Le saviez-vous ? Microsoft contribue au noyau Linux !
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Ayant croisé Tristan Nitot samedi dernier lors d’un BookSprint (objet d’un prochain billet), j’en ai profité pour lui extorquer quelques mots à propos dans le tant attendue version 4 du Firefox.
Quant au Mozilla Manifesto, vous le trouverez ici.
N’oubliez pas de prendre son relais pour convaincre à votre tour votre cercle d’amis 🙂
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Une petite mise à jour de la pensée de Stallman avec cette interview donnée par un confrère américain ?
On y retrouve certaines constantes pour lesquelles il se bat depuis près de trente ans (« la conscience du logiciel libre a été presque entièrement cachée sous le tapis par l’open source »). Mais il donne également son avis, souvent lapidaire, sur des sujets d’actualité comme l’essor de la téléphonie mobile, qualifiée de « rêve de Staline » (où même l’OS Android ne trouve pas grâce à ses yeux).
En toute logique, il ne possède pas de téléphone portable. « Les décisions que vous prenez dépendent de vos valeurs. Et la plupart des gens sont conduits à penser uniquement au prix et à la performance des logiciels, et non au fait de savoir s’ils respectent votre liberté. Les gens qui prennent des décisions sur ces valeurs ne feront jamais aucune concession pour obtenir un logiciel libre, alors que moi je suis prêt à travailler pendant des années et des années pour ne pas avoir de logiciels propriétaires sur mon ordinateur ».
Et vous ?
Et de conclure l’entretien par un message plus politique en référence aux mouvements sociaux du Wisconsin : « Les entreprises et les medias de masse ont, dans une large mesure, convaincu les Américains qu’ils n’ont pas de légitimité pour refuser le système économique, quels que soient les objectifs de ce système économique. Nous avons besoin d’un esprit de résistance en Amérique. Nous devons retrouver l’esprit de liberté avec lequel nous avons bâti les États-Unis. »
PS : Pour ceux qui désireraient mieux connaître le personnage nous rappelons l’existence de notre framabook sur Richard Stallman. Eyrolles vient de nous communiquer les ventes de l’année 2010 qui sont plus qu’encourageantes avec un total dépassant les 2 300 exemplaires.
Cell phones are ‘Stalin’s dream,’ says free software movement founder
Jon Brodkin – 14 mars 2011 – Network World
(Traduction Framalang : Étienne, Siltaar, Pandark, Lolo le 13, Goofy, Ypll, Yoann, Garburst)
Richard Stallman[1] : Les iPhones et autres Androids sont des traceurs à la Big Brother.
Près de trente ans après le début de sa croisade pour débarrasser le monde du logiciel propriétaire, Richard Stallman constate que les smartphones sont une nouvelle menace pour la liberté des utilisateurs.
« Je n’ai pas de téléphone portable. Je n’utiliserai pas de téléphone portable », déclare Stallman, fondateur du mouvement des logiciels libres et créateur du système d’exploitation GNU. « C’est le rêve de Staline. Les téléphones mobiles sont les outils de Big Brother. Je ne vais pas porter sur moi un traceur qui enregistre où je vais en permanence, ni un outil de surveillance qui autorise les écoutes. »
Stallman croit fermement que seul le logiciel libre (NdT: free software dans le texte) peut nous préserver de ces technologies de contrôle, qu’elles soient dans les téléphones portables, les PCs, les tablettes graphiques, ou tout autre appareil. Et par free il n’entend pas gratuit mais la possibilité d’utiliser, de modifier et distribuer le logiciel de quelque façon que ce soit.
Stallman a fondé le mouvement du logiciel libre entre le début et le milieu des années 80, avec le projet GNU et la Free Software Foundation, dont il est toujours le président.
Quand j’ai demandé à Stallman de lister quelques-uns des succès du mouvement du logiciel libre, le premier à être mentionné était Android mais pas la version de Google, non, une autre version du système d’exploitation mobile débarrassé de tout logiciel propriétaire (voir également Stallman soutient LibreOffice).
« Ce n’est que très récemment qu’il est devenu possible de faire fonctionner des téléphones portables largement répandus avec du logiciel libre », dit Stallman. « Il existe une version d’Android appelée Replicant qui peut faire fonctionner le HTC Dream sans logiciel propriétaire, à part aux États-Unis. Aux États-Unis, il a quelques semaines, il y avait encore un problème avec certaines bibliothèques, même si elles fonctionnaient en Europe. À l’heure qu’il est, peut-être cela fonctionne-t’il, peut-être pas. Je ne sais pas. »
Bien qu’Android soit distribué sous des licences libres, Stallman note que les constructeurs peuvent produire et livrer le matériel avec des exécutables non libres, que les utilisateurs ne peuvent pas remplacer « parce qu’il y a un élément dans le téléphone qui vérifie si le logiciel a été changé, et ne laissera pas des exécutables modifiés se lancer». Stallman appelle cela la Tivoisation, parce que TiVo utilise des logiciels libres tout en plaçant des restrictions matérielles qui l’empêchent d’être altéré. « Si le constructeur peut remplacer l’exécutable, mais que vous ne pouvez pas, alors le produit est dans une cage », dit-il.
En théorie, les téléphones qui n’utilisent que des logiciels libres peuvent être à l’abri des risques d’espionnage électronique. « Si vous n’avez que des logiciels libres, vous pouvez probablement vous en protéger, parce que c’est par les logiciels qu’on peut vous espionner », explique Stallman. Petit paradoxe au passage, Stallman répondait à mes questions sur un téléphone portable. Pas le sien, bien entendu, mais celui qu’il avait emprunté à un ami espagnol pour sa tournée de conférneces en Europe. Pendant les 38 minutes de notre échange, la connexion a été coupée cinq fois, y compris juste après un commentaire de Stallman sur l’espionnage électronique et les logiciels libres sur les téléphones. Nous avons essayé de nous reconnecter plusieurs heures plus tard mais il nous a été impossible de terminer l’interview par téléphone. Stallman a répondu au reste de mes questions par email.
Sacrifier le confort est une chose dont Stallman est familier. Il refuse d’utiliser Windows ou Mac, bien évidemment, mais même un logiciel tel qu’Ubuntu, peut-être le système d’exploitation le plus populaire basé sur GNU et le noyau Linux, ne satisfait pas ses critères de liberté. « Peu de monde est prêt à faire les mêmes sacrifices », reconnaît-il.
« Les décisions que vous prenez dépendent de vos valeurs », dit-il. « Et la plupart des gens sont conduits à penser uniquement au prix et à la performance des logiciels, et non au fait de savoir s’ils respectent votre liberté. Les gens qui prennent des décisions sur ces valeurs ne feront jamais aucune concession pour obtenir un logiciel libre, alors que moi je suis prêt à travailler pendant des années et des années pour ne pas avoir de logiciels propriétaires sur mon ordinateur ».
Stallman utilise un ordinateur portable Lemote Yeeloong faisant tourner gNewSense, une distribution GNU/Linux ne comportant que des logiciels libres.
« Il y a des choses que je ne peux pas faire. J’utilise actuellement un ordinateur assez lent, parce que c’est le seul portable avec un BIOS libre. gNewSense est la seule distribution entièrement libre qui tourne sur Lemote, qui est équipé d’un processeur de type MIPS » explique Stallman. Une autre distribution était fournie avec le Lemote, mais elle comprenait des logiciels non libres que Stallman a remplacés par gNewSense.
