Des routes et des ponts (4) – la gratuité pour changer le monde

Nous poursuivons la lecture du livre Des routes et des ponts de Nadia Eghbal que le groupe Framalang vous traduit au fil des semaines. Après nous avoir expliqué en termes simples de quoi sont constitués les logiciels (n’hésitez pas à reprendre les épisodes précédents, si par exemple vous avez oublié ce qu’est un framework ou une bibliothèque), elle nous explique en quoi l’accès libre et gratuit à ces composants a révolutionné l’industrie du logiciel : son fonctionnement, son financement, mais aussi la formation des professionnels.

 

Comment la gratuité des logiciels a transformé la société

par Nadia Eghbal

Traduction Framalang : Luc, urlgaga, Penguin, Mika, Asta, Edgar Lori, Julien / Sphinx, flo, xi, Bromind, goofy, salade, lyn. et 3 anonymes.

La première réflexion qui vient à l’esprit est : « Pourquoi ces développeurs ont-ils rendu leur logiciel gratuit ? Pourquoi ne pas le faire payer ? »
Les arguments en faveur du logiciel public reposent sur sa riche histoire politique et sociale. Mais d’abord, regardons la vérité en face : notre société ne serait pas là où elle est aujourd’hui si des développeurs n’avaient pas rendu le logiciel libre et gratuit.

Avec le logiciel libre, la production de logiciel est plus simple et considérablement moins chère

moneybox

Uber, un service de transport de personne, a annoncé récemment que des développeurs avaient créé un système permettant de réserver une voiture en utilisant Slack (une application de développement collaboratif) et non l’application mobile Uber. Le projet a été bouclé en 48 heures par une équipe de la App Academy, une école de programmation.
Uber a constaté que l’équipe avait été capable d’achever le projet rapidement car elle « avait utilisé des bibliothèques ouvertes telles que rails, geocoder et unicorn pour accélérer le développement tout en travaillant sur une base solide.»
En d’autres termes, la quantité de code que l’équipe a dû écrire par elle-même a été fortement réduite car elle a pu utiliser des bibliothèques libres créées par d’autres.
Ruby Geocoder, par exemple, est une bibliothèque réalisée en 2010 et maintenue par Alex Reisner, un développeur indépendant. Geocoder permet à une application de chercher facilement des noms de rues et des coordonnées géographiques.
Unicorn est un serveur datant de 2009, il est administré par une équipe de sept contributeurs (leurs noms sont visibles sur le site web d’Unicorn) encadrés par Eric Wong, un développeur.
Créer un nouveau logiciel n’a jamais été aussi simple, car il existe de plus en plus de portions de code « prêtes à l’emploi » dont on peut se servir. Pour en revenir à la métaphore de l’entreprise de bâtiment, il n’est plus nécessaire pour construire un immeuble de fabriquer soi-même tout ce dont on a besoin, il est plus simple d’acheter du « préfabriqué » et d’assembler fondation, structure porteuse et murs comme des Legos.
Du coup, il n’est plus nécessaire de savoir comment construire un logiciel à partir de zéro pour être qualifié de développeur. le service des statistiques sur le travail des USA (Bureau of Labor Statistics) estime que l’emploi des développeurs va augmenter de 22% entre 2012 et 2022, soit bien plus rapidement que la moyenne dans les autres professions.

Le logiciel libre est directement responsable de la renaissance actuelle des startups

Les coûts de lancement d’une entreprise ont énormément baissé depuis la première bulle internet de la fin des années 90. Le capital-risqueur et ex-entrepreneur Mark Suster évoquait son expérience dans un billet de blog de 2011 :

Quand j’ai monté ma première entreprise, en 1999, l’infrastructure coûtait 2,5 millions de dollars, simplement pour commencer, et il fallait y ajouter 2,5 millions de dollars de plus pour payer l’équipe chargée de coder, lancer, gérer, démarcher et vendre notre logiciel. […]

 

Nous avons à peine perçu le premier changement d’ampleur dans notre industrie. Il a été porté par l’introduction du logiciel libre et plus précisément par ce que l’on a appelé la pile LAMP. Linux (au lieu de UNIX), Apache (un logiciel de serveur web), MySQL (à la place d’Oracle) et PHP. Il y a bien sûr eu des variantes – nous préférions PostgreSQL à MySQL et beaucoup de gens utilisaient d’autres langages de programmation que PHP.

 

Le libre est devenu un mouvement, un état d’esprit. Soudain, les logiciels d’infrastructure étaient presque gratuits. Nous avons payé 10% du tarif normal pour l’achat des logiciels et le reste de l’argent est allé dans le support. Un tel effondrement de 90% des coûts engendre de l’innovation, croyez-moi.

La disponibilité actuelle des composants logiciels libres et gratuits (associée à des services d’hébergement moins chers comme Amazon Web Services et Heroku) permet à une startup technologique de se lancer sans avoir besoin de millions de dollars. Les entrepreneurs peuvent tout à fait sortir un produit et trouver un marché sans dépenser un seul dollar, la levée de fonds auprès de capital-risqueurs se faisant seulement après avoir montré la viabilité de leur projet.
Alan Schaaf, qui a fondé Imgur, un site populaire de partage d’images faisant partie des 50 sites les plus consultés au monde, a justement déclaré que les sept dollars nécessaires à l’achat du nom de domaine représentaient la seule dépense indispensable au démarrage de son entreprise. Imgur était rentable et avant de lever 40 millions de dollars en 2014 auprès de l’entreprise de capital-risque Andreessen Horowitz, Schaaf n’a eu recours à aucun fond extérieur pendant 5 ans (source).
Les capital-risqueurs ainsi que les autres acteurs de l’investissement ont, à leur tour, commencé à investir des montants moindres, développant ainsi de nouvelles formes de fond d’investissement dont voici trois exemples.

Fonds spécialisés dans le capital d’amorçage : sociétés de capital-risque préférant financer la première levée de fond, plutôt que de participer à une augmentation de capital ultérieure.

Fonds de micro capital-risque : une définition assez large sous laquelle on regroupe les sociétés de capital-risque disposant de moins de 50 millions de dollars d’actifs.

Accélérateurs de startup : des sociétés qui financent de petites sommes, souvent inférieures à 50 000 dollars, et qui également conseille et parraine les toutes jeunes entreprises..

Aujourd’hui, avec 10 millions de dollars, on peut financer cent entreprises contre seulement une ou deux dans les années 90.

Le logiciel libre a simplifié l’apprentissage de la programmation, rendant la technologie accessible à tous, partout dans le monde.

Si aujourd’hui vous voulez apprendre à coder chez vous, vous pouvez commencer par étudier Ruby on Rails. Rails est le nom d’un framework et Ruby est un langage de programmation. N’importe qui disposant d’un accès internet peut installer gratuitement ces outils sur n’importe quel ordinateur. Parce qu’ils sont libres et gratuits, ils sont également très populaires, ce qui signifie qu’il existe énormément d’informations en ligne permettant de bien démarrer, du simple tutoriel au forum d’aide. Cela montre qu’apprendre comment coder est aussi accessible que d’apprendre à lire et écrire l’anglais ou le français.
Pour comparer, l’utilisation de frameworks et de langages non open source impliquaient : de payer pour y avoir accès, d’utiliser un système d’exploitation et des logiciels spécifiques, et d’accepter des contraintes de licence susceptibles d’entraver le dépôt d’un brevet pour un logiciel construit sur la base de ce framework. Aujourd’hui il est difficile de trouver des exemples de frameworks qui ne sont pas publics. L’un des plus célèbres exemples de framework propriétaire est le .NET, développé et sorti en 2002. En 2014, Microsoft a annoncé la sortie d’une version publique de .NET, appelée .NET Core.
Audrey Eschright, une développeuse, a décrit comment les logiciels open source l’ont aidée à apprendre la programmation à la fin des années 90.

Je voulais apprendre à programmer mais je n’avais pas d’argent. Pas la version « étudiante fauchée » : ma famille était pauvre mais également dans une situation chaotique…. Cela peut sembler étrange aujourd’hui, mais à l’époque il y avait en fait deux options pour quelqu’un qui voulait écrire de véritables logiciels : on pouvait utiliser un ordinateur avec Windows et payer pour les coûteux outils de développement de Microsoft, ou on pouvait avoir accès a un système Unix et utiliser [le compilateur] gcc…. Mon but devint donc d’avoir accès à des systèmes Unix pour pouvoir apprendre à programmer et faire des trucs sympas.

Jeff Atwood, un développeur .NET de longue date, a expliqué sa décision d’utiliser Ruby pour un nouveau projet, Discourse, en 2013 :

Quand on habite en Argentine, au Népal ou en Bulgarie par exemple, il est vraiment très difficile de démarrer en programmation avec les outils fournis par Microsoft. Les systèmes d’exploitation, les langages et les outils open source permettent de mettre tout le monde au même niveau, ils constituent le socle sur lequel travaillera, partout dans le monde, la prochaine génération de programmeurs, celle qui nous aidera à changer le monde.

Le nombre de startups a explosé et dans leur sillage sont apparues de nombreuses initiatives pour enseigner la programmation aux gens : aux enfants et aux adolescents, mais aussi aux membres de communautés défavorisées, aux femmes ou aux personnes en reconversion professionnelle. Parmi ces initiatives on retrouve Women Who Code, Django Girls, Black Girls Code, One Month et Dev Bootcamp.
Certaines de ces organisations offrent leurs services gratuitement, tandis que d’autres les font payer. Toutes se reposent sur des logiciels libres et gratuits dans leur enseignement. Par exemple, Django Girls a appris à coder à plus de 2000 femmes dans 49 pays. Bien que l’organisation n’ait pas développé Django elle-même, elle a le droit d’utiliser Django, que les étudiantes téléchargent et utilisent gratuitement dans leur programme d’apprentissage.

Django Girls hackathon à Rome – Photo Django Girls CC-BY-2.0

Dev Bootcamp apprend à programmer aux personnes qui veulent changer de carrière, et prépare n’importe qui, du professeur d’anglais au vétéran, à devenir développeur professionnel. Le programme coûte entre 12 et 14 000 dollars. Dev Bootcamp enseigne entre autres Ruby, JavaScript, Ruby on Rails et SQL. Les étudiants peuvent télécharger et utiliser tous ces outils gratuitement, et Dev Bootcamp n’a pas besoin de payer pour les utiliser. Dev Bootcamp a été acheté par Kaplan en 2014 pour un prix inconnu.
Si des logiciels aussi importants n’étaient pas gratuits, beaucoup de gens seraient dans l’incapacité de participer à la renaissance technologique actuelle. Il existe encore de nombreux obstacles économiques et sociaux qui empêchent qu’ils soient encore plus nombreux à participer, comme le prix du matériel nécessaire pour avoir un ordinateur portable et une connexion Internet, mais les outils de programmation eux-mêmes ne coûtent rien.




