La comm’ en kit, c’est libre et bio !

Le kit du semeur d’idées est le site d’une communicante française qui propose des conseils et des ressources sous licence libre, avec en plus une démarche éco-responsable. Le tout pour pas un radis.

Salut Nadine ! Nous avons découvert ton initiative pour permettre à toutes et tous de « cultiver l’éco-communication ». Ça veut dire quoi ?

Salut ! Alors éco-communiquer signifie « communiquer efficacement tout en réduisant son impact sur l’environnement ». Il s’agit de faire de l’éco-conception : prendre en compte l’environnement dès la conception de sa stratégie. Pour le terme de « cultiver », il y a une petit histoire ! Avant de lancer Cultive ta com’ et son kit du semeur d’idées, j’étais graphiste sous logiciels libres et je faisais de l’éco-conception de documents sous le nom de « Graine de pixel ». J’ai voulu faire évoluer mon projet vers la sensibilisation tout en gardant une partie de cette identité.

Nadine
Nadine

C’est vraiment important de concevoir sa comm’ en pensant aux économies d’encre ? Que penses-tu des extensions comme print-edit qui permettent d’économiser du papier et de l’encre en éliminant le superflu ?

Je trouve que cette extension est une très bonne initiative. Il est tout de même important de se demander au préalable s’il est possible d’éviter l’impression depuis le web. La meilleure façon d’économiser de l’encre c’est de ne pas en utiliser, non ?

Elles sont chouettes et claires tes fiches, mais on n’y trouve pas de liens vers des ressources ou exemples ou prolongements, c’est délibéré ?

Merci beaucoup, c’est très important pour moi qu’elles soient claires. Non ce n’est pas du tout délibéré, je dois ajouter les sources et des liens externes sur les mises à jour du Kit. Il est en mutation perpétuelle, rien n’est jamais définitif et je tiens à approfondir les fiches avec le temps.

Et tu fais tout ça avec des logiciels libres ? Sous licence libre ?

Oui, je ne travaille que sous logiciels libres (et sous OS libre). il était évident pour moi de proposer le kit sous licence libre… même si je n’ai pas encore choisi lesquelles. Il m’arrive de me perdre dans le méandre des licences. Les images et les exercices de PAO sont sous licence ArtLibre 1.3. Je vais probablement mettre les textes sous licence Creative Commons 4.0 – partage dans les mêmes conditions.

Hum, j’ai corrigé quelques bricoles mineures sur une fiche dans ton github. Tu es sûre de ne pas vouloir passer sur (frama-)gitlab ?

J’avoue ne pas y avoir pensé (mea culpa). Dans mon esprit, Github s’adressait surtout à un public de développeurs en informatique. Je me suis créée un compte il y a quelques mois pour tester l’hébergement de site statique et j’ai commencé peu à peu à comprendre son fonctionnement… En découvrant l’utilisation faite par David Revoy pour la traduction de ses bandes dessinées Pepper&Carrot, je me suis dit que je pourrai en faire autant avec le contenu du kit sur mon compte vide. Étant tout neuf, je peux le migrer aisément sur Framagit. Je vais m’en occuper. 🙂

Ça n’a pas été trop difficile de convaincre les internautes, pour le financement ?

J’ai répondu à l’appel à projet UP ! d’Auvergne Nouveau Monde en partenariat avec Ulule. J’ai pu profiter, comme une dizaine d’autres auvergnats, d’une formation au crowdfunding et d’une visibilité dans la presse régionale durant ma campagne. J’ai également communiqué sur les réseaux sociaux et notamment sur ma page Diaspora où j’ai trouvé une communauté prête à me soutenir dans cette aventure ! Merci encore à tous !

Même sans un radis je cultive ma comm'
Le slogan du pas-radis

J’ai vu que ton site est hébergé par une société locale, on l’entendrait presque miauler ! C’est important, pour toi ?

Oui c’est très important. Je tâtonne sur les questions du numérique responsable. Je ne m’attendais pas à trouver un hébergeur local ! Et j’espère pouvoir entendre miauler prochainement vers chez moi !

D’ailleurs, tu revendiques ta localisation en province. C’est pas trop compliqué de faire de la comm depuis Clermont-Ferrand ? Les Parigots ne te regardent pas de haut ?
Je ne revendique pas ma localisation, mon projet est simplement basé là où je vis. Je pense qu’aujourd’hui il est possible d’implanter un projet numérique depuis n’importe où.

Tu vas sortir des infos régulièrement, sur ce site ?
J’espère pouvoir faire des mises à jours mensuelles avec de nouveaux contenus sur les fiches, de nouveaux thèmes et exercices.

Et alors, comment vois-tu la suite ? Tu prépares un nouveau financement participatif ou tu as d’autres idées pour faire vivre le projet ? Autrement dit, est-ce que tu as réfléchi au modèle économique ?
Le kit me tient à cœur et je souhaite le compléter et continuer à le faire évoluer. Je ne prépare pas de nouvelle campagne de financement, les mises à jour du kit seront faites sur mon temps libre. Mon modèle économique est basé sur le site de cultive-ta.com où je propose un accompagnement personnalisé en stratégie de communication responsable.

Il paraît que Pouhiou t’a fait du gringue pour que tu viennes nous donner un coup de main. On va se revoir, alors ? Tu peux en dire plus aux lecteurices du blog ?
Oui j’espère bien ! Pouhiou n’a pas eu besoin d’insister longtemps, haha ! Je propose un coup de patte de graphiste sous logiciels libres. Maintenant que mon kit est en ligne, j’espère avoir plus de temps pour pouvoir me rendre utile. Je vais aider Framabook dans la création des couvertures des futurs ouvrages aussi. Il y a de la place pour tous ceux qui souhaitent donner un coup de main et selon les compétences de chacun… et ça c’est chouette !

Et ton mot de la fin ?
Miaou ! Merci infiniment à Framasoft pour cet échange autour du kit !




Julie et le droit de copie

Julie Guillot est une artiste graphique (son book en ligne) qui vient d’entamer le récit de son cheminement vers le partage libre de ses œuvres. Elle y témoigne de façon amusante et réfléchie de ses doutes et ignorances, puis de sa découverte progressive des libertés de création et de copie…

C’est avec plaisir que nous republions ici cette trajectoire magnifiquement illustrée.

Droit de copie #1

Une chronique de Julie Guillot publiée d’abord sur son blog

Quand j’ai créé ce blog il y a 2 ans, puis le second sur les violences scolaires, mes proches m’ont encouragée et soutenue. Mais beaucoup (parfois les mêmes) m’ont aussi mise en garde, voire se sont sérieusement inquiétés.

Julie_Guillot_dessins

Ces peurs étaient très liées à Internet, à l’idée d’un espace immense, obscur, peu ou pas réglementé, ainsi qu’à la notion de gratuité qui en fait partie. Y publier ses images et ses productions reviendrait à les jeter par la fenêtre.

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Mais la crainte était, au-delà d’Internet et du support blog, une crainte (vraiment forte) du pillage, de l’expropriation et de la copie.

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Personnellement, je ne pensais pas d’emblée à ces « risques ». J’avais envie et besoin de montrer mon travail, donc de le partager. Mais devant ces alertes, et voyant que tout le monde semblait partager le sentiment du danger et le besoin de s’en protéger, j’ai apposé un copyright en bas de mon blog, avec la mention « tous droits réservés », et j’ai supprimé le clic droit.

