Le bien commun : l’assaut final – Un documentaire de Carole Poliquin

Nombreux sont ceux qui pensent qu’en France le projet de loi « Création et Internet » (ou Hadopi) n’est pas qu’une simple question technique et juridique pour endiguer le « piratage », mais se situe bien au delà, sur le front politique et sociétal de la défense des biens communs contre une « marchandisation » croissante des activités humaines, ici la culture[1].

C’est pourquoi il nous a semblé intéressant de proposer aux lecteurs de passage un « vieux » documentaire que vous n’avez peut-être pas eu l’occasion de voir à sa sortie en 2002 (durée : 1 heure).

Il a pour titre Le bien commun : l’assaut final et a été réalisé par la québécoise Carole Poliquin (dont nous avons obtenu accord pour diffusion).

Voici ce qu’en disait Bernard Langlois dans le journal Politis :

Sur le fond, c’est une charge très argumentée, très démonstrative contre la mondialisation libérale, nourrie de reportages et de témoignages recueillis au Canada, au Mexique, aux États-Unis, en Inde, en France. Avec les exemples très parlants de la marchandisation en cours de tous ces « biens publics mondiaux » que sont l’eau, les semences, la santé, les gênes, les connaissances et pratiques ancestrales ou nouvelles… Un thème que nous connaissons bien, autant de tristes réalités d’aujourd’hui.

C’est la forme qui est originale, avec un parti pris d’humour en contrepoint très réussi. Carole Poliquin a repris le thème et le découpage de la Genèse, ces sept jours qui bâtirent le monde ; mais ici ce n’est pas Dieu, c’est « l’homme d’affaires » qui se donne une semaine pour asservir le monde au profit, pour créer enfin ce « marché total » qu’on nous propose comme horizon. À chaque jour son thème (l’eau, les semences etc.). Chaque soir de la semaine, l’homme d’affaires reprend son Boeing, volant dans les étoiles vers sa prochaine mission, tandis qu’une voix off commente : « Et l’homme d’affaires se dit que cela était bon pour ses actionnaires ».

On notera que vous pouvez acheter le DVD de ce documentaire directement depuis son site officiel (ou en France chez Voir et Agir), non seulement pour en obtenir une version de qualité, des bonus, etc. mais également pour soutenir l’action de Carole Poliquin et l’aider à produire de nouveaux sujets comme son dernier en date Homo Toxicus[2].

—> La vidéo au format webm

Peut-être le trouverez trop simpliste, trop « altermondialiste », ou trop… réaliste ? Peut-être aurez-vous envie d’y ajouter un « huitième jour » autour de la création numérique (logiciels, œuvres de l’esprit…) ? Peut-être êtes-vous agréablement ou désagréablement surpris de sa mise en lumière sur le Framablog ? Il ne tient qu’à vous de vous exprimer dans les commentaires ci-dessus 😉

Notes

[1] Ce « front des biens communs » fait écho à deux livres de référence du Framablog (disponible tous deux en libre téléchargement) : Du bon usage de la piraterie de Florent Latrive et Cause commune de Philippe Aigrain.

[2] Résumé du documentaire Homo Toxicus de Carole Poliquin (2008) : « Une expérience planétaire est en cours et nous en sommes les cobayes. Chaque jour, des tonnes de substances toxiques sont libérées dans l’environnement sans que nous en connaissions les effets à long terme pour les êtres vivants. Certaines d’entre elles s’infiltrent à notre insu dans nos corps et dans celui de nos enfants. En même temps que notre patrimoine génétique, nous transmettons aujourd’hui à nos enfants notre patrimoine toxique. Dans une enquête inédite, menée avec rigueur et humour à partir de ses propres analyses de sang, la réalisatrice explore les liens entre ces substances toxiques et l’augmentation de certains problèmes de santé comme les cancers, les problèmes de fertilité et l’hyperactivité. Les conclusions sont troublantes… »




Largage de liens en vrac #13

Tony the Misfit - CC byUne nouvelle version de nos liens logiciels en vrac d’assez bonne facture ma foi.

Comme pour les éditions précédentes, vous êtes cordialement invité à nous en dire plus dans les commentaires si vous connaissez ou avez testé les logiciels en question[1].

