Quand Internet croit faire de la politique

Ted Percival - CC by« 18 juin 1940 – le général de Gaulle envoit un message sur Twitter et crée une cause sur Facebook. 19 juin 1940 – déjà plus de 30 millions d’internautes ont rejoint les rangs des Français Libres sur les réseaux sociaux. Les SMS et mails de soutien affluent. Des milliers de blogs fleurissent… »

Voici un article de Cédric Biagini[1] dont le préambule accroche illico et donne envie d’en savoir plus. Il interroge profondément le sens que nous donnons, ou feignons de donner, à tout ce temps passé à nous connecter et échanger des informations. Et si nous étions en train de nous fourvoyer à croire qu’un autre monde est possible, vissés que nous sommes derrière nos écrans ?

Participer plein d’espoir et d’énergie à notre propre enfermement alors même que nous pensons nous libérer, voilà un scénario que l’Histoire a déjà connu. Internet deviendra-t-il la nouvelle caverne de Platon de notre époque numérique ?

En tant que créateur de Framasoft (qui a donc de bonnes heures de vol net derrière lui), je tenais à vous faire partager ma perplexité existentielle face à ce texte militant qui pose quelques bonnes questions.

On pensera également bien entendu à la forte mobilisation du réseau contre le projet de loi Création et Internet (opération Blackout, pétition, Réseau des Pirates, groupe Facebook, tag Twitter, etc.) dont on peut légitimement se demander si elle ne s’est pas effectivement arrêtée aux frontières du Web. D’autant que lorsque l’on tente d’en sortir (ça, ça et bientôt ça), on franchit difficilement le stade de la confidentialité, quand bien même on passe assurément un bon moment ensemble.

Au final la loi risque bien d’être votée. Et le Net, constitué de gens toujours plus informés, est, dans sa grande majorité, totalement abasourdi devant tant d’incompétences et d’irresponsabilités. Sauf que comme il est dit plus bas, ce n’est pas parce que les gens savent que les choses changent. Le décalage entre le bruit virtuel et le silence du terrain est patent.

Il y a indéniablement une aspiration et de nouvelles possibilités pour faire de la politique autrement. Mais lorsqu’il est question de contester une loi émanant de la majorité, les classiques rapports de force gardent toute leur efficacité. De mémoire de parlementaire, on n’a encore jamais vu un buzz avoir raison d’un gouvernement…

Cet article est issu du dossier « le piège Internet » du numéro d’avril de La Décroissance (2€ chez votre point de vente le plus proche). Ce journal « de combat veut faire progresser une cause encore minoritaire, et fait désormais partie du paysage médiatique national, contribuant, par son indépendance, à la vitalité du débat démocratique sur l’avenir de la planète »[2].

La Toile contre la politique ?

Cédric Biagini – avril 2009 – La Décroissance

18 juin 1940 – le général de Gaulle envoit un message sur Twitter et crée une cause sur Facebook.

19 juin 1940 – déjà plus de 30 millions d’internautes ont rejoint les rangs des “Français Libres” sur les réseaux sociaux. Les SMS et mails de soutien affluent. Des milliers de blogs fleurissent. Sur les forums, Gaullistes, FFI, FTP et Miliciens pétainistes s’écharpent..

18 juin 2009 – In Frankreich wird nur noch Deutsch gesprochen…

Les milieux contestataires ont imposé l’idée que pianoter derrière un écran pour diffuser sur Internet était une pratique subversive. Les mouvements conservateurs tendant à reconquérir ce terrain, il est temps de mettre à bas ce mythe de la communication. Et de savoir construire (aussi) des rapports de force sociaux ou politiques dans le monde réel. Saurons nous encore le faire ?

Cette promesse d’un monde meilleur a été portée par les pionniers d’Internet. L’émergence du mouvement alter mondialiste est concomitante de l’éclosion de ces nouveaux médias, la lutte se mène désormais à l’échelle planétaire et prend le réseau comme modèle.

Mais cette illusion d’avoir dépassé le capitalisme vermoulu, ancré dans le réel, pesant, hiérarchisé, bref, associé à l’ancien monde du XXème siècle, n’a duré que quelques années, le temps que celui-ci se redéploie dans l’univers virtuel et en tire des bénéfices immenses, en terme financiers bien sûr, mais surtout idéologiques. Le basculement numérique lui offre, au contraire un nouveau territoire à conquérir et lui permet de se moderniser en se parant de valeurs issues de la tradition émancipatrice et de mots comme révolution, liberté, gratuité, horizontalité, participation, nomadisme, échange, etc…

Bien que toutes les forces sociales dominantes, de l’État aux multinationales, en passant par les industries culturelles, participent au déferlement technologique et tentent de mettre l’ensemble de l’humanité devant tel ou tel écran, les mouvements contestataires, passé l’euphorie des débuts, sont anesthésiés, incapables de formuler un discours un tant soit peu critique. Seules quelques technologies comme les puces RFID et celles associées aux contrôles policiers éveillent leur méfiance.

Pourtant la question numérique est éminemment politique. Nos rapports au temps, à l’espace, aux autres et à nos environnements s’en trouvent profondément modifiés. L’essence même de la technologie est en train de transformer le monde. Son emprise croissante sur nos vies ne fait que renforcer le libéralisme : marché autorégulé, disparition des intermédiaires, accélération des échanges, déterritorialisation, individualisation, destruction des modes de vie traditionnels, culte de la performance et de la nouveauté. Que les béni-oui-oui du progrès applaudissent à toutes les innovations, persuadés que chaque problème trouvera sa solution technique, paraît logique. Plus étonnante est la permanence du discours sur la neutralité de la technique – tout dépend de ce qu’on fait… – ou sur l’illusion de pouvoir la maîtriser – c’est bien pratique et efficace…

L’obsession de l’information. Peu à peu, une frénésie informationnelle s’est emparée de la société, le monde de la contestation ayant parfaitement intégré que tout n’était qu’information et que si les gens savaient, tout changerait !…. Puisque les grands médias sont responsables de tous les maux, leur critique devient obsessionnelle et rétablir la vérité devient le cœur des nouvelles pratiques militantes. Se multiplient alors forums, listes, sites, blogs, etc…

Le temps n’étant pas extensible, les moments de rencontre se raréfient et plus personne ne devient disponible pour organiser de vraies réunions ou penser des mobilisations ou des alternatives collectives. Cette réduction utilitariste de l’agir politique empêche de questionner le sens de nos pratiques, alors que nous devrions avoir compris, après les multiples échecs des mouvements du XXème siècle, que le chemin importe plus que le but. Faire un journal militant, par exemple, n’a pas uniquement pour objectif de diffuser des idées ; le support en lui-même crée du collectif et amorce une prise sur le réel.

Les militants passent un temps croissant vissés devant leur ordinateur à faire circuler des informations et à s’écharper sur les forums avec une violence que l’absence de liens véritables permet. Une information chasse l’autre dans un ballet sans fin qui donne le tournis… et de nouvelles raisons de s’inquiéter et de s’indigner. Plus le temps de prendre du recul pour mettre en perspective, de conceptualiser ou de débattre. Il faut se connecter aux évènements les plus récents et rester vigilants pour être sûrs de ne rien manquer ! Cette dictature de l’instant empêche de chercher des réponses philosophiques et politiques.

L‘homo communicans. Cette obsession de l’information libératrice postule qu’il suffirait d’être au courant des horreurs du monde pour les combattre. Ce peut être une condition nécessaire mais jamais suffisante, et il n’y a pas de lien direct entre information et action – si l’on entend bien sûr par « action » actes et engagement, et non un simple réflexe émotionnel ou compassionnel.

Le rapport de force politique ne se crée pas devant un écran. Car scoops et révélations n’entraînent pas mobilisations. Car ces informations et cette masse de connaissances accessibles, aussi critiques soient-elles, si elles n’entrent pas dans la « réalité de nos situations », c’est-à-dire dans un ordre constitué de croyances, de valeurs, de repères et de pratiques, ne produisent aucune puissance politique. Or la société communicationnelle nous condamne à n’être que des émetteurs-récepteurs d’informations, perpétuellement plongés dans l’univers des machines, extérieurs au monde.

Bien évidemment, il ne s’agit pas de refuser toute forme de communication, d’échanges d’informations et d’analyses. Mais plutôt, de cesser de nous bercer d’illusions que l’instantanéité et la profusion de données nous permettent de maîtriser le monde.

En évitant d’être happé par ces flux, un double processus peut s’enclencher : prendre le recul nécessaire à la réflexion, à la construction de soi et à la production de sens. Et, en même temps, nous réinscrire dans une histoire, dans un environnement social, dans la nature et dans la durée.

Notes

[1] Cédric Biagini est l’auteur de La Tyrannie technologique : Critique de la société numérique aux éditions L’échapée (dont on peut lire une critique contextuelle sur le site des Écrans).

[2] Crédit photo : Ted Percival (Creative Commons By)




Combien d’écoles Jean-Macé en France ?

Tinou Bao - CC byLe titre de ce billet fait naturellement écho à Combien de lycées Sud Médoc en France ? où nous feignions d’interroger la situation française alors qu’il ne s’agissait que de mettre en valeur une remarquable initiative locale, fort justement relayée par la presse.

Il en va de même ici, non plus dans le secondaire mais dans le primaire, à l’école Jean-Macé d’Hazebrouck[1].

Cette école ne disposait pas de salle informatique. Lacune aujourd’hui comblée avec une quinzaine de postes qui, depuis décembre, tournent sous le système d’exploitation GNU/Linux.

