700 assos ont déjà le nez dans les nuages (libres) : bilan d’un an de Framaspace

Ce long article vise à faire le bilan du projet Framaspace (cloud associatif basé sur Nextcloud), tout juste un an après son annonce.

🦆 VS 😈 : Reprenons du terrain aux géants du web !

Grâce à vos dons (défiscalisables à 66 %), l’association Framasoft agit pour faire avancer le web éthique et convivial. Retrouvez un résumé de nos avancées en 2023 sur le site Soutenir Framasoft.

➡️ Lire la série d’articles de cette campagne (nov. – déc. 2023)

 

Il était une fois Frama.space

Souvenez-vous, il y a un an, nous annoncions l’un des projets les plus ambitieux de Framasoft : Frama.space

Pour celles et ceux qui n’étaient pas là, où qui ne s’en souviendraient pas, l’envie de mettre en œuvre Frama.space partait d’un triple constat.

Le premier, c’est que c’est la merde. Politiquement, socialement, géopolitiquement, écologiquement, etc. Vous pouvez évidemment penser le contraire, mais nous, nous trouvons que le monde ne tourne pas très rond…

Le second constat, c’est que la société civile, qu’on caricaturera ici aux associations et syndicats est attaquée de toutes parts. La pression à dépolitiser les associations, la réduction du financement de ces dernières en faveur « d’entreprises à impact » ou de la startup nation, les attaques contre les libertés associatives… Tout cela épuise la capacité du troisième secteur à répondre aux besoins auxquels le marché ne répond pas. Il devient de plus en plus difficile d’équilibrer un contrat social mis à mal par les entreprises comme par l’État.

Mème sur la position difficile de nombre d'associations, coincées entre le dilemme "Se vendre aux entreprises" ou "Se prosterner devant l'État".

Enfin, plus proche de Framasoft, le numérique est devenu un outil d’organisation des personnes, mais aussi de passage à l’action. Cependant, ce constat plutôt positif est contrebalancé par deux observations plus négatives. D’une part le numérique est un outil de surveillance et d’aliénation. Et d’autre part, les associations sont à la traîne côté usages comme côté cohérence. Ainsi, des associations œuvrant pour une transition écologique vont utiliser les outils et services des GAFAM, qui participent largement au problème que ces associations essaient de résoudre.

Frama.space : du (Next)cloud pour les assos

Il y a un an, nous annoncions donc un nouveau service Framasoft : Frama.space

Sa mission ? Outiller la « société de contribution ». Formulé autrement : équiper numériquement les associations et collectifs « hors marché ». Qu’il s’agisse de l’AMAP de Trifouilly-les-Oies, du café associatif de Bernache-sur-Yvette, ou du collectif de théâtre queer de Cygne-lès-Lavaur.

Car nous pensons que ces associations et collectifs ont besoin (et même envie) de retrouver de la cohérence entre leurs valeurs, leurs actions, et leurs outils. Être une association qui milite pour, par exemple, le « zéro déchet » et qui utiliserait, par exemple toujours, les outils de Google ou Microsoft, nous paraît en effet contradictoire.

Attention cependant : il ne s’agit pas d’un jugement de valeur de notre part. Nous comprenons parfaitement que des contradictions, ou des objections légitimes puissent exister (on peut parfaitement être préoccupé par le sort de la planète, et prendre une voiture pour amener ses enfants à une activité sportive hebdomadaire située à 20km).

Cependant, il nous paraissait important que ces structures aient le choix de pouvoir avoir accéder facilement à des outils qui ne reposent pas sur les mécanismes du capitalisme de surveillance.

Interface d'un Framaspace (application "Fichiers")
Interface d’un Framaspace (application « Fichiers »)

Nextcloud : une solution imparfaite (mais une solution tout de même)

Framaspace embarque les suites bureautiques en ligne collaboratives Collabora Online et OnlyOffice. Ici, une capture écran de l'édition d'un fichier de type Tableur, directement dans le navigateur.
Framaspace embarque les suites bureautiques en ligne collaboratives Collabora Online et OnlyOffice. Ici, une capture écran de l’édition d’un fichier de type tableur, directement dans le navigateur.

 

Le logiciel est très perfectible (côté UX, côté dette technique, côté performances, etc.), mais… c’est le meilleur cheval de l’écurie malgré tout.

Par ailleurs, sa communauté est large (plus de 60 millions d’utilisateur⋅ices dans le monde) et plutôt active, ce qui donne des espoirs pour l’avenir.

Nous avons donc décidé de baser notre offre Framaspace sur ce logiciel, en proposant une offre techniquement ambitieuse, capable à terme d’accueillir jusqu’à 10 000 espaces Framaspace (et donc autant d’instances du logiciel Nextcloud). Pour cela, nous avons monté une infrastructure technique conséquente, et développé des outils logiciels « maison » (libres, évidemment) permettant de valider les demandes d’inscription et de déployer automatiquement de nouveaux espaces très rapidement, en quelques clics.

Interface de CHARON, logiciel qui nous permet de gérer les candidatures Framaspace
Interface commentée de CHARON, logiciel développé par Framasoft, qui nous permet de gérer les candidatures Framaspace.

 

Mais assez de rappels au passé : si vous souhaitez en savoir plus sur les ambitions derrière Framaspace, vous avez la possibilité de regarder deux vidéos :

On fait l’bilan, calmement

Frama.space devient Framaspace.org

Déjà, nous avons dû changer le nom, car l’extension « .space » augmentait la probabilité des emails contenant des adresses en « frama.space » d’être considéré comme des spams. La faute, évidemment, aux géants du mail, mais nous ne pouvions pas accepter une solution qui nuirait à l’usage normal de la plateforme. Nous avons donc fait le choix d’utiliser un nom de domaine et une extension plus classique, mais plus longue : framaspace.org.

La transition est en cours et se fera par étapes, car il n’y a pas d’urgence sur le sujet.

Par ailleurs, nous annoncions poursuivre quatre objectifs :

  1. Faciliter l’accès à Nextcloud/Framaspace
  2. Rendre plus visible Nextcloud/Framaspace
  3. Aider à faire émerger une communauté Nextcloud/Framaspace francophone
  4. Utiliser Nextcloud/Framaspace comme outil d’empuissantement

Ce premier anniversaire est donc le bon moment pour faire un point sur chacun de ces objectifs.

Bilan « fonctionnel » : ça marche, ou pas ?

Oui !

A l’heure où vous lirez ces lignes, plus de 700 espaces sont actifs. Cela signifie donc que Framasoft outille 700 associations et collectifs. Et les retours sont globalement positifs !

Nous avons pu faire des opérations complexes sans trop de difficultés. Par exemple, nous avons fait des mises-à-jour majeures de Nextcloud (de la version 25 à la version 26) avec un temps d’indisponibilité très limité (moins de 2mn par espace).

Côté infrastructure technique : il y a parfois des nids de poule, mais l’infra tient la route !

Ainsi, fin 2022, nous nous sommes aperçu qu’il y avait un souci du côté de notre système de gestion des suites bureautiques. Les vacances de fin d’années étant proches, et étant suivies de près par une préparation intense de l’A.G. de Framasoft, nous avons préféré suspendre les inscriptions, et prendre le temps nécessaire pour développer une solution pérenne. Nous avons rouvert les inscriptions en mars 2023. Donc, si vous aviez raté l’info : il est parfaitement possible de candidater pour votre association ou collectif sur https://framaspace.org !

Le fait que ça soit Framasoft qui gère les aspects techniques peut avoir certains inconvénients (nous limitons le nombre de comptes, d’espace disque, ou de plugins Nextcloud que vous pouvez utiliser). Mais cette infogérance facilite énormément la vie des utilisateur⋅ices (qui, pour la plupart, auraient bien du mal à maintenir dans le temps une instance du logiciel Nextcloud qu’iels auraient installé « manuellement »).

En un an, nous sommes passés de 0 à plus de 700 espaces gérés par Framasoft. Nous estimons donc ce bilan fonctionnel comme plus que satisfaisant.

Illustration de DemonDrive, un monstre fantomatique orné du logo de Google Workspace
Cliquez pour nous soutenir et aider à repousser Demon Drive – Illustration CC-By David Revoy

Bilan « notoriété »

Un des objectifs de Framaspace est aussi de faire connaître Nextcloud, et l’offre Framaspace (ou celles proches ailleurs, notamment chez les CHATONS).

Pour cela, en 2023, nous avons :

Sur un bulletin scolaire, nous pourrions écrire : « Pas mal, mais peut mieux faire ».

Bilan « communauté »

Cela concerne notre volonté de construire, à long terme, une communauté d’utilisateur⋅ices francophones de Nextcloud.

Dans ce cadre, nous avons :

Le bilan de cette partie là est un démarrage plutôt poussif, mais c’est assez logique car, pour différentes raisons, nous n’avons pas pu consacrer autant de temps de travail en 2023 à cette partie du projet que nous l’aurions souhaité.

Bilan « empuissantement »

Cette partie du projet est prévue pour 2025. Il n’était pas prévu de travailler dessus en 2023. Et donc, il est logique que nous n’ayons pas avancé dessus.

Slide "empuissanter" rappelant une partie des objectifs de Framaspace.

Statistiques du projet

Afin d’objectiver encore un peu plus ce bilan de la première année, voici quelques données chiffrées. Si elles ne vous intéressent pas, vous pouvez déjà sauter à la partie « Bilan du bilan » 🙂

Typologie des structures

Répartition par type de structures

Répartition des espaces par types de structures
Répartition des espaces par types de structures

 

Description :

  • 72% d’associations loi 1901 ;
  • 22% de collectifs informels ;
  • 5% de syndicats ;
  • 1% d’associations loi 1907 (associations mixtes/cultuelles).

Répartition par secteurs d’activités

Répartition des espaces, par secteurs d’activités

Description (NB : les structures pouvaient choisir plusieurs thématiques) :

  • un premier « bloc » avec plus de 250 structures se revendiquant des secteurs ou thématiques suivantes : Education/Formation, Environnement, Culture, Social ;
  • un second « bloc » avec plus de 100 structures se revendiquant des secteurs ou thématiques suivantes : Amicale / Entraide, Loisirs, Défense des droits fondamentaux, Activités politiques, Économie ;
  • un dernier « bloc » avec moins de 100 structures se revendiquant des secteurs ou thématiques suivantes : Sport, Santé, Recherche, Justice, Activités spirituelles ou philosophiques, Tourisme.

Répartition par année de création de la structure

Répartition des espaces par année de création

Description : 50% des 700 espaces correspondent à des structures dont l’année de création date de 2017 ou plus. Même si une dizaine de structures existaient avant 1950, on peut en déduire que, globalement, le public de Framaspace représente plutôt des structures récentes.

Répartition par nombre de salarié⋅es

Répartition des espaces par nombre d'employé⋅es

Description et commentaire : 500 des espaces (71% du total) sont des structures sans salarié⋅es. Il existe quelques structures avec plus de 20 salarié⋅es, cependant, il s’agit souvent « d’anomalies » (par exemple l’espace est créé pour un groupe syndical local, qui indique le nombre de salarié⋅es du syndicat national).

Répartition par nombre de membres

Répartition des espaces par nombre de membres.Description : la moitié des espaces représentent des structures de moins de 30 personnes. 75% déclarent compter 100 membres ou moins.

Répartition par nombre de bénéficiaires

Répartition des espaces par nombre de bénéficiaires.

Description : la moitié des espaces représentent des structures déclarant toucher 100 personnes ou plus. Il existe quelques structures déclarant toucher plus de 25 000 personnes, cependant, il s’agit souvent « d’anomalies » (par exemple l’espace est créé pour un groupe syndical local, qui indique le nombre de bénéficiaires du syndicat national).

Répartition par budget annuel

Répartition des espaces par budget annuel

Description : 150 structures n’ont pas souhaité répondre à la question. Sur les 550 restantes, la moitié déclarent avoir un budget annuel inférieur à 4 000€ par an (une centaine de structures déclarent même avoir un budget de 0€). 25% environ des structures déclarent avoir un budget entre 4 000 et 50 000€ (qu’on peut corréler avec les structures ayant au moins un⋅e salarié⋅e). Quelques rares structures déclarent avoir un budget supérieur à 50 000€/an, mais il s’agit là encore pour la plupart « d’anomalies statistiques ».

Exemples de structures

NB: ces associations se sont présentées publiquement sur le forum Framaspace, nous n’avons donc pas de cas de conscience à rendre public leurs identité ou objet.