  • Cofundos : Ce n’est pas un logiciel mais un nouveau service web que l’on pourrait définir comme une sorte de place de marché pour les projets de logiciels libres. Structuré en réseau social, il aide à développer de nouvelles idées en regroupant ceux qui en ont besoin avec les développeurs qui sont prêts à les réaliser, moyennant finances (ou non).
  • Mediafox : Lu sur Lifehacker, Mediafox est une assez impressionnante version customisée de Firefox (thème + de nombreuses extensions) portable dédiée au multimédia. C’est aussi une belle démonstration de ce qu’il est possible de faire avec Firefox et ses extensions. Uniquement pour Windows (et en anglais).
  • PhoneGap : Un prometteur environnement JavaScript pour votre téléphone (Android, iPhone, Blackberry) limité pour le moment à quelques fonctionnalités (géolocalisation, vibreur…) pour développer dans le futurs de jolies WebApps.
  • Zekr : Une application Java multilangues destinée à l’étude du Coran.
  • Un livre blanc sur les CMS : Rédigé par Smile, un livre blanc sur les CMS Open Source : Spip, Joomla, Typo3, Drupal, etc. Utile pour faire le bon choix au lancement d’un projet Web (dommage que la licence soit un full copyright).
  • Songbird 1.1 : Nouvelle version majeure pour ce concurrent libre d’iTunes qui a le vent en poupe.
  • Simile Widgets : En JavaScript Ajax, quatre modules pour créer de riches applications web (frise chronologique, géolocalisation, graphiques, et défilement d’images à la sauce Apple),
  • AjaXplorer : Un esthétique gestionnaire de fichiers en ligne en Ajax qui témoigne lui aussi des avancées des applications web (les photos s’affichent, le mp3 et les flv se lisent, etc.).
  • Mixwidget.org : Une vieille K7 qui lit en flash votre playlist mp3. On est loin des formats ouverts mais c’est là encore très joliment réalisé.
  • OpenWith.org : L’un des plus intéressants de la série, à ceci près que ce n’est pas du libre et que c’est que pour Windows, ce qui fait deux lourds handicaps j’en conviens ! C’est aussi bien un service web qu’une application qui associe à tout format de fichier un logiciel libre et/ou gratuit permettant de le lire. Si vous tapez DOC par exemple, le logiciel vous proposera OpenOffice.org pour le lire avec un bouton direct pour le téléchargement. Pas forcément très pertinent avec MP3 (pourquoi Picasa en premier ?) ou PDF (il manque Sumatra !) mais l’idée est plutôt bonne, surtout pour aider votre belle-mère qui vient de vous envoyer un mail vous expliquant qu’elle ne comprend pas pourquoi elle n’arrive pas ouvrir sa pièce jointe en double-cliquant dessus ! Si l’application avait été libre et multi-OS et si les choix proposés se restreignaient au logiciel libre, on aurait obtenu un super service (quand bien même, oui je sais, proposer du freeware rend service à Mme Michu).
  • Creative Commons pour MS Office : Pour ceux qui, pour x raisons, travaillent encore avec la suite bureautique Microsoft MS Office (en particulier chez mes collègues profs) je signale que le plugin permettant de placer facilement son document sous licence Creative Commons, déjà disponible pour MS Office 2003, vient de sortir pour MS Office 2007.
  • 6zap : Une application Ajax-Web très ambitieuse puisqu’elle vous propose sur une même page une messagerie, un calendrier, un gestionnaire de fichiers et de contacts. On aurait donc à faire avec une sorte de groupware capable de potentiellement concurrencer Google, rien que ça ! (la FermeDuWeb en fait un rapide survol).
  • pHash : Un système de marquage (empreinte digitale numérique) qui contrairement à la cryptographie classique se base sur le contenu même du fichier pour son algorithme. Ainsi, à ce que j’en ai compris, le même fichier un peu modifié verra son marquage un peu modifié lui aussi, permettant de retrouver et associer facilement les deux fichiers en question.
  • Shutter : Linux only, et la copie d’écran devint un jeu d’enfants.
  • Qimo 4 Kids : Une distribution Ubuntu totalement orientée enfants avec plein de petites applications dédiées pré-installées. Une fois francisée cela pourrait bien intéresser nos écoles primaires.
  • TurnKey Linux : Basé sur Ubuntu, un système silimaire à Bitnami permettant de faire tourner de manière autonome (disque dur, clé USB, live CD, virtualisation…) des applications web (Drupal, Mediwiki, Joomla…) clé en main puisqu’il embarque le trio LAMP à chaque fois avec lui (du moins je crois). Pour ce qui concerne Windows, Pierre-Yves est en train d’y travailler avec la Framakey.
  • Frescobaldi : Pour faire simple, Frescobaldi est à LilyPond ce que Kile est à LaTeX : un front end graphique pour KDE4 (source LinuxFr).
  • DeskHedron : Le fameux cube 3D de Compiz (et de GNU/Linux) plongé dans l’univers Windows. Absolument aucune idée de ce que ça vaut concrètement.
  • Mahara : Je ne connaissais pas ce gestionnaire de portfolio orienté éducation. Comme ça sans l’avoir du tout testé, je la vois comme une sorte de mix entre un ENT et un Facebook (qui s’accouple bien avec Moodle qui plus est). Entre nous soit dit, les fameux ENT dont parle depuis plusieurs années notre chère Éducation Nationale sans réussir véritablement à les déployer massivement, vous ne trouvez pas qu’ils ont pris un coup de vieux avec l’avènement des réseaux sociaux ?
  • OneSwarm : Développé par des chercheurs de l’Université de Washington, ce logiciel ne fera pas plaisir à Christine Albanel puisqu’il permet d’échanger des fichiers en P2P mais de manière beaucoup plus sécurisé puisque l’on peut restreindre les informations transmises à un cercle d’amis dûment identifiés (du coup ils appellent cela le F2F, Friend-to-Friend). On pourra lire PC Inpact pour de plus amples informations.

Notes

[1] Crédit photo : Tony the Misfit (Creative Commons By)




La gratuité c’est le vol déclare le ministre des finances

Eneas - CC byAppel d’air est un livre des éditions ActuSF (collection Les Trois Souhaits) qui regroupe une trentaine de courtes nouvelles de science-fiction interrogeant le devenir de la France au lendemain des élections présidentielles de 2007. Un fidèle lecteur m’a envoyé un message pour me suggérer de recopier celle de Roland C. Wagner. Why not, me suis-je dit plongés que nous sommes en cette obscure période Hadopi.

On est donc en pleine science-fiction (et dans le pastiche frondeur) mais est-on si loin que cela de la réalité au niveau des mentalités ? Nos sociétés, telles qu’elles sont actuellement organisées, n’ont-elles pas du mal à composer avec ces échanges non marchands souvent tirés vers le haut par l’usage des nouvelles technologies ?

Vous en trouverez la lecture publique récitée non sans verve par son auteur sur le site Dailymotion (issu du même recueil, on notera également Mentions légales de Catherine Dufour)[1].

La gratuité c’est le vol

Roland C. Wagner – avril 2007 – Appel d’Air (éditions ActuSF)

« La gratuité c’est le vol », déclare le ministre des finances.

« La loi sur la préservation de l’économie et la diminution de la dette publique est une loi juste, digne d’une grande démocratie comme la France, » appuie le président. « Il faut préserver notre industrie, notre commerce et nos services contre les ravages de la gratuité. Les revenus des auteurs et des compositeurs ne sont-ils pas en train de plonger à cause de la concurrence déloyale exercée par les artistes qui mettent leur musique en libre accès, contrairement à toutes les règles du marché ? Les ventes des quotidiens ne sont-elles pas en chute libre en raison de la multiplication des sources d’informations gratuites — et, disons-le, le plus souvent douteuses ? Nos artisans ne sont-ils pas menacés par le travail au noir non rémunéré qui se multiplie en catimini ? »

« Il devenait urgent de mettre un terme à ces abus qui mettent en péril le pays tout entier. C’est pourquoi, après avoir écouté avec attention les différents acteurs économiques, le gouvernement a décidé d’interdire toute offre de service ou de produit gratuit dès lors qu’il existe une solution payante équivalente. Par conséquent, le don, le prêt et à plus forte raison la copie des produits culturels est interdite, dans le souci de défendre les créateurs contre la véritable spoliation dont ils sont victimes chaque fois qu’une de leurs œuvres est consommée sans contrepartie financière. De même, il est désormais défendu aux associations caritatives de procurer gratuitement nourriture, vêtements ou services pour ne pas concurrencer les commerces et entreprises au bord de l’asphyxie financière. Recourir aux services de l’État sera désormais facturé à l’acte, afin de donner à chacun la possibilité du libre choix dans tous les domaines, y compris celui de la sécurité des biens et des personnes. »