C’est déjà remarquable en soi mais ce qui l’est peut-être tout autant voire plus, c’est d’avoir fait constater par l’autorité de tutelle, à savoir ici l’Inspection académique, que « l’absence Microsoft » ne pénalise nullement les usages pédagogiques et l’obtention du B2i, bien au contraire.

Un événement rapporté comme il se doit par les journaux locaux (voir ci-dessous), et le moins que l’on puisse dire c’est que cela fait plaisir à lire.

Source de l’information sur le site de l’école

Du matériel informatique neuf et innovant à l’école Jean-Macé

Image scannée de l'article de la Voix du Nord6 avril 2009 – La Voix du Nord

Mardi après-midi, deux conseillers en technologies de l’information et de la communication (TICE) sont venus s’enquérir du bon fonctionnement de la salle informatique de l’école Jean-Macé. Un site précurseur en la matière.

La municipalité a décidé de restaurer le parc informatique des écoles de la commune. Première à bénéficier de cette politique, l’école Jean-Macé fait figure de site pilote. En effet, son nouveau matériel, quinze unités centrales, fonctionne avec un système d’exploitation libre.

Des utilisateurs conquis

« L’intérêt de notre visite, c’est de vérifier que tout se déroule correctement et que l’utilisation d’un système d’exploitation libre est pertinente pour la délivrance du B2I, Brevet informatique et Internet, aux enfants de CM 2 », explique Thierry Heuguebart, conseiller en TICE pour le secteur d’Hazebrouck, venu, mardi, accompagné de Luc Simon, son homologue pour l’inspection académique du Nord.

Le moins que l’on puisse dire est que tous les utilisateurs sont conquis. Enseignants et élèves n’ont eu aucun mal à s’adapter au nouveau logiciel qui permet de sortir de la logique Windows.

Le directeur de l’établissement, Stéphane Olivier, ne cache pas lui non plus sa satisfaction devant l’investissement municipal. « Désormais, chaque élève dispose du même équipement. Avant, tout était dépareillé. Nous n’avons plus de bug et, grâce au serveur, nous sommes tous en ligne », s’enthousiasme-t-il.

Les écoliers expérimentent le logiciel libre

Image scannée de l'article de l'Indicateur des FlandresA. R.-M. – 9 avril 2009 – L’Indicateur des Flandres

Avec quinze ordinateurs neufs, élèves et enseignants de l’école Jean-Macé ont de quoi se réjouir. La municipalité d’Hazebrouck a décidé, sous la responsabilité de l’adjoint aux Affaires scolaires, Michel Labitte, de renouveler chaque année le parc informatique d’une école.

Cette politique volontariste en terme d’informatique ne s’arrête pas là puisque depuis le mois de décembre, les écoliers travaillent sous Linux, un système d’exploitation libre et donc gratuit, dans le cadre d’une expérimentation autorisée par l’Éducation nationale. Ce test a des répercussions économiques : la municipalité de devra plus payer le système Microsoft, ni acheter ses logiciels.

Ce qui intéressent davantage élus, enseignants et représentants de l’Inspection académique, qui étaient en visite mardi 31 mars à l’école Jean-Macé, c’est l’aspect d’ouverture d’esprit. Professeurs comme élèves découvrent qu’il existe d’autres systèmes d’exploitation que celui lancé par l’américain Bill Gates, Microsoft, devenu incontournable puisqu’il est vendu avec chaque ordinateur neuf. Cela pourrait bien changer car la commission européenne s’inquiète de ce monopole.

Dans les faits, les enfants ne se rendent pas compte de la différence. Ils viennent dans cette salle informatique pour acquérir des connaissances en français ou encore en mathématiques, avec une certaine autonomie, tout en s’initiant aux nouvelles technologies dans le cadre du B2i. Quant aux professeurs, ils ont tous reçu une formation dispensée par Thierry Heuguebart, conseiller pédagogique TIC (technologies de l’information et de la communication) dans la circonscription d’Hazebrouck.

Le directeur, Stéphane Olivier, confirme : « Le changement de logiciel s’est fait sans problème ». L’expérience semble donc concluante. La municipalité devrait poursuivre dans cette voie, tout comme l’Éducation nationale. Autre avantage non négligeable de l’expérience : le responsable informatique de la mairie, Grégory Houte, n’est plus dérangé fréquemment à cause de problèmes techniques. Quand un ordinateur ne répond plus, le serveur le réinitialise et l’enfant peut reprendre son travail.

Notes

[1] Crédit photo : Tinou Bao (Creative Commons By)




Dans la famille des futurs objets libres je demande la voiture

lammersch - CC by-sa« La route est longue mais la voie est libre » est devenu avec le temps le mantra slogan de Framasoft. Certes, mais encore faudrait-il s’intéresser au futur véhicule qui nous portera loin sur ce chemin !

Né au pays de Rembrandt, le projet « c,mm,n » d’une automobile libre et écologique est sur le papier un possible candidat.

Difficile de dire si cela aboutira et sortira du concept pour se matérialiser et surtout se commercialiser. Mais l’idée est bonne, belle et innovante.

La présentation officielle pourrait se traduire ainsi :

C,mm,n est une initiative de la Société néerlandaise pour la nature et l’environnement, et des universités scientifiques de Delft, Twente et Eindhoven. Ensemble, ils ont créé c,mm,n : un concept d’automobile durable, destiné aux villes de l’Europe occidentale du futur.

C,mm,n est un concept innovant pour la mobilité, une nouvelle façon de développer, de fabriquer et d’utiliser les voitures. En rendant publics les plans de la c,mm,n, sous une licence Open Source, nous pouvons développer une mobilité vraiment durable. Tout comme les logiciels Open Source, c,mm,n fonctionne grâce aux services autour du projet. Vous pouvez utiliser c,mm,n pour proposer du leasing, de la location ou d’autres services de mobilité. Il est aussi possible de vendre c,mm,n, sachant que vous rendez alors disponible publiquement toute œuvre dérivée.

Dis comme cela, on est impatient de la voir rouler[1] cette c,mm,n ! Décidément le Libre n’en finit pas d’explorer de nouvelles contrées…

Pour en savoir plus nous avons également traduit un récent billet blog qui évoque le sujet.

Une voiture écolo Open Source, conçue dans un wiki

Open source eco-car, designed by wiki

Paul Coppes – 14 avril 2009 – Springwise
(Traduction Framalang : Yonnel)

Les partisans des logiciels libres et Open Source connaissent déjà les bénéfices d’une approche collaborative, de partage, dans le design. Et c’est maintenant au monde de l’automobile de goûter à l’Open Source, grâce à un projet venant des Pays-Bas, qui porte le nom de c,mm,n.

lammersch - CC by-saC’est la mobilité durable qui a motivé le projet c,mm,n (apparemment, on prononce « common »), une initiative de Stichting Natuur en Milieu (la Société néerlandaise pour la nature et l’environnement) menée conjointement avec les universités techniques de Delft, Twente et Eindhoven. Avec en point de mire l’objectitf de bâtir un modèle pour les voitures de 2020, le premier prototype de voiture au design collaboratif a été dévoilé récemment, au salon AutoRAI d’Amsterdam.

Se targuant d’un « zéro émission », cette voiture à hydrogène possède une carrosserie thermoplastique légère (qui permet donc des économies d’énergie) et un intérieur comprenant des mousses à mémoire de forme à base de soja, et d’autres matériaux recyclables. Ce que ses développeurs appellent « affichage en rivière » est censé fonctionner comme un iPhone, accédant à de nombreuses informations dont le GPS, le covoiturage et autres systèmes d’optimisation de l’efficacité énergétique.
Ce véhicule est également optimisé pour réduire au maximum la dévalorisation et les réparations. Les matériaux du châssis, par exemple, ne durent que trois ans ; après, la voiture doit repartir à l’usine pour y être reconstruite.

Mais le paradigme le plus révolutionnaire de tous, c’est que les plans de la voiture sont mis à la disposition de tous, sous une licence Open Source, afin que son design puisse être utilisé et modifié par d’autres, tant que toute œuvre dérivée est aussi partagée publiquement. Plus de 800 personnes participent actuellement à c,mm,n à travers le wiki de la « c,mm,nauté » et des développeurs. Une vidéo sur Youtube (texte en néerlandais) propose une simulation informatique de la c,mm,n en action.

Étant donné le penchant de la Génération C(ontenu) pour la contribution à la création de contenu et la participation à tout ce qui est important (ou pas), il n’est pas surprenant que le logiciel Open Source gagne du terrain. Est-ce que le même concept « roulera » dans le monde de l’automobile ? Seul l’avenir nous le dira. D’ici là, en voilà une qu’il faudra surveiller, à moins que vous ne préfériez carrément participer !

Notes

[1] Crédit photos : 1. lammersch (Creative Commons By-Sa) – 2. lammersch (Creative Commons By-Sa)




Combien de lycées Sud Médoc en France ?

Mr. Theklan - CC by-saLe lycée Sud Médoc de Bordeaux propose à ses élèves un atelier Cinéma, un atelier Théâtre et un atelier… « Informatique et Logiciels Libres » !

Il ne s’agit pas d’un atelier informatique où figureraient, entre autres, les logiciels libres, c’est directement dans le titre et révèle l’importance qu’on souhaite leur accorder.

La présentation en est fort intéressante et a valeur d’exemple aussi bien au niveau du contenu que dans la volonté de nouer des partenariats dynamiques et pertinents avec le monde extérieur.

Il s’agit en effet de découvrir et promouvoir les plate-formes d’exploitation et les logciels libres, de s’initier à la programmation sous Linux et à la DAO grâce à des outils comme GIMP, Inkscape et Blender. Parmi les partenaires, on trouve l’ENSEIRB de Talence dont les étudiants viennent le samedi matin pour enseigner aux élèves du club la programmation en C et C++, la Cyber-base de Saint-Médard en Jalles pour la DAO, ainsi que la célèbre association ABUL (les créateurs des RMLL !) et Médias-Cité (les créateurs d’Expo Libre !).

