Le Népal, le numérique et les logiciels libres

Le Népal n’est pas forcément en avance dans le développement numérique du pays[1].

Raison de plus pour adopter d’emblée le logiciel libre…

Drnan Tu - CC by-sa

L’impact de l’open source au Népal

Nepal and the impact of open source

Carolyn Fox – 8 mai 2012 – OpenSource.com
(Traduction framalang : Slystone, Cédric Corazza, Goofy et Kabaka)

Le Népal est l’un des pays les plus pauvres au monde. Il fait face à de nombreux problèmes liés à l’inégalité entre les sexes, à l’éducation, ou au retard des technologies numériques. Et pourtant le Népal se transforme peu à peu grâce à l’open source et aux technologies numériques. Mais à mesure que le Népal cherche à intégrer ses citoyens dans l’économie mondiale numérique, de nombreux obstacles se dressent en travers de son chemin : instabilité politique, difficulté d’accès physique, infrastructures déficientes et pauvreté rurale. En avril 2012, le Forum Economique Mondial a publié un rapport qui a caractérisé le Népal comme l’un des pays les moins connectés au monde, tout en bas du classement mondial.

L’accès à l’éducation secondaire continue d’être un gros problème au Népal, particulièrement pour les filles. Environ la moitié des enfants du pays souffre de malnutrition chronique. Un enfant sur trois travaille et on estime qu’ils sont 2,6 millions à travailler entre cinq et quatorze ans.

La situation des jeunes Népalaises est plus que difficile. Le taux d’alphabétisation pour les filles va ainsi de 28 à 42%, comparé au 65 à 87% pour les garçons. La plupart des filles sont humiliées, opprimées et exploitées dans leur vie quotidienne. Les écoles publiques népalaises requièrent des frais de scolarité et beaucoup de parents ne peuvent se permettre d’y envoyer leurs filles ; on attend souvent des filles qu’elles abandonnent leurs études pour aller travailler.

L’impact direct des logiciels libres et des technologies numériques peut sembler à des années-lumières pour beaucoup, mais le gouvernement népalais et les organisations non gouvernementales (ONG) commencent à apporter un peu de changements dans la vie quotidienne des enfants ruraux et pauvres, et particulièrement des filles. Le Plan pour l’éducation du gouvernement népalais, le Plan de réforme du secteur scolaire, l’Open Learning Exchange (OLE) Népal, le projet One Laptop Per Child (OLPC) et d’autres initiatives font de grands progrès pour résorber la fracture numérique — en dépit du récent rapport du Forum économique mondial. Le gouvernement népalais, OLE Népal et d’autres organisations aident à réduire la fracture numérique en mettant à disposition des technologies numériques et des supports open source qui sont absolument nécessaires au Népal pour accomplir un progrès significatif, ce que le Sommet mondial pour la société de l’information (SMSI) a souligné.

Depuis 2009, OLE Népal a distribué plus de 2500 ordinateurs portables dans 26 écoles népalaises et a œuvré à créer des supports libres pour éduquer et encourager les enfants népalais, particulièrement les filles. Les objectifs principaux de OLE Népal sont d’améliorer l’éducation publique et de réduire la disparité de l’accès à l’éducation. La distribution d’équipements n’était pas suffisante pour résoudre le sous-équipement numérique du pays selon OLE Népal. La création de supports éducatifs libres, avec l’aide des développeurs et programmeurs népalais locaux, a été la clé de voûte de la résolution du problème numérique du pays. En 2011, OLE Népal a collaboré avec le British Council pour créer « Learn English Kids », un programme ayant pour but d’enseigner gratuitement les fondamentaux de l’anglais aux enfants et adultes népalais . Environ 3400 étudiants dans 34 écoles à travers le pays ont utilisé l’application Learn English Kids. Auparavant, les possibilités et supports nécessaires pour apprendre l’anglais étaient rares.

Des initiatives comme celles de OLE Népal et de OLPC donnent aux filles rurales pauvres, en particulier, une chance d’accéder aux études et d’échapper à une vie de pauvreté. Le rôle des femmes népalaises et l’utilisation des technologies sont les clés du potentiel et de l’avenir du pays. OLE Népal s’est rendu compte de la nécessité d’une bibliothèque numérique libre et fondée sur un objectif d’éducation pour aider les citoyens à franchir la fracture numérique et à améliorer la qualité et l’accès à l’éducation. E-Pustakayla peut être installé à l’école ou dans un centre communautaire sans accès à Internet, offrant ainsi à tous une source d’informations et d’éducation ouverte et gratuite.

Ces initiatives ont contribué à augmenter le taux d’alphabétisation et ont encouragé la création de communautés numériques au Népal. Sambad par exemple, est un projet de recherche sur la façon dont la technologie peut bénéficier aux analphabètes et illettrés du Népal. Une des possibilités consiste à créer des communautés numériques basées sur des communications audio ou visuelles, plutôt que sur du texte. Ces initiatives permettent aux Népalais de participer pleinement à la société numérique et sont une source d’émancipation et de changement social.

ALISON montre comment le monde du libre a un impact direct sur la vie des gens ordinaires au Népal. ALISON est une ressource en ligne gratuite pour l’apprentissage des bases et fondamentaux du monde du travail, proposant des cours numériques, des certificats ou des diplômes gratuitement aux citoyens népalais. Ce projet a le soutien du gouvernement népalais.

Le gouvernement du Népal est conscient de l’importance de l’alphabétisation numérique et du pouvoir du e-learning dans l’amélioration de la vie de ses citoyens. Celui-ci considère ALISON et d’autres programmes comme un moyen d’émancipation pour les Népalais et une source d’espoir en un développement durable avec l’aide du monde du libre et des technologies numériques.

Notes

[1] Crédit photo : Drnan Tu (Creative Commons By-Sa)




Les 20 personnalités préférées de l’Internet Libre

L’excellent quotidien d’information britannique The Guardian (que nous traduisons souvent ici) a récemment proposé une liste restreinte et subjective de vingt « fighters for Internet freedom ».

Stallman, Torvalds, Wales, Lessig, Assange, Sunde, Berners-Lee, Anonymous… Il y en a que nous connaissons bien ici. D’autres moins, mais c’est l’occasion de les découvrir[1].

Certains lecteurs regrettent ainsi par exemple l’absence de Cory Doctorow, Eben Moglen ou Mitchell Baker.

Qu’en pensez-vous ? Qui rajouteriez-vous ? Et pourquoi aucun français ni francophone ?

D’ailleurs s’il fallait faire une liste nationale vous choisiriez qui ?

(Petite liste alphabétique qui s’édite en fonction des commentaires : Philippe Aigrain, Jean-Pierre Archambault, Benjamin Bayart, Stéphane Bortzmeyer, Guillaume Champeau, Frédéric Couchet, Laurent Chemla, Loïc Dachary, Florence Dévouart, François Elie, Fabrice Epelboin, Roberto Di Cosmo, Christophe Espern, Sam Hocevar, Antoine Moreau, Tristan Nitot, Valentin Lacambre, Bernard Lang, Olivier Laurelli, Jean-Marc Manach, Jean Peyratout, Bernard Stiegler, Thierry Stoehr, Jérémie Zimmermann…)

Un billet à rapprocher de celui qui rendait hommage à quelques figures marquantes du monde du Libre : Sur la place des grands hommes du logiciel libre.

Aaron Brown - CC by-nc

Top 20 du Guardian : ceux qui se battent pour un Internet libre

The Guardian’s Open 20: fighters for internet freedom

Des hommes politiques et professeurs aux informaticiens en passant par le premier programmeur, les champions de l’Internet libre. Qui avons-nous oublié ? Faites votre propre liste ici.

Anonymous

Légions, partout
(Wikipédia)

Le cri de ralliement des Anonymous – « Nous sommes Anonymes. Nous sommes Légion. Nous ne pardonnons pas. Nous n’oublions pas. Redoutez-nous » (We are Anonymous. We are Legion. We do not forgive. We do not forget. Expect us) – n’est pas du goût de tout le monde, mais est certainement très connu. À l’inverse de son groupe frère Lulzsec, le collectif Anonymous est vraiment fragmenté et sans leader et a donc pu continuer malgré les arrestations du FBI qui ont paralysé Lulzsec. Les pirates ont récemment mis brièvement hors ligne le site web du ministère de l’intérieur anglais et certains des sites web les plus visités au monde en protestation contre les propositions de lois de surveillance d’internet.

