain, l’art se trouve aujourd’hui « à l’état gazeux »[5]. Disséminé dans toutes activités possibles, il est nulle part et partout à la fois. En fait, selon nous, sa présence est aussi réelle que son absence est manifeste, car la dissolution de l’art dans la réalité n’est pas la disparition réelle de l’art. La réalité de l’art qui nous est contemporain n’est pas tant dans sa « forme formée » que dans sa « forme formante ». Plus que jamais, pour reprendre le mot de Léonard de Vinci, l’art est « causa mentale ». Il est une production de l’esprit qui forme. Il est formant. Sa forme est une formation de l’esprit et l’opération qu’il réalise est la transformation de notre perception où « ce sont les regardeurs qui font le tableau » comme a pu l’observer Marcel Duchamp[6].

Ce que peut être le Net-Art.

En prenant en compte l’état contemporain de l’art, nous pouvons maintenant envisager le « peut-être » du Net-Art selon trois axes. Notre approche sera dialectique, nous allons procéder à chaque fois par « affirmation, négation et négation de la négation »[7].

1/ Le Net-Art c’est l’art qui se pratique par et pour l’internet. Ce n’est pas de l’Art sur le Net.

Affirmation : Une forme d’art sur le réseau internet est une forme d’art visiblement. Une oeuvre plastique qui se trouve sur le Net est déclarée artistique car elle présente toutes les apparences convenues de l’Art reconnu comme tel. Ce sont, par exemple, toutes formes que l’on voit sur les sites web d’artistes et tous types d’objets présentant des qualité artistiques apparentes.?
Négation : Ces objets d’art ne sont pas du Net-Art. Ils ne sont pas faits par et pour le réseau internet. Ils sont en visibilité sur la surface de la Toile[8] mais ne font pas partie de la réalité du réseau. Pour qu’une oeuvre puisse être déclarée « Net-Art », il lui faut être conçue spécialement par et pour le réseau. L’oeuvre de Net-Art n’existe que dans la réalité réticulaire. Sa matière n’est pas seulement numérique, elle fait partie intégrante du flux « on-line » du réseau. C’est le fait des artistes reconnus comme tels et qui investissent l’internet comme champ d’exercice artistique.?
Négation de la négation : Il ne suffit pas que les oeuvres soient du Net-Art pour être véritablement du Net-Art. Elles sont qualifiées ainsi car elles sont réalisées par des artistes qui utilisent le Net pour faire de l’Art. Mais ce sont, la plupart du temps, toujours des objets d’Art selon les critères dévolus aux oeuvres matérielles, quand bien même ils seraient véritablement produits avec le matériau réticulaire et conçues spécialement pour le Net. Dans les faits, il ne suffit pas de réaliser des objets d’Art pour le Net pour que ces objets soient, selon nous, qualifiés de « Net-Art ».?
Pour qu’une forme d’art soit du net-art (nous ne mettons pas de majuscules[9]) il lui faut intégrer ce qui fait la nature même de l’internet et être en intelligence avec l’esprit qui lui a donné corps. Disons-le d’une formule simple : le net-art c’est l’art du net.

2/ Le net-art c’est l’art du net. Ce n’est pas le Net-Art.

Qu’est-ce que le net-art entendu comme « art du net »?
Nous qualifierons de « net-art », toutes formes d’actions et de créations conformes à la forme de l’internet. Ces formes d’actions et de créations peuvent être qualifiées de net-art si et seulement si elles observent les protocoles ouverts de l’internet et les respectent. En effet, l’internet doit son existence à des protocoles ouverts et qui en ordonnent l’architecture et les transports (Web, e-mail, usenet, FTP, IRC, etc.). Basé sur la suite de protocoles TCP/IP[10], l’internet permet ainsi l’accès à tous les ordinateurs quelles que soient leurs particularités. Grâce à ses standards ouverts,[11] l’internet est devenu un réseau non propriétaire et qui a vocation universelle. Il est ouvert à tous, il est fait par tous et pour tous : c’est cela même la réalité du réseau internet, son corps, son esprit.?
C’est la raison pour laquelle nous avançons que c’est l’observation des protocoles du net et le respect des standards ouverts qui va déterminer la qualité artistique des formes. Cette qualité artistique ne se situe pas seulement dans des effets purement formels qui, en surface, font semblant d’art. Elle est dans la prise en considération de l’écosystème du réseau. Cette prise en compte, par tout auteur, du mode d’existence de l’internet peut produire des oeuvres artistiques dans la tradition de l’histoire de l’art, mais aussi des oeuvres qui n’ont pas, à priori, les qualités artistiques pour s’y inscrire. Le net-art (l’art du net) n’est pas le seul fait des artistes reconnus comme tels de la même façon qu’il n’est pas seulement une fabrique d’objets d’art reconnus comme tels.

Le net-art c’est l’art de se conduire dans et avec le net. C’est aussi l’art de conduire le net au mieux de sa forme. Toute technique qui sera en phase avec la réalité de son « moteur » et pas seulement, comme dans de nombreuses oeuvres reconnues comme étant du Net-Art, un formalisme esthétiquement convenu.?
L’esthétique dont il s’agit avec le net-art, tel que nous en proposons la définition, est une esthétique qui procède d’une éthique[12]. Nous entendons cette esthétique comme « es-éthique ». C’est à dire une forme de connaissances et de pratiques qui procède de l’esprit du net et qui précède la mise en forme des objets s’y rattachant. Il s’agit d’une esthétique qui conserve à l’art sa puissance d’action quand, nous l’avons vu, l’art avait été jugé « chose révolue » par ailleurs[13]. Aussi, l’es-éthique du net-art est-il, selon nous, l’esprit de l’art et l’art de l’esprit à l’ère du numérique et de l’internet. La pensée est en forme et forme le dessein d’un art toujours présent quand bien même il aurait pu être révolu à un moment de son histoire.

Par exemple : une simple forme de communication (e-mail, forum de discussion, mailing-list, IRC, etc) peut avoir les qualités de net-art si elle observe la netiquette, c’est à dire l’étiquette du net qu’on trouve dans la Request For Comment n°1855.[14] La netiquette participe de l’es-éthique du réseau des réseaux.?
Pour les formes que les pratiques artistiques investissent ordinairement (textes, images, sons, etc), le net-art (c’est-à-dire : l’art du net) consistera à créer en utilisant des formats ouverts. Ainsi, une page web sera écrite en HTML ou un autre langage comme le PHP et qui tient compte des normes du W3C[15]. Elle n’utilisera pas de codes qui ne permettent pas sa visualisation par n’importe quels logiciels de navigation web. Tout format propriétaire et donc fermé sera honni pour la simple raison qu’ils contredit l’internet en son sens même, en sa forme même, en son art même.?
Il en est de même avec les droits d’auteur que nous allons aborder plus loin dans la partie consacrée au copyleft. Mais avant cela, voyons l’infini du net-art.