Par ailleurs des événements sont organisés. Les élèves du club s’en vont ainsi dans les classes présenter les logiciels libres auprès de leurs camarades de Seconde. Et, avec l’aimable autorisation de Monsieur le proviseur, des conférences associées à des install-parties sont mises en place.

Enfin voici ce qu’il est explicitement précisé :

Les élèves du club fonctionnent sur le mode du tutorat et selon les principes des logiciels libres : « Si tu ne sais pas demandes, si tu sais tu partages ». La mutualisation des savoirs est à l’origine des logiciels libres et c’est une règle de conduite dans ce club.

Si un élève[1] inscrit à cet atelier passe pas ici, qu’il n’hésite surtout pas à apporter son témoignage !

Tous les acteurs impliqués dans le projet méritent à n’en pas douter d’avoir connu aujourd’hui les honneurs d’un encart dans la Grande Presse, en l’occurrence le journal Sud Ouest, que nous nous sommes permis de reproduire ci-dessous.

On notera que le conférence du jour place les logiciels libres au niveau des enjeux de société. Si ça n’est pas encore une bonne idée ça…

On n’est pas là pour distribuer des bons points mais nous tirons notre chapeau à cette emblématique initiative locale. Bravo, merci, et comme ne dirait pas Chrisitine Albanel, nous vous souhaitons de faire des eMules 😉

Edit : On pourra lire aussi l’article parallèle Combien d’écoles Jean-Macé en France ?

Le lycée Sud-Médoc fait la part belle aux logiciels libres

URL d’origine du document

18 avril 2009 – SudOuest.com

INFORMATIQUE. L’intérêt des élèves pour l’univers de Linux et de la programmation, encouragé par l’établissement, ne se dément pas

Le lycée Sud-Médoc a organisé dernièrement sa demi-journée annuelle sur les logiciels libres. Ces logiciels sont gratuites. L’expression « logiciel libre » fait référence à la liberté pour les utilisateurs d’exécuter, de copier, de distribuer, d’étudier, de modifier et d’améliorer le logiciel.

La manifestation s’organisait autour d’une conférence de Jean Perrochaud, sur le thème : « Les logiciels libres : quels enjeux de société ? », au nom de l’Association bordelaise des utilisateurs de logiciels libres.

Partenariat avec l’Enseirb

En parallèle, des animations étaient organisées : présentation de film d’animation par Joël Houdin de Cyberbase, install-party (installation de systèmes d’exploitation Linux sur les ordinateurs) et lan-party (jeux en réseaux, toujours des jeux libres et gratuits) proposés par les élèves de l’Atelier logiciels libres et programmation du lycée Sud-Médoc et deux « anciens » actuellement dans l’enseignement supérieur.

Médias-cité avait prêté un matériel important. Il y eut un moment fort avec la signature confirmant officiellement le partenariat avec l’Enseirb de Talence par son directeur et par M. Bellicchi, proviseur du lycée Sud-Médoc.

En effet, les étudiants viennent pour la 5e année consécutive le samedi matin au lycée pour un tutorat en programmation au profit de des élèves de l’Atelier. Ces derniers ont toujours été soutenus dans cette activité par le proviseur de l’établissement, qui obtient en retour des résultats très encourageants et une réelle gratitude de la part des élèves.

Notes

[1] Crédit photo : Mr Theklan (Creative Commons By-Sa)




Leçon n°1 : Cliquer sur le gros E bleu permet d’accéder à Internet

Tajai - CC byCe blog n’est pas le dernier à le constater : les enseignants et le logiciel libre, c’est parfois tout un poème…

Enfin surtout aux États-Unis où un enseignant se propose carrément ci-dessous « d’éduquer ses collègues au Libre », et de se demander au passage si la situation ne serait pas meilleure ailleurs.

En Angleterre certainement, mais en France ?

C’est, en l’absence de statistiques fiables, difficile à évaluer[1]. En bas ça fourmille à n’en pas douter d’initiatives pas forcément médiatisées, mais en haut ?

En haut, ça coince toujours pour je ne sais quelles obscures raisons. Où sont les documents d’informations, les plans d’action ou les directives courageuses ? Et confier la chose à Microsoft ou Google n’est certainement pas la solution…

Il faut éduquer les profs au Libre

Teachers Need An Open Source Education

Matt Hartley – 27 janvier 2009 – Datamation
(Traduction Framalang : Daria, Don Rico et Tyah)

Vous rappelez-vous en 2008, quand un professeur nommé « Karen » avait interdit à ses élèves d’utiliser Linux ? Apparemment, dans son raisonnement, des élèves qui utilisaient Linux étaient sans doute impliqués dans des pratiques illégales.

Elle s’est plus tard excusée même si dans les deux camps on a continué à se crêper le chignon. Il me semble que ce ne sont pas seulement les acteurs du logiciel propriétaire qui ne connaissent rien aux logiciels Open Source. Il semblerait qu’à présent le groupe des fanas de la désinformation inclut aussi les professeurs.

C’est la liberté qui compte, pas la gratuité

Malgré la croissance récente dans l’adoption des logiciels Open Source sur les plateformes propriétaires, il reste d’innombrables responsables et décisionnaires qui ignorent tout des logiciels libres/Open Source (Free/Open Source Software : FOSS). Et pour être complètement juste, il n’est pas difficile d’imaginer le trouble d’un professeur bombardé par le discours des présentateurs des grands médias qui passent plus de temps à brandir la menace du « piratage de logiciels » qu’à parler de leurs alternatives libres (FOSS).

Même les « freeware » (gratuiciels) peuvent être échangés illégalement puisqu’ils contiennent souvent un accord de licence stipulant qu’il faut la permission expresse de ses créateurs pour distribuer les travaux créés avec ces gratuiciels. On imagine alors sans mal comment un professeur mal informé peut être enclin à tirer des conclusions hâtives quand un de ses étudiants fait passer un CD contenant un « logiciel inconnu » à ses camarades.

En réalité, ces mêmes étudiants utilisent leur liberté de choix pour sélectionner les alternatives légales aux logiciels propriétaires. Ils évitent ainsi tout recours au piratage de logiciels. Grâce aux nombreuses licences Open Source existantes, les étudiants peuvent échanger ces logiciels sans restriction. Cette liberté n’a aucune conséquence néfaste. Hélas, la plupart des professeurs l’ignorent.

Ce qui n’arrange en rien cette incompréhension entre élèves et enseignants, ce sont les fortes présomptions voulant que les responsables informatique qui travaillent dans les mêmes établissements que ces professeurs mal informés ne sont pas en reste pour encourager ce genre de réactions et faire en sorte qu’elles aillent plus loin encore.

Des professionnels de l’informatique qui ont besoin de « retourner à l’école »

Essayez de suggérer à un utilisateur de Linux qu’il devrait retirer Linux de son PC : il y a de fortes chances qu’il vous rie au nez. Pourtant, il semblerait que ce soit des pratiques courantes dans les établissements.

Le problème, c’est que les utilisateurs de Linux eux-mêmes sont perçus comme des éléments perturbateurs dans un univers régi par des administrateurs certifiés Microsoft. Ces admins, qui étalent souvent leur « grande connaissance de Linux » acquise lors d’une aventure de vingt minutes avec une distribution Linux prise au hasard il y a quelques années, choisissent d’apporter leur pierre à la désinformation. On les accuse parfois de fabriquer des semi-vérités à propos de ceux qui utilisent exclusivement cette plateforme, ou de leur avoir simplement refusé l’accès au réseau. Voilà qui pose problème dès lors que les étudiants concernés viennent d’une famille où l’on n’utilise que Linux, ce qui pourrait les contraindre à devoir apporter au lycée leur propre portable tournant sous Linux.

Est-ce un problème mondial, ou est-un problème propre aux établissements scolaires américains ? Même si j’ai lu dans certains articles que ça se passe un peu partout, le gros des exemples cités semble venir essentiellement des États-Unis.

Les établissements scolaires américains sont-ils seuls à nager dans l’ignorance ?

À l’heure actuelle, les établissements américains sont plus doués pour enseigner la « docilité envers Microsoft » que pour faire en sorte que les élèves sachent lire avant leur entrée au lycée. Remarquez, ce n’est pas grave, ces mêmes élèves ont déjà appris tout seuls à cliquer sur « le gros E bleu » pour se rendre comme des grands sur MySpace et Facebook.

Ajoutez à cela le talent avec lequel ils utilisent la toute dernière suite de sécurité propriétaire pour se prémunir des programmes malveillants qui se baladent sur Internet, et nos élèves américains, en grandissant, deviendront une ressource sur laquelle on pourra compter.

Pendant ce temps, des régions du monde telles que l’Amérique centrale et l’Amérique du Sud connaissent des taux record de migrations vers Linux. Les lycéens de pays bien plus pauvres que le nôtre apprennent à mettre à profit leurs capacité à résoudre les problèmes pour contourner les « anicroches » de leur OS, alors qu’aux États-Unis, les lycéens s’échinent à améliorer leur perso World of Warcraft !

Même au Canada, notre voisin immédiat, des dépêches annoncent chaque mois que des groupements d’établissements passent à des alternatives Open Source, simplement parce qu’ils préfèrent consacrer leur budget éducatif à autre chose qu’à des licences Microsoft.