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En fait je n’avais pas du tout réfléchi à cette question. Je ne savais pas grand chose du droit d’auteur et du copyright.

Mais dès le début je ressentais une forme de malaise. Je savais que supprimer le clic droit n’empêcherait personne de récupérer une image. Et j’avais vaguement entendu que cette mention de copyright ne servait pas à grand-chose non plus.

Était-ce une saine prudence… ou une forme de paranoïa ?

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Et puis, j’ai commencé à recevoir des demandes de personnes qui souhaitaient utiliser mes images. Pour une expo, un travail de recherche, une conférence, un cours…. Spontanément, je disais toujours oui. Parce que je ne voyais aucune raison de refuser. Non seulement je trouvais cela flatteur, mais en plus cela m’apparaissait comme une évolution logique et saine de mon travail : à quoi sert-il s’il ne peut être diffusé, partagé, utile aux autres ?

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Petit à petit cela m’a fait réfléchir. Des gens venaient me demander mon autorisation simplement pour citer mon blog quelque part (ce qui n’est pas interdit par le droit d’auteur… !). Je ne pouvais pas le leur reprocher : après tout, j’avais apposé une mention « touts droits réservés ». Mais l’absurdité de la situation commençait à me parvenir.

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Un jour, j’ai reçu une demande d’ordre plus « commercial » : quelqu’un qui souhaitait utiliser mes images pour une campagne de financement d’une épicerie végane.

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Spontanément, j’ai hésité. Ne devais-je pas lui demander de l’argent ?
J’ai exprimé des conditions : je voulais être informée des images qu’il utiliserait, à quel endroit, des textes qu’il allait modifier, etc. Ce qu’il a accepté.
Mais très vite je me suis demandé pourquoi j’avais posé de telles conditions. Parce qu’en réalité, ça m’était égal.

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Finalement, il n’a pas utilisé mes images. Mais il m’a permis de réaliser que je n’avais pas de position claire sur la manière dont je voulais partager ou non mon travail, que je ne connaissais rien à la législation, aux licences d’utilisation et à de possibles alternatives.

 

J’ai donc commencé à m’intéresser de plus près à ces questions de copyright, de droit d’auteur, de culture libre et de licences.

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Ce qui m’a amenée à réfléchir à me conception de l’art, de la créativité, et même, plus largement, du travail.

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Gwenn Seemel explique très bien que le droit d’auteur n’est pas uniquement un système juridique, mais un paradigme :

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Nous envisageons l’art, la production de la pensée, comme des productions inaliénables ; nous assimilons la copie à du vol ; nous considérons l’imitation comme un acte malhonnête, une paresse, quelque chose de forcément blâmable. Il va de soi que nous devons demander l’utilisation à quelqu’unE pour utiliser ses écrits, ses images, sa musique, afin de créer quelque chose avec. Et nous ne remettons quasiment jamais ce paradigme en question.

Nous avons tous grandi avec l’idée que copier était (très) (très) mal. Et punissable.

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Quand j’étais à la fac, certainEs étudiantEs refusaient de dire quel était leur sujet de mémoire ou de thèse…de peur qu’on leur « pique » leur(s) idée(s). J’étais naïve…et consternée.

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C’était pour moi incompatible avec la conception que j’avais de la recherche et du travail intellectuel.

Bien sûr, ces comportements sont le résultat de la compétition qui structure notre société et une grande partie de nos relations. Toute production est considérée comme strictement individuelle, personnelle, comme si nous étions capables de créer à partir de rien.

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Je me suis sentie profondément enthousiaste de découvrir des artistes qui rendent leurs oeuvres publiques, c’est à dire qui en permettent la libre diffusion, la copie, l’utilisation, la modification, des gens qui réfléchissent à ces questions et militent pour une culture différente.

Comme Nina Paley, par exemple :

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J’étais convaincue, au fond, par la pertinence d’une culture sans copyright et je me sentais soulagée à l’idée de franchir le pas, moi aussi.

Je n’ai jamais ressenti un sentiment fort de propriété vis-à-vis de mes dessins.

J’ai toujours aimé copier, je m’inspire du travail des autres (comme tout le monde), et je trouve a priori naturel que mes productions puissent circuler, servir à d’autres, être utilisées et même transformées.

L’idée de pouvoir utiliser les œuvres des autres, comme me dessiner habillée en Gwenn Seemel, est tout aussi enthousiasmante.

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Cet élan spontané cohabitait en moi avec la persistance de craintes et de méfiances :

et si on se faisait de l’argent « sur mon dos » ? Et si je le regrettais ? Ne suis-je pas responsable de tout ce que je produis, et donc de tout ce que deviennent mes productions ? Ne devrais-je pas demander de l’argent pour toute utilisation de ce que j’ai fait ? Est-ce que je ne fais donc rien d’original et de personnel ? Et si cela m’empêchait de gagner de l’argent avec mon travail artistique ? Et comment faire dans une société où le principe du droit d’auteur est la règle ?

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J’avais besoin d’en savoir plus sur les aspects juridiques de la question, même si ça me semblait au départ rébarbatif.

Alors je me suis penchée sur le sujet. Comme dit Gwenn Seemel, personne ne va se brosser les dents à votre place.

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(mais il y a des gens qui fournissent le dentifrice, et ça c’est sympa).

[À suivre…]

Gwenn Seemel m’a beaucoup aidée à avancer dans ma réflexion sur le droit d’auteur, la culture libre, la pratique de l’art en général. Ses vidéos et ses articles ont répondu à beaucoup de mes questions (puisqu’elle s’était posé les mêmes que moi, logiquement). Je vous conseille la lecture de son blog, et de son livre sur le copyright.

Le blog de S.I.lex est aussi une mine d’informations sur le sujet.




[Tac au Tux] Péhä, Odysseus et Gee

Il était une fois dans le monde merveilleux de la télé des années soixante, celle avec une seule chaîne et deux couleurs, un programme où s’opposaient joyeusement : dessinateurs de BD (Franquin, Moebius, Pratt…), caricaturistes de presse (Cardon, Gébé, Siné…), illustrateurs et peintres (Gourmelin,Topor, Serre…), pour le plus grand plaisir des téléspectateurs et de Jean Frapat, l’homme derrière cette émission : Tac au Tac.

Aujourd’hui le temps a passé, la télé a évolué, elle a maintenant des centaines de chaînes, des couleurs par millions, mais aucune émission semblable de près ou de loin à ce que fut Tac au Tac pour la culture graphique populaire. Parallèlement a émergé Internet et ses innombrables possibilités de travail collaboratif. Partant de ce constat, le dessinateur Péhä s’est dit qu’il y avait là une belle occasion de faire revivre ce genre de projet dans une version bien moins centralisée mais tout aussi joyeuse et amusante ! Surtout dans le milieu des dessinateurs sous licence libre qui encouragent vivement la réutilisation de leurs dessins dans une démarche qui s’inscrit dans la plus large culture du remix…

Il a donc contacté deux autres dessinateurs libres que les lecteurs du Framablog connaissent très certainement déjà : Odysseus et Gee. À eux trois, ils ont joué une partie de ce qu’ils ont appelé Tac Au Tux (a-t-on vraiment besoin d’expliquer ce nom ?), s’échangeant les fichiers via Framapic et ajoutant tour à tour leurs touches sans aucune contrainte spécifiée. Nous vous proposons de découvrir le résultat ci-dessous, sous licence libre évidemment.

