Opération « Dégooglisons » à Nevers les 24/25/26 juin

Mi-avril, les services de la ville de Nevers, dans le cadre de leur Année du Numérique, ont pris contact avec nous pour nous proposer d’animer, avec Nevers Libre (le tout récent GULL local) un événement d’envergure autour de la thématique de la décentralisation d’internet.

On y parlera donc essentiellement de la concentration des pouvoirs des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), mais aussi auto-hébergement, biens communs, et bien évidemment logiciels libres !

Opération Dégooglisons à Nevers

Les temps forts

Nous commencerons dès le vendredi 24 juin par une présentation du manifeste et de la charte de notre futur projet CHATONS, qui sera suivie par une projection-débat du documentaire « Les Nouveaux Loups du Web ». C’est l’occasion pour nous de remercier le cinéMazarin de nous accueillir. Vous pouvez pré-reserver vos places !

Dès le samedi matin et jusqu’au dimanche soir, vous pourrez retrouver à l’Inkub vos structures préférées sur un village du libre : April, Cozy Cloud, FabLab de Clamecy, FFDN, Framasoft, Nevers Libre, La Quadrature du Net, OpenStreetMap, PIQO, SavoirsCom1, Ville et Agglomération de Nevers.

La journée débutera par une introduction au logiciel libre (April), et se poursuivra par la présentation des enjeux de la décentralisation (Framasoft), la démonstration d’outils (Cozy Cloud, notamment), et le cas d’un secteur « non-informatique » impacté (celui de la presse, avec nos amis de NextINpact).

Le dimanche verra sa matinée consacrée à une « carte blanche à Louis Pouzin » inventeur du datagramme, précurseur d’internet et natif de la Nièvre. Il participera notamment à une table ronde sur l’enjeu de la question d’un internet neutre et décentralisé, au côté le La Quadrature, de la Fédération FDN, et bien d’autres. Enfin, le week-end s’achèvera par une dernière table ronde qui visera à prendre un peu de recul en abordant la question des « communs numériques » à l’heure de GAFAM.

Les nouveaux loups du web

Le « off »

Le samedi soir, un BarCamp sera organisé. Pour rappel, un BarCamp est une « non-conférence », donc les sujets ne sont évidemment pas définis, car c’est vous qui décidez 😉

Par ailleurs, en parallèle des conférences, des ateliers s’enchaîneront le samedi et le dimanche, autour du thème de ces journées : contributions à OpenStreetMap ou Wikipédia, utilisation de Cozy Cloud, démonstration d’outils Framasoft, ateliers d’auto-hébergement, etc.

Ces temps sont volontairement ouverts à tou-te-s afin d’avoir un programme « souple » permettant à chacun de participer et de partager ses questions et ses connaissances.

Venez !

Pour nous retrouver, rien de tel qu’une Framacarte 😉

 

Voir en plein écran

Le programme complet

Vendredi 24/06

APRES MIDI

Lieu : Lycée Raoul Follereau, 9 Bd St-Exupéry, Nevers

  • 14H Intervention « Internet et vie privée : je t’aime, moi non plus ? » (Framasoft)

SOIRÉE

Lieu CinéMAZARIN, 120 rue de Charleville, Nevers
  • 20H à 20H30: Conférence de presse : Annonce manifeste et charte CHATONS, par Framasoft.
  • 20H30 : projection-débat du documentaire « Les Nouveaux Loups du Web », de Cullen Hoback (1h15)

Avez vous déjà lu les conditions générales d’utilisation des données privées présentes sur chaque site internet que vous visitez, ou sur les applications que vous utilisez ? Bien sûr que non. Et pourtant, ces mentions autorisent les entreprises à utiliser vos informations personnelles dans un cadre au delà de votre imagination. Le film vous révèle ce que les entreprises et les gouvernements vous soustraient en toute légalité, à partir du moment où vous avez cliqué sur « J’accepte », et les conséquences scandaleuses qui en découlent. La projection du film sera suivie d’un débat animé par l’association Framasoft.

Samedi 25/06

Lieu : l’Inkub, site Pittié, 5 rue du 13eme de ligne, Nevers

Tout au long de la journée, retrouvez sur le « village associatif » différentes associations qui pourront vous présenter différents aspects du logiciel et de la culture libres. Différents ateliers animés par ces mêmes structures pourront vous permettre de pratiquer (« Comment contribuer à Wikipédia ou OpenStreetMap ? », « Utilisation de CozyCloud », « Créer un fournisseur d’accès à internet libre de proximité », « Mieux contrôler sa vie privée avec Firefox », etc.)

MATIN

  • 10/12H : Conférence « Qu’est ce que le Logiciel libre ? »

Cette conférence vise à présenter au grand public ce qu’est le logiciel libre, son histoire, ainsi que les enjeux de ce mouvement qui est loin de n’être que technique.

Intervenantes : Magali Garnero, Odile Benassy, Association April

APRÈS MIDI

  • 14H/15H30 : conférence « Nos vies privées sont-elles solubles dans les silos de données de Google ? »

L’emprise de Google, Apple, Facebook, Amazon ou Microsoft ne cesse de croître. Non seulement sur internet, mais aussi dans bien d’autres domaines (robotique, automobile, santé, presse, média, etc). L’association Framasoft s’est fixé l’ambitieuse mission de montrer qu’il était possible – grâce au logiciel libre – de résister à la colonisation d’internet et à marchandisation de notre vie privée.

Intervenants : Pierre-Yves Gosset, Pouhiou, Association Framasoft

  • 16H00/17H30 : conférence « Google, un big brother aux pieds d’argile ! »

Cozy permet à n’importe qui d’avoir son serveur web et de l’administrer à travers une interface très simple. Il offre la possibilité d’installer des applications web et de stocker ses données personnelles sur un matériel que l’on maîtrise. Contacts, calendriers, fichiers… Tout est au même endroit !

Intervenant : Benjamin André, CEO et co-fondateur de Cozy Cloud

  • 18H00/19H30 : Paroles croisées « La presse à l’heure des GAFAM »

Tous les secteurs sont impactés par l’omniprésence et la puissance des géants du numérique (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft, etc.). La presse n’est pas épargnée. Comment s’adapter aux changements de pratiques des lecteurs ? Comment résister à la pression des plateformes ? Quels sont les modèles économiques existants ou à inventer ? Quels sont les impacts sur le métier de journaliste ? En croisant les expériences d’un journal historiquement « papier » à dimension régional et celui d’un site d’informations spécialisé né sur internet, nous essaieront de mettre en valeur les enjeux d’une presse à traversée par le numérique.

Intervenants : David Legrand, directeur des rédactions de NextInpact, Jean Philippe Berthin, rédacteur en chef du Journal du Centre

Animateur : Pierre-Yves Gosset, Framasoft

A partir de 20H : BARCAMP : « Venez découvrir et contribuer à des projets libres (OpenStreetMap, Wikipédia, Firefox, Cozy, etc.) »
Wikipédia définit le barcamp comme « une non-conférence ouverte qui prend la forme d’ateliers-événements participatifs où le contenu est fourni par les participants qui doivent tous, à un titre ou à un autre, apporter quelque chose au Barcamp. C’est le principe pas de spectateur, tous participants. »

Dimanche 26

Lieu : l’Inkub, site Pittié, 5 rue du 13eme de ligne, Nevers

MATIN

  • 10h à 10h45 : Carte blanche à Louis Pouzin
  • 11H/13h00 : Table ronde citoyenne : « Un internet neutre et relocalisé : quels enjeux pour les territoires ? »

« Le « cloud », c’est l’ordinateur de quelqu’un d’autre. ». Au travers des regards et expériences de différents acteurs tentant – chacun à leur façon – de promouvoir un internet et des services de proximité au service des citoyen, la table ronde vise à explorer les pistes de résistance à une appropriation d’internet par quelques entreprises.

Intervenants : Fédération FDN, Association April, La Quadrature du Net, Stéphane Bernier (DSI Ville de Nevers), Quentin Bouteiller (Nevers Libre), Louis Pouzin

Animateur : Benjamin Jean (Inno3)

APRES MIDI

  • 14H/16H : table ronde « Les communs numériques »

Pour conclure ces journées, cette table ronde vise à « prendre de la hauteur » en posant la question essentielle de la présence des « communs » à l’heure du numérique, mais aussi des pressions sociétales, lobbyistes, économiques auquel ces ressources doivent faire face.

Intervenants : Odile Benassy (April), Christian Quest (Président OpenStreetMap France), Pouhiou (Collectif SavoirsCom1)

Animateur : Jérémie Nestel

  • 16H : Clôture de l’événement : Alain Bourcier, Vice Président de l’Agglomération de Nevers en Charge du Numérique

 

Téléchargez le programme complet en version PDF.

 

Nous remercions chaleureusement tous les partenaires de cet événement (Ville/agglo de Nevers, Nevers Libre, PIQO, etc.) ainsi que toutes les structures ayant répondu présentes, et nous espérons vous voir nombreuses et nombreux pour partager ce moment avec nous !

 

Partenaires de l'opération

 




Prendre du champ (Libres conseils 26/42)

Chaque jeudi à 21h, rendez-vous sur le framapad de traduction, le travail collaboratif sera ensuite publié ici même.

Traduction Framalang : Lycoris, grosfarmerlin8282, Sky, Julius22, _noskill, Nyx, lenod, KoS, lerouge, alexb, Ex0artefact, name?, SaSha_01, peupleLàlamessen

Prendre de la distance pour atteindre l’excellence

Jono Bacon

Jono Bacon est gestionnaire de communauté, directeur technique, consultant et auteur. Il travaille actuellement comme gestionnaire de la communauté Ubuntu chez Canonical. Il dirige une équipe afin de faire croître, de stimuler et d’enthousiasmer l’ensemble de la communauté Ubuntu. Il est l’auteur d’Art of Community, le fondateur du Community Leadership Summit et le cofondateur du populaire podcast LugRadio.

Jono Bacon au tableau blanc

La première fois que j’ai entendu parler de Linux et d’open source remonte à 1998. La technologie était alors horriblement compliquée et il fallait fournir de gros efforts pour obtenir un système qui tourne correctement ; pourtant, le concept d’une communauté collaborative globale me subjugua. À l’époque, je ne possédais aucune connaissance, mes compétences techniques étaient limitées et j’avais des boutons.

J’étais un adolescent typique : tourmenté, cheveux longs, T-shirt Iron Maiden. Mon chemin était déjà tout tracé, au sens le plus traditionnel ; j’irais à l’école, puis au lycée, puis à l’université, puis je trouverais un travail.

Quatorze ans plus tard, le chemin que j’ai finalement suivi n’a rien de conventionnel. Cette fascination personnelle envers le communautaire m’a conduit partout dans le monde et m’a lancé des défis captivants. C’est intéressant de prendre du recul et d’analyser cette période. Enfin, ça pourrait être intéressant pour moi… Vous préférerez peut-être passer au chapitre suivant…

… Toujours avec moi ? OK, allons-y.

La science contre l’art

J’ai toujours cru que la gestion d’une communauté était moins une science qu’un art. Je définis la science comme l’exploration de méthodes permettant de reproduire des phénomènes à travers des étapes établies et clairement comprises. Dans le monde de la science, si vous connaissez la théorie et la recette pour un résultat donné, vous pouvez souvent reproduire ce résultat comme tout un chacun.

L’art est différent. Il n’y a pas de recette pour produire une chanson populaire, pour créer une peinture exceptionnelle ou pour sculpter une statue magnifique. De même, il n’y a pas vraiment d’ensemble d’étapes reproductibles pour créer une communauté prospère. Bien sûr, il y a des astuces et des techniques pour parvenir à réunir certaines composantes du succès, mais c’est la même chose pour les autres formes d’art : nous pouvons tous apprendre les notes et les accords d’une guitare, mais cela ne veut pas dire que nous allons écrire la prochaine Bohemian Rhapsody. La formule qui donne naissance à un titre comme Bohemian Rhapsody, c’est une dose de compétence acquise et une dose de magie.

Je ne suggère cependant pas que la gestion de communauté soit une forme d’art désespérément branchée et introvertie que seuls quelques bienheureux élus très talentueux peuvent accomplir. Ce dont je me plains est qu’il n’y ait pas de manuel sur la façon de créer une communauté magnifique et enthousiasmante ; il s’agit toujours d’une dose d’apprentissage et d’une dose de magie mais la part de magie ne vous sera pas insufflée par la grâce des dieux ; il vous faudra plutôt la chercher en essayant de nouvelles voies, en restant à l’écoute des retours et en évaluant ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.

C’est plutôt frustrant car cela veut dire que cette « magie » ne s’obtient pas en suivant une recette unique. Mais il reste la possibilité de partager les compétences acquises, comme j’ai cherché à le faire avec The Art of Community 1 et la conférence annuelle Community Leadership Summit 2.  

Avant de commencer mon introspection, et pour ceux que ma carrière n’ennuie pas mortellement, je vais résumer rapidement les communautés avec lesquelles j’ai travaillé afin de poser le contexte. En bref, j’ai commencé dans mes jeunes années chevelues par la création de l’un des premiers sites web communautaires britanniques sur Linux, appellé Linux UK, et j’ai intégré la communauté des Groupes d’utilisateurs de Linux (Gul). Je me suis ensuite lancé dans la création de mon propre Gul à Wolverhampton, au Royaume-Uni, et j’ai fondé le projet Infopoint pour encourager les Gul à prêcher Linux sur les salons informatiques du Royaume-Uni. J’ai ensuite poursuivi en contribuant à la communauté KDE et en fondant le site KDE::Enterprise ; j’ai établi le KDE Usability Study et contribué de-ci, de-là à diverses petites applications. J’ai ensuite fondé le groupe d’utilisateurs PHP des West Midlands. J’ai aussi commencé à m’intéresser à GNOME. J’ai développé quelques applications (GNOME iRiver, XAMPP Control panel, Lernid, Acire) et également participé à la conception et un peu au code d’une nouvelle application audio simplifiée appelée Jokosher. C’est à peu près à cette époque que j’ai co-fondé le podcast LugRadio qui fonctionna pendant quatre ans avec plus de deux millions de téléchargements, ce qui a entraîné la mise en place de cinq événements en direct au Royaume-Uni et aux États-Unis. À cette époque, j’ai également commencé à travailler comme consultant open source pour l’initiative publique OpenAdvantage. Là, j’ai vraiment eu l’occasion de me faire les dents sur le communautaire en aidant des organisations à travers tout les West Midlands à passer à l’open source. Après quelques années passées chez OpenAdvantage, je suis parti rejoindre Canonical comme gestionnaire de la communauté Ubuntu où j’ai mis en place une équipe de quatre personnes. Ensemble, nous nous investissons dans des projets très variés chez Ubuntu et Canonical. Vous êtes toujours là ?

Ouah, vous êtes tenace. Ou assommé d’ennui. Probablement assommé. Il y aura interro à la fin, ça vous apprendra…

Réfléchir

Ceci m’amène donc à l’objet de cet article : la curieuse question de savoir ce que je me dirais si je savais ce que je sais aujourd’hui. À ce jour, je pense que ce que j’ai appris au cours de ma carrière peut se diviser en deux grosses catégories :

Pratique — les trucs et astuces du métier, par exemple, les différentes approches des moyens de communication, les différentes façons d’utiliser la technologie, la gestion du temps, les différentes approches de la gestion de projet, etc.

Personnel — les leçons de vie et apprentissages qui modifient l’approche que nous avons de notre monde.

Je ne vais pas m’étendre sur la catégorie pratique — vous devriez lire mon livre si vous souhaitez en savoir plus sur ce sujet (le livre couvre aussi l’aspect personnel). Aujourd’hui, je vais plutôt m’intéresser aux leçons de vie. Les approches et les pratiques changeront toujours, mais les leçons que l’on en tire ne changent pas tant que ça : elles évoluent plutôt au fur et à mesure que votre sagesse grandit.

L’importance des convictions

Les communautés sont fondamentalement des réseaux de personnes poussées par leurs convictions. Chaque communauté possède son propre état d’esprit et un domaine d’expertise propre. Cela peut être une idée aussi grandiose que de rassembler l’intégralité des savoirs de l’humanité, changer la face du monde avec le logiciel libre ou, plus simplement, animer un « club » pour que les gens puissent échanger autour de leurs livres préférés. Que ce soit pour changer le monde ou simplement pour s’amuser, chaque communauté fait valoir son propre système de valeurs ; l’humble club de lecture accorde beaucoup de valeur au fait de fournir un environnement amusant, sécurisé et libre afin de pouvoir partager des avis et des conseils de lecture. Cela ne change pas le monde, mais cela reste toujours une bonne chose à laquelle n’importe qui peut se rallier.

La règle, souvent tacite, d’une communauté est que chaque contribution d’un membre de la communauté doit bénéficier à l’ensemble de celle-ci. C’est pourquoi il est amusant d’écrire un correctif pour un bogue d’un logiciel libre, de contribuer à la documentation ou d’organiser un événement gratuit. Mais il est rare que quiconque veuille contribuer de façon bénévole si sa contribution ne bénéficie qu’à une seule personne ou entreprise.

Bien sûr, je suis certain que vous tous, enfoirés cyniques que vous êtes, allez chercher et trouver une exception. Mais souvenez-vous que cette décision est profondément personnelle : les membres de la communauté décident par eux-mêmes si leur contribution doit bénéficier à tous. Par exemple, certains vont arguer que n’importe quelle contribution à Mono va seulement bénéficier à Microsoft et à l’ubiquité de leur infrastructure .NET. Mais des centaines de contributeurs participent à Mono parce qu’ils ne le voient pas de cette manière : ils voient leurs contributions comme un moyen utile et amusant de permettre aux développeurs d’écrire des logiciels libres plus facilement.

Si je devais parler au Jono de 1998, j’insisterais sur l’importance de cette conviction. J’avais alors une intuition à ce propos, mais je ne compte plus les exemples qui m’ont prouvé depuis que cette conviction incite réellement les gens à participer. J’ai souvent parlé de l’histoire du gamin d’Afrique qui m’a envoyé un courriel pour me dire qu’il devait marcher trois heures aller-retour jusqu’au cybercafé le plus proche pour contribuer à Ubuntu. Il le faisait car il était convaincu par notre mission d’apporter le logiciel libre aux masses. On pourrait aussi citer l’énorme croissance de Wikipédia, l’incroyable réunion de la communauté GNOME autour de GNOME 3, le succès d’OpenStreetMap et bien d’autres exemples.