Jacob Appelbaum

Militant, chercheur et développeur, Projet Tor
(Wikipédia)

Appelbaum, un chercheur en informatique à l’Université de Washington, est l’un des principaux membres du projet Tor, qui permet de garantir l’anonymat de milliers d’internautes à travers le monde. Egalement connu comme le principal défenseur du groupe, Appelbaum a attiré l’attention du public après avoir été arrêté et fouillé à de nombreuses reprises par des douaniers américains, qui lui ont confisqué son matériel électronique, après qu’il a défendu Julian Assange pendant une conférence.

Julian Assange

Éditeur en chef, WikiLeaks
(WikipédiaFramablog)

La force motrice derrière Wikileaks, Assange a coordonné la publication de documents secrets concernant les guerrres en Afghanistan et en Irak, de fichiers de prisonniers de la Baie de Guantanamo, et de 250 000 câbles diplomatiques. Assange est quelqu’un qui divise l’opinion, à cause des nombreuses polémiques qui l’entourent mais malgré cela (ou peut-être grâce à cela), il est sûrement le chef de file du mouvement pour un Internet libre et un interlocuteur important.

John Perry Barlow

Co-fondateur, Electronic Frontier Foundation
(Wikipédia)

Fondée en 1990, l’EFF se décrit elle-même comme « la première ligne de défense » lorsque les libertés numériques sont menacées. Grâce à un mélange d’action directe, d’actions en justice et de lobbying dans le milieu politique, le groupe défend la liberté d’expression et se bat contre la surveillance et les problèmes de propriété intellectuelle. L’ancien parolier des Grateful Dead est un des membres fondateurs de l’EFF et a depuis été l’un de ses plus importants porte-parole.

Sir Tim Berners-Lee

Inventeur du world wide web
(WikipédiaFramablog)

Étant l’inventeur d’une des parties les plus visible de l’Internet (le world wide web), la place de Berners-Lee dans l’histoire de l’Internet était déjà réservée. Il ne s’est cependant pas reposé sur ses lauriers: il joue un rôle important dans la promotion de l’open data jusque dans les hautes sphères des gouvernements à travers le monde, il fait également campagne contre un internet à « deux vitesses ». Il s’est aussi récemment excusé pour les deux slashes au début d’une adresse web (http://), reconnaissant qu’ils sont «?complètement inutiles?».

Heather Brooke

Journaliste et militante
(Wikipédia)

Militante pour la liberté d’information et contre la surveillance des états, Heather Brooke a eu un rôle capital dans les procès qui ont permis de réveler les abus dans le système de dépense du premier ministre britannique. Durant ses recherches sur la culture hacker et l’activisme en ligne, Brooke s’est procuré les câbles diplomatiques de Wikilieaks et a été l’une des journalistes à travailler sur le projet. Elle siège au conseil de l’Open Rights Group et elle est professeur en résidence à la City University de Londres.

Bram Cohen

Scientifique en chef, BitTorrent
(Wikipédia)

Bram Cohen n’est pas un homme populaire à Hollywood. Cohen a non seulement inventé la technologie du peer-to-peer qui est derrière le réseau BitTorrent, mais a également mis au point le logiciel qui permet aux utilisateurs de partager leurs fichiers. La technologie revendique plus de 100 millions d’utilisateurs actifs chaque mois, téléchargeant à peu près 400 000 fichiers chaque jour – quelques-uns sont légaux, mais pour beaucoup, il s’agit de films, musiques et programmes télé protégés par le droit d’auteur.

Rickard Falkvinge

Fondateur, le parti Pirate
(WikipédiaFramablog)

Falkvinge a fondé le parti Pirate Suédois en 2006 afin de se concentrer sur la réforme des lois sur le droit d’auteur, les brevets et le partage de fichiers. Le parti a maintenant une présence souvent marginale dans 22 pays, voire significative en Suède, où il dispose de deux députés européens, ainsi qu’en Allemagne, où il est la troisième force politique du pays.

Birgitta Jonsdottir

Membre du Parlement, The Movement, Islande
(Wikipédia)

Une poètesse et militante devenue femme politique, Jonsdottir est élue au parlement islandais depuis 2009. Principalement connue pour son rôle dans la diffusion de la vidéo WikiLeaks Collateral Murder au grand public, Jonsdottir a également eu un rôle prépondérant dans l’effort qu’a fait l’Islande pour être un paradis de la liberté d’expression, et c’est l’une des plaignantes dans les poursuites contre le gouvernement américain concernant les pouvoirs de surveillance que permet la loi NDAA.

Dr Susan Landau

Chercheur en cyber-sécurité, Membre de Guggenheim
(Wikipédia)

Susan Landau est professeur invitée du département de sciences informatiques de l’Université d’Harvard avec plus de 30 ans de publications sur la cyber-sécurité, la surveillance et la cryptographie derrière elle. Elle milite pour le respect de la vie privée des utilisateurs et dénonce les systèmes de surveillance installés sur les canaux de communication. Elle combat également pour la cause des femmes dans les sciences, et dirige la mailing list ResearcHers. Elle a gagné le prix Women of Vision social impact en 2008.

Lawrence Lessig

Fondateur, Creative Commons
(WikipédiaFramablog)

Tandis que que beaucoup d’hacktivistes se contentent simplement d’ignorer les lois et en risquent donc les conséquences, Lawrence Lessig a suivi une approche plus douce, en introduisant un type de licence qui autorise le partage de contenu sans crainte de poursuites. Les personnes qui créent des œuvres qui devraient normalement être soumises au droit d’auteur peuvent utiliser les licences Creative Commons (CC) qui autorisent une ré-utilisation libre, en y adjoignant une clause d’usage non-commercial ou de non-modification s’ils le souhaitent. Plus de 100 millions d’images sont déjà disponibles sur internet sous licences Creative Commons.

Ada Lovelace

Programmeuse
(Wikipédia)

Ada Lovelace, morte en 1852, sert d’inspiration à un internet libre. Lovelace travaillait avec Charles Babbage sur sa machine analytique, a écrit certains des premiers programmes informatiques, et elle est donc considérée comme la première programmeuse d’ordinateur. À l’opposé de Babbage, elle avait compris le rôle que pourraient jouer les ordinateurs pour faire de la musique, de l’art et plus encore. Ces dernières années, le jour Ada Lovelace est devenu une institution sur Internet, promouvant le rôle des femmes dans les sciences et technologies, et modifiant la vision que l’on a d’elles dans les médias.

Alex MacGillivray

Conseiller Général, Twitter
(Wikipédia)

Alex MacGillivray, l’avocat général de Twitter, est celui a qui l’on attribue le mantra de l’entreprise « la branche liberté d’expression du parti de la liberté d’expression » (the free-speech wing of the free-speech party), et a joué un rôle important dans les efforts qu’a faits le site pour rester le plus transparent possible sans pour autant se rendre hors-la-loi. Ses récents efforts en vue de limiter la censure non plus au niveau planétaire mais pays par pays, ont d’abord provoqué une fronde mais ont finalement été vus par beaucoup comme une façon habile de n’adopter que le minimum des restrictions exigées par la législation.

Clay Shirky

Ecrivain, professeur assistant à l’Université de New York
(WikipédiaFramablog)

Clay Shirky a été l’un des premiers ardents défenseurs du crowdsourcing, de la collaboration et de l’aggrégation de contenus et du journalisme en ligne, et donc des institutions ouvertes nécessaires à leur développement. Shirky encourage des institutions à se remettre en question dans un monde toujours plus connecté, et il est crédité comme l’une des personnes qui a inspiré la politique de journalisme ouvert du Guardian.

Richard Stallman

Fondateur, Free Software Foundation
(WikipédiaFramablog)

L’un des défenseurs les plus ardents du logiciel libre (et non open source, terme qu’il déteste), Stallman fait le tour du monde afin de montrer les avantages qu’apportent des logiciels libres d’utilisation et libres de modification. Cependant, Stallman est davantage qu’un porte-parole, il est également l’un des principaux programmeurs de GNU (un système d’exploitation qu’il a mis au point).