Gageons que ce premier essai de dessin collaboratif ludique ne sera pas le dernier que vous pourrez admirer sur le Framablog, et nous invitons par ailleurs les dessinateurs intéressés pour jouer une partie future à nous contacter (plus de détails en fin d’article).

La partie de Tac au Tux

C’est Péhä qui débute ce Tac au Tux :

0-TacAuTac-Test Initial

Odysseus répond à l’appel du Père Noël :

1-TacAuTac-Test Odysseus

Tandis que Gee y glisse un piège mortel :

2-TacAuTac-Test Gee

Et si le piège se faisait lui-même piéger ? C’est la proposition de Péhä :

3-TacAuTac-Test Péhä

Un petit air d’Halloween avec cette répartie d’Odysseus qui en profite pour élargir le cadre (qui a dit que c’était interdit ?) :

4-TacAuTux-Test

Et Gee conclut la grande chaîne du chasseur-chassé :

5-TacAuTux-Fin

La boucle est bouclée ! Et en prime, voici une petite version animée :

animation

Invitations à participer

Bien sûr, un projet libre c’est bien, mais un projet participatif, c’est mieux ! Les trois compères se sont bien amusés pendant cette première partie, mais ils n’ont certainement pas l’intention de tourner en rond pour la suite. Vous êtes dessinateur vous aussi ? Participer à un projet amusant et sous licence libre vous intéresse ? Alors n’hésitez pas à nous faire signe ! Il n’y a pas encore de calendrier ou de règle pour les participation (si ce n’est la licence du dessin final qui doit être libre) : comme tout projet débutant, celui-ci assume sa part de bazar. Qui sait, peut-être verrons-nous un jour des parties de Tac Au Tux en direct vidéo ? Tout est possible dans le monde du Libre 🙂

Il faut rendre à César…

Pour conclure ce premier article, il nous faut écrire quelques mots sur l’inventeur de l’émission Tac au Tac. Jean Frapat, pionnier parmi d’autres de la télévision, producteur inventif qui aura donné sa vraie place à la culture sur le petit écran à travers les émissions qu’il produisit. Il fut également l’un des premiers de son temps à voir le formidable potentiel culturel de la BD et à considérer les dessinateurs de BD comme de vrais artistes majeurs.

Jean Frapat est décédé le 8 octobre 2014 à l’âge de 86 ans dans l’indifférence générale, oublié d’une télévision fade devenu trop étriquée culturellement pour un aventurier des ondes comme lui.

Tac au Tux est un modeste hommage à ce grand monsieur.




Valentina, logiciel libre de création de vêtements (et Gucci devint GNUcci)

Le monde du logiciel libre manque d’applications dédiées à la création de vêtements. D’autant qu’avec le boom des fab labs, on formerait plein de stylistes en herbe qui proposeraient autre chose que des produits chinois.

Raison de plus pour mettre en lumière ci-dessous le projet émergent qu’est Valentina.

Pour illustrer ce qu’il peut potentiellement réaliser, voici trois images chronologiques :

Valentina

Valentina

Valentina

Remarque : si le sujet intéresse, on pourra aussi lire Nous avons enfin compris pourquoi le diable s’habillait en Prada.

http://valentina-project.blogspot.ru/2013/12/blog-post_10.html

Présentation de « Valentina », un logiciel libre de création de vêtements

Introducing Valentina, free fashion design software

Alexandre Prokoudine – 31 décembre 2013 -LibreGraphicsWorld
(Traduction : GregR, @cartron, Mooshka, Scailyna, Asta, Lolo le 13 + anonymes)

Au fil du temps, nous avons assisté à de nombreuses discussions sur la viabilité du logiciel libre pour le graphisme, le design graphique et la conception de plans. Mais qu’en est-il de la création de vêtements ?

Tout d’abord, quel est le problème avec le logiciel commercial ? Comme beaucoup de systèmes de CAO (Conception Assistée par Ordinateur), c’est cher. Même si certains éditeurs, comme TUKAtech, proposent en option des abonnements mensuels à 145 $ pour répartir le coût de possession dans le temps (ce qui rend plus obscur le TCO/coût total de possession), d’autres éditeurs sont moins libéraux.

Par exemple, le département de relations publiques de Optitex n’a pas peur de rediffuser des études de cas qui mettent en évidence les éléments suivants :

Les prix ne sont pas du tout abordables pour une jeune société qui vient de se monter : environ 16.000 $, sans formation, et sans compter le coût de l’ordinateur, du scanner (si vous avez besoin de dessiner vos modèles à la main), et du traceur (si vous voulez imprimer le modèle en taille réelle).

OK, vous comprenez l’idée. Le résultat, c’est que les stylistes qui démarrent leur activité sont bloqués entre des logiciels chers qu’ils ne peuvent pas se permettre d’acheter, des applications simplistes, et des systèmes de CAO génériques divers et variés (de l’abordable aux versions chères piratées). Tout cela ne rend pas les choses faciles.

Vous êtes déjà en train d’aller dans en bas de cet article, pour y laisser un commentaire acide disant qu’on ferait mieux de parler de liberté ? Eh bien, disons qu’il serait assez génial de donner aux gens un outil libre et gratuit qui fonctionne et qui fournisse une grande flexibilité.

Donc, un logiciel de mode libre du coup ?

Susan Spencer Conklin a été la première à aborder le sujet (non existant) du logiciel libre pour le design de mode, au « Libre Graphics Meetings 2010 », avec l’intention de démarrer une conversation avec la communauté. Un an plus tard, à la même conférence, elle montrait déjà son propre logiciel, qui fait partie du projet Tau Meta Tau Physica (TMTP).

Vous pouvez lire cette entretien avec Susan pour avoir plus de détails sur son projet. Pour résumer, Susan se concentre sur le développement d’un système qui génère un modèle de taille unique qui ira à n’importe qui avec très peu d’ajustements à faire.

Bien que Susan ait aussi réussi à faire quelque chose qui marchotte avec Inkscape, il y a toujours de la place pour un outil de design de modèle dans l’écosystème. Et c’est là que Valentina rentre en jeu.

Valentina

Bien que ce projet soit assez récent, Roman Telezhinsky a commencé à travailler sur son propre outil de création de modèle quand il était étudiant.

Cette version de l’application fonctionne sur Linux et Windows, et supporte le design et le classement de modèles. Vous pouvez faire pas mal de choses, comme créer manuellement des agencements pour exporter en SVG et PNG, puis les couper avec un traceur.

En fait, il est déjà possible d’utiliser Valentina pour créer de vrais vêtements à partir d’un patron de couture, comme illustré sur le blog du projet. Et si on créait GNUcci ? 🙂

Cependant, à ce stade du développement, Roman suggère humblement de ne pas traiter Valentina comme un outil de production, car il manque toujours des fonctionnalités importantes, et le format de fichier interne n’est pas encore stabilisé.

Une collaboration entre Susan et Roman est tout à fait possible. Ils ont beaucoup discuté en 2013, et il y a pas mal de choses intéressantes à porter de TMTP à Valentina.

Il y a encore beaucoup de travail en perspective. En mettant de côté les fonctionnalités Design Patern, il y a toute la question de la 3D. De plus en plus d’applications pour la conception de mode permettent de tester simplement votre création sur des personnages virtuels et voir le résultat dans des poses différentes. Réécrire ce type de fonctionnalités entièrement peut être un énorme chantier.