Par exemple :

« Bonjour. Nous sommes l’association Les petits pois sont verts à Clamart. Notre raison d’être est d’imaginer et construire un mode de vie solidaire et respectueux de l’environnement en :

  • reliant les Clamartois partageant les mêmes motivations,
  • encourageant une dynamique locale,
  • portant des projets,
  • collectant et diffusant des informations

Nous avons quelques années d’existence seulement et prônons l’usage du numérique libre et sobre.

Nous utilisons les outils Framasoft suivants : Framapad, Framadate, et Frama.space depuis peu. »

Ou encore :

« L’association des Cavaliers Au Long Cours (CALC) est une association francophone regroupant des adhérents, environ 200, du monde entier (notre adhérent le plus lointain est au Kirghistan !) mais ils sont principalement basés dans les pays d’Europe de l’Ouest. Notre objectif est le développement du voyage au long cours avec un animal (cheval, âne, mulet, etc.) monté et/ou bâté. Nous aidons aussi les prétendants au voyage dans leur organisation et apportons une aide aux voyageurs en difficulté. »

Autres exemples :

  • Plan B – asso d’éduc pop bretonne (Rennes)
  • AMAP de St Vallier de Thiey (Alpes Maritimes)
  • La Gonette – Monnaie locale citoyenne (Lyon)
  • Les amis du Portique – Revue de philo et sciences humaines
  • Les Pieds à Terre – éduc pop à l’environnement (Haute-Loire)
  • Planning familial de l’Aude

Usage des structures

Suites bureautiques utilisées

Répartition des Framaspaces entre Collabora Online et OnlyOffice
Répartition des Framaspaces entre Collabora Online et OnlyOffice

 

NB : la surreprésentation de Collabora Online est due au fait qu’il s’agit de la suite bureautique proposée par défaut. L’admininstrateur⋅ice de l’instance peut basculer si c’est son choix vers OnlyOffice, mais très peu le font.

Statistiques d’usage
  • Nombre d’espaces
    • actifs : 700
    • refusés : 14
    • désactivés (par leurs administrateur⋅ices) : 10
  • Comptes (admins + users) : 3 356
    • Moyenne : 4,8 comptes ; médiane : 2 comptes
  • Fichiers utilisateurs hébergés : 760 939 pour 860 Go (hors révisions et hors corbeille)
    • 131 Go en corbeille
    • 99 % des espaces ont créé au moins un fichier
  • Connexion :
    • 198 espaces ont eu une connexion dans les 3 derniers jours
    • 390 espaces ont eu une connexion dans les 15 derniers jours

Nombre de comptes

Répartition des espaces par nombre de comptes

Description : près de 300 espaces n’ont qu’un seul compte (nécessairement le compte « admin »). Cela signifie que 40% des espaces n’ont pas d’usage collaboratif avec d’autres utilisateur⋅ices. Cependant, nous avons constaté des usages où l’admin de l’espace avait malgré tout des usages collaboratifs avec d’autres personnes de son asso (par exemple par l’utilisation de dossiers partagés, avec ou sans mots de passe). Cela signifie – quand même – que 60% des espaces comptent plusieurs utilisateur⋅ices. 42% ont même 5 utilisateur⋅ices ou plus.

Espace disque utilisé

Répartition des espaces par espace disque occupé.

Description : quasiment tous les espaces ont utilisé leur espace de fichiers (seuls 2% n’ont jamais créé de fichier). Il est intéressant de noter que moins de 20% des espaces utilisent plus de 1 Go (sur un maximum de 40 Go par espace).

Nombre de fichiers

Répartition des espaces par nombre de fichiers.

Description : 50% des espaces comptent plus de 250 fichiers utilisateur⋅ices. Ce qui est plutôt une bonne « surprise » à notre avis : cela signifie que Framaspace est bien utile (soit au stockage, soit au partage de fichiers).

Bilan financier

Dépenses

Actuellement, l’infrastructure technique (les serveurs informatiques) de Framaspace nous coûte environ 1 200€ par mois (soit environ 15 000€ par an) Le coût du travail, estimé par le très peu précis Institut LaLouche, est d’environ 20 000€ d’investissement en amont du lancement du projet. Depuis le lancement, toujours à la grosse louche, nous pouvons compter environ 2000€ par mois (3 salariés impliqué, à temps très très partiels sur ce projet). On peut donc dire, grossièrement, que Framaspace a coûté environ 60 000€ à Framasoft.

Recettes

Côté recettes, c’est un peu plus complexe.

Framaspace est un projet réservé aux petites associations et collectifs solidaires, volontairement gratuit. Nous souhaitons que le prix ne soit pas un frein à l’accès. Et nous ne souhaitons pas fixer de « prix libre », car qui dit prix, dit service vendu, dit prestation, dit facture, dit obligations (contractuelles, comptables et fiscales). Nous faisons le choix volontaire et assumé du don sans contrepartie financière attendue (ce qui n’empêche pas qu’elle soit espérée 😉 ).

Il est probable que certain⋅es membres des associations que nous hébergeons aient fait un don à Framasoft. Cependant, nous ne voulons pas flécher les dons sur les projets Framasoft. Car comptablement, un don fléché sur un projet doit entrer dans un fond dédié qui doit servir à ce projet. Or nous souhaitons qu’un don à Framasoft puisse aussi financer des projets « à perte », ce qui est exactement le cas de Framaspace cette première année.

Par volonté de simplification, on peut donc dire que les recettes sont de… 0€ ! 😱

Coût par espace

À partir de données précédentes, on peut donc déduire que le coût d’un espace (à ce jour) est de 86€ annuel (soit 7€ par mois. Dont 1,8€/mois de coût d’infrastructure).

Mais le coût de l’infrastructure ne devrait pas trop bouger, et le coût du travail légèrement augmenter, en 2024, alors que le nombre d’espaces pourrait, lui, tripler ou quadrupler. Si on part sur une hypothèse d’un coût total de 60 000€ (pour 2023) + 15 000€ pour les serveurs en 2024 + 36 000€ de coût du travail. On arrive à un total de 111 000€ fin 2024. Avec une hypothèse de 2 500 espaces actifs fin 2024, cela porterait le coût total à 45€ par espace et par an (soit 3,7€ par mois, dont 1€/mois de coût d’infrastructure). Coût qui pourrait encore baisser en 2025.

C’est un coût important, et rares sont les associations qui peuvent se permettre ce genre de projet qui ne vise pas un objectif de rentabilité ou même d’équilibre.

Cependant, nous pensons que la portée politique de ce projet implique que nous prenions ce risque. Nous espérons (par expérience plus que par naïveté) que les associations qui le pourront soutiendront financièrement Framasoft (et donc indirectement Framaspace).

Bilan du bilan

Les nouvelles sont plutôt bonnes !

Mème Framaspace reprenant la célèbre phrase du biologiste Richard Dawkins, au sujet de la science, affirmant "It works, Bitches".
Mème Framaspace reprenant la célèbre phrase du biologiste Richard Dawkins, au sujet de la science, affirmant « It works, Bitches ». (contexte ; vidéo PeerTube)

 

D’abord, Framaspace fonctionne 🙂
Gérer 700 instances Nextcloud, c’est pas mal en un an, non ? D’autant que l’infogérance se passe plutôt bien (pour le moment !)

Ensuite, nous avons réussi à cibler le public que nous souhaitions toucher : des associations (déclarées ou de fait) plutôt petites, avec des petits budgets. La plupart sont orientées vers l’éducation, l’environnement, le social ou le culturel. Ce qui n’est pas étonnant quand on connaît le public de Framasoft.

Enfin, Framaspace est utilisé. Les connexions sont régulières sur plus de la moitié des espaces. Et les personnes manipulent pas mal de fichiers (plutôt de petits fichiers, ce qui explique que rares sont les espaces qui utilisent plus d’un Go sur les 40Go max octroyés).

Nous considérons que nos objectifs 2023, en termes d’actions, sont plus que correctement remplis 🎉 On peut même dire que c’est une réussite au vu des moyens que nous avons déployés.

Le fait de proposer des espaces « verrouillés » (par exemple vous ne pouvez pas installer les plugins Nextcloud de votre choix sur Framaspace, et seules les petites associations ou collectifs peuvent ouvrir un Framaspace) a eu l’effet de frustration escompté. En effet, nous avons régulièrement renvoyé les personnes frustrées par ces limitations vers des structures amies, comme Zaclys, IndieHosters, Cloud Girofle, Paquerette, Arawa, etc. C’est la démonstration que nous ne prenons pas une « part du gâteau », mais bien que nous participons à agrandir la taille de ce dernier.

Dessin de Li, la licrone mascotte de Framaspace. Elle s'apprete à lancer des bulles magiques.
Cliquez sur Li, la licorne-mascotte de Framaspace, pour soutenir Framasoft. – Illustration CC-By David Revoy

Framaspace en 2024 (et 2025)

Comme vous avez pu le lire dans notre « bilan du bilan », Framaspace répond à un besoin, et Framasoft estime que la réponse apportée est plutôt bonne. C’est évidemment loin d’être parfait, mais pour une petite asso qui voudrait se dégoogliser et mettre en cohérence ses valeurs et ses outils numériques, l’offre Framaspace peut convenir.

Cependant, nous ne comptons pas nous arrêter là ! Framaspace est toujours en phase de « beta test » (et ce sans doute jusqu’à fin 2025 !) et de nombreuses améliorations sont à venir 😀

Accompagnement

Tout d’abord, nous allons continuer à accueillir des espaces. Maintenant que Framaspace est plus stable, nous pensons pouvoir accélérer le rythme et accueillir 2 500 espaces d’ici fin 2024 (c’est-à-dire plus que tripler le nombre actuel. Même pas peur !).

Ensuite, nous allons poursuivre nos actions d’infogérance. Par exemple en passant de Nextcloud 26 à Nextcloud 27 fin 2023 ou début 2024. Chaque version apporte son lot de nouvelles fonctionnalités (voir chez nos ami⋅es d’Arawa qui en font une présentation synthétique ici et ).

Côté accompagnement, nous souhaitons produire un tutoriel un peu spécial. En effet, de très nombreux tutoriels existent déjà (nous mettons en avant celui de Coopaname, réalisé par La Dérivation). Mais ce type de tutoriel ne correspond pas à tous les besoins. Nous souhaiterions donc produire un tutoriel plus narratif et plus immersif. Un « tutoriel dont vous êtes le héros » (ou « Les combines dont vous êtes l’héroïne » si vous préférez). Inspiré des « livres dont vous êtes le héros », il s’agira pour l’utilisateur⋅ice d’incarner un personnage devant remplir différentes missions avec son espace Framaspace. La particularité étant que certaines « quêtes » pourront être soit contournées (par exemple si l’utilisateur⋅ice sait déjà créer un compte utilisateur⋅ice) soit approfondies (par exemple sur le partage de fichiers).

Scénario en construction d'un « tutoriel dont vous êtes le héros »
Scénario en construction d’un « tutoriel dont vous êtes le héros »

 

Nous souhaitons aussi apporter de la documentation (et des outils de facilitation) pour faciliter la migration depuis OneDrive, Dropbox ou GoogleDrive, ainsi que simplifier l’import/export entre instances Nextcloud. Par exemple une asso qui arriverait aux limites de 50 comptes sur son espace Framaspace et souhaiterait migrer pour un Nextcloud plus puissant chez nos ami⋅es de IndieHosters pourrait transférer ses données — fichiers, agendas, contacts, etc — de façon plus automatisée.

Enfin, nous sommes conscient⋅es qu’une des grandes faiblesses de Nextcloud (et donc de Framaspace) est la difficulté à « embarquer » (= onboarding en anglais) les novices dans une interface (trop ?) riche et parfois (très ?) confuse. C’est pourquoi nous souhaiterions intégrer à Nextcloud l’outil libre IntroJS afin de mettre en lumière certaines parties du logiciel et de faciliter ainsi sa prise en main. Cf vidéo ci-dessous.

 



Vidéo d’une démonstration de la façon dont pourrait s’intégrer IntroJS dans Nextcloud pour faciliter sa prise en main.

Toujours sur le plan de la prise en main, nous travaillons avec la designer Marie-Cécile Godwin, qui enseigne notamment à l’école de design Strate, afin de faire réfléchir ses étudiant⋅es aux possibilités d’amélioration de Nextcloud d’un point de vue UX et UI.

Accroître la notoriété de Nextcloud

En 2024, nous poursuivrons bien évidemment les actions visant à mieux faire connaître Nextcloud sur les territoires francophones.

Ainsi, nous avons déjà sous-titré en français quelques vidéos de présentation de Nextcloud. Mais nous souhaiterions aller plus loin. Par exemple en refaisant carrément les voix off, où en traduisant des supports de documentation (flyers, plaquettes, etc.).

Vidéo d’une vidéo promotionnelle de Nextcloud, originellement en anglais uniquement, et sous-titrée par Framasoft.