Peter Sunde

Co-foundateur, Pirate Bay
(WikipédiaFramablog)

Peter Sunde était une des personnes responsables de Pirate Bay, un moteur de recherche permettant l’accès à plus de 4 millions de fichiers sur le réseau BitTorrent, et un portail clé pour toute personne échangeant des fichiers. Le site a longtemps évité les tentatives de la justice pour l’interdire, mais Sunde est déjà passé à autre chose, en fondant Flattr, un site de micro-paiement qui a pour but de rétribuer financièrement et volontairement les sites indépendants et les blogs. Pendant ce temps, Pirate Bay prétend mettre au point des serveurs embarqués sur des drones, afin de s’assurer que le gouvernement ne sera jamais capable de les déconnecter.

Aaron Swartz

Programmeur, militant
(Wikipédia)

Si un vendeur sur un marché tunisien a lancé le printemps arabe, il est peut être juste de créditer Aaron Swartz d’avoir lancé le «?printemps universitaire?», si les accusations le concernant s’avèrent fondées. Swartz est accusé d’avoir téléchargé plus de 4 millions d’articles universitaires du site JSTOR afin d’améliorer l’accès à la littérature savante. Après son inculpation, et alors qu’il se dit innocent, d’autres personnes ont commencé à partager des milliers de papiers sur le net sans aucune permission. Maintenant, l’accès aux publications universitaires est en train d’être libéré par des moyens légaux et de plus en plus rapidement, avec comme principal appui financier le Wellcome Trust, et certains ministres du Royaume Uni qui soutiennent maintenant le libre accès.

Professeur Sebastian Thrun

Fondateur, Udacity
(Wikipédia)

Le professeur Thrun n’était pas un homme qui avait à se soucier de son prochain salaire?: en tant que professeur permanent en intelligence artificielle à la prestigieuse Stanford University, il avait un poste à vie. Non satisfait d’enseigner à un nombre restreint d’étudiants, il a donné accès à ses cours en ligne gratuitement, à travers un site nommé Udacity. La première année, plus de 140 000 étudiants se sont inscrits à ses cours.

Linus Torvalds

Architecte en chef, Linux
(WikipédiaFramablog)

Pour ceux qui ne seraient pas désireux d’avoir à choisir entre Microsoft Windows et Apple Mac OSX, une alternative libre existe, qui s’accompagne d’une valeur ajoutée (pour les programmeurs) : elle est ouverte aux modifications et personnalisations, cette alternative c’est Linux. Linus Torvalds est un développeur Finno-Américain qui a démarré ce projet, et a depuis lors montré la voie à de nombreuses distributions en tant que défenseur de l’open source et des logiciels libres.

Jimmy Wales

Fondateur et membre du Board, Fondation Wikimedia
(WikipédiaFramablog)

Jimmy Wales est l’homme derrière Wikipédia, la plus grosse encyclopédie au monde (avec 21 millions d’articles), rédigé exclusivement par des bénévoles, grâce à son système d’édition ouvert. De plus, Wales a récemment gagné en légitimité en matière d’Internet ouvert en encourageant le comité du site à sortir de sa politique habituelle de neutralité afin d’organiser un black-out d’une journée de la version anglophone du site, en réponse à la proposition de loi SOPA contre la piraterie.

Qui avons-nous oublié ? Faites-le nous savoir en proposant vos propres choix dans les commentaires.

Notes

[1] Crédit photo : Aaron Brown (Creative Commons By-Nc)




Geektionnerd : Dépêches Melba VI

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Liens connexes :

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Lire, écrire, compter et coder ? Faut pas déconner !

L’informatique est de plus en plus présente dans nos vies et globalement toujours aussi absente dans l’éducation. Résultat, une sorte de frénésie s’est emparée de la plupart des observateurs : il faut apprendre à la société à coder !

Le Framablog n’est d’ailleurs pas le dernier à participer au mouvement :

Une voix discordante vient cependant de se faire entendre récemment en suscitant de nombreuses réactions.

Une voix de l’intérieur, puisqu’il s’agit de Jeff Atwood, développeur de renom[1].

One Laptop per Child - CC by

N’apprenez pas à coder, merci.

Please Don’t Learn to Code

Jeff Atwood – 15 mai 2012 – CodingHorror.com
(Traduction Framalang : Goofy)

Le nouveau mantra « tout le monde devrait apprendre à programmer » a pris des proportions tellement incontrôlables ces derniers temps que même le maire de New York a pris cette résolution du nouvel an.

Tweet - Mike Bloomberg

Voilà certes une noble déclaration propre à engranger les suffrages de la communauté techno de NYC, mais si le maire de la ville de New York a vraiment besoin de tricoter du code JavaScript pour faire son travail, c’est un symptôme de grave maladie pour la vie politique de l’état de New York. Même si M. Bloomberg se mettait vraiment à «apprendre à coder », que Adam Vandenberg me pardonne cet emprunt, je crois qu’on aboutirait à quelque chose comme :

10 PRINT "JE SUIS LE MAIRE"
20 GOTO 10

Heureusement, les risques qu’une telle prouesse technologique se produise sont proches de zéro, et pour une bonne et simple raison : le maire de New York passera plutôt son temps à faire le travail pour lequel les contribuables le paient, et c’est tant mieux. Selon la page d’accueil du secrétariat du maire, il s’agit de lutter contre l’absentéisme scolaire, pour l’amélioration des services de transports en commun, pour l’équilibre de budget municipal en 2013 et… dois-je vraiment poursuivre ?

Je m’adresse à ceux qui prétendent que savoir programmer est une compétence essentielle que nous devrions enseigner à nos enfants, au même titre que lire, écrire et compter. Pourriez-vous m’expliquer en quoi Micheal Bloomberg accomplirait mieux sa tâche quotidienne à la tête de la plus grande ville des USA s’il se réveillait un beau matin en étant devenu un petit génie de la programmation en Java ? Il me semble évident qu’être un lecteur averti, un écrivain talentueux, et posséder le minimum requis en mathématiques sont essentiels à l’exécution du travail d’un politicien. Et à n’importe quel autre emploi du reste. Ça l’est beaucoup moins pour ce qui concerne la maîtrise des variables, des fonctions, des pointeurs ou de la récursivité,

Attendez, j’adore programmer. Je suis également convaincu que la programmation c’est important… mais dans le contexte adéquat, et pour certaines personnes. Tout comme un grand nombre de compétences. Je n’inciterais pas tout le monde à apprendre la programmation, pas plus que je ne pousserais tout le monde à apprendre la plomberie. Ce serait ridicule, non ?

Plumbers

La mode du « tout le monde devrait apprendre à coder » n’est pas seulement néfaste parce qu’elle met la programmation sur un pied d’égalité avec d’autres compétences comme la lecture, l’écriture et le calcul. Selon moi, elle est mauvaise pour un grand nombre d’autres raisons.

  • Elle part du postulat que le monde entier désire ardemment davantage de code. En trente ans de carrière comme programmeur, j’ai constaté que… ce n’est pas le cas. Devriez-vous apprendre à écrire du code ? Non, je n’en démords pas. Vous devriez apprendre à écrire le moins de code possible. Et même pas de code du tout, idéalement.
  • Elle présuppose que la programmation est un but en soi. Les développeurs de logiciels ont tendance à devenir des drogués de la programmation qui croient que leur travail consiste à écrire du code. Ils se trompent. Leur travail consiste à résoudre des problèmes. Ne célébrez pas la création de code, célébrez la mise au point de solutions. Nous avons déjà une pléthore de codeurs complètement accros à l’idée d’ajouter encore une ligne de code.
  • Elle met la charrue avant les bœufs. Avant de vous précipiter pour apprendre à coder, analysez soigneusement la nature exacte de votre problème. Avez-vous seulement un problème, au fait ? Êtes-vous capable de l’expliquer à d’autres de manière compréhensible ? Avez-vous mené une recherche approfondie des possibles solutions à ce problème ? La programmation permet-elle de résoudre le problème ? En êtes-vous sûr ?
  • Elle suppose qu’il existe une cloison mobile de l’épaisseur d’une feuille à cigarette entre apprendre à programmer et en faire une activité professionnelle rémunérée. Regardez un peu ces nouveaux programmeurs à qui l’on propose des emplois payés sur la base de $79k/an (NdT : environ 62 000 euros) après avoir assisté à une simple session d’entraînement de deux mois et demi ! Vous pouvez même apprendre le Perl par vous-même en 24 heures ! Certes j’adore que la programmation soit un domaine égalitaire dans lequel les diplômes et les certifications sont sans objet en regard de l’expérience, mais il va bien falloir vous y plonger pendant dix mille heures comme nous tous.