« À partir du premier janvier de l’année prochaine, la vente de produits de seconde main sera interdite, afin de protéger les producteurs. Seuls les objets de collection d’une valeur supérieure à cent euros échapperont à cette règle. De fait, brocantes et vide-greniers sont appelés à disparaître en faveur de foires ne proposant que des objets neufs, dans le but de préserver les emplois de ceux qui fabriquent les objets en question. À cette même date entrera en vigueur l’article 17 de la loi qui condamnera sévèrement le travail gratuit, cette plaie de notre société. Aider quelqu’un à, par exemple, refaire le papier peint de son salon sera dés lors passible de 5 ans de prison et de 375 000 euros d’amende, sauf bien entendu à l’intérieur du cercle familial restreint tel qu’il a été défini par la loi sur la famille du mois dernier — c’est à dire limité aux personnes possédant au minimum 50 % d’ADN en commun, les individus prédisposés génétiquement à la malhonnêteté et à l’incivilité étant bien entendu exclus. »

« C’est ainsi, mes chers compatriotes, que nous sauverons la France et reviendrons à une croissance positive dès l’année prochaine. En supprimant à jamais l’illusion scandaleuse de la gratuité. »

Dépêche AFP : « Un boy-scout qui avait aidé une vieille dame à traverser la rue sans lui réclamer de chèque emploi service a été condamné à trois ans de prison dont deux avec sursis et 10 000 euros d’amende par le tribunal de Nice. Le ministre de l’intérieur, qui estime la sanction bien légère, a demandé au parquet de faire appel. »

Notes

[1] Crédit photo Eneas (Creative Commons By)




Le logiciel libre, la dictature de l’entreprise et la démocratie des pays

Joshua Davis - CC by-saNous avons déjà évoqué la place à part et le rôle majeur joués par les leaders de projets de logiciels libres dans un billet dédié. Mais de là à caractériser « l’Open Source » comme une « dictature » issue de la culture de l’entreprise par opposition aux « médias sociaux » qui seraient eux plutôt du côté de la « démocratie » chère aux nations dignes de ce nom, il y a un pas que Chris Anderson ose franchir sur son blog dans une courte réflexion que nous vous proposons traduite ci-dessous.

Il convient bien entendu de s’entendre sur les termes employés (d’où l’existence de nombreux guillemets dans le paragraphe précédent), ainsi Wikipédia serait ici bien plus un média social qu’un projet Open Source. Il convient également de ne pas oublier le principe de méritocratie qui n’est ni une dictature ni une démocratie. Il n’empêche qu’il n’est pas loin de détruire un mythe qui a la vie dure au sein de la communauté lorsqu’il affirme que « de nombreuses personnes pensent à tort que les projets Open Source sont émergents, auto-organisés et démocratiques » alors que « la vérité est tout à fait l’inverse »[1].

L’Open source est une entreprise, les médias sociaux un pays

Chris Anderson – 12 mars 2009 – The Long Tail (Wired)
(Traduction Framalang : Simon)

Open source is a company; social media is a country

Au petit déjeuner Sourceforge ce matin, nous avons abordé quelques questions portant sur les différences entre l’organisation de l’Open source et celle des médias sociaux. Voici ma réponse :

L’un des paradoxes observés dans la gestion du début du 20e siècle c’est que les compagnies sont mieux gérées sous un régime dictatorial, alors que les pays le sont eux, avec une démocratie. Pourquoi donc ? Charles Barnard, théoricien de la gestion, suggéra dans sa théorie des entreprises que les organisations se créaient pour poursuivre un objectif commun et partagé. Alors que les pays eux, existaient seulement pour servir leur peuple.

Un objectif commun nécessite une vision unique, un commandement et une hiérarchie verticale descendante. De l’autre côté, le service du peuple tire plus de profits d’une hiérarchie ascendante, de la reconnaissance des besoins de chacun, et des décisions prises collectivement (vote).

De nombreuses personnes pensent à tort que les projets Open Source sont émergents, auto-organisés et démocratiques. La vérité est tout à fait l’inverse : la plupart sont gérés par un dictateur bienveillant, ou deux. Ce qui fait le succès d’un projet Open Source, c’est sa direction, tout simplement. Une ou deux personnes articulent une vision, commencent à construire dans sa direction, et embarquent les autres au passage, leur donnant des tâches et des droits précis. Les meilleurs projets sont ceux qui ont les meilleurs meneurs.

Les média sociaux, d’un autre côté, ne se créent pas pour atteindre un objectif commun. Ils existent pour servir les individualités. Nous ne gazouillons pas (NdT : to tweet), pour fabriquer Twitter, nous gazouillons pour nous-mêmes. Nous bloguons parce que nous le pouvons, pas parce nous nous sommes inscrits dans un projet de blogs.

Vus sous cet angle, les projets Open Source sont comme des compagnies et les média sociaux ressemblent à des pays. Les dictatures bienveillantes dirigent les premiers ; des démocraties les seconds.

Notes

[1] Crédit photo : Joshua Davis (Creative Commons By-Sa)




Quand le logiciel libre et Wikipédia donnent de l’espoir à François Bayrou

François Bayrou n’est pas totalement inconnu sur le Framablog. Nous l’avions ainsi gentiment taquiné à propos d’un syndrome qui porte désormais son nom et que nous connaissons assez bien pour en être parfois atteints, à savoir faire la promotion du logiciel libre tout en restant sur du logiciel propriétaire, parce que pas encore le temps, parce que difficile de rompre avec ses habitudes, etc.

Mais nous l’avions surtout apprécié lors de son intervention aux RMLL 2006 de Nancy où il nous exposait sa « vision des deux mondes » (marchand vs non marchand).

Il récidive ici au cours de l’émission de France Info Parlons Net ! du 27 février dernier, en se faisant, au passage et malgré lui, le défenseur d’un Wikipédia critiqué (sans grande imagination) par les journalistes de l’assistance.

—> La vidéo au format webm

Morceaux choisis :

Pourquoi est-ce que je suis intéressé par l’univers des logiciels libres ? Pourquoi est-ce que je suis intéressé par l’univers wiki ? Parce que ce sont des modèles de société non marchands. Ça ne veut pas dire qu’il n’y a pas des gens qui à partir du logiciel libre ne font pas du marchand, ne créent pas des activités économiques, mais Wikipédia, pour prendre un exemple, c’est tout de même impressionnant qu’il y ait une encyclopédie de centaines de milliers de pages sur tout sujet, sans que personne n’ait été là pour des raisons marchandes.