Par ailleurs, Framasoft poursuivra son travail de promotion de Nextcloud et de Framaspace, par le biais de conférences, de webinaires, d’interviews, etc.

Ensuite, nous poursuivrons nos partages et retours d’expérience avec la communauté CHATONS, dont de nombreux membres proposent des services autour de Nextcloud. Nous pensons avoir acquis certains savoirs et savoirs-faire autour de Nextcloud, mais nous savons surtout qu’il nous reste énormément à apprendre.

Enfin, nous allons commencer à prendre contact avec les têtes de réseaux associatifs (Collectif Associations Citoyennes, Mouvement Associatif, réseaux d’éducation populaire, mais aussi des réseaux tels que Associations Mode d’Emploi, Solidatech, Associathèque, etc.) afin de présenter Framaspace, et mettre en lumière ce que Nextcloud peut faire (ou ne peut pas faire !) au niveau du numérique éthique collaboratif. L’objectif, à terme, est d’évaluer sa pertinence comme « commun numérique d’intérêt général » pour les associations.

Communauté d’utilisateur⋅ices Framaspace & Nextcloud

En 2024, nous poursuivrons notre travail pour impulser, animer et coordonner une communauté d’utilisateur⋅ices du logiciel Nextcloud sur le forum Framaspace.

Nous publierons aussi un site pour l’observatoire OPEN-L (« Observatoire des Pratiques et Expériences Numériques Libres »), qui accueillera publiquement les différentes enquêtes (et leurs résultats !) que Framasoft aura conduites auprès de ses publics. Ce site sera ouvert aux structures souhaitant elles aussi partager leurs retours d’expérience. L’objectif étant de ne pas réinventer la roue, et de pouvoir plus facilement objectiver les besoins (et frustrations) des utilisateur⋅ices.

Évidemment, nous continuerons à améliorer Framaspace, mais aussi Nextcloud. Nous avons la chance (et le plaisir) de compter Thomas dans notre équipe salariée, l’un des principaux contributeurs mondiaux extérieurs à l’entreprise Nextcloud GmbH.

Cela signifie que Framasoft (au travers de Framadrive, Framagenda, et maintenant Framaspace), participe très activement à ce commun numérique qu’est le logiciel Nextcloud.

D’ailleurs, concernant les nouvelles plus « internes », nous devrions dans les mois qui viennent augmenter notre capacité de travail au sein de Framasoft sur le projet Framaspace : Thomas, actuellement développeur principal de Mobilizon, basculera jusqu’à 50% de son temps de travail sur Framaspace, et Pierre-Yves, actuellement codirecteur de Framasoft, quittera cette fonction afin de se concentrer sur les services numériques de l’association (dont Framaspace, évidemment).

Empuissanter les structures « hors marché »

Nous avons beaucoup d’ambitions politiques autour du projet Framaspace (cf. notre article de lancement).

Pour cela, nous allons poursuivre, par le biais d’enquêtes, la collecte des besoins (fonctionnels, mais aussi plus politiques) des structures hébergées. En fonction des résultats, nous pourrons – si nos moyens nous le permettent – adapter Framaspace aux besoins des utilisateur⋅ices.

Nous avons constaté que dans les associations que nous accompagnons, la question des outils numériques repose souvent sur un ou deux bénévoles, qui peinent parfois à mettre en place une politique de conduite du changement, ou à convaincre leur Conseil d’Administration. Nous souhaitons donc aussi produire des « fiches pratiques » afin de faciliter la vie de ces personnes clés. « Comment faire le diagnostic numérique de mon association ? », « Comment convaincre mon C.A. de passer de Gdrive ou Dropbox à Framaspace ? », etc.

Enfin, et nous sommes conscient⋅es de la forte demande concernant ce point, nous souhaitons mutualiser le financement de nouvelles fonctionnalités dans Framaspace.

Nous étudierons prioritairement :

  • la possibilité de gérer ses membres dans Framaspace (membres, catégories, fiche d’identité, cotisations, rappel d’adhésion, etc.), grâce au (fabuleux) logiciel libre de gestion associative Paheko ;
  • la possibilité de gérer la comptabilité de son association (saisie, bilan, compte de résultat, choix du plan comptable, etc.), là encore grâce à Paheko ;
  • ajouter la faculté de décliner rapidement des visuels de communication, grâce au logiciel Aktivisda (cf l’exemple de l’association Alternatiba) ;
  • permettre, pour les associations qui le souhaitent, de rendre publiques des pages présentant leur structure et leurs actions. Pour cela nous souhaitons donner la possibilité de publier un mini-site web de présentation de la structure (rédigé dans l’application « Collectives » de Framaspace).

Dessin dans le style d'un jeu vidéo de combat, où s'affronte la licorne de Framaspace et le monstre de Google Workspace.
Aidez Li, la licorne de Framaspace, à repousser Demondrive en soutenant Framasoft ! – Illustration CC-By David Revoy

Moulaga needed!

Comme vous le voyez, la feuille de route 2024 de Framaspace est déjà bien chargée !

Attention : aucun des points ci-dessous n’est un engagement ferme de notre part. Il s’agit de nos envies, de ce que nous souhaitons mettre en place l’année qui vient. Cela reste très ambitieux. Et comme toute ambition, il faut savoir quelles sont les ressources disponibles que l’on peut y consacrer.

Nous l’avons indiqué plus haut, Framaspace est un projet largement déficitaire. Ça tombe bien : il n’a pas vocation à être rentable, et encore moins à dégager des bénéfices. Cependant, ce sont bien les moyens que vous nous confiez (c’est-à-dire vos dons) qui nous permettent d’agir.

En conséquence, nous pensons sincèrement que 1€ (ou 100€ ou 1 000€, hein ! 😅) donné à Framasoft permet réellement de faire bouger les lignes, et d’avoir un impact positif sur le numérique « hors marché ».

C’est pourquoi nous vous invitons, si cela vous est possible, à soutenir Framasoft en faisant un don, afin que nous puissions poursuivre nos actions, et notamment maintenir et développer le projet Framaspace.

Cette année encore, nous avons besoin de vous, de votre soutien, de vos partages, pour nous aider à reprendre du terrain sur le web toxique des GAFAM, et multiplier les espaces de numérique éthique.

Nous avons donc demandé à David Revoy de nous aider à montrer cela sur notre site « Soutenir Framasoft« , qu’on vous invite à visiter (parce que c’est beau) et surtout à partager le plus largement possible :

Capture d'écran de la barre de dons Framasoft 2023 à 8%

Si nous voulons boucler notre budget pour 2024, il nous reste six semaines pour récolter 183 478 € : nous n’y arriverons pas sans votre aide !

 

Soutenir Framasoft

 




Let’s regain ground on the toxic web ! – Framasoft’s 2023 report

A year ago, we launched our 2022-2025 roadmap, « Collectivising the Internet, Convivialising the Internet ». The aim: to encourage the adoption of user-friendly web tools by groups that share the values of Free/Libre culture.

🦆 VS 😈: Let’s take back some ground from the tech giants!

Thanks to your donations to our not-for-profit, Framasoft is taking action to advance the ethical, user-friendly web. Find a summary of our progress in 2023 on our Support Framasoft page.

➡️ Read the series of articles from this campaign (Nov. – Dec. 2023)

One year on, we are proud and delighted to present this first full update on our activities, funded (as always) by your donations.

 

drawing of Coin-coin, the duck mascot of the Framasoft campaign. He is in a karateka position
Click on Coin-Coin to support Framasoft – Illustration CC-By David Revoy

 

Changing the world, one web corner at a time

Drawing of Datavöre, a dripping monster made up of 5 heads, each bearing a GAFAM logo.
Click to support us and push Datavöre away – Illustration CC-By David Revoy

The actions of Collectivise / Convivialise Internet (« Collectivisons Internet / Convivialisons Internet » aka « Coin-coin » (qwack qwack, in French), hence the mascot) complement and add to the maintenance of our historical actions: online services and software tools, sharing experience, various contributions and collaborations.

As we wrote last year on this blog, the goal remains the same: to ensure that there are more and more bubbles of ethical web, in order to regain ground on the toxic digital world occupied by the tech giants.

This blogpost is a very quick summary of our end-of-year campaign. It aims to give you a general idea of what your donations are going towards. If you’re interested, we’ll be posting details of the key actions in this report on this blog every Tuesday (if everything goes well©) until the end of the year.

 

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Framaspace, solidarity collectives get to grips with this convivial cloud

We said it back in 2022: Framaspace is our most ambitious project in this new roadmap. By the end of 2025, we aim to provide up to 10,000 collaborative cloud spaces based on Nextcloud software for small groups of people to work together.

We’ll be covering Framaspace news in detail during the week of Nov. 21st:

Illustration of DemonDrive, a ghostly monster adorned with the Google Workspace logo
Push back Demondrive by supporting Framasoft – Illustration CC-By David Revoy

  • The first year of Framaspace
    • A high demand, already almost 700 Framaspaces open;
    • …and even more if you ask here for one for your (French-speaking only) collective;
    • Lessons learned from this beta release;
    • the first needs expressed by the beneficiaries;
    • technical improvements, updates, maintenance, etc.
  • In the pipeline for next year(s)
    • Preparation of tools to make it easier for newcomers to use the system;
    • Ideas for « tutorials where you are the hero » (or « schemes where you are the heroine »?);
    • future explorations: the possibility of publishing websites, or even managing members and accounts?

 

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PeerTube: a v6 based on your ideas

We’ve been developing this software for six years, and once it’s installed on a server, it can be used to create an ethical alternative to YouTube, Twitch, Vimeo and so on.

The technical possibilities offered by PeerTube all serve the same purpose: to allow you to host and distribute your videos and live streams, even (and especially) if you don’t have the money of Google or the server farms of Amazon.

 

The features that we will describe in detail during the week of Nov. 28th have been selected from your ideas:

Illustration of Videoraptor, an insectoid monster whose three heads bear the logos of YouTube, Vimeo and Twitch.
Click to support us and push Videoraptor away – Illustration CC-By David Revoy

  • Version 5.1 (March 2023)
    • Moderation of account requests;
    • Back to live.
  • Version 5.2 (June 2023)
    • Major work on transcoding that can be offloaded to a remote server;
    • Replay visibility;
    • RSS feed adapted for podcasts.
  • Version 6 (end of November 2023)
    • Improved accessibility;
    • Image preview in progress bar;
    • Videos chapters;
    • Uploading a new version of a video;
    • Password protection for videos;
    • Live load & stress tests (report to be published later).

 

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Mobilizon, the final countdown of the battle…

…for Framasoft!

After 4 years of development, we feel we’ve completed our vision for Mobilizon. Once this v4 is released, we hope that your groups will have the features they need to organise themselves around their events, and emancipate themselves from Facebook or Meetup.

That’s why during the week of Dec. 5th, we’ll be talking in detail about:

Illustration of Face Ghoûl, a dripping, clawed monster adorned with the Facebook logo
Click to support us and push Face Ghoûl away – Illustration CC-By David Revoy

  • Version 3.1 (March 2023)
    • Ability to enter an unlisted address;
    • Anti-spam tools.
  • Version 4 (December 2023)
    • Import events from other platforms (MeetUp, Facebook, etc.);
    • Message from organisers to participants.
  • The future
    • We will provide security updates;
    • We will maintain the French-speaking instance Mobilizon.fr;
    • Other groups already have plans to develop Mobilizon with new ambitions…
    • …and there is always room for your own vision!

 

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PeerTube (yes, again! but…) in 2024: we’re betting big on its success

The toxicity of YouTube, Twitch and the like is becoming increasingly visible… More and more groups, institutions and content creators discover and use PeerTube. In 2023, we’ve been working hard internally to better support this burgeoning success and give PeerTube every chance to succeed.

That’s why, during the week of Dec. 12th, we’ll be talking specifically about:

Illustration of Yetube, a Yeti-like monster with the YouTube Premium logo.
Click to support us and push Yetube away – Illustration CC-By David Revoy

  • The roadmap to PeerTube v7 (end 2024)
    • Export and import tool for your account;
    • Accessibility audit and recommendations integration;
    • Comment moderation tool (for admins and video-makers);
    • Keyword list moderation tool;
    • Separation of audio and video streams (opens up future possibilities);
    • Addition of « zero pixel » resolution (receive audio only);
    • Recategorisation of sensitive content (more detailed than SFW/NSFW);
    • Redesign of the video management area;
    • Redesigning the interface following a user experience (UX) audit.
  • Investing even more in PeerTube to give it a better chance of growing its audience, starting in 2024
    • Promote the PeerTube ecosystem (newsletter, social media, etc.);
    • Work on a « showcase » instance of PeerTube;
    • Hire a second developer (from September 2023);
      • Threefold goal: master 270,000 lines of code, encourage contributions, but above all…
  • Official PeerTube mobile application (end of 2024)
    • Based on design work (survey, mock-ups, etc.);
    • For Android, iOS (🤞)… and ideally AndroidTV;
    • First version: discover and watch videos (search, playlists, subscriptions, notifications).