Ceci dit, la conviction n’est pas juste un artifice pour les relations publiques. Il faut qu’elle soit réelle. Bien que nous ayons tous des convictions différentes — certains ont des convictions sur le logiciel, sur l’éducation, sur le savoir, sur la transparence ou sur n’importe quoi d’autre — vous ne pouvez pas fabriquer un système de convictions à moins qu’il n’ait un but valide, auquel un groupe puisse s’intéresser. Certes, il peut être obscur, mais il doit être réel. Avec le succès du mouvement open source, nous avons vu des exemples d’entreprises qui tentaient de jouer cette approche et ce registre sémantique autour de la conviction, mais dans le but de servir leurs propres besoins. Je pourrais essayer de vous faire adhérer à cette idée : « Travaillons tous ensemble pour aider Jono à devenir riche » et fabriquer de toutes pièces quelques sophismes pour justifier de cette acte de foi (par exemple, si j’étais riche, je pourrais me concentrer sur d’autres travaux, au bénéfice d’autres communautés ; mes enfants seraient élevés et éduqués dans de bien meilleures conditions, ce qui profiterait à tout le monde), mais ce serait n’importe quoi.

En tant que telle, la conviction est un puissant moteur pour la contribution comme pour la collaboration, mais il est important de l’utiliser de manière équilibrée et de l’associer au respect. Alors qu’elle peut déclencher d’incroyables changements, elle peut être terriblement dévastatrice (comme c’est le cas avec certains prédicateurs à la TV qui utilisent la religion comme un moyen de vous soustraire de l’argent, ou encore les faux médiums qui utilisent la lecture à froid et s’accrochent à votre besoin désespéré de croire que vous pouvez à nouveau vous connecter à un être cher disparu).

Votre rôle

Aujourd’hui, les gestionnaires de communauté ont un rôle intéressant. Par le passé, j’avais parlé de deux types de gestionnaires de communauté ; ceux qui sortent, font des conférences et s’agitent en parlant d’un produit ou d’un service et ceux qui travaillent avec une communauté de volontaires pour les aider à connaître une expérience collaborative, productive et amusante. Le second type m’intéresse plus — je pense que c’est ce que fait un vrai gestionnaire de communauté. Le premier de ces positionnements est tout à fait sympa et respectable mais cela convient mieux dans le domaine de la promotion et des relations publiques et cela nécessite d’autres compétences. J’ai quelques conseils que je pense être assez intéressants pour être partagés.

La première et probablement la plus importante des leçons est d’accepter que vous pouvez et allez parfois avoir tort. Jusqu’ici, dans ma carrière, j’ai fait certaines choses correctement et j’ai commis des erreurs. Bien que je croie être généralement sur le bon chemin et que l’essentiel de mon travail soit couronné de succès, il y a eu quelques flops ici ou là. Ces loupés, accidents et faux pas n’ont jamais été dus à de la malveillance ou de la négligence ; ils ont plutôt été causés par une sous-estimation de la difficulté de mon objectif.

Ça a l’air assez évident, mais ça l’est moins quand vous avez une fonction relativement publique. En gros, les gestionnaires de communautés sont souvents vus comme les représentants d’une communauté donnée. Par exemple, je sais qu’à titre personnel, on me considère comme l’une des figures publiques d’Ubuntu et cette responsabilité, s’accompagne d’une certaine pression publique quant à la manière dont les gens vous perçoivent.

Avoir les projecteurs braqués sur soi en se retrouvant à la tête d’une communauté déclenche chez certains un mécanisme défensif. Ils reculent à l’idée de faire des erreurs en public, comme si les masses dans leurs bavardages s’attendaient à une prestation parfaite. C’est dangereux, et on a déjà vu, par le passé, des personnages publics qui ne reconnaissent jamais avoir fait une erreur par crainte d’être ridicules en public. Non seulement, c’est une idée fausse (nous faisons tous des erreurs), mais cela ne donne pas non plus à la communauté un bon exemple de chef de file honnête et transparent tant dans les choses qu’ils font bien que dans celles qu’ils font moins bien. Il est important de se rappeler que nous gagnons souvent le respect d’autrui par leur acceptation de nos erreurs : c’est la caractéristique d’un individu honnête et accompli.

Je me rappelle mes débuts en tant que responsable chez Canonical. À l’époque, Colin Watson et Scott James Remnant, deux vieux briscards des tous débuts de Canonical et d’Ubuntu, faisaient aussi partie des responsables de l’équipe d’ingénierie d’Ubuntu. Nous avions des réunions hebdomadaires avec notre directeur technique, Matt Zimmerman, et j’y entendais régulièrement Colin et Scott avouer ouvertement qu’ils étaient mauvais dans ceci ou avaient fait une erreur dans cela ; ils étaient étonnamment humbles et acceptaient leurs forces et leurs faiblesses. En tant que responsable débutant, je l’ouvrais moins souvent, mais cela m’a appris que ce genre d’ouverture d’esprit et d’honnêteté est important non seulement en tant que responsable, mais en tant que leader d’une communauté. Depuis, je n’hésite plus à admettre publiquement mes erreurs ou à m’excuser si je foire quelque chose.

Écouter

De même qu’être ouvert aux erreurs est primordial, il est tout aussi important d’être à l’écoute et d’apprendre de ses pairs. Dans de nombreux cas, nos communautés perçoivent les responsables et les leaders de communauté comme des personnes qui devraient toujours fournir des orientations et des directions, mener activement le projet et réaliser ses objectifs. C’est sans aucun doute une responsabilité. Mais tout autant qu’être la voix qui montre la voie, il est important de prêter l’oreille pour écouter, guider quand c’est opportun et apprendre de nouvelles leçons et idées.

Les membres de nos communautés ne sont pas juste des mécaniques froides et insensibles qui font leur travail. Ce sont des humains qui vivent, respirent, ont des opinions, des sentiments et des idées. J’ai vu de nombreux exemples — et j’en ai déjà moi-même provoqué —, de ces situations où quelqu’un est tellement habitué à donner des instructions et des conseils qu’il oublie parfois de simplement s’asseoir, écouter et apprendre de l’expérience de quelqu’un d’autre. Toute industrie possède ses maîtres-à-penser et ses experts… des gens célèbres et reconnus pour leur sagesse. Mais, d’après mon expérience, certaines des leçons de vie les plus révolutionnaires que j’ai apprises sont venues de membres tout à fait anonymes, ordinaires. Savoir écouter les gens n’est pas seulement important pour nous aider à apprendre et à nous améliorer dans ce que nous faisons, c’est également essentiel pour gagner le respect et avoir de bonnes relations avec sa communauté.

Temps de travail contre temps libre

Pendant que je parle de la façon dont nous collaborons avec notre communité, il y a un autre résultat de mon expérience que je n’ai vraiment assimilé qu’assez récemment. Comme beaucoup de gens, de nombreux centres d’intérêts remplissent mes journées. À part être marié et essayer d’être le meilleur mari possible, et à part mon travail quotidien en tant que gestionnaire de la communauté d’Ubuntu, je participe aussi à des projets tels que Severed Fifth, le Community Leadership Summit et quelques autres choses. Comme on pourrait s’y attendre, je consacre mes journées à mon travail rémunéré : au boulot, je ne passe pas de temps à travailler sur ces autres projets. Et, comme on pourrait s’y attendre, lorsque ma journée de travail se termine, je me mets à travailler sur ces autres projets. La leçon qu’il faut retenir ici, c’est qu’il n’est pas toujours clair pour votre communauté de savoir où tracer les limites.

Au fil des années, j’ai développé toute une série de services en ligne que j’utilise tant dans mon travail qu’à titre personnel. Mes comptes Twitter, identi.ca et Facebook, mon blog et d’autres ressources sont les endroits où je parle de ce que je fais. Le problème est que si l’on tient compte de leur caractère public, du fait que je suis un représentant officiel du projet Ubuntu et de tous les fuseaux horaires autour du globe, même Einstein aurait du mal à faire la différence entre ce que j’écris en tant que Jono et ce que j’écris pour le compte de Canonical.

Ce qui a pu causer de la confusion. Par exemple, malgré mes clarifications répétées, OpenRespect n’est pas et n’a jamais été une initiative de Canonical. Bien sûr, quelques idiots ont choisi d’ignorer mes explications à ce sujet mais je comprends néanmoins comment la confusion a pu arriver. La même chose s’est produite pour d’autres projets tels que Severed Fifth, The Art of Community et le Community Leadership Summit, qui ne font pas et n’ont jamais fait partie de mon travail chez Canonical.

C’est une leçon pour moi car j’ai moi-même partagé un moment, cette vision des choses et disais : « Évidemment que c’est activité de loisirs, j’ai posté ça à 20 h. » tout en haussant les épaules à propos de la confusion entre travail et projets personnels. Quand votre travail vous met dans une position relativement publique, vous ne pouvez pas vous offrir le luxe de voir les choses comme ça. Au contraire, vous devez considérer que les gens vont avoir tendance à faire la confusion et que vous allez devoir travailler plus dur pour bien clarifier les choses.

Ne voyagez pas trop

À propos du travail pour une société qui vous a recruté pour être à la tête d’une communauté, vous devriez toujours avoir conscience des risques comme des bénéfices des voyages. C’est une chose que j’ai apprise assez tôt dans ma carrière chez Canonical. Je voyais toujours les mêmes têtes dans les conférences, et il était évident que ces personnes avaient très bien communiqué sur les bénéfices des voyages auprès de leurs employeurs, tout comme je l’avais fait, sauf que j’en ai aussi appris les dangers.

Je voyageais et ce n’était pas seulement un travail fatigant et épuisant psychologiquement, mais j’étais aussi plus loin de mes courriels, moins présent sur IRC, j’étais dans l’impossibilité d’assister à de nombreuses réunions et j’avais moins de temps à consacrer à mes engagements professionnels. Ainsi, mon rôle était principalement devenu de sortir et d’aller assister à des événements et, même si c’était amusant, cela ne rendait pas autant service à ma communauté qu’il l’aurait fallu. Aussi ai-je drastiquement réduit mes déplacements — pour tout dire, je suis allé au Linux Collab Summit il y a quelques jours, et hormis quelques événements d’Ubuntu auxquels je devais assister, je n’ai assisté à aucune conférence depuis près d’un an. J’ai l’impression à présent d’être allé un peu trop loin dans l’autre direction. Tout est donc une question d’équilibre. Mais j’ai aussi le sentiment de mieux servir ma communauté quand je peux prendre le temps d’être au bureau et d’être en ligne et disponible.

La planification

Pour certains, être à la tête d’une communauté, ou simplement l’animer, est un rôle qui tient moins de la structure pré-établie que du fait d’être réactif. À mes débuts, c’est également ce que je pensais. Bien qu’il n’y ait absolument aucun doute sur la nécessité de se montrer réactif et de pouvoir répondre aux choses qui se présentent, il est également essentiel de planifier suffisamment son travail sur une période donnée.

Cette planification devrait être effectuée de manière ouverte quand c’est possible et remplit plusieurs objectifs :

Partager la feuille de route — ça aide la communauté à comprendre sur quoi vous travaillez et lui offre souvent des opportunités de vous aider.

Apporter des garanties — ça prouve qu’un responsable de communauté fait quelque chose. Votre communauté peut constater votre travail effectif à l’œuvre. C’est très important puisque la majeure partie du travail d’un responsable de communauté s’effectue souvent sans que la communauté au sens large en ait connaissance (par exemple, avoir une conversation en tête à tête avec un des membres de la communauté). Et ce manque de visibilité peut parfois générer des inquiétudes sur le fait que peu de choses se produisent dans des domaines-clé alors qu’en fait, beaucoup de choses se produisent en coulisses.

Communiquer les progrès vers le haut et vers le bas de l’organisation — c’est pertinent si vous travaillez dans une entreprise. Avoir établi de bons processus de planification montre votre travail effectif à votre hiérarchie ; ça rassure votre équipe sur le fait que vous saurez toujours sur quoi travailler et ça donne beaucoup de valeur ajoutée à la communauté.

Au fil des années, j’ai attaché de plus en plus d’importance à la planification. Mais je garde suffisamment de temps et de flexibilité pour rester réactif. Quand j’ai débuté comme gestionnaire de la communauté Ubuntu, mon planning était plutôt personnel et je le gérais au coup par coup : je prenais le pouls de la communauté et je consacrais temps et moyens à m’occuper des domaines que je jugeais adéquats.

À présent, je répartis les objectifs dans un ensemble de projets qui couvrent chacun un cycle d’Ubuntu, je rassemble des informations avec les parties prenantes, je compose une feuille de route, je fais le suivi du travail dans des schémas directeurs. J’estime également les progrès effectués en utilisant toute une gamme d’outils et de processus tels que mon diagramme des tâches réalisées, des réunions régulières et d’autres encore. Bien que la méthode actuelle nécessite plus de planification, elle est d’une aide significative en termes de bénéfices sur les points cités ci-dessus.

Perception et conflit

Dans le monde de la gestion et de la gouvernance de communautés, j’entends souvent s’exprimer l’avis selon lequel tout serait affaire de perception. En règle générale, quand j’entends ça, c’est en réponse à quelqu’un qui se trouve du mauvais côté du bâton, le plus souvent au cours d’une période de conflit.

Bien sûr, la perception joue un rôle important dans nos vies, c’est vrai ; mais ce qui peut alimenter des perceptions erronées ou inadéquates, c’est le manque d’information, de mauvaises informations et, dans certains cas, des tensions et des tempéraments échauffés. Cela peut être une des tâches les plus complexes pour celui qui est à la tête de la communauté. Et j’en suis ressorti en tirant quelques leçons dans ce domaine également.

Les communautés sont des groupes de personnes et, dans chaque groupe, on trouve souvent des rôles stéréotypés dans lesquels les gens se glissent. On y trouve, en général, quelqu’un que l’on considère comme une rockstar ou un héros, quelqu’un de compréhensif pour les préoccupations et les soucis et qui prêtera son épaule pour pleurer, quelqu’un qui a son franc-parler et souvent quelqu’un qui est… disons… intentionnellement pénible. Les héros, les oreilles compatissantes et les grandes gueules ne posent pas particulièrement de problèmes, mais les personnes qui créent délibérément des difficultés peuvent être pénibles ; lorsqu’il devient carrément difficile de gérer une personne, cela peut provoquer des tensions avec les autres membres et amener du conflit dans une communauté qui, sinon, est heureuse. Il faut étouffer ce genre de problèmes dans l’œuf.

Une partie du défi, ici, c’est que les gens sont des gens, que les groupes sont des groupes et qu’il n’est pas rare qu’une personne (ou un petit nombre de personnes) se fasse connaître et soit critiquée derrière son dos et passe pour quelqu’un avec qui il est difficile de travailler. En plus de cela, la plupart des gens n’ont pas envie d’être impliqués dans un quelconque conflit et, du coup, la personne dont on se plaint ne peut pas toujours se rendre compte de la façon dont les gens la perçoivent, étant donné que personne ne veut la confronter à ce sujet. Il en résulte une des situations les plus dangereuses pour les membres d’une communauté — une réputation se propage, sans même que la personne concernée ne s’en rende compte. Et du coup, puisqu’elle ne le sait pas, elle n’a jamais l’occasion de changer de comportement. C’est une situation plutôt inconfortable.

Une réponse habituelle à cette conclusion consiste à dire : « ils sont si difficiles à gérer qu’essayer de les raisonner c’est peine perdue, de toute façon ». Même si cela se produit certainement de temps à autres, ne supposez pas trop vite que ce sera l’issue ; j’ai quelquefois eu la désagréable expérience de sentir que je devais faire savoir à certaines personnes, la réputation qu’elles avaient développée. Et, dans la plupart des cas, cela a été une réelle surprise pour elles. Et elles ont quasiment toutes modifié leur comportement après ce retour.

Sur un sujet lié, bien que ça n’est pas si courant dans la routine quotidienne d’un leader de communauté, un conflit va souvent se pointer ici ou là. Je voudrais juste partager deux éléments à ce propos.

La première chose, c’est de comprendre comment les conflits naissent. Pour expliquer cela, permettez-moi de vous raconter une anecdote. La semaine dernière, un de mes amis est venu en avion dans la baie de San Fransisco pour une conférence. Il est arrivé le soir, je suis donc allé le chercher à l’aéroport et nous sommes allés au pub pour discuter des dernières nouvelles. Là-bas, il commença à me raconter à quel point il était déçu d’Obama et de son administration. Il a cité des exemples : la réforme de la sécurité sociale, la réforme de Wall Street, les droits du numérique et d’autres choses. Ce qui l’embêtait n’était pas la politique menée en elle-même, mais il trouvait qu’Obama n’en faisait pas assez. Ma vision des choses était légèrement différente.

Je ne suis ni Démocrate, ni Républicain ; je prends ma décision sur chaque problème, sans m’aligner sur l’une ou l’autre des parties. Là où je diffère de mon ami, cependant, c’est que je suis un peu plus favorable à Obama et son travail quotidien. C’est parce que je crois que lui, et que n’importe qui dans un poste en relation avec le public — qu’il soit internationalement reconnu comme le président ou qu’il soit obscur et spécifique comme un gestionnaire de communauté — a conscience que l’histoire lue et comprise par le public est souvent un simple fragment de l’histoire complète. Il y a eu des cas, par le passé, où quelque chose de controversé a démarré dans les communautés auxquelles j’appartenais. De nombreux commentateurs et spectateurs n’avaient pas l’entière connaissance des faits, soit parce qu’ils n’avaient pas compris les nuances et les détails du sujet, soit parce que certains éléments de l’histoire n’avaient pas été partagés.

Bon, je sais ce que vous allez dire — , quoi, certains éléments n’avaient pas été partagés !? Il vaudrait mieux être transparent, n’est-ce pas ? Bien sûr que c’est nécessaire. Et nous devrions toujours nous attacher à être ouverts et honnêtes. Mais il y a des cas où il serait inapproprié de partager certaines parties de l’histoire. Cela pourrait être en raison de fragments de conversations privées avec des gens qui ne souhaitent pas partager leurs commentaires ou tout simplement faire son boulot bien comme il faut sans éclabousser les réputations. Par exemple, j’ai toujours eu comme pratique de ne pas faire de coups bas à des concurrents, peu importe la situation. Par le passé, il y a eu des comportements critiquables de la part de certains concurrents dans les coulisses. Mais je ne vais pas me mettre à salir leurs réputations car cela n’aurait pas vraiment d’intérêt. Je dois cependant accepter que des critiques de la communauté peuvent ne pas connaître toute la situation avec toutes les magouilles ayant eu lieu dans les coulisses.