Stallman, 57 ans, a commencé à faire l’expérience du partage de logiciels à ses débuts au Laboratoire d’intelligence artificielle du MIT en 1971. Cette communauté de partage s’est dispersée au début des années 80 à peu près au moment où Digital Equipment Corp. a arrêté le serveur central sur lequel s’organisait la communauté. Stallman aurait pu rejoindre le monde des logiciels propriétaires s’il avait accepté de « signer des accords de confidentialité et promettre de ne pas aider mes camarades hackers », selon ses propres mots. Au lieu de cela, il a lancé le mouvement du logiciel libre.
Stallman est un personnage fascinant du monde de l’informatique, admiré par beaucoup et injurié par des entreprises comme Microsoft, qui voient en lui une menace pour les profits qu’ils peuvent tirer des logiciels.
Stallman n’a pas réussi à casser la domination de Microsoft/Apple sur le marché de l’ordinateur de bureau, sans parler de celle d’Apple sur les tablettes. Par contre, le mouvement du logiciel libre qu’il a créé a directement participé à la prolifération de serveurs sous Linux dans les data centers qui propulsent une grande partie d’Internet. Il y a peut-être là une ironie, Stallman ayant exprimé de la rancoeur au sujet de la reconnaissance acquise par le noyau Linux aux dépens de son système d’exploitation GNU.
Stallman se dit « plutôt » fier de cette multiplication des serveurs libres, « mais je suis plus inquiet de la taille du problème à corriger que du chemin que nous avons déjà accompli ».
Les logiciels libres dans les data centers, c’est bien, mais « dans le but d’apporter la liberté aux utilisateurs, leurs propres PC de bureau, portable et téléphone sont ce qui a le plus d’effet sur leur liberté ». On se soucie principalement de logiciel plutôt que de matériel, mais le mouvement insiste sur « du matériel avec des spécifications telles que l’on peut créer des logiciels libres qui le supporte totalement », insiste-t-il. « Il est outrageux de proposer du matériel à la vente et de refuser de dire à l’acheteur comment l’utiliser. Cela devrait être illégal ».
Avant d’accepter d’être interviewé par Network World, Stallman a exigé que l’article utilise sa terminologie de référence — par ex. « logiciel libre » à la place d’« open source » et « GNU/Linux » au lieu de juste « Linux ». Il a aussi demandé que l’interview soit enregistrée et que, si l’enregistrement était mis en ligne, il soit publié dans un format compatible avec le libre.
Il y a quatre libertés logicielles essentielles, expliquées par Stallman. « La liberté zéro est la liberté d’utiliser le programme comme bon vous semble. La liberté 1 est la liberté d’étudier le code source, et de le changer pour qu’il fonctionne comme vous le souhaitez. La liberté 2 est la liberté d’aider les autres ; c’est la liberté de réaliser et de distribuer des copies exactes quand vous le souhaitez. Enfin la liberté 3 est la liberté de contribuer à votre communauté, c’est la liberté de distribuer des copies de vos versions modifiées quand vous le souhaitez ».
Stallman a évoqué le terme « copyleft » pour désigner les licences qui garantissent que le code d’un logiciel libre ne peut pas être redistribué dans des produits propriétaires.
La clé de la philsophie de Stallman est la suivante : « Sans ces quatre libertés, le propriétaire contrôle le programme et le programme contrôle les utilisateurs », a-t-il affirmé. « Le programme se retrouve alors être un instrument de pouvoir injuste. Les utilisateurs méritent d’avoir la liberté de contrôler leur informatique. Un programme non libre est un système de pouvoir injuste et ne devrait pas exister. L’existence et l’usage de logiciels non libres est un problème sociétal. C’est un mal. Et notre but est un monde délivré de ce problème. »
Ce problème n’a pas été créé par une entreprise en particulier, mais Microsoft est d’habitude la plus critiquée par les gens comme Stallman.
« Ils continuent à nous considérer comme leurs ennemis », insiste Stallman. Il y a dix ans, dans une saillie restée célèbre, le PDG de Microsoft Steve Ballmer traitait Linux de « cancer ». Depuis Microsoft a baissé le ton en public, mais Stallman ne s’en laisse pas compter : « D’un certain côté ils ont appris à être un peu plus subtils mais leur but est de faire utiliser Windows et non un système d’exploitation libre ». Après cette phrase, notre appel téléphonique s’est une fois de plus interrompu.
À part Microsoft, Stallman épingle « Apple et Adobe, ainsi qu’Oracle et beaucoup d’autres qui font des logiciels propriétaires et contraignent les gens à les utiliser ».
Google « fait de bonnes choses et d’autres mauvaises » dit Stallman. « Il a mis à disposition des logiciels libres comme le codec WebM, et pousse YouTube à adopter son support. Toutefois, le nouveau projet Google Art ne peut être utilisé qu’à travers des logiciels propriétaires. »
Stallman est également en porte-à-faux avec ce qu’on appelle la communauté open source. Les partisans de l’open source sont issus du mouvement du logiciel libre, et la plupart des logiciels open source sont aussi des logiciels libres. Cependant, pour Stallman, ceux qui se disent partisans du logiciel libre ont tendance à considérer que l’accès au code source est simplement un avantage pratique, et ignorent les principes éthiques du logiciel libre. Diverses entreprises commerciales ont pris en route le train de l’open source sans adhérer aux principes auquel croit Stallman et qui devraient selon lui être au cœur du logiciel libre.
« je ne veux pas présenter les choses de façon manichéenne », déclare Stallman. « Il est certain que beaucoup de gens qui ont des points de vue open source ont contribué à des logiciels utiles qui sont libres, et il existe des entreprises qui ont jeté les bases de logiciels utiles qui sont libres aussi. C’est donc du bon travail. Mais en même temps, à un niveau plus fondamental, mettre l’accent sur l’open source détourne l’attention des gens de l’idée qu’ils méritent la liberté. »
L’une des cibles de Stallman est Linus Torvalds, le créateur du noyau Linux et l’une des personnalités les plus célèbres du monde du logiciel libre.
Stallman et son équipe ont travaillé sur le système d’exploitation GNU pendant la majeure partie des années 80, mais il manquait une pièce au puzzle : un noyau, qui puisse fournir les ressources matérielles aux logiciels qui tournent sur l’ordinateur. Ce vide a été comblé par Torvalds en 1991 quand il a mis Linux au point, un noyau analogue à Unix.
Les systèmes d’exploitation qui utilisent le noyau Linux sont couramment appelés « Linux » tout court, mais Stallman se bat depuis des années pour que les gens emploient plutôt l’appellation « GNU/Linux ».
Stallman « voudrait être sûr que GNU reçoive ce qu’il mérite » dit Miguel de Icaza de chez Novell, qui a créé le l’environnement libre GNOME, mais a été critiqué par Stallman pour ses partenariats avec Microsoft et la vente de logiciel propriétaire. « Quand Linux est sorti, Richard n’y a pas prêté sérieusement attention pendant quelque temps, et il a continué à travailler sur son propre noyau. C’est seulement lorsque Linux s’est trouvé sous les feux de la rampe qu’il a pensé que son projet n’était pas assez reconnu. » Le problème, c’est qu’à cette époque, est apparue à l’improviste une communauté qui n’était pas nécessairement dans la ligne GNU.
Le noyau GNU, appelé Hurd, est toujours « en développement actif », selon le site internet du projet.