3/ Le net-art c’est l’art qui s’offre infini. Ce n’est pas un objet fini.

De la même façon qu’on ne peut confondre un objet d’art avec l’objet même de l’art, on ne peut se méprendre sur la finalité de l’objet de net-art. Inachevé par nature[16], celui-ci n’a pas de fin. Nous le savons par ailleurs, l’objet de l’art ne s’achève jamais dans la fabrication d’un objet d’art, mais il excède son inscription dans la matière. L’objet de l’art passe à travers l’objet d’art fini pour ainsi ne pas choir et être clos dans sa définition.
Le net-art est par excellence un art en flux et en suspens. Il se fait, après qu’il ait été conçu à un moment « t » de son invention, en interaction avec le découvreur qui l’agit sur la Toile. Il n’y a pas d’arrêt sur l’objet, il y a un objet sans fin dont la finalité n’est pas tant l’objet lui-même que ce qui est poursuivi à travers sa production : l’art infini..
Aussi, nous pouvons dire qu’il n’y a pas d’objets de net-art en réalité, mais que l’objet de l’art se manifeste avec l’internet, par et pour l’internet, à travers certaines formes conformes à l’esprit de l’internet. Ces formes ne sont pas l’expression d’un « conformisme » mais manifestent le souci d’être en intelligence avec la forme du net. D’être en phase avec le réseau comme le surfeur peut l’être avec la vague qui le transporte. C’est la raison pour laquelle nous disons que ces formes d’art forment la forme du réseau, qu’elles participent à sa bonne santé, à sa vie. Une vie suspendue entre la naissance et la mort, une vie infinie, non achevée encore dans une supposée maturité, signe avant-coureur de sa fin et de sa destruction..
Ce qui fait la vitalité du net-art, ce en quoi le net-art est vivant et vrai dans sa forme, c’est son immaturité. Cette immaturité du net-art nous l’entendons au sens où Gombrowicz a pu faire comprendre la forme où l’art et la vie sont au mieux de leur forme : ce moment « t » où le temps est suspendu dans la grâce de ce qui advient sans laisser prise au temps, sauf l’éternité.

En effet (…) un postulat erroné veut qu’un homme soit bien défini, c’est à dire inébranlable dans ses idéaux, catégorique dans ses déclarations, assuré dans son idéologie, ferme dans ses goûts, responsable de ses paroles et de ses actes, installé une fois pour toutes dans sa manière d’être. Mais regardez bien comme un tel postulat est chimérique. Notre élément, c’est l’éternelle immaturité[17].

Cette « éternelle immaturité », un présent, un don, une réalité sensible et active du temps imprenable où le net-art est offert aux affects et va se laisser former et transformer à l’infini.
Sans doute le moment est-il venu alors de présenter le copyleft, principe actif de cette immaturité formante que le net-art, quand il est l’art du net, met en pratique.

Le copyleft, principe actif de l’art du net.

Nous voulons maintenant creuser l’élément plastique du net-art. Et ceci en étendant la notion de plasticité non seulement aux arts visuels, mais à tout type d’art qui fait forme et à toute forme quand elle est aussi explosion de la forme[18]. Non pas dans l’intention de détruire la forme, mais dans celle d’en renouveler la puissance plastique grâce à toutes les altérations possibles issues de l’ouverture.
Les droits d’auteurs sont en première ligne car le net-art plastique les droits d’auteurs. Le net-art c’est l’explosion du moteur à création. Non pas, faut-il le préciser encore une fois, sa destruction, mais la remise en forme de sa puissance de transport comme de sa beauté formelle et mécanique.

Explication : le net-art ne peut faire l’économie des droits d’auteurs. L’internet n’est pas, par la vertu du numérique et de la technologie, une zone de non-droit. Dura lex sed lex[19], le droit s’applique, même sur l’internet. Pour qu’une oeuvre soit qualifiée de net-art, il lui faut respecter aussi le droit des auteurs. Mais comment faire, quand le droit d’auteur interdit la copie, la diffusion et la transformation des oeuvres ? Car si nous observons bien l’es-éthique du réseau, comme nous l’avons vu avec les standards ouverts, une oeuvre de net-art devra être librement accessible, copiable, diffusable, transformable et devra interdire, en outre, l’appropriation exclusive.

Liberté d’étudier, de copier, de diffuser, de transformer et interdiction d’appropriation exclusive, ces principes sont également ceux du logiciel libre mis en place avec le projet GNU[20] de la Free Software Foundation[21] en 1984 et formalisés dans une licence juridique, la General Public License[22]. C’est ce qu’on appelle le « copyleft ». Loin d’être une négation ou un déni des droits des auteurs, le copyleft en reformule la pertinence en fonction des pratiques et des matériaux.

Du logiciel libre à l’art libre il n’y a eu qu’un pas. Celui-ci a été franchi à notre initiative lors des rencontres Copyleft Attitude[23] qui ont eu lieu à Paris en 2000. Elles ont donné naissance à la Licence Art Libre[24], directement inspirée par la General Public License. Il s’agissait d’appliquer les principes du copyleft à tout genre de création.

L’intention est d’ouvrir l’accès et d’autoriser l’utilisation des ressources d’une oeuvre par le plus grand nombre. En avoir jouissance pour en multiplier les réjouissances, créer de nouvelles conditions de création pour amplifier les possibilités de création[25].

Là aussi, il s’agit d’un mouvement dialectique qui procède d’une négation de la négation. Le plasticage de l’art opéré par le copyleft, n’est pas sa destruction, mais sa remise en forme. Un retournement de situation quand les matériaux sont des immatériaux, quand la rareté de l’oeuvre d’art est en profusion et quand la forme est formée par des affects qui la reforment à l’infini.

Mieux : le net-art est un art par excellence pour la raison qu’il réalise cette forme qui est le signe même de l’apparition de l’art dans l’histoire : la forme gracieuse.

Négation de la pesanteur, si ce n’est un don du ciel, c’est un art qui ne doit pas paraître en être un, un art dissimulé. Le seul effort qu’il faut faire consiste à le cacher, car montrer qu’il s’agit d’un art serait le meilleur moyen d’étouffer la grâce[26].

Le net-art, une forme gracieuse.