Enfin, à propos de conflits, je crois que j’ai appris une vraie leçon de vie au sujet de l’approche idéale à propos des critiques et des issues heureuses. Bien que les billets de blogs aient eu un impact très positif sur la manière dont les gens peuvent exposer leur pensée et partager leurs opinions et visions des choses, ils présentent une facette bien plus sombre. Les blogs sont aussi devenus un moyen d’exprimer parfois un peu trop rapidement des opinions excessivement zélées. Malheureusement, j’ai un exemple plutôt embarrassant de quelqu’un qui est tombé dans ce piège : c’est votre serviteur.

Pour commencer, quelques éléments de contexte. Il existait une entreprise appelée Lindows qui distribuait une version de Linux qui présentait beaucoup de similarités visuelles et fonctionnelles avec Windows. Microsoft voulout interdire l’emploi du nom « Lindows » et une bataille s’engagea pour changer le nom. D’abord, Lindows résista. Mais après que la pression eut monté, l’entreprise se rebaptisa Linspire.

Maintenant, le problème. Je prends la liberté de l’expliquer dans les termes de l’article lui-même :

Il y a peu de temps, un type nommé Andrew Betts a décidé de retirer les éléments non-libres de Linspire et de publier les parties libres dans une distribution dérivée de Linspire qu’il a appelée Freespire. Le fait de rediffuser des distributions ou du code n’a certainement rien de nouveau et s’inscrit parfaitement dans la culture de l’open source. À vrai dire, bien des distributions que nous utilisons aujourd’hui ont été dérivées d’outils existants.

Malheureusement, Linspire a considéré que c’était un problème et a demandé à Freespire de changer de nom. En lisant l’annonce du changement, son langage et son style, j’ai l’impression que tout ça pue le pur marketing. Loin de moi l’idée d’insinuer que Betts a été contraint d’écrire cette page ou que les drones marketing de Linspire l’ont écrite et annexée en son nom, mais cela ne me semble pas sonner très juste. Je me serais attendu à trouver des lignes du style « Le nom de Freespire a été changé pour Squiggle afin d’éviter toute confusion avec le produit Linspire. », mais ce n’est pas le cas. Au lieu de cela, on a droit à des morceaux choisis de marketing comme « Afin de prévenir toute confusion, j’ai contacté Linspire qui m’a fait une offre extrêmement généreuse pour nous tous. » La vache ! Quelle peut bien être cette offre-exclusive-qu’on-ne-rencontre-qu’une-fois-dans-sa-vie-et-qu’on-ne-trouve-pas-dans-les-magasins ? Fort heureusement, il poursuit : « Ils souhaitent que tous ceux qui ont suivi mon projet puissent faire l’expérience du vrai Linspire, ET GRATUITEMENT !!! ». Maintenant, dites-nous, je vous prie, comment nous pouvons obtenir cette vraie version du logiciel « ET GRATUITEMENT » ?

« Pour une période limitée de temps, ils mettent à disposition un code de réduction dénommé FREESPIRE qui vous donnera une copie numérique gratuite de Linspire ! Veuillez visiter http://linspire.com/ pour les détails. » Ho… merci.

Dans un billet de mon blog, J’ai décoché à Linspire un bon coup de genou dans les bijoux de famille. J’ai raconté l’histoire, protesté contre ce que je considérais comme de l’hypocrisie considérant leur propre bataille dans des histoires similaires de marques déposées, et j’ai fulminé. J’aurais aimé que Guitar Hero existe à cette époque, cela aurait été un bien meilleur moyen d’utiliser mon temps.

Je me suis trompé. Mon article n’allait jamais servir à quoi que ce soit. Peu de temps après la publication de l’article, le PDG d’alors, Kevin Carmony, m’envoya un courriel. Il n’avait pas l’air satisfait de ma prestation. Son objection, et elle était valable, visait l’absence de concertation mutuelle préalable. Ma première réaction fut de répondre sur mon blog. La réalité de l’histoire était beaucoup moins noire. Et les gens de Linspire n’était pas les ogres que j’avais dépeints. J’ai présenté mes excuses à Kevin et me suis senti idiot.

Beaucoup de conflits sont résolus par des discussions privées où les gens peuvent être ouverts et concentrés sur les solutions sans être dérangés. Au fil des années, j’ai vu beaucoup d’exemples d’une guerre publique houleuse par blogs interposés continuant, alors que, dans les coulisses, il y avait un échange calme et une recherche de solutions.

Jono Bacon a appris à communiquer avec toutes les communautés

Pour conclure

Lorsque j’ai commencé à écrire cet article, il était bien plus court. Mais j’ai continué à ajouter des éléments un par un. Il est sûrement déjà assez long pour que je puisse compter le nombre de personnes lisant cette partie sur les doigts d’une main. Je vais donc l’arrêter ici. Je pourrais continuer éternellement avec des anecdotes croustillantes et des expériences dans lesquelles j’ai été suffisamment chanceux pour être impliqué et pour étendre mes horizons. Mais je finirais par écrire L’art de la communauté II : cette fois-ci, c’est personnel.

La vie est une expérimentation permanente. Et j’espère que votre investissement dans la lecture de cet article vous a apporté un peu d’expérience.

1 http://artofcommunityonline.org

2 http://communityleadershipsummit.com

Crédit photos : gidgetkitchen  (CC-BY-SA) et Ubuntu-news.ru




WebM contre H.264 : La FSF soutient le choix de Google

Dawn - CC byCe n’est pas forcément tous les jours que la Free Software Foundation (FSF) de Richard Stallman applaudit et soutient ouvertement Google dans ses choix de format vidéo pour le Web. Et d’appeler les internautes à en faire de même.

Google est même qualifié d’audacieux, puisque l’adoption d’un format ouvert – WebM – s’accompagne de la suppression d’un format fermé – H.264.

Pour en savoir sur le sujet, nous ne saurions trop vous conseiller notre article : Bataille de la vidéo sur le Web : Quand Google restreint pour mieux ouvrir ?[1].

Pas de double standard : soutenir l’appui de Google à WebM

No double standards: supporting Google’s push for WebM

Brett Smith – 19 Janvier 2011 – FSF.org (Traduction Framalang : Cheval boiteux, Jérémie et Antistress)

Nous avons décidé de soutenir le projet WebM et nous encourageons les autres fondations et organisations à nous rejoindre pour connaître la marche à suivre. Aujourd’hui, nous exhortons également les gestionnaires de sites web à distribuer les vidéos dans le format WebM et à abandonner le H.264.

La semaine dernière, Google a annoncé qu’il planifiait la suppression du support du codec vidéo H.264 des ses navigateurs au profit du codec WebM qui a récemment été libéré. Depuis, il y a eu beaucoup de discussions concernant les incidences possibles sur l’avenir du Web, au moment où la spécification HTML5 — dont la balise video — mûrit.

Nous applaudissons Google pour ce changement : c’est une avancée positive pour le logiciel libre, ses utilisateurs, et pour chaque personne qui utilise le Web. Cela fait un moment déjà que regarder une vidéo sur le Web peut s’avérer périlleux. La plupart d’entre elles sont publiées à l’aide de Flash qui est un logiciel non-standard et propriétaire. Les alternatives libres comme GNU Gnash sont disponibles, mais l’expérience utilisateur n’est pas toujours à la hauteur.

Quand le travail a commencé sur la nouvelle version du standard HTML, HTML5, le travail sur la diffusion et la lecture des vidéos était une priorité. Mais, bien que tout le monde était d’accord sur ce à quoi la balise <video> devait ressembler, il n’y avait pas de consensus sur le format d’encodage des vidéos. Microsoft et Apple soutenaient H.264, Mozilla et Opera soutenaient WebM et Ogg Theora. Jusque là, Google supportait tous ces codecs, mais aujourd’hui il a fait preuve d’audace en décidant de supporter les standards libres et ouverts et de laisser tomber H.264.

Ceci est une bonne nouvelle, car si H.264 devenait le standard de fait pour la vidéo sur le Web, cela ne serait pas mieux que la situation actuelle. H.264 est un codec lourdement breveté ; le consortium MPEG LA oblige les développeurs qui l’implémentent à accepter une licence de brevet. Cette licence est fondamentalement incompatible avec les logiciels libres. Elle exige des développeurs qu’ils restreignent l’utilisation qui sera faite de leur logiciel, et permet la collecte d’une redevance dans la plupart des situations.

Afin de s’assurer que le Web reste libre et ouvert pour tous, nous avons besoin qu’un codec libre s’impose comme standard de fait pour HTML5. WebM peut être ce codec : Google fournit avec le standard une licence de brevet qui est compatible avec les licences des logiciels libres et propose même une implémentation libre. Ils promeuvent également avec force ce codec, et leur décision de laisser tomber H.264 est une étape de plus dans cette direction.

Des réactions au geste de Google ont suggéré que cela représentait un pas en arrière pour les standards sur le Web, car H.264 est supporté par un plus grand nombre de matériels et de logiciels. Ces commentaires révèlent une incompréhension fondamentale de la vision d’un Web libre et ouvert. Nous ne pouvons être libres que si nous rejetons les formats de données qui sont assujettis à brevets.

Mais la question n’est pas encore règlée. C’est le moment pour tout le monde d’agir et de faire en sorte que WebM soit effectivement adopté par le plus grand nombre À cette fin, nous avons décidé de soutenir le projet WebM et nous encourageons les autres fondations et organisations à nous rejoindre — écrivez à webmaster AT webmproject.org pour connaître la marche à suivre. Aujourd’hui, nous exhortons également les gestionnaires de sites web à distribuer les vidéos dans le format WebM et à abandonner le H.264.

Bientôt, nous allons transformer notre campagne PlayOgg en PlayFreedom et nous allons mettre l’accent sur les moyens permettant à chacun d’encourager l’adoption de WebM. Vous pouvez vous inscrire dès maintenant pour en savoir plus sur la manière d’aider. Ensemble, nous pouvons veiller à ce que le Web remplisse sa promesse d’être libre pour tout le monde.

Notes

[1] Crédit photo : Dawn (Creative Commons By)




Mozilla, le H264 ne doit pas passer par toi !

CBS Fan - CC by-saOn l’a évoqué longuement dans un précédent billet, l’avenir de la vidéo en lecture continue sur le Web est à un tournant de son histoire. Mais plus encore que le logiciel libre, il est fort difficile de sensibiliser le grand public sur ce sujet il est vrai technique et complexe.

L’évènement qui redistribue les cartes est le passage progressif de tous les navigateurs à la nouvelle version 5 du HTML permettant de lire directement une vidéo. C’est une bonne nouvelle parce que nous allons enfin pouvoir nous affranchir du format Flash qui était fermé et nécessitait l’installation d’un plugin propriétaire dédié (et mal supporté sur des OS libres comme GNU/Linux).

Mais si le HTML5 autorise donc les navigateurs à lire directement une vidéo, elle ne dit rien sur le format (ou le codec) dans lequel doit être publiée cette vidéo. Or aujourd’hui deux formats bien différents font acte de candidature : le format Ogg Theora et le format H.264.

Le premier problème c’est que si le Ogg Theora est libre (et gratuit), le H.264 est breveté et demande plusieurs millions par an aux navigateurs qui voudraient l’inclure et le supporter[1].

Le second problème c’est qu’à l’heure actuelle la balance penche nettement en faveur du H.264 qui, avec la future version 9 d’Internet Explorer sera lu par tous les navigateurs sauf Mozilla et Opera.

Il y a alors un double risque. Celui de quitter un format breveté (Flash) pour un autre format breveté (H.264) et celui d’ostraciser les navigateurs Opera et surtout Firefox (qui a déjà fort à faire actuellement avec la concurrence inavouée mais bien réelle de Chrome).

La pression est alors clairement sur les épaules de Mozilla. La fondation va-t-elle persister à refuser le H.264 pour des raisons économiques mais surtout éthiques, en devenant en quelque sorte le porte-drapeau de l’Ogg Theora ? Ou bien va-t-elle abdiquer pour ne pas voir ses parts de marché grignoter par d’autres navigateurs, et c’en sera alors fini des espoirs suscités par le Ogg Theora ?

On sait que l’on peut compter sur Wikimedia (qui a ouvert tout récemment le très opportun site Let’s get video on Wikipedia). Mais qu’adviendra-t-il de Google qui a pour le moment adopté le H.264 pour YouTube alors que la firme peut potentiellement mettre tout le monde d’accord en proposant un troisième format issu d’une récente acquisition ?

Dans l’article traduit ci-dessous, le journaliste Thom Holwerda ne cache pas sa préférence : il souhaite voir Mozilla résister. Mais il nous rappelle fort justement que la décision est également suspendue au choix du format des utilisateurs et développeurs Web lorsqu’ils mettront en ligne leurs futures vidéos.

Au nom du « pragmatisme », certains voudraient privilégier le H.264 ? N’oublions pas que pour les mêmes raisons nous nous enchainâmes à Internet Explorer 6 qui fit stagner pendant de longues années le Web tout entier.

Mozilla : reste fidèle à tes idéaux, tiens-toi à l’écart de H264

Mozilla: Stick to Your Ideals, Shun H264

Thom Holwerda – 19 mars 2010 – OSNews.com
(Traduction Framalang : Antistress, Goofy et Quentin)

A présent que les caractéristiques d’Internet Explorer 9 ont été rendues publiques, nous connaissons mieux la position de Microsoft quant au codec vidéo à associer à la balise video de HTML5. Microsoft a choisi H264, un codec qu’il fournit déjà avec Windows de toute façon. Cela signifie que, Firefox et Opera mis à part, tous les principaux navigateurs prendront en charge le H264. D’aucuns y voient une raison pour que Mozilla abandonne ses idéaux et ajoute le support de H264. Je dis : Mozilla, reste fidèle à tes idéaux. Les dernières personnes à écouter en cette matière sont les développeurs Web.

« Mozilla devrait souscrire une licence d’utilisation de H264 »

Nous connaissons tous la situation de la vidéo via HTML5. Nous avons cette solution merveilleuse – une balise pour la vidéo aussi simple que pour les images – qui permet à chacun d’intégrer facilement des séquences vidéo sur son site Web sans avoir à recourir à la technologie propriétaire Flash. Il y a toutefois un problème.

Le problème est qu’il n’y a pas de codec standard pour HTML5. Les principaux compétiteurs sont H264 et Theora et il semble que ce dernier l’emporte pour le moment du côté des navigateurs. Une vidéo encodée avec Theora peut être vue à la fois des utilisateurs de Firefox, Chrome et Opera alors qu’avec H264 il vous manque les utilisateurs de Firefox et Opera. Si l’on considère que Firefox est, de loin, le plus répandu des navigateurs implémentant HTML5, encoder votre vidéo exclusivement en H264 revient à vous tirer une balle dans le pied.

Il y a une raison simple qui explique que Mozilla soit vent debout contre H264 : le codec est criblé de brevets. Cela signifie que, si vous utilisez le codec dans certaines parties du monde, vous vous exposez à devoir verser une redevance à la MPEG-LA qui gère les brevets de H264 (entre autres). Et, en effet, la MPEG-LA a clairement indiqué fin janvier que les utilisateurs finaux pouvaient eux aussi être la cible de contentieux relatifs aux brevets.

« J’aimerais aussi préciser que, bien que nos licences ne soient pas souscrites par les utilisateurs finaux, toute personne de la chaîne d’utilisation est responsable si un produit est utilisé sans licence » explique Allen Harkness, en charge des licences pour la MPEG-LA. « En conséquence, la redevance acquittée par le fournisseur d’un produit couvre l’utilisateur final, mais, lorsque la redevance n’a pas été acquittée, le produit est utilisé sans autorisation et toute personne de la chaîne (fournisseur ou utilisateur) peut en être tenue pour responsable ».

Étant donné que H264 est clairement incompatible avec les idéaux du logiciel libre, Mozilla a décidé de s’y opposer farouchement. Le refus d’Opera de souscrire une licence pour H264 n’a, de toute évidence, rien à voir avec un quelconque idéal (Opera étant un logiciel propriétaire après tout) mais la société norvégienne considère que le montant de la redevance est simplement trop élevé.

Apple pousse depuis longtemps H264 dans l’ensemble de ses logiciels et produits tandis que, du point de vue de Google, la redevance à acquitter pour avoir le droit d’utiliser H264 représente des clopinettes. Le dernier grand acteur à ne pas s’être prononcé était Microsoft qui, comme on pouvait s’y attendre, vient de choisir H264 simplement parce que la licence et le codec sont déjà inclus dans Windows. Le fait que des processeurs spécialisés dans le décodage de H264 soient disponibles sur les appareils portables constitue un autre atout tandis que Theora (ainsi que tout autre codec libre de brevet comme Dirac) ne peut se permettre ce luxe.

Du coup, des développeurs Web et autres pontes commencent à soutenir que Mozilla devrait rentrer dans le rang et souscrire une licence pour H264 sinon ils risquent de tuer la vidéo via HTML5. « J’ai des raisons de croire que la décision de Mozilla de ne pas prendre en charge les vidéos encodées en H264 dans la balise video de HTML5 à cause des nombreux brevets de ce codec est une mauvaise décision qui, à moins qu’ils ne changent d’avis, détruira tout espoir d’inaugurer une nouvelle ère où la vidéo serait accessible en ligne sans plugin » écrit Brian Crescimanno, un développeur Web qui est dans le métier depuis 1997.

Il explique qu’en campant sur ses positions, Mozilla va obliger les gens à continuer à utiliser Flash pour la vidéo vu que personne ne va encoder la vidéo deux fois uniquement pour qu’elle soit lue aussi par Firefox et Opera ; ils vont juste proposer aux utilisateurs de Firefox et Opera la vidéo encodée en H264 via Flash au lieu de ré-encoder la vidéo en Theora. Il fait remarquer également que Mozilla prenait en charge le format GIF du temps où il était propriétaire.

« Je conteste l’idée que être idéaliste soit votre raison d’être », écrit Crescimanno. « Je crois que votre responsabilité première en tant qu’éditeur d’un navigateur Web est de rendre le Web meilleur. C’est certainement ce que vous pensez sincèrement faire mais honnêtement, soyons réaliste, la seule chose que vous allez réussir c’est rendre la balise video de HTML5 inutilisable ».

Le billet de Crescimanno a été repris par John Gruber qui, rien de surprenant, abonde dans son sens : « par conséquent même ceux qui utilisent la dernière version de Firefox seront traités comme s’ils utilisaient un navigateur antique » explique Gruber. « L’intransigeance au nom de l’ouverture aura pour résultat que les utilisateurs de Firefox se verront proposer de la vidéo au moyen du plugin fermé Flash tandis qu’en coulisses la vidéo sera de toutes façons encodée en H264 ».