Arrêtez-moi si je me trompe, mais il y a quelque chose qui cloche, non ? Les enseignants et les administrateurs système serinent aux jeunes élèves portés vers les nouvelles technologies que s’ils veulent être compétitifs sur le marché, ils doivent utiliser Windows. N’oublions pas que nous espérons former ces mêmes élèves à être performants dans un monde ou Linux et Windows sont tous les deux très utilisés.

D’accord, on voit souvent passer des articles qui affirment que l’utilisation de Linux est marginale. Pourtant, quand on demande comment on peut bien s’y prendre pour comptabiliser un système d’exploitation qui ne fournit pas de réel moyen de le comptabiliser, ces mêmes sources médiatiques se referment comme des huîtres. En d’autres termes, nul ne peut fournir un pourcentage tangible, et ceux qui montrent des camemberts représentant les parts de marché en avançant des arguments confus doivent comprendre qu’ils ne racontent pas toute la vérité.

Mais revenons à nos moutons. Avec le budget éducatif dont disposent actuellement les établissements scolaires américains, il semblerait qu’il y ait un paquet d’argent à dépenser en logiciels et en renouvellement de matériel ! Les économies réalisées par les établissements américains qui utilisent toujours Windows 98 et 2000 Pro, voilà qui à l’évidence est plus rentable qu’embaucher des administrateurs formés à plusieurs systèmes d’exploitation et capables de travailler sur autre chose que Windows, non ?

Ces administrateurs ne passent quand même pas plus de temps à lutter contre les logiciels malveillants qu’à améliorer l’environnement informatique pour les élèves, non ? Ah si, au temps pour moi.

Une proposition modeste

Je vais faire une proposition. Et si on permettait aux élèves qui le souhaitent d’apprendre à se servir de Linux, et ce sur leur temps libre ? Peut-être pourrait-on même en faire une option qui leur vaudrait des points supplémentaires, ce qui serait forcément mieux que de les assommer d’ennui avec des matières en option dont ils se fichent comme d’une guigne.

Cela ne coûterait rien aux établissements, et pour couronner le tout, contribuerait à parfaire les capacités de résolution de problème des élèves.

En outre, je suggère que les enseignants et les techniciens informatique formés par Microsoft se documentent davantage sur Linux avant de porter dessus des jugements hâtifs.

Bien que je reconnaisse volontiers que Linux n’est pas une plateforme accessible à tout le monde, elle est de plus en plus utilisée dans le monde entier, et ceux qui la maîtriseront en plus des systèmes d’exploitation propriétaires seront en bien meilleure position pour réussir sur le marché du travail.

Qui plus est, n’importe quel utilisateur de Linux peut se coller devant une machine tournant sous Windows et réussir à s’en servir en quelques minutes. Pouvons-nous en dire autant de l’utilisateur de Windows de base qui tenterait la même expérience avec Linux ? Sans « le gros E bleu » sur le bureau, c’est peu probable.

Notes

[1] Crédit photo : Tajai (Creative Commons By)




Numérique, droit d’auteur et pédagogie

Mr. Theklan - CC by-saPour ceux qui arrivent encore à résister aux sollicitations permanentes d’Internet pour réussir l’exploit de parcourir jusqu’au bout de longs documents, nous vous proposons aujourd’hui la lecture d’un article de Jean-Pierre Archambault, paru initialement dans la revue Terminal, qui interroge le présent mais surtout l’avenir des ressources pédagogiques à l’ère du numérique.

Parce que si l’on n’y prend pas garde, on pourrait bien vite se retrouver peu ou prou en face des mêmes tensions que celles qui ont été mises à jour lors de l’examen du projet de loi Création et Internet. Quid en effet d’un monde[1] où la propriété finirait par contraindre de trop l’accès et le partage, a fortiori à l’école ?

Numérique, droit d’auteur et pédagogie

Jean-Pierre Archambault
Terminal n° 102, Automne-Hiver 2008-2009, édition l’Harmattan, p. 143-155.

Les ressources pédagogiques utilisées dans les cours sont l’un des cœurs de l’enseignement, correspondant à des démarches et des conceptions d’apprentissage. Il y a les ressources que se procurent les enseignants. Éditées à des fins explicitement pédagogiques ou matériaux bruts non conçus initialement pour des usages scolaires, mais y trouvant naturellement leur place, comme une œuvre musicale ou une reproduction de tableau. Leurs modèles économiques et leurs modalités de propriété intellectuelle, vis-à-vis de l’institution éducative sont nécessairement distincts.

Il y a aussi les ressources produites par les enseignants eux-mêmes, aujourd’hui dans le contexte radicalement nouveau issu de l’omniprésence de l’ordinateur et d’Internet, à des échelles dont les ordres de grandeur sont sensiblement différents de ceux de l’ère du pré-numérique. Elles sont élaborées dans des processus collaboratifs qui appellent nécessairement des réponses en termes de droits d’auteur de nature à permettre et favoriser l’échange par une circulation fluide des documents.

La problématique juridique est vaste. Nous examinerons les licences de logiciels et de ressources libres – certains points qui font débat comme la sécurité juridique, considération importante pour les établissements scolaires. En effet, elles éclairent et illustrent la situation nouvelle et irréversible créée par l’irruption du numérique dans les processus de création de biens informationnels et la place de ceux-ci, sans cesse croissante, relativement et en valeur absolue. Nous poserons la question de l’exception pédagogique, en relation avec les missions de l’École et l’exercice concret du métier d’enseignant, au temps nouveau du numérique.

Un modèle français

Les ressources pédagogiques, au premier rang desquelles les manuels scolaires, mais aussi la banale préparation de cours, l’article ou la photographie « sur laquelle on est tombé »… ont toujours joué un rôle important dans l’exercice du métier d’enseignant, variable selon les disciplines. Comme support de cours bien sûr, mais aussi comme vecteur de mise en oeuvre de nouveaux programmes ou support de formation (derrière un scénario pédagogique, il y a toujours une pratique professionnelle). Il existe un modèle français de l’édition scolaire dont la figure centrale, le manuel des élèves, relève pour l’essentiel du secteur privé. Ce modèle a acquis ses lettres de noblesse et fait ses preuves depuis deux siècles. L’histoire de l’édition scolaire en France est l’histoire des relations entre trois acteurs majeurs, l’État, les éditeurs et les auteurs – des enseignants et des inspecteurs – et de leurs rapports de force mouvants, dans lesquels il arrive que la technique intervienne. Ainsi, à partir de 1811, un auteur ne peut plus soumettre directement à l’État un manuscrit sous prétexte, parmi d’autres raisons, que son examen est long et difficile. Une proposition de manuel doit être obligatoirement communiquée sous forme d’imprimé. L’éditeur devient, de fait, incontournable.

Depuis une quarantaine d’années, les manuels scolaires se sont profondément transformés. L’iconographie occupe jusqu’à 50 % de la surface. L’ouvrage permet des lectures plurielles et des usages multiples, qui préfigurent ceux de l’hypermédia. Il n’y a plus de cours en tant que tel… Le résultat combiné de cette complexité croissante des manuels, de la concurrence des méthodes actives et de la souplesse de la photocopie est sans appel : on constate depuis les années quatre-vingt une tendance à la perte de vitesse de l’utilisation du manuel traditionnel, même si l’attachement symbolique demeure[2][3]. L’enfant chéri de l’édition scolaire connaît une forme de crise…

Une rupture

…et le numérique arrive dans ce contexte. Rude concurrent ! En effet, le manuel scolaire, ce livre d’une centaine de pages, qu’on ne lit plus d’une façon linéaire mais dans lequel on navigue avec des index et des renvois, ce livre ne saurait rivaliser avec Internet et le multimédia, leurs hyperliens, leurs millions de pages et leurs outils de recherche automatisée. Le livre n’est désormais plus « l’enfant unique ».

Plus généralement, le numérique transforme radicalement le paysage éditorial installé. Certes, les enseignants ont toujours réalisé des documents à l’intention de leurs élèves, en préparant leurs cours. Jusqu’à l’arrivée de l’ordinateur et d’Internet, une élaboration collaborative avec des collègues et la visibilité des ressources produites ne pouvaient aller au-delà d’un cercle restreint et rapproché. Modifier un document écrit à la main était et demeure une opération lourde, qui plus est quand il circule et que chacun y met sa griffe. Dans les années 70 encore, les photocopieuses étaient rarissimes, les machines à alcool fastidieuses à utiliser.

Des échanges sur une plus grande échelle supposaient de mettre en forme des notes manuscrites, et la machine à écrire manquait de souplesse, ne tolérant pas vraiment les fautes de frappe. Le manuel scolaire était alors la seule perspective pour une diffusion élargie, l’éditeur le passage obligé, et on lui accordait d’autant plus facilement des droits sur la fabrication des ouvrages que l’on ne pouvait pas le faire soi-même ! Mais, aujourd’hui, les conditions de la production des ressources pédagogiques, numériques pour une part en augmentation régulière, ont donc radicalement changé, du fait de la banalisation des outils informatiques de réalisation des contenus (du traitement de texte aux logiciels de publication) et d’Internet qui favorise à la fois les productions individuelles et le développement du travail collectif des enseignants, dans leur établissement, ou disséminés sur un vaste territoire, à la manière des programmeurs qui écrivent des logiciels libres.

Il y a une transférabilité de l’approche du libre, des logiciels à la réalisation des autres biens immatériels. Internet permet aux auteurs de toucher un vaste public potentiel qui peut aisément reproduire leurs documents, les utiliser, les modifier… La profusion des ressources éducatives que l’on peut consulter sur Internet est là pour en témoigner. En nombre, les enseignants auteurs-utilisateurs sont devenus un acteur autonome à part entière de l’édition scolaire. On peut, pour le moins, parler de turbulences dans le secteur[4][5].