Framaforms : n’offrez plus les réponses que vous collectez à Google !

Un formulaire d’inscription ? Une enquête en ligne ? Un questionnaire de satisfaction ? Bref : vous avez besoin de réaliser rapidement un questionnaire à diffuser en ligne et d’en collecter les réponses ?

Il existe plusieurs logiciels libres pour réaliser cela. Nous devons même reconnaître qu’aucun ne rivalise avec la redoutable efficacité de Google Forms (maintenant intégré à la « G(oogle) Suite » ). Mais ce dernier aspire vos données, et surtout celles des participants répondant innocemment à vos formulaires, en enregistrant leurs réponses dans Google Sheets, lui même enregistré dans Google Drive !

anim_framaforms

Alors, nous avons décidé de construire nous-mêmes une alternative : Framaforms !

Framaforms vous permet de réaliser simplement des formulaires, par glisser-déposer d’éléments (champs textes, cases à cocher, menu déroulant etc.). Il vous suffit alors de transmettre l’adresse de ce formulaire à qui bon vous semble par email, sur les réseaux sociaux, ou directement en l’intégrant sur votre site web… et de laisser les participants répondre. Les réponses seront anonymisées ; vous pourrez les visualiser et même les analyser, notamment à l’aide de graphes générés automatiquement pour vous faire gagner du temps. Et bien entendu vous pourrez les télécharger au format .csv, utilisable dans n’importe quel tableur.

Comme il faut parfois tâcher d’éviter les abus, l’outil comporte volontairement quelques limitations (durée d’hébergement du formulaire, ou nombre de réponses maximum par formulaire). Nous lèverons éventuellement ces contraintes suivant les usages, mais pour ne pas avoir à les subir, et surtout si vous avez des besoins spécifiques, le mieux est alors d’installer vous-même l’outil sur votre serveur. Vous pouvez aussi utiliser les services « premium » du site webform.com par l’auteur du module qui fait tourner Framaforms.

Pour en savoir plus sur l’outil Framaforms, notamment sur pourquoi et comment nous avons décidé de le faire nous-mêmes, nous vous invitons à lire l’interview de Pierre-Yves, qui a réalisé cet outil pour vous : entretien avec Pierre-Yves, pour en savoir (un peu) plus sur Framaforms.

Donnez-moi un exemple simple à comprendre !

Tristan[1] a des choses à dire sur ce qu’il pense des GAFAM (Google, Apple, Amazon, Facebook, Microsoft), et de l’utilisation qu’ils font de nos données personnelles. D’ailleurs il est régulièrement invité pour en parler car son expertise sur le sujet est reconnue. Il a donc décidé de rassembler ses idées dans un livre. Après plusieurs mois de rédaction et avoir pris bonne note des retours qui lui ont été faits par les lectrices et lecteurs de son blog, il a trouvé une maison d’édition proche de ses valeurs prête à publier son livre. Le jour tant attendu du lancement de son ouvrage approche, mais afin de pouvoir s’organiser, il décide de créer un formulaire en ligne invitant à s’inscrire les personnes qui souhaitent venir.

Framaforms à la rescousse

Première étape, l’inscription.

Rien d’extraordinaire de ce côté-là. Tristan se rend sur https://framaforms.org et clique sur « Créer un compte ». Il saisit alors un login, son adresse email, et répond à la question servant à s’assurer qu’il n’est pas un robot-spammeur (pour info, la réponse est « framaforms » 😛 )

Il reçoit quelques secondes plus tard un email provenant du site lui demandant de cliquer sur un lien pour terminer son inscription. Il clique dessus et peut alors choisir son mot de passe et quelques informations complémentaires.

Création d'un compte
Création d’un compte

Voilà, son compte est créé et validé, il peut commencer son formulaire !

Création du formulaire

Il clique sur « Créer un formulaire ». Le site lui demande alors de remplir les informations de base, comme l’intitulé (« Inscription au lancement de mon livre »).

Création de formulaire
Création de formulaire

Il choisit aussi de mettre en ligne une description et une image qui rappelleront aux gens de quoi il s’agit.

Ajout d'une description
Ajout d’une description

Comme date d’expiration, Tristan choisit une date 15 jours après l’événement. Il aura de toutes façons récupéré toutes les informations d’ici là, et inutile d’encombrer les serveurs avec un formulaire dont les informations n’auront plus d’intérêt quelques jours plus tard.

Comme Tristan est un type sympa, il se dit que son formulaire pourra servir à d’autres plus tard, et décide donc de faire de son formulaire un « modèle ». Cela signifie que son formulaire se retrouvera parmi les multiples modèles de formulaires dont d’autres utilisateurs pourront s’inspirer et qu’ils pourront surtout « cloner » d’un seul clic, leur faisant gagner un temps précieux. Il décide de nommer ce formulaire « Modèle de formulaire d’inscription à un événement ».

Options de création
Options de création

Il passe alors à l’étape de la construction de son formulaire.

Conception du formulaire

C’est simple et rapide : il suffit de glisser-déposer les champs, puis de cliquer dessus pour éditer les informations qui seront affichées.

Il commence donc par un champ texte pour le nom ou le pseudo.
Il clique sur le crayon et complète les informations souhaitées. Il en profite d’ailleurs pour rendre ce champ obligatoire.

Ajout d'un champ
Ajout d’un champ

Comme il souhaite savoir comment les inscrits ont entendu parler de son ouvrage, il utilise alors un champ « boutons radio ». Et remplit 3 champs « Par l’auteur », « Par l’éditeur »,
« Autre ».

Ajout de boutons de sélection
Ajout de boutons de sélection

Afin de savoir avec combien de livres son éditeur doit venir le jour J, il décide de poser la question sous forme d’une simple case à cocher.

Ajout d'une case à cocher
Ajout d’une case à cocher

Enfin, il décide d’ajouter, à la demande de son éditeur, un champ email pour les personnes qui souhaiteraient être tenues au courant de l’actualité de ce dernier. Aucun problème, un dernier glisser-déposer et c’est réglé.

Ajout d'un champ courriel
Ajout d’un champ courriel

Et voilà, il enregistre, et son formulaire est prêt à être diffusé !

Il peut le visualiser et le tester en cliquant sur « Voir »

Prévisualisation
Prévisualisation

Options

Bon, jusqu’ici ça ne lui a pris que 5 minutes chrono, mais Tristan se dit que ça mérite un peu de peaufinage. C’est un jour important après tout !

D’abord, il retourne modifier son formulaire et décide de rajouter un champ texte « Pouvez-vous m’en dire plus ? » qui ne s’affichera QUE si le participant coche la case « Autre ».
Il ajoute ce champ sous les boutons radio et enregistre son formulaire.

Ajout d'un nouveau champ qui ne sera affiché que si un autre est coché
Ajout d’un nouveau champ qui ne sera affiché que si un autre est coché

Puis, il clique sur « champs conditionnels » et sélectionne les menus de façon à formuler la phrase « Si Comment avez-vous entendu parler de cet événement est Autre alors Pouvez-vous m’en dire plus ? est affiché », puis enregistre. Simple !

Choix du champ à afficher
Choix du champ à afficher

 

Le résultat est concluant :

Champ s'affichant sous condition
Champ s’affichant sous condition

Par ailleurs, il se dit qu’il aimerait bien recevoir un mail à chaque réponse.

Il se rend dans l’onglet « courriels » et ajoute un « courriel standard ». Pour adresse courriel du destinataire, il met la sienne.

Il parcourt les autres champs, mais les valeurs par défaut lui conviennent, et il décide donc de valider.

Ajout d'une adresse email pour recevoir un message à chaque participation.
Ajout d’une adresse email pour recevoir un message à chaque participation.

Dernière modification, cosmétique, dans l’onglet « Modifier », tout en bas, il choisit un autre thème, plus adapté aux smartphones que le thème par défaut (il faut dire que les amis de Tristan sont très connectés). Il enregistre encore une fois.

Choix d'un thème différent
Choix d’un thème différent (d’autres choix de thèmes seront ajoutés dans quelques semaines)

Voilà, son formulaire peut être diffusé !

Diffusion

En se rendant sur l’onglet « Partager », Tristan voit une option pour partager son formulaire sur les réseaux sociaux.

Il a supprimé son compte Facebook il y a très longtemps, parce que l’entreprise modifiait sans cesse ses conditions d’utilisation, de plus en plus abusives. Par contre Tristan a un compte diaspora* sur Framasphère, le pod du réseau social loyal et respectueux de vos données, géré par l’association Framasoft (le pod, pas le réseau :P). Et il est aussi très présent sur Twitter (100 000 abonnés tout de même). Il publie donc l’annonce du lancement de son livre sur ces deux réseaux. Il a même le code HTML qui lui permet d’afficher ce formulaire directement embarqué sur son site. Il envoie aussi l’adresse de son formulaire à ses contacts par email.

Possibilités offertes pour partager son formulaire
Possibilités offertes pour partager son formulaire

Les dés sont jetés.

Collecte, analyse et téléchargement des données

Quelques jours plus tard, Tristan se connecte sur Framaforms et peut retrouver son formulaire via le bouton « Mes formulaires ».

Il clique sur son formulaire, puis sur « Résultats ». Il peut alors voir le nombre de réponses et visualiser chacune d’entre elles en situation (et supprimer les tests qu’il avait faits au début).

Liste des participations (possibilité de visualiser/supprimer)
Liste des participations (possibilité de visualiser/supprimer)

Il peut aussi sélectionner l’onglet « Analyse » pour afficher des graphiques des réponses.

Analyse et graphiques
Analyse et graphiques

L’onglet « Tableau » permet, lui, d’avoir une vision globale des réponses (pratique pour les formulaires ne comportant pas trop d’éléments.

Détails des participations
Détails des participations

Enfin, il peut bien entendu télécharger les résultats au format .csv pour importer les informations brutes dans, par exemple, LibreOffice Calc (son tableur préféré).

Téléchargement des résultats
Téléchargement des résultats

Conclusion

Tristan a donc créé un formulaire en quelques minutes, qui plus est en étant certain que les données des réponses des participants n’iront pas nourrir l’ogre Google.