(…)

Mais pour l’essentiel, ne prenez le petit défaut ou la petite faille, prenez le fait massif. Il y a là une encyclopédie, free, libre d’accès, à disposition de tout le monde, qui a été développée par des esprits généreux qui ont simplement voulu faire partager à d’autres ce qu’ils savaient. Vous ne trouvez pas que c’est intéressant. Vous ne trouvez pas que c’est intéressant que on ait des logiciels, des systèmes d’exploitation, qui soient constamment enrichis, bénévolement ou gratuitement. Et donc pour moi il y a là un projet de société qui est intéressant au moins à regarder et à réfléchir parce qu’il veut dire que la loi du profit ne commande pas tout. Qu’elle n’est pas totalement absente, on n’est pas naïf, bien sûr que les raisons économiques sont à prendre en compte. Mais elles ne doivent pas prendre la place de toutes les autres raisons de vivre : raison de chercher, raison d’enseigner, raison de transmettre, raison de s’élever, raison de créer, etc.

(…)

C’est important pour beaucoup de ceux qui vous écoutent sur le Net en particulier. Il y a là quelque chose qui donne de l’espoir dans la nature humaine. Alors comme tout, pas que de l’espoir. Mais il y a là quelque chose qui permet d’avoir une autre vision de l’avenir de l’humanité que cet avenir écrasé qu’on nous promet par ailleurs. Parce que si vraiment, ce que je crains, on est en train en France de mettre en place un réseau d’influence et de pouvoir sur des secteurs entiers de la société, où est la capacité de résistance ? Si vous êtes un citoyen moyen, un jeune garçon, une jeune fille ? Qu’est-ce que vous pouvez faire ? Vous défilez une fois, et après il n’y a plus de défilés comme vous le savez. Bon et bien il y a là, dans cette culture civique, quelque chose qui donne de l’espoir, qui en tout cas à moi me donne de l’espoir.

Ce n’est pas pour polémiquer mais, en ces temps troubles d’Hadopi, lorsque l’on entend ce type de discours, lorsque l’on relit le rapport Rocard commandé par Ségolène Royal, ou plus généralement lorsque l’on se remémore les réponses apportées par les candidats 2007 au questionnaire de l’April, on se dit que, dans le domaine précis qui nous préoccupe ici, on n’a pas forcément hérité du meilleur des présidents possibles…




Et les artistes dans tout ça ?

Dno1967 - CC byLe choix actuel de la répression et des verrous numériques est peut-être une solution à court terme pour l’industrie musicale mais il place les artistes en position plus que délicate vis-à-vis de leurs fans. Difficile en effet de ne pas réaliser que, le temps passant, les intérêts des uns et des autres sont de plus en plus divergents.

Dans le très tendu climat du moment (crise des ventes, « piratage » généralisé…), il est alors assez logique de voir des musiciens prendre ouvertement leur distance avec la logique des Majors et se regrouper pour faire entendre leur voix (sic !). C’est déjà le cas en Angleterre où quelques grands noms de la chanson britannique[1] se sont tout récemment réunis au sein de la Featured Artists Coalition (FAC) afin de « prendre le contrôle de leur musique et défendre leurs droits d’auteur face aux opportunités que représentent les technologies digitales ». C’est l’objet de notre traduction ci-dessous issue d’un article dédié du journal The Independent.

« La révolution digitale a balayé le vieux business de la musique des années soixante et a changé pour toujours la relation entre les artistes et les fans », explique le batteur du groupe Blur, David Rowntree. « Nous sommes à la recherche d’une nouvelle donne, basée sur l’équité, avec nos fans, l’industrie du disque et les gouvernements ». À rapprocher de ce que disait Mike Masnick dans sa très éclairante conférence consacrée au « cas Trent Reznor ».

Et en France, me direz-vous, où sont donc nos artistes, alors même qu’ils sont les premiers impliqués dans le projet de loi « Création et Internet » qui se discute en ce moment même à l’Assemblée ?

Force est de constater qu’on ne les entend pas beaucoup, comme si la majorité d’entre eux restaient prostrés dans une sorte de silence gêné, ayant par trop conscience des effets dévastateurs produits par des discours dont Thomas Dutronc offre une magnifique caricature.

Quitte à tomber dans l’excès inverse, nous lui préférons les propos du documentariste Grand François qui donnent peut-être plus à réfléchir :

—> La vidéo au format webm

Mais revenons à nos anglais qui se rebiffent…

Ce n’est pas un crime de télécharger disent les musiciens

It’s not a crime to download, say musicians

Arifa Akbar – 12 mars 2009 – The Independent
(Traduction Framalang : Poupoul2)

Des musiciens, dont Robbie Williams, Annie Lennox, Billy Brag, David Rowntree (Blur) et Ed O’Brien (Radiohead) ont déclaré hier soir que le public ne devrait pas être poursuivi pour avoir téléchargé illégalement de la musique sur Internet.

la Featured Artists Coalition, qui intègre 140 des plus grandes stars pop et rock de Grande Bretagne a indiqué, lors de son inauguration, que des entreprises telles que MySpace ou Youtube devraient être mises à contribution, lorsqu’elles utilisent leur musique à des fins publicitaires.

Brag a déclaré à The Independent que la plupart des artistes ont voté contre toute tentative visant à criminaliser le téléchargement illégal de musique par le public.

Les musiciens exprimeront leur point de vue à Lord Carter, qui a suggéré que les particuliers qui se livrent au téléchargement illégal devraient être amenés devant les tribunaux.

Alors qu’Annie Lennox n’a pas pu assister à l’inauguration, elle a adressé un message de soutien, tout comme Peter Gabriel, tandis que David Gray, Fran Heal (Travis), Nick Mason (Pink Floyd) et Mick Jones (The Clash) ont fait une apparition.

Brag s’est exprimé comme membre clé de cette coalition, qui a été créée afin de donner une voix collective aux artistes qui veulent défendre leurs droits dans le monde numérique. Elle s’engage en faveur d’un marché plus équitable pour les musiciens, au moment où il peuvent utiliser Internet pour créer des liens directs avec leurs fans. « Ce que j’ai déclaré pendant l’inauguration est que l’industrie culturelle en Grande Bretagne poursuit son chemin vers la criminalisation de notre public, celui qui télécharge illégalement des mp3 », a-t-il déclaré.

« Si nous suivons l’industrie culturelle sur cette voie, nous ne ferons rien d’autre que de participer à ce mouvement protectionniste. Cela revient à essayer de remettre le dentifrice dans son tube ».