Sésamath

Cette association est synonyme d’excellence en matière de production pédagogique et de communauté d’enseignants-auteurs-utilisateurs. En effet, Sésamath a reçu une mention d’honneur pour le prix 2007 Unesco-Roi Hamad Bin Isa Al-Khalifa sur l’utilisation des technologies de l’information et de la communication dans l’éducation. L’Unesco a décidé d’attribuer une mention spéciale au projet de manuel libre « pour la qualité de ses supports pédagogiques et pour sa capacité démontrée à toucher un large public d’apprenants et d’enseignants ». L’association a également été récompensée aux Lutèce d’Or (Paris, capitale du libre). Elle regroupe une soixantaine de professeurs de mathématiques de collèges. De l’ordre de 400 contributeurs-auteurs utilisent régulièrement les outils de travail coopératif qu’elle a mis en place (Wiki, Spip, forums, listes de diffusion…). Animée d’une volonté forte de production de ressources sous licence libre, et si possible formats ouverts, Sésamath ne soutient que des projets collaboratifs dont elle favorise et encourage les synergies. L’association donne les résultats : environ un million de visiteurs sont comptabilisés chaque mois sur l’ensemble de ses sites. Parmi les projets soutenus par l’association figure Mathenpoche. Dix académies hébergent le logiciel sur un serveur local, en plus du serveur mis à disposition par Sésamath pour les professeurs des autres académies, en partenariat avec le Centre de ressources informatiques de Haute-Savoie (Citic74).

Ce sont ainsi 5 000 professeurs qui utilisent la version réseau de Mathenpoche à laquelle sont inscrits 260 000 élèves. Plus de 160 000 connexions élèves sont enregistrées sur les serveurs chaque mois, auxquelles il faut ajouter 236 000 connexions en accès libre sur le site public de Mathenpoche. MathémaTICE est une revue en ligne sur l’intégration des TICE dans l’enseignement des mathématiques, née en septembre 2006. Enfin, Le Manuel Sésamath pour la classe de cinquième, premier manuel scolaire libre, fruit du travail collaboratif d’une cinquantaine de collègues, s’est vendu à 72 000 exemplaires à la rentrée 2006. Le Manuel Sésamath pour la quatrième s’est vendu, lui, à plus de 90 000 exemplaires en septembre 2006. à n’en point douter, en cette rentrée 2008, le Manuel de troisième connaîtra le succès, comme ses prédécesseurs.

Les communautés d’enseignants auteurs-utilisateurs se multiplient[6][7][8]. Utilisant à plein les potentialités d’interaction du Web, elles fonctionnent comme les communautés de développeurs de logiciels libres. Leurs membres ont une vision et une identité communes. Organisées pour fédérer les contributions volontaires, dans une espèce de synthèse de « la cathédrale et du bazar », ces communautés répondent à des besoins non ou mal couverts et doivent compter en leur sein suffisamment de professionnels ayant des compétences en informatique. Les maîtres mots de la division du travail y sont « déléguez » et « distribuez ».

Les licences de logiciels libres

Les logiciels libres sont désormais une composante à part entière de l’informatique[9]. Parmi les raisons qui expliquent cette rapide évolution, le fait que l’approche du libre, qui relève du paradigme de la recherche scientifique, est en phase avec la nature profonde de l’activité d’écriture de logiciels (difficile par exemple de mener des projets combinant des millions et des millions de lignes de programme quand on n’a pas accès au code source) et qu’elle est ainsi gage d’efficacité et de qualité. Les enseignants utilisent des logiciels libres et certains en produisent. Pour autant, le long fleuve du libre, en général et dans l’éducation en particulier, n’est pas toujours tranquille. Intimement liées au modèle économique, il y a les réponses en termes de droit d’auteur. Et il arrive que des questions juridiques soient mises en avant, notamment celles ayant trait à la compatibilité des licences libres avec le droit français, à une certaine insécurité juridique. Qu’en est-il exactement ?[10].

La typologie classique des licences Logiciel libre comprend deux ensembles principaux, licences avec ou sans copyleft, et un cas spécial : le domaine public. La caractéristique des licences sans copyleft, dites type BSD est de ne pas obliger à conserver la même licence pour une oeuvre dérivée. Le code des logiciels utilisant ces licences peut donc être intégré dans du logiciel propriétaire ou du logiciel libre avec copyleft.

Les licences avec copyleft exigent qu’un logiciel dérivé conserve son statut de logiciel libre, notamment par la fourniture du code source de la version modifiée. En pratique, cela signifie qu’il n’est pas possible de diffuser un logiciel propriétaire incorporant du code utilisant une telle licence. La principale licence de ce type est la GNU General Public licence (GNU GPL) de la FSF (Free Software Fondation). D’autres licences de ce type sont la Lesser General Public License (LGPL) de la FSF, qui offre la possibilité de lier dynamiquement le programme à une application propriétaire. La LGPL est notamment utilisée par le projet OpenOffice.org. La licence CeCILL est une licence francophone proposée par le CEA, le CNRS et l’Inria pour les mondes de la recherche, de l’entreprise et des administrations, et plus généralement pour toute entité ou individu désirant diffuser ses résultats sous licence de logiciel libre, en toute sécurité juridique. Les auteurs de CeCILL l’ont déclarée compatible avec la GNU GPL. Et la FSF a indiqué que CeCILL faisait partie des licences compatibles avec la GNU GPL. Chaque licence doit préciser les licences qui lui sont compatibles.

« Une complexité conceptuelle de la licence GPL est qu’elle prétend ne pas être un contrat, ce qui peut poser des difficultés de compréhension en Europe ». Si, aux États-Unis, la GPL s’appuie essentiellement sur le copyright, en France et dans de nombreux pays d’Europe, l’habitude est de licencier les logiciels par des contrats, acceptés par les deux parties avec les clauses de responsabilité inhérentes aux contrats logiciels. « L’utilisation licite d’un programme sous GNU GPL n’impose pas une relation contractuelle entre l’utilisateur et le titulaire des droits d’auteur »[11]. Cette différence d’appréciation et la volonté d’avoir une licence d’origine française ou européenne basée sur une mécanique contractuelle sont à l’origine de la rédaction des licences CeCILL et EUPL. « Néanmoins, la validité de la licence GPL a été confirmée à plusieurs reprises par des tribunaux européens ». La diffusion sous des licences d’origine américaine comme la GNU GPL pouvant poser certaines questions de droit, engendrant des incertitudes qui peuvent dissuader des entreprises ou des organisations d’utiliser ou d’apporter leurs contributions aux logiciels libres. Dans ce contexte, le Cea, le Cnrs et l’Inria ont donc entrepris la rédaction de contrats de licences de logiciels libres visant à accroître la sécurité juridique « en désignant un droit applicable (et les tribunaux compétents pour juger d’éventuels litiges), en l’occurrence le droit français, conforme au droit européen et qui a vocation à concerner 27 pays », à préciser exactement l’étendue des droits cédés et à encadrer « la responsabilité et les garanties accordées par les concédants dans les limites permises par le droit français et européen ». Il y a une version française qui, avec la version anglaise fait également foi. Elle s’impose, de par la loi, aux organismes de recherche et établissements publics français.

L’utilisateur secondaire, c’est-à-dire la personne admise à utiliser un logiciel libre (vous et moi) à l’exclusion de tout acte de copie, de modification, d’adaptation et de distribution, est dans une situation juridique spéciale. Il n’a pas de relation contractuelle avec le concédant de la licence dans la mesure où il n’a pas consenti à la licence et ne connaît pas le plus souvent le concédant, auteur du logiciel libre qu’il utilise. « Il ne paraît pas possible de faire valoir un éventuel consentement implicite à la conclusion d’une licence et ce d’autant plus que le droit français ne permet pas en cette matière les accords tacites ».

Ces difficultés tiennent pour une part au droit, français notamment, qui, s’il accorde aux auteurs un droit exclusif sur leurs créations, ne dit rien d’explicite quant à des modalités leur permettant de faire connaître leurs volontés concernant les usages de leurs œuvres. Il y a là un vide juridique, sinon une forme d’incohérence. Cela étant, les licences de type GPL sont particulièrement protectrices des droits des utilisateurs dans la mesure où les contributeurs successifs s’obligent les uns les autres à respecter les dits droits, en s’appuyant sur les traités internationaux en matière de droit d’auteur. De plus, la publication et l’utilisation par les administrations françaises et européennes de licences libres (comme CeCILL et EUPL) traduisent la maturation juridique de la diffusion du libre, contribuant ainsi de fait, plus que fortement, à créer un environnement « sécurisé » pour les utilisateurs. Et puis, il y a des millions et des millions d’utilisateurs de logiciels libres en France et dans le monde. Une des vertus du droit étant de s’adapter aux évolutions, technologiques en particulier… l’insécurité, très relative, ne manquera pas de n’avoir été que momentanée.

Les licences de ressources libres

Les enseignants et les institutions éducatives ont encore tendance à mettre en ligne des ressources pédagogiques sans se poser explicitement la question de leurs licences. D’où un certain flou. Mais les licences de ressources libres ont commencé à faire leur chemin dans les problématiques éditoriales. Leur objectif est de favoriser le partage, la diffusion et l’accès pour tous sur Internet des œuvres de l’esprit, en conciliant les droits légitimes des auteurs et des usagers. Cela passe par des modalités juridiques correspondant aux potentialités de la Toile, notamment à cette possibilité de diffusion quasi instantanée d’une ressource immatérielle à des milliers et des millions de personnes. Le projet Creative Commons s’y emploie[12]. Il a vu le jour à l’université de Standford, au sein du Standford Law School Center for Internet et Society, Lawrence Lessig en étant l’un des initiateurs. Il s’agit donc d’adapter le droit des auteurs à Internet.