Une façon de voir cela est d’estimer quelles parties pourraient êtres déléguées à des logiciels comme l’add-on MakeClothes pour Blender, puis de voir s’il serait facile d’intégrer Valentina, Blender + MakeClothes, et MakeHuman. Ceci permettrait d’attirer l’attention des développeurs sur l’utilisation de Blender pour la simulation de vêtements.

Maintenant, vous souhaitez sans doute voir du concret : vous trouverez un fichier d’installation de Valentina à côté des Tarball du code source sur Bitbucket. Pour commencer, lisez le tutoriel par Roman Telezhinsky et Christine Neupert.

Donnons sa chance à Valentina.




Un salon de beauté conçu avec Blender et Cycles (en lieu et place de 3ds Max)

Dans le milieu du design et de la CAO, la part belle est encore trop souvent faite aux logiciels propriétaires.

Mais il n’y pas que 3ds Max & co dans la vie logicielle. On peut faire tout aussi bien, voire mieux, avec le libre Blender et son moteur de rendu Cycles.

C’est que ne nous prouve par l’exemple cet entretien du talentueux ukrainien Igor Shevchenko.

Backstage - Blender

Un salon de beauté conçu et visualisé grâce à Blender et Cycles

Beauty salon designed and visualized with Blender and Cycles

Alexandre Prokoudine – 25 février 2013 – LibreGraphicsWorld.org
(Traduction : Alpha, Max, KoS + anonymes)

Parmi toutes les choses intéressantes qui sont réalisables à l’aide de logiciels libres, ce que LGW aime faire le plus, c’est produire un travail commandé qui soit reconnu. Parlons d’un cas particulier, celui de l’utilisation de Blender et Cycles pour la visualisation d’architectures commerciales.

Je suis récemment tombé sur ce travail sur Behance (NdT : une plateforme de partage de projets de design pour les professionnels) et je n’ai pas pu résister à l’envie de contacter Igor Shevchenko, son auteur.

Igor travaille pour une entreprise ukrainienne appelée « Magis ». Il s’occupe de la modélisation, du texturage et du rendu d’intérieur. « Backstage », le salon de beauté en question, est un véritable établissement qui a ouvert à Kiev en septembre 2012.

Igor, s’agit-il de ton premier projet sérieux réalisé à l’aide de Blender ? Le reste de ton album sur Behance semble porter les étiquettes de 3DS Max, Adobe Photoshop et d’autres logiciels du même genre.

Oui, c’est vrai, c’est le premier vrai projet que l’on m’a commandé et que j’ai réalisé avec Blender. J’étais vraiment curieux de savoir s’il allait être possible de réaliser un tel projet uniquement avec un logiciel libre et de voir les difficultés auxquelles on pouvait s’attendre. Lorsque j’ai commencé à travailler sur le projet, j’ai eu peur que ma connaissance de Blender ne soit pas suffisante pour le mener à bien et de devoir retourner sous 3DS Max. Ça ne s’est pas produit.

Combien de temps cela a-t-il pris ?

Le travail sur le design intérieur a été fait en 3 mois. Mais les rendus du portfolio pour Behance ont été une toute autre affaire. Je suis parti de rien, surtout pour Behance.

Vraiment ?

L’année dernière, en novembre, notre administrateur système m’a demandé de lui envoyer quelques rendus de ce que j’avais fait avec Blender. Il souhaitait les montrer à un ami qu’il tentait de convaincre que Blender était en fait un outil très correct. J’ai donc fouillé parmi mes fichiers et je fus horrifié de constater que je n’avais aucun rendu lissé. J’ai alors décidé de repartir de zéro pour refaire les rendus du projet « Backstage ».

Attends, donc tu n’as pas fait ces visualisations pour le client ?

Le client ne voulait pas des rendus de haute qualité dans un premier temps. Nous avons juste fait le design et décrit le reste avec des mots.

OK, donc de combien de temps as-tu eu besoin pour réaliser la version portfolio du projet ?

Je n’avais aucune date limite, ça ne pressait donc pas, je l’ai fait pendant mon temps libre. Je pense qu’en m’y mettant et en ne faisant rien d’autre, ça m’aurait pris une journée pour faire la modélisation, une autre pour peaufiner les détails et encore une autre pour effectuer le rendu global.

Backstage - Blender

D’où vient ton intérêt pour Blender ?

Il y a environ trois ans, j’ai fini par en avoir marre d’utiliser 3DS Max, j’ai donc commencé à chercher des alternatives. J’ai d’abord essayé Maya et Cinema 4D et j’ai opté pour Maya. Cependant, je me suis rendu compte que soit je n’arrivais pas à trouver le temps pour apprendre à l’utiliser, soit il ne me convenait pas. Peut-être un peu des deux.

J’ai fini par revenir à 3DS Max, faute d’autre chose. Notre administrateur système, qui est un grand adepte du logiciel libre m’a suggéré d’utiliser Blender, mais il s’agissait de la version 2.49 que je n’ai vraiment pas appréciée.

Fin 2011, j’ai lu un article sur « Sintel » le film libre, je l’ai alors regardé. J’ai adoré à la fois l’histoire et les visuels, j’ai donc donné une seconde chance à Blender : j’ai téléchargé une version plus récente et je me suis mis à lire les tutoriels d’Andrew Price, j’ai alors commencé à comprendre comment ce logiciel fonctionnait.

Puis, Cycles est arrivé, et ça a achevé de me convaincre. Mi-2012, j’étais déjà en train de réaliser des petits projets avec Blender, puis « Backstage » est devenu le premier grand projet pour lequel je m’en suis servi. Ça n’a pas été facile, mais je ne suis pas déçu. Avant je considérais que les logiciels libres performants ne pouvaient pas exister. Blender est une exception remarquable dans ce domaine.

L’un dans l’autre, une expérience positive ?

Oui. Mes collègues ont remarqué que je travaillais plus rapidement. Blender a une logique réellement différente, pas comme dans 3DS Max :

  • manipulation d’objets,
  • personnalisation facile de l’interface,
  • approche différente de la modélisation de polygone,
  • paramétrage nodal des matériaux,
  • traitement « post-processing » intégré,
  • modificateurs (il n’y en pas beaucoup, mais ils sont très efficaces pour accélérer le processus de modélisation),
  • raccourcis clavier (il y en a beaucoup et ils améliorent grandement mon efficacité).

Blender possède des fonctionnalités sans lesquelles je ne m’imagine pas travailler aujourd’hui. 3DS Max n’en possède pas autant.

Cette liste pourrait s’allonger mais le plus important est que Blender est tout simplement mon type d’application.

Et Cycles ?

Cycles est un formidable moteur de rendu. J’ai récemment implémenté le matériau caoutchouc dans 3DS Max pour les pneus, et c’était vraiment la misère : paramétrage, rendu, paramétrage, rendu ainsi de suite… Dans Cycles, j’ai juste ajusté les paramètres et vu le résultat immédiatement.

Vois-tu une utilité au moteur de rendu interne de Blender dans ton travail quotidien ?

Non, c’est plutôt inutile en ce qui me concerne.

Est-ce que l’aspect libre et gratuit, en plus de la faible taille du fichier à télécharger a joué un rôle ?

Tout à fait. À plusieurs reprises, j’ai eu besoin de télécharger Blender lors d’un rendez-vous avec un client sur son ordinateur (5 minutes), de le lancer (2 secondes) et de travailler sur un projet. Ça fait une grande différence.

Au vu de tout ça, est-ce que l’un de tes collègues a déjà eu envie d’utiliser Blender ?