« Les artistes devraient être détenteurs de leurs propres droits, et devraient décider à quel moment leur musique peut être utilisée gratuitement, et à quel moment ils devraient être payés. »

Les artistes souhaitaient dire à Lord Carter : « Nous voulons nous ranger aux côtés du public, des consommateurs ».

O’Brien a déclaré « qu’il s’agit d’une période charnière pour l’industrie », ajoutant que « de nombreux droits et sources de revenu sont charcutés, et nous avons besoin de faire entendre notre voix. Je pense que tous les intervenants principaux veulent entendre ce que nous avons à dire. »

Notes

[1] Crédit photo : Dno1967 (Creative Commons By)




Traduction du plan d’action britannique en faveur de l’Open Source

Paolo Camera - CC byChose promise chose due. Voici la traduction (of course non officielle) du plan d’action gouvernemental britannique du 24 février dernier dont l’objectif clairement affiché est de « passer à la vitesse supérieure » pour ce qui concerne l’usage public du logiciel Open Source.

Nous l’avions évoqué dans deux récents articles qui constituent deux regards intéressants sur l’annonce de ce plan : celui de la BBC et celui du site d’enseignants OpenSourceSchools.

Vous y trouverez bon nombre d’arguments que les défenseurs du logiciel libre portent depuis des années. Reste à voir bien sûr si ces belles déclarations d’intention seront pragmatiquement suivies d’effets. Mais quoiqu’il arrive les Anglais[1] disposent désormais d’un document de poids sur lequel s’appuyer.

Avec ce travail, nous souhaitons informer le public francophone des avancées internationales du logiciel libre mais nous souhaitons également en profiter pour interroger ce qu’il se passe également chez nous. Y a-t-il une volonté similaire en France ? Si oui, les initiatives ont-elles la même envergure et la même ambition ?

Dans la mesure où le doute subsiste, que diriez-vous si nous tentions d’apporter cette traduction sur le bureau de notre nouvelle secrétaire d’État au développement de l’économie numérique, Nathalie Kosciusko-Morizet, pour lui poser directement la question ?

PS : Vous trouverez en fin d’article, pour impression ou… ré-utilisation, une version PDF (et OpenOffice.org) de la traduction.

Open Source, standards ouverts et ré-utilisation : le plan d’action du gouvernement

Open Source, Open Standards and Re-Use: Government Action Plan

Gouvernement du Royaume-Uni – 24 février 2009 – CIO.gov.UK
(Traduction Framalang : Poupoul2, Googy, Olivier et Don Rico)

Avant-propos

L’Open Source est l’un des développements majeurs de la culture informatique de ces vingt dernières années : il a démontré que des particuliers, en travaillant ensemble par le biais d’Internet, peuvent créer des produits qui rivalisent avec ceux de gigantesques entreprises, voire les dépassent ; il a également démontré que ces mêmes entreprises, mais aussi les gouvernements, peuvent devenir plus innovants, plus souples et plus efficaces dans leur gestion des coûts en tirant les fruits du travail communautaire. Grâce à cette base informatique, le mouvement Open Source a apporté ses lettres de noblesse à une nouvelle vision des droits de la propriété intellectuelle, du partage et de la disponibilité de l’information pour tout un chacun.

Depuis longtemps, ce gouvernement a pour principe, formellement exprimé pour la dernière fois en 2004, de chercher à utiliser des solutions Open Source là où elles offrent le choix le plus judicieux pour les dépenses du service public financées par le contribuable. Même si nous respectons depuis toujours l’opinion de ceux pour qui les gouvernements devraient favoriser l’Open Source par principe, notre position a toujours été que le critère principal devait être le meilleur rapport qualité-prix pour le contribuable.

Au cours des cinq dernières années, de nombreux services gouvernementaux ont démontré que l’Open Source peut s’avérer le meilleur choix pour le contribuable, dans nos services accessibles sur le Web, dans le National Health Service (NDT : Service de santé publique du Royaume-Uni) et dans d’autres services publics essentiels.

Mais il faut à présent passer à la vitesse supérieure.

  • (1) Nous voulons nous assurer que les services publics bénéficient toujours des meilleures solutions possibles au meilleur rapport qualité-prix, et être surs de payer au plus juste ce que nous achetons.
  • (2) Nous voulons partager et ré-utiliser ce que le contribuable a déjà financé au sein du secteur public, non seulement pour éviter de payer deux fois, mais aussi afin de réduire les risques et trouver des solutions communes aux besoins du gouvernement.
  • (3) Nous voulons encourager l’innovation au sein du Gouvernement, en incitant à penser Open Source, mais aussi en dehors du Gouvernement, en favorisant le développement d’un marché en pleine effervescence.
  • (4) Nous voulons offrir à l’industrie informatique, et plus largement à l’économie, les bénéfices de l’information que nous produisons et des logiciels que le Gouvernement développe.

Ainsi, nous estimons le moment venu de mettre à profit notre réputation d’impartialité et nos réussites, et d’engager de nouvelles actions concrètes pour que le recours aux logiciels libres soit envisagé avec sérieux et impartialité par les services informatiques gouvernementaux. Nous devons aussi rendre publiques nos exigences et publier nos statistiques concernant les formats ouverts, et chercher à atteindre le niveau de souplesse inhérent à l’Open Source dans nos relations avec les fournisseurs de logiciels propriétaires.

Cette stratégie Open Source répond à ces points essentiels. Elle détaille les étapes que nous devons franchir, au Gouvernement et avec nos fournisseurs informatiques, afin de tirer profit des atouts de l’Open Source.

Tom Watson, député au Parlement britannique
Ministre de l’Engagement numérique
(NdT : Équivalent du secrétaire d’état à l’économie numérique français).

Plan d’action gouvernemental

1. Le Gouvernement a revu pour la dernière fois sa politique liée à l’Open Source en 2004[2]. Cette politique indiquait clairement que le Gouvernement examinerait les solutions Open Source au même titre que les solutions propriétaires dans les passations de marchés informatiques et que les contrats seraient jugés sur des critères financiers.

2. Depuis 2004, le Gouvernement utilise davantage de logiciels Open Source, particulièrement en ce qui concerne les systèmes d’exploitation et les composants middleware des solutions métier. Par exemple :

  • 50% des principaux sites Web des services gouvernementaux ont adopté le serveur web Apache.
  • La colonne vertébrale du NHS utilise un système d’exploitation libre, et lorsque le remplacement de Netware par Open Enterprise Server sera achevé, 35 % des services du NHS, représentant 300 000 utilisateurs, seront pris en charge par une infrastructure Linux.
  • Des composants libres sont utilisés dans des systèmes cruciaux pour des missions décisives telles que Directgov (NdT : Site d’accès aux services publics britanniques) ou Electronic Vehicle Licensing (NdT : Service public de réduction fiscale lié à l’utilisation d’un véhicule électrique).