Creative Commons renverse le principe de l’autorisation obligatoire. Il permet à l’auteur d’autoriser par avance, et non au coup par coup, certains usages et d’en informer le public. Il est autorisé d’autoriser. Métalicence, Creative Commons permet aux auteurs de se fabriquer des licences, dans une espèce de jeu de Lego simple, constitué de seulement quatre briques. Première brique : attribution. L’utilisateur, qui souhaite diffuser une œuvre, doit mentionner l’auteur. Deuxième brique : commercialisation. L’auteur indique si son travail peut faire l’objet ou pas d’une utilisation commerciale. Troisième brique : non-dérivation. Un travail, s’il est diffusé, ne doit pas être modifié. Quatrième brique : partage à l’identique. Si l’auteur accepte que des modifications soient apportées à son travail, il impose que leur diffusion se fasse dans les mêmes termes que l’original, c’est-à-dire sous la même licence. La possibilité donnée à l’auteur de choisir parmi ces quatre composantes donne lieu à onze combinaisons de licences. Grâce à un moteur de licence proposé par le site de Creative Commons, l’auteur obtient automatiquement un code HTML à insérer sur son site qui renvoie directement vers le contrat adapté à ses désirs.

L’exception pédagogique

Les enseignants utilisent des documents qu’ils n’ont pas produits eux-mêmes, dans toutes les disciplines, mais particulièrement dans certaines d’entre d’elles comme l’histoire-géographie, les sciences économiques et sociales ou la musique : récitation d’un poème, lecture à haute voix d’un ouvrage, consultation d’un site Web… Ces utilisations en classe ne sont pas assimilables à l’usage privé. Elles sont soumises au monopole de l’auteur dans le cadre du principe de respect absolu de la propriété intellectuelle. Cela peut devenir mission impossible, tellement la contrainte et la complexité des droits se font fortes. Ainsi pour les photographies : droits du photographe, de l’agence, droit à l’image des personnes qui apparaissent sur la photo ou droit des propriétaires dont on aperçoit les bâtiments… Difficile d’imaginer les enseignants n’exerçant leur métier qu’avec le concours de leur avocat ! Mais nous avons vu les licences Creative Commons qui contribuent, en tout cas sont un puissant levier, à développer un domaine public élargi de la connaissance. Et la GNU GPL et le CeCILL qui permettent aux élèves et aux enseignants de retrouver, dans la légalité, leurs environnements de travail sans frais supplémentaires, ce qui est un facteur d’égalité et de démocratisation. Mais la question de l’exception pédagogique dans sa globalité, une vraie question, reste posée avec une acuité accrue de par le numérique : quelque part, le copyright est antinomique avec la logique et la puissance d’Internet.

L’exception pédagogique, c’est-à-dire l’exonération des droits d’auteurs sur les oeuvres utilisées dans le cadre des activités d’enseignement et de recherche, et des bibliothèques, concerne potentiellement des productions qui n’ont pas été réalisées à des fins éducatives. Par exemple, le Victoria and Albert Museum de Londres, à l’instar du Metropolitan Museum of art de New York, a décidé de ne plus facturer le droit de reproduction des œuvres de sa collection lorsqu’elles sont publiées à des fins d’enseignement, leur mise en ligne restant cependant soumise à conditions 13.

La société Autodesk a ouvert un portail étudiant de l’ingénierie et de la conception numérique depuis lequel les élèves, étudiants et enseignants de toutes les disciplines peuvent notamment télécharger gratuitement des versions pour étudiants de ses logiciels, toutes ses ressources concernant la conception architecturale, la conception graphique, le génie civil et la conception mécanique et électrique.

L’activité d’enseignement est désintéressée et toute la société en bénéficie. L’éducation n’est pas un coût mais le plus nécessaire (et le plus noble) des investissements. L’exception pédagogique a donc une forte légitimité sociétale. De plus, entrés dans la vie active, les élèves auront naturellement tendance à, par exemple, préconiser les logiciels qu’ils auront utilisés lors de leur scolarité. En la circonstance le système éducatif promeut des produits qu’il a pendant longtemps payé cher (avant que le libre contribue à une baisse sensible des prix pratiqués). D’un strict point de vue économique, il ne serait nullement aberrant que ce soit au contraire les éditeurs qui payent pour que les élèves utilisent leurs produits ! On n’en est pas encore là. Sans nier certains excès auxquels la photocopie non maîtrisée peut donner lieu, il ne faut pas oublier que les établissements d’enseignement contribuent déjà à la défense du droit d’auteur en versant des sommes importantes (près de trois millions d’euros de la part des universités) pour la photocopie d’œuvres protégées, au nom de la fameuse lutte contre le « photocopillage ». Les bibliothèques, quant à elles, doivent déjà faire face au paiement de droits de prêt diminuant fortement leur pouvoir d’achat.

On distingue le cas de l’édition scolaire dont la raison d’être est de réaliser des ressources pour l’éducation, et qui bien évidemment doit en vivre. L’édition scolaire traverse une période de turbulences de par le numérique. Les questions posées sont notamment celles de son positionnement par rapport aux productions enseignantes, du caractère raisonnable ou non des prix pratiqués, de l’existence d’un marché captif, d’un nouveau modèle économique combinant licences libres et rémunération sur les produits dérivés… mais pas celle du bien-fondé d’une légitime rémunération d’un travail fait, dans le contexte d’une école républicaine gratuite et laïque. Deux types de solutions existent pour assurer l’exception pédagogique : la voie contractuelle et la voie législative.

La voie contractuelle

En mars 2006, le ministère de l’Éducation nationale a signé des accords avec les syndicats d’éditeurs. Ils concernent les œuvres des arts visuels ; les enregistrements sonores d’oeuvres musicales, la vidéo-musique et les interprétations vivantes des œuvres musicales ; les œuvres cinématographiques et audiovisuelles ; les livres et les musiques imprimées ; les publications périodiques imprimées. Ils autorisent et limitent certains usages d’œuvres protégées par les enseignants, à des fins d’illustration des activités d’enseignement et de recherche. Ils couvrent une période allant de janvier 2007 à 2009, date à laquelle une exception sera inscrite dans le Code de la Propriété intellectuelle (CPI).

Les publics visés sont notamment la classe et la formation initiale. Les cas autorisés sont la diffusion ou projection en classe d’œuvres protégées de tout enregistrement audio (même intégral), de toute image, texte ou de partition, de toute œuvre audiovisuelle obtenue par un canal hertzien gratuit, de toute représentation (interprétation en particulier) en classe d’une œuvre ; la reproduction papier d’œuvres protégées pour les élèves de la classe (10 % maximum d’un livre ou d’une partition, 30 % d’un périodique) avec selon les types d’établissements un quota de copies par élève et par an ; la reproduction numérique d’images protégées donnée à titre temporaire pour toute œuvre diffusée en classe, avec un maximum de 20 images incorporées dans chaque travail pédagogique ou de recherche mis en ligne sur Intranet et des limitations (400 × 400 pixels, 72 dpi, pas de recadrage, pas d’accès direct aux œuvres, pas d’indexation, déclaration des œuvres par formulaire à l’AVA) ; la diffusion audio et audiovisuelle lors de concours ou colloques (extraits audio d’une œuvre limités à 30 secondes dans la limite de 10 % de la durée totale chacun, représentants, additionnés, moins de 15 % du total).

Les accords ne concernent notamment pas l’analyse d’une œuvre pour elle-même, la formation continue, l’utilisation en classe de DVD ou de VHS du commerce (les droits de diffusions ou de prêt doivent être alors acquittés par les centres de documentation des établissements), la création de bases d’œuvres protégées numérisées consultables en Intranet (sous forme de fichiers image, son ou vidéo en particulier), la distribution de fichiers numériques d’œuvres protégées aux élèves, la possibilité de faire des liens profonds sur des sites pour disposer, par exemple, d’extraits audio organisés de manière thématique.

Pour les livres et les musiques imprimées, les accords prévoient des vérifications (Article 10) : « Les représentants des ayants droit pourront procéder ou faire procéder à des vérifications portant sur la conformité des utilisations d’œuvres visées par l’accord au regard des clauses de l’accord. Les agents assermentés de chaque représentant des ayants droit auront la faculté d’accéder aux réseaux informatiques des établissements afin de procéder à toutes vérifications nécessaires. Ils pourront contrôler notamment l’exactitude des déclarations d’usage et la conformité de l’utilisation des œuvres visées par l’accord avec chaque stipulation de l’accord. En cas de manquement à ces obligations contractuelles, les représentants des ayants droit pourront requérir du chef d’établissement ou du responsable du réseau le retrait des œuvres ou extraits d’œuvres visées par l’accord utilisé illicitement. En cas de contestation sur l’application de l’accord, le comité de suivi se réunit pour constater l’absence de respect d’une clause de l’accord et proposer une solution aux parties. » Cette possibilité d’intrusion sur les réseaux des établissements scolaires a été diversement appréciée.

Des entraves à l’activité pédagogique

Les limitations prévues dans les accords (nombre de pixels, durée des extraits…) ne sont pas sans poser de réels problèmes pédagogiques. Yves Hulot, professeur d’éducation musicale à l’IUFM de Versailles (Cergy-Pontoise), en pointent quelques-uns. La combinaison d’une résolution limitée à 400 × 400 pixels et d’une définition de 72 dpi de la représentation numérique d’une œuvre avec une utilisation portant sur l’œuvre intégrale empêche le recours à des photos de détails des oeuvres.