Je suppose que je peux accepter l’idée qu’apprendre un peu de programmation vous permet de savoir reconnaître ce qu’est le code, et quand le code peut être un moyen adéquat d’aborder un problème que vous rencontrez. Mais je peux aussi bien repérer des problèmes de plomberie quand j’en vois sans avoir bénéficié d’une formation spécifique dans ce domaine. La population au sens large (et ses dirigeants politiques) tirerait probablement le meilleur profit d’une meilleure compréhension du fonctionnement d’un ordinateur et d’Internet. Être capable de se débrouiller avec Internet est devenu une compétence vitale de base, et c’est ce qui devrait être notre obejctif principal prioritaire, avant de nous jeter à corps perdu dans la programmation.

Merci de ne pas argumenter en faveur de l’apprentissage de la programmation pour le plaisir d’apprendre à programmer. Ou pire encore pour le nombre de zéros sur le bulletin de paie. Je suggère humblement que nous passions plutôt du temps à apprendre à…

  • Mener des recherches avec avidité, et comprendre comment fonctionnent les choses autour de nous à un niveau basique.
  • Communiquer efficacement avec les autres êtres humains.

Voilà des compétences qui vont bien au-delà de la pure programmation et qui vous aideront dans toutes les circonstances de votre vie.

Notes

[1] Crédit photo : One Laptop per Child (Creative Commons By)




Entretien avec iMaugis, une SSLL proposant des solutions libres (TNI…) pour les écoles

En France, l’équipement en matériel informatique des écoles primaires est très disparate, leur financement étant à la charge des municipalités. Quelques plans ministériels (Informatique pour tous en 1985 et École Numérique Rurale en 2009) ont bien tenté de lancer une certaine dynamique mais on constate que les solutions libres ont bien souvent été oubliées dans ces plans (cf cet article du Framablog) qui ressemblent parfois à un subventionnement indirect aux éditeurs de logiciels propriétaires et aux industriels.

Il existe cependant quelques sociétés dont l’objectif est bien moins le profit que de favoriser l’essor du logiciel libre tout en pérennisant des emplois, comme Ryxeo par exemple qui développe la solution AbulÉdu depuis maintenant de nombreuses années.

Nous avons découvert, lors d’un reportage télévisé sur France 3, une toute jeune SSLL (et bientôt SCIC) ardennaise, iMaugis dont les trois coprésidents ont accepté de répondre à quelques questions.

—> La vidéo au format webm

Entretien avec iMaugis

Framasoft : Pouvez vous vous présenter en quelques mots ?

Fabian Pilard : Coprésident en charge de la représentativité d’iMaugis

Julien Mousseaux : Coprésident en charge de la gestion et du développement, fan de geekeries et de booonnes bières!

Remy Mondi : Coprésident en charge de l’animation

Comment avez vous connu les logiciels libres ?

Fabian : un peu par hasard, je me suis retrouvé service civique dans un GULL il y a 2 ans, n’étant pas informaticien, je me retrouve surtout dans la philosophie du logiciel libre.

Rémy : Par le biais d’un ami. J’ai commencé avec Firefox et OpenOffice puis j’ai franchi le cap en installant Ubuntu par la suite.

Julien : Dans une boutique de presse, un mag vendu avec une Red Hat 6.2 que je n’ai jamais réussi à installer 😀 Puis en 2003 quand l’ADSL est arrivée dans notre coin perdu

iMaugis, qu’est-ce que c’est ?

iMaugis est une société de services en logiciels libres sous forme (bientôt !) de coopérative d’intérêt collectif (SCIC).

C’est également une aventure humaine qui nous permet de travailler dans un domaine qui nous passionne, celui de l’informatique, tout en défendant des valeurs, celles des logiciels libres et de l’économie sociale et solidaire.

Qu’est ce qui différencie une SSLL (Société de Services en Logiciels Libres) comme iMaugis d’une SSII (Société de services en ingénierie informatique) ?

Nos prestations ne s’orientent que sur des technologies libres. Par conviction philosophique et technologique.

On peut aussi parler de la différence de taille concernant le futur statut juridique de la SCIC (Société coopérative d’intérêt collectif) impliquant un mode de gouvernance alternatif mais démocratique.

Racontez-nous la génèse d’iMaugis ?

iMaugis est né d’une réflexion d’une dizaine de membres de l’association ILArd (Informatique Libre en Ardennes) qui, au delà de de la promotion du libre avaient pour volonté de répondre à un besoin sur le territoire, et créer de l’emploi pérenne en Ardenne.

Nous remercions Guillaume (président du GULL Ilard) qui a eu dés le début l’idée d’une structure coopérative.

Et depuis, quel chemin avez-vous parcouru ?

Les choses avancent… (parole de politicien), iMaugis est sur le marché concurrentiel, nous commençons à réaliser des prestations. La création d’une société, peu importe la forme, est toujours difficile, mais nous restons confiants et débordons d’idées !

Nous commençons à avoir une certaine visibilité sur le territoire ardennais

Arrivez-vous déjà à dégager des salaires grâce à ces prestations liées au libre ?

Par le biais de subventions à la création d’activités, nous arrivons à dégager quelques fonds, mais pas de quoi rouler sur l’or pour le moment (ce n’est d’ailleurs pas l’objectif). J’ai toujours une autre activité à côté.

Dans le reportage que France 3 vous a consacré, on vous voit présenter un TBI (Tableau Blanc Interactif) annoncé comme un des moins cher du monde, pourriez-vous nous en dire un peu plus ?

Ah la la, France3, toujours à la recherche du scoop 🙂 , le moins cher du monde, je ne sais pas. Moins cher que les solutions existantes sûrement !

Et pourrait-on avoir un ordre d’idée du prix ?

Moins cher ! en terme de matériel, nous sommes à moins de 1000€ ordinateur libre et projecteur compris, ensuite nous proposons du service ( accompagnement, formation ) autour de cette offre.

Comment pensez-vous pouvoir trouver votre place à côté des multinationales du TBI ?

Nous ne vendons pas la même chose, nous ne sommes pas dans la même logique, je pense que nous sommes complémentaires, nous nous orientons plutôt vers les structures ayant peu de moyens et/ou partageant nos valeurs.

De plus nous avons mis au point une IHM (Interface Homme Machine) qui facilite l’usage d’un ordinateur via un TBI.

Au niveau système d’exploitation, utilisez-vous des distributions éducatives existantes (AbulÉdu, ASRI Éducation …) ou bien vous appuyez-vous sur des distributions plus généralistes ?

Nous en avons testé une demi douzaine et elles sont toutes très complètes, mais nous avons besoin d’un système personnalisé et adapté au TBI. Nous nous appuyons donc sur une distrib’ généraliste pour le moment, mais l’objectif est de créer la nôtre. D’ailleurs nous avons déjà l’interface qui nous semble adaptée pour le TBI et la tablette.

Dans le reportage, on peut également voir que vous vous appuyez notamment sur Sankoré. Quels sont les autres logiciels libres principaux au cœur de votre système ?

Sankoré reste LE logiciel libre pour un usage TBI, mais il y a aussi GCompris bien sûr, Beneyluschool, un ENT libre très intéressant, différents logiciels provenant du Terrier, OOo4Kids, Childsplay, Omnitux, Dicorime, Tuxmaths, Tuxpaint, CaRMetal… et des ressources pédagogiques libres.

Et pour la reconnaissance des caractères, avez-vous trouvé ou développé une solution libre convaincante ?

Non, c’est effectivement un domaine où les différents logiciels libres existants n’ont pas encore atteint le niveau des meilleurs solutions propriétaires.

Sur votre site, un de vos produits est appelé École Numérique Pour Tous. Pouvez nous expliquer en quoi cela consiste précisément ?

École Numérique Pour Tous 2.0 : ENPT car c’est une réponse à école numérique rurale.

  • 2.0 car cela rentre dans l’initiative Ordi 2.0 (Reconditionnement d’ordinateurs pour réduire les coûts d’investissements et contribuer au développement durable).
  • ENPT 2.0 est donc une offre clé en main proposant solution matérielle, logicielle et de services adaptés afin d’équiper les écoles.