3. Cependant, depuis 2004 l’industrie du logiciel et le marché de l’informatique se sont aussi développés pour rendre les produits Open Source plus compétitifs et plus faciles à intégrer à l’univers professionnel des entreprises. Par exemple :

  • des modèles économiques solides et pérennes ont émergé. Ils permettent l’implémentation et le support des solutions Open Source.
  • un nombre croissant d’acteurs majeurs de l’industrie informatique se sont engagés activement dans l’Open Source et soutiennent l’utilisation de standards ouverts.
  • de grandes entreprises et des ministères font un usage quotidien d’éléments Open Source sur des systèmes sensibles ; par conséquent, les chefs d’entreprise appréhendent mieux les différents modèles commerciaux, ainsi que les modèles de gestion des coûts, des licence et des risques.

4. La manière d’aborder l’informatique gouvernementale a évolué et par conséquent il en est de même pour la manière d’aborder l’Open Source :

  • La création de la profession d’informaticien pour le gouvernement et l’ouverture du recrutement aux professionnels de la technologie ont permis d’améliorer les capacités et les connaissances pour aller vers une concurrence plus ouverte entre fournisseurs de solutions technologiques.
  • La création du Conseil des DSI a conduit à davantage d’ouverture et d’échanges d’informations sur les bonnes solutions logicielles et les expériences positives au sein du gouvernement. Il existe une forte volonté et des structures de service rodées pour réutiliser de façon optimale les produits informatiques déjà existants du gouvernement. L’Open Source et les standards ouverts peuvent apporter une importante contribution à ce processus.
  • La mise en place de la structure interministérielle gouvernementale et son adoption par les principaux fournisseurs informatiques du gouvernement ont permis de morceler les solutions professionnelles « fermées » en composants répondant à des besoins précis. Ceci permet le partage et la réutilisation des briques logicielles entre les différents domaines de l’action publique.
  • Les politiques de licences des fournisseurs de logiciels, en particulier quand le gouvernement n’est pas considéré comme une entité unique, et le manque de transparence des tarifs dans la filière de production sont autant d’obstacles à une réduction des coûts plus efficace et à une meilleure mutualisation des services entre les ministères.
  • Beaucoup de ministères ont d’ores et déjà conçu des « écosystèmes » permettant d’utiliser une gamme élargie de fournisseurs de solutions informatiques grâce à un partenariat général pour les prestations de service.
  • Les technologies et la culture de l’Open Source ont été adoptées dans d’autres domaines de l’action gouvernementale, par exemple pour la consultation publique du Livre blanc des sciences publié par le secrétariat d’état à la Recherche et à l’université (Department for Innovation, Universities and Skills, DIUS) et des conclusions du groupe de travail « Pouvoir de l’information » du Cabinet Office (NdT : Cabinet du premier ministre et secrétariat du Royaume-Unis).
La marche à suivre

5. Le gouvernement considère qu’afin d’atteindre ses objectifs clés, une série de mesures concrètes est nécessaire pour s’assurer qu’il existe une véritable « égalité des chances » entre le logiciel Open Source et le logiciel propriétaire, et pour que soit reconnu le rôle que peuvent jouer les logiciels Open Source concernant des objectifs plus vastes, tels que la réutilisation et les standards ouverts. Ce programme doit comporter à la fois une déclaration plus précise des stratégies menées et des actions concrètes entreprises par le gouvernement et ses fournisseurs. Les objectifs clés seront les suivants :

  • (1) s’assurer que le gouvernement adopte des standards ouverts et les utilise pour communiquer avec les citoyens et les entreprises qui auront adopté des solutions Open Source.
  • (2) s’assurer que les solutions Open Source seront prises en considération avec équité et choisies pour répondre aux appels d’offre gouvernementaux lorsqu’elles présentent le meilleur rapport qualité/prix (en tenant compte d’autres avantages tels que la réutilisation possible et la flexibilité).
  • (3) renforcer les compétences, l’expérience et les capacités au sein du gouvernement et de ses fournisseurs pour utiliser l’Open Source de façon optimale
  • (4) instaurer une culture Open Source du partage, de la réutilisation et du développement collaboratif entre le gouvernement et ses fournisseurs, en s’appuyant sur les processus et stratégies de réutilisation déjà validés par le Conseil des DSI et ainsi stimuler l’innovation, réduire les coûts et les risques, et enfin accroître la réactivité du marché.
  • (5) s’assurer qu’il n’existe pas d’obstacle procédurier à l’adoption des produits Open Source par le gouvernement, en accordant une attention particulière aux filières de productions et modèles économiques impliqués.
  • (6) s’assurer que les intégrateurs de systèmes et les fournisseurs de logiciels propriétaires pourront s’aligner sur le monde de l’Open Source pour ce qui est de la flexibilité et de la réutilisation de leurs produits et de leurs solutions.
Politique

6. La politique du gouvernement est la suivante :

Logiciels Open Source

  • (1) Le gouvernement examinera de façon équitable et approfondie solutions Open Source et solutions propriétaires dans les décisions d’attribution de marchés.
  • (2) Les attributions de marchés seront décidées en fonction du meilleur rapport qualité/prix pour l’objectif recherché, en prenant en compte le coût total de la solution logicielle sur toute sa durée de vie, y compris les coûts de résiliation et de transfert, après s’être assuré que les solutions satisfont aux conditions minimales exigées en termes de capacité, sécurité, extensibilité, possibilité de transfert, support et facilité de maintenance.
  • (3) Le gouvernement attendra des prestataires de TIC qu’ils proposent si nécessaire des produits alliant Open Source et logiciels propriétaires afin de disposer de l’offre la plus complète possible.
  • (4) Lorsque la différence tarifaire entre produits Open Source et propriétaires sera négligeable, les produits Open Source seront choisis au regard de leur plus grande souplesse d’utilisation.

Logiciels non Open Source

  • (5) Le gouvernement évitera, chaque fois que possible, les engagements contraignants qui le lierait à des logiciels propriétaires. Les coûts de résiliation, de renégociation et de redéploiement seront pris en compte dans les attributions de marchés, et il sera demandé aux prestataires de logiciels propriétaires de détailler les modalités de résiliation.
  • (6) Lorsque l’acquisition de produits non Open Source sera nécessaire, le gouvernement demandera que leurs licences soient valables pour l’ensemble du secteur public et que les licences déjà acquises puissent être transférées à tout le secteur public sans surcoût ni restriction. Le gouvernement négociera si nécessaire avec les fournisseurs des accords généraux interministériels afin d’être considéré comme une entité unique pour bénéficier du transfert de licences et des rabais inhérents aux commandes en volume.