La contribution de Torvalds au logiciel libre sera largement célébrée cette année à l’occasion des 20 ans du noyau Linux. Mais Stallman n’en sera pas l’une de ses majorettes, et pas seulement à cause de cette querelle sur le nom.
« Je n’ai pas d’admiration particulière pour quelqu’un qui déclare que la liberté n’est pas importante », explique Stallman. « Torvalds a rendu un bien mauvais service à la communauté en utilisant ouvertement un programme non libre pour assurer la maintenance de Linux (son noyau, qui est sa contribution majeure au système d’exploitation GNU/Linux). je l’ai critiqué sur ce point, et bien d’autres avec moi. Quand il a cessé de le faire, ce n’était pas par choix délibéré. Plus récemment, il vient de rejeter la version 3 de la licence GPL pour Linux parce qu’elle protège la liberté de l’utilisateur contre la Tivoisation. Son refus de la GPL v.3 est la raison pour laquelle la plupart des téléphones sous Android sont des prisons ».
Même Red Hat et Novell, largement reconnus comme soutiens du logiciel libre, ne reçoivent pas une franche approbation. « Red Hat soutient partiellement le logiciel libre. Novell beaucoup moins », dit-il, notant que Novell a un agrément de brevet avec Microsoft.
En dépit de son pessimisme apparent, Stallman voit quelques points positifs motivant sa quête de logiciel libre. Quand il n’est pas chez lui à Cambridge (Massachusetts), Stallman parcourt le monde pour y donner des conférences et participer à des débats sur le logiciel libre.
Avant de voyager vers l’Espagne, Stallman s’est arrêté à Londres pour faire une conférence (dans laquelle il a qualifié Windows de « malware ») et pour rencontrer quelques membres du Parlement afin de leur expliquer les principes du logiciel libre. Il reçoit souvent un meilleur accueil en Europe que chez lui.
« Aux États-Unis, la conscience du logiciel libre a été presque entièrement cachée sous le tapis par l’open source. Dès lors on ne trouve aucun responsable gouvernemental qui accepte de parler avec moi ».
Mais hors de l’Amérique du Nord, quelques gouvernements s’engagent dans le logiciel libre. « J’ai découvert hier, qu’en France, les organismes d’État continuent à migrer vers le logiciel libre », dit-il. « Il n’y a pas une politique systématique qui leur enjoint de le faire, mais ils le font de plus en plus. Et dans certains pays, par exemple en Équateur, il existe une politique explicite pour que les organismes gouvernementaux migrent vers le logiciel libre, et ceux qui veulent continuer à utiliser des logiciels non libres doivent demander une dérogation temporaire pour le faire. »
Bien que Stallman ne l’ait pas mentionné, le gouvernement russe exige aussi des organismes qu’ils remplacent les logiciels propriétaires par des alternatives libres d’ici 2015, afin d’améliorer à la fois l’économie et la sécurité, selon le Wall Street Journal.
Au-delà du logiciel libre, Stallman se consacre aux questions politiques, et tient un blog pour le journal Huffington Post. De fait, il voit peu de différences entre les entreprises qui maltraitent la liberté logicielle et les « gredins de Washington » qui sont les obligés des lobbys d’entreprises qui leur font des dons.
Dans les mouvements sociaux récents du Wisconsin, Stallman retrouve quelque chose de son propre état d’esprit. « Quelquefois, la liberté demande des sacrifices et la plupart des Américains n’ont pas la volonté de faire le moindre sacrifice pour leur liberté », dit-il. « Mais peut-être que les manifestants du Wisconsin commencent à changer cela ». Les entreprises et les medias de masse « ont, dans une large mesure, convaincu les Américains qu’ils n’ont pas de légitimité pour refuser le système économique, quels que soient les objectifs de ce système économique. Nous avons besoin d’un esprit de résistance en Amérique. Nous devons retrouver l’esprit de liberté avec lequel nous avons bâti les États-Unis. »
Il est des billets que l’on n’aime pas avoir à publier. Celui-ci en fait clairement partie tant il m’irrite au plus haut point !
Il illustre malheureusement une nouvelle fois l’incapacité chronique de l’école à comprendre et former aux nouvelles technologies et aux enjeux de demain.
C’est donc l’histoire d’un lycée qui souhaite organiser une journée de sensibilisation sur le thème « Réseaux sociaux, gérer son identité numérique ». Louable intention s’il en est. Et l’on imagine fort bien que derrière ce titre se cache l’ombre de Facebook, devenu effectivement omniprésent chez les ados avec toutes les questions et conséquences que cela implique[1].
Soit, les enseignants ne sont pas tous des spécialistes du numérique, mais il doit bien y avoir dans une équipe pédagogique quelques compétences en la matière. Donc logiquement cela devrait pouvoir se préparer en interne. Mais non, on fait appel à une société privée.
Calysto se définit comme « une agence qui concentre son activité dans la maîtrise des enjeux liés aux usages de l’Internet et aux Technologies de l’Information et de la Communication ». Et, via son site TousConnectes.fr, elle propose aux établissements scolaires des journées d’information « dans le cadre de son partenariat avec le ministère de l’Education nationale ».
Voici la page de présentation de l’offre pour le lycée, sachant qu’il en coûtera à l’établissement (et donc au contribuable) 376 euros par jour. Elle commence ainsi : « Les lycéens se sont largement appropriés l’univers de l’Internet et du téléphone mobile dont les usages sont en constante évolution. S’ils en sont très souvent les prescripteurs, certaines notions leur échappent et nécessitent d’être approfondies. »
Calysto propose également de conférences pour les parents et se targue d’avoir déjà organisé plus de 230 conférences ayant touché plus de 22 000 adultes.
J’ai fait une rapide recherche Web et il semblerait que beaucoup établissements scolaires aient déjà fait appel aux services de Calysto, qui, il y a à peine une semaine, a même eu l’honneur d’un article dans le journal Sud Ouest. Extrait : « De nombreux contenus multimédias sont soumis à des droits d’auteur, la récente loi Hadopi a été mise en place pour les protéger (…) On peut retrouver n’importe quel internaute par son adresse IP ».
Cet extrait anxiogène n’est qu’un avant-goût de ce qui va suivre.
Calysto est passée tout dernièrement dans un lycée dont nous tairons le nom. C’est le témoignage édifiant d’un enseignant présent ce jour-là que nous vous proposons ci-dessous.
Parents vous pouvez dormir tranquille, la police de la pensée veille sur vos enfants ! Sauf que les enfants ne sont pas dupes, et leurs réactions radicales au sortir de la journée donnent paradoxalement espoir : « On fait quoi ? Il faut tout arrêter ? On ne va pas arrêter de vivre quand-même. Dans ce cas il faut interdire Internet ».
Quant à nous (nous Framasoft, mais aussi April, Quadrature, Wikipédia, etc.), il faut absolument que l’on s’organise pour proposer des journées alternatives, bénévoles et gratuites, afin d’opposer à un tel discours notre propre approche et culture du Net.
Par un enseignant, quelque part en France
À l’initiative des documentalistes et des CPE dans mon lycée se sont tenus des débats-conférences autour des dangers de l’internet et des réseaux sociaux. Ils ont fait appel à la société privée Calysto qui propose des solutions « clé en main ».