 

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Émancip’Asso: professional training, MOOC, website…

Conceived in partnership with Animafac, the Émancip’Asso project aims to train service providers to understand and support associations in their transition to ethical web tools.

A lot of work has already been done this year and we’ll be talking about it during the week of Dec. 19th:

Illustration of Toxicloud, a steamy, toxic monster with the Amazon Web Services logo.
Click to support us and push Toxicloud away – Illustration CC-By David Revoy

  • Organisation of face-to-face professional training (January 2023)
  • Publication of the MOOC « Developing a range of services to support associations in their ethical digital transition », the extended version of the face-to-face professional training course, aimed at anyone wishing to start or improve their support skills.
    • MOOC with free and independent participation;
    • Understand the non-profit sector and its digital applications;
    • To master the support methods used by non-profit organisations;
    • Design and promote a range of services tailored to this ecosystem;
    • Not forgetting networking in order to work together more effectively.
  • Design and publication of the Émancip’Asso website
    • A list of service providers who can support associations in their transition process;
    • A space for associations to help each other;
    • Access to additional resources;
  • What’s next for 2024
    • To increase the number of support services listed;
    • A campaign to promote the system to associations;
    • Active community management.

 

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Digital empowerment with practical tools

To end the year on a high note, we’d like to talk about the hard work we’re doing on the practical, concrete tools we offer.

Whether it’s our « De-google-ify internet » services or our historical directory of free software, these tools enable more than 1.5 million people every month to break free from the tech giants and their toxic tools.

During the week of Dec. 26th, if you’ve been good (or naughty), we’ll announce:

Illustration of MS Blue Scream, a blue blob-like monster adorned with the Windows logo
Click to support us and push MS Blue Scream away – Illustration CC-By David Revoy

  • Framalibre, the free software directory
    • Complete overhaul of the directory following design surveys;
    • Still collaborative, with a priori moderation (to fight spam);
    • (under the hood) New static engine, easy to use entries;
    • Fluid and simplified interface, adapted to mobile phones;
    • Simple search (search bar, tags);
    • Software recommendations;
    • « Small sites » tool: create your own pages to recommend your favorite FOSSes.

    Illustration of Hydroffice, a serpentine monster with five heads and fangs, adorned with the logos of Google Suite tools.
    Click to support us and push Hydroffice away – Illustration CC-By David Revoy
  • « De-google-ify internet » services
    • Almost 10 years of existence!
    • Our annual usage statistics;
    • Maintenance, backups, updates;
    • Huge work to fight spam;
    • The success of Framagroupes…
    • …and the campaign to renew the services (we have lots of ideas!)

 

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All the work we can’t describe in 7 weeks…

If you’ve read through the 94 pages of our 2022 Activity Report (FR), you’ve already guessed: it’s very difficult to summarize everything our small association is doing.

But just because we won’t be devoting a week to each of the following projects doesn’t mean that nothing has happened…

So here’s what we won’t have time to go into until the end of the year:

  • CHATONS Collective (ethical web service providers)
    • Framasoft has been dedicating paid time to the collective for 6 years now;
    • Organisation of the CHATONS camp (August 2023);
    • This is our last year of coordinating the collective;
    • Major transmission and support work, allowing it to become autonomous;
    • Self-managed internal debates have already taken place;
    • Framasoft remains a member of the collective, we just stop coordinating it.
  • ECHO Network (European exchange project on ethical digital support for citizens)
    • Co-organisation of the inaugural seminar in Paris (January 2023);
    • Study visit to Berlin (March 2023);
    • Brussels study visit (June 2023);
    • Rome study visit (September 2023);
    • Zagreb study visit planned for early December 2023;
    • In 2024, pooling shared experiences into practical tools.
  • Peer.Tube (showcase of quality content broadcast on PeerTube)
    • Prioritized the development of PeerTube in 2023;
    • Work planned for 2024 (content promotion, showcase, community of curators, etc.).

 

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Drawing in the style of a fighting video game, featuring a karateka duck and a monster with GAFAM logos.
« Coin-Coin VS Datavöre » – Illustration CC-By David Revoy

Seven weeks to balance our budget for 2024

If Framasoft is able to employ not 10 but 11 people, to rent nearly 57 servers, to travel all over France (and beyond), and to finance everything it does in the digital commons… It is all thanks to your donations.

Your donations are and will remain our main source of funding, allowing us to act freely and in complete independence.

This year again, we need you, your support, your sharing, to help us regain ground on the toxic GAFAM web, and multiply ethical digital spaces.

So we’ve asked David Revoy to help us present this off on our « Support Framasoft » page, which we invite you to visit (because it’s beautiful) and above all to share as widely as possible:

Click to support us – Illustration CC-By David Revoy

If we want to complete our budget for 2024, we have seven weeks left to raise 200 000 €: we won’t make it without your help!

 

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We sincerely hope that this report and outlook will inspire you and (if you can) make you proud to support Framasoft.




Reprenons du terrain sur le Web toxique ! – Bilan 2023 de Framasoft

Il y a un an, nous vous présentions « Collectivisons Internet, Convivialisons Internet » notre feuille de route 2022-2025. L’objectif : favoriser l’adoption d’outils web conviviaux par des collectifs solidaires qui partagent les valeurs du Libre.

🦆 VS 😈 : Reprenons du terrain aux géants du Web !

Grâce à vos dons (défiscalisables à 66 %), l’association Framasoft agit pour faire avancer le Web éthique et convivial. Retrouvez un résumé de nos avancées en 2023 sur le site Soutenir Framasoft.

➡️ Lire la série d’articles de cette campagne (nov. – déc. 2023)

Un an plus tard, nous sommes fiers et heureuses de vous présenter ce premier point d’étape complet de nos actions, qui sont (comme toujours) financées par vos dons.

dessin de Coin-coin, le canard mascotte de la campagne de Framasoft. Il est en position de karatéka
Cliquez sur Coin-Coin pour soutenir Framasoft – Illustration CC-By David Revoy

Changer le monde, un coin(coin) de web à la fois

Dessin du Datavöre, un monstre dégoulinant composé de 5 tête portant chacune un logo des GAFAM
Cliquez pour nous soutenir et aider à repousser le Datavöre – Illustration CC-By David Revoy

Rappelons que les actions de Collectivisons Internet / Convivialisons Internet (alias « Coin-coin », d’où la mascotte) complètent et s’ajoutent au maintien de nos actions historiques : services en ligne et outils logiciels, partages d’expérience, contributions et collaborations variées.

Comme nous l’exprimions l’an dernier sur ce blog, l’objectif reste le même : faire en sorte de multiplier les coins de Web éthiques, afin de reprendre du terrain sur le numérique toxique occupé par les géants du Web.

Si cet article résume très rapidement notre bilan-campagne de fin d’année, c’est pour vous donner une idée globale de ce à quoi servent vos dons. Pour les intéressé·es, nous détaillerons les actions phares de ce bilan sur ce blog, chaque mardi (si-tout-va-bien©), d’ici la fin de l’année.

Soutenir Framasoft

Framaspace, les collectifs solidaires apprivoisent ce cloud convivial

Nous l’affirmions déjà en 2022 : Framaspace est notre projet le plus ambitieux de cette nouvelle feuille de route. En effet, l’objectif est de fournir, d’ici fin 2025, jusqu’à 10 000 espaces de cloud collaboratifs, basé sur le logiciel Nextcloud, à de petits collectifs solidaires.

Les infos Framaspace que nous détaillerons la semaine du 21 novembre :

Illustration de DemonDrive, un monstre fantomatique orné du logo de Google Workspace
Cliquez pour nous soutenir et aider à repousser Demon Drive – Illustration CC-By David Revoy

  • Première année de Framaspace
    • Un besoin fort, déjà près de 700 espaces Framaspaces ouverts ;
    • …et plus encore si vous en demandez un ici pour votre collectif ;
    • des enseignements tirés de cette sortie en bêta ;
    • les premiers besoins exprimés par les bénéficiaires ;
    • des optimisations techniques, mises à jour, maintenance, etc.
  • Dans les cartons pour la suite
    • la préparation d’outils facilitant la prise en main par de nouveaux arrivants ;
    • des idées de « tuto dont vous êtes le héros » (ou « combine dont vous êtes l’héroïne » ?) ;
    • des explorations à venir : possibilité de publier des pages web, voire de gérer ses membres & sa compta…?

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PeerTube : une v6 réalisée à partir de vos idées

Voilà six ans que nous éditons ce logiciel qui, une fois installé sur un serveur, permet de créer une alternative éthique à YouTube, Twitch, Vimeo, etc.

Les possibilités techniques qu’offrent PeerTube ont un même but : permettre d’héberger et diffuser ses vidéos et ses directs, même (et surtout) lorsque l’on n’a pas l’argent de Google ni les fermes de serveurs d’Amazon.

Les fonctionnalités que nous détaillerons la semaine du 28 novembre, ont été choisies parmi vos idées :

Illustration de Videoraptor, un monstre insectoïde dont les trois têtes sont ornées des logos de YouTube, Viméo et Twitch
Cliquez pour nous soutenir et aider à repousser Videoraptor- Illustration CC-By David Revoy

  • Version 5.1 (mars 2023)
    • Modération des demandes de comptes ;
    • Retour au direct.
  • Version 5.2 (Juin 2023)
    • Gros travail sur le transcoding déportable sur un serveur distant ;
    • Visibilité des replay ;
    • Flux RSS adapté aux podcasts.
  • Version 6 (fin novembre 2023)
    • Amélioration de l’accessibilité ;
    • Prévisualisation de l’image dans la barre de progression ;
    • Chapitrage des vidéos ;
    • Téléchargement d’une nouvelle version d’une vidéo ;
    • Protection des vidéos par mot de passe ;
    • Tests de charge pour le live (publication d’un rapport à venir).

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Mobilizon, c’est la lutte version finale…

…pour Framasoft !

En effet, nous estimons qu’après 4 années de développements, nous arriverons au bout de la vision que nous avions pour Mobilizon. Une fois cette v4 sortie, nous espérons que vos groupes auront les fonctionnalités nécessaires pour s’organiser autour de vos événements, et ainsi vous émanciper de Facebook ou Meetup.

C’est pour cela que la semaine du 5 décembre, nous parlerons en détail de :

Illustration de Face Ghoûl, un monstre dégoulinant et griffu orné du logo de Facebook
Cliquez pour nous soutenir et aider à repousser Face Ghoûl – Illustration CC-By David Revoy

  • La version 3.1 (mars 2023)
    • Possibilité d’entrer une adresse non répertoriée ;
    • Outils de lutte contre le spam.
  • La version 4 (décembre 2023)
    • Import des événements depuis d’autres plateformes (MeetUp, Facebook, etc.) ;
    • Message des organisatrices d’un événement vers les participants.
  • L’avenir
    • Nous assurerons les mises à jour de sécurité ;
    • Nous maintiendrons l’instance francophone Mobilizon.fr ;
    • Il y a des projets d’évolution de Mobilizon avec des ambitions nouvelles…
    • …et de la place pour votre vision à vous !

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PeerTube (oui, encore ! mais…) en 2024 : nous misons gros sur son succès

La toxicité de YouTube, Twitch et compagnie devient de plus en plus visible… Ainsi, de plus en plus de collectifs, d’institutions et de créateurices de contenus découvrent et utilisent PeerTube. En 2023, nous avons beaucoup travaillé en interne afin de mieux accompagner ce succès naissant, et de donner toutes ses chances à PeerTube.

C’est pour quoi la semaine du 12 décembre nous parlerons précisément de :

Illustration de Yetube, un monstre de type Yéti avec le logo de YouTube Premium.
Cliquez pour nous soutenir et aider à repousser Yetube – Illustration CC-By David Revoy

  • La feuille de route vers PeerTube v7 (fin 2024)
    • Outil d’export et d’import de son compte ;
    • Audit d’accessibilité et intégration des recommandations ;
    • Outil de modération des commentaires (pour admins et vidéastes) ;
    • Outil de modération par liste de mots-clés ;
    • Séparation des flux audio et vidéo (ouvre de futures possibilités) ;
    • Ajout d’une résolution « zéro pixels » (recevoir uniquement l’audio) ;
    • Recatégorisation des contenus sensibles (plus détaillée que SFW/NSFW) ;
    • Refonte de l’espace de gestion des vidéos ;
    • Re-design de l’interface suite à un audit de l’expérience d’utilisation (UX).
  • S’investir plus encore dans PeerTube pour lui donner plus de chances d’élargir son audience, dès 2024
    • Promotion de l’écosystème PeerTube (newsletter, médias sociaux, etc.) ;
    • Travail sur une instance « vitrine » de PeerTube ;
    • Embauche d’un deuxième développeur (depuis septembre 2023) ;
      • Triple objectif : maîtriser 270 000 lignes de code, animer la contribution, mais surtout…
  • Application mobile officielle PeerTube (fin 2024)
    • Conception d’après un travail en design (enquête, maquettes, etc.) ;
    • Pour android, iOS (🤞)… et dans l’idéal AndroidTV ;
    • Première version : découvrir et regarder des vidéos (recherche, playlists, abonnements, notifications).