Formulaire final tel que vu par les utilisateurs
Formulaire final tel que vu par les utilisateurs

Il n’en a pas eu l’utilité, mais de nombreuses autres options étaient disponibles. Par exemple il aurait pu ajouter un champ pour demander l’âge des participants, avec une vérification automatique que la valeur saisie était bien un nombre compris entre 7 et 97 ans. Ou renvoyer automatiquement le participant sur une page de remerciements sur son blog une fois le formulaire rempli. Ou limiter le nombre de places aux 100 premiers répondants. Ou …

Pour aller plus loin :

  • Webform.com : une alternative très proche de Framaforms, partiellement libre – par l’auteur du module Webform (gratuit avec quelques limitations, mais avec une offre payante si vous ne voulez pas de contraintes)

 

Notes :

[1] – oui, cet exemple est tiré d’une histoire vraie que certain-e-s d’entre-vous reconnaîtront sûrement 😉 Cependant, notez que la soirée de Tristan est intervenue avant la sortie de Framaforms ! Il ne pouvait donc pas l’utiliser. Mais que ça ne vous empêche pas d’acheter son (excellent) bouquin !




Framanotes : vos notes vous appartiennent. For ever.

Framanotes vous permettra de chiffrer (et de retrouver) sans effort vos listes de courses, de tâches à faire, schémas et photos inspirantes, fichiers perso et marque-pages qui en racontent bien plus sur vous que ce que vous voudriez en dire !

Parce qu’avoir toutes ces petites notes sous la main, c’est pratique. Très pratique. On les arrange sur son ordinateur, on les récupère sur son téléphone quand on a en a besoin en déplacement, et on prend sa tablette pour ajouter trois photos et deux liens le soir depuis son canapé… Mais si tout passe par les serveurs d’Evernote (ou de ses concurrents), ces petits bouts de nos vies sont-ils vraiment en sécurité, demeurent-ils confidentiels ?

Attendez : Evernote, ce sont pas des GAFAM, si…?

Si, tout à fait.

Evernote est encore, pour l’instant (et à notre degré de connaissance) une entreprise indépendante des géants du Web étatsunien. Néanmoins, l’omniprésence croissante de leur application crée à elle seule un nouveau silo de données, donc un pouvoir important pour leur entreprise. Pour l’instant, leur modèle économique semble reposer sur le paiement de fonctionnalités et d’espace disque supplémentaire.

Le problème, c’est que non seulement leur code source n’est pas libre (donc nul autre qu’eux ne peut en faire l’audit pour savoir ce qu’ils font des informations qu’on leur confie) ; mais en plus cette concentration des utilisateurs leur confère un pouvoir unilatéral. Quand ils décident d’une hausse tarifaire, soit vous obtempérez, soit vous partez…

Les GAFAM ne s’y trompent pas : mieux comprendre vos intérêts, vos travaux, vos futurs achats, etc. a une valeur folle. Depuis la montée en puissance d’Evernote il y a quelques années, Google a sorti son application Keep, Microsoft son OneNote, Apple ses Apple’s Notes… Vous rendre service ET augmenter la valeur de votre profil publicitaire ? Voilà une affaire juteuse !
prise de notes avec un paon domestique

Framanotes : la tortue du chiffrement soulève le lièvre du profilage !

Nous avons donc installé Turtl sur nos serveurs. il s’agit d’un logiciel de prise de notes, mais pas comme les autres. Le principe est simple :

  1. Se créer un compte sur Framanotes.org
  2. Retenir son mot de passe (très important, nous ne pourrons pas vous le retrouver/renouveler !)
  3. Installer les applications sur votre bureau, ordiphone, tablette, etc.
  4. Les connecter à https://api.framanotes.org et à votre compte
    1. Bonus : ajouter une extension Turtl à votre navigateur !
    2. Bonus : utiliser la version Web sur https://mes.framanotes.org
REMARQUE : À l’origine, Turtl est pensé comme un ensemble d’applications se connectant à un serveur. La version Web est donc un hack expérimental : il s’agit du code des applications que nous avons simplement mis en ligne. Selon nos tests, elle fonctionne bien sur Chromium/Chrome, correctement sur Firefox, peu ou pas du tout sur Internet Explorer/Edge. Nous n’avons pas pu tester sur Safari/Vivaldi.

La différence qui change tout ? Turtl vous propose du chiffrement de bout en bout. Cela signifie que c’est l’application qui chiffre lorsque vous envoyez une note, et qui déchiffre lorsque vous la consultez (pas d’inquiétude, tout cela se fait automatiquement, sans que vous ne le voyiez ^^). Votre mot de passe permet l’accès à vos notes en clair, voilà pourquoi nous ne l’avons pas sur nos serveurs et ne pourrons pas le retrouver (sinon ce serait une grosse faille de sécurité) !

Techniquement, cela signifie que, quoi que vous notiez sur Framanotes, nous n’avons aucun moyen de savoir ce que c’est. Même s’il s’agit du meilleur coin à champignons de l’Ariège. Ou de la recette magique pour réintroduire des licornes sur Terre. Vos notes vous appartiennent à vous, rien qu’à vous et picétout !

En plus de cela, Turtl (et donc Framanotes) vous permet de :

  • Créer & modifier des notes textes au format Markdown
  • Donc créer aisément des listes à puces, avec titres, gras et italique
  • Créer & modifier des notes images (jusqu’à 2 Mo par fichier)
  • Créer & modifier des notes fichiers (jusqu’à 2 Mo par fichier)
  • Créer & modifier des notes marque-pages (adresses web)
  • Noter vos mots de passe (allez-y, c’est chiffré !)
  • Trier vos notes par un système d’étiquettes (tags)
  • Rechercher dans vos notes (indexation)
  • Rassembler certaines notes dans des tableaux
  • Partager un ou des tableaux avec vos ami-e-s (qui sont sur Framanotes)

Turtl est codé par Lyon Bros, en Common Lisp pour la partie serveur (licence AGPLv3) et JavaScript (si, si !) pour les applications et la version Web (licence GPLv3). Beaucoup de fonctionnalités intéressantes figurent sur leur feuille de route, donc n’hésitez pas à leur faire un petit don pour les encourager !

Ou alors, faites comme Framasky, qui, pour préparer Framanotes, n’a pas hésité à se retrousser les manches et a contribué au code en ajoutant entre autres un système de traduction (qui sera intégré aux applications dans leurs prochaines versions).

animation framanotes

Framanotes me sert à préparer mon prochain roman (et faire une tarte)

Nous aimons donner des exemples d’utilisations fictifs et un peu farfelus. Ici, nous allons simplement prendre l’exemple de Pouhiou, framaslave de son état, et romancier à ses heures perdues.

Pour écrire son prochain roman, mettant en scène un Incube patron d’un coffee shop, Pouhiou a besoin de rassembler les notes de ses recherches… Il décide donc de créer un compte sur Framanotes.org.

Il a bien lu l’avertissement, et note son mot de passe avec soin, parce que même en tant que salarié chez Framasoft, il sait qu’il n’y a pas de passe-droit possible : il est strictement impossible pour l’équipe technique de le lui retrouver s’il le perd.

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Maintenant, il lui faut installer l’application Turtl sur son ordinateur (sous Ubuntu) et son téléphone (sous Android/Cyanogen). C’est simple : télécharger, installer, rentrer son pseudo (avec la majuscule, sinon c’est pas le même) et son mot de passe, et bien inscrire  » https://api.framanotes.org  » dans les « paramètres avancés ».

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Bon il est temps de créer sa première note : il fait un résumé des idées maîtresses pour ce nouveau roman, et utilise la puissance du Markdown, un code tout léger et facile à utiliser, pour les mettre en page.

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Il en profite pour ajouter dans ses notes quelques liens et photos qui vont l’inspirer dans son écriture : des infos sur les incubes, des photos pour le coffee shop où démarre l’intrigue, et le document pdf du dictionnaire des Furby (puisque son démon sera accompagné de cette peluche possédée). Malin, il prend soin d’ajouter à chacune l’étiquette « Projet Incube ».

Les notes pour le roman de Pouhiou

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Dans ses recherches pour les plats servis au coffee shop, il trouve une recette de tarte crue « avocat-citron vert » qui lui fait vraiment de l’œil. (Aux autres frama-enquiquineurs aussi. À tous les coups ils vont demander à goûter pour l’AG, tels que Pouhiou les connaît.) Il décide d’installer l’extension Firefox pour l’ajouter plus facilement dans ses Framanotes… Vu qu’il utilise l’application Turtl sur son ordinateur, l’extension Firefox marche comme un charme ! (il sait qu’elle ne fonctionnera pas avec la version web)

L’application de bureau et l’extension Firefox s’appairent en un copier/coller !

Bon, c’est trop alléchant : il lui faut faire cette tarte. Il crée une note avec tous les ingrédients pour ses prochaines courses. Le problème, c’est que ça fait tache parmi les notes sur son roman ! Pas de souci : il va donc créer un tableau de notes « projet incube », puis un deuxième « courses et achats », pour trier encore plus facilement ses notes !

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Une fois dans son magasin préféré, il retrouve le tableau « courses » sur l’application de son ordiphone, et il retrouve le lien vers la recette ainsi que la liste des ingrédients nécessaires… Pratique, ce système !

Par
Par pudeur, Pouhiou n’a pas rajouté « PQ » dans sa liste de courses.

Le lendemain, il est temps de se remettre au travail. Framasky, son collègue à Framasoft, vient justement de lui proposer de partager un tableau de notes des tâches qu’ils ont à faire pour Dégoogliser Internet ! Oh la belle idée !

L’email du partage de Luc.

Il lui suffit de cliquer sur accepter pour que ces notes professionnelles s’ajoutent aux notes perso. Mais seules celles sur le tableau partagé avec Luc seront visibles par ce dernier.

#gallery-6 { margin: auto; } #gallery-6 .gallery-item { float: left; margin-top: 10px; text-align: center; width: 50%; } #gallery-6 img { border: 2px solid #cfcfcf; } #gallery-6 .gallery-caption { margin-left: 0; } /* see gallery_shortcode() in wp-includes/media.php */

Et voilà, Pouhiou n’a plus qu’à se mettre à l’écriture, aux fourneaux et au boulot ! À aucun moment il ne s’est rendu compte que tous les envois, échanges et réceptions de notes étaient chiffrés et déchiffrés, car les applications Turtl le font directement pour lui.

Chez Framasoft, nous sommes (littéralement) les premiers à « manger la pâtée de notre chien« , c’est à dire à utiliser les services que nous vous proposons. C’est donc avec un enthousiasme non dissimulé que nous pouvons vous affirmer combien ce Framanotes est pratique, utile et respectueux de vos données. Maintenant, c’est à vous de vous en emparer et de nous dire ! (Mais attention : Pouhiou n’envoie pas de parts de tarte par la poste !)

Pour aller plus loin :




Se lancer dans l’open source : un témoignage engageant

Comment participer à des projets open source et s’y sentir légitime ? La réponse habituelle un peu désinvolte consiste à dire : « il suffit de commencer à proposer ne serait-ce qu’un signalement de bug ou une correction mineure dans la documentation et hop ». En commençant par une contribution minime, on peut donc trouver sa place dans une équipe. Théoriquement, c’est exact.