Non, et je ne m’attends pas à ce qu’ils le fassent. Soyons réalistes, la seule façon pour que cela arrive, c’est de les forcer à l’utiliser, et rien de bon n’en sortira. En réalité, les gens n’ont soit pas le temps, soit pas l’envie d’apprendre de nouvelles choses, et certains ne savent même pas que des alternatives existent.

Quels types de difficultés as-tu rencontrés lorsque tu travaillais avec Blender sur le projet « Backstage » ?

Le principal défaut de Blender est que la phase de développement actif a commencé assez récemment et beaucoup de fonctionnalités de base ne sont pas encore présentes. Il y a aussi les problèmes de compatibilité avec les formats de fichiers : c’est difficile d’ouvrir des fichiers Blender dans AutoCAD et dans 3DS Max, c’est même quasiment impossible.

As-tu rencontré des problèmes purement techniques avec Cycles ? Quelque chose qui manque ?

J’ai un peu de mal à me rappeler ce qui manque. De manière générale, les fonctionnalités compatibles par défaut dans les autres moteurs de rendu. La gestion des fichiers IES (NdT : qui gèrent la répartition de la lumière) en faisait partie il y a peu, mais ça a été résolu.

D’un autre côté, j’ai trouvé des méthodes parfaitement fonctionnelles pour contourner la plupart — sinon toutes — des fonctionnalités manquantes. La seule chose que je n’arrive pas à contourner c’est que Cycles est plutôt inutile sans une carte graphique chère.

Penses-tu que la fréquence des mises à jour de versions interfère avec les méthodes de travail en entreprise ? Les studios seraient plus enclins à n’utiliser que des mises à jour importantes et à ne les mettre à jour que pour corriger les bugs, c’est assez connu.

La fréquence d’apparition des nouvelles versions semble être une des principales particularités des logiciels libres. Je pense qu’en réalité, Blender en tire profit, parce qu’il reste beaucoup de choses à faire.

En plus, Blender a une bonne compatbilité ascendante et, de cette manière, rien n’empêche un studio de se limiter à une version particulière et à l’utiliser pendant quelques années.

Backstage - Blender

La galerie complète du projet « Backstage » est disponible sur Behance.




Savoir utiliser images et couleurs (Libres conseils 24/42)

Chaque jeudi à 21h, rendez-vous sur le framapad de traduction, le travail collaboratif sera ensuite publié ici même.

Traduction Framasoft :peupleLà, elquan, tcit, Julius22, Garburst, okram, Jej, Cyrille L., lerouge, Lycoris, Goofy, CoudCoud, vvision, lamessen

Du bon usage de la couleur et des images dans le design

Eugene Trounev

Membre actif du logiciel libre et de KDE depuis près de six ans, Eugene Trounev a commencé chez KDEGames et a poursuivi pendant l’ensemble de la transition de KDE3 à KDE4. Il a participé à toute la transition de KDE3 vers KDE4. Actuellement, il s’occupe principalement de la présence de KDE sur le Web et de l’apparence du bureau principal.

Depuis la nuit des temps, les hommes ont utilisé la puissance des images et de la couleur pour transmettre des informations, attirer l’attention ou la détourner. Un célèbre dicton dit « une image vaut mille mots » et on ne saurait mieux dire. Depuis la façon dont nous nous habillons jusqu’aux néons criards des magasins de centre-ville dans le monde entier, chaque couleur, chaque forme et chaque courbe joue un rôle.

Connaître ce rôle n’est cependant pas si difficile, puisque toutes ces variations de teintes et de lignes sont assemblées pour être lues et ressenties par chacun de nous. Il est donc vrai qu’un design génial doit venir droit du cœur, étant donné qu’il est censé parler d’abord au cœur. Néanmoins, le cœur seul ne pourrait pas produire un design génial si quelques règles n’étaient pas d’abord définies et respectées.

Il existe plusieurs façons de classer les couleurs, mais la plupart mettent en avant les propriétés physiques ou chimiques de la lumière ou de l’encre. Bien que cela soit important pour le résultat final, ces propriétés ne vous aideront pas à faire un design attrayant. Ce qui fonctionne le mieux, selon moi, est de séparer entre couleurs chaudes et couleurs froides. Pour faire simple, les couleurs chaudes sont celles qui sont les plus proches de la teinte rouge : le rouge, l’orange et le jaune. Les couleurs froides, à l’opposée du spectre, sont celles qui se rapprochent du bleu : le vert, le bleu et, dans une moindre mesure, le violet. Il est important de se rappeler que « froid » représente aussi le calme et la respiration, tandis que « chaud » est impulsif et dangereux. Ainsi, en fonction des sentiments que vous souhaitez éveiller au sein de votre public, vous devriez utiliser des couleurs plus chaudes ou plus froides. Des couleurs chaudes pour attirer l’attention ; des couleurs froides pour informer. Une utilisation excessive de l’une ou de l’autre aboutira soit à une surchauffe — provoquant des sentiments négatifs chez votre public — soit à un refroidissement — ce qui causera son indifférence.

Il est important de se souvenir que le noir, le blanc et les nuances de gris sont aussi des couleurs. Celles-ci, toutefois, sont neutres. Elles ne provoquent aucun sentiment mais établissent plutôt une atmosphère. Leurs propriétés seront discutées plus loin.

Chaque image est d’abord et avant tout une collection de couleurs et, en tant que telle, suivra les règles de la gestion des couleurs. Déterminer la couleur dominante de votre image est la clé du succès. Essayez d’avoir une vue d’ensemble, sans vous concentrer sur les détails. Une bonne manière de le faire consiste à placer une image sur un fond sombre, puis à se reculer de quelques pas et de l’observer de loin. Quelle couleur percevez-vous le plus ?

Toutefois, toutes les images n’ont pas une couleur dominante. Quelquefois, vous rencontrez un amas de couleurs dont vous ne pouvez déterminer la teinte dominante, quelle que soit l’intensité avec laquelle vous le regardez. Essayez d’éviter de telles illustrations car elles vont inévitablement déconcerter vos utilisateurs. Confrontés à des images de ce type, les gens auront tendance à rapidement regarder ailleurs et cela ne leur laissera pas bonne impression, quel que soit le sujet abordé.

Au delà de la couleur, les images ont aussi une texture car, en fin de compte, elles ne sont rien de plus qu’un ensemble de couleurs texturées. Identifier la texture dominante d’une image n’est pas aussi simple que de percevoir sa couleur car les textures sont rarement évidentes, particulièrement dans les photographies. Il existe néanmoins quelques indicateurs pouvant vous aider. La nature humaine fait que nous sommes attirés par les formes incurvées (aussi appelées formes « naturelles ») tandis que les formes anguleuses et effilées sont considérées comme moins attirantes. C’est pour cela que l’image d’une feuille verte et incurvée sera plus attirante que celle d’un pic en métal. Pour résumer : la clé d’un design réussi et séduisant est une bonne combinaison, correctement équilibrée, entre couleurs et textures au sein des images utilisées.

Un autre aspect aussi important de tout design réussi est la mise en forme du texte et la disposition des espaces autour de celui-ci. Tout comme pour les textures et les couleurs, vous devriez toujours garder à l’esprit que les gens aiment respirer. Cela signifie qu’il devrait y avoir suffisamment d’espace dans et autour du texte pour le rendre plus facilement repérable, lisible et compréhensible.