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Émancip’Asso : la formation, le MOOC, le site web…

Conçu en partenariat avec Animafac, le projet Émancip’Asso vise à former les hébergeurs de services à comprendre et accompagner les associations dans leur transition vers des outils web éthiques.

Un énorme travail a déjà été accompli cette année, dont nous parlerons la semaine du 19 décembre :

Illustration de Toxicloud, un monstre vaporeux et toxique avec le logo de Amazon Web Services
Cliquez pour nous soutenir et aider à repousser Toxicloud – Illustration CC-By David Revoy

  • Organisation de la formation en présentiel (janvier 2023)
  • Publication du MOOC « Développer une offre de services pour accompagner les associations dans leur transition numérique éthique », la version enrichie de la formation en présenciel à destination de toutes les personnes qui souhaitent se lancer ou s’améliorer en matière d’accompagnement.
    • MOOC en participation libre et autonome ;
    • Pour comprendre le monde associatif et ses usages numériques ;
    • Pour maîtriser les méthodes de l’accompagnement associatif ;
    • Pour concevoir une offre de services adaptée à cet écosystème et la faire connaître ;
    • Sans oublier la mise en réseau, pour mieux travailler dans la complémentarité.
  • Conception et publication du site web Émancip’Asso
    • Répertoire de prestataires pouvant accompagner les associations dans leurs démarches de transition ;
    • Espace d’entraide communautaire entre associations ;
    • Accès à des ressources complémentaires ;
  • La suite pour 2024
    • Développement du nombre d’offres d’accompagnement recensées ;
    • Campagne de promotion du dispositif auprès des associations ;
    • Animation active de la communauté.

Soutenir Framasoft

L’émancipation numérique, avec des outils concrets

Afin de finir l’année en beauté, nous comptons bien parler du travail de fond que nous poursuivons sur les outils pratiques et concrets que nous proposons.

Qu’il s’agisse des services « Dégooglisons Internet » ou de notre historique annuaire de logiciels libres ; ces outils permettent, chaque mois, à plus d’1,5 million de personnes de s’émanciper un peu plus des géants du Web et de leurs outils toxiques.

La semaine du 26 décembre, si vous avez été (pas) sages, nous annoncerons :

Illustraiton de MS Blue Scream, monstre de type blob, bleu, orné du logo de Windows
Cliquez pour nous soutenir et aider à repousser MS Blue Scream – Illustration CC-By David Revoy

    • Framalibre, l’annuaire du logiciel libre
      • Refonte complète de l’annuaire suite à des enquêtes de design ;
      • Toujours collaboratif, avec modération a priori (pour lutter contre le spam) ;
      • (sous le capot) Nouveau moteur statique, notices facilement exploitables ;
      • Interface fluide et simplifiée, adaptée aux mobiles ;
      • Recherche facilitée (barre de recherche, tags) ;
      • Recommandations de logiciels ;
      • Outil « mini sites » : créez vos pages de logiciels libres à recommander.

Illustration de Hydroffice, un monstre serpentin à cinq têtes avec des crocs, ornées des logos des outils de la Google Suite
Cliquez pour nous soutenir et aider à repousser Hydroffice – Illustration CC-By David Revoy

  • Services « Dégooglisons Internet »

    • Bientôt 10 ans d’existence !
    • Nos statistiques annuelles d’utilisation ;
    • Travail de maintenance, sauvegardes, mises à jours ;
    • Gros travail de lutte contre les spams ;
    • Succès de Framagroupes…
    • …et de la campagne de rénovation des services (on a plein d’idées !)

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Tout le travail qu’on ne pourra pas détailler en 7 semaines…

Si vous avez mis le nez dans les 94 pages de notre rapport d’activités 2022, vous vous en douterez : c’est très difficile de résumer tout ce que fait notre petite association.

Or, ce n’est pas parce que nous ne consacrerons pas une semaine pour chacun des projets suivants qu’il ne s’est rien passé…

Voici donc ce que nous n’aurons pas le temps de détailler d’ici la fin de l’année :

  • Collectif CHATONS (hébergeurs de services web éthiques)
    • Déjà 6 ans que Framasoft consacre du temps salarié à animer le collectif ;
    • Organisation du camp CHATONS (août 2023) ;
    • C’est notre dernière année de coordination du collectif ;
    • Gros travail de transmission et d’accompagnement ;
    • Des débats internes auto-gérés ont déjà eu lieu ;
    • Framasoft reste membre du collectif, en le laissant s’autonomiser.
  • ECHO Network (projet européen d’échanges sur l’accompagnement au numérique éthique des citoyen·nes)
    • Co-organisation du séminaire d’ouverture à Paris (Janvier 2023) ;
    • Visite d’étude de Berlin (mars 2023) ;
    • Visite d’étude de Bruxelles (juin 2023) ;
    • Visite d’étude de Rome (septembre 2023) ;
    • Visite d’étude de Zagreb prévue pour début décembre 2023 ;
    • En 2024, mise en Communs des expériences partagées, dans des outils pratiques.
  • Peer.Tube (vitrine de contenus de qualité diffusés sur PeerTube)
    • Priorisation du développement de PeerTube en 2023 ;
    • Travail prévu pour 2024 (promotions de contenus, instance vitrine, communauté de curation…).

Soutenir Framasoft

Dessin dans le style d'un jeu vidéo de combat, où s'affronte un canard karatéka et un monstre affublé des logos des GAFAM.
« Coin-Coin VS Datavöre » – Illustration CC-By David Revoy

Sept semaines pour nous aider à boucler notre budget 2024

Si Framasoft peut employer non plus 10, mais désormais 11 personnes, louer près de 57 serveurs, se déplacer dans toute la France (et au delà), et élever dans les communs numériques tout ce qu’elle fait… C’est, encore et toujours, grâce à vos dons.

Vos dons sont, et restent, notre principale source de financement et celle qui nous permet d’agir librement, en toute indépendance. L’association Framasoft étant reconnue d’intérêt général, un don à Framasoft de 100 €, peut revenir à 34 € après déductions fiscales (pour les contribuables français·es).

Cette année encore, nous avons besoin de vous, de votre soutien, de vos partages, pour nous aider à reprendre du terrain sur le Web toxique des GAFAM, et multiplier les espaces de numérique éthique.

Nous avons donc demandé à David Revoy de nous aider à montrer cela sur notre site « Soutenir Framasoft« , qu’on vous invite à visiter (parce que c’est beau) et surtout à partager le plus largement possible :

Cliquez pour nous soutenir – Illustration CC-By David Revoy

Si nous voulons boucler notre budget pour 2024, il nous reste sept semaines pour récolter 200 000 € : nous n’y arriverons pas sans votre aide !

Soutenir Framasoft

Nous espérons, sincèrement, que ce bilan et ces perspectives vous enthousiasmeront, et (si vous le pouvez), vous rendront fier·es de soutenir Framasoft.




Opposez-vous à Chat Control !

Sur ce blog, nous transposons régulièrement différents points de vue concernant les luttes pour les libertés numériques. Dans ce domaine, on constate souvent que les mouvements sociaux (solidariste, durabilistes, préfiguratifs, etc.) ne prennent que trop rarement en compte les implications directes sur leurs propres luttes que peuvent avoir les outils de surveillance des États et des entreprises monopolistes. Cela rend toujours plus nécessaire une éducation populaire d’auto-défense numérique… Du côté des mouvements autonomes et anti-autoritaires, on ressent peu ou prou les mêmes choses. Dans les groupes européens, le sujet du capitalisme de surveillance est trop peu pris en compte. C’est du moins l’avis du groupe allemand Autonomie und Solidarität qui, à l’occasion du travail en cours au Parlement Européen sur l’effrayant et imminent projet Chat Control (voir ici ou ), propose un appel général à la résistance. L’heure est grave face à un tel projet autoritaire (totalitaire !) de surveillance de masse.

Cet appel a été publié originellement en allemand sur Kontrapolis et en anglais sur Indymedia. (Trad. Fr. par Framatophe).

Opposez-vous à Chat Control !

Une minute s’il vous plaît ! Chat Control ? C’est quoi ? Et pourquoi cela devrait-il nous intéresser en tant qu’autonomes et anti-autoritaires ?

Chat Control est le projet de règlement de l’Union Européenne portant sur la prévention et la protection des enfants contre les abus sexuels. Il a été reporté pour le moment, mais il risque d’être adopté prochainement1.

Ce projet de loi est une affaire assez grave pour plusieurs raisons2.

Avec Chat Control, les autorités publiques seront autorisées à scanner, analyser et lire automatiquement les contenus des communications privées en ligne de tous les utilisateur·ices. Cela se fera via une contrainte sur les fournisseurs de chat tels que Signal, Threema, Telegram, Skype, etc.3, soit par ce qu’on appelle une analyse côté client (Client Side Scanning). Les messages et les images seraient alors lus directement sur les terminaux ou les dispositifs de stockage des utilisateur·ices. Et cela avant même qu’ils soient envoyés sous format chiffré ou après leur réception, une fois déchiffrés.

C’est précisément ce que l’UE souhaite atteindre, entre autres, avec Chat Control : rendre les communications chiffrées inutiles. Les services de renseignement, les ministères de l’Intérieur, les autorités policières, les groupes d’intérêts privés et autres profiteurs du capitalisme de surveillance, ont en effet depuis longtemps du mal à accepter que les gens puissent communiquer de manière chiffrée, anonyme et sans être lus par des tiers indésirables.

Pourtant, la communication chiffrée est très importante. Face aux répressions de l’État, elle peut protéger les millitants, les opposant·es et les minorités. Elle sert aussi à protéger les sources et les lanceur·euses d’alerte, et rendre également plus difficile la collecte de données par les entreprises.

Comme si l’intention d’interdire ou de fragiliser le chiffrement n’était pas déjà assez grave, il y a encore pas mal d’autres choses qui nous inquiètent sérieusement avec Chat Control. Ainsi, l’introduction de systèmes de blocage réseau4 est également en discussion. Plus grave encore, l’obligation de vérifier l’âge et donc de s’identifier en ligne. Cela aussi fait explicitement partie du projet. Il s’agira de faire en sorte que l’accès à certains sites web, l’accès aux contenus limités selon l’âge, l’utilisation et le téléchargement de certaines applications comme Messenger, ne soient possibles qu’avec une identification, par exemple avec une carte d’identité électronique ou une identité numérique.

Voici l’accomplissement du vieux rêve de tou·tes les Ministres de l’Intérieur et autres autoritaires du même acabit. L’obligation d’utiliser des vrais noms sur Internet et la « neutralisation » des VPN5, TOR et autres services favorisant l’anonymat figurent depuis longtemps sur leurs listes de vœux. Et ne négligeons pas non plus la joie des grands groupes de pouvoir à l’avenir identifier clairement les utilisateur·ices. L’UE se met volontiers à leur service6. Tout comme le gouvernement allemand, Nancy Faser en tête, qui se distingue par ailleurs avec une politique populiste et autoritaire de droite.

Le « tchat controle » n’est pas la première tentative mais une nouvelle, beaucoup plus vaste, d’imposer la surveillance de masse et la désanonymisation totale d’Internet. Et elle a malheureusement de grandes chances de réussir car la Commission Européenne et la majorité du Parlement, ainsi que le Conseil, les gouvernements et les ministères de l’Intérieur de tous les États membres y travaillent. Et ils voudraient même des mesures encore plus dures comme étendre ce projet au scan de nos messages audios au lieu de scanner « seulement » nos communications textuelles7.

Dans le discours manipulateur, il existe déjà des « propositions de compromis » avec lesquelles les États autoritaires souhaitent faire changer d’avis les critiques. Il s’agirait dans un premier temps, de limiter le type de contenus que les fournisseurs devront chercher, jusqu’à ce que les possibilités techniques évoluent. La surveillance du chiffrement devrait tout de même avoir lieu. Il est évident que ce n’est qu’une tentative pour maquiller les problèmes8.