Gruber et Crescimanno soutiennent en fait que Mozilla devrait laisser son idéal de côté et se montrer pragmatique en implémentant le H264.

Au nom du pragmatisme

Petit retour en arrière. Il y dix ans de cela, le Web n’était pas encore la formidable source d’informations et de divertissements que nous connaissons aujourd’hui, il était à peine en train d’émerger. C’est ce moment qu’ont choisi les développeurs Web pour prendre au nom du « pragmatisme » une série de décisions d’une stupidité monumentale, décisions dont nous payons encore le prix une décennie plus tard.

Quand les développeurs Web se sont retrouvés face aux gigantesques parts de marché d’Internet Explorer 6, ils ne sont soucié de rien d’autre que de rendre les sites visibles pour cette triste version du navigateur, en faisant fi des standards au nom du « pragmatisme ». À cause de cette attitude, les autres navigateurs ont éprouvé les pires difficultés à concurrencer IE6, simplement parce que leurs utilisateurs ne pouvaient consulter leurs sites préférés optimisés pour IE6.

Dix ans plus tard, nous en voulons encore à Microsoft pour son Internet Explorer 6 qui aura rendu le Web dépendant à son égard (le nombre de sites spécifiques à IE est aujourd’hui devenu très faible mais pas nul) alors que la véritable raison pour laquelle IE est devenu si dominant et difficile à renverser est que les développeurs ne se sont pas donnés la peine de penser au delà du « pragmatisme » et de coder pour autre chose qu’IE.

Puis il y a eu Flash. Est-ce Microsoft qui nous a imposé Flash ? Est-ce Adobe qui nous a mis un revolver sur la tempe pour nous forcer à télécharger le plugin ? Non. Là encore ce sont les développeurs Web qui l’ont déployé partout sur le Web au nom du pragmatisme. Nous, les utilisateurs, ne décidons pas de télécharger Flash : nous y sommes forcés parce que les développeurs Web utilisent Flash pour tout et n’importe quoi, depuis les boutons jusqu’au lettres capitales illustrées.

Dix ans plus tard, Flash est devenu lui aussi un boulet qui entrave le Web. Les plateformes minoritaires comme Linux et Mac OS X n’ont pas suffisamment d’importance aux yeux d’Adobe pour l’inciter à développer correctement Flash dessus, sans parler de plateformes plus confidentielles encore, comme Syllable ou Haiku, qui n’ont pas du tout accès à Flash, rendant ainsi des sites aussi populaires que YouTube complètement inutilisables.

Qui allons-nous blâmer cette fois ? Je vois des développeurs Web et des blogueurs de renom comme Gruber s’en prendre à Adobe alors qu’en réalité ce sont les développeurs Web qui ont choisi Flash et l’ont rendu omniprésent sur le Web.

Et nous voilà à nouveau devant un problème similaire. Nous avons le choix pour le codec vidéo de HTML5 : l’un est libre, gratuit et n’est pas soumis à brevet, l’autre est breveté jusqu’à l’os et est tout sauf libre ou gratuit. Il y beaucoup de discussions pour savoir lequel des deux est de meilleure qualité, et vous trouverez des gens intelligents détaillant tests et arguments en faveur de l’un ou l’autre des deux codecs. Le seul avantage du H264 est, de toute évidence, le support matériel.

Et tandis que nous nous tenons à la croisée des chemins, ce sont encore les développeurs Web qui veulent faire le mauvais choix simplement parce qu’ils sont incapables de voir plus loin que le bout de leur nez. Ils se fichent de savoir à quoi ressemblera le Web dans dix ou même seulement cinq ans (quand la période d’essai gratuite sur le Web de H264 aura expiré), ils ne sont intéressés que par le présent. Ils ont fait des choix plus désastreux les uns que les autres, des choix qui ont gravement nuit au Web, et, pourtant, il faudrait que nous les écoutions encore ?

Cher Mozilla, contemple l’histoire du Web et vois l’impact désastreux d’Internet Explorer et de Flash. Regarde bien ensuite qui a fait en sorte que ces technologies nous soient imposées. Alors, et seulement alors, prends en compte à leur juste valeur leur opinion sur cette question.

A défaut, je prédis de quoi nous discuterons dans cinq ou dix ans : les développeurs Web et les pontes comme Gruber se lamenteront en se demandant comment le Web a pu embrasser sans restriction H264 à présent que la MPEG-LA a décidé de faire respecter ses brevets. Ils trouveront quelqu’un à blâmer : Microsoft, Adobe ou la lune, et, encore une fois, ils refuseront d’assumer leurs responsabilités.

L’heure du bain

Parfois il faut se jeter à l’eau. Bien sûr la transition vers un codec libre et gratuit sera difficile, mais les bénéfices escomptés le justifient amplement. Je préfère avoir affaire à une situation compliquée maintenant plutôt que de devoir faire face dans cinq ou dix ans à une situation aussi inextricable que celle engendrée par IE6 et Flash.

Notes

[1] Crédit photo : CBS Fan (Creative Commons By-Sa)




Bilan de deux années d’actions pour « Dégoogliser les assos » 🦆🦆

En lançant en octobre 2022 la campagne COllectivisons INternet / COnvivialisons INternet (coin coin pour les intimes), nous annoncions notre ambition de poursuivre le mouvement émancipateur lancé par Dégooglisons Internet et approfondi par Contributopia, sans limiter nos actions aux « petits gestes individuels de dégooglisation ». Notre objectif : fournir des outils numériques aux associations et collectifs qui œuvrent pour le bien commun et le bien des Communs.

Un peu plus de deux ans après le lancement de cette feuille de route, il est temps pour nous de vous présenter le bilan des 4 projets la constituant.

🎈 Framasoft a 20 ans🎈 : Contribuez pour financer une 21e année !

Grâce à vos dons (défiscalisables à 66 %), l’association Framasoft agit depuis 20 ans pour faire avancer le Web éthique et convivial. Retrouvez un focus sur certaines de nos actions en 2024 sur le site Soutenir Framasoft.

➡️ Lire la série d’articles de cette campagne (nov. – déc. 2024)

Emancip’Asso, favoriser l’émancipation numérique du monde associatif

Bannière Emancip'Asso : "les géants du numérique, c'est pas automatique !"

Première étape : accompagner la montée en compétences des fournisseurs de services numériques éthiques

Ayant constaté que les fournisseurs de services numériques éthiques étaient peu nombreux à proposer des solutions prenant réellement en compte les besoins des associations, notamment l’accompagnement nécessaire pour mener à bien une démarche de transition vers des outils numériques libres, nous avons souhaité accompagner la montée en compétences de ces acteurices à travers deux dispositifs : une formation et un cours en ligne (MOOC).

Nous avons publié le bilan complet de ces dispositifs sur le Framablog fin 2023. Rappelons tout de même que 20 personnes se sont retrouvées à Paris en janvier 2023 pour participer à la formation « Développer une offre de services pour accompagner les associations dans leur transition numérique éthique » et que courant 2023, cette formation a été transposée en cours en ligne sur la plateforme https://mooc.chatons.org/.

screenshot de la page d'accueil du MOOC Emancip'Assp

C’est bien évidemment à son lancement il y a un an que la fréquentation du MOOC a été la plus importante : plus de 2000 consultations des leçons en décembre 2023 (dont 1253 provenant d’apprenant⋅es identifié⋅es) et 1150 en janvier 2024. À compter de février, on note une consultation bien plus faible, mais régulière des leçons à hauteur de 120 consultées en moyenne chaque mois. Sachant qu’il est possible de suivre le MOOC de manière anonyme, il n’est pas aisé de déterminer le nombre réel d’apprenant⋅es, mais on comptabilise 91 comptes créés qui ont suivi tout ou partie du MOOC.

Seconde étape : un site web pour que les associations trouvent qui peut les accompagner dans leur émancipation numérique

Si le site emancipasso.org a été réalisé au cours de l’année 2023, c’est en mars 2024 que nous avons communiqué spécifiquement à son sujet auprès des associations. La campagne de communication « Associations : les géants du numérique, c’est pas automatique ! » s’est articulée autour d’articles de blog (l’un présentant le projet, les autres documentant la démarche de plusieurs associations en cours de transition), de publications sur les réseaux sociaux (#EmancipAsso) pour visibiliser les prestataires du répertoire et célébrer les associations qui ont mis en cohérence leurs outils et leurs valeurs, d’un webinaire de présentation et d’une campagne d’emailing auprès des organisations de l’ESS.

S’il est difficile d’évaluer si cette campagne a permis aux associations de prendre conscience de l’incohérence qu’il y a à vouloir changer le monde en utilisant les outils du capitalisme, on peut se féliciter que la communauté Emancip’Asso, espace d’entraide pour échanger bonnes pratiques, conseils et astuces, ait progressivement été rejointe par des associations et des acteurices de l’écosystème du numérique émancipateur. On comptabilise à ce jour 145 comptes, dont quasiment la moitié (48,3 %) y ont contribué. Au total, la communauté a accueilli 105 échanges, lesquels représentent au total 360 messages. Ces échanges sont principalement initiés par des membres d’associations pour exprimer des besoins techniques ou stratégiques. La communauté (prestataires et/ou autres associations) y répond rapidement (délai de moins de 3 jours en général) et on estime que le niveau de satisfaction est élevé. De plus, l’outil est un bon moyen pour les prestataires recensés dans le répertoire de valoriser leur savoir-faire.

screenshot du forum Emancip'Assp

On peut aussi se réjouir de voir de plus en plus de prestataires soumettre leur candidature pour intégrer le répertoire. En l’espace d’un an, leur nombre a doublé : ils étaient 25 en décembre 2023, 33 au lancement de la campagne de communication en mars et 52 désormais.

Enfin, afin de faire connaître Emancip’Asso au plus grand nombre, nous l’avons présenté à plusieurs reprises en 2024 :

  • le 31 janvier au Forum national de l’ESS (Niort)
  • le 25 avril lors d’un webinaire pour le réseau Numéris’Asso
  • le 26 mai aux Journées du Logiciel Libre (Lyon)
  • le 10 juin aux Rencontres Professionnelles du logiciel libre (Lyon)
  • le 26 septembre lors d’un webinaire pour la communauté de la Fondation Crédit Coopératif
  • le 13 novembre au Forum National des Associations et fondations (Paris)
  • le 23 novembre au Campus du Libre (Lyon)
  • le 10 décembre lors d’un mardi de l’ESS (Lyon) sur Les Communs numériques, leviers de la transformation sociale

Perspectives

Emancip’Asso n’en est qu’à ses débuts et a vocation à durer dans le temps, pour convaincre toujours plus d’associations de mettre en cohérence leurs outils numériques avec leurs valeurs.

Nous allons continuer à faire connaître le site emancipasso.org en :

  • communiquant régulièrement sur les prestataires recensés dans le répertoire ;
  • présentant les ressources qui y sont répertoriées ;
  • animant la communauté Emancip’Asso ;
  • développant les partenariats avec les fédérations d’associations ;
  • développant notre présence lors des événements nationaux du secteur associatif ;
  • animant webinaires de présentation, ateliers ou conférences.

Et nous comptons sur le bouche-à-oreille pour que ce site devienne une ressource incontournable pour toutes les associations : n’hésitez pas à présenter cet outil à vos associations préférées !

Si vous le souhaitez, vous pouvez nous donner les moyens de continuer à faire découvrir Emancip’Asso auprès des nombreuses associations qui utilisent encore les outils des géants du web.

Soutenir Emancip’Asso (et Framasoft)

 

Peer.Tube, mettre en valeur le PeerTube pour lequel nous œuvrons

PeerTube pouvant être utilisé par toutes et n’importe qui, on peut parfois trouver tout et n’importe quoi dans cet univers de vidéos, dont des contenus qui ne nous correspondent pas du tout. Ce n’est pas notre rôle de les interdire, mais cela peut être notre rôle de promouvoir des vidéos sur PeerTube qui nous rendent fièr·es de tout ce travail que nous fournissons depuis plus de 7 ans sur ce logiciel.

Notre idée était donc de créer sur le site peer.tube une vitrine de vidéos PeerTube qui nous enthousiasment. En réalisant ce travail de curation, via la sélection de contenus de qualité, nous aurions ainsi pour répondre à celles et ceux qui nous demandent comment trouver des vidéos intéressantes sur PeerTube : essaye sur peer.tube !

Nous avions prévu 4 axes de développement sur ce projet :

  • se fédérer avec des instances et chaînes au contenu original,
  • partager nos choix de fédération pour que d’autres instances puissent les suivre,
  • permettre à des créatrices de contenus qui ne trouvent pas leur place sur d’autres instances de candidater pour avoir un compte sur peer.tube,
  • tenter de faire communauté avec les administratrices et administrateurs d’autres instances qui ont établi leur ligne éditoriale.

Si, en 2022, nous avions déjà commencé ce travail en proposant sur peer.tube une sélection de chaînes « qui valent le détour » et de quelques playlists en anglais et en français, nous n’avons au final pas trouvé l’énergie et la disponibilité d’avancer davantage dans ce projet.

screenshot de la page d'accueil de peer.tube

Pour autant, le besoin est, selon nous, toujours d’actualité. Nous avions d’ailleurs pensé que l’application PeerTube que nous venons de publier pourrait en partie y répondre. Mais c’était avant qu’on découvre que les magasins d’applications d’Apple (AppStore) et Google (PlayStore) n’étaient manifestement pas prêts à héberger un client pour (non pas une plateforme mais) un réseau de plateformes autonomes de partage de vidéos. Ainsi, pour pouvoir publier l’application PeerTube, nous avons dû présenter l’application mobile avec une « liste autorisée » de plateformes PeerTube répondant à leurs normes. Normes qui font que certains comptes et certaines chaînes que nous trouvons pertinents (et qui sont déjà dans notre sélection sur https://peer.tube/) en sont exclus.

Si le projet Peer.Tube n’a pas vu le jour sous la forme qu’on avait imaginée en 2022, on espère cependant qu’on pourra envisager sa transformation (ou sa relance) prochainement. En 2025, on aimerait continuer à mettre un peu d’énergie et de moyens pour davantage valoriser les contenus de qualité postés sur le réseau PeerTube. Cela pourrait être en prolongeant l’expérience de la newsletter de l’écosystème PeerTube envoyée en avril dernier… ou bien d’une toute autre façon…

Si vous pensez que c’est une bonne idée, n’hésitez pas à nous le faire savoir : quelques encouragements en commentaire et/ou votre soutien financier nous serons très précieux.

Soutenir la promotion de PeerTube (et Framasoft)

 

Framaspace, cloud convivial pour collectifs solidaires

Deux ans après l’annonce de Framaspace, un environnement de travail en ligne collaboratif pour outiller les associations et collectifs qui veulent changer le monde, 1627 organisations ont rejoint ce service gratuit basé sur le logiciel libre Nextcloud. C’est 125 de plus depuis la publication de l’article de blog du 26 novembre, ce qui nous conforte dans l’idée que ce service répond bien à un besoin.

Un environnement de travail collaboratif tout-en-un…

Entre la version beta lancée le 15 novembre 2022 et aujourd’hui, le service Framaspace a bénéficié de nombreuses améliorations via :

  • plusieurs mises-à-jour majeures de Nextcloud, le logiciel derrière Framaspace ;
  • le développement et l’ajout de 2 applications : Visites guidées et Transfert de propriété ;
  • l’ajout de 3 autres applications : Formulaires, Tableaux et Paheko.

Illustration - Dans l'espace, une licorne fait apparaitre des bulles de sa baguette magique. Dans les bulles, on trouve des symboles : un boulier, des fichiers, etc.
Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Framaspace, c’est aujourd’hui une suite logicielle qui intègre 13 outils :

📁 un espace de stockage / partage de documents (drive)

🗒️ une suite bureautique pour l’édition collaborative des fichiers

📷 une application pour créer des albums de photos ou des vidéos

💬 la possibilité d’échanger par conversation écrite ou en visioconférence avec les autres utilisateur⋅ices

👥 un carnet de contacts où en plus d’y enregistrer vos contacts personnels, vous pouvez créer des groupes pour les organiser et des équipes pour partager des données spécifiques

🗓️ une application pour créer des agendas, y ajouter vos événements et les partager

🗂️ un outil de gestion de projet de style kanban destiné à la planification personnelle et à l’organisation de projets en équipe

📣 un module d’annonces qui permet de publier des informations à destination de tous les utilisateur⋅ices de votre Framaspace

🔄 une application permettant aux associations qui ont rejoint Framaspace de coopérer entre elles autour de projets communautaires, en construisant des connaissances partagées via l’édition collaborative de contenus

📊 un outil pour créer des formulaires simples dont les résultats sont visibles directement ou transférés dans un fichier .csv ou un tableur

🧩 un outil de gestion de la vie associative (gestion des membres, gestion des activités et gestion comptable)

📝 une application pour gérer des listes de tâches et de les partager avec d’autres utilisateur⋅ices

🚀 un outil no code qui permet de créer des mini-applications (réservé à un public ayant une bonne maîtrise des outils numériques)

Et on ne compte pas s’arrêter là ! Même si nous proposons désormais une offre relativement complète. Avec l’installation de la version 30 de Nextcloud début 2025, de nouvelles fonctionnalités intéressantes vont être ajoutées. Pour la suite, nous envisageons de mettre en place une infrastructure plus performante pour augmenter les capacités de l’outil de visioconférence intégré à Framaspace pour que cette fonctionnalité soit accessible à davantage de participant⋅es.

De plus, nous évaluerons l’intégration de nouvelles applications, comme celle mettant à disposition un tableau blanc interactif et partagé, ou celle proposant des dossiers de groupes (qui reste pour l’instant un peu trop buguée à notre goût). Nous estimerons la pertinence d’intégrer la valorisation du bénévolat. Et nous verrons si nous avons les moyens humains et financiers d’ajouter la possibilité de créer et gérer votre site web associatif, directement depuis votre Framaspace.

Soutenir Framaspace (et Framasoft)

 

… adopté par des organisations œuvrant à la transformation sociale et environnementale

Grâce aux informations renseignées lors de chaque inscription, il nous est possible d’avoir une petite idée de qui sont les bénéficiaires de Framaspace. On constate ainsi que ce sont des structures plutôt récentes : 42% d’entre elles ont moins de 5 ans alors que 26% ont entre 5 et 15 ans et 32% plus de 15 ans. Elles sont même 10% à avoir été créées en 2024.

graphique en barre montrant en absysse le nombre de structures et en ordonnée les années de création

 

La majeure partie d’entre elles (70%) sont constituées en associations, mais 25% sont des collectifs informels et 5 % des syndicats.