J’y ai assisté avec mes élèves de Seconde, et là je dois dire que j’ai été atterré.Le débat n’avait rien de participatif, l’intervenant faisait réagir les élèves avec des images chocs mais ne poussait pas la réflexion. Nous avons eu droit à une succession à un rythme effréné de faits divers et d’anecdotes. Le discours était très culpabilisant, ce qui est contre-productif avec les ados, « C’est interdit, c’est pas bien, vous n’avez pas lu les conditions d’utilisations, et oui, faut lire ».
Voici mon témoignage mais je dois préalablement dire que parmi mes collègues certains trouvaient d’une part que ça avait le mérite de lancer le débat et qu’il fallait donner une suite avec les profs, et que d’autre part tout le monde n’est pas spécialiste du sujet et qu’il faut passer par des simplifications et des abus de langage. Et qu’un discours policé de spécialiste n’aurait pas eu d’effet sur le public ado.
Lors de la conférence il y a des oppositions franches sur des faits précis. L’intervenant soutenait certains propos que je lui disais être faux. Il a insisté et à aucun moment n’a montré le moindre doute du genre « je ne suis plus sûr du chiffre exact, il faudrait vérifier ». J’ai du prouver mon point de vue sourcé a posteriori à mes collègues pour démontrer qu’il s’était manifestement trompé et qu’il a soutenu le contraire, quitte à me faire passer pour un incompétent.
Lui – Vous avez un compte Facebook par exemple ? Mains levées. Avez-vous lu les conditions d’utilisation ? Mains baissées. Eh oui faut lire !
Moi, me mettant dans la peau d’un élève – Mais encore ? Une fois qu’on l’a lu, on fait quoi s’il y a un truc qui nous gène ? On n’a pas le choix ?
Lui, véhément – Je ne peux vous laisser dire ça, on a toujours le choix, il faut lire les clauses c’est votre responsabilité, blabla…
C’était ma première intervention je ne pensais vraiment pas à mal, au contraire c’était pour lancer le débat.
Moi, dans mon idée faire émerger l’e-citoyen – Bien sûr mais ce que je veux dire, c’est s’il y a parfois des clauses abusives on fait quoi, les CLUF sont rédigés par des armées d’avocats qui se sont blindés ! N’est-ce pas à la loi, à nos députés, aux associations de consommateurs de nous protéger ?
(Et je ne parle même pas de class-action qu’on n’a pas en France.)
Lui, impatient ne voulant pas aller dans cette direction et voulant reprendre le fil de son intervention formatée et bien rodée – Non vous avez accepté c’est trop tard.
À partir de là il me suggère franchement de me taire, je lui réponds que j’ai été invité avec mes élèves et l’intitulé de l’invitation était Conférence, débat et échanges, là-dessus, il me mouche en me disant « oui, mais avec les élèves. » Je suis passablement énervé. J’ironise en disant que j’avais bien lu les CLUF pourtant.
Lui – L’Hadopi a faim, ils veulent rentrer dans leurs frais ça coûte cher, elle a condamné 75 000 internautes depuis le mois d’août.
Moi – Personne n’a été condamné, des mails d’avertissements ont été envoyés mais à ce jour aucun accès internet n’a été coupé !
Lui – Si il y a eu 75 000 condamnations et pas plus tard que …. il y a avait un jeune de 19 ans qui s’est fait coupé son accès.
Moi – Il y a eu 75 000 mails envoyés je vous l’accorde mais aucune coupure.
Lui – Nous avons les chiffres, mon collègue de Calysto va à l’ALPA (Association de lutte contre la piraterie audiovisuelle) tout le temps alors…
Grosso-modo on sait mieux que vous.
À ce moment là j’abandonne vu la réaction d’un de mes collègues (mais c’est du détail les batailles de chiffres), au même moment un autre collègue avec son iPhone se connecte sur le site de l’Hadopi et me dit qu’il doit confondre condamnations et recommandations ! Effarant.
Là en se moquant de moi il me demande si je n’ai pas une pause à aller prendre.
On passe à des copies d’écrans de sites pro-ana, les images choquent et font réagir les élèves. Il demande le silence, les menace de ne plus laisser parler si ils sont aussi bruyants.
Un autre prof pose la question suite aux diapos concernant le streaming et le direct download, peut-on (les autorités) aller voir dans mon disque dur ?
Lui – Oui bien sûr !
Moi, me sentant obligé de réagir alors que je ne voulais plus – Non c’est faux, il faut l’avis d’un juge, la police ou la gendarmerie doit avoir une commision rogatoire pour examiner le contenu de votre ordinateur.
Lui – Et non monsieur c’est LOPPSI 2, vous n’avez pas lu dans le journal : Les dictateurs en rêvaient Sarkozy l’a fait ! ?
Moi, j’ai un doute j’avoue que je n’avais pas potassé la loi LOPPSI2 – La LOPPSI2 n’est pas encore entrée en vigueur, elle vient juste d’être votée, aucun décret d’application n’a été publié.
Lui poursuit sans tenir compte de ma réponse, alors dans la tête des élèves ça donne ceci : « la police, les gendarmes peuvent se connecter même de l’extérieur comme ils veulent à notre ordinateur et accéder à son contenu ».
Après avoir fait quelques recherches ils se trouve que la LOPPSI 2 est actuellement visée par le Conseil constitutionnel et sur Wikipédia (à vérifier) j’ai pu lire que : « La police, sur autorisation du juge des libertés, pourrait utiliser tout moyen (physiquement ou à distance) pour s’introduire dans des ordinateurs et en extraire des données dans diverses affaires, allant de crimes graves (pédophilie, meurtre, etc.) au trafic d’armes, de stupéfiants, au blanchiment d’argent, mais aussi au délit « d’aide à l’entrée, à la circulation et au séjour irrégulier d’un étranger en France commis en bande organisée », sans le consentement des propriétaires des ordinateurs. »
Nos ados téléchargeurs illégaux seraient-ils des terroristes trafiquants de stupéfiants ?
Après ça, c’en était trop je suis sorti une dizaine de minutes de la salle, puis je suis revenu m’installer tout au fond pour ne plus rien dire jusqu’à la fin. Pendant ce temps on assistait à d’autre passes d’armes moins intenses avec un autre collègue.
Et bien surprise il y en avait un peu. C’était pas le top mais quand même. On a eu droit à une diapo sur les contenus Creative Commons, mais sans rentrer dans les détails. « Il existe des contenus libres de droits comme le portail Jamendo pour la musique. »
Lui – Jamendo où ce sont des artistes pas connus qui partagent le contenu, c’est financé par la pub.
Moi – On peut aussi donner pour soutenir un artiste qu’on aime… aller à ses concerts.
Lui – Oui c’est comme Grégoire, vous misez sur un artiste en espérant que…
j’ai voulu dire que MyMajorCompany et Jamendo ce n’était pas la même chose, mais je n’ai pu le confier qu’à mon voisin car il était déjà reparti sur un autre sujet.
On a vu aussi un slide sur le P2P avec trois contenus Batman_origin.avi, Firefox, Adobe Reader et il a demandé si c’était du piratage ? Oui pour Batman mais non pour Firefox et Acrobat Reader qui sont gratuits mais nous ne sommes pas rentrés dans les différences entre ces deux contenus « gratuits ».
Lui qui disait qu’il fallait absolument lire les CLUF pour savoir à quoi s’en tenir apparemment ne le savait pas. Et préalablement il a bien dit que l’outil P2P avait été conçu pour partager des fichiers et que ce sont certains utilisateurs qui s’en servent pour partager des contenus qui ne respectent pas le droit d’auteur.
