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Si vous parcourez les articles de nos tags Informatique et Code, vous vous apercevrez que nous sommes de ceux qui poussent pour que la programmation (avec du Libre dedans) entre dans les écoles française sans attendre l’Université[1].
Parce que cela a des implications politiques majeures et ceux qui ont tout intérêt à ce que la situation ne bouge pas l’ont très bien compris…
En Angleterre la prise de conscience est en train de se faire (quitte à ce que ce soit un Google qui vienne l’éveiller). Mais chez nous c’est franchement pitoyable. Tout au plus a-t-on réussi à obtenir une option pour la seule Terminale S l’année prochaine. Attention car, comme disait Barbara, le temps perdu ne se rattrape plus !
Apprendre les rudiments de la programmation aux enfants aura-t-il un impact politique ?
Will teaching children basic programming skills have a political impact ?
Sam Tuke – 12 janvier 2012 – FSFE.org
(Traduction Framalang/Twitter : Yoha, Gatitac, Bl0fish, Sophie, Morphix, 0gust1)
La BBC m’a envoyé un courrier électronique la semaine dernière pour me demander mon avis sur la rumeur actuelle qui voudrait que le gouvernement britannique ajoute des compétences informatiques de base aux programmes scolaires en mettant l’accent sur un éventuel impact politique que ceci pourrait avoir sur la façon dont la société interagit avec les technologies. Voici ma réponse.
Question : Enseigner des rudiments de programmation à tous nous oriente-t-il vers une société plus critique et plus créative ?
Oui. Très souvent, les technologies, et en particulier les logiciels, voient leur utilité restreinte pour les intérêts de quelques-uns, comme les entreprises privées, afin de leur permettre de manipuler les consommateurs à leur avantage. Bien que la Grande-Bretagne utilise plus de logiciels et de produits numériques que jamais, seul un pourcentage restreint de la population est capable de participer à la création de ces produits, de les adapter à ses propres besoins, ou bien de créer les siens.
Cela a un impact extrêmement néfaste sur la société. Cela crée un déséquilibre de pouvoir entre les concepteurs des outils et tous les autres, dont le travail dépend de ces outils. Quel que soit le secteur dans lequel il travaille, un salarié a de fortes chances de devoir utiliser un jour ou l’autre un navigateur Web ou un client de messagerie par exemple, ne serait-ce que trouver un emploi. Mais la façon dont une personne interagit avec ces technologies est presque toujours définie par un groupe de personnes extérieures, sans aucun lien avec l’utilisateur final et qui pourraient n’avoir que très partiellement satisfait ses besoins.
Si notre société inculquait davantage les concepts de base de la programmation et de la création numérique, nous serions plus à même d’interagir en connaissance de cause avec notre environnement social et professionnel. C’est particulièrement vrai pour les sujets importants comme par exemple le journalisme citoyen, l’auto-hébergement et la publication. Une compréhension large de la façon dont fonctionnent les systèmes de vote électronique pourrait avoir un impact fort sur la politique future, par exemple.
Pour autant, avoir simplement des compétences en programmation ne suffit pas. Pour être compétitif, efficace et productif, la Grande-Bretagne devra également promouvoir une culture des libertés et du logiciel libre au sein de son industrie informatique. Et ce parce que les restrictions des copyrights et des brevets peuvent mettre au pas la créativité, y compris celle du plus doué des programmeurs, ou les forcer à réinventer constamment la roue avant qu’ils ne puissent commencer à innover.
Le logiciel libre a initié une véritable révolution technologique au cours des trois dernières décennies, nous apportant, entre autres avantages, Internet et des ordinateurs suffisamment abordables pour être distribués en masse dans le Tiers Monde.
Les écoles devraient favoriser la curiosité et l’esprit critique dans un environnement qui encourage les étudiants à apprendre. Une salle de classe exécutant des logiciels propriétaires ne peut fournir cela. « Comment ça marche ? », « Qu’est-ce qui se passe si je change ceci ou cela ? ». Ces questions restent fondamentalement sans réponse quand on enseigne aux enfants en utilisant des systèmes d’exploitation, des suites bureautiques ou des outils de robotique non libres.
AmoK
« Tout au plus a-t-on réussi à obtenir une option pour la seule Terminale S l’année prochaine. »
Il me semble que les séries STG aussi apprennent le développement logiciel (et notions SQL dès la 1ère toutes séries confondues)
deadalnix
Bonjour,
Il est dommage que cet article passe à coté d’un point important. Bine que l’intérêt société soir indéniable, il y a un intérêt pédagogique aussi.
On ne fait jamais un programme correct du premier coup (si on y arrive, c’est qu’on a pas assez testé). Mais ce que l’on a fait à l’essai n, les erreurs rencontrés, permettent de savoir comment avancer à l’essai n+1 .
De par son processus, l’informatique pousse à apprendre de ses erreurs, et à acquérir un processus d’apprentissage sain. Contrairement aux math par exemple (allez aka, prend ça dans les gencives 😀 ) ou lorsque l’on a faux, et bien on n’a pas de points au devoir, en informatique, lorsque l’on a faux, on peut expérimenter notre programme erratique et investiguer pourquoi l’on s’est trompé et comment ne plus se tromper.
Si l’on prend cet effet pédagogique, que l’on considère aussi les points fort bien mis en avant dans ce texte, on ne peut que conclure que cet apprentissage est capital.
pirpa
Hello,
je confirme ! Prof de Sciences, j’ai été amené il y a 20 ans à enseigner la programmation au sein d’un cours d’informatique (avant que le « programme » officiel ne transforme cette option en un cours de bureautique). Dans du code (le basic, à l’époque), la moindre petite faute est sanctionnée : il faut que tout soit impeccable pour que le programme fonctionne. Je n’ai plus jamais retrouvé, dans aucune matière, la même nécessité – hautement pédagogique – de perfection.
Sam Tuke
@deadalnix @pirpa I agree that learning to code can result in valuable skills relating to the practice of trial and error and the application of scientific method (such as by tightly controlling tiny changes through numerous iterations to get closer to the source of a problem).
In my article I was attempting to highlight the importance of Free Software to the teaching of coding, not just he benefits of learning to code itself. However Free Software is especially beneficial in terms of the skills that you mention also – working collaboratively is intrinsic to common Free Software development approaches, and this can teach students to identify problems in their programs and experiments as efficiently as possible by utilising the expertise of a broad network of developers. Free Software also strongly encourages the use of best practice in problem finding and resolution techniques, in a way that non-Free Software development cannot accomplish. The typical Free Software patch peer-review process is an important part of this efficient collaborative effort.
So I agree with you both that the skills you describe are also an important aspect of teaching computer science in schools. I also believe that the use of Free Software systems and methodologies in classrooms is the most beneficial way to teach them.
Papoune
Eh oui, la programmation a une vertu, c’est qu’elle ne supporte pas l’à peu près : la réponse à une faute est immédiate;;; ou génère une attente anxieuse de résultat lorsque la boucle devient trop longue.
L’autre vertu générée chez l’apprenti est patience et opiniâtreté, à l’opposé de l’envie quotidienne du gagner plus vite pour avoir plus vite !
Il est difficile aussi de concevoir un objet (théorique) pour autrui ! Là l’objectif pédagogique est de faire fonctionner pour un autre, et cela, c’est dérangeant pour les débutants.
La technologie fait trop oublier la connaissance qu’elle peut enrichir !