Imaginez un exemple constitué de deux pages — l’une venant d’un roman d’amour tandis que l’autre est tirée d’un document légal. Vous préféreriez très probablement le roman d’amour par rapport à un document légal quel que soit le moment. Mais savez-vous pourquoi ? La réponse est simplement que vous aimez respirer. Une page de roman d’amour contient vraisemblablement trois éléments importants : des dialogues, des paragraphes et des marges extra-larges, tandis que la plupart des documents légaux ne comportent d’ordinaire aucun des trois. Tous les éléments mentionnés ci-dessus font vivre la page et la rendent dynamique, tandis qu’en leur absence, la page ressemble à un gros pavé de texte. L’œil humain, étant plus habitué à un certain degré de variation de formes, se sent plus à l’aise lorsque les pages bénéficient d’une mise en page aérée et fluide.

Toutefois, cela n’implique pas que chaque texte doive avoir ces trois éléments pour avoir l’air plus attrayant, loin de là. Tout texte peut être rendu facile et agréable à lire en l’aérant suffisamment.

Un peu de respiration ou d’espace peut être injecté au texte de plusieurs manières, telles que l’espacement des lettres, des lignes et des paragraphes ; les marges du contenu, de la section et de la page ; et pour finir, la taille de la police. Essayez de garder une espace d’au moins un caractère de haut entre vos paragraphes et vos lignes ainsi que des espaces de deux caractères de haut entre vos sections. Autorisez-vous des espaces généreux autour du texte sur une page en cadrant assez largement vos marges. Essayez de ne jamais avoir une taille de police inférieure à 10 points pour vos paragraphes tout en gardant les titres assez gros pour les faire ressortir.

Tout comme les animaux, les êtres humains sont souvent attirés par les éclats de couleurs brillantes et les textures inhabituelles. Plus le regard est attiré, plus les personnes ignoreront d’autres points d’intérêt potentiels. Cette simple règle de l’attraction est utilisée indifféremment par les hommes et les femmes pour canaliser l’attention des autres loin de certains éléments qui doivent selon eux passer inaperçus. Le meilleur exemple d’une telle supercherie est celui d’un magicien de rue qui distrait souvent l’attention des spectateurs par l’utilisation de fumée, de flammes ou de tenues tape-à-l’œil.

Il est important, ici, de se rappeler que les mots sont aussi visuels puisqu’ils créent des images et des associations spécifiques. La supercherie qui peut être réalisée avec de la fumée et du feu peut également être accomplie par le biais d’une utilisation créative des mots. Le meilleur exemple de supercherie quotidiennement réalisée grâce aux mots est, de loin, celle des étiquettes de prix. Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi les commerçants aimaient autant les 99 et les 95 centimes ? C’est parce que les 9,95€, ou même les 9,99€, semblent plus attractifs que 10€, même si, dans la réalité, ils ont le même impact sur votre porte-monnaie. Ajoutez-y une « vieille » étiquette de prix à 10€ ostensiblement barrée d’une épaisse ligne rouge et vous aurez un bon aimant à clients.

Conclusion

L’obtention d’un design à la fois beau et attractif passe par ces règles de base : soyez judicieux dans vos choix iconographiques ; faites un bon usage des couleurs et des textures pour créer une atmosphère ; donnez à votre lecteur des espaces pour respirer ; détournez l’attention des parties qui comptent le moins pour l’amener sur celles qui sont importantes.

Ce court article n’entend pas couvrir toute l’étendue du spectre des différents styles et techniques de design. Il s’agit plutôt de vous donner à vous lecteur une base sur laquelle vous pourrez vous appuyer pour construire.




Intégrer un projet en se faisant connaître (Libres conseils 23/42)

Chaque jeudi à 21h, rendez-vous sur le framapad de traduction, le travail collaboratif sera ensuite publié ici même.

Traduction Framasoft : Miki, peupleLà, dabou, Astaelquan, Goofy, Julius22, okram, lamessen, Jej, lerouge, SaSha_01, Lycorismeumeul, vvision

Ne soyez pas timide

Máirín Duffy Strode

Máirín Duffy Strode utilise des logiciels libres et open source depuis le lycée et y contribue depuis huit ans. Elle contribue aux communautés Fedora et GNOME et a travaillé sur l’identité visuelle des interactions, l’image de marque ou l’iconographie de plusieurs applications libres et open source importantes telles que Spacewalk, Anaconda, virt-manager, SELinux et SSSD. Elle s’est également engagée dans des activités de sensibilisation en enseignant les techniques de design à des enfants à l’aide d’outils libres et open source tels que GIMP et Inkscape qu’elle défend ardemment. Elle est à la tête de l’équipe de conception graphique de Fedora et designer d’interaction senior chez Red Hat, Inc.

Je connaissais et utilisais des logiciels libres et open source bien avant de devenir contributrice. Ce n’est pas faute d’avoir essayé — il y a eu quelques faux départs auxquels je n’ai pas donné suite principalement parce que j’étais trop timide et que j’ai eu peur d’aller plus loin. Sur la base de ces tentatives avortées et de ce que m’ont rapporté d’autres designers qui se sont embarqués dans des projets libres et open source, j’ai cinq astuces à vous offrir si vous êtes un designer aspirant au statut de contributeur au logiciel libre et open source.

1. Sachez que l’on a besoin de vous et qu’on vous veut (très fort !)

Mon premier faux départ s’est produit alors que j’étais étudiante en première année d’informatique au Rensselaer Polytechnic Institute. Il y avait un projet particulier que j’utilisais beaucoup et auquel je voulais participer. Je ne connaissais personne au sein du projet (ni qui que ce soit investi dans le logiciel libre). J’ai donc fait une tentative à froid. Le site web du projet signalait que les contributeurs voulaient de l’aide et qu’ils avaient un canal IRC. J’y ai alors traîné pendant une semaine ou deux. Un jour, après une pause dans la conversation, j’ai osé élever la voix. J’ai dit que j’étais une étudiante en informatique intéressée par l’ergonomie et que j’adorerais participer.

On m’a répondu : « Dégage ! ». Qui plus est, on m’a fait comprendre que mon aide n’était ni nécessaire ni désirée.

Cela a retardé mon engagement de quelques années — il avait suffi de quelques mots un peu rudes sur IRC pour me dissuader de réessayer pendant près de cinq ans. Je ne découvris que bien plus tard que la personne qui m’avait plus ou moins expulsée du canal IRC de ce projet était en marge du projet, qu’elle avait un lourd passif de ce genre et que je n’avais vraiment rien fait de mal. Si seulement j’avais persévéré dans mes tentatives d’approche et conversé avec d’autres personnes, j’aurais pu commencer à ce moment-là.

Si vous souhaitez contribuer au logiciel libre et open source, je vous garantis qu’il y a un projet quelque part qui a vraiment besoin de votre aide, en particulier si vous êtes orienté design ! Faites-vous du design web ? De l’iconographie ? De l’ergonomie ? De l’habillage ? Des maquettes d’interface utilisateur ? J’ai parlé à de nombreux développeurs de logiciels libres et open source qui non seulement sont désespérément à la recherche d’aide dans ce domaine, mais qui en plus l’apprécieraient vraiment et vous vénéreraient pour l’avoir apportée.

Si vous rencontrez des résistances la première fois que vous essayez de participer dans un projet, apprenez de mon expérience et n’abandonnez pas tout de suite. Si, en définitive, le projet n’est pas fait pour vous, ne vous inquiétez pas et passez votre chemin. Il y a des chances pour que vous trouviez un projet que vous adorerez et qui vous adorera en retour.