Standards ouverts

  • (7) Le gouvernement utilisera les standards ouverts pour passer ses appels d’offres et exigera des solutions compatibles avec les standards ouverts. Le gouvernement soutiendra le développement des standards ouverts et des normes.

Ré-utilisation

  • (8) Le gouvernement veillera à bénéficier des pleins droits sur le code des logiciels modifiés ou adaptés à partir des produits commerciaux d’origine, de manière à s’assurer de leur possible réutilisation directe partout ailleurs dans le secteur public. Le cas échéant, les logiciels d’intérêt général développés pour le compte du gouvernement seront publiés suivant les principes de l’Open Source.
  • (9) Si le secteur public est déjà propriétaire d’un système, d’un outil ou d’une plateforme, le gouvernement exigera que ce produit soit réutilisé et que les contrats commerciaux en tiennent compte. Pour des acquisitions nouvelles, les prestataires devront garantir qu’ils n’ont pas déjà développé ou produit une solution similaire, pour tout ou partie, vendue par le passé au secteur public, ou si tel était le cas, dans quelle mesure ce précédent se traduira par une réduction des coûts, des risques et des délais.
  • (10) Lorsque les fournisseurs proposent un logiciel tiers, la transparence des coûts est de rigueur. En cas d’accord interministériel, il devrait être possible de procéder à la passation de marché au cas où cela conférerait une valeur ajoutée au secteur public dans son ensemble. Seuls les frais du fournisseur devront être facturés au gouvernement, à moins que le prestataire puisse apporter la preuve de façon claire et transparente de la valeur ajoutée du logiciel tiers.
Plan d’action

Les points-clés de l’action gouvernementale sont donc les suivants :

Action 1 : Transparence dans les passations de marchés. Le conseil des DSI, appuyé par « l’Office for Government Commerce » (NdT : L’organisme chargé de définir les appels d’offre pour le gouvernement), assurera l’équité entre les produits Open Source et les produits propriétaires en présentant des lignes directrices construites autour du rapport qualité/prix. Ces lignes directrices seront publiées et comprendront :

  • a) Les moyens de mise en œuvre et d’évaluation de la compatibilité avec les standards ouverts, ainsi que leur réutilisation généralisée potentielle dans le secteur public.
  • b) des formules standards à faire apparaître dans les cahiers des charges pour réaffirmer que la politique du gouvernement est de juger les solutions Open Source en fonction de leurs qualités intrinsèques et de leur coût total d’utilisation.
  • c) un guide faisant autorité, destiné aux acheteurs du secteur public, sur les problèmes spécifiques de licences, garanties et dédommagements inhérents à l’Open Source.

Action 2 : Amélioration des compétences au sein du gouvernement : le Conseil des DSI et l’OGC, en partenariat avec l’industrie et en s’inspirant des bonnes pratiques observées dans d’autres pays, vont lancer un programme de formation et d’acquisition de compétences destiné aux employés en charge de l’informatique et des passations de marchés au gouvernement. Ils pourront acquérir le savoir-faire nécessaire à l’évaluation et à la bonne utilisation des solutions Open Source. Cette opération a pour but d’améliorer l’information des fonctionnaires, leur niveau de compétence et leur assurance par rapport aux problématiques de licence, de maintenance et d’économie propres aux solutions Open Source.

Action 3 : La réutilisation comme principe pratique : les principes de fonctionnement du conseil des DSI mettent en exergue la transmission du savoir. Lorsque les solutions Open Source auront été évaluées et approuvées par une partie du Gouvernement, cette évaluation ne devrait pas être réitérée mais partagée. À cette fin, les ministères conserveront et partageront des archives de leurs approbation et utilisation des solutions Open Source, y compris pour les composants Open Source dans des solutions hybrides.

Action 4 : Maturité et développement durable : il existe une multitude de logiciels Open Source. Selon la nature de la mission gouvernementale, l’aboutissement du produit, la sécurité de son code noyau et la pérennité du projet lui-même sont des critères primordiaux. Le Conseil des DSI effectuera une évaluation régulière de l’aboutissement des produits et recommandera une liste de solutions et d’implémentations qui satisferont à ces critères consensuels.

Action 5 : Mise en demeure des fournisseurs : considérant les actions ci-dessus, les ministères du Gouvernement mettront en demeure leurs fournisseurs de leur démontrer qu’ils sont compétent en matière d’Open Source et que les produits Open Source ont été réellement envisagés comme tout ou partie de la solution logicielle qu’ils proposent. Lorsqu’aucune solution entièrement Open Source n’existe, les fournisseurs seront tenus d’envisager l’utilisation des produits Open Source au sein de solutions globales afin d’optimiser le coût de l’acquisition. Une attention particulière sera portée aux cas où des produits Open Source existent et ont déjà fait leurs preuves ailleurs au sein du gouvernement. Les fournisseurs qui mettront en avant des produits non Open Source auront à fournir la preuve qu’ils ont véritablement recherché des alternatives Open Source et devront expliquer pourquoi elles ont été écartées.

Action 6 : Exemples et politiques dans le monde entier, veille permanente des évolutions : le gouvernement du Royaume-Uni s’intéressera particulièrement aux exemples d’autres pays et d’autres secteurs pour encourager le développement des connaissances sur les produits et favoriser la concurrence entres fournisseurs. Le Royaume-Uni s’impliquera activement dans le développement de stratégies dans toute l’Union européenne et à l’international.

Action 7 : Collaboration active Gouvernement/Industrie : le Conseil des DSI travaillera de pair avec les intégrateurs de systèmes et les fournisseurs de logiciels pour que puissent émerger des solutions qui satisferont aux standards ouverts, intègreront l’Open Source et faciliteront sa réutilisation. Le gouvernement encouragera et facilitera la création de liens étroits entre les fournisseurs Open Source (organisations fournissant aide et support pour l’Open Source comprises) et les intégrateurs de systèmes. Le gouvernement partagera l’information avec l’industrie à propos des déploiements de l’Open Source en cours et des tests déjà effectués, de telle sorte que les connaissances acquises puissent être réutilisées.