Quelles sont les différences entre ENPT et d’autres solutions propriétaires ?

ENPT est un ensemble matériel (TBI, ordis en fond de classe, serveur (fichier, impression, proxy, filtrage)) + logiciel, le tout servi avec une interface adaptée soit pour une utilisation avec un stylet (TBI) soit pour une utilisation par un enfant (grosses icônes facilement cliquables, impossibilité de supprimer ou rajouter des logiciels autrement que par l’administrateur du système, l’élève ne pourra utiliser que ce dont il a réellement besoin).

Le but est de faciliter l’usage des TICE tant pour les enseignants que pour les élèves et de favoriser l’accompagnement et la formation grâce à l’économie réalisée sur les frais de licence ainsi que sur l’utilisation de matériel reconditionné. Les solutions propriétaires sont basées sur du matériel systématiquement neuf (et donc onéreux), pas forcément raccord avec le reste des équipements de l’école (avec le TBI par ex) et ne bénéficient souvent pas de suites logicielles éducatives aussi complètes que celle que nous pouvons intégrer grâce aux logiciels libres. De plus la solution ENPT est beaucoup plus “éthique” et s’inscrit dans une véritable mission de service publique car les élèves seront égaux et pourront réutiliser les logiciels vu en classe chez eux (encore un avantage du logiciel libre).

La reporter de France 3 indique que vous avez des contacts avec l’éducation nationale. Qu’en est-il réellement ?

Oui, depuis le début du projet, nous avons voulu travailler en coopération avec l’éducation nationale. Nous avons donc rencontré l’inspection académique des Ardennes pour leur présenter notre projet et ainsi lancer une démarche de co-construction avec eux afin de répondre au mieux aux attentes des enseignants.

Et quel a été leur accueil au départ ?

Intéressé notamment par l’aspect financier puisque ils savent que c’est LA problématique des collectivités pour l’équipement en NTIC. Les différents conseillers TICE rencontrés ne sont pas contre le logiciel libre même s’ils reconnaissent un lobbying important des multinationales (ils nous ont parlé de fenêtres, pas vraiment compris…) …et de certaines personnes qui ne savent plus se servir de leur machine si l’icône ronde est devenue ovale ! (ça marche aussi avec une carrée devenant rectangulaire !).

Et par la suite ?

En toute logique, nous devrions mettre en place un pilote dans une école de Charleville-Mézières en 2012.




Regarde le capitalisme tomber à l’ère de la production Open Source

« Le logiciel libre, l’innovation partagée et la production collaborative menacent le capitalisme tel que nous le connaissons. » C’est ainsi que Michel Bauwens résume son propos dans les colonnes du site d’Aljazeera.

Le menace vient du fait qu’à l’aide d’Internet nous créons beaucoup plus de valeur d’usage (qui répond à nos besoins) que de valeur d’échange (qui se monétise facilement[1]).

Menace pour les uns, opportunité et espoir pour les autres…

Nick Ares - CC by-sa

La question à 100 milliards de dollars de Facebook : Le capitalisme survivra-t-il à « l’abondance de valeur » ?

The $100bn Facebook question: Will capitalism survive ‘value abundance’?

Michel Bauwens – 29 février 2012 – Aljazeera

(Traduction Framalang/Twitter/Fhimt.com : Lambda, vg, goofy, fcharton, btreguier, HgO, Martin, bu, pvincent, bousty, pvincent, deor, cdddm, C4lin, Lamessen et 2 anonymous)

Le logiciel libre, l’innovation partagée et la production collaborative menacent le capitalisme tel que nous le connaissons.

Facebook exploite-t-il ses utilisateurs ? Et d’où vient la valeur estimée à 100 milliards de dollars de la société ?

Ce débat n’est pas nouveau. Il ressurgit régulièrement dans la blogosphère et dans les cercles universitaires, depuis que Tiziana Terranova a inventé le terme de « travail libre/gratuit » (NdT : Free Labour) pour qualifier une nouvelle forme d’exploitation capitaliste du travail non rémunéré – faisant d’abord référence aux téléspectateurs de médias audiovisuels traditionnels et maintenant à une nouvelle génération d’utilisateurs de médias sur des sites comme Facebook. Cet avis peut se résumer très succinctement par le slogan : « Si c’est gratuit, c’est que vous êtes le produit ».

Ce terme a été récemment relancé dans un article de Christopher Land et Steffen Böhm, de l’Université de l’Essex, intitulé « Ils nous exploitent ! Pourquoi nous travaillons tous pour Facebook gratuitement ». Dans ce court essai, ils affirment haut et fort que « nous pouvons placer les utilisateurs de Facebook dans la catégorie des travailleurs. Si le travail est considéré comme une activité productive, alors mettre à jour son statut, cliquer sur j’aime en faveur d’un site internet, ou devenir ami avec quelqu’un crée la marchandise de base de Facebook. »

Cette argumentation est toutefois trompeuse, car elle mélange deux types de créations de valeurs qui ont déjà été reconnues différentes par les économistes politiques au XVIIIe siècle. La différence se trouve entre la valeur d’usage et la valeur d’échange. Pendant des milliers d’années, dans le cadre de production non capitalistes, la majorité des travailleurs produisait directement de la « valeur d’usage » – soit pour subvenir à leurs propres besoins, soit sous forme de contributions pour la classe dirigeante du moment. C’est seulement avec l’arrivée du capitalisme que la majorité de la population active a commencé à produire de la « valeur d’échange » en vendant son travail aux entreprises. La différence entre ce que nous sommes payés et ce que les gens payent pour le produit que nous faisons est la « plus-value ».

Mais les utilisateurs de Facebook ne sont pas des travailleurs produisant des marchandises pour un salaire, et Facebook ne revend pas ces marchandises sur le marché pour créer de la plus-value.

Bien sûr, les utilisateurs de Facebook ne créent pas directement une valeur d’échange, mais plutôt une valeur de communication. Ce que fait Facebook, c’est permettre le partage et la collaboration autour de sa plateforme. En autorisant, encadrant et « contrôlant » cette activité, on crée des profils et des centres d’intérêt. Et ce sont ces profils et ces centres d’intérêt qui sont par la suite vendus aux publicitaires, pour un montant estimé de 3,2 milliards de dollars par an (NdT : environ 2,4 milliards d’euros), soit une recette publicitaire par utilisateur d’à peine 3,79 dollars (NdT : 2,85 euros).

En fait Facebook fait beaucoup plus que vendre de votre attention et disponibilité (NdT : temps de cerveau disponible ?). Leur connaissance de notre comportement social, individuel et collectif, a une importance stratégique indiscutable aussi bien pour les politiques que pour les sociétés commerciales. Mais cette plus-value vaut-elle réellement 100 milliards de dollars ? Cela reste un pari spéculatif. Pour le moment, il est probable que le quasi milliard d’utilisateurs de Facebook ne trouve pas les 3,79 dollars de recettes publicitaires très exploitables, d’autant plus qu’ils ne payent pas pour utiliser Facebook, et qu’ils utilisent le site volontairement. Ceci étant dit, il y a un prix à payer à ne pas utiliser Facebook : un certain isolement social par rapport à ceux qui l’utilisent.

Créer de la rareté

Il est néanmoins important de noter que Facebook n’est pas un phénomène isolé, mais fait partie d’une tendance bien plus large et lourde de nos sociétés connectées : l’augmentation exponentielle de la création de valeur utile par des publics productifs, ou « productilisateurs » (NdT « produsers »), comme Axel Bruns aime à les appeler. Il faut en effet bien comprendre que cela crée un problème de taille pour le système capitaliste, mais aussi pour les travailleurs tels qu’on les conçoit traditionnellement. Les marchés sont définis comme des moyens d’attribution de ressources rares, et le capitalisme n’est en fait pas simplement un système « d’attribution » de la rareté mais aussi un système de création de la rareté, qui ne peut accumuler du capital qu’en reproduisant et développant les conditions de cette rareté.