Par exemple : « Le tableau Les noces de Cana de Véronèse comporte une intéressante viola da braccio au premier plan. Avec une telle limite de résolution sur cet immense tableau, il est impossible de projeter et de zoomer convenablement sur ce détail. Qui peut croire justifier de telles limitations ? » La durée des extraits d’une oeuvre musicale crée également des obstacles de nature pédagogique. « Si je travaille en classe de troisième sur la compagnie des Ballets russes, il me semble évident que pour apprécier l’importance de la révolution qu’elle apporta, une analyse d’au moins deux ballets s’impose, en l’occurrence L’après-midi d’un faune et Le sacre du Printemps, ce qui permet d’aborder deux musiciens capitaux, Debussy et Stravinsky. Le premier dure environ dix minutes, le second environ trente. Habitués que sont nos élèves à côtoyer majoritairement le genre chanson, il me semble utile de les confronter à d’autres durées et d’autres langages musicaux ou chorégraphiques. Mais je crains qu’à trop limiter l’activité pédagogique des enseignants on finisse par empêcher ceux qu’ils éduquent de réellement avoir les clés d’accès à la culture ! »

La voie législative

Les contenus numériques en ligne sont quasiment absents des accords précités. Est-ce un hasard ? L’affrontement fondamental est-il prudemment différé ? C’est principalement l’écrit numérique qui est envisagé, l’audio et l’audiovisuel en étant exclus. La mise en ligne d’images protégées suppose qu’elles soient incorporées à un travail pédagogique ou de recherche, et qu’elles soient limitées en qualité et en quantité. Ces accords couvrent essentiellement des activités de diffusion en classe, les seuls cas de reproduction à des fins de distribution concernent la photocopie. Les possibilités d’échange de fichiers numériques avec les élèves et les étudiants sont donc limitées, tout comme les échanges entre collègues lors de travaux interdisciplinaires.

Ils favorisent une offre éditoriale qui est de type catalogue et non sur-mesure ou granulaire malgré les développements récents de l’offre numérique. « En dehors du cadre et des limites prévus par les accords, l’obtention dans l’enseignement des droits d’exploitation d’œuvres protégées, représente une double difficulté : savoir à quels ayants droit demander les autorisations et avoir le budget éventuellement nécessaire pour s’en acquitter. D’où la nécessité de proposer un dispositif permettant aux enseignants d’être à la fois clairs du point de vue juridique et d’obtenir facilement les droits pour ce qu’ils se proposent de faire pour leurs élèves ou leurs étudiants. »[13]

Les enjeux de l’exception pédagogique demeurent

À l’occasion de la transposition par le Parlement, en 2006, de la directive européenne sur les Droits d’auteurs et les droits voisins dans la société de l’information (Dadvsi), qui prévoit la possibilité d’une exception pédagogique, la CPU (Conférence des présidents d’université) et l’ADBU (Association des directeurs de bibliothèque universitaire), constatant que la France était est l’un des rares pays européens à ne pas l’avoir retenue dans son projet de loi, redoutaient que cette législation n’aboutisse à une domination accrue de la littérature de langue anglaise déjà majoritaire parmi les ressources d’information disponibles en ligne, notre seule référence devenant Google et nos seules sources étant les données anglo-saxonnes.

Un amendement adopté lors du débat de 2006, applicable en 2009 (CPI L122-5 3-e), définit l’exception pédagogique comme : « La représentation ou la reproduction de courtes œuvres ou d’extraits d’œuvres, autres que des œuvres elles-mêmes conçues à des fins pédagogiques, à des fins exclusives d’illustration ou d’analyse dans le cadre de l’enseignement et de la recherche, à l’exclusion de toute activité ludique ou récréative, et sous réserve que le public auquel elles sont destinées soit strictement circonscrit au cercle des élèves, étudiants, enseignants et chercheurs directement concernés, que leur utilisation ne donne lieu à aucune exploitation commerciale, et qu’elle soit compensée par une rémunération négociée sur une base forfaitaire nonobstant la cession du droit de reproduction par reprographie mentionnée à l’article L. 122-10 ». Il comporte des aspects restrictifs. Le rendez-vous de 2009 est important.

Un usage loyal

Pierre-Yves Gosset, délégué de Framasoft, se prononce pour un système de fair use à l’américaine. Aux États-Unis, le fair use, (usage loyal, ou usage raisonnable, ou usage acceptable) est un ensemble de règles de droit, d’origine législative et jurisprudentielle, qui apportent des limitations et des exceptions aux droits exclusifs de l’auteur sur son œuvre (copyright). Il essaie de prendre en compte à la fois les intérêts des bénéficiaires des copy – rights et l’intérêt public, pour la distribution de travaux créatifs, en autorisant certains usages qui seraient, autrement, considérés comme illégaux. Des dispositions similaires existent également dans beaucoup d’autres pays.

Les critères actuels du fair use aux États-Unis sont énoncés au titre 17 du code des États-Unis, section 107 (limitations des droits exclusifs : usage loyal (fair use) : « Nonobstant les dispositions des sections 106 et 106A, l’usage loyal d’une oeuvre protégée, y compris des usages tels la reproduction par copie, l’enregistrement audiovisuel ou quelque autre moyen prévu par cette section, à des fins telles que la critique, le commentaire, l’information journalistique, l’enseignement (y compris des copies multiples à destination d’une classe), les études universitaires et la recherche, ne constitue pas une violation des droits d’auteur. Pour déterminer si l’usage particulier qui serait fait d’une œuvre constitue un usage loyal, les éléments à considérer comprendront : l’objectif et la nature de l’usage, notamment s’il est de nature commerciale ou éducative et sans but lucratif ; la nature de l’œuvre protégée ; la quantité et l’importance de la partie utilisée en rapport à l’ensemble de l’œuvre protégée ; les conséquences de cet usage sur le marché potentiel ou sur la valeur de l’œuvre protégée. Le fait qu’une œuvre ne soit pas publiée ne constitue pas en soi un obstacle à ce que son usage soit loyal s’il apparaît tel au vu de l’ensemble des critères précédents ». « L’originalité du fair use par rapport aux doctrines comparables est l’absence de limites précises aux droits ouverts : alors que les autres pays définissent assez précisément ce qui est autorisé, le droit des États-Unis donne seulement des critères (factors) que les tribunaux doivent apprécier et pondérer pour décider si un usage est effectivement loyal. Par conséquent, le fair use tend à couvrir plus d’usages que n’en autorisent les autres systèmes, mais au prix d’un plus grand risque juridique. »

De la propriété à l’accès ?

Lors des Rencontres de l’Orme 2008, Frédérique Muscinési, médiatrice culturelle, a risqué le débat : « Aujourd’hui, l’intermédiaire ne peut plus constituer l’agent de la culture établie, ni du discours officiel. Il doit réfléchir, à l’heure des nouvelles technologies et de la substitution progressive de la propriété par la notion d’accès, à son rôle dans le cadre d’une probable et enfin réalisable démocratisation de la culture, non de sa consommation que son propre rôle antérieur rendait impossible ou invalidait, mais de sa création. » Elle a rappelé que « l’imitation et la modification sont à la base de la création entendue comme mémoire et transmission, puisqu’elles sont le moteur de l’apprentissage, processus ou objet même de la création ».

En conséquence, la propriété intellectuelle appliquée aux objets ou aux expériences artistiques, a passé d’être un appui aux auteurs à celui des industries culturelles qui, restreignant l’accès à l’objet de création, restreignent par là même ses possibilités. Culture et éducation cheminent ensemble, c’est bien connu…

Notes

[1] Crédit photo : Mr. Theklan (Creative Commons By-Sa)

[2] Les manuels scolaires : histoire et actualité, Alain Choppin, INRP, Hachette 1992

[3] « L’édition scolaire au temps du numérique », Jean-Pierre Archambault, Médialog n° 41

[4] Les turbulences de l’édition scolaire, Jean-Pierre Archambault, colloque SIF « Les institutions éducatives face au numérique », organisé par la Maison des Sciences de l’Homme de Paris-Nord, Paris les 12 et 13 décembre 2005

[5] Sur le blog du CNS (Canal numérique des savoirs), Laurent Catach (dictionnaires Le Robert) propose à ses collègues des voies de sortie des turbulences, leur demandant de se montrer optimistes : «  Éditeurs, ayez confiance, le web est une formidable opportunité, comme sans doute il n’en arrive que tous les quelques siècles… ». Il s’emploie à les rassurer : « Il est en effet logique et inévitable que plus la quantité d’informations augmente plus on a besoin de la hiérarchiser, de la filtrer, de la commenter, de l’animer et de la fédérer. Comment par exemple feront les élèves pour se repérer et trouver une juste information dans les 15 millions de livres numérisés de Google ? ». Il voit « se profiler un véritable eldorado éditorial ! ». Il met les points sur les i : « Nous avons à notre disposition un matériau informationnel extraordinaire (toute la richesse du web) à mettre en forme et à mettre en scène. Et l’information et sa mise en scène, n’est-ce pas là très précisément notre métier ?… La question n’est donc pas de savoir si les éditeurs scolaires ont un rôle à jouer sur le web : c’est une évidence. Et c’est même leur responsabilité vis-à-vis des jeunes générations de ne pas laisser les élèves se débrouiller tous seuls avec Internet. La seule et unique question est de savoir comment ils seront rémunérés. »

[6] Squeak – Hilaire Fernandes, « Squeak, un outil pour modéliser », EpiNet n° 86

[7] Abuledu

[8] Voir Wikipédia, notamment un « Wikipédia éducatif » et « Wikipédia : la rejeter ou la domestiquer », Éric Bruillard, Médialog n° 61

[9] Pour l’éducation voir « Les logiciels libres dans le système éducatif », Jean-Pierre Archambault et « Favoriser l’essor du libre à l’École », Jean-Pierre Archambault, Médialog n° 66

[10] Voir le Livre blanc sur les modèles économiques du libre, publié par l’April et Rapport du CSPLA (Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique) sur la diffusion ouverte des oeuvres de l’esprit

[11] Voir note 8, le Livre blanc sur les modèles économiques du libre, publié par l’April

[12] « Naissance d’un droit d’auteur en kit ? », Jean-Pierre Archambault, Médialog n° 55 et « Les licences Creative Commons dans le paysage éducatif de l’édition… rêve ou réalité ? », réflexions de Michèle Drechsler

[13] Arsmusicae Site d’information sur l’exception pédagogique pour l’enseignement et la recherche




Quand le Cned confond formation bureautique avec formation Microsoft

Sailor Coruscant - CC byNous sommes en mars 2009. Vous êtes un organisme public souhaitant offrir à son personnel une formation bureautique à distance. Comment vous y prendriez-vous ?