Comme toujours, la justification est particulièrement fallacieuse ! On connaît la chanson : la « lutte contre le terrorisme », les « copies pirates », les drogues, les armes etc. sont des constructions argumentaires par les politiques pour faire accepter des projets autoritaires et pour en discréditer toute résistance dans l’opinion publique. Il n’en va pas autrement pour Chat Control. Cette fois-ci, l’UE a même opté pour un classique : la prétendue « protection des enfants et des adolescents » et la lutte contre l’exposition des mineurs aux contenus pornographiques. Qui voudrait s’y opposer ?

Stop Chat Control. Image librement inspirée de International-protest (Wikimedia)

Pourtant, même des experts, provenant notamment d’associations de protection de l’enfance, affirment que Chat Control ne protégera pas les enfants et les adolescents9. En effet, il permettra également de surveiller leurs communications confidentielles. Le projet peut même conduire tout droit à ce que des agents des autorités aient accès aux photos de nus et aux données confidentielles que des mineurs s’envoient entre eux… Et ils pourront ensuite faire n’importe quoi avec. Le risque de faux positifs à cause de l’emploi de l’IA est également très important. Les gens pourraient avoir de gros problèmes à cause d’une erreur technique. Mais l’UE ne s’en soucie pas car la protection des mineurs n’est pas le sujet ici.

Les domaines d’application ont déjà été élargis entre-temps… Drogues, migration, etc. Tout doit être étroitement surveillé. Quelle sera la prochaine étape ? Une application contre les extrémistes politiques identifiés comme tels ?

Et puis, il y a aussi la très probable question de « l’extension des objectifs ». Nous connaissons déjà suffisamment d’autres lois et mesures étatiques. Elles sont souvent introduites pour des raisons d’urgence. Ensuite, elles sont constamment étendues, différées, puis soudain elles sont utilisées à des fins totalement différentes par les flics et les services de renseignement, selon leur humeur. L’extension de Chat Control se prête bien à ce jeu. Les premières demandes ont déjà été formulées10.

Dans une Europe où : il y a des interdictions de manifester11 et des détentions préventives, des perquisitions pour des commentaires sur les « quéquettes »12, des liens vers Linksunten/Indymedia13 ou des graffitis14, où des enquêtes par les services de renseignement pour adbusting dans l’armée allemande, ou bien des avis de recherche pour « séjour illégal » sont monnaie courante, dans une Europe où les ultraconservateurs occupent des postes de pouvoir, appellent à l’interdiction de l’avortement et à la lutte contre les personnes queer et réfugiées15, où des structures d’extrême-droite existent dans les administrations et la police16, dans cette Europe, une infrastructure de surveillance comme Chat Control, avec interdiction du chiffrement et permis de lecture de l’État sur tous les appareils, a de graves conséquences pour la liberté de tous les êtres humains17.

Des lois et des avancées similaires, la surveillance biométrique de masse18, l’utilisation d’IA à cet égard comme à Hambourg19, les identités numériques20, le scoring21, la police prédictive22, et ainsi de suite sont en cours de développement ou sont déjà devenus des réalités… tout cela crée une infrastructure totale, centralisée et panoptique qui permet d’exercer un énorme pouvoir et une répression contre nous tous.

En tant qu’antiautoritaires, nous devrions nous défendre, attirer l’attention et faire connaître ce sujet en dehors de l’activisme numérique germanophone ! Nous appelons donc à protester et à résister contre Chat Control. Les alliances existantes comme Stop Chat Control23 pourraient être complétées par une critique autonome24. D’autres actions de protestation peuvent être imaginées, il n’y a pas de limites à la créativité. Les objectifs de telles actions de protestation pourraient éventuellement découler de la thématique…

Les anti-autoritaires résistent à Chat Control !

Nous apprécions les suggestions, les questions, les critiques et, dans le pire des cas, les louanges, et surtout la résistance !



  1. “Zeitplan für Chatkontrolle ist vorerst geplatzt”, Netzpolitik.org, 20/09/2023. (NdT –) Il s’agit du règlement CSAR, également appelé Chat Control. La Quadrature du Net en a fait une présentation.↩︎
  2. “EU-Gesetzgebung einfach erklärt” Netzpolitik.org, 28/06/2023, “Das EU-Überwachungsmonster kommt wirklich, wenn wir nichts dagegen tun”, Netzpolitik.org, 11/05/2022 ;ChatKontrolle Stoppen ; “Kennen wir ansonsten nur aus autoritären Staaten”, Süddeutsche Zeitung, 10/08/2022.↩︎
  3. “NetzDG-Bußgeld: Justizminister Buschmann will Telegram mit Trick beikommen”, Heise Online, 28/01/2022.↩︎
  4. “Die Rückkehr der Netzsperren”, Netzpolitik.org, 11/03/2021.↩︎
  5. “Online-Ausweis und VPN-Verbot: Streit über Anonymität im Netz kocht wieder hoch”, Heise Online, 08/10/2023.↩︎
  6. “EU-Ausschuss will Chatkontrolle kräftig stutzen”, Netzpolitik.org, 15/02/2023.↩︎
  7. “Live-Überwachung: Mehrheit der EU-Staaten drängt auf Audio-Chatkontrolle”, Heise Online, 17/05/2023.↩︎
  8. “Ratspräsidentschaft hält an Chatkontrolle fest”, Netzpolitik.org, 12/10/2023.↩︎
  9. “Immer wieder Vorratsdatenspeicherung”, Netzpolitik.org, 23/06/23.↩︎
  10. “https://netzpolitik.org/2023/ueberwachung-politiker-fordern-ausweitung-der-chatkontrolle-auf-andere-inhalte/”, Netzpolitik.org, 06/10/2023.↩︎
  11. “Noch mehr Macht für Beamte ist brandgefährlich”, nd Jounralismus von Links, 13/09/2021 ; “Amnesty sieht Versammlungsfreiheit in Deutschland erstmals eingeschränkt – auch in NRW”, Westdeutscher Rundfunk, 20/09/2023.↩︎
  12. “Unterhalb der Schwelle”, TAZ, 08/08/2022.↩︎
  13. “Die Suche nach einer verbotenen Vereinigung”, Netzpolitik.org, 03/08/2023.↩︎
  14. “Linksextreme Gruppen in Nürnberg: Polizei durchsucht mehrere Wohnungen”, Nordbayern, 11/10/2023.↩︎
  15. “Sehnsucht nach dem Regenbogen-Monster”, TAZ, 28/07/2023.↩︎
  16. “Das Ende eines Whistleblowers”, TAZ, 01/10/2019.↩︎
  17. “Chatkontrolle: Mit Grundrechten unvereinbar”, Gesellschaft für Freiheitsrechte ; “Sie betrifft die Rechte aller Internetnutzer”, Junge Welt, 15/09/2023.↩︎
  18. “Polizei verdoppelt Zahl identifizierter Personen jährlich”, Netzpolitik.org, 03/06/2021 ; “Mehr Kameras an Bahnhöfen”, DeutschlandFunk, 22/12/2014 ; “Polizei bildet Hunderte Drohnenpiloten aus”, nd Jounralismus von Links, 04/01/2023.↩︎
  19. “Polizei Hamburg will ab Juli Verhalten automatisch scannen”, Netzpolitik.org, 19/06/2023.↩︎
  20. “Digitale Identität aller Menschen – Fortschritt oder globale Überwachung?”, SWR, 28/08/2022.↩︎
  21. “Punkte für das Karmakonto”, Jungle.World, 25/05/2022.↩︎
  22. “Überwachung: Interpol baut Big-Data-System Insight für”vorhersagende Analysen”, Heise Online, 24/09/2023.↩︎
  23. “Chatkontrolle-Bündnis fordert Bundesregierung zum Nein auf”, Netzpolitik.org, 18/09/2023 ; “Unser Bündnis gegen die Chatkontrolle”, Digital Courage, 12/10/2022 ; Chatkontrolle Stoppen, Digital Gesellschaft ; “Aufruf Chatkontrolle stoppen”, Digital Courage, 10/10/2022.↩︎
  24. “Statement zum EU-Verschlüsselungsverbot / Chatdurchleuchtungspflicht”, Enough 14, 15/05/2022.↩︎



Brussels,june 2023 : Diary of the second ECHO Network study visit

 

As a reminder, the participants in the ECHO Network exchange come from 7 different organisations in 5 European countries: Ceméa France, Ceméa Federzione Italia, Ceméa Belgium, Willi Eichler Academy (Germany), Solidar Foundation (European network), Centar Za Mirovne Studije (Croatia), Framasoft (France).

 

Report on the week in Brussels.

 

Cliquez ici pour lire l’article en français.

 

Brussels’ Grand Place under the sun

TLDR (too long, I didn’t read it): It was just too much fun! You can feel that the bonds between participants are getting stronger, and that the methods of popular/permanent/active/new education (place the term of your choice before education) are bearing fruit!

 

That week, from June 12 to 17, 2023, Brussels was bathed in sunshine.

A crosswalk in LGBT+ colors leading to parliament.

We were two Framasoft members: Fred and Booteille.

In ECHO Network meetings, Mondays and Fridays are dedicated to travel, since the various people are more or less far from the meeting place.

But our Belgian pals had planned a debate evening for Monday evening, so we had to arrive not too late.

Luckily, we both had trains that allowed us to arrive around noon, so we met up at the Gare du… Midi and set off together to explore the city center of the European capital in search of our hotel.

 

Smurf ceiling in Brussels. Comics are everywhere.

 

Once we’d packed up, we took a quick stroll to find a place to eat.

Brussels is a great city, where you can go from an upmarket district to a working-class one just by crossing the street. I’m sure that’s true elsewhere, but it struck us. Fred’s tip: if you want to be offered something to smoke, walk around with a guy who looks like Bob Marley.

After that, Fred wandered off while Booteille recuperated from his three nights of 3-4h in a row (he’d just come from another association’s AGM and a few parties).

So we met up directly at the DK workshop, a very nice association bar, where we were going to discuss what Framasoft is with a few dozen members of the public. The invitation had been extended by Tactic (which supports and hosts ethical digital services) and Neutrinet (a Belgian non-profit ISP); Tactic being one of the Belgian partners who co-organized some of the activities during our stay in Brussels.

The time, the people and the place were really nice. We were made to feel very welcome, and it was a pleasure to be with so many allies we didn’t know.

A journalist was at the party for a documentary he’s preparing on privacy. He wants to sell it to RTBF. He took video captures of the discussion.

Gerben, who works for NLnet, was there. NLNet is a foundation that funds a lot of digital projects that contribute to improving our society. PeerTube is one of these projects.

On the first evening, we had a meal downtown with the ECHO partners. For Booteille, who was bursting with fatigue, it was particularly difficult to start exchanging in English that evening.

 

On Tuesday, we kicked off the first day of activities at Maxima, a very nice third-party association.

Everyone had arrived, despite a few people’s transport problems. There were members of Solidar Foundation, CÉMÉA Italy, CÉMÉA France, Willi Eichler Akademy, La Ligue des Familles in Belgium, Tactic, Framasoft…

It’s important to note that the theme of the week was « active education practices to raise awareness of ethical tools ».

So we started by doing some activities to get us into the spirit of the week, to start building links between participants, based – as will be the case for almost all activities – on active/permanent/popular/new education methods; choose your favorite term among these. While not everyone agreed on the name (and some didn’t necessarily mean the same thing as others), everyone validated their interest, and that’s the important thing!

Next, we got into groups to discuss what we thought active education and popular education were and were not. We had to draw our interpretations on panels. In a few years’ time, our work may be found again, and the world may mistake it for a painting by Leonardo da Vinci. Expect the foundations of what we call « art » to change after that. There will have been a before and an after. 🙂

After the small-group discussions, we watched a video on Joseph Jacotot, « Peut-on enseigner sans savoir? » (Can we teach without knowing?).

We then presented our panels and had a large-group discussion.

 

In the afternoon, we did an activity based on key digital figures: money, quantity of data, pollution, place the figures given opposite the right question. Not an easy task, even for geeks. Quite a few people made corrections to the figures given after the activity, as the cards were three or four years old. This highlighted the speed at which digital technology is evolving, which is quite staggering.

Then we had a meeting with people from Code du Numérique. An ultra-cool project. They are working to build coherent legislative proposals to put to elected representatives – particularly on issues of inclusion. These proposals are developed through workshops with a wide range of people, both those who are comfortable with digital technology and those who are not. You don’t like legal issues: go and talk to these people!

There are some great videos on their website, which we recommend!

We also suggested that they be interviewed on the Framablog, because we were so enthusiastic about it.