Sans tension entre l’offre et la demande, il ne peut y avoir de marché ni d’accumulation de capital. Or ce que font actuellement ces « productilisateurs », c’est créer des choses, avant tout immatérielles comme de la connaissance, des logiciels ou du design, aboutissant à une abondance d’information facile à reproduire et à exploiter

Cela ne peut se traduire directement en valeur marchande, car ce n’est pas du tout rare ; c’est au contraire surabondant. De plus, cette activité est exercée par des travailleurs du savoir (NdT knowledge workers) dont le nombre augmente régulièrement. Cette offre surabondante risque de précariser l’emploi des travailleurs du savoir. Il en découle un exode accru des capacités de production en dehors du système monétaire. Par le passé, à chaque fois qu’un tel exode s’est produit, les esclaves dans l’Empire Romain en déclin, ou les serfs à la fin du Moyen Age, cela a coïncidé avec l’avènement de conditions pour des changements économiques et sociétaux majeurs.

En effet, sans le support essentiel du capital, des biens et du travail, il est difficile d’imaginer la perpétuation du système capitaliste sous sa forme actuelle.

Le problème est là : la collaboration via Internet permet une création massive de la valeur d’usage qui contourne radicalement le fonctionnement normal de notre système économique. D’habitude, les gains de productivité sont en quelque sorte récompensés et permettent aux consommateurs d’en tirer un revenu et d’acheter d’autres produits.

Mais ce n’est plus le cas désormais. Les utilisateurs de Facebook et Google créent de la valeur commerciale pour ces plateformes, mais de façon très indirecte, et surtout ils ne sont pas du tout récompensés pour leur propre création de valeur. Leur création n’étant pas rémunérée sur le marché, ces créateurs de valeur n’en tirent aucun revenu. Les médias sociaux sont en train de révéler un important défaut dans notre système économique.

Nous devons relier cette économie sociale émergente, basée sur le partage de la création, avec les plus authentiques expressions de la production collaborative orientée vers le bien commun, comme en témoignent déjà l’économie de l’Open Source et de l’usage équitable des contenus libres (dont la contribution est estimée à un sixième du PIB américain). Il ne fait pas de doute sur le fait qu’un des facteurs clés du succès actuel de la Chine réside en une savante combinaison de l’Open Source, tel que l’exemple de l’économie locale à Shanzaï, avec une politique d’exclusion des brevets imposée aux investisseurs étrangers. Cela a offert à l’industrie chinoise une innovation ouverte et partagée en boostant son économie.

Même si l’économie de l’Open Source devient le mode privilégié de création des logiciels, et même si elle permet de créer des entreprises qui génèrent des chiffres d’affaires de plus d’un milliard d’euros, comme Red Hat, la conséquence globale est plutôt la déflation. Il a en effet été estimé que l’économie du libre réduisait annuellement de quelque 60 milliards de dollars le volume d’affaires dans le secteur des logiciels propriétaires.

Ainsi, l’économie de l’Open Source détruit plus de valeur dans le secteur propriétaire qu’elle n’en crée. Même si elle engendre une explosion de la valeur d’usage, sa valeur d’échange, monétaire et financière décroît.

La fabrication Open Source

Les mêmes effets surviennent quand le partage de l’innovation est utilisé dans la production physique, où il combine à la fois l’approche Open Source des moyens de distribution et l’affectation de capitaux (en utilisant des techniques comme la production communautaire, ou crowdfunding, et des plateformes dédiées comme Kickstarter).

Par exemple, la Wikispeed SGT01, une voiture qui a reçu cinq étoiles en matière de sécurité et peut atteindre 42,5 km/litre (ou 100 miles par gallon), a été developpée par une équipe de bénévoles en seulement trois mois. La voiture se vend au prix de 29.000 dollars, environ un quart du prix que pratiquerait l’indutrie automobile traditionnelle, et pour laquelle il aurait fallu cinq années de R&D ainsi que des millards de dollars.

Local Motors, une entreprise automobile ayant fait le choix du crowdsourcing et connaissant une croissance rapide, annonce qu’elle produit des automobiles 5 fois plus rapidement que Detroit, avec 100 fois moins de capitaux, et Wikispeed a réussi à mettre en place des temps de design et de production encore plus rapides. En ayant fait le pari de l’intelligence distribuée, la voiture Wikispeed a été pensée pour être modulaire, en utilisant des techniques de programmation logicielle efficaces et sophistiquées (telles que la méthode agile, Scrum et Extreme Programming), un design ouvert ainsi qu’une production effectuée par des PME locales.

Et Arduino, un simple petit circuit imprimé de prototypage electronique Open Source, fonctionnant sur le même principe que Wikispeed, provoque une baisse des prix dans son secteur et une extraordinaire effervescence dans les toujours plus nombreux fab labs (NdT : cf l’histoire d’Arduino). Si le projet de Marcin Jakubowsky Open Source Ecology rencontre le succès alors nous aurons à disposition de tous 40 différents types de machines agricoles bon marché rendant un village auto-suffisant. Dans tous les domaines où l’alternative de la production Open Source se developpe – et je prédis que cela affectera tous les domaines – il y aura un effet similaire sur les prix et les bénéfices des modèles économiques traditionnels.

« Consommation collaborative »

Une autre expression de l’économie du partage est la consommation collaborative, ce que Rachel Botsman et Lisa Gansky ont démontré dans leurs récents livres respectifs What’s Mine Is Yours: The Rise of Collaborative Consumption et The Mesh: Why The Future of Business is Sharing. Il se développe rapidement une économie du partage autour du secteur des services affectant même les places de marché et les modes de vie des gens.

Par exemple, il a été estimé qu’il y a environ 460 millions d’appartements dans le monde développé, et que chaque foyer possédait, en moyenne, une valeur de 3000 dollars disponibles en biens inutilisés. Il y aurait un intérêt économique manifeste à utiliser ces ressources qui dorment. Pour la plus grande part d’ailleurs, elles ne seront pas rentabilisées, mais échangées ou troquées gratuitement. Le modèle même du partage payant aura un effet de dépression sur la consommation de produits neufs.

De tels développements sont bénéfiques pour la planète et bons pour l’humanité, mais globalement sont-ils bons pour le capitalisme ?

Qu’arrivera-t-il à ce dernier à l’heure du développement croissant des échanges via les médias sociaux, de la production et de la consommation collaborative des logiciels et des biens ?

Qu’arrivera-t-il si notre temps est de plus en plus dédié à la production de valeur d’usage (une fraction de ce qui crée la valeur monétaire) sans bénéfices substantiels pour les producteurs de valeur d’usage ?

La crise financière commencée en 2008, loin de diminuer l’enthousiasme pour le partage et la production par les pairs, est en fait un facteur d’accélération de ces pratiques. Ce n’est plus seulement un problème pour des masses laborieuses de plus en plus précarisées, mais également pour le capitalisme lui-même, qui voit ainsi s’évaporer des opportunités d’accumulation et d’expansion.

Non seulement le monde doit faire face à une crise globale des ressources, mais il fait également face à une crise de croissance, car les créateurs de valeur ont de moins en moins de pouvoir d’achat. L’économie de la connaissance se révèle être un miroir aux alouettes, car ce qui n’est pas rare mais abondant ne peut pas soutenir la dynamique des marchés. Nous nous retrouvons donc face à un développement exponentiel de la création de valeur qui ne s’accompagne que d’un développement linéaire de la création monétaire. Si les travailleurs ont de moins en moins de revenus, qui pourra acheter les biens qui sont vendus par les sociétés ? C’est, pour simplifier, la crise de la valeur à laquelle l’Humanité doit faire face. C’est un challenge aussi important que le changement climatique ou l’accroissement des inégalités sociales.

La débâcle de 2008 était un avant-goût de cette crise. Depuis l’avènement du néolibéralisme, les salaires ont stagné, le pouvoir d’achat a été maintenu artificiellement par une diffusion irraisonnée du crédit dans la société. C’était la première phase de l’économie du savoir, au cours de laquelle seul le capital avait accès aux réseaux qu’il utilisait pour créer de gigantesques multinationales.

Avec la croissance continue de cette économie du savoir, une masse de plus en plus importante des valeurs échangées est constituée de biens intangibles et non plus physiques (NdT : cf capital immatériel). Le marché des changes néolibéral et ses excès spéculatifs peut être vu comme un moyen de tenter d’évaluer la part de valeur intangible, virtuelle, qui est ajoutée à la valeur réelle par la coopération. Il fallait que cette bulle explose.