En poursuivant l’intuition que nous avons eue il y a quelques années et qui considère que « l’oeuvre, c’est le réseau »[27], nous pouvons dire que l’internet est lui-même, par nature, une forme gracieuse. Une forme d’art, cela va sans dire.
Cet « état de grâce » propre au net se trouve également dans le logiciel libre et l’art libre car la mise à disposition, par un auteur, de données sur le réseau procède d’une beauté certaine du geste. Cette beauté du geste n’est pas gratuite, le copyleft ne s’oppose pas au commerce, elle est précisément gracieuse. Elle n’est pas non plus gratuite au sens d’arbitraire, elle est justifiée par l’éthique, l’es-éthique. Il s’agit bien d’une forme de pratiques et de productions de l’esprit qui posent la grâce comme condition d’exercice.

Ainsi, la kharis notion de la grâce antique circule entre objet et sujet. Cette idée de beauté (qui n’apparaît que tardivement dans la gratia latine) domine toute la conception grecque de la kharis. Comme faveur, la beauté est ce qui est offert aux regards – ou aux oreilles – des tiers : toute beauté est don généreux. Ce qui est remarquable dans cette notion de kharis, c’est sa capacité à exprimer en même temps une propriété des êtres (leur séduction allant jusqu’au kharisma), l’action de ces charmes sur autrui, l’état de plaisir de qui le perçoit et la gratitude ressentie pour cette faveur. Tel est « l’état de grâce »[28].

Nous affirmons, en suite de Winckelmann[29], inventeur de l’histoire de l’art et qui a su pointer le moment de sa naissance et de sa renaissance, qu’il y a art quand il y a forme gracieuse, beauté du geste et dons. Le moment où l’artiste est doué de dons, ceux qu’il donne en retour sous formes gracieuses à travers des productions librement offertes comme abandon de toute pesanteur[30].
Des données numériques qui sont librement accessibles, copiables, diffusables et transformables selon le copyleft, procèdent de cette liberté qui fait, non seulement la beauté du geste, mais rend l’art possible et existant. Lorsque cette liberté disparaît, l’art disparaît également et la forme gracieuse avec lui.

L’art, qui avait reçu la vie de la liberté elle-même, devait nécessairement, avec la perte de cette liberté, décliner et mourir au lieu même de sa plus belle floraison[31].

Ainsi, le moment politique de la naissance de l’art aura été celui où la grâce aura pu prendre forme librement. La première fois dans la Grèce antique et la deuxième fois, à la Renaissance au XVe et XVIe siècles avec la redécouverte de l’art grec classique et de sa forme gracieuse.

Nous posons qu’une troisième naissance et renaissance de l’art est à l’oeuvre, aujourd’hui, à l’ère de l’internet et du numérique. Cette re-renaissance de l’art se fait avec l’art libre selon les principes du copyleft. Le net-art, tel que nous l’avons défini, en est l’exercice par excellence car il procède d’une forme gracieuse de dons, de données et de libertés.

Antoine Moreau, « La voie négative du Net-Art », mars 2007, un texte écrit pour la revue Terminal n° 101, Printemps 2008.
Copyleft : ce texte est libre, vous pouvez le copier, le diffuser et le modifier selon les termes de la Licence Art Libre.

Bibliographie :

  • BLONDEAU Olivier, LATRIVE Florent, Libres enfants du savoir numérique, anthologie du « Libre » préparée par, L’Éclat, 2000.
  • BOURGEOIS Bernard, Le vocabulaire de Hegel, Ellipses, Paris 2000.
  • BRUAIRE Claude, La dialectique, PUF, Paris, 1985.
  • CLAVERO Bartolomé, La grâce du don, anthropologie catholique de l’économie moderne, Albin Michel, Paris, 1996.
  • COMETTI Jean-Pierre, L’Art sans qualités, farrago, Tours, 1999.
  • COUCHOT Édomond, HILLAIRE Norbert, L’Art numérique, comment la technologie vient au monde de l’art, Flammarion, Paris, 2003.
  • FOURMENTRAUX Jean-Paul, Art et Internet, les nouvelles figures de la création, CNRS Éditions, Paris 2005.
  • GOMBROWICZ Witold, Moi et mon double, Gallimard Quarto, 1996.
  • HÉNAFF Marcel, Le prix de la vérité, le don, l’argent, la philosophie, Éditions du Seuil, Paris, 2002.
  • HIMANEN Pekka, L’Éthique hacker et l’esprit de l’ère de l’information, Exils, 2001.
  • MALABOU Catherine, La plasticité au soir de l’écriture. Dialectique, destruction, déconstruction. Éditions Léo Scheer, 2005
  • MICHAUD Yves, L’art à l’état gazeux, Hachette, Paris, 2004.
  • PERLINE, NOISETTE Thierry, La bataille du logiciel libre, La Découverte, Paris, 2004.
  • POMMIER Édouard, Winckelmann, inventeur de l’histoire de l’art, Gallimard, 2003.

Webographie :

Notes

[1] Une base de données importante de Net-Art sur le site rhizome.org : (page visitée le 05/03/07)

[2] J.P. COMETTI, L’Art sans qualités, farrago, Tours, 1999.

[3] « L’art n’apporte plus aux besoins spirituels cette satisfaction que des époques et des nations du passé y ont cherchée et n’ont trouvé qu’en lui . L’art est et reste pour nous, quant à sa destination la plus haute, quelque chose de révolu. Il a, de ce fait, perdu aussi pour nous sa vérité et sa vie authentique. » HEGEL, Cours d’esthétique, Tome 1, Aubier, Paris, 1995-1997, p. 17 & 18, cité par B. BOURGEOIS, Le vocabulaire de Hegel, Ellipses, Paris 2000, p. 12.

[4] Cité par S. JOUVAL, « Robert Filliou : "Exposition pour le 3e oeil" », Robert Filliou, génie sans talent, catalogue d’exposition, Musée d’art moderne de Lille, 6 décembre 2003 au 28 mars 2004, Éditions Hatje Cantz 2003, p. 8.

[5] Y. MICHAUD, L’art à l’état gazeux, Hachette, Paris, 2004.

[6] Marcel Duchamp, Duchamp Du signe, écrits, Flammarion, 1975, p. 247.

[7] Formule rappelée par Marx dans un lettre polémique adressé à Proudhon. MARX, Misère de la philosophie, cité par Claude BRUAIRE, La dialectique, PUF, Paris, 1985, p. 8.

[8] Nom donné au World Wide Web.

[9] Pour la raison que le net n’est pas une marque, c’est un nom commun et que l’art aujourd’hui n’a plus les qualités de l’Art.

[10] Ensemble de protocoles de communication utilisé par l’internet (page visitée le 10/10/06)

[11] « On entend par standard ouvert tout protocole de communication, d’interconnexion ou d’échange et tout format de données interopérable et dont les spécifications techniques sont publiques et sans restriction d’accès ni de mise en œuvre. » Journal Officiel n° 143 du 22 juin 2004 : loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (référence NOR: ECOX0200175L). Définition trouvé dans : Titre Ier (De la liberté de communication en ligne), Chapitre Ier (La communication au public en ligne), Article 4. Sur le site formats ouverts, (page visitée le 10/10/06)

[12] P. HIMANEN, L’Éthique hacker et l’esprit de l’ère de l’information, Exils, 2001.