Je pense vraiment que l’intervenant était un animateur commercial formé sur le sujet à la va-vite, utilisant des techniques de communication éprouvées : frapper les esprits, faire réagir (rires) puis engueuler méchamment, culpabiliser, provoquer un sentiment de honte (en invoquant par exemple la sexualité hésitante des ados), affirmer sa connaissance sans faille en invoquant des sources bétons mais invérifiables, et abuser des arguments d’autorité sans justifier leur raison d’être.
Le thème que nous voulions traiter était « Réseaux sociaux, gérer son identité numérique ». J’ai eu l’occasion de parler avec quelques élèves par la suite, ils sont sortis de là en se disant « On fait quoi ? Il faut tout arrêter ? On ne va pas arrêter de vivre quand-même. Dans ce cas il faut interdire Internet ».
Peut-être que c’est ce qui nous attend si ce genre d’idées simplistes continue à se diffuser.
Bientôt on aura le droit un avertissement du type : « Internet tue, provoque la dépendance, l’isolement ».
Et nous rajouterons : « et libère des peuples ».
[1] Crédit photo : Prakhar Amba (Creative Commons By)
Pourquoi certains livres ne sont-ils pas traduits alors que tout porte à croire qu’ils le méritent ?
A contrario pourquoi d’autres livres connaissent de nombreuses traductions malgré le caractère très confidentiel de leur sujet et donc de leur audience potentielle ?
Pour les uns comme pour les autres à cause du droit d’auteur.
Un droit d’auteur qui selon le cas (et le choix) peut décourager ou encourager, nous dit ici Karl Fogel, qui est bien placé pour en parler car ses deux livres, le premier sous licence GNU General Public License et le second sous licence Creative Commons By, ont connu spontanément de nombreuses traductions[1].
Et nous aussi à Framasoft, nous sommes bien placés pour en parler, car lorsque nous décidons d’entamer un long projet de traduction via notre groupe de travail Framalang, la condition sine qua non est que la licence de l’ouvrage original nous y autorise explicitement. Un long projet comme notre dernier framabook Produire du logiciel libre de… Karl Fogel justement !
A Tale of Two Authors: Why Translations Happen, or Don’t.
Karl Fogel – 21 février 2011 – QuestionCopyright.org
(Traduction Framalang : Brandelune, Goofy et Penguin)
Pourquoi certains livres ne sont-ils pas traduits ?
Vous penserez peut-être qu’il est difficile de trouver des traducteurs disposés, ou que les compétences nécessaires sont rares, mais je vous propose deux études qui fournissent une autre explication.
La raison principale d’un texte non traduit vient tout simplement du fait qu’on nous interdit de le traduire. Lorsque les restrictions dues aux droits d’auteur ne les entravent pas, les traductions fleurissent.
Si vous êtes sceptique, lisez plutôt la suite. Voici l’histoire de deux auteurs, l’un dont les livres peuvent être traduits librement par n’importe qui, l’autre qu’on ne peut pas traduire. Nous allons même tricher un peu en disant que celui dont les livres sont ouverts à la traduction est un auteur mineur (un de ceux dont les œuvres, pour être parfaitement honnête, ne vont pas changer la face du monde). Tandis que certains des ouvrages de l’autre sont considérés comme des chefs-d’œuvre dans leur langue d’origine, au point que l’on peut trouver des citations d’éminents universitaires mentionnant l’absence de traduction comme « un des plus grands scandales de notre époque ».
Le premier auteur, c’est moi. J’ai écrit deux livres, tous deux sous licence libre, aucun n’a la moindre importance historique même si j’en suis fier et ai été content de les écrire. Le premier, publié en 1999, était un manuel semi-technique expliquant comment utiliser certains logiciels de collaboration. Bien que son public soit limité et que j’aie mis en ligne une version dans un format un peu lourd, des traductions bénévoles ont très vite été proposées, et l’une d’elles au moins (en allemand) a été achevée. D’autres traductions ont peut-être abouti, je ne sais pas (le livre étant déjà ancien et les traductions m’étant incompréhensibles, je n’ai pas fait l’effort d’en savoir plus).
Remarquez que je ne parle ici que de traductions faites par des bénévoles, celles qu’ils entreprennent juste parce qu’ils en ont envie, sans demander au préalable de permission à quiconque (il y avait aussi une traduction en chinois achevée et dont j’ai une version papier publiée, mais je ne la considère pas dans ma démonstration car elle est passée par les canaux de publication contrôlés par l’éditeur).
Mon livre suivant, publié à l’origine en 2005, ne visait également qu’un lectorat potentiel limité : il traite de la gestion de projets collaboratifs open source — il n’était pas exactement destiné à devenir un best-seller. Mais avec le soutien de mon aimable éditeur, O’Reilly Media, je l’ai mis en ligne sous une licence libre, cette fois sous un format plus agréable, et des projets de traductions bénévoles sont aussitôt apparus. Plusieurs ont maintenant porté fruit : le titre existe en japonais, en galicien, en allemand, en néerlandais et en français. La traduction espagnole est presque terminée, et d’autres encore sont en cours dont je vous épargne la liste.
(Ah oui, au fait, plusieurs de ces traductions sont disponibles en format papier de qualité commerciale, j’en ai chez moi des exemplaires. L’activité lucrative est parfaitement compatible avec les modèles de distribution non restrictifs, comme nous l’avons déjà souligné à plusieurs reprises)
Alors… tout ça pour un livre traitant de collaboration au sein des projets open source ? Vraiment ? Que peut-on en déduire ?
Eh bien, voyons un contre-exemple.
Hans Günther Adler (« HG Adler » de son nom de plume) est un auteur mort en 1988 dont l’œuvre est désormais largement reconnu comme majeure dans la littérature allemande sur l’Holocauste. Très peu de ses œuvres ont été traduites en anglais, sauf tout récemment le roman Panorama, publié en Angleterre et dont la critique a longuement parlé.
Deux de ces critiques nous permettent de bien comprendre pourquoi ici, sur QuestionCopyright.org, nous considérons que notre mission essentielle est de recadrer le débat public sur le droit d’auteur. Les deux critiques littéraires — manifestement intelligents, manifestement d’accord sur l’importance d’Adler, et écrivant tous deux pour les plus influentes revues littéraires de langue anglaise — commentent l’absence scandaleuse de traductions d’Adler en anglais tout en se recroquevillant dans une attitude passive quand il s’agit d’expliciter les raisons de cette absence.
D’abord, Judith Shulevitz dans le New York Times :
De temps en temps, un livre vous fait prendre brutalement conscience de la somme d’efforts et de chance qui ont été nécessaires pour le faire arriver entre vos mains. « Panorama » est le premier roman écrit par H. G. Adler, un intellectuel juif et germanophone vivant à Prague qui a survécu à un camp de travail en Bohème, Theresienstadt, Auschwitz, ainsi qu’à un autre camp de travail forcé particulièrement horrible car souterrain, appelé Langenstein près de Buchenwald. Adler écrit la première ébauche en moins de deux semaines, en 1948 il arrive enfin en Angleterre mais ne trouve personne pour publier son livre avant 1968. 20 ans et deux manuscrits plus tard le livre est enfin publié en anglais aujourd’hui, pour la première fois.