Quant à leurs domaines d’intervention, elles sont 43% à indiquer qu’elles œuvrent dans l’éducation, 41% dans le social et 40% dans l’environnement.

Nous le constations déjà en 2022 et 2023 et cela se confirme en 2024 : nous avons réussi à cibler le public que nous souhaitions toucher : des associations (déclarées ou de fait) plutôt petites, avec de petits budgets dont les domaines d’intervention sont l’éducation, l’environnement, le social ou le culturel. Ce qui n’est pas étonnant quand on connaît le public de Framasoft !

Du côté des usages, 46% d’entre elles ont créé entre 1 et 4 comptes sur leur Framaspace, 20% entre 5 et 9 comptes, 10% entre 10 et 14 comptes et seulement 24% ont créé 15 comptes et plus. Rien d’étonnant à cela puisque Framaspace est réservé aux petites organisations.

Elles sont finalement assez peu nombreuses à être contraintes par la capacité de stockage maximum que nous avons fixée : 90% stockent sur leur Framaspace moins de 5 Go de données et seulement 2% d’entre elles ont dépassé les 20 Go de données alors qu’elles sont 8% à utiliser entre 5 et 20 Go.

Pour construire les fondations d’une communauté francophone d’utilisateur⋅ices de Nextcloud et favoriser l’entraide entre les utilisateur⋅ices de Framaspace, nous avons mis en place un forum. A ce jour, 388 comptes y ont été créés, ce qui est encore trop peu à notre goût au regard du nombre de structures utilisant Framaspace. En revanche, les échanges vont bon train puisque 1642 messages ont été postés au sein de 497 sujets différents.

En 2025, nous souhaitons mettre davantage d’énergie pour inciter les structures qui ne l’ont pas encore rejoint à le faire et pour animer et modérér les échanges qui s’y tiendront. Cela ne pourra évidemment se faire que si vous nous en donnez les moyens.

Soutenir les 1600 bénéficiaires de Framaspace (et Framasoft)

 

Et la suite ? promouvoir et faciliter l’adoption !

Le projet Framaspace n’en est qu’à ses débuts et, en 2025, nous espérons que davantage d’associations et collectifs pourront en bénéficier. Car si accueillir 1627 organisations est déjà un exploit technique, nous aimerions davantage permettre à ces structures de s’émanciper des outils des géants du web. Pour cela, nous souhaitons consacrer davantage de temps à la promotion de ce service.

Un autre objectif pour l’année à venir est de développer l’accompagnement aux usages de Framaspace. Mieux accompagner les utilisateur⋅ices, notamment celles et ceux qui découvrent Nextcloud, nous semble essentiel au regard de la complexité de l’outil. Nous allons nous lancer dans la réalisation du tutoriel interactif dont vous serez l’héroïne ou le héros et comptons produire plusieurs tutoriels sur des fonctionnalités avancées de NextCloud, en particulier sur les apps « Formulaires », « Tableaux » et « Paheko ».

Enfin, nous souhaitons inciter à la « collaboration politique » entre les espaces. Que cela soit en mettant en valeur les possibilités de « fédération » (c’est-à-dire la possibilité de lier et de partager des informations entre plusieurs espaces Framaspace ou Nextcloud), ou en proposant une « veille militante » partagée afin de faciliter les mobilisations (ce qui nous semble particulièrement essentiel en ce moment).

À la louche, on estime que le service Framaspace nous a coûté 30 000 € en 2024 : la moitié de cette somme a servi à louer des serveurs, l’autre à rémunérer les équipes techniques. Mais si en 2025, comme nous le souhaitons, nous consacrons davantage de temps à promouvoir Framaspace, développer l’accompagnement à sa prise en main et inciter à la collaboration entre utilisateur⋅ices, ces coûts vont forcément augmenter.

Nous pensons sincèrement qu’un service réalisé par une association pour des associations a du sens. Si vous le pensez aussi, que vous bénéficiez ou non d’un Framaspace, nous avons donc besoin de votre soutien, dès maintenant, afin de nous « aider à aider » ces structures non seulement à quitter les GAFAM et à mettre leurs outils en cohérence avec leurs valeurs, mais aussi et surtout à mieux agir, à mieux coopérer, à mieux créer du lien. À mieux faire société, ensemble.

Soutenir l’avenir de Framaspace (et Framasoft)

 

ECHO Network, comprendre les besoins de l’éducation populaire hors de nos frontières

Ethical, Commons, Humans, Open-Source Network (Réseau autour de l’Éthique, les Communs, les Humaines et l’Open-source) est un projet et un réseau de 7 structures associatives d’éducation populaire provenant de 5 pays européens (Céméa Federzione Italia, Céméa Belgique, Willi Eichler Academy, Solidar Foundation, Centar Za Mirovne Studije et Framasoft) mené par l’association d’éducation populaire des Céméa France.

logo du projet Echo Network

Si ces organisations ont en commun d’accompagner les citoyen⋅nes dans leur autonomie et leur émancipation, elles s’interrogeaient sur comment accompagner leurs publics à s’émanciper des services des géants du web. Le projet s’est donc donné comme objectif de promouvoir la citoyenneté numérique en outillant les organisations de jeunesse et plus largement les associations, à analyser et comprendre les effets du numérique sur nos vies, nos organisations et nos relations, en tenant compte des droits des personnes ; et en proposant des alternatives numériques éthiques, respectueuses de l’environnement et des droits humains.

5 temps forts en 2023

En 2023, les partenaires du projet se sont rencontrés, ont échangé des pratiques et expérimentés des méthodes d’animation lors de 5 temps forts. Un séminaire d’ouverture s’est tenu en janvier 2023 à Paris et a été suivi de 4 visites d’études dans chacun des pays pour échanger sur les usages numériques spécifiques à leurs pays, leur culture, leur langue. Si ces rencontres ont permis une meilleure compréhension du contexte de chacun·e, elles ont surtout favorisé l’acquisition de connaissances et de compétences.

Le séminaire d’ouverture co-organisé par les Ceméa France et Framasoft a rassemblé à Paris une trentaine de participant·es représentant les partenaires du projet ECHO Network et plus de vingt personnes des réseaux de l’éducation nouvelle, de la médiation numérique, des communs et du libre. Pendant 3 jours, les participant⋅es ont pu faire connaissance et échanger sur les notions d’Éthique, de Communs, d’Humanisation et d’Ouverture dans le numérique.

lire le CR complet sur le Framablog

La première visite d’étude s’est tenue à Berlin du 27 au 31 mars 2023. Organisée par la Willi Eichler Akademy sur la thématique « jeunes, réseaux sociaux et éducation politique », elle a permis aux participant⋅es de questionner leurs usages des réseaux sociaux (comment partager nos messages en restant cohérent⋅es avec ce que l’on défend) et de mieux comprendre comment les jeunes générations les appréhendaient.

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Du 12 au 17 juin 2023, c’est sous le soleil de Bruxelles que s’est tenue la deuxième visite d’étude sur la thématique « pratiques d’éducation active pour sensibiliser aux outils éthiques ». Les participant⋅es ont pu expérimenter de nombreux formats d’animation pour partager leurs connaissances en matière de numérique éthique, mais aussi rencontrer les différentes organisations locales ou se former à la captation vidéo ou à la diffusion radio.

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La troisième visite d’étude s’est déroulée à Rome du 27 au 29 septembre 2023. Organisée par la fédération italienne des CEMEA autour de la thématique « Entre présentiel et distanciel, quelle utilisation du numérique ? », elle s’est articulée autour de rencontres avec plusieurs associations italiennes, dont les formateur·ices ont témoigné de leur utilisation des outils numériques en formation, d’ateliers de réflexion et de production sur les enjeux du numérique dans les formations et les contenus pédagogiques et la rencontre avec une chercheuse de l’Université de Rome Tre autour des enjeux de l’Intelligence Artificielle.

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Le consortium du projet ECHO Network s’est retrouvé pour la dernière visite d’étude du projet, à Zagreb du 5 au 7 décembre 2023 au Center for Peace Studies, organisation croate de défense des droits humains. Les participant·es ont pu rencontrer différentes organisations croates utilisant le numérique dans leurs activités, échanger sur la question des Droits Humains et de l’IA, sur le rôle d’Internet dans les mouvements anti-guerre en Croatie dans les années 90 et de la cyber-surveillance.

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2024 : production et valorisation

Après ces 4 visites d’études, le projet ECHO Network était consacré en 2024 à la production de ressources qui pourraient servir à d’autres associations en Europe. Lors d’un échange en mars, nous nous sommes mis d’accord sur la forme que prendrait nos réalisations et comment se répartir le travail. Framasoft a pris en charge la réalisation d’un site web pour présenter l’ensemble de ces productions.

screenshot de la page d'accueil du site https://echo-network.eu/

Vous pouvez ainsi trouver sur le site https://echo-network.eu :

  • une cartographie des structures œuvrant pour un numérique éthique à travers la formation, la construction d’outils et/ou la proposition de services
  • un référentiel de ressources et outils disponibles dans le réseau des partenaires en lien avec la promotion de la citoyenneté numérique
  • des démarches d’animation à destination des éducateur·ices et des jeunes pour analyser et comprendre
  • un guide de survie numérique pour les représentant⋅es d’associations qui souhaitent engager une transition numérique en lien avec leurs valeurs associatives
  • un plaidoyer pour une transition numérique éthique et durable

Les partenaires du projet ECHO Network se sont retrouvés une dernière fois à Bruxelles du 4 au 6 novembre 2024 pour finaliser le bilan du projet et le présenter lors d’un événement organisé par Solidar au Comité économique et social européen, un organe consultatif de l’Union Européenne. Cet événement a permis de réunir les acteurs de l’éducation et de la formation et les décideurs politiques européens lors d’une table ronde politique sur le thème de la transition numérique éthique et durable.

photo d'un temps lors de la table-ronde organisée au Comité économique et social européen
Présentation du projet au Comité économique et social européen

 

Tout au long de ce projet, nous avons pu découvrir les différences de fonctionnement, d’actions et de culture de nos structures respectives. Les activités de Framasoft sont évidemment assez différentes des méthodes d’animation des Ceméa ou des actions de plaidoyer de Solidar. De plus, nous n’avons pas pour habitude de faire des rencontres dans toute l’Europe (qui restent assez chronophages en particulier lorsqu’on évite le transport aérien), notre fonctionnement plus dynamique préfère les échanges asynchrones et à distance. Pour autant, ces rencontres nous ont permis de découvrir nos points communs et nos discours partagés, et nous nous réjouissons d’avoir apporté notre regard aux enjeux du numérique qui ont pu être discutés.

Nous espérons que les contenus présents sur ce site aideront les membres de la société civile au niveau européen à la recherche de ressources autour du numérique éthique, et nous nous efforcerons d’y référer et de diffuser ses contenus sous licence libre, en particulier au sein de notre réseau non-francophone.

Soutenir la participation de Framasoft à ECHO Network

Vous reprendrez bien un peu de numérique émancipateur pour Noël ?

Au regard de ce long bilan, et même si nous n’avons pas mené tous ces projets dans leur intégralité, nous estimons avoir atteint l’objectif que nous nous étions fixé, à savoir fournir des outils numériques aux associations et collectifs qui œuvrent pour le bien commun et le bien des Communs. Et on est sacrément fier⋅es de ce que nous avons accompli ces deux dernières années, dans un contexte mouvementé.

Pour autant, nous n’allons pas nous arrêter en si bon chemin ! Il reste encore beaucoup à faire pour que toutes les structures qui veulent changer le monde mettent en cohérence leurs outils numériques et leurs valeurs. D’ailleurs, on compte sur vous pour leur faire découvrir tout ce que nous avons mis en place ces deux dernières années. Et pour vous aider, on vous a concocté une petite vidéo qui présente en 13 min chrono l’offre de Framasoft à destination des associations.



En cette veille de Noël, et même si nous ne sommes pas hyper fans des fêtes religieuses et consuméristes, on se dit que vous nous feriez un chouette cadeau en participant à rendre virale cette vidéo ! Alors, n’hésitez pas à la partager auprès de votre famille, votre cercle amical, vos collègues et bien évidemment auprès de vos communautés.

Soutenir les actions qui dégooglisent les associations (et Framasoft)

 

Le défi : 20 000 fois 20 € de dons pour les 20 ans de Framasoft !

Framasoft est financée par vos dons ! Chaque tranche de 20 euros de dons sera un nouveau ballon pour célébrer 20 d’aventures et nous aider à continuer et décoller une 21e année.

Framasoft, c’est un modèle solidaire :

  • 8000 donatrices en 2023 ;
  • plus de 2 millions de bénéficiaires chaque mois ;
  • votre don (défiscalisable à 66 %) peut bénéficier à 249 autres personnes.

Jauge de dons de Framasoft au 24 décembre 2024, à 201 425 €

À ce jour, nous avons collecté 201 425 € sur notre objectif de campagne. Il nous reste 7 jours pour convaincre les copaines et récolter de quoi faire décoller Framasoft.

Alors : défi relevé ?

🎈 Je soutiens la 21e année de Framasoft 🎈




Alternatiba poursuit sa sortie des logiciels propriétaires et adopte un outil de base de données no-code et libre

Le mouvement citoyen pour le climat et la justice sociale nous parle de sa vision des outils numériques et comment il entreprend de sortir concrètement des logiciels privateurs. Partage d’expérience dans la mise en place d’un outil de base de données no-code.

Bonjour Adrien et Gauthier ! Pouvez-vous vous présenter ?

Salut, ici Gauthier, profil type de l’ingénieur qui aurait pu travailler dans la voie toute tracée de l’industrie mais qui se posait trop de questions pour ça. Après une escapade dans l’éducation nationale, je suis devenu militant à plein temps à Alternatiba / ANV-COP21 Grenoble, puis je me suis impliqué de plus en plus dans l’équipe informatique globale jusqu’à devenir salarié du mouvement en 2021. Je suis aussi impliqué dans plein d’assos militantes ou dans le domaine de l’animation, et je traîne dans le monde du numérique libre depuis quelques années ! Aujourd’hui, je dirais que je suis un geek (barbu, lunettes et tout 🤓) qui comprend à peu près ce que disent les machines (encore que…), mais qui préfère surtout parler aux humains (c’est ça qui est intéressant !).

 

Salut ! Moi, c’est Adrien ! J’ai 35 ans. Dans une autre vie, j’ai fait des études de maths pour l’information et une thèse en cryptographie quantique. J’ai quitté le monde de la recherche après mon doctorat et j’ai travaillé pour différentes ESN. J’ai notamment fait une mission de 3 ans en tant qu’ingénieur de recherche en analyse de données pour Michelin. J’ai démissionné durant l’été 2021 pour me consacrer entièrement à des engagements associatifs, notamment à Alternatiba et ANV-COP21 à Clermont-Ferrand, mais également dans un atelier bois partagé ou pour la monnaie locale du Puy-de-Dôme. J’ai rejoint Gauthier à la commission informatique d’Alternatiba en décembre 2022.

 

Le mouvement Alternatiba est déjà relativement médiatisé et connu, mais sans doute pas de tout le monde. Alors, c’est quoi Alternatiba ? Et quel est votre rôle ?

Alternatiba et Action Non-Violente COP21 (ANV-COP21) sont les deux « jambes » d’un même mouvement citoyen pour le climat et la justice sociale. Né au Pays Basque en 2013, ce mouvement forme aujourd’hui un réseau de 115 groupes locaux implantés sur les territoires et vise à relever le défi climatique en contribuant à faire émerger un mouvement de masse, à la fois radical, populaire, non-violent et déterminé. Alternatiba promeut les alternatives et fait de la mobilisation citoyenne (organisation de marches climat, de villages des alternatives, d’actions de plaidoyer, etc.) En parallèle la « jambe » ANV-COP21 s’oppose et résiste face aux projets climaticides par l’organisation d’actions de désobéissance civile non violente.

Ces deux « jambes » nous permettent de faire passer les citoyen⋅nes à l’action autour du slogan « Changeons le système, pas le climat ! »

Pour animer ce réseau de 115 groupes locaux, une équipe d’animation a pour rôle de faciliter le lien entre tous ces groupes et de créer des dynamiques, sur des thèmes ou des campagnes ou projets communs. Cette équipe, composée de bénévoles et d’une quinzaine de membres permanent⋅es salarié·es, est répartie en différentes commissions (animation du réseau, communication externe, collecte, finances, etc.). Pour notre part, nous sommes les deux coordinateurs de la commission informatique. Nous mettons en place et maintenons les outils numériques utilisés par l’équipe globale et nous sommes force de proposition pour transposer les valeurs du mouvement à nos pratiques numériques !

 

Groupe de personnes, assises en demi-cercle, participant à une formation/animation par Alternatiba.
Formation lors du Camp Climat Militant Nord 2022

 

Comment définiriez-vous le rapport entre votre mouvement et « le numérique » en général ?

Les groupes locaux du réseau sont tous autonomes et ont chacun leur propre style côté numérique : ça va du « geek de service » un peu tout seul qui bricole les outils du groupe avec les moyens du bord, aux « gros » collectifs qui mettent en place des systèmes plus robustes et souvent avec des outils libres et une équipe informatique plus structurée. Résultat ? Un joyeux méli-mélo de pratiques numériques qui dépend souvent de la magie des personnes en charge ! 🤪 Une des questions que l’on se pose d’ailleurs beaucoup au sein de la commission informatique est de savoir comment accompagner les différents groupes locaux pour mettre en place des outils numériques qui leur permettent de mobiliser efficacement.

Pour ce qui est de l’équipe d’animation globale, notre rapport au numérique a longtemps été dicté par l’usage des outils les plus répandus, les moins chers, et les plus faciles à utiliser… oui, vous avez bien deviné, on est encore beaucoup chez Google… Ces outils ont été choisi par défaut au début d’Alternatiba par les premier⋅es militant⋅es du mouvement.

La création de la commission informatique en 2018, suivie par l’arrivée d’un salarié dédié, a permis de concrétiser la volonté de mettre en cohérence nos pratiques numériques avec nos valeurs et d’initier les changements nécessaires : structuration des usages numériques, sobriété numérique, sensibilisation au capitalisme de surveillance, choix d’hébergeurs éthiques, virage vers des logiciels émancipateurs, etc.