[13] C’est la raison pour laquelle nous parlons de « l’esprit du net » qui, comme pour l’art, ne saurait être réduit à sa seule technicité ou matérialité. L’internet, plus qu’une intelligence matérialisée est une spiritualité pratique (c.f. P. HADOT, Exercices spirituels et philosophie antique, Albin Michel, 2002).

[14] « Les règles de la Nétiquette », RFC 1855, traduction Jean-Pierre Kuypers, sur le site UCL/SGSI Infrastructures des réseaux du système d’information (SRI) (page visitée le 13/02/07)

[15] Le consortium qui se porte garant de l’interopérabilité du Web (page visitée le 13/02/07)

[16] Par la nature même du numérique, sa matérialité de fait.

[17] GOMBROWICZ, Moi et mon double, Ferdydurke, introduction à « Philidor Doublé d’enfant », Gallimard Quarto, 1996, p. 338.

[18] # « Rappelons que selon son étymologie – du grec plassein, modeler – le mot « plasticité » a deux sens fondamentaux. Il désigne à la fois la capacité à recevoir la forme (l’argile, la terre glaise par exemple sont dites « plastiques ») et la capacité à donner la forme (comme dans les arts ou la chirurgie plastiques). Mais il se caractérise aussi par sa puissance d’anéantissement de la forme. N’oublions pas que le « plastic », d’où viennent « plastiquage », « plastiquer », est une substance explosive à base de nitroglycérine et de nitrocellulose capable de susciter de violentes détonations. On remarque ainsi que la plasticité se situe entre deux extrêmes, d’un côté la figure sensible qui est prise de forme (la sculpture ou les objets en plastique), de l’autre côté la destruction de toute forme (l’explosion). » C. MALABOU, La plasticité au soir de l’écriture. Dialectique, destruction, déconstruction. Éditions Léo Scheer, 2005, note de bas de page p. 25 et 26.

[19] La loi est dure mais c’est la loi.

[20] GNU is Not UNIX, projet de la Free Software Foundation qui formalise le logiciel libre avec la licence GNU/GPL. (page visitée le 23/02/07).

[21] FSF.org (page visitée le 23/02/07).

[22] Licence libre copyleft pour les logiciels

[23] Avec des artistes regroupés autour de la revue Allotopie (page visitée le 14/02/07)

[24] Rédigée par Mélanie Clément-Fontaine et David Geraud, juristes et Isabelle Vodjdani et Antoine Moreau, artistes.

[25] Extrait du prologue de la Licence Art Libre 1.2.

[26] Éd. POMMIER, Winckelmann, inventeur de l’histoire de l’art, Éditions Gallimard, 2003, p. 59.

[27] Citée dans le numéro spécial Artpress, l’Art et la Toile, « Internet all over ? » novembre 1999, N. HILLAIRE, p. 9 et Éd. COUCHOT, N. HILLAIRE, L’Art numérique, comment la technologie vient au monde de l’art, Flammarion, Paris, 2003, p. 72.

[28] M. HÉNAFF, Le prix de la vérité, le don, l’argent, la philosophie, Éditions du Seuil, Paris, 2002, p.326.

[29] Éd. POMMIER, Winckelmann, inventeur de l’histoire de l’art, Gallimard, 2003.

[30] Nous sommes là également proche du moment mystique décrit par Simone WEIL, La pesanteur et la grâce, Plon, Agora, 1988.

[31] J.J. WINCKELMANN, Histoire de l’art de l’Antiquité, Darmstadt, 1982, cité et traduit par Éd. POMMIER, idem.




Lorsque vous démarrez votre ordinateur vous vous engagez politiquement

« Mais que fais-tu donc derrière ton ordinateur ? » est une question qui me revient assez souvent. Lorsque je dispose d’un peu de temps devant moi il m’arrive de répondre d’applomb : « Je participe à la prochaine révolution ! ».

C’est vrai après tout. Tant qu’à y passer du temps autant que ce soit pour une bonne raison 😉

C’est évidemment une boutade à la limite de la provocation mais elle a le mérite de piquer la curiosité de mon interlocuteur. Et alors de lui évoquer en vrac le logiciel libre, son mouvement, sa culture, ses extensions du domaine comme Wikipédia, Creative Commons, PLoS, etc.

Bref, en gros, tout ce que contient cette nouvelle traduction (by Olivier et Daria from Framalang Institute). C’est un article exotique puisqu’il nous vient d’Inde. Mais il m’est plus familier que bon nombres d’articles de mes propres compatriotes. En imaginant qu’il y ait des V. Sasi Kumar dans tous les pays du monde, il y a de quoi être optimiste…

Crédit photo : Vibrantly Rabari par Meanest Indian (Creative Commons By)

Vibrantly Rabari - Meanest Indian - CC by

Une nouvelle vague de liberté

A new wave of freedom

V. Sasi Kumar – Mai 2008 – Frontline Magazine (India)

Le nouveau mouvement de liberté, dans les logiciels, le savoir, la publication et le commerce va complètement bouleverser notre manière de penser, de faire les choses et d’interagir.

« Toute action qui est dictée par la peur ou par la contrainte de quelque nature que ce soit cesse d’être morale »
Mahatma Gandhi

Politiquement, nous ne jouissons pas de certaines libertés que nous méritons. Une nouvelle vague de mouvements pour la liberté, pour rendre concrètes ces libertés, balaie actuellement le monde, un mouvement qui modifiera notre façon de penser, notre façon de faire les choses et notre manière d’interagir. Il a pris sa source aux États-Unis et vise à libérer les gens des serres des monopoles capitalistes. Ici le rôle de Gandhi est joué par une personne extraordinaire qui porte les cheveux longs et a une longue barbe, un homme qui répond au nom de Richard Mathew Stallman, qui rejette avec énergie toute comparaison à Gandhi ou Nelson Mandela.

Gandhi disait « Tant que nous ne sommes pas complètement libres nous sommes des esclaves ». L’évolution des technologies a permis à l’humanité de jouir d’une plus grande liberté. Cependant, des intérêts particuliers, avec l’aide des législateurs, parviennent maintenant à empêcher la société de jouir de cette liberté. Par exemple, avec l’avènement des ordinateurs et d’Internet, les données, les informations et la connaissance peuvent être transmises instantanément à la condition que des deux côtés il y ait ordinateur raccordé à Internet. Toutefois, certaines de nos lois conçues pour une ère dépassée empêchent les peuples de profiter pleinement de cette technologie.