Action 8 : Standards ouverts : Le gouvernement précisera les exigences du cahier des charges en référence aux standards ouverts et, dans la mesure du possible, demandera des solutions compatibles avec les standards ouverts. Il soutiendra l’utilisation du format Open Document (ISO/IEC 26300:2006) ainsi que des versions libres émergentes de formats auparavant propriétaires (par ex. ISO 19005-1:2005 (PDF) et ISO/IEC 29500 (formats Office Open XML)). La publication de l’information gouvernementale dans des formats ouverts sera de sa responsabilité, et l’usage de standards ouverts sera exigé sur les sites Web de l’État.

Action 9 : Technologies Open Source, ré-utilisation au sein du Gouvernement et publication adéquate du code : les acheteurs du gouvernement utiliseront une clause standard OJEU approuvée par l’OGC pour établir clairement que les solutions logicielles sont acquises sur la base de leur possible réutilisation partout ailleurs dans le secteur public. Les clauses du contrat standard OGC contiendront un article stipulant que le Gouvernement conservera les pleins droits sur les adaptations du code des logiciels ou les modifications des produits commerciaux tels qu’ils sont vendus, et qui établira clairement que ces droits couvrent la réutilisation partout ailleurs dans le secteur public et la possibilité de publier le code sur le principe de l’Open Source. Le cas échéant, les logiciels d’intérêt général développés par ou pour le gouvernement seront publiés suivant le principe de l’Open Source.

Action 10 : Communication, consultation et suivi : le gouvernement communiquera largement sur cette politique et ses actions connexes, et accroîtra sa communication si nécessaire. Il s’engagera aux côtés de la communauté Open Source et encouragera activement les projets qui pourraient, une fois leurs objectifs atteints, être labellisés comme des produits « Approuvés par le gouvernement ». Il suivra avec soin la stratégie et la politique de ces projets et rendra compte publiquement de leur évolution.

Commentaires

Pour contribuer au débat collectif en ligne à propos de ce plan d’action, nous avons créé une page publique qui recense des liens vers des blogs, des sites d’information et de réactions sur le gouvernement du Royaume-Uni, l’Open Source et les standards ouverts. Si vous publiez en ligne sur ces thèmes, veuillez utiliser le tag #ukgovOSS pour nous permettre de retrouver vos commentaires.

Notes

[1] Crédit photo : Paolo Camera (Creative Commons By)

[2] Usage des logiciels Open Source : Usage au sein du Gouvernement de Grande Bretagne, version 2. Cabinet Office/OGC, 28 octobre 2004.




Voudrait-on tuer le logiciel libre que l’on ne s’y prendrait pas mieux

Une de Libération - 10 mars 2009Le titre de mon billet du jour ne sort pas du cerveau torturé d’un gus dans un garage mais d’une émission radiophonique tout bien comme il faut de France-Inter. Il émane de Bernard Maris qui dans son émission L’autre économie du 9 mars dernier nous a proposé un percutant petit édito résumant si bien la situation que nous nous sommes permis de le reproduire ci-dessous.

Jacques Attali par ci, Une de Libération par là… on parle enfin de l’Hadopi en dehors de la blogosphère à la faveur de son passage à l’Assemblée. Et force est de constater que là aussi le projet de loi « Création et Internet » semble faire quasiment l’unanimité contre lui, les observateurs oscillant entre critique non voilée et grande perplexité.

Pour se tenir au courant, rien de tel que la revue de presse de la Quadrature du Net. À parcourir ces articles, on se dit que le chemin de croix de Christine Albanel et du gouvernement ne fait que commencer…

PS : Soit dit en passant, je plaide coupable par naïveté, mais qui peut bien m’expliquer pourquoi les émissions de ce joyau du service public qu’est Radio France ne sont pas librement disponibles en archives (et en formats ouverts) ?

La loi Hadopi

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Bernard Maris – 9 mars 2009 – L’autre économie – France Inter

Cette semaine les députés examinent le projet de loi HADOPI sur le piratage et le téléchargement illégal…

HADOPI qu’est ce que ça veut dire ? ca veut dire « Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet ». Cette Hadopi contrôlera et punira les internautes qui se livrent au téléchargement illégal. En fait le projet de loi sera pompeusement baptisé par le gouvernement « Création et internet » présenté par le ministère de la culture et inspiré par l’ancien PDG d’une grande surface, la FNAC. Que va faire cette autorité ? Lorsqu’un internaute téléchargera illégalement une œuvre musicale ou cinématographique depuis Internet, il sera rappelé à l’ordre, d’abord par l’envoi d’une lettre d’avertissement puis, en cas de récidive d’une lettre recommandée, et enfin par la suspension puis la résiliation de l’abonnement Internet.

C’est donc extrêmement sévère…

C’est sévère, mais on comprend la FNAC qui a envie de vendre des CD. Autrefois il y avait des milliers de marchands de disques en France, autant que de libraires, ils ont été tués par les grandes surfaces, et il est tout à fait humain qu’ayant liquidé les petits vendeurs, les gros veuillent garder leur rente. Les artistes, les créateurs, eux sont beaucoup plus partagés sur le piratage.

Pourquoi ?

Pour deux raisons.

  • Parce que le téléchargement ne les a pas empêché de vendre, au contraire les a fait connaître, n’a jamais diminué le nombre de fan dans les concerts pas plus que le magnétoscope n’a tué le cinéma ou la radio la chanson.
  • Pour une deuxième raison plus profonde. Les artistes, les créateurs savent qu’ils sont des imitateurs, ils ont appris de plus anciens, de plus géniaux, bref de maîtres. S’ils n’avaient pas eu accès à la création d’autrui, ils n’auraient pas créé. On peut aussi interdire les bibliothèques gratuites : c’est ce qu’avaient voulu faire certaines éditeurs. Ça ne favorisera pas l’éclosion des écrivains.

Enfin cette loi est une menace pour le logiciel libre…

Oui, parce qu’il faudra bien mettre des policiers derrière chaque ordinateurs, des mouchards qui seront des logiciels propriétaires, et que le rêve des logiciels propriétaires (Microsoft, Apple) est de tuer les logiciels libres qui sont beaucoup plus efficaces et performants ; et surtout fonctionnent selon un principe qu’ils détestent qui est celui de la coopération et de la réciprocité. Or il est impossible, par définition même, de filtrer les communications d’un logiciel libre. Logiciel livre et dispositifs de contrôle d’usage et de mouchardage sont ontologiquement incompatibles. Voudrait-on tuer le logiciel libre que l’on ne s’y prendrait pas mieux.

La phrase : On copie, on copie, et on finit par faire une œuvre. Picasso.