The day ended with a review of the activities carried out. As always with popular education, you get the impression that the hours have just flown by and that you haven’t made any effort, but when you look back you realise how rich the exchanges have been and how much work has been done.

We then went for a drink and a bite to eat with some of the group. And to answer the question on your lips, yes, some people had chips!

The next day, we had a date at another venue, the PianoFabriek, in Saint-Gilles.

We had a beautiful (dance) hall with an outdoor area.

In the morning, Cécile and Annie, from the Ligue des Familles, suggested « the hidden side of clicking » as a theme, where we would discuss the attention economy.

But before that, we played a little presentation game, where each pair had to find something in common that the others didn’t have. Contrary to what you might think, many people have been on roadtrips to Spain and would like to listen to opera.

Annie and Cécile then asked us to answer 12 yes or no questions. These 12 statements are designed to help identify an addiction (see an example here) and have been adapted for use with smartphones. For example: « I feel nervous or anxious if I’ve left my smartphone at home ».

Several people in the group were a little « shocked » by the results of their answers.

Answering two (2!) of the statements with « yes » underlines addictive behaviour. Suffice it to say that the geeks have hit the roof.

 

 

 

In Belgium, Fred’s addiction to Speculoos is reawakening.

 

We then watched the Dopamine episode on Facebook, which many people were just discovering, and discussed it with our respective small groups.

The next activity was cognitive bias bingo. The names of several biases and their descriptions were posted around the room, and a randomly selected pair of us were asked to write down the name of the bias for each description on an index card.

After this activity, we discovered Ardoino’s grid in which we had to place, first on our own and then with our groups, solutions to the problems raised by digital technology.

Were these solutions of an individual, interpersonal, group, organizational or institutional nature? Let’s think about it!

The aim was to highlight the fact that many impactful actions are not just individual matters (you know, peeing, showering, etc.).

We ended our activities at PianoFabriek with a moving debate.

Individually, we wrote answers to « For me, active pedagogy is… » and « For me, active pedagogy is not… » on sticky notes.

 

After which, Alain, from CÉMÉA Belgium (who co-hosted most of the week with Sarah, also from CÉMÉA Belgium), chose a few answers and had us move around the space to indicate « I agree » or « I disagree ».

Once positioned, we were able to speak up and discuss the reasons for our position. At any moment, we could change our position, physically showing the evolution of our thinking.

We really enjoyed this form of debate.

Incidentally, we haven’t noted it yet, but it’s important to know that we mainly exchanged ideas in English, and translated into English what people who spoke in French were saying. Most people seemed to understand enough English not to translate systematically from English into French, and would indicate when there was a need for translation in that direction.

The translation work was a considerable effort, but for the people in charge of the animation, it was even more exhausting. At the ECHO Network session in Paris, those able to express themselves in English had formed a group which spent the whole week exchanging in that language. In Brussels, this was not possible. European project, European constraints!

After the PianoFabriek, we joined members of EDRI and Technopolice Brussels for an exploratory walk in public spaces (notably the Gare du Midi) in search of CCTV cameras.

 

These two people helped us to better understand the thinking behind the installation of cameras: « Which locations with which lenses? » In the Gare du Midi, for example, each door is necessarily equipped with a dedicated camera. There’s also a camera in front of every staircase leading up to the platforms, so that faces can be clearly identified. Not to mention the store, where a camera is also pointed… at the cashier’s hands!

We noticed that there are far more cameras in the poorer neighborhoods (including Molenbeek-Saint-Jean)  than in the richer ones. One fact that impressed us: a camera was located in front of a subway station in a working-class neighborhood. Residents didn’t like it, and it was damaged. Another camera was placed much further down the street, but it monitored the same subway exit. These cameras have an impressive zoom capability.

The cost of installing a camera is estimated at €20,000, and cities are installing hundreds of them, although their effectiveness in combating crime has not been proven in the slightest.

 

The premises of the Belgian Cyber Security Center are packed with surveillance cameras. No, nothing. All is well.

 

 

Ha, I think it’s time to ask this but… HOW IS IT THAT IN BRUSSELS YOU HAVE TO PAY FOR BOTTLED WATER IN ALL RESTAURANTS! NO FREE TAP WATER! JUST WATER! RAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH! LET’S BURN CAPITALISM!

 

 

 

A poster « Are you a communist? Join us! » we came across while wandering around Brussels.

Sorry for the outburst, it’s okay now.

For the last day, we were back at Maxima, where a number of digital, image (video) and radio players presented their projects to us, including RadioPanik, a free radio station (which makes fascinating impossible programs) and ZinTV, an organization close to social movements.

After the presentation of their projects, we had a large-group discussion on the difficulties of migrating to open-source solutions for certain structures.

During the day, we had to join either ZinTV to learn how to make video recordings, or RadioPanik to learn how to make radio.

We learned how an ultra-light portable radio transmitter works, or how to use OBS to broadcast live TV.

At the end of the day, there was a PeerTube presentation from someone who learned a little late that she had to do it, poor thing. Luckily, Booteille was on hand to answer any questions.

After that, the ECHO Network core group and I took stock of the week.

The results were really positive. The partners who didn’t really see the value of popular education methods during the first session in Paris are now convinced. The links between the different members and structures were further strengthened.

We had the feeling that we were really starting to form a body, a real group, and that we were all really moving in the same direction, which for a pan-European project like this is really motivating.

In the evening, before dinner, we attended a conference on Tyler Reigeluth‘s book, « The Intelligence of Cities, Critique of Endless Transparency ».

Before the conference, Booteille spoke on behalf of Framasoft alongside Morgane (co-organizer of the ECHO project, member of CÉMÉA France), Sarah (who was co-organizing the trip to Belgium) and Célo (member of Tactic and Neutrinet, who played an important part in organizing the activities), into the microphone of RadioPanik, which was broadcasting live.

We gave a brief presentation of our structures and the ECHO Network project.

The conference then got under way, and to be honest, we weren’t very good at it. Our ECHO Network accomplices, who had learned how to make radio and TV that very afternoon, were broadcasting the conference over the airwaves, and we couldn’t help but give them a helping hand. The PeerTube streaming of the rebroadcast had a problem, and Booteille had to get his hands dirty (Booteille’s note: In truth, they managed just fine without me, haha!).

Right after the conference, we went out to eat, drink and chat until late.

Antonio, our Croatian colleague (from Center for Peace Studies), hosted the evening. He’ll be part of the host team in Zagreb, and he’s quite a character!

 

Ce graffiti « Montrez-moi le budget » près de la Gare du Midi est la preuve indiscutable que pyg est passé à Bruxelles.

 

This « Show Me The Budget » graffiti near the Gare du Midi is indisputable proof that pyg has been to Brussels.




Bruxelles, juin 2023 : journal de bord de la deuxième visite d’études d’ECHO Network

Pour rappel, les participant⋅es à l’échange européen ECHO Network font partie de 7 organisations différentes dans 5 pays d’Europe : Ceméa France, Ceméa Federzione Italia, Ceméa Belgique, Willi Eichler Academy (Allemagne), Solidar Foundation (réseau européen), Centar Za Mirovne Studije (Croatie), Framasoft (France).

 

Compte-rendu de la semaine à Bruxelles.

 

Click here to read the article in English.

 

La Grand Place de Bruxelles sous le soleil

 

 

TLDR (trop long, j’pas lu): C’était vraiment trop chouette ! On sent que les liens entre les participant·es se renforcent et que les méthodes d’éducation populaire/permanente/active/nouvelle (placez le terme de votre choix après éducation) portent leurs fruits !

 

Cette semaine-là, celle du 12 au 17 juin 2023, Bruxelles était écrasée de soleil.

Un passage piéton aux couleurs LGBT+ qui mène au parlement.

 

Nous étions deux membres de Framasoft à partir : Fred et Booteille.

Dans les rencontres ECHO Network, les lundis et les vendredis sont dédiés aux trajets, puisque les différentes personnes sont plus ou moins loin du lieu de rendez-vous.

Mais les potes Belges nous avaient prévu une soirée débat le lundi soir, il nous fallait donc arriver pas trop tard.

Par chance, nous avions tous deux des trains qui nous permettaient d’arriver aux alentours de midi, donc nous nous sommes retrouvés à la gare du… Midi et sommes allés, ensemble, explorer le centre-ville de la capitale européenne à la recherche de notre hôtel.

Plafond Schtroumpf dans Bruxelles. La BD est partout.

Une fois les affaires déposées, on s’est baladé vite fait pour trouver un coin où manger.

Bruxelles est une ville formidable, où on passe d’un quartier huppé à un quartier populaire en traversant la rue. Ça doit être vrai ailleurs, mais ça nous a frappés. Astuce de Fred : si vous voulez qu’on vous propose de quoi fumer, promenez-vous avec un type qui ressemble à Bob Marley.

Après quoi Fred s’est baladé pendant que Booteille récupérait de ses trois nuits de 3-4h d’affilée (il sortait de l’AG d’une autre association et de quelques soirées).

Nous nous sommes donc rejoints directement à l’atelier DK, un bar associatif très chouette, où nous allions discuter de ce qu’est Framasoft avec quelques dizaines de personnes du public. L’invitation avait été faite par Tactic (qui fait de l’accompagnement et de l’hébergement de services numériques éthiques) et Neutrinet (un FAI associatif belge) ; Tactic étant un des partenaires belges ayant co-organisé certaines activités du séjour bruxellois.

Le moment, le public et le lieu étaient vraiment sympathiques. Nous avons été super bien accueillis et ça faisait plaisir d’être avec autant d’allié·es que nous ne connaissions pas.

Un journaliste était présent à la soirée pour un documentaire qu’il prépare sur la vie privée. Il souhaite le vendre à RTBF. Il a pris des captures vidéos de la discussion.

Gerben, qui travaille pour NLnet, était venu. NLNet est une fondation qui finance pas mal de projets numériques qui contribuent à améliorer notre société. PeerTube est un de ces projets.

Le premier soir, on a fait un repas en centre-ville avec les partenaires d’ECHO. Pour Booteille, qui était explosé de fatigue, c’était particulièrement difficile de commencer à échanger en anglais dès ce soir là.

Mardi, on a démarré la première journée d’activités à Maxima, un tiers lieu associatif très chouette.

Tout le monde était arrivé, modulo les soucis de transports de quelques personnes. On comptait des membres de Solidar Foundation, Les CÉMÉA Italie, Les CÉMÉA France, la Willi Eichler Akademy, La Ligue des Familles en Belgique, Tactic, Framasoft…

Il est important de noter que la thématique de la semaine était « pratiques d’éducation active pour sensibiliser aux outils éthiques ».

Nous avons donc commencé par faire des activités permettant de nous mettre dans l’esprit de la semaine, de commencer à construire du lien entre les participant·es, en s’appuyant, comme ce sera le cas pour presque toutes les activités, sur des méthodes d’éducation active/permanente/populaire/nouvelle ; choisissez votre terme préféré parmi ceux-ci. Si tout le monde n’est pas raccord sur le nom (et que certains ne signifient pas forcément la même chose que d’autres), tout le monde valide leur intérêt, et c’est bien ça l’important !

Ensuite, nous nous sommes mis en groupe pour discuter de ce que nous pensons être ou ne pas être l’éducation active et l’éducation populaire. Nous devions dessiner sur des panneaux nos interprétations. Dans quelques années on risque de retrouver nos œuvres et le monde risque de le confondre avec une peinture de Léonard de Vinci. Attendez-vous à ce que les fondements de ce qu’on appelle « art » changent après ça. Il y aura eu un avant et un après. 🙂

Après les échanges en petits groupes, on a regardé une vidéo sur Joseph Jacotot « Peut-on enseigner sans savoir ? ».

Suite à quoi nous avons présenté nos panneaux et eu un échange en grand groupe.

L’après-midi, nous avons fait une activité autour des chiffres clés du numérique : pognon, quantité de données, pollution, placez les chiffres donnés en face de la bonne question. Pas évident, même pour des geeks. Pas mal de personnes ont apporté des corrections aux chiffres donnés après l’activité, car les fiches dataient d’il y a trois ou quatre ans. Ça a permis de souligner la vitesse à laquelle le numérique évolue, ce qui est assez effarant.

Ensuite, on a eu une rencontre avec des personnes du Code du Numérique. Un projet ultra-chouette. Iels travaillent à construire des propositions de loi cohérentes à proposer aux élu·es — notamment sur les questions d’inclusion. Ces propositions sont pensées à l’aide d’ateliers avec plein de gens, à l’aise avec le numérique ou non. Vous n’aimez pas les questions juridiques : allez discuter avec ces gens là !

Il y a des vidéos sur leur site web qui sont formidables, nous vous les recommandons !