Le nouveau mouvement de liberté parvient à se frayer un chemin autour de ces lois. Et, de façon intéressante, ce mouvement n’est mené par aucun parti politique ni aucun activiste politique, mais bien par des programmeurs informatiques (ou hackers). Voyons de quelles manières nos libertés sont réduites et par quels moyens nous pouvons les reconquérir même au sein du paradigme actuel.

Lorsque vous démarrez votre ordinateur vous vous engagez politiquement. Cela peut vous paraitre absurde de chercher un aspect politique à une chose aussi triviale. Mais c’est là un fait. A l’aube de l’informatique, ce sont les utilisateurs qui écrivaient leurs propres programmes et se les échangeaient selon leurs besoins. Personne alors ne détenait de droit exclusif sur ces programmes. A l’époque les ordinateurs étaient imposants et chers, ils occupaient souvent une salle entière mais étaient bien moins puissants que les PC d’aujourd’hui, même les plus petits. A mesure que la technologie a évolué les ordinateurs sont devenus plus petits et aussi plus puissants.

C’est vers le début des années 80 que les fabricants d’ordinateurs ont commencé à imposer ce qu’on appelait des accords de dissimulation aux programmeurs qu’ils engageaient pour écrire les logiciels. Ces accords interdisaient aux développeurs de révéler le code source de leurs programmes (NdT : leur secret de fabrication). Et ainsi les logiciels sont devenus un produit que les utilisateurs doivent payer. Évidemment, certains utilisateurs ont continué à écrire des programmes pour leurs propres besoins, et ils continuent encore aujourd’hui, mais les logiciels tout-prêts sont devenus accessibles en échange d’un paiement et les utilisateurs d’ordinateurs se sont mis à les utiliser de plus en plus.

Les logiciels pour tous

C’est en réaction à cette marchandisation du logiciel que Richard Stallman, alors employé du Laboratoire d’Intelligence Artificielle du Massachusetts Institute of Technology (MIT), a décidé de créer un système d’exploitation (ou OS pour operating system) et des programmes qui rendraient aux utilisateurs la liberté. Il croyait que les logiciels sont comme la connaissance (il les compare souvent à des recettes de cuisine) et que comme la connaissance les logiciels ne devraient pas être la propriété d’une personne ou d’un organisme. Ils devraient appartenir à l’humanité toute entière.

Stallman a écrit : « De quoi à donc besoin la société ? Elle a besoin d’informations qui sont réellement disponibles aux citoyens, par exemple des programmes que des gens peuvent lire, réparer, adapter et améliorer, pas seulement utiliser. Mais en général les propriétaires des logiciels ne fournissent qu’une boîte noire qu’on ne peut ni étudier ni modifier. La société a également besoin de liberté. Quand un programme est possédé, les utilisateurs perdent la liberté de contrôler une partie de leur propre vie. » (source)

Stallman a initié un projet nommé GNU pour créer des logiciels libres et il a décidé de façonner son OS libre d’après Unix qui était alors très populaire. Unix était un OS propriétaire qui pouvait gérer plusieurs utilisateurs simultanément, il pouvait interconnecter les ordinateurs et était très sécurisé. A l’époque, de nombreux programmeurs avaient pris l’habitude de baptiser un nouveau programme qui était similaire à un autre pré-existant en créant un acronyme signifiant que ce n’était justement pas ce programme.

Ainsi, par exemple, un nouvel éditeur de texte similaire à l’éditeur existant Emacs se nommait Eine pour Eine Is Not Emacs (NdT : Eine n’est pas Emacs). De même, Stallman baptisa son système d’exploitation GNU pour GNU is Not Unix. Il sera plus tard combiné avec le noyau Linux (la partie centrale d’un OS) pour donner naissance au système d’exploitation GNU/Linux. Il existe maintenant plusieurs noyaux qui peuvent être utilisés avec GNU, comme FreeBSD, Open Solaris etc.

« Pour les logiciels libres ce qui importe est la liberté, pas le coût. C’est une question de liberté, pas de prix. Le mot "libre" dans "logiciel libre" a une signification proche de celle dans liberté de parole, peuple libre ou pays libre et ne devrait être confondu avec une autre signification associée à coût zéro. Il faut que vous voyez "logiciel libre" comme libre de fardeau, pas nécessairement libre de frais. Il faut le voir comme logiciel swatantra (NdT : libre ou indépendant en sanskrit) » précise la Free Software Foundation d’Inde. Les logiciels libres apportent quatre libertés aux utilisateurs :

  1. La liberté de les utiliser sur un nombre illimité d’ordinateurs pour n’importe quelle tâche ;
  2. La liberté de partager le logiciel dans votre cercle familial ou d’amis ;
  3. La liberté d’étudier et de modifier le logiciel ;
  4. La liberté de redistribuer les modifications.

(NdT : toute la confusion entre libre et gratuit provient du double sens de "free" en anglais)

La troisième liberté implique que ce que l’on appelle le code source (le texte compréhensible par l’Homme) du programme devrait être mis à disposition de tout utilisateur souhaitant l’obtenir. Mais on peut se demander ce que peuvent en faire les utilisateurs. Alors que la plupart d’entre eux seraient certainement incapables de l’étudier ou de le comprendre, sans même parler de le modifier, cette liberté permet à tout un chacun de demander à un programmeur de le modifier et permet également aux programmeurs de par le monde au moins d’étudier le programme pour vérifier que rien de ce qu’il contient ne constitue une menace pour les utilisateurs. Concrètement, les sociétés et autres organisations peuvent modifier le programme pour qu’il réponde à leurs besoins.

Stallman a rapidement démissionné du MIT par crainte que le MIT revendique les droits sur son travail. Il était quasiment une entreprise à un seul employé lorsqu’il a démarré le projet GNU en 1984 mais des dizaines de milliers de personnes du monde entier l’on rejoint ensuite. En 1985 il a lancé la Free Software Foundation (FSF). Aujourd’hui, en plus de la FSF à Boston aux Etats-Unis on retrouve des FSF en Europe, en Inde et en Amérique Latine. Et les logiciels libres sont devenus suffisamment puissants, et populaires aussi, pour défier la puissance de nombreuses entreprises de logiciels propriétaires.

Libre et populaire

Par exemple, toutes les écoles du Kerala n’emploient que des logiciels libres et tous les ordinateurs du gouvernement du Kerala sont en cours de migration vers les logiciels libres. Les écoles de la province d’Estrémadure en Espagne en font de même. Mais bien avant eux la ville de Munich avait déjà décidé de faire migrer tous ses ordinateurs vers des logiciels libres. De nombreuses entreprises et organismes gouvernementaux ont déjà effectué la migration (comme ELCOT dans la Tamil Nadu) ou sont en train de le faire (comme le Kerala State Electricity Board par exemple). Bien que le gouvernement du Kerala ait adopté une politique des TIC promouvant explicitement les logiciels libres, le gouvernement de l’Inde n’a pas encore pris une telle décision. Espérons que le gouvernement de l’Inde à son tour proclame la liberté des logiciels.