Mais quand on est une jeune femme à peine sortie de ses études d’informatique et qu’on éprouve un peu d’appréhension au contact des contributeurs supposés expérimentés, rien n’est tout à fait simple.

Comme on le lira dans le témoignage de Shubheksha, il faut non seulement parvenir à surmonter son manque de confiance en soi, mais aussi avoir la chance de rencontrer sur son chemin des mentors qui vous accueillent avec bienveillance, vous guident et vous invitent à contribuer davantage encore.

Le parcours cahoteux d’une débutante dans le monde de l’open source

Article original paru dans Medium : A Beginner’s Very Bumpy Journey Through The World of Open Source

Par Shubheksha

Traduction :  Lyn, audionuma, goofy, Lumibd, Manguito,et un anonyme

shubhekshaAvez-vous atterri ici en recherchant des conseils sur la meilleure manière de contribuer à l’open source ? Il y a des milliers d’histoires de ce genre sur Internet, n’est-ce pas ?
Je suis sûre que vous en avez lu beaucoup à présent, car vous essayez de contribuer depuis un bon moment. Et vous avez toujours l’impression de ne pas avoir progressé.
Je connais ce sentiment. J’étais exactement dans la même situation il y a quelques semaines. Laissez-moi vous conter mon histoire.

Voilà à peu près deux ans que j’essaie de contribuer à l’open source.

Oui. Deux ans.

Et il y a bien une chose que je peux affirmer : c’est intimidant. C’est dur de commencer. Vous devez apprendre comment travailler sur un long code source. Vous devez apprendre et adopter les règles de style de code d’un projet.

Tout paraît confus. L’ordre des instructions, comment les différents modules interagissent entre eux, comment et pourquoi le code est organisé de la manière dont il l’est : tout cela constitue un grand labyrinthe.

Je ressens cela en permanence car je ne suis, après tout, qu’une amatrice qui essaie d’en apprendre autant qu’elle le peut.

J’ai donc choisi de suivre la voie la plus facile : la correction de fautes dans la documentation ou les commentaires, et la résolution de bugs triviaux où il était évident de trouver ce qui devait être modifié. Je ne voulais pas poser trop de questions ni essayer de comprendre l’ensemble du code.

Chaque fois que je voulais contribuer, j’allais sur github — ou un autre gestionnaire de bugs – et j’essayais de rechercher des problèmes étiquetés « facile », « débutant », « premier bug facile ». Après en avoir consulté des centaines, je trouvais quelque chose de suffisamment simple à traiter sans beaucoup d’aide extérieure.

Alors, cela a bien fonctionné jusqu’au moment où j’ai pris conscience que je pourrais mieux utiliser les compétences que j’étais en train de développer. J’avais appris tant de nouvelles choses, mais je ne voyais pas à quoi j’aurais pu les utiliser. Apprendre sans mettre en application, c’est bien peu gratifiant. J’étais bloquée sur un palier et je n’avançais plus du tout.

Alors, il est arrivé quelque chose qui m’a terriblement effrayée en tant que nouvelle contributrice qui essaie de naviguer dans le monde de l’open source. J’avais trouvé un bug qui avait l’air assez facile dans un grand projet renommé.

J’ai pensé qu’il valait mieux demander quelques éclaircissements avant de procéder à la moindre modification car je craignais de tout bousiller. J’ai donc envoyé un commentaire indiquant que j’étais une nouvelle contributrice, et demandant quelle serait la meilleure manière de modifier un bout de texte pour corriger le bug.

La réponse que je reçus fut :

« Si tu n’arrives pas à déterminer comment effectuer cette modification, c’est que tu n’es pas qualifiée pour effectuer cette modification. »

Cette réponse me laissa complètement décontenancée, et m’effraya davantage encore à l’idée de poser des questions lorsque je ne comprenais pas quelque chose à propos d’un projet.

Peut-être étais-je indésirable parce que je n’en savais pas assez ? Peut-être devais-je travailler davantage pour acquérir des compétences au lieu de poser des questions stupides et maladroites à des personnes expérimentées beaucoup trop occupées pour me répondre ?

C’est aussi à cette époque que ma recherche d’un mentor a commencé. J’ai pensé que si je connaissais quelqu’un avec qui je serais plus à l’aise pour poser des questions, les choses se passeraient bien et je pourrais me rendre plus utile.

J’ai donc écrit à de nombreuses personnes en leur demandant de m’aider à débuter, vu que je me sentais particulièrement intimidée par mes précédentes expériences. J’ai reçu beaucoup de réponses positives, pleines d’encouragements, mais je n’ai jamais exactement trouvé ce que je cherchais.

J’avais l’impression de buter contre un environnement clos dans le monde ouvert de l’open source.

Tout semblait suggérer que je n’avais qu’à m’y mettre et à ne pas avoir peur. Mais je n’étais pas prête à ce moment là.

Moi, fuyant le monde du logiciel open source

Ma découverte de Mozilla

Par une belle soirée, alors que je cherchais des bugs à corriger, j’ai atterri sur le projet de Mozilla qui vous aide à tester des extensions web. J’étais contente de voir qu’il y avait quelques problèmes étiquetés comme « premier bug facile » mais aucun d’entre eux n’était aussi simple que de corriger une petite coquille.

Bon sang, j’en suis tellement heureuse maintenant.

J’ai commencé à travailler sur l’un de ces bugs, mais j’ai vite compris qu’il me faudrait poser des questions si je voulais être capable de résoudre le problème. J’ai parcouru le code source. Après avoir compris les grandes lignes du problème, j’ai demandé plus d’informations. et voila ! J’ai été capable de résoudre le problème une fois que j’ai eu tous les détails nécessaires.

Maintenant que j’ai soumis trois pull requests [NDT : demandes de modification du code source] (l’une a été acceptée, les deux autres sont en passe de l’être), je suis heureuse d’avoir franchi le pas. Je suis contente de ne pas avoir hésité à poser des questions pertinentes, même si je risquais parfois d’avoir l’air de poser des questions stupides.

Ce n’est pas un problème de ne pas tout savoir et de progresser par étapes pour apprendre quelque chose de nouveau.

Les gens de Mozilla qui encadrent ces corrections m’ont beaucoup aidée et ont toujours été très positifs. Ils m’ont guidée du début à la fin, prenant le temps de m’expliquer les choses de façon à la fois simple et très détaillée. Et cela malgré le fait qu’ils n’auraient mis que quelques heures à corriger ces problèmes eux-mêmes au lieu de prendre le temps de me guider vers une solution de mon cru, dont la conception m’a pris plusieurs jours.

J’ai appris et découvert énormément de choses juste en travaillant sur ces trois problèmes basiques. Et je suis vraiment excitée à l’idée de travailler sur des problèmes encore plus difficiles et d’augmenter ma compréhension de ce sujet et mes connaissances.

l'insatiable vieux dino de Mozilla se goinfre de bugs
l’insatiable vieux dino de Mozilla se goinfre de bugs

Je ne peux pas les remercier assez pour cette expérience tellement positive et enrichissante, qui m’amène à installer Firefox localement et à parcourir les bugs sur Bugzilla un jour sur deux (je garde mes questions sur « Pourquoi » et « Comment » pour un billet plus long).

Je prévois de contribuer à Mozilla aussi régulièrement que possible. À chaque fois que j’ai posé une question pertinente, que ce soit sur IRC, Github ou Bugzilla, j’ai reçu des réponses très aimables.
Jusqu’à aujourd’hui, j’ai résolu trois problèmes dans web-ext, et j’ai eu un correctif accepté et intégré dans Firefox.

Mes contributions ont été remarquées par la communauté, et j’ai aussi été nommée dans le « Addons Contribution Recognition document » [NdT : la liste des contributeurs aux extensions de Mozilla].

En définitive, mes expériences de ces dernières semaines ont été vraiment merveilleuses. J’ai appris tellement de choses, petites et grandes, qu’aucun manuel de programmation n’aurait pu m’apprendre.
Voici mes conseils pour les développeurs débutants qui veulent contribuer à un projet open source :

Conseil n°1 : n’ayez pas peur de poser des questions

Je ne saurais trop insister sur ce point. J’ai perdu beaucoup de temps parce que je ne cessais de me censurer, et c’était ma plus importante inhibition.

Tout le monde a peur de paraître stupide. Mais ne laissez pas cette peur paralysante devenir une entrave à votre progression.

Il est normal de demander si vous ne comprenez pas quelque chose qui est en rapport avec le projet. Les développeurs du projet sont devenus des experts au fil des années. Ils peuvent vous aider très rapidement. Sinon vous risquez de perdre des heures le nez dans le code source à essayer de deviner quelque chose que vous n’êtes même pas censés savoir au départ.

Mais quand vous demandez des informations, vérifiez si elles ne sont pas déjà disponibles dans une documentation ou une recherche Google. Ainsi, vous prendrez garde à respecter le temps libre des développeurs du projet.

Conseil n°2 : c’est normal d’avoir des lacunes

On ne s’attend pas à ce que vous sachiez tout de A à Z lorsque vous commencez à contribuer à un projet. Le processus, c’est plutôt que vous appreniez et gagniez en compétence en résolvant des problèmes de plus en plus difficiles, et en vous familiarisant avec le projet et les outils qu’il utilise. Le temps nécessaire pour cela varie d’un projet à l’autre et d’une personne à l’autre.

Conseil n°3 : lancez-vous !

Ne perdez pas un temps considérable à choisir le projet idéal. Si vous connaissez un projet ou une organisation dont la communauté accueille amicalement les débutants, faites-en votre point de départ.

Trouvez un problème avec lequel vous êtes à l’aise, de préférence dans un langage que vous pratiquez déjà depuis un moment, et essayez d’imaginer ce qui a besoin d’être fait. Demandez des informations pertinentes afin de combler vos lacunes, et après, lancez-vous ! N’attendez pas.

Merci à tous ceux qui travaillent dans l’open source

Une dédicace spéciale à tous les contributeurs aux projets open source qui sont super réactifs et qui encouragent les nouveaux. Vous aidez les nouveaux venus à se frayer un chemin au milieu d’interminables lignes de code et les faites contribuer de manière peut-être limitée mais néanmoins significative. Vos efforts sont nécessaires et sincèrement appréciés.

En tant que débutante et développeuse junior, j’essaie juste de trouver mon chemin dans le vaste et formidable monde de l’informatique. Quelques minutes de votre temps, que ce soit pour me présenter une simple technique de débogage ou pour me montrer comment écrire correctement des tests logiciels, m’aideront, au fil du temps, à devenir une meilleure développeuse.

Vous avez l’expérience et j’ai l’envie insatiable d’apprendre autant que je peux.