Il est difficile de concevoir la raison pour laquelle nous avons dû attendre si longtemps. Il en résulte que Adler est un presque parfait inconnu dans le monde anglophone. Seuls trois de ses livres ont été traduits : un travail historique intitulé « Jews in Germany », un roman appelé « The Journey » et, maintenant, « Panorama ». Le fait que les lecteurs anglais et américains aient eu un accès aussi limité à l’œuvre et à la pensée d’Adler pendant si longtemps est, comme l’écrit ce spécialiste éminent de la litérature allemande moderne qu’est Peter Demetz, « l’un des grands scandales de notre époque ».
Ensuite, voici ce qu’écrit Ruth Franklin dans le New Yorker :
Hermann Broch a écrit que le livre Theresienstadt 1941–1945 deviendrait un classique sur la question, et que la méthode d’Adler « clinique et précise, non seulement saisit les détails essentiels mais parvient à montrer en plus l’étendue de l’horreur des camps d’une manière particulièrement pénétrante ». (Le livre a été publié en Allemagne en 1955 et il est devenu très vite un ouvrage de référence pour les études allemandes sur l’Holocauste mais n’a jamais été traduit en anglais.)
Soit, Shulevitz et Franklin écrivaient des critiques du travail même d’Adler, pas des analyses sur les raisons pour lesquelles ces ouvrages avaient été si peu traduits en anglais. Il est pourtant frappant qu’ils aient choisi tous deux de commenter le manque de traduction, plus ou moins longuement, et pourtant ils n’offrent aucune hypothèse sur les raisons de cette absence. Ils décrivent simplement la situation et expriment leurs regrets, comme s’ils parlaient simplement du mauvais temps ; il n’y aucune indignation ni frustration sur le fait que l’absence de traduction est tout simplement due au fait qu’elles ont été interdites avant même qu’on puisse les commencer.
Je ne vais même pas utiliser « probablement » ou « sans doute » dans cette déclaration. À ce point, il faut considérer qu’il s’agit de faits établis. Si mes livres – mes petits ouvrages qui ne visent qu’une population limitée dans le monde du développement logiciel – sont traduits depuis l’anglais dans d’autres langues au lectorat plus faible, il est tout simplement impossible que les livres bien plus importants de H.G. Adler, sur des sujets beaucoup plus importants, n’aient pas été traduits de l’allemand vers l’anglais, si même une seule personne (ou, plus important encore, un seul groupe) qui aurait eu l’ambition de les traduire avait été libre de le faire.
Il existe un grand nombre de personnes qui parlent couramment à la fois l’anglais et l’allemand ; les études sur l’Holocauste intéressent de très nombreux locuteurs de ces deux langues et il existe des sources de financement, tant gouvernementales que provenant d’organismes à but non lucratif, qui auraient volontiers soutenu ce travail (certaines traductions de mon deuxième livre ont reçu ce genre de financement, il serait incompréhensible que ces financements puissent exister pour cela et pas pour les traductions du travail de Adler).
Le fait que l’absence de traductions d’Adler, ou d’autres œuvres importants, ne soit pas directement compris comme étant dû aux restrictions issues du droit d’auteur souligne la dramatique faiblesse du débat public autour du droit d’auteur. A l’heure actuelle, les traducteurs ne peuvent pas traduire s’ils ne sont pas assurés en premier lieu d’en avoir le droit, et puisque la position par défaut du droit d’auteur est que vous n’avez pas le droit de traduire à moins que quelqu’un ne vous en donne explicitement le droit, la plupart des traducteurs potentiels abandonnent sans avoir même essayé. Ou, plus probablement, ils ne pensent même pas à essayer, car ils ont été habitués à cette culture basée sur la permission. La simple recherche de la personne à qui demander la permission est un processus suffisamment décourageant, sans même compter le temps passé dans les incertaines négociations qui s’ensuivent lorsque vous avez trouvé la bonne personne.
Il n’est pas étonnant que de nombreux ouvrages de valeur restent sans traduction, étant donné les obstacles. Mais il est étonnant que nous continuions à nous voiler la face sur les raisons de cette situation, alors même lorsqu’elles nous crèvent les yeux.
[1] Crédit photo : Shandi-Lee Cox (Creative Commons By)
Paradoxes apparents. Peut-on simultanément souhaiter la fermeture des données et l’ouverture d’Internet ? Peut-on se féliciter du rôle joué par Facebook et Twitter en Tunisie ou en Égypte tout en affirmant que ces sites sont à très court terme dangereux pour ceux qui les utilisent ?
C’est cette double problématique qui est au cœur de la FreedomBox Foundation, le nouveau projet du brillant juriste de la FSF Eben Moglen qui fait régulièrement l’objet de billets sur ce blog. Et la solution qu’il nous propose est aussi simple que de brancher son chargeur de téléphone, à ceci près que c’est alors un mini serveur que nous mettons dans la prise (sous OS libre évidemment)[1].
Il est ici question de nos données personnelles, de notre vie en ligne, de notre manière de communiquer et d’interagir avec les autres. Et il s’agit bien moins de se cacher que de pouvoir choisir et définir à notre guise les conditions du partage de ces données, dans un Internet menacé aujourd’hui dans ses fondements mêmes par la censure, le filtrage ou le non respect de sa neutralité originelle.
Personne ne nous a obligés. Mais puisque c’était gratuit, c’était pratique, nous avons mis nos infos et nos amis sur Facebook et Twitter, nos messages dans Gmail, nos photos sur Flickr, nos vidéos sur YouTube, nos documents dans Google Docs… Au final nous avons participé ensemble à un formidable mouvement de centralisation du Net, où un nombre très restreint de sites hébergent une quantité phénoménale de données personnelles.
Que se passe-t-il le jour où ces quelques sites sont rendus volontairement ou non inaccessibles ?[2] Et que font ou feront exactement ces sites, tous commerciaux (et tous américains), avec nos données ?
C’est avant tout cela aujourd’hui le cloud computing que des marketeux de génie osent encore nous présenter comme de « l’informatique dans les nuages ». Des nuages, il y en a de moins en moins en fait mais ils sont de plus en plus gros et annoncent à n’en pas douter de futures tempêtes si nous n’y faisons rien.
Agir, c’est en l’occurrence faire revenir nos données chez nous, à la maison, dans le mini serveur branché sur la prise. Cela peut paraitre totalement irréaliste vu l’état de la situation actuelle, mais les acteurs du Libre n’en sont plus à un projet fou près.
Ils nous auront prévenus en tout cas…
Moglen on Freedom Box and making a free net
Jonathan Corbet – 8 février 2011 – LWN.net
(Traduction Framalang : Jean, Gilles, Antistress, Yonnel et Goofy)
Eben Moglen est d’habitude un orateur enthousiasmant et sa conférence au FOSDEM 2011 a tenu toutes ses promesses. Le logiciel libre demeure, comme toujours, à la base de son discours, mais il a adopté une perspective plus politique et il pense que la communauté devrait en faire autant. Notre liberté, a-t-il dit, dépend d’une conception revisitée du réseau afin de remplacer des services vulnérables et centralisés par des alternatives qui résisteraient au contrôle des gouvernements.