Les logiciels sont vraiment identiques à la connaissance comme l’a découvert Stallman. La ressemblance peut être établie de manière très détaillée. Plutôt que d’énumérer tous les arguments on peut signaler qu’un vaste ensemble de savoirs est disponible au format numérique et, pour un ordinateur, il n’y a pas beaucoup de différence entre un programme et un savoir numérisé comme un fichier texte, une image ou une vidéo. Dans ce cas il devrait être possible de libérer aussi la connaissance, tout comme le projet GNU a libéré les logiciels.

En mars 2000, Jimmy Wales, un entrepreneur américain de l’Internet, a lancé Nupedia, une encyclopédie en ligne dont le contenu est libre, le précurseur du Wikipédia actuel. Le contenu de l’encyclopédie était sous licence Nupedia Open Content License qui autorisait à n’importe qui de la copier, modifier et distribuer mais qui défendait quiconque d’en faire payer le contenu. Le contenu était rédigé par des volontaires dont les connaissances dans le domaine étaient évaluées par un comité et le contenu était soumis à révision avant publication. Les coûts de fonctionnement de Nupedia étaient couverts par Bomis, une entreprise Internet que détenait Wales.

Mais le succès de Wikipédia apporta un coup d’arrêt à Nupedia en 2003. Une majorité des contributeurs n’étaient pas satisfaits des lourdeurs du contrôle éditorial exercé sur les contributions et Stallman et la FSF étaient en faveur d’une plus grande liberté laissée aux contributeurs. Par conséquent la FSF a lancé une nouvelle encyclopédie appelée GNUPedia en 2001. Mais comme Wales possédait déjà le nom de domaine gnupedia.org elle a été renommée GNE (pour GNE is Not an Encyclopedia) sur la même idée que GNU.

GNE a eu une vie plus courte encore, en partie à cause de son incapacité à décider du poids du contrôle éditorial mais surtout parce que Nupedia a lancé Wikipédia en 2001 qui offrait une liberté totale et dont le contenu était placé sous la GNU Free Documentation Licence. Apparemment ce serait Stallman qui aurait le premier évoqué l’idée d’une encyclopédie en ligne libre en 1999.

Même s’il a lancé GNE, depuis son échec, il supporte Wikipédia. Aujourd’hui Wikipédia est l’encyclopédie la plus populaire avec plus de deux millions d’articles rien que pour la langue anglaise et bien plus encore dans d’autres langues. Parmi ces autres langues on en dénombre huit qui dépassent les 300 000 articles chacune et huit autres encore qui dépassent la barre des 100 000 articles chacune.

On recense 254 langues du monde possédant au moins une page Wikipédia. Les dialectes indiens ne sont pas bien représentés dans Wikipedia. Le premier est le telugu avec 38 000 articles, suivi par le bishnupriya manipuri avec 23 000 articles, le bengali (17 000), l’hindi (16 500), le marathi (16 200) et le tamil (13 000). Aucun autre langage indien ne compte plus de 10 000 articles. Il est acquis maintenant que l’encyclopédie Malayalam, publiée par le gouvernement du Kerala, mettra tous ses articles sur Wikipédia.

Même s’il est vrai que le nombre d’utilisateurs d’Internet ne représente qu’un infime pourcentage de la population, ce pourcentage est amené à croitre et la disponibilité de l’information en langues indiennes sera certainement d’une grande utilité à tous les Indiens, en Inde et à l’étranger.

Wikipédia est actuellement dirigée par une organisation à but non lucratif, la Wikimedia Foundation, grâce aux contributions du public. D’autres projets sont dans les cartons aujourd’hui, comme Wikibooks, Wikinews et Wiktionary. Tous les documents, y compris le texte et les illustrations, sur tous ces sites peuvent être copiés, modifiés et utilisés librement à toute fin sans violer de lois du droit d’auteur. C’est réellement la liberté du savoir.

Un autre projet connexe est WikiMapia. En reprenant une citation de Wikipédia : « WikiMapia est un projet inspiré par Google Maps et par Wikipédia. WikiMapia utilise les vues satellitaires de Google Maps et permet de les annoter avec un système wiki. Les Russes Alexandre Koriakine et Evgeniy Saveliev ont lancé ce projet le 24 mai 2006. Le projet est destiné à « cartographier et décrire la planète Terre » vue par satellite. Il fait partie des 1 000 sites les plus visités et recense plus de 6 millions d’endroits annotés. Alors qu’aucune inscription n’est requise pour éditer WikiMapia, plus de 153 000 utilisateurs partout dans le monde sont actuellement inscrits. »

Le terme "connaissance" est utilisé ici dans une conception large et désigne aussi bien des articles que des livres, des histoires, des images, de la musique, des films, etc. Il faut se rappeler que chaque support possède certaines particularités que les autres n’ont pas. Ainsi par exemple, un article sur l’astronomie indienne contient principalement de la documentation issue de sources variées même si la présentation finale de l’information est celle propre à l’auteur. Mais une histoire (un roman, une nouvelle…) est le travail créatif émergeant complètement de l’imagination de l’auteur.

Ainsi, pour les humains, la connaissance se distingue des logiciels par une différence fondamentale. En effet, contrairement aux logiciels, certaines formes de connaissance ne se prêtent pas aux modifications anonymes. Par exemple, une interview avec une personnalité doit conserver sa forme et son contenu puisque c’est le compte-rendu d’une vraie conversation. Il serait dangereux de laisser quiconque la modifier.

D’un autre côté, la liberté pourrait être accordée, par exemple, de la publier ailleurs sans modification. De même, un artiste ne souhaiterait peut-être pas que n’importe qui puisse modifier sa peinture, même si cela ne poserait pas de problème. Il n’est donc pas suffisant de disposer d’une seule licence pour toutes les formes de savoir contrairement aux logiciels. Mais alors quelle est la solution ?

Creative Commons

La solution a d’abord était proposée par Creative Commons (CC) en décembre 2002. CC a été lancé par Lawrence Lessig, Professeur à la Stanford Law School, avec quelques amis pour répondre précisément à ce problème. « Creative Commons a repris l’idée "offrir des licences de droit d’auteur libres" du Free Software Movement. Mais le problème que nous essayions de résoudre était quelque peu différent » dit Lessig.