À savoir que les membres permanent⋅es de l’équipe d’animation globale n’ont pas une très grande connaissance du monde du numérique en général. Pour beaucoup, les outils numériques sont utilisés par nécessité (parce que nous sommes une équipe décentralisée – vive les visios… 😅) et doivent avant tout être des outils fonctionnels et efficaces. Par ailleurs, la multiplication d’outils numériques est globalement vue comme une contrainte qui peut générer de la lassitude ou de la frustration. C’est clair qu’on préférerait faire de la randonnée, de la soudure ou du jardinage plutôt que d’être devant un écran !

En résumé, nous restons collectivement pragmatiques : nous sommes un mouvement citoyen pour le climat et la justice sociale, et nos outils numériques doivent avant tout nous permettre de répondre à ces objectifs de manière efficace. Le numérique n’est pas le « cœur de métier » d’Alternatiba / ANV-COP21 : nous, c’est la mobilisation citoyenne ! Alors on évite d’auto-héberger ou de développer nos propres outils : en règle générale, on se tourne plutôt vers des hébergeurs en qui on a confiance et vers des outils qui existent déjà. Cependant, la conviction que le choix des outils numériques est politique est globalement partagée par tout le monde et nous donne (en tant que commission informatique) la légitimité de pousser à développer une culture du numérique libre au sein du mouvement.

 

Et y a-t-il une volonté, une politique/doctrine, envers le logiciel libre en particulier ?

La volonté de valoriser les logiciels libres est clairement présente au sein du mouvement. Cela a été affirmé à plusieurs reprises dans différentes instances du mouvement, notamment au sein du conseil d’administration. Pour nous, les logiciels libres incarnent dans le monde du numérique les valeurs que nous défendons pour une société désirable : plus de communs gérés de manière démocratique, moins de surveillance, une philosophie d’opposition au capitalisme…

En théorie, tout ça est bien beau mais, en pratique, c’est beaucoup moins évident… 😬 Cette volonté de s’affranchir des logiciels privateurs et de mettre en place des usages numériques alternatifs émancipateurs est limitée par l’habitude (« oui mais je connais bien ce logiciel… »), le manque de convivialité et d’ergonomie de certains outils (« ah non c’est moche ! ») ou le besoin de fiabilité (« oui c’est sympa mais bon, ça ne marche jamais ton truc »). Ces questions étant actuellement portées par un nombre restreint de personnes, il y a une certaine inertie au sein du mouvement, et c’est normal.

En résumé, nous adoptons une posture radicalo-pragmatique : nous cherchons à nous émanciper du numérique privateur autant que possible mais nous utilisons ce que nous avons à disposition ici et maintenant pour continuer d’avancer efficacement. Alternatiba / ANV-COP21 est avant tout un mouvement citoyen écologiste qui se veut accessible à toutes et tous, et qui a besoin d’avoir des outils facilement appropriables pour les gens. La question de la convivialité et de la formation à ces outils est primordiale, nous devons encore beaucoup travailler dessus !

"ce qu'on veut" vs "ce qu'on parvient à faire"
Allégorie du quotidien de la commission informatique

 

Dans vos actions, vous utilisez donc différents logiciels ou plateformes. Peut-on savoir lesquels ?

Globalement, nous sommes toujours dépendant⋅es d’un certain nombre de logiciels propriétaires. L’outil de travail central de l’équipe globale est un Google Drive sur lequel nous stockons et partageons nos documents de travail, les ordres du jours et les comptes rendus (on fait beaucoup de rédaction collaborative ! ✏️), ainsi que des tableaux de suivi et de nombreux autres documents. Nos boîtes mails et listes mails sont actuellement hébergées chez OVH, mais nous avons initié un processus pour les migrer chez un hébergeur associatif. Nous utilisons encore beaucoup Zoom pour faire des réunions en visio. On utilise également Brevo (ex Sendinblue) pour envoyer nos infolettres, des outils spécifiques pour la collecte de don, et Ohme comme CRM. Enfin, en tant que mouvement de mobilisation, nous sommes presque « contraint⋅es » à utiliser les réseaux sociaux dominants pour toucher un maximum de personnes.

Cependant, nous migrons peu à peu nos usages vers des outils libres. Nos sites web sont hébergés chez Infomaniak sur WordPress depuis 2018. Nous utilisons le logiciel de messagerie instantanée Mattermost, hébergé par le CHATONS le Cloud Girofle, nous avons un serveur Mumble pour les réunions audio, on utilise l’instance Vaultwarden de Tedomum (un autre CHATONS) pour la gestion de nos mots de passe, Paheko pour la gestion de notre caisse, BigBlueButton chez Globenet pour les visios, et Aktivisda, le petit nouveau qui permet de créer des visuels. Et bien sûr, nous utilisons beaucoup des services de Framasoft : Framadate (sondage), Framaforms (formulaire), Framavox (prise de décision), Framagit (forge logicielle)… Certains groupes locaux ont également mis en place une instance Nextcloud pour partager les fichiers et s’organiser. D’une manière générale, nous évitons de développer nos propres logiciels, mais en 2019 Alternatiba s’est malgré tout lancé dans une chouette aventure en participant au développement de NOÉ, une application libre d’organisation d’événements, car nous avions des besoins très spécifiques pour l’organisation des Camps Climat. ⛺ Aujourd’hui, le projet s’est autonomisé mais nous continuons à utiliser ce logiciel pour nos événements, et notamment pour notre projet de Camp Climat 2025.

Enfin, pour certains usages spécifiques liés à la désobéissance civile avec ANV-COP21, nous utilisons certains outils qui mettent en avant la confidentialité et le chiffrement, par exemple Proton Mail, Signal ou Cryptpad.

Vous noterez qu’on dépend de pas mal d’hébergeurs différents, mais on essaie de maintenir un lien de confiance avec les humain⋅es de ces différentes organisations. Notre critère primordial : « suis-je capable de boire une bière avec mon hébergeur ? » » 🍻

Où sont nos données ? - La galaxie des hébergeurs sympas autour d'Alternatiba
Où sont nos données ? – La galaxie des hébergeurs sympas autour d’Alternatiba

 

Vous nous avez contacté au sujet d’un projet, d’une envie. Celle d’utiliser des outils type « base de données no-code ». On a beau être sur Framasoft : pouvez-vous nous expliquer ce que sont ces outils, et quels sont leurs principaux avantages ?

En tant qu’équipe d’animation globale, nous cherchons à suivre la dynamique du réseau Alternatiba / ANV-COP21 et à faire circuler des informations dans l’ensemble des groupes locaux. Pour cela, nous devons stocker un certain nombre d’informations, comme les contacts des différents référent⋅es, les activités des groupes, les participations aux différentes mobilisations et campagnes ou encore les formations données.

Toutes ces données ont longtemps été stockées dans de nombreux tableaux de suivi sous forme de Google Sheets. Le temps passant, ces tableaux sont devenus lourds et difficiles à maintenir et à mettre à jour car ils n’ont pas été conçus de manière optimale à l’origine. La mise à jour ou la récupération de données spécifiques se sont avérées compliquées, fastidieuses et chronophages, un peu comme dans le grenier de la vieille maison de famille dans lequel on entasse un peu tout ce qui passe années après années… 🕸️

À l’inverse de ces tableaux indépendants, une base de données est un outil qui permet nativement de répondre à ce type de besoin en liant différents tableaux entre eux de telle sorte que les informations des uns puissent être lues ou mises à jour à partir des autres. Cela évite les doublons et facilite grandement la mise à jour et la consultation des données ! Au contraire d’une base de données « classique » qui s’utilise par des requêtes type SQL, un outil de base de données dit « no-code » est doté d’une couche supplémentaire qui permet de rendre invisible pour l’utilisateur⋅rice les formules qui se cachent derrière et est donc parfaite pour des utilisateurices non geeks.

C’est pour ces raisons que nous avons décidé de procéder à un grand ménage de printemps de notre vieux grenier et de nous orienter vers ce type d’outils pour faciliter le suivi de notre réseau ! 🧹

 

OK, merci : on y voit (un peu) plus clair 🙂 Maintenant, pouvez vous préciser votre projet ?

Dans l’idée de sortir petit à petit un maximum de nos données de Google (en particulier les données personnelles), notre projet est de migrer l’ensemble de nos tableaux de suivi Google Sheets vers un outil de base de données no-code existant. Le leader du marché est AirTable, un logiciel propriétaire américain de la Sillicon Valley BigTech et compagnie. Nous avons choisi une alternative open-source, Baserow, qui offre également de nombreuses fonctionnalités intéressantes.

Nous avons donc construit une (vraie) base de données sur Baserow pour le suivi de notre réseau. Finies les bidouilles : place aux tables de suivi interconnectées, où chaque info est bien rangée à sa place et prête à être trouvée en deux clics. 😁 Plus besoin de jouer aux détectives, toute l’équipe peut accéder aux infos sans prise de tête.

Pour compléter le tout, nous voulions avoir un maximum de contrôle sur l’ensemble de nos données (qui ne sont donc plus stockées sur les serveurs de Google) et en particulier sur les données sensibles de notre réseau. Il s’avère cependant que nous n’avons trouvé aucun CHATONS qui administre et met à disposition des instances Baserow. Nous avons donc fait le pari d’auto-héberger notre propre instance Baserow afin d’avoir facilement la main sur nos données. Pour cela, nous utilisons une machine chez Grésille un hébergeur associatif de confiance avec qui nous avons des liens forts. ❤️

 

Ca à l’air chouette ! Comment vous y êtes-vous pris·es ?

Bien que Baserow soit un outil relativement simple d’utilisation, il ne fallait pas foncer tête baissée sans réfléchir… La première étape a été de concevoir la structure de notre base de données : quelles tables, quelles infos, à quelle place ? Cette période de conception nous a occupé·es pendant plusieurs mois.

Ensuite, un gros travail a été de mettre en place les fonctionnalités qui répondent à nos besoins. Baserow ayant aujourd’hui des fonctionnalités natives relativement limitées, nous avons dû nous adapter et être inventifs dans la conception de la base de données en attendant le développement de ces fonctionnalités. Pour cela, on a créé grâce à notre complice n8n (un outil libre que l’on héberge aussi et qui se branche sur Baserow) de nombreuses automatisations de tâches grâce à des nœuds préconfigurés et un soupçon de code maison. Exemple ? Un système d’envoi automatique de courriels mensuels aux groupes locaux pour qu’ils mettent à jour leurs infos eux-mêmes. Résultat : les données des groupes sont à jour sans se prendre la tête ! 🧘‍♂️

D’ailleurs, nous avons été impressionnés par la dynamique de développement de Baserow qui témoigne d’un lien fort avec la communauté d’utilisateurices. Nous avons osé publier quelques demandes de fonctionnalités en expliquant notre besoin, et elles ont été prises en compte par l’équipe dans le développement ! 🤩

Schéma de fonctionnement dans le cas de la mise à jour mensuelle des groupes locaux - Source Excalidraw
Schéma de fonctionnement dans le cas de la mise à jour mensuelle des groupes locaux – Schéma réalisé avec Excalidraw

 

 

Capture d'écran du logiciel Baserow, montrant un menu sur la partie gauche et un tableur sur le reste du texte
Capture d’écran du logiciel Baserow

 

Pour mettre en place tous ces outils, nous avons fait appel à Maxime, développeur salarié de la coopérative TelesCoop et qui a été un membre actif d’un groupe local Alternatiba par le passe.

TelesCoop est une coopérative super chouette qui accompagne « les acteurs qui participent à l’amélioration des problématiques sociales et environnementales de notre société à travers les technologies de l’information ». Au delà des compétences techniques, nous avons été touché⋅es par les choix forts qui ont été fait dans l’entreprise concernant les conditions salariales (égalité femme/homme évidemment, salaire adapté en fonction des besoins, temps de travail modulable) et le choix des projets qu’ils et elles choisissent d’accompagner. Chaque salarié⋅e peut allouer une partie de son temps de travail sur des projets bénévoles mais qui remplissent des critères éthiques forts ! 😍 Cela résonne fortement avec les valeurs que nous portons au sein du mouvement Alternatiba.

Nous sommes uni·e·s et engagé·e·s autour de valeurs communes – écologie, justice sociale, sobriété – et d’une volonté de mettre en commun nos expériences individuelles au service d’un projet collectif.
— TelesCoop, sur leur site https://telescoop.fr

Quelle est la suite pour ce projet à moyen terme ?

Aujourd’hui, nous continuons d’intégrer peu à peu l’ensemble des données du mouvement et nous connectons notre base de données à différents outils pour des fonctionnalités spécifiques : formulaires de contact sur nos sites web, visualisation d’indicateurs de la dynamique du réseau grâce à Metabase, inscription/désinscription à nos listes mails, ou encore mise à jour automatique de nos différentes cartes interactives GoGoCarto. D’une manière générale, les possibilités offertes par Baserow (et n8n) sont infinies pour ajouter des nouvelles fonctionnalités à notre système !

Par ailleurs, nous avons conçu ce système d’information en nous appuyant sur les besoins de notre mouvement Alternatiba / ANV-COP21, structuré en groupes locaux répartis sur tout le territoire et animé par une équipe dédiée. Mais peut-être que d’autres mouvements ou collectifs ont une organisation similaire à la notre, et pourraient être intéressés par cet outil ? Une fois que tout sera en place et fonctionnel, il peut être intéressant de le diffuser et le proposer à d’autres mouvements qui ont les mêmes besoins que nous ! C’est ça aussi la dynamique du logiciel libre. 🙂

 

Cool ! Mais… ça va prendre du temps ? Nécessiter de l’argent ? Comment allez-vous faire ?

Le projet a commencé concrètement avec Maxime de TelesCoop au mois de mars 2023. D’un point de vue opérationnel, nous étions quatre côté Alternatiba à suivre le développement de l’outil : deux personnes de l’équipe informatique et deux de l’équipe d’animation du réseau. Il y a eu beaucoup d’aller-retour entre TelesCoop et nous sur les fonctionnalités, la configuration des tables de données ou les workflows n8n.

Pour ce qui est du développement, on met les mains dans la technique côté Alternatiba pour pouvoir gérer en interne le support et les évolutions par la suite mais c’est surtout Maxime qui a développé la structure de l’outil en travaillant sur le projet plusieurs heures par semaine. Le temps bénévole et le mécénat de compétences que TelesCoop nous consacre à travers Maxime ont permis de faire avancer ce projet très rapidement.

Aujourd’hui, le projet est fonctionnel et utilisé par toute l’équipe. 🎉 La première version a été lancée courant août 2023. Après de nombreux tests, nous avons migré toutes nos données sur notre nouvelle base de données. Les Google Sheet sont maintenant figés. Le premier mail automatique, contenant les liens vers les formulaires de mise à jour, est parti début septembre 2023. Nous avons également commencé à mettre à disposition des projets Baserow pour les groupes locaux intéressés !

Nous avons apporté une attention particulière à former toustes nos collègues et, aujourd’hui, Baserow est un outil largement adopté dans l’équipe. Cette année, nous avons notamment réalisé la gestion du projet du Tour Alternatiba 2024 (notre grand projet qui a impliqué des centaines de bénévoles dans plus de 100 villes de France sur 4 mois) avec efficacité et il sera encore central dans l’organisation du Camp Climat 2025 !

C’est merveilleux (et je pèse mes mots) pour moi de vérifier les mises à jour des référent·es de groupe sans avoir à ouvrir 3 tableaux Google pour repérer / noter les modifs / les faire / les doubler dans un autre tableau. Effet Whaouh !

— Léa, animatrice du réseau Alternatiba / ANV-COP21

Comment Baserow a changé la vie de Léa, animatrice du réseau Alternatiba / ANV-COP21

Vous avez des besoins d’aide ? Technique ? Financière ? Autre ?

D’un point de vue technique, le projet roule aujourd’hui parfaitement et nous ajoutons régulièrement de nouvelles fonctionnalités. Nous avons un petit groupe de travail qui assure le support et l’amélioration continue de notre système Baserow/n8n.

D’un point de vue financier, nous avons lancé début décembre notre campagne de collecte de fin d’année. Cette collecte est cruciale dans un contexte d’incertitude financière croissante pour notre mouvement et, plus largement, pour tous les acteurs de la mobilisation climatique et sociale. Plus que jamais, l’auto-financement devient une nécessité (toujours dans une logique d’autonomie !). Pour vous donner un ordre d’idée, en 2024, la collecte de dons de particuliers a représenté 26,3 % de nos financements sur Alternatiba et 59,5 % sur ANV-COP21.

Notre objectif est de faire grandir cette part afin de garantir notre indépendance et notre vision à long terme. Pour renforcer notre mouvement, multiplier nos actions, et gagner en autonomie face à l’urgence climatique, nous avons besoin du soutien financier des citoyen·nes, car c’est leur mouvement avant tout. Chaque nouveau donateur·rice crédibilise nos actions : en soutenant financièrement, des centaines de personnes renforcent la pression citoyenne pour un monde plus juste et soutenable. Si vous souhaitez contribuer, vous pouvez faire un don directement sur don.alternatiba.eu ! ❤️

 

👉 Je soutiens Alternatiba

 

Personne avec un tshirt Alternatiba, au milieu d'un groupe, souriante et levant un pouce.

 

 




20 anni di Framasoft… e uno in più grazie alle vostre donazioni ?

Grazie alle vostre donazioni, Framasoft aiuta più di 2 milioni di persone a diventare digitalmente indipendenti. Dopo un ventesimo anno difficile, la nostra associazione vi chiede i mezzi per continuare il suo lavoro… e per affrontare le sfide del futuro.

🎈 Framasoft compie 20 anni🎈 : contribuisci a finanziare il 21° anno!

Grazie alle vostre donazioni, l’associazione Framasoft lavora da 20 anni per far progredire un Web etico e conviviale. Per saperne di più su alcune delle nostre azioni nel 2024, visitate il sito web Support Framasoft.

➡️ Leggere la serie di articoli di questa campagna (novembre-dicembre 2024)

 

Nonostante un anno difficile…

Senza entrare nei dettagli o nell’autocommiserazione (perché questo è un momento di festa), quest’anno è stato doppiamente difficile per Framasoft.

Prima di tutto dal punto di vista umano, perché dei conflitti significativi (che possono verificarsi in qualsiasi associazione… e in qualsiasi avventura umana) hanno assorbito molte energie e indebolito il livello di motivazione.