2. Aidez le projet pour qu’il vous aide à aider les autres

Bien des projets libres et open source sont aujourd’hui dominés par les programmeurs et les ingénieurs. Et si certains ont la chance qu’une ou deux personnes créatives s’investissent, dans la plupart des projets, un designer, un artiste ou une autre présence créative représente un rêve souvent-caressé-mais-jamais-réalisé. En d’autres termes, même s’ils comprennent qu’ils ont besoin de vos compétences, ils peuvent ne pas savoir quelle sorte d’aide ils peuvent vous demander, quelle information ils doivent vous donner pour que vous puissiez être productif ni même les bases pour travailler avec vous efficacement.

Quand j’ai commencé à m’investir dans différents projets libres et open source, j’ai rencontré beaucoup de développeurs qui n’avaient jamais travaillé directement avec un designer auparavant. Au début, je me suis sentie un peu inutile. Je ne pouvais pas suivre toutes leurs conversations sur IRC parce qu’ils parlaient de leur cuisine interne et de détails techniques qui ne m’étaient pas familiers. Quand ils se sont donné la peine de me prêter attention, ils m’ont posé des questions comme « Quelle couleur dois-je mettre ici ? » ou « Quelle police dois-je utiliser ?  ». Ce que je voulais vraiment en tant que designer d’interactions, c’était d’être associée à la prise de décision lorsqu’on abordait les contraintes spécifiques du projet. Si un utilisateur voulait une fonctionnalité particulière, je voulais avoir mon mot à dire sur le design — mais je ne savais pas où ni quand ces décisions se prenaient et je me sentais exclue.

Le design couvre une gamme assez large de compétences : l’illustration, la typographie, la conception des interactions, la conception visuelle, la conception d’icônes, la conception graphique, la rédaction, etc. et il y a peu de chances qu’un seul concepteur les possède toutes. Il est alors compréhensible qu’un développeur ne soit pas sûr de ce qu’il peut vous demander. Ce n’est pas qu’ils essaient de vous faire obstacle — c’est seulement qu’ils ne savent pas dans quelle mesure vous avez besoin de vous investir ou le désirez.

Aidez-les à vous aider. Montrez-leur clairement le type de contributions que vous pouvez apporter en fournissant des exemples de contributions antérieures. Faites-leur comprendre vos besoins de sorte qu’ils comprennent mieux comment vous aider à vous engager dans leur projet. Par exemple, lorsque vous vous impliquez pour la première fois dans une initiative spécifique pour le projet, prenez le temps de présenter les grandes lignes de son processus de conception et postez cela dans la liste de développement principale afin que les autres contributeurs puissent vous accompagner. Si vous avez besoin d’idées sur des points particuliers, soulignez-les dans votre présentation. Si vous n’êtes pas certain de la façon dont certaines choses se produisent — comme le processus de développement d’une nouvelle fonctionnalité — entrez en contact avec quelqu’un en parallèle et demandez-lui de vous l’expliquer pas à pas. Si quelqu’un vous demande de faire quelque chose au-delà de vos capacités techniques — travailler sur de la gestion de versions, par exemple — et que vous n’êtes pas à l’aise avec ça, dites-le.

Communiquer sur votre processus et vos besoins vous évitera de jouer aux devinettes dans le projet et ses membres seront au contraire capables d’utiliser au mieux vos talents.

3. Posez des questions, beaucoup de questions ; il n’y a pas de question idiote

Nous avons parfois remarqué chez Fedora que, lorsque de nouveaux designers arrivaient à bord, ils avaient peur de poser des questions techniques, par crainte de paraître stupides.

Ce qu’on ne vous dit pas, c’est que les développeurs peuvent être tellement spécialisés qu’il y a beaucoup de détails techniques qui sortent de leur domaine de compétence et qu’ils ne comprennent pas non plus — cela se produit même au sein du même projet. La différence, c’est qu’ils n’ont pas peur de demander — donc vous ne devriez pas avoir peur non plus ! Dans mon travail de design des interactions, par exemple, j’ai dû contacter de nombreuses personnes du même projet pour comprendre comment un processus se déroulait dans leur logiciel, car ce dernier comportait plusieurs sous-systèmes et tous les participants du projet ne comprenaient pas forcément comment chaque sous-système fonctionnait.

Si vous ne savez pas sur quoi travailler, que vous ne savez pas par quoi commencer ou que vous ne comprenez pas pourquoi ce que quelqu’un a dit sur le chat est si drôle — demandez. Vous avez des chances que quelqu’un vous réponde qu’il ne sait pas non plus et peu de risques de passer pour stupide. Dans la plupart des cas, vous allez apprendre quelque chose de nouveau qui vous aidera à devenir un meilleur contributeur. Il peut être particulièrement efficace de chercher un tuteur — certains projets ont même un programme de tutorat — et de lui demander s’il veut bien être votre référent quand vous avez des questions.

4. Partagez et partagez souvent, même si ce n’est pas encore prêt, surtout si ce n’est pas encore prêt

Nous avons aussi remarqué que de nouveaux designers pour Fedora et d’autres projets libres et open source sont un peu timides lorsqu’il est question de montrer leur travail. Je comprends qu’on ne veuille pas ruiner sa réputation en publiant quelque chose qui n’est pas ce qu’on peut faire de mieux ni même fini ; mais une grande partie du travail sur des projets libres et open source est de partager souvent et ouvertement.

Plus vous aurez avancé sur un élément avant de le partager, plus il sera difficile à d’autres de vous apporter un retour utilisable, de se lancer et de s’investir. Il est aussi plus difficile pour autrui de collaborer à votre travail et d’avoir un sentiment d’appartenance au projet, de le soutenir et de le pousser jusqu’à l’implémentation. Dans certains projets libres et open source, ne pas être communicatif avec vos ébauches, compositions et idées est même considéré comme offensant !

Publiez vos idées, maquettes ou compositions sur le Web plutôt que par courriel, afin qu’il soit plus aisé pour les autres collaborateurs de faire référence à votre contribution en faisant un copier-coller de l’URL — c’est particulièrement pratique au cours d’une discussion. Plus vos éléments de design seront faciles à trouver, plus il est probable qu’ils seront utilisés.

Essayez ce conseil et gardez l’esprit ouvert. Partagez votre travail tôt et souvent. Rendez disponibles vos fichiers sources. Vous serez peut-être agréablement surpris par ce qui va se passer !

5. Soyez aussi visible que possible au sein de la communauté du projet

Un outil qui — de manière totalement involontaire — a fini par m’aider énormément à démarrer en tant que contributeur de logiciels libres et open source a été mon blog. J’avais commencé à entretenir un blog, simplement pour moi, à l’image d’un portfolio grossier des choses sur lesquelles j’avais travaillé par le passé. Mon blog est un énorme atout pour moi, parce que :

  • En tant qu’enregistrement de l’historique des décisions de projet, il représente un moyen pratique pour rechercher d’anciennes décisions de design — comprendre pourquoi nous avons décidé de laisser tomber tel ou tel visuel à nouveau ou pourquoi une approche particulière, précédemment essayée, n’a pas fonctionné, par exemple ;
  • En tant que dispositif de communication, il aide les autres contributeurs associés à votre projet et même les utilisateurs à être au courant des travaux en cours et des changements à venir pour le projet. De nombreuses fois, j’ai omis quelque chose d’essentiel dans un design et ces personnes ont très rapidement posté un commentaire pour m’en informer !
  • Il m’a aidé à construire ma réputation en tant que designer de logiciels libres et open source, ce qui m’a aidé à gagner la confiance des autres envers mes choix de design avec le temps.