En quoi était-il différent ? « Nous ne partions pas d’un monde sans culture propriétaire. Au contraire, la culture propriétaire avait toujours été là, les œuvres étaient protégées par un droit exclusif. (…) Mais globalement, le fardeau imposé par le droit d’auteur aux autres créateurs et sur la culture en général était léger. Et une somme importante de travail créatif pouvait se faire hors des contraintes de la loi. Tout ceci a commencé à changer avec la naissance des technologies numériques et pour une raison que personne n’a vraiment cherché à comprendre. » (source).

Une autre raison a entraîné la formulation de ces licences. Après la Convention de Berne en 1886 il n’était plus nécessaire de déclarer un droit d’auteur. Tout œuvre originale tombe automatiquement sous le régime du droit d’auteur. Et finalement il n’est plus devenu nécessaire de marquer un document comme protégé par le droit d’auteur. Sauf déclaration contraire, tout document qui n’appartient pas au domaine public est protégé par le droit d’auteur.

Rien que de savoir si un document est protégé par les lois du droit d’auteur devient par conséquent difficile. Cela rend la ré-utilisation d’œuvres déjà disponibles très compliquée. De plus, les auteurs désirant offrir certaines libertés aux autres n’ont aucun moyen de le faire. Ils n’avaient le choix qu’entre le droit d’auteur et le domaine public (qui concède tous les droits à tout le monde).

Creative Commons propose plusieurs licences grâce auxquelles le créateur peut offrir certaines libertés aux gens, ou, comme le dit CC, Certains Droits Réservés en opposition au Tous Droits Réservés du régime "classique" du droit d’auteur. CC dispose de quatre licences principales : Attribution (notée by), Noncommercial (nc), No Derivative Work (nd) et Share Alike (sa) (NdT : Paternité, Pas d’Utilisation Commerciale, Pas d’œuvre Dérivée et Partage à l’Identique). Ces licences peuvent être combinées pour produire de nouvelles licences comme by-sa, by-nc-nd etc. qui sont plus utiles que les licences principales.

CC a également élaboré une Licence de Sample qui permet aux autres d’utiliser des portions de votre œuvre dans leur propre œuvre. Vous vous souvenez de la jeune auteure indienne, Kaavya Viswanathan, punie il y a quelques temps pour l’utilisation de passages d’autres livres dans sa nouvelle, même si les lecteurs appréciaient sa nouvelle ?

Un développement intéressant permis par CC a été la création d’un morceau de musique par la collaboration d’artistes qui ne se sont jamais rencontrés. Colin Mutchler, un défenseur de l’utilisation des média et de la technologie pour donner envie aux gens de prendre des mesures en faveur d’une économie durable, a envoyé My Life, une chanson joué à la guitare acoustique, sur Opsound, un répertoire de musique qui impose aux morceaux soumis d’être sous licence Attribution-Share Alike ; Cora Beth, une personne complètement inconnue de Colin, y a ajouté un violon pour créer My Life Changed. Aucun avocat de la Propriété Intellectuelle n’a été consulté, ou maltraité, pour cela. Gilberto Gil, le ministre brésilien de la Culture et musicien lauréat d’un Grammy Award supporte la liberté de la culture et a sorti quelques-unes de ses musiques sous la licence CC Sampling.

Rentable également

Une question qu’il est naturel de se poser est alors : est-ce que le créateur ne va pas perdre ses revenus s’il permet aux gens d’utiliser ses créations librement ? L’expérience montre que ça n’est pas le cas. Par exemple, les groupes de musique affirment que les téléchargements de musique libre en fait les aident à faire plus de concerts et leur source de revenus principale est la scène (source). Une recherche sur Google vous fera découvrir d’autres études de ce genre.

Comme Stallman et d’autres l’ont suggéré, un lien sur la page de téléchargement peut permettre aux utilisateurs d’effectuer un paiement volontairement. Pour une œuvre assez bonne cela peut apporter à son auteur une somme appréciable. De toute façon des copies illégales de la plupart des films ou des musiques sont disponibles gratuitement, particulièrement dans les pays émergents et rien n’est arrivé, ni à l’industrie de la musique, ni à celle du film.

Cependant, à long terme, les industries de l’édition, du disque et du cinéma pourraient avoir à adopter un nouveau paradigme qui pourrait être défini par les nouvelles technologies qui émergeront à coup sûr, même si ces industries se sont toujours montrées très attachés aux anciens paradigmes et qu’elles font tout ce qu’elles peuvent pour ne pas changer. Souvenez-vous des protestations de l’industrie de la musique lorsque l’enregistreur cassette a été inventé. Pourtant jusqu’à maintenant aucun changement drastique n’est en vue.

L’industrie du disque aux États-Unis a réussi à mettre le législateur de son côté pour subvenir à ses propres besoins au travers de la technologie des DRM (NdT : Digital Rights Managements ou Mesures Techniques de Protection) et une loi associée et le DMCA (NdT : Digital Millenium Copyright Act dont la loi DADVSI est la transposition en droit français). Stallman et les partisans du logiciel libre appellent les DRM Digital Restrictions Managements (ou Mesures Techniques de Privation). Les DRM empêchent en fait les gens de copier les œuvres incorporant cette technologie ou encore de jouer l’enregistrement sur un autre lecteur. Par conséquent, le mot Restrictions (Privations) semble plus approprié.

Les fans de musique se sont opposés à cette politique et on peut trouver beaucoup d’articles sur le Web à ce sujet. Ils disent que les DRM les empêchent même d’exercer leur droit à la copie privée. Les opposants ont créé des logiciels qui peuvent outrepasser la technologie DRM. Mais le DMCA (NdT : tout comme la DADVSI) rend illégal la création ou l’utilisation d’une technologie visant à briser les DRM. Heureusement, ces lois ne sont actuellement en vigueur que dans quelques pays. L’industrie du disque fait pression sur l’Inde et d’autres pays pour adopter ces lois. Mais espérons que l’Inde choisisse d’offrir les bénéfices des technologies à son peuple plutôt qu’aux industriels.

Les publications dans des revues scientifiques étaient à l’origine faites pour communiquer les résultats des recherches à d’autres scientifiques. La première revue scientifique au sens moderne est le Philosophical Transactions de la Royal Society of London dont la publication a commencé en 1665. A l’époque, seule l’imprimerie permettait cette communication. La plupart des premiers journaux étaient édités par des sociétés de chercheurs comme la Royal Society. Avec l’augmentation du nombre de revues et de chercheurs, les éditeurs se sont dits qu’une manne leur tendait les bras.

Quelques grandes maisons d’édition ont investi le marché et, bizarrement, le prix des revues s’est aussi mis à augmenter. Finalement, la communauté scientifique a commencé à se révolter contre les revues qui faisaient payer le prix fort. En 2001, deux organisations ont co-publié Declaring Independence.