La publication du livre Code de Larry Lessig, dit Eben, a attiré notre attention sur le fait que, dans le monde dans lequel nous vivons, le code fonctionne de plus en plus comme la loi. Le code fait le travail que lui demande l’Ètat, mais il peut aussi servir la révolution contre l’état. Nous sommes aujourd’hui témoins de la démonstration magistrale du pouvoir du code, dit-il. Dans le même temps, il faut accorder beaucoup d’intérêt à la publication de The Net Desilusion d’Evgeny Morozov qui proclame qu’Internet a été choisi pour contrôler les libertés dans le monde entier. Le livre est conçu comme un cri d’alarme contre les techno-optimistes. Eben est, selon lui, un de ces optimistes. La leçon qu’il a tiré des événements actuels est que le bon réseau apporte la liberté, mais le mauvais réseau apporte la tyrannie.
Nous avons passé beaucoup de temps à élaborer des logiciels libres. Et ce faisant, nous avons joint nos forces à celles d’autres acteurs de la culture libre. Des personnes comme Jimmy Wales, mais aussi d’autres comme Julian Assange. Wikipédia et Wikileaks, dit-il, sont deux faces d’une même pièce. Au FOSDEM, il a déclaré qu’on peut voir une « troisième face » de cette pièce. Nous faisons tous partie de ceux qui se sont mis en ordre de bataille pour changer le monde sans créer de nouvelles hiérarchies dans l’opération. À la fin de l’année 2010, Wikileaks était perçue comme une opération criminelle. Les événements en Tunisie ont changé cette perception. Wikileaks s’est révélé être une tentative pour aider les gens à y voir plus clair sur leur propre monde. Wikileaks, a-t-il dit, n’est pas la destruction, c’est la liberté.
Mais maintenant il y a beaucoup d’Égyptiens dont la liberté dépend de la capacité à communiquer à travers des canaux commerciaux qui répondront à la pression du gouvernement. Nous voyons maintenant en temps réel les points faibles qui viennent de la mauvaise conception du système actuel (NdT : Cet article a été rédigé le 8 février dernier, alors que Moubarak étant encore en place et le Net censuré).
Les réseaux sociaux, a-t-il déclaré, ont modifié l’équilibre du pouvoir au détriment de l’État et au bénéfice du peuple. Les évènements dans des pays comme l’Iran, la Tunisie, et l’Égypte démontrent leur importance. Mais les formes de communication sociale actuelles sont « extrêmement dangereuses » à utiliser. Elles sont aussi centralisées et vulnérables au contrôle de l’État. Leur conception est dirigée par le profit, pas par la liberté. Donc les mouvements politiques se basent sur des fondations fragiles : le courage de M. Zuckerberg ou Google à résister à l’État – le même État qui peut facilement les faire fermer.
De la même manière, l’information en temps réel pour les personnes essayant de construire leur liberté dépend d’un seul service de micro-blogging basé en Californie et qui doit faire du profit. Cette organisation est capable de décider, seule, de donner tout son historique à la bibliothèque du Congrès Américain. Qui sait le genre de dons elle a pu faire ailleurs ?
Nous devons résoudre cette situation, et rapidement. Nous sommes « derrière la vague » des mouvements de libération qui dépendent essentiellement du code. Plus nous attendons, plus nous faisons partie du système. Et ça amènera rapidement des tragédies. Ce qui s’est déroulé en Égypte est riche d’enseignements, mais les choses auraient pu se passer de manière bien pire encore. L’État a été long à contrôler Internet et ne s’est pas montré aussi dur qu’il le pouvait. Selon Eben, ce n’est pas difficile de décapiter une révolution quand tout le monde est dans la base de données de M. Zuckerberg.
Il est temps de penser aux conséquences de ce que nous avons construit et de ce que nous n’avons pas encore construit. Nous avons parlé pendant des années de remplacer les services centralisés par des services fédérés ; la centralisation excessive est une vulnérabilité critique qui peut entraîner arrestations, torture, et meurtres. Les gens dépendent de la technologie qui est construite pour les vendre au plus offrant. Si nous nous soucions véritablement de la liberté, nous devons traiter ce problème. Parce que le temps presse et les gens sont dans une situation dangereuse. Eben ne veut pas que les gens qui prennent des risques pour la liberté utilisent un iPhone.
Ce que nous a montré l’Egypte, comme l’avait fait l’Iran, est qu’un réseau fermé est dangereux et que les « interrupteurs qui coupent le réseau » mettent en danger les gens épris de liberté. Que pouvons-nous faire quand un gouvernement verrouille les infrastructures du réseau ? Nous devons revenir à l’idée de réseaux en maille, conçus à partir des équipements existants, qui peuvent résister au contrôle gouvernemental. Et nous devons revenir à des communications sécurisées à chaque extrémité du réseau. Pouvons-nous le faire ? a-t-il demandé.
Bien sûr que nous pouvons mais le ferons-nous ? Si nous ne bougeons pas, la promesse du mouvement du logiciel libre commencera à ne plus être tenue. C’est la répression qui l’emportera en apportant la preuve que le réseau en tant que tel n’est en rien une garantie contre les régimes autoritaires.
L’Amérique du Nord, selon Eben, devient le cœur d’une industrie de data mining mondialisé. Quand le Président américain Dwight Eisenhower a quitté le pouvoir, il nous a mis en garde contre la montée en puissance du complexe militaro-industriel. En dépit de cet avertissement, les États-Unis ont, depuis, investi dans leur armée plus que tous les autres pays réunis. Depuis les évènements du 11 Septembre 2001, un nouveau pas dans l’industrie de la surveillance a été franchi. Eben a fortement recommandé de lire les article du dossier « Top Secret America » publiés par le Washington Post. Ils nous permettent d’ouvrir les yeux sur un certain nombre d’opérations à-la-Google, toutes sous le contrôle du gouvernement. La protection des données en Europe a tellement bien fonctionné qu’elle a causé la migration de toutes ces données en Amérique du Nord, où leur usage n’est pas contrôlé. Le data mining, comme toutes les industries, a tendance à se déplacer dans les endroits où il y a le moins de contrôle. En aucun cas le gouvernement américain ne va changer cette situation, il en dépend bien trop fortement. Pendant la campagne présidentielle, Barack Obama excluait de donner l’immunité à l’industrie des télécommunications pour son rôle dans l’espionnage des Américains. Cette position n’a même pas duré le temps de l’élection. La politique actuelle d’Obama n’est pas très différente de celle de ses prédécesseurs, excepté dans les domaines où elle est moins agressive.
L’industrie privée ne changera pas les choses non plus, l’appât du gain n’entraînera ni le respect de la vie privée ni la défense des gens dans la rue. Les sociétés qui essaient de faire du profit n’y parviennent pas sans l’aval des gouvernements. Donc nous devons construire le Net en partant du principe que le réseau n’est pas intrinsèquement digne de confiance, et que les services centralisés peuvent aller jusqu’à tuer des gens. Nous ne pouvons pas nous permettre d’être nonchalants et indifférents avec ça, nous devons remplacer tous ces points faibles.
Or nous savons comment nous sortir de cette situation. Nous devons créer des serveurs-prises qui sont bon marché et nécessitent peu de courant, et nous devons les remplir de « logiciels libres sympas ». Nous devons concevoir des réseaux maillés, élaborer des plateformes de téléphonie auto-construits avec des outils comme OpenBTS ou Asterisk, des réseaux sociaux fédérés, et des plateformes de publication anonymes. Nous devons conserver nos données dans nos maisons où elles sont protégées par des lois contre la recherche physique. Nous devons toujours chiffrer nos emails. Ces systèmes peuvent aussi être utilisés défensivement et servir de serveur proxy pour contourner les pare-feux nationaux. Nous pouvons faire tout cela a déclaré Eben, c’est tout à fait réalisable vu ce que nous avons déjà sous la main.