Nous nous trouvons dans la seconde phase de l’économie du savoir, au cours de laquelle les réseaux sont en train d’être étendus à toute la société, et qui permet à tout un chacun de s’engager dans une production collaborative. Ce qui crée de nouveaux problèmes et engendre de nouveaux défis. Ajoutons à cela la stagnation des revenus, la diminution de la masse du travail salarié que cette production collaborative de valeur entraîne, et il évident que tout ceci ne peut être résolu dans le paradigme actuel. Y a-t-il dès lors une solution ?

Il y en a une mais elle sera pour le prochain cycle : elle implique, en effet, une adaptation de l’économie à la production collaborative, ouvrant par là-même les portes à un dépassement du capitalisme.

Michel Bauwens est théoricien, écrivain ainsi qu’un des fondateurs de la P2P (Peer-to-Peer) Foundation.

Notes

[1] Crédit photo : Nick Ares (Creative Commons By-Sa)




Geektionnerd : Dépêches Melba 3 (p0rn inside)

Un Gee-Mix des news de la semaine…

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Liens connexes, si cela vous a échappé :

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Comment j’ai appris à programmer ou le témoignage qui donnait envie de s’y mettre

Randall a 23 ans et il nous explique ici comment il est devenu un bidouilleur de code pour son plus grand plaisir. Il a découvert la programmation par lui-même et nous livre ici son témoignage et le fruit de sa jeune expérience.

Tout le monde ne partagera pas sa passion avant autant d’intensité. Nous espérons cependant que nombreux seront les enfants et leurs parents à tomber par hasard sur cet article (d’autant que cette sensibilisation est toujours absente de l’école d’aujourd’hui)[1]. Et, qui sait, peut-être que cela suscitera de nouvelles vocations ?

Sur le même sujet on pourra parcourir ces récents articles du Framablog illustrant l’enjeu majeur d’une éducation informatique (libre et ouverte) dans nos sociétés en mutation : De l’impact politique d’apprendre aux enfants la libre programmation, Les codeurs sont la nouvelle élite politique, Le code deviendra-t-il le latin du XXIe siècle ? et surtout Exercice de la citoyenneté et culture informatique.

Francisco Osorio - CC by

Comment j’ai appris à programmer

How I Learned to Program

Randall Degges – 4 février 2012 – Blog perso
(Traduction Framalang/Twitter : Calystod, Twix, kinou, HgO, monsieurab, Spartition, ametaireau, Grom, alaindalche, Evpok, Grom, Fred)

Programmer est, sans aucun doute, la chose la plus gratifiante intellectuellement que j’ai jamais réalisée. Programmer m’a appris que la vie se devait d’être amusante, remplie de créativité et vécue au maximum de son intensité. Programmer m’a appris que tout était possible ; je peux faire ce qui me plait en utilisant seulement mon esprit.

Programmer m’a également enseigné qu’apprendre est drôle et ludique. Cela m’a montré que plus vous en savez, plus vous comprenez et êtes acteur du monde qui vous entoure. Programmer m’a confirmé qu’une vie en apprentissage continu est une meilleure vie à vivre. Programmer m’a révélé qui je suis au fond de moi, m’a donné une bonne estime de moi et m’a continuellement aidé à arriver à mes fins.

Je me sens extrêmement chanceux d’avoir eu la volonté et l’opportunité d’apprendre à programmer tôt dans la vie. Et si mes méthodes ne sont certainement pas les meilleures pour tout le monde, elles ont marché pour moi.

Je n’ai aucun regret.

Alors je me suis dit que j’allais partager mes méthodes avec vous, en espérant qu’un débutant lise cet article et en tire quelque chose.

Si vous n’avez pas le temps de le parcourir retenez avant tout ceci : l’important est de s’amuser.

Mtellin - CC by

Installer GNU/Linux sur votre machine

Bien que plus jeune, j’ai découvert les rudiments informatiques sur des ordinateurs MS-DOS Windows grâce aux jeux vidéos, mon véritable apprentissage a commencé le jour où j’ai installé un système GNU/Linux sur mon ordinateur personnel.

Ce n’est pas fondamental d’utiliser ou non Windows (ou Mac OS X) sur votre machine, il y a ainsi beaucoup de programmeurs qui travaillent sous système d’exploitation propriétaires. Mais GNU/Linux est imbattable pour apprendre.

Contrairement aux idées reçues, les développeurs ne font pas que pisser du code. On tape quelque chose, ce qui déclenche autre chose. Il y aurait des entrées et des sorties. Cette vision est erronée.

La programmation est un mode de vie

Les programmeurs sont obsédés par la connaissance. Ils utilisent cette obsession pour alimenter leur soif d’apprendre, de découvrir et de créer. Voilà la vraie définition d’un programmeur.

Une principale raison d’utiliser Linux pour travailler au quotidien est qu’il vous aide à apprendre progressivement et pratiquement la programmation. Sur Windows, si vous voulez copier un fichier d’un dossier à un autre, vous faites du glisser-déposer à la souris. Sur Linux, vous pouvez aussi en faire de même désormais, mais vous pouvez également utiliser scp ou rsync. Parce qu’apprendre à utiliser la ligne de commande vous enseigne des techniques basiques de logique et améliore votre capacité à résoudre des problèmes.

La pratique régulière de l’OS GNU/Linux permet d’acquérir des compétences importante à commencer par l’autonomie. Contrairement à d’autres activités, la programmation ne demande ni de grands efforts de mémorisation, ni de répéter encore et encore les mêmes routines. Ce qu’il faut, c’est surtout énormément de motivation et de détermination. . Même les meilleurs programmeurs n’ont généralement aucune idée précise de ce qu’ils vont faire lorsqu’ils débutent un nouveau projet. Si une seule chose peut résumer mon activité, ce serait la recherche. Les programmeurs se doivent de savoir où trouver l’information, comment la digérer et s’en servir d’une manière utile. Cette compétence demande du temps et de la patience mais il est clair que GNU/Linux aide à cela.

Utiliser Linux vous poussera à rechercher activement des solutions aux problèmes que vous rencontrez. Si vous ne savez pas comment mettre en place un tunnel SSH, et bien vous allez l’apprendre tout simplement. Utiliser Linux vous amènera à découvrir de nouvelles choses auxquelles vous n’auriez jamais pensé en utilisant Mac ou Windows. Apprivoiser petit à petit GNU/Linux fera de vous un meilleur et plus pragmatique développeur. Vous apprendrez à travailler collaborativement pour résoudre un problème, à aller à la chasse aux erreurs, à mobiliser vos connaissances pour créer de nouvelles choses et rendre votre vie (et celle des autres) plus simple.

De plus, en tant que projet libre (tant le système d’exploitation que les logiciels disponibles), GNU/Linux offre un accès privilégié à la culture de la programmation. À coup sûr, vous allez :

  • Trouver un bogue dans une application que vous utilisez
  • Chercher des réponses sur internet
  • Trouver un système de tickets ou un forum sur le logiciel en question
  • Soumettre un ticket concernant le bogue ou poster dans un forum un sujet sur le problème rencontré
  • Interagir avec d’autres utilisateurs pour aidez à le résoudre

Tout cela n’a pas l’air très cool, mais patientez. Une fois ces points achevés, vous aurez fait connaissance avec la communauté hacker. Trouver des problèmes, en discuter avec d’autres personnes, résoudre ces problèmes ensemble et vous voici membre de cette communauté.

Si tout était parfait et qu’il n’y avait pas un seul problème à résoudre dans ce monde la vie serait morne. Mettre le nez dehors et corriger des choses, combattre le chaos, donne un sens à la vie. Alors profitez-en !

Linux peut vous apprendre tout cela, et bien plus encore.

Jon Rawlinson - CC by

Avoir un désir intense

Pourquoi voulez-vous programmer ? Quelles sont vos motivations ? Si vous n’avez pas cette envie pressante d’apprendre à programmer, vous échouerez.

J’ai commencé à coder parce que j’avais une très grande envie de créer des jeux vidéo. Quand j’étais un enfant, les jeux vidéo étaient ma passion. Je rentrais le plus rapidement possible de l’école pour rester scotcher sur l’ordinateur à jouer à des vieux classiques. Mes épiques batailles de Starcraft contre mon frère font parties de mes meilleurs souvenirs.