Rémunérer l’éditeur

L’édition scientifique est à bien des égards différente des autres formes d’édition. Ici les articles sont rédigés par les chercheurs et relus par des chercheurs. Les éditeurs du journal sont souvent eux-mêmes des chercheurs également. Les maisons d’édition ne font qu’imprimer et envoyer le journal aux abonnés. Le salaire des chercheurs provient essentiellement de l’argent public. Leur travail de recherche est également financé par l’argent public. Et pourtant c’est la maison d’édition qui détient les droits sur les articles.

Les chercheurs et le public doivent s’abonner à ces journaux (ils doivent payer l’éditeur) pour avoir accès aux informations obtenues grâce à l’argent public. Et le prix des journaux a commencé à augmenter au point que certaines universités parmi les plus aisées dans les pays industrialisés ont de plus en plus de mal à s’abonner à tous les journaux qui traitent de leurs activités. C’est dans ces conditions que les scientifiques ont commencé leur révolte. On attribue la naissance du mouvement à une pétition de 2001 à l’initiative de Patrick Brown et de Michael Eisen même si des voix isolées les précédaient.

Ainsi, Prof. Donald Knuth, auteur du classique Art of Computer Programming et inventeur de Tex, un langage de traitement de texte pour documents techniques, écrit : « J’adore ma bibliothèque et les autres bibliothèques que je visite fréquemment et ça me met en rage de voir les prix qu’ils imposent aux bibliothèques. J’ai donc écrit une lettre salée à Elsevier en août 2001 pour leur faire part de ma grande inquiétude quant à leur future politique de prix pour le Journal of Algorythms. Elsevier a cependant ignoré ma lettre et ne m’a pas répondu. » (source)

La pétition de Brown et Eisen appelait tous les scientifiques à s’engager à partir de septembre 2001 à ne plus soumettre leurs papiers aux journaux qui ne rendaient pas le texte complet de leurs travaux accessible à tous, librement et sans entraves, que ce soit immédiatement ou après un délai de quelques mois.

La fondation de la Public Library of Science (PLoS) a été la grande étape suivante du mouvement vers la libération des éditions scientifiques. Malgré le soutien d’un éminent prix Nobel, Dr. Harold Varmus, ils ont dû patienter quelques temps avant de devenir complètement opérationnels et de publier le journal PLoS Biology en 2003.

Maintenant ils éditent sept journaux dont le contenu est disponible librement sur Internet. Ils ont adopté un modèle où les auteurs des articles paient pour être publiés. Ils conservent un fond, comme le font d’autres journaux du même type, pour affranchir de tout paiement les auteurs de pays émergents ou les auteurs qui n’ont pas les moyens suffisants.

En Europe, la Budapest Open Access Initiative, qui est à la fois une déclaration d’intention, de stratégie et d’engagement, a été signée par plusieurs scientifiques lors d’une réunion organisée par l’Open Society Institute en décembre 2001. Aujourd’hui des milliers de scientifiques sont signataires de l’initiative. Elle a eu un impact très fort dans le monde entier, en particulier en Europe.

Plusieurs agences de recherche et de financement, comme le Organisation Européenne pour la Recherche Nucléaire (CERN) et le National Institutes of Health (NIH), ont imposé l’accès libre pour toutes les publications issues de recherches qu’ils ont financées.

L’Accès Libre (AL) signifie que toutes les publications sont librement accessibles par les autres scientifiques et par le public. En fait, il offre toute liberté aux utilisateurs et demande simplement que l’auteur soit reconnu et que l’intégrité des documents soit conservée. Bien sûr il ne permet pas la ré-édition des documents, dans leur forme originale ou modifiée, comme les licences CC le font. Mais L’Accès Libre aux publications scientifiques est une avancée très importante dans des pays comme l’Inde.

Le gouvernement d’Inde devrait par conséquent imposer l’Accès Libre pour toutes les publications issues de recherches financées par l’argent public. Cela peut-être réalisé de deux manières : soit l’auteur affiche l’article sur son site Web, sur le site de son institut ou sur un site de centralisation (les revues qui permettent cela sont appelés AL vert) soit il peut publier dans des revues Accès Libre qui affichent leur contenu sur leur propre site Web (appelées AL d’or). Heureusement, une grande partie des journaux indiens sont AL. Mais la plupart des bons articles d’Inde sont publiés dans des journaux étrangers qui ne sont pas nécessairement AL.

La liberté dans le commerce

Nous allons parler ici d’une nouvelle expérience menée en Inde. L’idée est de parvenir à une transparence totale du commerce. Une entreprise technologique nommée WikiOcean a vu le jour à Pune. L’entreprise est unique de part le fait qu’elle expose tout son fonctionnement sur son site Web, même ses transactions financières. Ils appellent ce genre de système un wékosystème, un jeu de mot entre wiki et écosystème. Comme l’explique le site Web : « WikiOcean est une organisation participative, non-propriétaire où les professionnels rejoignent un modèle de partage des bénéfices comme expliqué dans le wékosystème. »

Cette entreprise a été inspirée par la transparence des logiciels libres et, en fait, l’un de ceux que l’on pourrait appeler les catalyseurs (ceux qui régulent la structure et la dynamique de Wékosystème) est le président de la Free Software Foundation of India, Prof. G. Nagarjuna. L’entreprise travaille déjà sur quelques projets. Mais il est encore trop tôt pour juger des chances de survie d’une telle entreprise. Souhaitons que tout se passe pour le mieux.

Une autre idée complètement exotique est de copier le modèle des logiciels libres pour d’autres produits. En d’autres termes rendre tous les besoins librement disponibles pour tous. Bien que ça puisse sembler absurde il ne faudrait pas rejeter cette idée puisque certains efforts à petite échelle ont été lancés et semblent fonctionner.

Cette idée est envisagée par un groupe pas si petit que ça qui s’appelle Oekonux (dérivé de oekonomie, le terme allemand pour économie et Linux). Vous pourrez en apprendre plus sur www.oekonux.org et vous pouvez rejoindre leur liste de diffusion si vous êtes vraiment intéressés.

Comme nous l’avons vu, les nouvelles technologies apportent de nouveaux défis, de nouvelles idées. Et nous serons peut-être amenés à ré-écrire de vieilles lois qui avaient été créées pour des situations complètement différentes, un autre paradigme technologique.

Quand de nouvelles technologies apparaissent il nous faut changer nos lois pour nous adapter à la nouvelle donne afin que la société puisse pleinement bénéficier de la nouvelle technologie ou alors seule une petite portion de la société en récoltera tous les bienfaits. Et au rythme auquel la technologie évolue il ne va pas être facile de suivre toutes ses implications. Nos technocrates et nos législateurs vont devoir suivre le rythme.

Cet article (et sa traduction) est publié sous licence Creative Commons Attribution Share Alike 2.5.