Un grand merci à Guido, Kumur McMillan et Luca qui ont été de fabuleux mentors tout au long de ce parcours, ils m’ont suivie à chaque instant et ont répondu à mes diverses questions. J’ai vraiment apprécié le temps et les efforts que vous m’avez consacrés 🙂

Si vous êtes un nouveau venu qui peine à entrer dans le monde de l’open source, j’aimerais que vous me parliez de votre histoire et de votre expérience. Si je peux vous aider de quelque façon que ce soit, surtout n’hésitez pas à me contacter.

J’envisage de rendre compte de mon parcours chez les contributeurs de l’open source, donc si vous désirez que j’aborde un sujet en particulier, merci de laisser un commentaire.
Merci à Pawan Dubey et Quincy Larson pour m’avoir aidée à peaufiner cet article.




Avec « Des routes et des ponts », la voie est libre

Les membres du groupe Framalang ont toujours un gros appétit, il faut à leur insatiable faim de traduction de nouveaux aliments. C’est un morceau de choix qu’ils ont décidé de traduire et publier progressivement ici même…

… un livre entier de Nadia Eghbal qui porte sur l’infrastructure cachée ou discrète de la grande soupe numérique où nous grenouillons. Cet ouvrage a été financé par la Fondation Ford et sa source est sous licence CC BY 4.0, ce qui vous permet d’en profiter.

Si ça vous tente de nous rejoindre dans cette entreprise à long terme (il nous faudra quelques mois et nous n’avons pas de deadline hein) nous diffuserons sur Framasphère l’adresse du framapad de la traduction de la semaine chaque mardi à 19h 😉

 

Nous vous proposons aujourd’hui seulement l’avant-propos.

Histoire de susciter votre curiosité voici quelques titres des chapitres que nous vous proposerons semaine après semaine :

  • Une brève histoire du code public et libre et de ceux qui l’ont libéré
  • Pourquoi les gens continuent-ils à contribuer à ces projets sans être payés ?
  • Comment sont gérés les projets d’infrastructure numérique ?
  • Les rapports difficiles de l’open source avec l’argent

 

Des routes et des ponts (1)

Document original (lien direct vers le PDF) Roads and Bridges, The Unseen Labor behind Our Digital Structure
par : Nadia Eghbal

Traduction Framalang : astraia_spica, Mika, peupleLà, roptat, xi, Luc, mika, Lyn., Julien / Sphinx, Lumibd, goofy

Avant-propos

nadia-eghbalLe problème exposé dans cet ouvrage m’est apparu sur une intuition. Pour avoir travaillé dans des startups puis dans des sociétés de capital-risque, j’ai pu constater que des sommes d’argent considérables affluaient dans les entreprises de logiciel. Par ailleurs, en tant que développeuse de logiciel en amateur, j’étais bien consciente que je n’aurais rien pu produire toute seule. J’utilisais du code gratuit et public (plus connu sous le nom de code open source) dont j’assemblais des éléments afin de répondre à des objectifs personnels ou commerciaux. Et franchement, les personnes impliquées dans ces projets avaient, quel que soit leur rôle, fait le plus gros du travail.

Cette observation m’a tourné dans la tête pendant plusieurs années, tandis que j’assistais à l’explosion à droite et à gauche des bootcamps où étaient diplômés de nouveaux développeurs de logiciel et que je voyais des startups lever plusieurs dizaines de millions de dollars pour vendre des produits qui tournaient sans doute avec plus de code libre que de code propriétaire. Ayant précédemment travaillé dans des associations à but non lucratif, je faisais immédiatement le lien avec les biens publics et les défis qui leur sont associés. Pourtant ce vocabulaire était étrangement absent du langage de mes pairs dans le monde du logiciel.

Après avoir quitté mon travail dans une entreprise de capital-risque l’an dernier, je me suis mis en tête d’étudier ce paradoxe auquel je ne cessais de penser : il existe des logiciels précieux qui ne peuvent pas s’appuyer sur des modèles commerciaux et auxquels manquent le soutien des pouvoirs publics.

C’est plutôt amusant, mais le code open source ne figurait pas sur ma liste initiale. Comme mes collègues, j’avais supposé, à tort, que c’était l’exemple même de ressources logicielles à la disposition du public qui bénéficiaient d’un fort soutien. Lorsque j’ai mentionné l’open source à mes amis et mentors, ils m’ont aimablement dissuadée de poursuivre mes recherches dans ce domaine, puis incitée à plutôt trouver d’autres exemples de domaines qui avaient vraiment besoin de soutien.

soutien

Pourtant, je suis tombée sur un certain nombre de projets open source qui mettaient à mal ces préjugés. Il s’est avéré que maintenir les projets dans la durée était un problème connu dans le monde des contributeurs de l’open source. Plus je creusais la question et plus je découvrais des billets de blog, des articles et des forums de discussion qui abordaient la tension et l’épuisement éprouvés par ceux qui maintiennent les projets open source. Tout le monde m’indiquait une autre personne à contacter et sans m’en apercevoir j’ai récolté un nombre incroyable de témoignages à ce sujet.

Je me suis rendu compte que j’avais découvert un problème certes « bien connu » des producteurs (les contributeurs de l’open source) mais dont les consommateurs (les entreprises de logiciels et les autres utilisateurs de code open source) n’avaient apparemment aucune idée. Cette anomalie m’a incitée à me pencher sur le problème.

Par ailleurs, il semble que le milieu de l’open source soit lui-même en train d’évoluer, voire de bifurquer. J’ai eu des conversations très diverses avec des interlocuteurs de différentes générations, tous contributeurs open source. Ils semblaient avoir des philosophies et des valeurs divergentes, au point de donner l’impression de ne pas utiliser le même vocabulaire. J’ai appris que dans les trois à cinq dernières années, la production ainsi que la demande avaient explosé dans le monde de l’open source grâce à l’amélioration des outils pour les développeurs et à celle de l’organisation du travail. Les contributeurs de l’open source d’aujourd’hui sont très différents de ceux d’il y a 10 ans, sans parler de ceux d’il y a 30 ans. Or ces différentes générations ne communiquent pas entre elles, ce qui rend difficile toute conversation productive sur la maintenance pérenne des logiciels.

Au hasard d’une conversation avec Ethan Zuckerman, du MIT Center for Civic Media, j’ai eu l’occasion de partager plus largement mes découvertes.

Bien que ne sachant pas exactement ce qu’il y avait derrière ni si j’employais les bons mots, j’ai décrit à Ethan le problème dont je m’étais rendu compte et il a eu la gentillesse de me mettre en contact avec Jenny Toomey de la Fondation Ford. Jenny m’a suggéré de rassembler les résultats de mes recherches dans un rapport. Au fur et à mesure de son écriture a émergé cet ouvrage sur notre société numérique moderne, et sur l’infrastructure cachée qui la sous-tend.

Le présent ouvrage n’aurait jamais vu le jour si Ethan et Jenny n’avaient pas donné sa chance à une idée tout juste ébauchée qui désormais, grâce au travail d’écriture, s’est transformée en quelque chose de construit. Je les remercie énormément d’avoir fait confiance à leur intuition. Je suis aussi reconnaissante envers Michael Brennan et Lori McGlinchey pour leurs conseils, leur regard, et leur enthousiasme au cours de la relecture. Enfin, et c’est sans doute le plus important, j’ai une dette envers toutes les personnes qui travaillent dans l’open source et qui ont rendu leur histoire publique pour que des gens comme moi puissent la lire — et particulièrement ceux qui ont pris de leur temps malgré un agenda chargé pour me divertir au détour d’une conversation ou d’un courriel. Ce rapport est un concentré de leur sagesse et non de la mienne. Je suis particulièrement reconnaissante pour les conversations que j’ai pu avoir avec Russel Keith-Magee, Eric Holscher, Jan Lehnardt, Audrey Petrov et Mikeal Rogers, ils continuent à m’inspirer par leur patience et leur dévouement à l’égard du travail open source.

Merci d’avoir été aussi attentionnés.




David Revoy, la BD et les licences libres

Si vous avez raté le début…

(Si vous avez déjà suivi les épisodes précédents, allez directement au texte de David…)

Comme le savent nos lecteurs, nous défendons volontiers non seulement les logiciels mais aussi la culture libre sous ses multiples formes, y compris dans le domaine artistique :

turbulencesla position et l’expérimentation d’artistes comme Gwenn Seemel, Amanda Palmer, Neil Jomunsi entre autres multiples exemples (ne risquons pas l’accusation de copinage en mentionnant Pouhiou), nous intéressent et nous passionnent parce qu’elles témoignent d’un monde à la charnière. En effet, un modèle d’édition et de diffusion arrive en bout de course et à bout de souffle, mais il est défendu mordicus à la fois par ses bénéficiaires (c’est cohérent) et parfois par ses victimes, ce qui est plus surprenant. Quant aux modèles émergents, aux variantes nombreuses et inventives, ils cherchent la voie d’une viabilité rendue incertaine par les lois du marché qui s’imposent à eux.

Le mois dernier une annonce nous a fait plaisir, celle de la publication « papier » par Glénat du webcomic Pepper et Carrot de David Revoy, qui n’est pas un inconnu pour les lecteurs du Framablog auquel il a accordé cette interview il y a quelques mois. Voici la page où il détaille sa philosophie.

Un article de Calimaq expose de façon documentée l’intérêt de cette reprise d’une œuvre open source par un éditeur « classique » dans laquelle il voit de façon optimiste une façon de faire bouger les lignes qui bénéficie autant à l’auteur (qui renforce ses sources de mécénat) qu’à l’éditeur et aux lecteurs.

Tout va donc pour le mieux dans le petit monde de la BD ? — Pas vraiment, parce que l’accord passé par David Revoy avec Glénat (lequel s’engage à respecter cette licence Creative Commons) vient de provoquer une levée de boucliers chez un certain nombre d’auteurs de bande dessinée. Ils estiment notamment que cet accord dévalorise l’ensemble d’une profession qui peine déjà à survivre et s’insurgent contre l’idée de donner librement le fruit d’un travail artistique.

Vous pouvez par exemple lire ce billet de Xavier Guilbert pour la revue Du9 qui résume de façon assez équilibrée l’ensemble de la polémique. Si vous souhaitez lire un avis circonstancié carrément libriste, lisez l’excellent coup de gueule de Luc, qui fait notamment le lien avec Framabook, notre maison d’édition qui a fait « le pari du livre libre », mais établit néanmoins des contrats avec les auteurs qui sont rémunérés.

Également du côté des défenseurs du libre Neil Jomunsi sort la grosse artillerie et demande aux auteurs de se sortir les doigts du c**. C’est précisément à la suite de cet article que le principal intéressé s’exprime dans un long commentaire que nous reproduisons ici avec son accord.