Eben a conclu en annonçant la création de la Freedom Box Foundation, qui a vocation à rendre tout cela disponible et « moins cher que des chargeurs de téléphone portable ». Il y a une génération, nous avons pris le chemin de la liberté, et nous y sommes encore. Mais nous devons passer à la vitesse supérieure, et donner à nos outils un objectif plus politique. Nos amis sont dans la rue ; si nous ne les aidons pas, ils seront en danger. La bonne nouvelle est que nous avons déjà presque tout ce dont nous avons besoin, et qu’il n’y a plus qu’à se retrousser les manches.
[1] Pour avoir plus de détails sur les caractéristiques techniques des serveurs-prises, nous vous invitons à lire le billet de Philippe Scoffoni : FreedomBox Foundation, une initiative pour communiquer en sécurité sur internet.
[2] Crédit photo : Thierry Ehrmann (Creative Commons By)
Mais que diable va-t-il donc faire dans cette galère ?
De passage à Paris, je me rendrai au siège de Microsoft France à Issy-les-Moulineaux, le 4 mars prochain, sur invitation de Thierry de Vulpillieres, directeur des partenariats éducation.
L’invitation avait été lancée il y a bien longtemps déjà, dans ces mêmes colonnes, à l’occasion d’une série de billets qui posaient la question du rôle exact de Microsoft dans les activités et projets de l’association Projetice et du Café pédagogique, avec toutes les conséquences négatives que cela pouvait impliquer pour le logiciel libre à l’école.
Thierry de Vulpillieres était alors intervenu en personne dans les commentaires :
« Bon et puis : « un costard-cravate de Microsoft » ? plutôt pas beaucoup chez Microsoft… je vous invite quand vous le souhaitez pour vérifier dans nos bureaux et prolonger cet échange… Je reste disponible pour débattre et avancer avec l’anonyme aKa, et même pour organiser une rencontre-débat si vous le souhaitez sur ces questions légitimes à propos desquelles on doit pouvoir faire mieux que des colonnes de commentaires anonymes sur des blogs… non ? »
En répondant à son commentaire, j’avais alors accepté l’invitation, en m’excusant du reste pour l’expression « costard-cravate de Microsoft » un brin méprisante.
La voici donc qui se concrétise, quelques trois ans plus tard.
Dans l’intervalle Microsoft s’est dotée d’un nouveau siège flambant neuf[1]. Ils appellent cela le Campus Microsoft et à en croire cette brochure ou cette vidéo, c’est un endroit où il fait bon vivre ! C’est tellement beau, écolo et moderne que même le Premier ministre choisit d’y faire ses annonces (en n’oubliant pas de dire tout le bien qu’il pense de Microsoft).
Dans l’intervalle aussi, les nouvelles technologies ont poursuivi leur évolution en se déplaçant clairement du système d’exploitation vers Internet, de l’ordinateur de bureau à la téléphonie mobile. Microsoft demeure un acteur dominant du secteur mais doit désormais partager son leadership dans de nombreux domaines avec d’autres multinationales comme par exemple Apple, Google ou encore Facebook.
Du coup les partisans du logiciel libre ont également diversifié leurs attaques, leurs défenses et leurs propositions d’alternative. Et réciproquement, il est possible que la position de Microsoft vis-à-vis du logiciel libre ne soit plus la même que par le passé. Si l’on reprend la célèbre citation de Gandhi « D’abord ils vous ignorent, ensuite ils vous raillent, puis ils vous combattent et enfin, vous gagnez », nous en sommes à la phase trois du processus, où le concurrent logiciel libre est enfin évalué sérieusement.
À l’heure qu’il est je ne connais pas le programme des festivités et ne sais qui je vais rencontrer exactement en plus de Thierry de Vulpillieres avec qui, de toutes les façons, nous aurons des choses à nous dire concernant la situation de l’éducation en France et la stratégie de Microsoft à ce sujet.
J’en appelle aux lecteurs du blog pour préparer au mieux ce rendez-vous en terre inconnue (et ne pas me faire naïvement récupérer !). Si vous vous retrouviez à ma place, quelle attitude adopteriez-vous, et quelles questions (pertinentes et impertinentes) poseriez-vous à Monsieur Microsoft ?
Parce que, voyez-vous, j’hésite entre déclencher la ceinture d’explosifs dans le hall en chantant The Free Software Song et accepter obséquieusement la Kinect Xbox qu’une charmante hôtesse ne manquera pas de m’offrir en guise de cadeau de bienvenue 😉
[1] Crédit photo : TechFlash Todd (Creative Commons By)
Ouverture, transparence, confiance, passion, audace, collaboration… font partie du champ lexical du logiciel libre.
Mais en ce jour de Saint-Valentin[1], ces mots peuvent également évoquer tout autre chose 😉
C’est ce parallèle osé (hasardeux ?) que nous propose Mary Ann en nous invitant à compléter ou amender la liste.
Mary Ann (Red Hat) – 14 février 2011 – OpenSource.com
(Traduction Framalang : Penguin, Baptiste et Goofy)
C’est vrai. Si vous réflechissez aux caractéristiques de l’open source et aux qualités d’une relation intime réussie, vous trouverez beaucoup de points communs.
Ouverture : Vous devez être ouvert et flexible pour que la relation fonctionne. Revenons à l’une de mes comparaisons préférées sur la différence entre les logiciels libres et les logiciels propriétaires : un logiciel propriétaire, c’est comme acheter une voiture avec le capot soudé. « Oh, vous devez changer l’huile ? Dommage. Achetez une nouvelle voiture. » Si nous ne sommes pas flexibles et ouverts aux changements, si nos capots sont soudés, cela devient très compliqué pour la voiture de garder le cap amoureux.
Transparence : Les secrets sont la ruine des relations. Dois-je en dire plus ?
Confiance : Sans confiance dans une relation, vous allez vous rendre d-i-n-g-u-e-s, vous et votre partenaire. Vous allez toujours penser que l’autre est en train de préparer un sale coup et envisager les pires scénarios.
Passion : Bien entendu, la démarche open source attire les gens passionnés, elle attire ceux qui veulent participer aux changements. Si vous n’êtes pas engagés passionnément dans une relation, vous cesserez vite de vous y investir et, à partir de là, les choses se dénouent très facilement.
Audace : L’open source, c’est pour ceux qui se bougent. Vous voulez changer les choses ? À vous de jouer. Si une personne vous intéresse, ne vous contentez pas d’y penser, agissez sinon c’est fichu.
Collaboration : Une communauté open source ne réussit que par le travail d’équipe et la collaboration. Il en va de même pour une relation enrichissante : on donne et on reçoit.
Release early, release often (NdT : Difficilement traduisible, « sortir tôt, sortir souvent » ou « communiquer tôt, communiquer souvent ») : Dans nos relations amoureuses, tout n’est pas toujours idyllique à chaque fois, mais nous ne pouvons nous empêcher de recommencer. C’est également vrai pour le modèle open source. Avec l’espoir que demain la relation sera meilleure et plus solide.
À vous de compléter (je pense que la liste peut s’allonger encore un peu). Joyeuse Saint-Valentin d’un amoureux de l’open source à un autre !
[1] Crédit photo : George Eastman House + OpenSource.com (Domaine Public)