Plus que tout, je voulais être capable de maîtriser ces jeux. Je voulais les dominer, je voulais rendre servile mon ordinateur esclave afin qu’il fasse ce que je désirais.

Ces vieilles motivations me semblent maintenant un peu idiotes mais je les ressentais alors de manière intense. J’en rêvais la nuit, j’y pensais durant le jour et en était obsédé alors que j’étais derrière mon ordinateur les après-midis.

Quand j’ai décidé d’apprendre à programmer, je savais que je pouvais le faire. Je savais que quoi qu’il arrive dans ma vie, j’apprendrais coûte que coûte à programmer, alors même qu’au début je n’avais aucune idée de comment y arriver et ne connaissais personne dans ce domaine.

Mais j’ai trouvé un moyen. J’ai lu sur le Web des dizaines et des dizaines de pages de documentation. J’ai dépensé sans compter des centaines d’heures à fouiller au hasard les forums à la recherche de bribes d’information. J’étais tellement motivé et entier dans mon désir que cela me semblait facile et m’a aidé à devenir un programmeur à moitié convenable.

Kalyan Kanuri - CC by-sa

Faire de petits programmes en ligne de commande

Aujourd’hui, il semblerait que la majorité apprenne la programmation en plongeant la tête la première dans le développement Web. Même si ça peut marcher pour certaines personnes, ça me semble vraiment fou. Non seulement les technologies Web sont vastes, complexes et vite démodées (construire un site Web moderne requiert des tonnes de compétences différentes qui nécessitent plusieurs années de maturation), mais elles sont souvent frustrantes et décourageantes pour les nouveaux développeurs.

Je suis peut-être de la vieille école (j’ai seulement 23 ans :x), mais il n’y a rien de plus satisfaisant et formateur que d’écrire des tonnes de programmes simples en ligne de commande. J’écrivais des tonnes de choses :

  • Un script simple qui prenait en entrée des noms de fichiers pour les stocker dans des dossiers hiérarchisés et organisés en fonction du type de fichier
  • Un bot IRC qui enregistrait toute l’activité d’un channel dans un fichier texte.
  • Un programme simple qui télechargeait toutes les images d’une page Web donnée.
  • Un outil permettant de convertir des nombres en base dix vers n’importe quelle autre base en CLI
  • Un script compilant et mémorisant d’un coup toutes mes personnalisation graphiques : fonds d’écran, thèmes, etc.
  • Un programme basique qui téléverse automatiquement des captures d’écran sur un hébergeur d’images et en copie automatiquement l’adresse dans mon presse-papier.
  • Et un million d’autres choses encore.

J’ai tiré grand bénéfice de ces petits exercices. Chacun d’eux était suffisamment simple pour être écrit en quelques heures (pas plus), et ils m’ont tous appris quelque chose : un nouveau language, nouvelle bibliothèque ou stratégie. J’ai sans aucun doute gagné une grande partie de mes compétences informatiques en construisant là ces applications.

Mais cela joue également au niveau de la confiance. Chaque application créée aura été une petite satisfaction personnelle dont j’étais fier. J’y revenais du reste en les tenant à jour mais surtout en tentant de les modifier sans cesse par du nouveau code et de nouvelles stratégies. Cela m’a appris les bases de la programmation par itération (améliorer au fil du temps) tout en contribuant effectivement à la communauté du logiciel libre.

Si vous êtes un nouveau programmeur, il n’y a rien de mieux et de plus amusant que d’écrire ces petits utilitaires en ligne de commande. Vous ne me croyez pas ? Essayez, et dites moi si vous ne vous retrouvez pas accro dès la première ligne !

Erin Kohlenberg - CC by

Écrire, Écrire, Écrire

L’écriture est controversée. Lorsque j’ai commencé à programmer, les nerds avaient une réputation d’être inaptes à tout sauf aux ordinateurs. Pendant une période, j’ai supposé que comme étant bon avec les ordinateurs, j’étais naturellement mauvais pour tout le reste : même pour écrire.

C’était idiot.

J’en suis venu à réaliser avec le temps que les programmeurs sont, au contraire, d’excellents auteurs. La capacité à penser logiquement et à résoudre les problèmes est un avantage indéniable pour écrire, alors qu’il est parfois si difficile de coucher ses idées sur le papier. Et réciproquement l’exercice d’écriture m’a aidé à devenir un meilleur développeur. En outre nous savons qu’il est important de bien documenter son code.

Posséder un blog par exemple est une excellente manière de pratiquer l’écriture, pour garder une trace de ce que vous apprenez, et aide à s’assurer d’un progrès constant en particulier sur les sujets techniques.

Si vous écrivez une très très utile application en ligne de commande pour commander des pizzas chez Dominos, il vous sera alors difficile d’en parler sans aller dans le détail pour décrire la technologie que vous utilisez, comment l’API de Dominos fonctionne, etc. En prenant le temps d’écrire en structurant votre pensée, en relatant votre expérience, vous en apprendrez forcément davantage.

L’écriture peut être incroyablement utile lorsqu’elle est utilisée pour décrire des choses techniques, puisqu’elle simplifie et clarifie la cause du problème, vous forçant à réfléchir à ce problème de la manière la plus simple possible pour mieux la communiquer.

Un des mes plus grands regrets est de ne pas avoir conservé mes articles. Au fil des réécritures de mon site Web, d’erreurs de gestion de serveurs, j’ai petit à petit perdu la majeur partie de mes écrits. Le blog que vous lisez actuellement existe principalement suite à la décision que j’ai prise de remédier à cela. Ne faites pas la même erreur !

John Vetterli - CC by-sa

Rejoindre une communauté en ligne

Internet est un vaste lieu. Programmer est un vaste sujet. Il est tout à fait possible de devenir un excellent programmeur tout seul dans son coin mais il est beaucoup plus facile de le faire avec l’aide d’autrui.

Lorsque j’ai commencé à programmer j’ai eu la chance de rencontrer grâce au Net d’autres programmeurs fascinants avec qui j’ai partagé des jours durant des idées via IRC. Ces personnes ainsi rencontrées comptent parmi les individus les plus brillants et passionnés que je n’ai jamais rencontrés dans ma vie. Nous sommes devenus amis et le sommes encore !

Avoir des amis aussi motivés a décuplé ma propre motivation, et m’a aidé à tirer le meilleur de moi-même. Nous écrivions ensemble des articles pour partager les choses que nous avions apprises, nous critiquions nos codes respectifs, nous parlions des projets sur lesquels nous travaillions et sur la meilleure manière de les mener à bien.

Connaître un groupe qui partage la même passion et la même envie que vous est inestimable.

Sham Hardy - CC by-sa

Amusez-vous

Programmer est amusant. Programmer est vraiment, vraiment très amusant. Le simple fait d’en parler me met en joie ! Il est difficile de cacher mon excitation 🙂

Le plus important quand on apprend à programmer c’est de toujours S’AMUSER ! Peu importe que vous commenciez tout juste à programmer ou que vous soyez un programmeur aguerri et confirmé : vous ne devez jamais perdre du vue cette dimension fondamentale de l’informatique.

Supposons que vous veniez de commencer à apprendre le Python (à propos, Dive Into Python reste l’un des meilleurs livres sur le sujet), ne démarrez pas par un projet ennuyant. Écrivez quelque chose de nouveau ! Un truc qui vous semble fun et quelque part utile. Amusez-vous avec, et lancez-vous des defis.

Si votre motivation première pour travailler sur un projet est de le terminer alors vous faites fausse route. Pour devenir un bon programmeur il faut bidouiller des trucs que VOUS trouvez sympa. Le monde est rempli de logiciels tristes alors qu’on a besoin de logiciels GENIAUX. Et la seule façon de faire un logiciel génial c’est de s’éclater en le créant !

Je pourrais déblatérer pendant des heures ainsi. Mais à la place et pour conclure je veux VOUS mettre au défi (oui vous !). Pensez à quelquechose que vous adoreriez faire. Un site de partage ? un éditeur vidéo ? Peu importe ce qui vous exalte et vous transporte. Vous avez saisi ?

OK, maintenant allez-y fabriquez-le !

Notes

[1] Crédit photos : Francisco Osorio, Mtellin, Jon Rawlinson, Kalyan Kanuri, Erin Kohlenberg, John Vetterli, Sham Hardy (Creative Commons By et By-Sa)