2016-04-13_carrot-updating-or-repairing_by-david-revoy

(dans un premier temps David s’adresse à Neil Jomunsi)

2015_portrait-of-david-revoy_by-elisa_de_castro_guerra
Photo par Elisa De Castro Guerra

Hello, merci Neil pour cette initiative, j’espère y lire ici des propositions constructives de la part des autres auteurs et non pas seulement des retours des happy few qui vivent confortablement du système éditorial classique. En effet, je prends en considération que ces auteurs ne peuvent pas émettre une pensée libre d’intérêts éditoriaux ou syndicaux sur ce thème (surtout de manière publique). Ils ont aussi très peu d’intérêt à un changement de paradigme…
Pour ma part, je me suis très peu exprimé jusqu’alors. Mais je me sens à l’aise sur ce blog. J’aime le ton de l’article, la police d’écriture et la boîte de commentaire large. Je pense que ça risque de me faire pianoter. Et puis, je n’ai pas de blog français… Je réquisitionne donc cette boîte de commentaire un peu comme un blogpost de réponse.

 

Voici mon angle de vue que-personne-ne-m’a-demandé-mais-voilà-tout-de-même sur le modèle de Pepper&Carrot et pourquoi, je le répète, il me convient et que je maintiens ma tag-line sur ma page de garde :

devise

(Note : j’utiliserai par raccourcis les termes ‘auteurs’, ‘éditeurs’, ‘lecteurs’, mais je pense bien également aux ‘autrices’, ‘éditrices’, ‘lectrices’ derrière ces termes.)

Donc entendons-nous bien ici : je ne suis pas dans une lutte classique tel qu’on l’entend, voulant la destruction d’organisations, d’entreprises ou autre systèmes en place. Dans « changer l’industrie de la BD », j’entends « sanifier » les relations auteurs/éditeurs par plus de liberté et d’indépendance dans leurs relations. Par sanifier, je n’entends pas l’inversion du rapport de force où l’auteur triomphe de l’éditeur. Non. Dans ma démarche, il n’y a pas de rapport de force entre auteur et éditeur. L’éditeur est un acteur libre qui fait un produit dérivé de ma création. Dans le système classique, il y a un rapport dominant/dominé évident, contractualisé et opaque aux lecteurs. C’est tout là le problème. Avec Pepper&Carrot, je propose un système côte-à-côte. Chacun indépendant.

Ce système marche-t-il ? Sur ma page Philosophie, j’écris

… Et pourquoi Pepper&Carrot ne pourrait-il pas amorcer un changement et ainsi inspirer une industrie en crise ? Essayons !

Ce « essayons » démontre le caractère expérimental de ma démarche. Car oui, je suis en train de créer, oui, c’est nouveau et oui, ça agace quand quelqu’un essaie du nouveau.

Pepper&Carrot est un webcomic numérique en anglais principalement et international. Il est hébergé autant à Paris, qu’au U.S.A, en Asie et sur je-ne-sais-combien de sites miroirs et ça tourne. La France représente 4 % de ses visiteurs et cela me donne un peu de retrait sur le problème actuel. En effet : il serait vraiment malhonnête de penser que je suis dans la même situation qu’un jeune dessinateur amateur français, publiant en français sans audience et qui n’aurait qu’un seul éditeur monolithique comme source de revenus/diffusion, Glénat, pour survivre avec les 350 $ par mois de mécénat de Glénat… C’est pourtant, et à l’origine du buzz, l’angle de communication surprenant qu’a essayé d’orchestrer le syndicat BD SNAC sur sa page Facebook, et ce, bizarrement à quelques dizaines de jours d’une rencontre auteurs/éditeur importante. À part m’y faire traiter littéralement de con dans les commentaires et d’amener un lectorat d’auteurs entier à mépriser ma démarche, rien n’a germé, aucune pensée : stérile. Cependant cela a alimenté de la colère. Ce groupe a-t-il besoin de ça pour s’unifier ? Pepper&Carrot/Glénat est simplement devenu un prétexte du moment. Une opportunité pour eux de « casser de l’éditeur » collectivement et dénigrer un nouvel auteur qui n’a pas choisi de lutter à leur manière. Triste.

Donc ce buzz, dit il la vérité ? En partie, oui, c’est pour ça que ça marche. Il est possible à n’importe qui de faire des produits dérivés de Pepper&Carrot, de façon commerciale, en suivant un ensemble de règles de la Creative Commons Attribution permissive que j’ai établie. Glénat qui imprime à 10 000 exemplaires mon webcomic n’est qu’un produit dérivé à mes yeux (comme déjà dit). Pour faire un parallèle, je le considère comme si j’avais un film et qu’ils imprimaient la figurine du héros. Rien de plus. Nous avons eu une collaboration que je décris en anglais sur le blog de Pepper&Carrot. J’en suis satisfait, c’est super cool un premier album imprimé, mais cliquez sur le bouton « HD » sur le site de Pepper&Carrot, et vous y aurez plus de détails, plus de couleurs que dans l’album imprimé.

Ma BD principale, mon support de choix n’est pas l’album de Glénat. Ce n’est pas le média principal de Pepper&Carrot. D’autres projets suivront comme l’éditeur allemand Popcom qui vient de rejoindre le mécénat de Pepper&Carrot, le livre de la Krita Foundation ou une édition régionale en Breton de Pepper&Carrot. Ce n’est que le début, le projet n’a que deux ans et je ne compte pas tout ça comme un manque à gagner. Je n’y vois que les effets positifs de personnes qui utilisent la base de ressources que j’ai créée, avec respect, dans les règles qui me conviennent pour créer plus de valeur autour de la série. Et ça fonctionne.

Glénat fait des bénéfices ? Et alors ? Bon pour eux. Le font-il « sur mon dos » ? Non, je ne me sens pas lésé en quoi que ce soit. Pas plus que quand Pepper&Carrot fait la frontpage d’ImgUr, de deviantArt ou de Reddit. (je vous présente ici des nouvelles puissances éditoriales). Le papier, la chaîne graphique, l’impression, l’empaquetage, la distribution, etc. c’est le métier de l’éditeur, il véhicule mon œuvre sur le papier. Pas très différent de ce que ferait un autre site web, pour moi. De mon point de vue, je fais du divertissement numérique sur Internet et je ne vends pas de BD. Si l’éditeur aime la source qui lui permet de vendre du papier, il sait comment me gratifier. Idem pour l’audience. C’est simple et c’est décrit dans l’album papier de Glénat Pepper&Carrot (si certains avaient pris le temps de l’ouvrir). Ce qui m’interpelle vraiment, c’est : Glénat imprime 10 000 exemplaires et aucun petit éditeur ne pense à aller sur mon site télécharger plein de croquis Creative Commons et en faire un artbook d’accompagnement en librairie ? Publier des cartes postales ? Refaire une version « deluxe » du Tome 1 ? Le monde éditorial à moins d’initiative que ce que j’avais prévu.

Je veux un univers collaboratif dont le lecteur puisse s’imprégner et devenir à son tour acteur, entrepreneur. Ici encore la Creative Commons Attribution le permet

J’aimerais aussi faire prendre conscience dans ce débat sur un autre point qui n’est jamais abordé dans les articles : la « culture libre » que permet Pepper&Carrot. Les auteurs ont conquis une place dans les esprits de leurs audiences qui me dérange fondamentalement. Prenez par exemple une BD lambda, distribué sous copyright classique (même d’un webcomic « gratuit » mais propriétaire d’Internet). Tout le monde peut penser l’univers, rêver dedans, rejouer les scènes en pensée, etc. Cet univers existe en nous. Mais dès que cette pensée essaie de germer, de muter, de passer à l’action dans la vraie vie par une création, elle se retrouve anéantie ou réduite aux règles vaseuses du fair-use/fan-art/fan-fiction qui devient illégal en cas de création d’activité commerciale. Combien de cas problématiques sur Internet ces dernières années ! Sans le savoir, les auteurs d’univers propriétaire sont aussi propriétaires d’une part de votre culture, de votre pensée, de vos rêves, de ce qui regroupe les fans…

Avec Pepper&Carrot, je ne veux plus de ce paradigme du tout. Je veux un univers collaboratif dont le lecteur puisse s’imprégner et devenir à son tour acteur, entrepreneur. Ici encore la Creative Commons Attribution le permet, et ainsi j’ai des projets de jeux vidéos, de jeux de sociétés, de jeux de rôles de fan-art et de fan-fictions qui viennent à leur tour enrichir le wiki de l’univers d’Hereva à la base de Pepper&Carrot. Encore une fois, ceci est ma volonté de créer une relation côte-à-côte avec le lecteur, et j’en vois les bénéfices.

je replace l’auteur maître de son œuvre en face de l’éditeur dans un rapport d’égal à égal dans leur liberté et leurs droits.

Vous l’avez donc compris, je ne suis pas intéressé par l’établissement d’une relation d’un contrat classique, dominant-éditeur, dominé-auteur et sous-dominé-lecteur-acheteur. C’est liberticide et nuirait collectivement à notre éditeur-auteur-lecteur, à nos libertés d’agir, d’entreprendre et de penser. Je fonde un écosystème où les acteurs sont libres et côte-à-côte dans un rapport pacifié. La CC-By-Nc ? (la clause non-commerciale de la Creative Commons) désolé, je ne la veux pas pour ma BD, et ce n’est pas parce que ça s’appelle Creative Commons que c’est libre : c’est une licence propriétaire. La CC-By (attribution) est libre et m’intéresse. Avec cette liberté, cette indépendance, j’ai ici un modèle qui fonctionne à ma modeste échelle et tout ceci alimenté financièrement grâce à des héros dans mon audience qui soutiennent mon travail et ma philosophie.

L'image finale de l'épisode 8 récemment publié
L’image finale de l’épisode 8 récemment publié, l’anniversaire de Pepper

 

Mais ce n’est pas tout… Ce que je propose est une solution robuste contre la question du piratage de la BD, ce que je propose rend obsolète la création même des DRM pour la diffusion numérique, ce que je propose clarifie les rapports ambigus pour la création de fan-art/fan-fiction et dérivations, et enfin je replace l’auteur maître de son œuvre en face de l’éditeur dans un rapport d’égal à égal dans leur liberté et leurs droits.

Refaites le compte, et réévaluez ma proposition. Libre aussi à chacun de signer un contrat, de le négocier, de savoir quoi faire avec son œuvre. Mais pour moi, cette réflexion est faite. J’aime le libre pour ce qu’il offre pragmatiquement et je suis déjà dans son application à la réalité concernant ma BD depuis deux ans. Il vous reste un dégoût qu’une grosse entreprise genre « gros éditeur » puisse imprimer vos œuvres gratuitement ? Cela fait partie de la licence libre telle qu’elle est et de la liberté qu’elle offre. La licence n’est qu’un outil ne peut pas faire vraiment de différence entre la lectrice/traductrice japonaise, le petit commerçant polonais, l’artisan irlandais, le gros site web australien et le géant industriel de l’édition française… Sinon ce ne serait plus de la vraie liberté.