Framasoft conclude quindi il 2024 con una stanchezza accumulata, un team più piccolo e un forte desiderio di focalizzarsi nel 2025 sulle nostre azioni al servizio di chi ha bisogno di strumenti digitali etici e popolari.

Ma anche dal punto di vista finanziario non c’è da rallegrarsi. Tra il fatto che abbiamo meno persone nell’associazione e un annata triste per tutti: l’inflazione, il fascismo alle porte del potere, un crescente bisogno di solidarietà…

Framasoft (come molti altri) ha visto le sue donazioni diminuire drasticamente. Il 1° ottobre 2024, Framasoft aveva ricevuto quasi 50.000 euro in meno di donazioni rispetto alla stessa data del 2023.

…Framasoft è orgogliosa dei risultati ottenuti nel 2024!

Da qui alla fine dell’anno, vi presenteremo in dettaglio su questo blog alcune delle azioni significative realizzate nel 2024. Naturalmente, Framasoft è molto di più di questa selezione (ad esempio, tutti i servizi Internet di Dégooglisons)… Ma dovete scegliere tra le 100 pagine dei resoconti delle nostre attività.

🦄 Framaspace, il cloud associativo, si arricchisce di importanti strumenti

Illustration - Dans l'espace, une licorne fait apparaitre des bulles de sa baguette magique. Dans les bulles, on trouve des symboles : un boulier, des fichiers, etc.
Illustrazione di David Revoy – Licenza: CC-By 4.0

 

Contabilità, gestione dei soci, moduli, gestione semplificata dei dati… tutte queste funzioni si aggiungono alle intro interattive, alla condivisione delle proprietà, alle agende, ai contatti, alla chat e alla sincronizzazione delle cartelle già disponibili in Framaspace.

Se desiderate che la vostra associazione o il vostro piccolo gruppo riceva un Framaspace e possa beneficiare di queste nuove funzionalità il prima possibile, non esitate: le iscrizioni sono ancora aperte!
• scoprire Framaspace
Tutti i dettagli sul Framablog.

 

🦄 Sostieni Framaspace 🦄

🤖 Framamia & [Project L]: demistificare l’IA attraverso la spiegazione (e l’esempio!)

Dal miracolo all’apocalisse, l’IA è oggetto di fantasie profetiche. Framasoft si è posta la sfida di precisare il dibattito e di ritornare alla concretezza condividendo alcune chiavi di lettura.

 

Illustration. Autour d'une table, des pingouin chantent. Au centre, un petit perroquet mécanique prend des notes à la manière d'un sténographe.
Illustrazione di David Revoy – Licenza: CC-By 4.0

 

Con il sito web di Framamia, vogliamo spiegare chiaramente come vediamo oggi questa nuova sfida digitale…

Per quanto riguarda il [Progetto L], sarà un esperimento, una dimostrazione del tipo di strumenti che possono essere creati quando l’IA viene utilizzata senza cercare il profitto, la crescita o lo sfruttamento… ma solo per essere fondamentalmente utile.

 

• Tutti i dettagli sono in arrivo sul Framablog.

 

🤖 Sostieni Framamia 🤖

📱 L’app PeerTube: un mondo di video nel palmo della mano

PeerTube non è una piattaforma di video e di live: è una rete di piattaforme autonome, autogestite e interconnesse.

 

Tuttavia, rimane difficile scoprire i contenuti su questa rete, soprattutto perché la maggior parte dei video online viene ormai guardata da un telefono cellulare.

Illustration - Sepia, læ poulpe mascotte de PeerTube, sort de l'écran d'un téléphone mobile.
Illustrazione di David Revoy – Licenza: CC-By 4.0

 

Abbiamo quindi sviluppato un’applicazione mobile PeerTube, che sarà disponibile su F-Droid, PlayStore e iOS appstore (se tutto va bene).
• Tutti i dettagli sono in arrivo sul Framablog.

 

📱 Sostieni l’applicazione PeerTube 📱

🐙 PeerTube versione 7: una riprogettazione per un’esperienza ancora più fluida

È stato un anno ricco di nuove funzionalità per il software che consente di creare la propria piattaforma di video e di live: esportazione e importazione di account, moderazione dei commenti, trascrizione automatica dei video, separazione dei flussi audio e video, navigazione nei sottotitoli, ecc.

Illustration - Dans la mer Sepia, læ poulpe mascotte de PeerTube, dessine un grand chiffre sept avec son encre.
Illustrazione di David Revoy – Licenza: CC-By 4.0

 

A dicembre è previsto il rilascio della versione 7 di PeerTube, con importanti modifiche all’esperienza e all’interfaccia del software.

Più chiaro, più semplice e più accessibile: non vediamo l’ora di condividere questo nuovo look con voi!

scoprire PeerTube
• Tutti i dettagli sono in arrivo sul Framablog.

 

🐙 Sostieni PeerTube v7 🐙

🦆 Cancanons: bilancio delle azioni per rendere internet più collettivo e facile da usare

Annunciata alla fine del 2022, la roadmap di Collectivisons Internet / Convivialisons Internet (o « coin-coin », per i più veloci) può essere riassunta in un’unica ambizione: degooglizzare le associazioni.

 

Illustration - Une maman canard regarde le nid dans lequel quelques uns des œufs ont éclot.
Illustrazione di David Revoy – Licenza: CC-By 4.0

 

Con ECHO network che si sta concludendo (brillantemente), Emancip’Asso che è stata lanciata e sta facendo buoni progressi, Framaspace che si sta evolvendo… sembra un buon momento per fare il punto su queste iniziative e sul futuro che abbiamo in serbo per loro.

Framasoft offre ora una serie di strumenti ai gruppi che desiderano strumenti digitali all’altezza dei loro valori: è ora di presentarli correttamente!
Vedere la roadmap di Collectivisons / Convivialons Internet
• Rete ECHO
Emancip’Asso
• Tutti i dettagli sono in arrivo sul Framablog.

 

🦆 Sostieni Coin-Coin 🦆

Celebriamo i 20 anni di condivisione associativa

Per noi, il 2024 è anche il 20° anno dell’associazione Framasoft, la cui fondazione è stata ufficializzata con la pubblicazione sul Journal Officiel del 03 gennaio 2004.

Annuncio della fondazione dell’associazione Framasoft nel Journal Officiel del 3 gennaio 2004.

… nel podcast di Projets Libres!

Non abbiamo intenzione di raccontare 20 anni di avventure associative in un post sul blog (non sappiamo se un solo libro sarebbe sufficiente!) Così abbiamo chiesto a Walid, autore del podcast Projets Libres! di aiutare alcuni membri storici a condividere alcuni ricordi di questi due decenni.

Il primo episodio di questo podcast è già disponibile: Framasoft, i primi anni (2004-2014) raccontati da Alexis Kauffmann e Pierre-Yves Gosset.

 

capture d'écran de la page du podcast projets libres dédié à Framasoft

Clicca per ascoltare la prima puntata del podcast sui 20 anni di Framasoft

… sul sito 20ans.framasoft.org!

Inoltre, i membri volontari dell’associazione hanno messo a punto un sito web che illustra 20 anni di azioni e progetti sul software libero, sui beni culturali comuni e sull’educazione popolare alle tematiche digitali.

La storia di Framasoft dimostra che con tanti contributi, talento, duro lavoro, fortuna (anche) e determinazione… una piccola associazione con meno di 40 membri può offrire servizi e strumenti che migliorano la vita digitale di oltre due milioni di persone ogni mese.

 

Fare clic qui per visitare il sito web dei 20 anni di Framasoft

Questa storia potrebbe essere un’anomalia statistica (anche se… vorremmo cogliere l’occasione per augurare alle amiche e agli amici di CLISS XXI, Thunderbird e Wikimedia France un buon 20° compleanno)! Eh sì: Framasoft ha un modello certamente difficile da riprodurre… ma è soprattutto un grande motivo di orgoglio per noi e una grande responsabilità, resa possibile dal sostegno di chi, ogni anno, ha donato a Framasoft.

🎈 Sostieni i 20 anni di Framasoft 🎈

Due possibili futuri, che dipendono interamente da voi

Le donazioni a Framasoft sono una dimostrazione di solidarietà: nel 2023, stimiamo di aver avuto circa 8.000 donatori per 2 milioni di beneficiari mensili.

Una persona che fa una donazione a Framasoft permette ad altre 249 persone di beneficiare gratuitamente dei nostri strumenti.

Essendo Framasoft un’associazione di interesse generale, le donazioni danno diritto ai contribuenti francesi a una detrazione fiscale del 66%. Una donazione di 200 euro quest’anno sarà di 67 euro, al netto della detrazione.

Sì, questo è il periodo dell’anno in cui facciamo appello al vostro sostegno per continuare e finanziare le azioni di Framasoft. E dopo un ventesimo anno difficile, la nostra associazione ha ancora più bisogno di voi, sia per per ripartire che per prendere il volo.

 

illustration où des animaux mascottes de projets framasoft rassemblent des ballons sur deux piquets au sol. Les ballons prennent la forme d'un 20 géant.
Illustrazione di David Revoy – Licenza: CC-By 4.0

Con 200.000 euro, Framasoft prosegue nel suo 21° anno di attività

È la somma di cui abbiamo bisogno per completare il bilancio 2025 e continuare i nostri progetti con il team ridotto. Questo ci permetterà, ad esempio, di assicurare finalmente il posto di lavoro a Wicklow (che, tra le altre cose, sviluppa l’applicazione PeerTube), il cui contratto a tempo determinato è stato prorogato alla fine di agosto.

Tuttavia, non illudiamoci: se da un lato questa somma (già molto cospicua) consentirà a Framasoft di uscire dall’impasse, dall’altro avremo solo i mezzi per mantenere le nostre azioni attuali, i servizi online, ecc. senza poter davvero affrontare nuovi progetti.

 

🎈 Aiuta Framasoft a continuare il suo lavaro 🎈

Con 400.000 euro, Framasoft prende il volo per innovare!

Ecco perché quest’anno abbiamo aggiunto un secondo livello, un bonus nella nostra raccolta fondi. Qualsiasi cifra che superi i 200.000 euro ci darà i mezzi per fare di più, per fare meglio e per affrontare nuovi progetti.

Naturalmente abbiamo già una serie di progetti per migliorare drasticamente i servizi che oggi utilizziamo di più. Ma questo richiede tempo, talento… in breve: denaro.

Vogliamo anche dimostrare che una tecnologia digitale emancipatrice, compresa e controllata… è un tema attuale e importante di fronte alle urgenze climatiche e sociali.
Che si parli di usi mobili, di AI, di Commons, di strumenti resilienti (bassa tecnologia, riuso, ecc.), del posto della tecnologia digitale nell’attuale emergenza climatica… abbiamo grandi ambizioni nell’iniziare questo nuovo decennio della vita di Framasoft. Ci mancano solo i mezzi per realizzarle!

 

🎈🎈 Aiuta Framasoft a decollare nel 2025 🎈🎈

Illustration - des mascottes ont planté une flopée de ballons qui prennent la forme du logo Framasoft. Le lopin de terre s'est détaché, et ils flottent dans le ciel nocture en faisant la fête.
Illustrazione di David Revoy – Licenza: CC-By 4.0

La sfida: 20.000 volte 20 euro di donazioni per il 20° anniversario di Framasoft!

Certo, lo slogan « 20 euro (20 balles/palloni) per 20 anni di Frama » suonava bene… ma se i più generosi tra voi limitassero le loro donazioni a 20 euro, dovremmo trovare 20.000 donatori! (contro i poco più di 8.000 del 2023).

Non vogliamo dirvi quanto contribuire, ma solo che (se siete disposti e in grado di farlo), il vostro sostegno sarà più che benvenuto. Ogni 20 euro donati saranno un nuovo palloncino per celebrare 20 anni di avventure e aiutarci a prendere il volo.

Il vostro sostegno e il vostro incoraggiamento saranno altrettanto preziosi per noi: insieme, abbiamo 42 giorni per convincere i nostri amici e raccogliere abbastanza denaro per far decollare Framasoft.

Allora: sfida accettata?

 

🎈 Io sostengo il 21° anno di Framasoft 🎈

Traduzione: nilocram (grazie!)




Lokas : l’app pour enregistrer et transcrire vos réunions en toute confidentialité

Framasoft vous propose d’essayer le prototype de Lokas, une nouvelle application de transcription « speech to text » qui respecte votre vie privée. Cette démo fonctionnelle est aussi une expérimentation de Framasoft dans le domaine de l’IA, accompagnée du site Framamia, que l’on présente ici.

🎈 Framasoft a 20 ans🎈 : Contribuez pour financer une 21e année !

Grâce à vos dons (défiscalisables à 66 %), l’association Framasoft agit depuis 20 ans pour faire avancer le Web éthique et convivial. Retrouvez un focus sur certaines de nos actions en 2024 sur le site Soutenir Framasoft.

➡️ Lire la série d’articles de cette campagne (nov. – déc. 2024)

 

Veuillez noter que cet article est aussi disponible en anglais.

Facilitez vos prises de notes avec Lokas

Lokas est une application (sur smartphone Android ou iOS) qui permet de transcrire le son de voix en fichier texte.

En gros, pour une réunion : vous mettez le téléphone au centre de la table, vous appuyez sur le bouton « Enregistrer » en début de réunion, sur « Arrêter » en fin de réunion, et l’application vous renvoie quelques minutes après un fichier texte reprenant les phrases prononcées par chacun et chacune.

Lokas permet et surtout permettra pas mal d’autres choses, mais nous y reviendrons en fin d’annonce.

captures d'écran de l'application Lokas avec les trois étapes : enregistrement, édition du transcript, détail du temps de parole

Lokas, c’est pour qui ?

Lokas s’adresse à toute personne qui participe à des réunions. Autant dire un paquet de personnes sur la planète 🙂

Nous pouvons cependant partager quelques cas d’usages.

Premier exemple : une AG associative

Imaginons une Assemblée Générale associative. Il y a 15 personnes dans la pièce, 2 animateur⋅ices, 1 personne à la prise de notes. Et une réunion de 2H.

Les soucis :

  • La prise de notes est épuisante
  • La personne qui prend les notes voit sa participation limitée
  • Les notes peuvent être incomplètes (un « trou » dû à une pause pipi)

Ce qu’apporte Lokas ?

Lokas permet d’assister la personne qui prend les notes, et lui permettra de participer plus facilement (tout en autorisant la pause pipi !).

Exemple de transcription d'un échange vocal avec l'application Lokas
Exemple de transcription d’un échange vocal avec l’application Lokas

Second exemple : un atelier avec des ados

Un atelier de l’association « Les petits débrouillards ». 3 groupes de 5 adolescent⋅es. Une majorité de filles dans les groupes.

Les soucis :

  • La prise de notes peut être très compliquée
  • Les garçons monopolisent la parole

Ce qu’apporte Lokas ?

Lokas permet de garder trace (sonore et écrite) de ce qu’il s’est dit. Et permet d’établir des statistiques de temps de paroles, notamment par genre, afin d’objectiver le fait que les garçons ne laissent que peu de temps de paroles aux filles.

Troisième exemple : une réunion de travail en visio, en langue étrangère

Votre collectif militant est proche d’une association espagnole. C’est Camille, une bénévole de votre collectif, qui parle à peu près l’espagnol, qui fera la visio avec son interlocutrice madrilène. La visio a donc lieu dans une langue étrangère.

Les soucis :

  • Vous avez besoin de pouvoir réécouter à tête reposée
  • Vous avez besoin d’une transcription en français et de la partager aux membres du C.A.

Ce qu’apporte Lokas ?

Avec Lokas, Camille pourra réécouter la visio, la transcrire automatiquement en français, et la partager depuis votre smartphone (par mail, via Signal, Matrix, WhatsApp, Telegram, etc).

Soutenir Lokas (et Framasoft)

L’IA n’est pas magique . Lokas non plus 🤷.

Lokas n’est qu’un outil. Il peut vous assister dans la prise de notes. Cependant, comme tout outil, il ne doit pas vous dispenser d’utiliser votre cerveau !

L’invention de l’écriture (une autre technologie, très perfectionnée) date d’au moins 3 000 ans. Cela fait donc au moins aussi longtemps que l’humanité est capable de se réunir et de garder des traces écrites. Sans IA. Sans smartphone. Ne jetez pas plusieurs millénaires de techniques avec l’eau de l’IA. Un outil comme Lokas pourra être utile dans certains cas, et complètement gadget, voire improductif, dans d’autres cas. Cela n’est pas sans rappeler le concept de Pharmakon, cher au philosophe Bernard Stiegler : Lokas, comme tout objet technique, est à la fois poison, remède, et bouc-émissaire.

Par exemple le web est « à la fois un dispositif technologique associé permettant la participation et un système industriel dépossédant les internautes de leurs données pour les soumettre à un marketing omniprésent et individuellement tracé et ciblé par les technologies du user profiling. ». Remède et poison.

De la même façon, Lokas pourra être émancipateur (en facilitant la participation plutôt que la prise de notes), ou au contraire contraignant (les réunions un peu foutraques dans un bar bruyant ont aussi leur intérêt, il ne faudrait pas s’en passer parce que l’outil fonctionne mieux dans un environnement calme), ou frustrant (« l’application a planté, je n’ai aucune note de secours ! La technologie, c’est de la mârde ! »).

Lokas, comme une voiture, un marteau, un stylo, n’est pas un outil « neutre ». À vous de voir, collectivement, si vous souhaitez l’utiliser, et comment.

Illustration de Gee, montrant de mauvaises conditions pour utiliser Lokas, à savoir une réunion bruyante dans un bar
Forcément, ça va moins bien marcher – CC-By SA Gee

« C’est l’histoire d’une app… »

Il nous semble intéressant de pouvoir vous raconter comment est née l’application Lokas. C’est lever un coin de rideau sur les coulisses de Framasoft, comprendre comment nous pouvons prendre la décision de faire (ou de ne pas faire) tel ou tel projet. C’est aussi montrer que parfois, avec un peu de chance et d’huile de coude clavier, on peut faire des choses qui pourraient paraître impossibles. Cependant, comme cette partie n’est pas indispensable, on vous laisse le choix d’en prendre connaissance ou pas.

Cliquez ici pour lire (l’improbable et fabuleuse) histoire de Lokas

 

Cela fait bien trois ou quatre ans que l’idée de Lokas traîne dans la tête de pyg, membre de Framasoft.

L’idée de départ (nom de code : « Brewawa »), c’était surtout d’imaginer une application qui serait capable de calculer le temps de parole de locuteur⋅ices dans une réunion. Le but (pas du tout caché) était de démontrer facilement que lors d’une discussion avec des personnes de genres différents, ce sont de façon très très majoritairement les hommes qui monopolisent la conversation.