On pourrait définir et présenter les différentes fonctionnalités du traitement de texte, du tableur, du logiciel de présentation. Puis insister sur l’importance d’utiliser des formats ouverts. Et illustrer le tout avec des logiciels libres disponibles gratuitement pour tous les systèmes d’exploitation, comme la suite OpenOffice.org (qui a justement la bonne idée de produire un format ouvert, l’Open Document)[1].

Ce n’est visiblement pas l’option retenue par le Centre national d’enseignement à distance (plus connu sous l’acronyme Cned), dont l’un des enseignants à qui s’adresse cette formation, nous a fait parvenir le courriel suivant (c’est moi qui souligne) :

From: XXX
Date: 17 mars 2009
Subject: Formation bureautique à distance

Mesdames, Messieurs,

Dans le cadre de la mise en œuvre du plan de formation 2008/2011 de l’établissement, la Direction des ressources humaines de la Direction générale procède au recensement des besoins en formation bureautique à distance.

Vous avez la possibilité de suivre une formation aux logiciels Microsoft Outlook, Word, Excel et PowerPoint en ligne ou par le biais d’un CD-Rom.

Vous trouverez dans le document joint « organisation des formations » les différentes modalités des formations, des versions, en ligne ou sur CD-Rom.

Si vous êtes intéressé par l’une de ces formules, vous voudrez bien renseigner le formulaire joint et le renvoyer avant le 15 avril 2009, auprès de votre institut de rattachement.

La Direction des ressources humaines reste à votre disposition pour tout renseignement complémentaire.

Cordialement,

XXX
Direction des ressources humaines
Cned – Direction générale

Ce mail était donc accompagné d’une pièce-jointe au format .doc où l’on peut lire explicitement les informations suivantes :

  • « Pendant votre formation, vous travaillez directement dans l’environnement Microsoft correspondant au logiciel étudié. »
  • « Les formations ne sont pas compatibles Mac et Linux. »
  • « Formation demandée (2 au maximum) : Word – Excel – PowerPoint – Outlook. »

Pour rappel, il s’agit d’un « plan de formation 2008/2011 »…

On pourra toujours m’objecter que le Cned ne fait que s’adapter à la demande puisque tous ses enseignants travaillent sur la suite Microsoft Office. D’abord cela reste à prouver mais admettons que ce soit bien le cas (n’oublions pas qu’il y a une véritable machine de guerre économique déployée dans les coulisses pour qu’il en soit ainsi). Est-ce une raison suffisante pour ne pas adopter et faire adopter de bonnes pratiques, surtout lorsque l’on se définie comme une institution éducative de formation ?

Pensez une seconde aux conseils que ces enseignants ainsi « formés » prodigueront aux élèves dont ils ont la charge à distance ! Vont-ils eux aussi confondre « Word » avec « traitement de texte » ? Qu’adviendra-t-il lorsqu’ils recevront un fichier .doc ? Et bonjour le fracture numérique, puisque tous ces élèves n’ont pas forcément l’OS Windows et la suite MS Office (dûment achetés) à disposition !

La noble mission de service public du Cned ne doit pas s’arrêter aux portes de la formation numérique.

Notes

[1] Crédit photo : Sailor Coruscant (Creative Commons By)




Désobéissance civile en vue à l’école ?

ComputerHotline - CC by-saJusqu’où va-t-on descendre ? C’est la question que l’on peut légitimement se poser avec cette loi Création et Internet qui, chaque jour passant, l’éloigne de la solution et la rapproche du problème.

Dans la famille déjà nombreuse des effets collatéraux néfastes du projet de loi, je demande désormais… l’éducation.

Lors d’un récent communiqué, L’April s’était fort justement inquiétée d’un article introduit au Sénat prévoyant que élèves « reçoivent une information, notamment dans le cadre du brevet informatique et internet des collégiens (B2i), sur les risques liés aux usages des services de communication au public en ligne, sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d’œuvres culturelles pour la création artistique, ainsi que sur les sanctions encourues en cas de manquement à l’obligation définie à l’article L. 336-3 du code de la propriété intellectuelle et de délit de contrefaçon. Les enseignants sont également sensibilisés. »

Commentaires de l’April :

Les promoteurs du projet de loi Hadopi affichent une ambition d’instaurer de nouvelles formes de soutien aux artistes et de nouveaux modèles économiques pour revivifier la filière culturelle. Pourtant, ils occultent purement et simplement la libre diffusion des contenus et œuvres sous licences ouvertes et libres, alors qu’ils constituent une offre légale abondante pour le public3 donnant lieu à une rémunération de leurs auteurs.

Ces licences sont un outil adéquat du partage de la connaissance et des savoirs, et se montrent particulièrement adaptées au monde de l’éducation. Inspirées du mouvement pour le logiciel libre, les licences d’œuvres en partage ouvrent de nouveaux modèles économiques en phase avec les nouvelles technologies.

Et de citer alors deux articles du Framablog : l’étude riche d’enseignements du cas musical Trent Reznor, et la situation un peu ubuesque dans laquelle se retrouve les enseignants lorsqu’ils utilisent des « œuvres protégées » (non copyleft) en situation d’apprentissage.

Les craintes de l’April étaient malheureusement bien fondées puisqu’aujourd’hui l’Assemblée a ni plus ni moins rejeté un amendement de pur bon sens de Martine Billard souhaitant, dans un souci de « pluralisme et neutralité » que l’article en question évoque également « les avantages pour la création artistique du téléchargement et de la mise à disposition licites des contenus et œuvres sous licences ouvertes ou libres » (pour plus de détails lire l’article de Guillaume Champeau reproduit ci-dessous ainsi que la transcription exacte de l’échange sur le site de l’April).

Comme quoi certains masques tombent définitivement.

C’est d’autant plus inepte que ces licences ouvertes ou libres seront, ma main à couper, l’une des prochaines révolutions scolaires, non plus restreintes à la création artistique mais à tout ce qui touche aux ressources éducatives.

Par anticipation, je m’engage d’ores et déjà à faire acte de « désobéissance civile » lorsqu’arrivera le temps où mes élèves seront censés recevoir l’information en question dans le cadre du B2i[1]. Cette information sera bien diffusée mais elle sera immanquablement accompagnée d’une sensibilisation aux licences libres et ouvertes et d’un débat sur les tenants et aboutissants des uns et des autres.

Gageons alors que mes élèves sauront en tirer leurs propres conclusions…

PS : Qu’il me soit d’ailleurs permis de remercier ici le travail respectivement politique et médiatique de Martine Billard et Guillaume Champeau, qui n’ont pas ménagé leurs efforts pour nous alerter et tenter de faire évoluer la situation.

Pas de licence libre dans la propagande pro-majors à l’école

URL d’origine du document

Guillaume Champeau – 2 avril 2009 – Numerama
Article diffusé sous licence Creative Common by-nc-nd 2.0

Pouvait-on faire plus caricatural pour démontrer que la lutte contre le piratage n’a pas pour but d’aider les artistes, mais d’imposer un modèle économique au bénéfice des grandes maisons de disques ?

Le projet de loi Création et Internet prévoit de sanctionner par un diplôme au collège la connaissance des « risques liés aux usages des services de communication au public en ligne, sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d’œuvres culturelles pour la création artistique, ainsi que sur les sanctions encourues en cas de téléchargement illégal ». Pour préparer ce diplôme, la commission des affaires culturelles a proposé d’ajouter un amendement qui prévoit que les élèves reçoivent une « information sur les dangers du téléchargement et de la mise à disposition illicites d’œuvres culturelles pour la création artistique ».

Dans le but d’équilibrer la proposition, la députée Verts Martine Billard a alors proposé jeudi de préciser que cette information doit être « neutre et pluraliste », et couvrir notamment « les avantages pour la création artistique du téléchargement et de la mise à disposition licites des contenus et œuvres sous licences ouvertes ou libres », c’est-à-dire en particulier des œuvres sous Creative Commons.

Mais malgré le soutien de Muriel Marland-Militello, l’amendement de Martine Billard a été rejeté par la majorité. « Ça n’est vraiment pas du niveau de la loi, ça n’est vraiment pas nécessaire, au mieux ça sera une directive du ministère », a expliqué le rapporteur Frank Riester, comme si la propagande sur le téléchargement « légal » ne pouvait pas lui aussi faire l’objet d’une simple directive ou avait davantage sa place dans la loi. « Même position », dira simplement Christine Albanel. Sans protestation des bancs socialistes.

Notes

[1] Crédit photo : ComputerHotline (Creative Commons By-Sa) – Mais qui donc inscrit le nom de « La Quadrature du Net » au tableau ?