Il ne me reste plus qu’à continuer d’informer les lecteurs et leur demander de soutenir les artistes libres qu’ils aiment directement via Internet et non de penser que ces artistes touchent un quelconque gros pourcentage opaque sur les produits dérivés que ceux-ci iront acheter. Cette tâche d’information, si on s’y mettait tous collectivement et pratiquement entre artistes, aurait certainement plus d’effets sur nos niveaux et confort de vie que toutes négociations de pourcentages et discussions de frais d’avances autour de réunions et de cocktails.

portrait-of-charles-darwin_by-david-revoy
Darwin par David Revoy, extrait de son portfolio. Cliquer pour agrandir ce portrait à la manière d’Arcimboldo.

 

  • Toutes les illustrations de cet article sont de David Revoy, CC-BY



Le Framablog a 10 ans, c’est vous qui le dites

Et hop, voici comme promis le remix de vos réponses aux quelques questions posées à propos des 10 ans du Framablog. Les lecteurs de la première heure se sont manifestés, mais aussi les plus récents !

Nous avons souhaité publier ce mashup pour vous donner la parole à l’occasion de cet article n° 2000 — enfin 2001, on a été un peu grillés parce que les annonces de rentrée sur le blog ont commencé à déferler, et ça ne va faire que croître et embellir, restez tunés !

Découvrez donc notre choix parfaitement arbitraire parmi vos réponses. Précisons : nous n’avons pas retenu *tous* les compliments et remerciements parce que ça faisait vraiment beaucoup, mais ça fait vachement plaisir ! Un grand merci à tous les lecteurs, nous voilà dopés pour la rentrée !

 

Comment tout a commencé

Voici les réponses à la question : comment avez-vous découvert le Framablog ?

obligation

  • Probablement par le Planet Libre tout au début
  • Par Ubuntu-fr, grâce au stand Framasoft lors d’une Ubuntu Party
  • Par linuxfr
  • Grâce à mes professeurs d’informatiques qui avaient installé nos ordinateurs directement avec Firefox et un marque page vers l’annuaire de logiciels libres Framasoft.
  • Par un ami libriste en DUT informatique
  • c’est une connaissance qui m’en a parlé.
  • par mon entourage proche, famille militante qui m’a fait connaitre le libre et ses combats
  • à cause de Pouhiou !! <3

Chacun sa route, chacun son chemin

J’ai connu le Framablog en m’intéressant à Linux, je voulais changer de Windows non pas pour son aspect libre, gratuit… mais parce que mon Windaube tombait tout le temps en panne. De fil en aiguille, de recherches en réponses et de liens en liens, j’ai découvert Framasoft (monde du libre oblige) et le Framablog. Je suis arrivé un peu avant le campagne « dégooglisons Internet », et je me suis mis à suivre le blog par flux RSS car cette initiative m’intérêssait. Je suis un peu un genre de « Dupuis-Morizeau » qui a basculé de l’autre côté du mur des GAFAM et utilise Linux Mint depuis 1 an en tant qu’OS principal, un peu grâce à Framasoft aussi !

memoire

 

  • Bonne question, je ne m’en souviens même plus.
  • Je ne sais plus !
  • Je ne sais même plus depuis le temps…
  • Je ne sais plus comment j’ai connu Framablog
  • je ne m’en rappelle plus
  • Je sais plus vraiment…
  • Je ne me souviens plus … ça fait tellement longtemps …

Des articles ? il en manque !

Réponses sélectionnées à la question :

« Je trouve que dans le Framablog on ne parle pas assez de… »

alors, ça avance ?

…de l’avancement de dégooglisons (notament framaforms, framatweet, framapétitions et framanotes)
et des C.H.A.T.O.N.S. Vous nous avez bien titillé, on veut en savoir plus. Vous pourriez parler de jeu vidéo libre aussi, après tout c’est de la culture.

l’école du libre

  • du libre… mais on n’en parlera jamais assez 😉
  • des logiciels libres
  • Je ne serais pas contre parler un peu plus d’éducation, et de la place du libre (ou de son absence de place parfois) dans le système éducatif, et des enjeux (cachés ou non) qu’il y a derrière cela
  • Articles de fond, l’éducation (qui était vraiment très présent avant)

penser global, agir local

…d’action possible près de chez nous !

message perso

[Tac au tux] (et ça, c’est pas pour de rire, faut vraiment réorganiser ça !!!)

pour aller plus loin

  • J’ai envie de dire de technique, mais je sais bien que ce n’est pas le but du framablog.
  • Je pense que les articles de fond devrais proposer à la fin un index de ressources pour aller plus loin, soit techniquement, soit dans la réflexion, soit dans l’action. Par exemple un article sur le chiffrement devrait proposer des liens sur :
    – Les détails technique du chiffrement
    – D’autres articles sur le chiffrement
    – Comment essaimer (je vous mets dans ma poche avec ce mot :p)

le bistrot des distros

  • Je trouve que dans le Framablog on ne parle pas assez de… Mageia. Blague à part, ne parle pas assez des distributions GNU/Linux. Le Libre par les logiciels c’est bien, le système qui les supporte a aussi son importance (même si Mme Michu ne souhaite pas adhérer au pingouin chevaucheur de Gnou).
  • de distribution Gnu/Linux
  • des GAFAM … cf.  https://gafam.wordpress.com/ que j’ai mis en ligne il y a quelques mois & http://www.gafam.fr/ que je suis en train de préparer tranquillement (et qui devrait être fin prêt en fin d’année) pour en faire un «  »vrai » » site concernant cette problématique : «  » gafam.fr : Faire connaître & promouvoir les alternatives aux GAFAMs
  • de la protection de la vie privée (par des trucs & astuces, sous win & sous linux) : peut-être que notre ami gee pourrait faire quelques planches à se sujet ?
  • des distributions GNU/Linux les plus populaires / connues / stables … pouvant judicieusement remplacer win & mac
  • des logiciels libres les plus utilisés / connus … (pour présenter simplement / clairement les alternatives libres aux logiciels privateurs utilisés par mesdames Michu & Dupuis-Morizeau, en leur expliquant bien le pourquoi du comment)
  • Distros et logiciels libres en remplacement des fermés

#FramaDebout

  • Thèmes anticapitalistes, contre les entreprises (Ubuntu), des intérêts divergents entre les profits et 99 % de la population.
  • Peut-être de structure économique justifiant les dérives, à mes yeux, -mais je m’avance un peu- ^^
  • l’incompétence des décideurs (politiques, économiques…) en matière de progression de la société, ou de leur quasi volonté d’anesthésier le peuple.
  • politique au sens large

le vrai problème

comment trouver l’amour quand on est un libriste !

coeursolitaire

C’est beau mais bof

« Techniquement et graphiquement, je trouve que le Framablog… »

travail non évalué

Bon, ça va, hein. Mais la perfection n’existe pas, donc ne compte pas sur moi pour un 20/20

c’est du bio c’est du bon

  • C’est propre tout en ayant un petit goût de fait à la main, et quand c’est fait à la main, c’est souvent bon.
  • Sobre, léger, très sympa
  • est bien lisible sans se fatiguer. La navigation est facile.
  • Sobre, esthétique et LISIBLE.

beugue riporte

Est assez épuré, les articles sont plaisants à lire même si parfois pour les interviews, on a des gros pâtés de texte. À noter, j’ai toujours un effet de scintillement lorsque la CSS se charge, vous pourriez peut-être voir pour améliorer les perfs de ce côté pour éviter ce « flash ».

fitcheur ricoueste

  • Je n’y accède que par mes flux RSS. Peut-être un lien direct vers les commentaires en fin d’article (comme sur LinuxFR)
  • Je lis les articles directement sur TheOldReader. Avoir les articles complets dans le flux RSS est important pour moi.
  • Une version mobile/responsive serait un plus.

osef

  • Globalement on s’en cogne… C’est le contenu qui est intéressant 🙂
  • Un peu spartiate, mais ça va
  • Correspond à mes attentes. En même  temps, j’en ai pas, des attentes…!

charte vermeillevieux-sourd

  • Design un peu vieux. Faudrait peut-être suivre, pour une fois, la mouvance de design (Flat par exemple?)
  • Clair, mais un chouille old-school.
  • Un peu vieillot mais avec les évolutions qui arrivent par petites touches on voit que ça avance Graphiquement un peu à la traîne

Framalang ? — C’est good et oui ouante encore participette.

À la question : « Un petit message pour les bénévoles de Framalang qui traduisent des nouvelles du monde du libre ? » voici les réponses que nous avons sélectionnées :

around the world around the world…

carry on & never give up !
« どうもありがとうございました
がんばってください »

holla !
Good job !
Molte gracie
Muchas gracias
Bolchoi Paciba

c’est trop bien

  • Je trouve que vous faites un travail incroyable et qui mérite toutes mes félicitations. Vos traductions me sont très utiles puisque je peux ainsi lire des articles anglais que je n’aurais pas pensé chercher sur Internet.
  • BRAVO ! Votre travail est vraiment excellent et permet aux anglophobes d’accéder à des informations non relayées par les médias classiques ou difficiles à appréhender avec les subtilités du langage.
  • bravo et merci! Un grand merci à tous pour tout le Framaboulot accompli depuis ces années !
  • Merci du gros travail de traductions, qui est de bonne qualité .

mais euh ça va trop vite !