Vous bloguez ? Trouvez quels agrégateurs de blogs lisent les membres du projet auquel vous participez et demandez à ce que votre blog y soit ajouté (il y a en général un lien pour cela dans la barre latérale). Par exemple, l’agrégateur de blogs que vous devrez rejoindre pour faire partie de la communauté Fedora se nomme Planet Fedora. Écrivez un premier billet pour vous présenter aux autres et leur faire savoir ce que vous aimez une fois que vous y aurez été ajouté — des informations du genre de celles listées dans la première astuce.

Le projet aura certainement une liste de diffusion ou un forum où les discussions ont lieu. Rejoignez-les et présentez-vous là aussi. Quand vous apportez une contribution au projet — peu importe qu’elle soit petite ou loin d’être aboutie — postez des billets sur ce que vous faites, téléchargez-le vers le wiki du projet, tweetez à ce sujet et envoyez des liens aux membres importants de la communauté via IRC afin d’avoir leur retour.

Rendez votre travail visible et les gens commenceront à vous associer à votre travail et à vous proposer des projets sympas ou d’autres opportunités, simplement grâce à ça. C’est tout ce que j’aurais aimé savoir quand j’ai essayé de m’investir pour la première fois dans le logiciel libre et open source comme designer. Si vous ne deviez retenir qu’un message de tout cela, c’est que vous ne devriez pas être timide — faites-vous entendre haut et fort, faites connaître vos besoins, faites savoir aux autres quels sont vos capacités et ils vous aideront à les utiliser pour que le logiciel libre envoie du lourd.




Cadeau : le geektionnerd à faire soi-même

bannière Gégé

Vous avez peut-être remarqué dans les derniers articles publiés sur le framablog que quelques illustrations à l’humour approximatif étaient signées Gégé, le générateur de Geektionnerd. Ce petit jeu graphique vous est aujourd’hui offert en libre-service par Framasoft.

D’où vient-il ?

C’est une conception des Mozilla Labs dont on peut trouver toute la petite histoire et les caractéristiques techniques sur ce blog de Mozilla hacks. Pour simplifier, Willian Carvalho a voulu réaliser avec Canvas (traitement de l’image en JavaScript) ce qui existait seulement en Flash. C’est une chouette et amusante démonstration de ce qu’on peut faire désormais avec le HTML5, que Mozilla défend et promeut comme le langage du Web, plateforme ouverte de développement…

La version Framalab

C’est Cyrille (avec l’aide de Quentin pour la mise en ligne) qui a réalisé une adaptation francophone, avec la complicité de Simon “Gee” Giraudot qui a fourni les images. Vous pouvez trouver les sources librement disponibles sur le github, n’hésitez pas à le forker, à vous installer votre propre version avec vos images et à fabriquer vous-mêmes des bandes dessinées libres.

Comment ça marche ?

C’est vraiment simple et intuitif. Rendez-vous sur la page du générateur de Geektionnerd, choisissez et déplacez les éléments graphiques, saisissez du texte pour vos “bulles”, redimensionnez les éléments avec les flèches haut/bas du clavier et inversez-les avec les flèches droite/gauche. Vous pouvez enregistrer facilement vos créations ensuite.

…d’ailleurs n’hésitez pas à en faire profiter tout le monde, peut-être publierons-nous vos meilleures réalisations ici, qui sait ?

Et Simon Giraudot, le voilà piraté ? Qu’en dit-il ?

Eh bien nous lui avons posé la question…

Quelle a été ta première réaction quand tu as découvert ce générateur ?

Très bonne ! Lorsque Cyrille a partagé la première version du générateur sur la liste de l’association Framasoft, tout le monde a commencé à jouer avec et à partager ses créations sur la liste. C’est assez marrant de voir mes personnages avec des mots qui ne sont pas les miens dans leur bouche !

D’une certaine façon c’est la continuité logique des créations libres que tu as réalisées avec la série des Geektionnerds ?

À priori c’est pareil. D’ailleurs, les dessins du générateur ne sont pas des dessins « exclusifs », ils sont en fait issus d’articles du blog (donc ils sont déjà sous CC-By-Sa !). Mais oui, c’est l’exacte continuité de ce que je propose dans le Geektionnerd. J’ai placé mes œuvres sous licence libre par conviction, parce que c’est comme ça que je vois « l’art » de manière générale. Le fait que les dessins soient librement modifiables n’est qu’une liberté, mais ça ne veut pas dire que vous allez forcément l’utiliser : grâce à ce générateur, on vous propose d’expérimenter cette liberté et de créer vos propres BD dérivées du Geektionnerd !

Tout le monde peut s’amuser avec ce petit générateur que nous te remercions d’avoir alimenté de tes dessins. Penses-tu que c’est juste un gadget sympathique ou que ça peut déclencher des vocations ?

L’un n’empêche pas l’autre, non ? 😉 Blague à part, c’est surtout un outil de loisir, à mon sens. Ça reste du bidouillage de dessins et de textes, je ne me verrais pas réaliser une histoire complète avec ça, par exemple. Mais après, qui sait ? Avec les licences libres, les possibilités sont infinies : imaginez une personne qui a une idée géniale de scénario pour une BD, mais ne sait absolument pas dessiner. Grâce aux contributions que l’on met dans le pot commun de l’art libre (et je ne parle pas que de moi ici mais de tous les artistes libres), il pourrait tout à fait récupérer une énorme base de données de dessins et les arranger comme il le veut pour correspondre à son scénario. Sympa, non ?

Si l’on va un peu plus loin, ce genre de pratiques implique la fin de l’œuvre unique, puisque chacun peut utiliser, copier, remixer, re-créer et diffuser des comic strips ? l’analogie avec les 4 libertés du logiciel libre est frappante, non ?

Oui, c’est exactement ça. Pour autant, il ne faut pas voir ça comme une trahison de l’œuvre ou un manque de respect de l’auteur (ce genre d’argument revient souvent lorsqu’on parle de modifier les œuvres sans l’autorisation de l’auteur – un des principes d’une licence libre). L’œuvre originale, le Geektionnerd, reste une « œuvre unique », si l’on veut. La différence avec une œuvre sous régime de droit d’auteur classique, ce n’est pas que vous allez vous l’approprier et en faire ce que vous voulez : ça, honnêtement, vous le faites aussi avec des œuvres protégées.

La différence, c’est que là, non seulement personne ne viendra vous demander des comptes et vous traiter de voleur, mais en plus, on vous y encourage ! Tu parles de l’analogie avec les 4 libertés du logiciel libre : je pense aussi, personnellement, aux deux modèles que propose Florent Latrive dans son livre Du bon usage de la piraterie. Il explique que, classiquement, on aimait considérer les artistes comme des  « génies romantiques » qui avaient une inspiration naturelle et quasi-divine. Mais l’artiste est en fait plus proche du « hacker », qui s’approprie toutes les informations qui l’entourent pour créer quelque chose de nouveau. Tous les artistes passent leur temps à reprendre, copier, réutiliser les œuvres du passé. La licence libre ne fait que se mettre en accord avec cette réalité qui est pourtant loin d’être spécifique à l’art libre ! On connait la fameuse citation de Picasso, « Les bons artistes copient, les grands artistes volent ». Aurait-il mis ses œuvres sous licence libre si cela avait existé à son époque ? C’est une autre question 😉