Différents essais ont été réalisés ces dernières années (coucou Gee, coucou bjnbvr !) pour étudier la faisabilité d’une telle application. Mais le fait est qu’en 2020, même si les possibilités techniques étaient présentes, elles n’étaient pas vraiment accessibles pour notre toute petite association, surtout sur un projet parallèle à tous ceux que Framasoft menait déjà.

« C’est l’histoire d’améliorations techniques… »

Cependant, avec le développement de logiciels tels que Vosk ou Whisper, les capacités de transcription audio (c’est-à-dire la capacité à transformer le son de phrases en texte) se sont largement améliorées.

À tel point qu’aujourd’hui, ces technologies sont utilisées par énormément de logiciels (de YouTube à PeerTube, en passant par BigBlueButton ou WhatsApp), et souvent même directement intégrée dans des appareils (Samsung en fait clairement un argument de vente).

Par ailleurs cette dernière décennie a aussi vu s’améliorer les processus de « diarisation ». Ce terme un peu barbare est en fait la technique qui permet d’identifier différent⋅es locuteur⋅ices dans une discussion. Par exemple, si Alex, Camille et Fred font une réunion, la diarisation saura attribuer à chacun⋅e les phrases qu’il ou elle aura prononcées (non, le logiciel ne va pas deviner le prénom de la personne, mais il saura – à peu près – identifier qu’il y avait trois participant⋅es, et dire « Cette phrase a été prononcée par la personne #1. Cette phrase a été prononcée par la personne #2. », etc.

C’est évidemment une phase essentielle pour pouvoir comprendre « qui a dit quoi » dans une réunion.

Ce processus est encore imparfait, mais s’améliore de mois en mois. Il faut donc se projeter en 2026 ou 2027 pour imaginer une diarisation vraiment fiable, mais elle est aujourd’hui « suffisante » dans 60 à 80% des usages en « bonnes conditions ».

« C’est l’histoire d’un alignement de planètes… »

Il se trouve qu’au sein de Framasoft, les compétences nécessaires pour le développement d’une telle application étaient réunies.

Chocobozzz, le développeur de PeerTube, avait déjà beaucoup travaillé sur le processus d’intégration de Whisper à PeerTube, afin de pouvoir générer automatiquement les sous-titres d’une vidéo. Il connait donc bien Whisper, ses options de configuration, ses performances, etc.

Wicklow, le développeur de l’application PeerTube, travaille depuis plusieurs mois avec le langage Dart et le SDK Flutter qui permet de développer en une seule base de code une application pour différents terminaux (Android, iPhone, ordinateur/tablette, web, etc).

Luc, notre administrateur système préféré (c’est pas compliqué, remarquez, nous n’en avons qu’un 😅) gère l’intégralité de l’infrastructure technique de Framasoft (une soixantaine de serveurs informatiques physiques). Donc, mettre en place la machine qui gère les transcriptions, l’installer, la sécuriser, etc, était pour lui un jeu d’enfant.

pyg, anciennement directeur de Framasoft, aujourd’hui coordinateur des services numériques de l’association, a géré d’innombrables projets pour Framasoft ces 20 dernières années. Alors, un de plus, même en pleine campagne, ça n’allait pas l’arrêter.

Entre cet ensemble de compétences, et les capacités techniques des logiciels de transcriptions et diarisation, les planètes étaient donc alignées pour lancer un tel projet.

« C’est une histoire de chance… »

Cependant, comme souvent, il faut un peu compter aussi sur le hasard ou la chance.

En effet, pyg avait un peu laissé tomber l’idée de cette application, tout simplement par ignorance des avancées techniques en termes de diarisation.

C’est en évoquant l’idée de cette application lors du dernier Framacamp, en juillet 2024, que Wicklow a lâché une info au détour de la conversation : « Ah, mais tu sais, Whisper fait maintenant une diarisation correcte. »

BIM 💣

 

« Ah, super intéressant ! Mais j’imagine qu’il faudrait longtemps pour développer une telle application de transcription libre ? » lui demanda pyg.

« Oh, je dirais qu’en 3 jours, je peux avoir un prototype fonctionnel si Chocobozzz se charge de la partie serveur. »

BOUM 💥

Autant vous dire qu’au lieu de profiter de sa soirée à jouer au poker, pyg a filé dans sa chambre, préparé une présentation d’une douzaine de diapositives sur un potentiel projet d’application, qu’il a présenté à l’association le lendemain matin.

Diapo extraite de la présentation "Brewawa"
Une des diapos produites pendant la nuit…

 

Certain⋅es membres étaient enthousiastes, d’autres moins. Et on les comprend : d’une part, c’était encore ajouter du travail à une association déjà particulièrement chargée et épuisée ; d’autre part, c’était un projet utilisant un logiciel issu de l’intelligence artificielle, une technologie sur laquelle nous sommes (unanimement) très critiques.

Cependant, cette application, qui allait devenir Lokas, nous semblait un bon moyen « d’incarner » l’objet social de Framasoft : faire de l’éducation populaire aux enjeux du numérique et des communs culturels.

Cela nous permettait en effet de sortir de l’aspect discours pédagogique, à la fois indispensable, mais insuffisant en termes d’appropriation et d’autodétermination. En créant un « objet numérique manipulable », nous pouvions faire de Lokas une occasion complémentaire de faire comprendre ce qu’est l’IA, ses possibilités, mais aussi ses faiblesses. Et revenir, donc, à notre « Pharmakon » évoqué plus haut.

Par ailleurs, en plus de pouvoir assister tout collectif faisant des réunions, cela nous permettait de mettre en œuvre, concrètement, une application portant nos valeurs : un outil convivial, n’exploitant pas les données des utilisateur⋅ices, sous licence libre, s’adressant avant tout aux personnes qui changent le monde pour plus de progrès social et de justice sociale.

Au final, la majorité des membres présent⋅es s’est exprimée : « Banco la caravane ! On se lance ! ».

« C’est (aussi) une histoire de contraintes »

Comme évoqué plus haut, les contraintes étaient fortes.

Un projet, ça coûte forcément en temps et en argent. Du temps et de l’argent qui ne pourront pas être utilisés ailleurs.

Or, il ne vous a pas échappé que Framasoft vit des dons. Il faut donc faire des campagnes de dons. Et la fin de l’année était déjà particulièrement chargée par la finalisation de différents projets et leurs annonces

En discutant avec Thomas et Pouhiou, codirecteurs de l’association, il a donc été décidé que Lokas devrait rester un projet sous contraintes fortes : coûter moins de 10 000€ tout compris ; ne pas impacter fortement les missions de Chocobozzz, pyg, ou Wicklow ; être réalisé (à « temps perdu », donc) entre mi-septembre et mi-novembre (notamment à cause des délais de validation des stores Android et iOS, que nous ne maîtrisons pas).

Avec de telles contraintes, impossible pour nous de réaliser un produit bien finalisé. Nous avons donc décidé de viser plutôt la mise à disposition d’un prototype. Voyez ce prototype comme un appartement témoin. Nous avons produit cette version non pas en nous focalisant sur un projet de long terme, avec des fondations solides, mais plutôt comme une « preuve de concept », développée rapidement, pour voir si le concept est suffisamment attirant et intéressant pour qu’en 2025 nous priorisions le développement de cette application (si les dons sont suffisants, donc !).

Afin de vous donner suffisamment « envie » de voir un jour une version 1.0 de Lokas arriver, nous avons fait appel aux compétences de l’Atelier Domino pour la création d’un logotype et d’une charte graphique. Ce qui nous a guidés pour réalisé en interne le site web du projet : lokas.app

En parallèle, Wicklow et Chocobozzz se sont attaqués au développement du prototype, ainsi qu’à la partie serveur de transcription.

« C’est une histoire qui ne demande qu’à être écrite… »

Une quinzaine de jours de travail plus tard (et un coût estimé à 7 500€ tout compris, avec en gros moitié de temps de travail Framasoft, et moitié prestations : Atelier Domino, location du serveur, des noms de domaines, validation des stores), nous pouvons présenter, avec fierté et un peu d’anxiété, notre prototype !

Soutenir Lokas (et Framasoft)

Lokas, comment ça marche ?

1. Se mettre dans les bonnes conditions

Lokas, comme tous les outils de transcription, d’ailleurs, est imparfait. Des bruits extérieurs, une mauvaise articulation, une voix fluette en fond de salle, des personnes qui se coupent la parole… Autant de raisons qui peuvent nuire à la transcription.

En conséquence, prévoyez de vous mettre au calme, de placer le téléphone au centre de la table (meilleure est la qualité sonore, meilleure est la transcription), n’ayez pas plusieurs discussions en même temps, et… prenez des notes « à l’ancienne » à côté (papier+crayon, ordinateur+pad, etc) en cas de souci.

Une fois cela fait, le fonctionnement est très simple.

Illustration de Gee montrant les bonnes conditions pour Lokas, à savoir une réunion au calme.
L’IA c’est pas magique : Lokas nécessite de bonnes conditions – CC-By SA Gee

2. Lancer l’enregistrement

Cliquez simplement sur le bouton « Enregistrement ». Placez le téléphone de façon à ce qu’il puisse capter au mieux les échanges. Et commencez votre réunion.

Capture (non contractuelle ;) ) de l'application Lokas, permettant l'enregistrement et la mise en pause de cet enregistrement audio
Enregistrement d’une réunion

 

Afin de limiter les abus, les enregistrements sont limités à 5 par jour et par appareil.

Notez que le modèle de langue géré par Lokas permet de l’utiliser d’ores et déjà dans une cinquantaine de langues, notamment : Néerlandais, espagnol, coréen, italien, allemand, thaïlandais, russe, portugais, polonais, indonésien, mandarin, suédois, tchèque, anglais, japonais et bien entendu français ! D’autres langues sont supportées, mais la reconnaissance sera moins performante.

À la fin de la réunion, cliquez sur « Finaliser ».

3. Envoyez votre fichier pour transcription (et patientez)

Vous pourrez éventuellement réécouter votre fichier avant de cliquer sur « Envoyer ».

Votre fichier est alors envoyé sur notre serveur où il sera placé dans la file d’attente pour sa transcription.

Cette étape pourra prendre de quelques minutes à quelques heures, suivant le nombre de fichiers en attente.

Vous pourrez vérifier manuellement si votre fichier a bien été transcrit, ou attendre tranquillement la notification (dont la tâche de vérification est exécutée toutes les 15mn)

 

Capture (non contractuelle ;) ) de l'application Lokas, montrant l'écran signifiant l'envoi du fichier audio aux serveurs de Framasoft
L’écran signifiant l’envoi du fichier audio aux serveurs de Framasoft

Une fois la transcription reçue

Une fois la transcription reçue, vous pourrez l’afficher dans Lokas.

 

Vous pourrez évidemment la partager (avec l’application de votre choix : mail, Signal, WhatsApp, etc) pour la corriger.

Affichage du menu de partage (audio ou texte) dans Lokas. En fond d'écran, la transcription.
Affichage du menu de partage (audio ou texte) dans Lokas. En fond d’écran, la transcription.

 

Vous pourrez aussi voir les statistiques de temps de parole (NB : cette fonctionnalité est relativement expérimentale). Si vous le souhaitez, pour une meilleure lecture des notes, vous pouvez attribuer un prénom (ou pseudo) aux participant⋅es. Pour obtenir des temps de parole par genre, vous pouvez aussi les attribuer manuellement, en vous assurant évidemment du consentement des personnes concernées à communiquer cette information. Notez que ces informations sont volontairement manuelles, et ne quittent pas votre téléphone, et ne sont donc pas transmises à Framasoft ou qui que ce soit.

 

Capture (non contractuelle ;) ) des stats de l'application Lokas. Temps de parole par participant⋅es et genres (attribués manuellement) des participant⋅es
Aperçu des temps de parole, ainsi que des noms et genres des participant⋅es (aucune de ces informations n’est transmise à Framasoft)

 

Point confidentialité : l’une des particularités de Lokas est que nous respectons votre vie privée : le fichier audio est enregistré sur votre téléphone. Il est envoyé, à votre demande, sur nos serveurs, qui se chargeront alors de sa transcription. Une fois la transcription terminée, une notification est envoyée sur votre téléphone ; lorsque vous ouvrez (dans « Mes fichiers ») la réunion en question, la transcription est alors téléchargée sur votre téléphone. Une fois cette étape réalisée, et après un léger délai pour s’assurer que tout s’est bien passé techniquement, tout est supprimé de notre serveur : le fichier audio ainsi que la transcription. Par ailleurs, si vous attribuez des noms, pseudos ou genres, pour les statistiques, sachez que ces informations ne font l’objet d’aucun traitement de notre côté.

Soutenir Lokas (et Framasoft)

Et l’IA dans tout ça ?

À Framasoft, nous ne sommes pas fans du tout de l’IA. Nous pensons que cette technologie (ou plutôt cet ensemble de technologies), pose plus de problèmes qu’elle n’apporte de solutions. Nous avons d’ailleurs essayé de présenter une synthèse de notre position sur l’I.A. au sein du site Framamia, que nous présentons ici sur le Framablog.

Alors, n’est-ce pas contradictoire d’utiliser l’IA au sein d’applications Framasoft, comme Lokas ou PeerTube ?

À notre sens, non. Et ce pour plusieurs raisons.

D’abord, comme nous l’écrivions dans le site Framamia, tous les modèles d’intelligence artificielle ne se valent pas. Whisper, le logiciel qui sert à la transcription, est une IA « spécialisée », et non une IA « généraliste » comme ChatGPT par exemple.

« Les modèles spécialisés, quant à eux sont optimisés pour résoudre efficacement une tâche précise. Leur impact est souvent maîtrisé, et peut correspondre à celui d’un autre logiciel. ».
Framasoft, sur le site Framamia.org

Whisper est certes une IA, mais qui tourne « en vase clos » sur nos serveurs.

Les algorithmes utilisés sont plus complexes qu’un filtre « Enlève les yeux rouges de cette photo » avec GIMP ou Photoshop, mais cela reste un modèle relativement simple (avec un processus d’entrées/sorties) infiniment moins énergivore qu’un modèle d’entraînement. En effet, l’inférence (le processus d’utiliser le modèle pour effectuer une tâche) consomme bien moins d’énergie que l’entraînement. Par exemple, exécuter Whisper pour transcrire un fichier audio de quelques minutes nécessite une puissance de calcul relativement modeste.

Ensuite, un projet comme Lokas ne nécessite pas d’acheter 350 000 puces GPU pour 9 milliards de dollars, comme l’a fait récemment Meta/Facebook, ce qui représente en gros le PIB du Togo en 2023. Nous ne pensons pas participer à la croissance de la bulle financière autour de l’IA, ou à faire faire s’emballer le capitalisme algorithmique.

Enfin (et surtout), avec Lokas ou PeerTube, nous demeurons cohérent⋅es avec une des valeurs au cœur de Framasoft, à savoir le respect de la confidentialité de vos données. En effet, nous ne faisons aucune exploitation de vos fichiers, en dehors de la tâche explicitement demandée, par exemple la transcription. Elles ne servent pas à enrichir un modèle d’IA à partir de vos discussions, de votre identité, etc. Nous ne conservons pas les fichiers audio ou texte, nous n’avons pas accès aux noms/prénoms/genres que vous attribuez manuellement aux participant⋅es d’une discussion (ça reste sur votre téléphone), etc. Et, évidemment, vos données ne sont JAMAIS monétisées.

Bref, Framasoft se fiche du contenu de vos données, elles vous appartiennent et ne regardent que vous.

Malgré cela, nous respectons le point de vue des personnes qui souhaitent boycotter l’IA, et nous entendons la contradiction qu’iels pourraient trouver à ce qu’une asso technocritique comme Framasoft propose des projets utilisant l’I.A.

Notre objectif est justement de proposer un outil qui permette d’avoir une réflexion concrète, afin de se forger un avis autonome, permettant à chacun et chacune de se construire sa propre position.

Illustration. Autour d'une table, des pinguoin chantent. Au centre, un petit perroquet mécanique prend des notes à la manière d'un sténographe.
Un perroquet mécanique prend des notes : tout un symbole.Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

Lokas c’est pour quand ?

Vous pouvez d’ores et déjà télécharger l’application Lokas sur le Play Store, iOS (toujours en testflight chez Apple, parce qu’ils sont 🤬… disons tatillons. EDIT : c’est maintenant disponible !), f-droid (en cours), ou avoir l’apk Android en téléchargement direct ici. Notez cependant que Lokas est un prototype (si ce n’est pas déjà fait, prenez deux minutes pour lire « L’histoire de Lokas » et comprendre pourquoi), et il est donc normal que plein plein plein de choses ne fonctionnent pas !

Nous avons déjà pris du temps, de l’énergie, et un peu d’argent sur des ressources pourtant limitées (on vous a déjà dit qu’on ne vivait que de vos dons ? 😉 ). De plus, comme toujours, le code est libre, nous l’avons publié ici sur notre forge logicielle.

Avant d’aller plus loin, nous avons donc besoin de confirmer que ce projet vous intéresse. Si les dons ne sont pas assez importants, ou si les contradictions sont trop fortes : nous nous arrêterons là. (le code est libre, donc ça ne sera pas « perdu »).

Si, par contre, vous trouvez ça pertinent, les possibilités de développements futurs sont innombrables. Citons par exemple :

  • Reprendre complètement le design et l’accessibilité (en mode prototypage, nous sommes allé⋅es très vite, et Lokas est donc très perfectible) ;
  • Possibilité de (re)transcrire le fichier de son choix (par exemple issu d’une vidéo ou d’une autre application) ;
  • Ajouter un mode « web » à l’application. C’est à dire la possibilité d’utiliser Lokas depuis son ordinateur (sur le modèle de ce que fait le serveur Scribe de nos ami⋅es des Céméa) ;
  • Ajouter la possibilité de synthèses automatiques des transcriptions, pour retrouver rapidement les points clés ;
  • Traduire l’application (et le site web) dans d’autres langues que le français et l’anglais ;
  • Possibilité d’éditer et corriger la transcription directement depuis votre téléphone ;
  • Donner la possibilité d’obtenir la transcription dans la langue de son choix (par exemple une réunion en anglais, transcrite en français, ou l’inverse) ;
  • etc

Mais pour cela, il va nous falloir du temps salarié, et donc de l’argent. Donc, au risque de paraître insistant, nous vous invitons, si vous le pouvez, à nous faire un don.

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