  • Pour avoir participé un petit peu il y a quelques années, j’ai trouvé la méthodo et l’infrastructure hyper efficace, j’étais toujours étonné de la rapidité des traductions, il fallait limite se dépêcher si on voulait pouvoir participer un peu.
  • j’arrive souvent après la bataille :'(
  • Dans le temps j’ai perdu le fil, et je ne sais même plus aujourd’hui comment m’informer des nouvelles traductions proposées. À l’époque c’était des appels par Twitter. P.S.: je viens de chercher et du coup me suis inscrit à la liste de diffusion framalang@framalistes.org :DDDDD »
2000-articles trop-vite

 

Framasoft ? — On gère du pâté et on en fout partout

Voici ce qu’ont répondu quelques-uns à la question finale : « Un autre message pour l’équipe du Framablog et de Framasoft ? lâchez-vous ! »

optimiste et conquérant :

Cette année nous démarrons (grâce à vous !!!) la dégooglisation du lycée agricole d’E. et par là même la dégooglisation des esprits de nos apprenants… (il faut préciser que nous sommes de très gros consommateurs de Google Drive et que nous espérons, d’ici deux ans, conjuguer cette phrase au passé)

la belle histoire

Petite histoire, ma mère travaillait dans un collège très pauvre à M. avec des élèves vraiment très défavorisés. Elle distribuait des Framakeys à un moment je crois, et recommandait systématiquement les logiciels libres. Elle avait donné des copies de Open Office à l’époque et des élèves l’avaient remerciée chaleureusement de leur avoir fait découvrir cela, car elles ignoraient que de telles choses existaient et visiblement n’avaient même pas l’idée de craquer des logiciels de traitement de texte propriétaires et/ou avaient été épargnés par la vente liée (bizarre!).

repas de famille

En vrai, de plus en plus de gens, même mes proches et notamment ma famille : des oncles, des tantes etc, commencent fortement à s’intéresser à ces problématiques grâce au framamonde.

fédération charcutière

Merci pour tout, merci pour le bien que vous faites à Internet en général (avec d’autres services comme Qwant, l’April ou la mère Zaclys pour ne citer qu’eux), vous êtes une pierre importante de l’édifice libre que j’utilise au quotidien (Linux, Framasphère*, Framablog, Framacarte, Framatube, Framindmap, Framadrop (hyper utile, merci !), j’aurai  bien voulu un Framadrive mais y’a pu d’place… :P) ! Et rien que pour ça, vous gérez du pâté !

à l’assaut l’asso

Pas de grand discours mais juste un grand merci pour votre mobilisation et votre ouverture. J’ai appris beaucoup de chose avec vous, je me suis trouvée de nouveaux centres d’intérêts et un « combat » de la vie de tous les jours.

sentier lumineux

Vous êtes la lumière dans un monde d’obscurité

trop mignon

Des gros bisous avec plein de licornes et chats des internets <3

bday-cake

gâteau d’anniversaire offert par normanack (CC BY 2.0)




Minetest, intérêts et possibilités pédagogiques

Dans « Framinetest Édu » il y a « Édu ». Ce n’est pas (simplement) pour damer le pion à Microsoft. Les jeux de minages sont des outils intéressants et innovants pour expérimenter d’autres formes de pédagogies.

Voici un article de SVTux, un professeur de SVT convaincu des avantages des serious games… pour les avoir testés lui-même.

le Coming out simulator un serious game d'éducaiton populaire à la tolérance. CC-0 Nicky Case
Coming out simulator un serious game d’éducation populaire à la tolérance.
CC-0 Nicky Case

Entre serious games et serious gaming

Un serious game est un jeu vidéo pensé pour être éducatif. Par opposition, le serious gaming est le détournement d’un jeu classique dans un contexte pédagogique.

Avec Minetest, nous sommes à la frontière de ces deux mondes. En effet, si de base, son utilisation pédagogique le place principalement dans le serious gaming, ses possibilités de personnalisation, adaptations, détournement, … peuvent assez facilement le positionner parmi les serious games !

Quelques anecdotes pour comprendre l’intérêt pédagogique

Si vous n’êtes pas familier de ce type de jeu, j’imagine que vous êtes en train de vous dire : « mais qu’est-ce que ce truc encore ? », « c’est n’importe quoi ! », « quel est le rapport avec les programmes ? »…

Je vais donc commencer par vous raconter 3 petites anecdotes :

  • Sur la première version du collège construite par mes élèves en janvier 2015, j’ai eu la surprise de constater que ces derniers avaient choisi les cubes en fonctions de leurs couleurs afin de correspondre au mieux à la réalité « visuelle ». Par conséquent, le sol (et les plafonds) avaient été construit en grès. Grave erreur ! Car le jeu tient compte des processus d’érosion ! Autrement dit, au bout de quelques jours dans le jeu, nous nous sommes retrouvé avec un tas de sable gigantesque au milieu du collège !!! (En effet, le grès termine en grains de sable de par les processus d’érosion)
  • Pendant l’une de mes dernières séances : « Monsieur, Monsieur, je ne comprends pas : j’ai bien construit l’enclos comme vous avez demandé ! Par contre je crois qu’il y a un bogue dans le jeu parce que lorsque j’y met des poules, il y a des œufs mais les poussins ne naissent pas ! ». Je l’interpelle en lui proposant d’ajouter un coq dans son enclos : « Génial Monsieur, vous avez corrigé le bogue, maintenant il y a même des poussins qui naissent, grandissent et deviennent des poules ou des coqs ! »

Mais allons plus loin avec cette 3e anecdote (arrivée le 1er avril 2016, et ce n’est pas un poisson !) :

  • Comme d’habitude, je retrouve le vendredi midi les élèves les plus motivés par Minetest pour le « club minetest » et l’un d’eux me demande s’il peut me montrer ce qu’il a fait pendant le week-end de Pâques (bon, jusque là, rien d’anormal, je m’attends à voir une maison de plus ! Lol). L’élève démarre le jeu en « local » et m’explique comment il construit des voitures dans le jeu. Sauf que ses voitures, elles roulent, tournent… Bref, de vraies voitures ! Et surtout, par défaut, le jeu que je lui avais transmis ne le permettait pas. Je lui demande comment il a fait : « c’est très simple monsieur, j’ai créé un mod, si vous voulez, je vous le donne ! » (là, mon cerveau se met en mode sérieux). Je regarde, il m’explique plus en détail… et je comprends qu’il a vraiment fait du code… tout seul, en s’inspirant des autres mods du jeu. Cet élève, ne trouvant pas l’option dans le jeu avait décidé de créer l’option lui-même. Depuis hier, son mod est intégré dans le serveur du prof. Respect, cet élève a 11 ans.

Ces anecdotes doivent d’ores et déjà vous laisser entrevoir quelques pistes d’exploitation pédagogique… Mais allons plus loin !

Le parking était là, il manquait juste les voitures… un élève les a codées.
Le parking était là, il manquait juste les voitures… un élève les a codées.

Pistes d’exploitation pédagogique :

Minetest permet de travailler en s’amusant dans la quasi totalité des disciplines : du Français au Sciences, en passant par la philosophie, l’histoire ou encore les langues étrangères et la technologie. Rien que cela !

A minima les points des programmes suivants peuvent être abordés :

  • Apprendre à se repérer sur une carte, un plan.
  • Comprendre et savoir appliquer la notion d’échelle.
  • Découvrir les notions de cycles de vie, de chaînes et réseaux alimentaires, l’agriculture humaine, de biomes…
  • Découvrir les principales notions de géologies (érosion, volcanisme…).
  • Comprendre l’influence des conditions météorologiques, de l’Homme… sur l’environnement.
  • Découvrir la notion de modélisation.
  • Apprendre à coopérer et collaborer.
  • Découvrir les matériaux, leurs propriétés, les notions de composites, etc.

Et que dire philosophiquement, lorsqu’on interdit l’usage des armes dans le jeu, des élèves qui constituent des stocks d’armement dans leurs coffres avec l’argument : « Ne vous inquiétez pas Monsieur, nous n’allons pas nous en servir… c’est juste au cas où ! »… de passionnant débats en perspective ! CQFD.

Exemple n°1, en Sciences de la Vie et de la Terre : « L’influence de l’Homme sur les peuplements »

Exemple n°2, Projet d’EPI : Géographie/Technologies/Mathématiques : « Construisons notre collège, notre ville…  »

Exemple n°3, Minetest, un outil pédagogique modulaire

Construisons notre collège.
Construisons notre collège.

Mais bien entendu, il faut garder à l’esprit que les possibilités pédagogiques de Minetest n’ont de limites que celles de notre imagination !

Autres ressources pédagogiques :

De la coopération à la collaboration !

Minetest, tout comme Framapad, peut être qualifié d’outil collaboratif.

Pour rappel, un outil est qualifié de coopératif lorsqu’il permet à plusieurs utilisateurs d’atteindre ensemble un même objectif en permettant à chacun d’apporter sa pierre à l’édifice final (sans toucher/modifier la brique du voisin).

Par opposition, un outil est dit collaboratif lorsqu’il permet à plusieurs utilisateurs d’atteindre ce même objectif en permettant à chacun d’apporter sa pierre à l’édifice final et de modifier, supprimer… celle du voisin.

En classe, lors des premières séances, nous n’observons le plus souvent que de la coopération mais avec l’entraînement, et l’acceptation de la prise en compte de l’avis de ses camarades, la collaboration se met progressivement en place. Une fois la compétence acquise par les élèves, les groupes de travail deviennent plus efficaces et autonomes.

Il est donc nécessaire de prendre le temps et de renouveler les séances pour permettre aux élèves d’apprendre à collaborer. Cet investissement temporel vaut le coup !

Où trouver de l’aide ?

Comme tout logiciel libre qui se respecte, il existe une communauté riche de nombreux membres prêts à vous aider dans vos projets. Pour en savoir davantage, voici deux liens indispensables :

Mise à jour du 20/09/2016 : faisant suite à vos demandes, nous avons ouvert une section « Minetest » sur notre forum : https://framacolibri.org/c/framinetest-minetest

Pourquoi utiliser Minetest plutôt que Minecraft en milieu scolaire ?

Voici une question fréquente à laquelle il est assez simple de répondre lorsqu’on a testé les deux outils en milieu scolaire :

  • Minetest est écrit en C++ (Minecraft en Java) : il est par conséquent très léger et tourne facilement sur des machines peu puissantes.
  • Les fichiers de configuration sont au format txt, ce qui facilite la personnalisation.
  • Le jeu occupe peu de bande passante, ce qui est bien pratique lorsque votre établissement ne dispose pas d’une excellente connexion.
  • Étant libre, le jeu offre une main totale à l’administrateur comme aux utilisateurs (configuration, personnalisation…).
  • Le jeu est entièrement gratuit. Aucun frais n’est à envisager pour l’établissement.
  • Le jeu est réellement multiplateforme, ce qui permet un fonctionnement dans tous les environnements scolaires.
  • Enfin, soulignons qu’il ne nécessite pas d’installation pour les élèves : un simple copier-coller suffit, ce qui est bien pratique sur les machines des établissements scolaires !

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Minetest sur android, joué directement depuis un ordiphone.

Pour aller plus loin, il peut être intéressant, pour l’enseignant, de s’interroger sur l’intérêt de pousser uniquement en établissement des outils propriétaires (tel que Minecraft) chez de jeunes enfants quand on connaît l’impact de la publicité sur eux. Il est une évidence qu’il faut parfois rappeler : la diversité numérique dans le milieu scolaire est indispensable et devrait être la règle. Sinon, ne serait-ce pas une forme de publicité forcée et/ou de formatage ? Que dirait-on si une entreprise célèbre de soda réalisait l’ensemble des livres scolaires sans qu’il y ait d’autres alternatives ?

Ami-e-s enseignant-e-s : veuillez noter que la carte proposée par défaut sert à tester Framinetest. Une autre carte est réservée aux activités pédagogiques.