Nous leur avons proposé une interview dans le Framablog, tellement ça nous a passionnés.

La journée s’est terminée après un bilan sur les activités réalisées. Comme toujours avec l’éducation populaire, on a l’impression que les heures ont coulé toutes seules et qu’on n’a pas fourni d’effort, mais quand on regarde dans le rétro on se rend compte de la richesse des échanges et de la quantité de boulot qui a été abattue.

Nous sommes ensuite allés boire un verre puis manger avec une partie du groupe. Et pour répondre à la question qui vous brûle les lèvres, oui, des personnes ont pris des frites !

Le lendemain, nous avions rendez-vous dans un autre lieu, le PianoFabriek, à Saint-Gilles.

Nous avions une très belle salle (de danse) avec un extérieur.

Le matin, Cécile et Annie, de la Ligue des Familles, nous ont proposé comme thématique « la face cachée du clic », où nous discuterons économie de l’attention.

Mais avant ça, nous avons fait un petit jeu de présentations où par binôme, nous devions trouver un point commun que les autres n’auraient pas. Figurez-vous que contrairement à ce que l’on pourrait penser, beaucoup de personnes ont fait des roadtrips en Espagne et aimeraient écouter de l’opéra.

Ensuite, Annie et Cécile nous ont fait répondre à 12 affirmations par oui ou par non. Ce sont douze affirmations qui permettent d’aider à identifier une addiction (un exemple ici) et qui ont été adaptées pour l’usage des smartphones. Par exemple : « Je me sens fébrile ou angoissé·e si j’ai oublié mon smartphone à la maison ».

Plusieurs personnes dans le groupe étaient un peu « choquées » par le résultat de leurs réponses.

En effet… Répondre à deux (2 !) des affirmations par « oui » souligne un comportement addictif. Autant vous dire que les geeks ont crevé le plafond.

 

En Belgique l’addiction de Fred pour les Spéculoos se réveille.

 

Ensuite, on a regardé l’épisode de Dopamine consacré à Facebook, que plusieurs personnes découvraient et nous en avons par la suite discuté avec nos petits groupes respectifs.

La prochaine activité était un bingo des biais cognitifs. Le nom de plusieurs biais et leur description étaient affichés sur l’ensemble de la salle et, avec un binôme choisi aléatoirement, nous devions, sur une fiche, indiquer le nom du biais pour chaque description proposée.

Après cette activité, nous avons découvert la grille d’Ardoino dans laquelle nous devions y placer, d’abord en solo puis avec nos groupes, les solutions aux problématiques soulevées par le numérique.

Est-ce que ces solutions relevaient de l’ordre de l’individuel, de l’interpersonnel, du groupe, de l’organisationnel ou des institutions ? À nous d’y réfléchir !

Le but était de souligner que beaucoup d’actions impactantes relèvent d’autres choses que de l’individuel. (Vous savez, le pipi, la douche, toussa toussa…)

On a terminé les activités au PianoFabriek avec un débat mouvant.

Individuellement, nous avons écrit sur des papillons repositionnables des réponses à « Pour moi, les pédagogies actives c’est… » et « Pour moi, les pédagogies actives ce n’est pas… ».

Après quoi, Alain, des CÉMÉA Belgique (qui a co-animé avec Sarah, des CÉMÉA Belgique aussi, la majeure partie de la semaine), a choisi quelques réponses et nous a fait nous déplacer dans l’espace pour indiquer « Je suis d’accord » ou « Je ne suis pas d’accord ».

Une fois positionnés, nous pouvions prendre la parole et échanger sur les raisons de notre positionnement. À tout moment, nous pouvions changer de position, montrant physiquement l’évolution de notre réflexion.

Nous avons beaucoup aimé cette forme de débat.

D’ailleurs, nous ne l’avons pas encore noté mais il est important de savoir que nous échangions principalement en anglais et traduisions, en anglais, les propos des personnes qui s’exprimaient en français. La plupart des gens semblaient comprendre suffisamment l’anglais pour ne pas traduire systématiquement de l’anglais vers le français et indiquaient quand il y a un besoin de traduction dans ce sens.

Le travail de traduction représentait mine de rien un effort considérable mais autant dire que pour les responsables de l’animation, c’était encore plus épuisant. Lors de la session ECHO Network à Paris les personnes capables de s’exprimer en anglais avaient formé un groupe qui avait passé la semaine entière à échanger dans cette langue. À Bruxelles ce n’était pas possible. À projet européen, contraintes européennes !

Après le PianoFabriek, nous avons rejoint des membres d’EDRI et de Technopolice Bruxelles, pour faire une ballade exploratoire dans l’espace public (et notamment la gare du Midi) à la recherche de caméras de vidéosurveillance.

Ces deux personnes nous ont permis de mieux comprendre la réflexion dans la pose des caméras : « Quels lieux avec quels objectifs ? » Dans la gare du Midi, par exemple, chaque porte a forcément une caméra dédiée. Une caméra est aussi placée devant chaque escalier montant aux quais de manière à pouvoir bien identifier les visages. Sans parler de la boutique où une caméra est aussi pointée… sur les mains du caissier !

Nous avons pu constater qu’il y a beaucoup plus de caméras dans les quartiers pauvres (notamment Molenbeek-Saint-Jean) que dans les riches. Un fait qui nous a impressionnés : une caméra était située devant la station de métro d’un quartier populaire. Les habitants n’ont pas apprécié et elle a été endommagée. Une autre caméra a été placée beaucoup plus loin dans la rue, mais elle surveille la même sortie de métro. On se rend compte que ces caméras ont une impressionnante capacité de zoom.

On estime à 20 000 € le prix de la pose d’une caméra, les villes en installent des centaines, et leur efficacité pour lutter contre la délinquance n’est absolument pas prouvée.

Les locaux du Centre pour la Cyber-Sécurité Belge sont truffés de caméras de surveillance. Non, rien. Tout va bien.

 

Ha, je crois que c’est le moment de le poser là mais… COMMENT CA SE FAIT QU’À BRUXELLES IELS FONT PAYER OBLIGATOIREMENT DE L’EAU EN BOUTEILLE DANS TOUS LES RESTAURANTS BORDAYL DE ZUT ! PAS POSSIBILITÉ D’AVOIR DE L’EAU DU ROBINET GRATUITEMENT ! DE L’EAU QUOI ! RAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH ! BRÛLONS LE CAPITALISME !

 

Une affiche « Es-tu communiste ? Rejoins-nous ! » rencontrée au hasard de nos pérégrinations dans Bruxelles

 

Pardon pour le coup de sang, ça va mieux.

Pour la dernière journée, nous étions de retour à Maxima, où des acteurices du numérique, de l’image (vidéo) et de la radio nous ont présenté leurs projets, notamment, RadioPanik, une radio libre (qui fait des émissions impossibles passionnantes) et ZinTV, une organisation proche des mouvements sociaux.

Après la présentation de leurs projets, nous avons échangé en grand groupe sur les difficultés de migrer vers des solutions libres pour certaines structures.

Durant la journée, nous devions nous joindre soit à ZinTV pour apprendre à faire de la captation vidéo, soit à RadioPanik pour apprendre à faire de la radio.

Nous avons appris comment fonctionne un émetteur radio portatif ultra-léger ou l’utilisation d’OBS pour diffuser de la télé en live.

À la fin de la journée, il y a eu une présentation de PeerTube d’une personne qui a appris un peu tard qu’elle devait la faire, la pauvre. Heureusement, Booteille l’a un peu assisté pour répondre aux questions.

Après ça, nous avons fait un bilan avec le groupe cœur d’ECHO Network, sur la semaine.

Le bilan était vraiment positif. Les partenaires qui ne voyaient pas trop l’intérêt des méthodes de l’éducation populaire lors de la première session parisienne sont désormais convaincu·es. Les liens entre les différent·es membres et différentes structures se sont encore renforcés.

Nous avons eu le sentiment que nous commencions à faire réellement corps, à faire réellement groupe, et que nous avancions vraiment toutes et tous dans la même direction, ce qui pour un projet pan-européen comme celui-ci est vraiment motivant.

Le soir, avant le repas, nous avons assisté à une conférence autour du livre de Tyler Reigeluth, « L’intelligence des villes, Critique d’une transparence sans fin ».

Avant la conférence, Booteille a parlé au nom de Framasoft aux côtés de Morgane (co-organisatrice du projet ECHO, membre des CÉMÉA France), Sarah (qui co-organisait le séjour en Belgique) et Célo (membre de Tactic et Neutrinet, qui a pris une part importante dans l’organisation des activités), dans le micro de RadioPanik qui diffusait en direct.

Nous y avons fait une brève présentation de nos structures et du projet ECHO Network.

Après quoi la conférence a commencé et pour être honnête nous n’avons pas été très bons élèves. Nos complices d’ECHO Network qui avaient appris à faire de la radio et de la télé l’après-midi même retransmettaient la conférence sur les ondes, et nous n’avons pas pu nous empêcher de leur donner un coup de pouce. Le streaming sur PeerTube de la retransmission a eu un souci et Booteille a dû mettre les mains dans le cambouis. (Note de Booteille : En vrai, iels s’en sortaient très bien sans moi, haha !)

Juste après la conférence nous sommes allés manger, boire et discuter jusqu’à une heure avancée.

Antonio, notre camarade croate (de Center for Peace Studies), a animé la soirée. Il fera partie de l’équipe accueillante à Zagreb, et c’est un sacré personnage !

 

Ce graffiti « Show Me The Budget » près de la Gare du Midi est la preuve indiscutable que pyg est passé à Bruxelles.




Métacartes, des communs pédagogiques pour accompagner les accompagnateurs de transition numérique

Nous vous avons déjà parlé à plusieurs reprises du projet « Métacartes » que nous trouvons très pertinent pour aborder des sujets complexes de façon simple (et collective !).

Mélanie et Lilian, les créateur⋅ices de cette initiative (et des personnes fabuleuses par ailleurs), reviennent aujourd’hui nous partager un point d’étape important. Nous sommes ravi⋅es de leur laisser la parole.

Rappel des épisodes précédents

À tout point de vue, le modèle actuel du numérique est catastrophique (si vous en doutez lisez chaque semaine le fabuleux Khryspresso où la réalité dépasse souvent la fiction). Pourtant, même quand on est conscient qu’il faut changer de modèle, il est difficile de passer à l’action car c’est un problème complexe qui nécessite des changements à la fois individuels et collectifs.

Pour soutenir les professionnels qui accompagnent des collectifs dans des démarches vers un numérique plus éthique, ainsi que les formateur.ice.s et médiateur.ice.s numériques, nous avons conçu les Métacartes Numérique éthique : une boite à outils sous forme de cartes papier reliées à des fiches en ligne (rappel des épisodes précédents sur le Framablog ici, ici et ici).

 

Aperçu des cartes Numérique éthique
Aperçu des cartes Numérique éthique

Un outil d’animation participative et d’apprentissage coopératif

Les Métacartes ont été conçues pour offrir une multitude de possibilités :

  • structurer les échanges et les réflexions sur le numérique grâce à un outil de médiation synthétique qui tient dans la poche
  • apprendre et réfléchir au numérique en sortant la tête des écrans
  • faciliter l’échange et le partage des connaissances avec des publics de tous âges, à travers la manipulation d’un support physique
  • faciliter la coopération et l’apprentissage par les pairs (pas seulement via le formateur.ice),
  • mettre en action les individus et collectifs sur des projets concrets (pas juste du théorique),
  • mobiliser tous les styles d’apprentissage, visuels, auditifs, kinesthésiques, en utilisant le visuel, l’écoute, la manipulation et le mouvement (pas de journée complète en position assise).
  • consulter et proposer des ressources en lignes actualisées et enrichies régulièrement.
  • consulter et proposer des tutoriels complémentaires adaptés à des publics ou contextes particuliers

 

Fruit d’un travail de plus de deux ans en coopération ouverte avec un groupe d’acteur·ice·s du libre et de la société civile, cet outil constitue un commun pédagogique qui peut être personnalisé pour vos usages et enrichi par vos contributions.

Deux ans après, il s’est passé plein de choses : on vous raconte.

De nouveaux outils, complémentaires

Au fur et à mesure des retours et de nos propres usages, nous avons complété les cartes avec une série d’outils téléchargeables sur le site.

Un tableau récapitulatif des cartes Numérique Éthique

Pensé pour les animateur·ice·s et les formateur·ice·s, ce tableau offre une vue d’ensemble des cartes et de leur utilisation. Lors de la conception de vos séquences pédagogiques, vous serez guidé sur les cartes à choisir en fonction de votre objectif, les objectifs étant reliés aux différentes étapes du canevas “vous êtes ici” :

  • prendre conscience des enjeux
  • faire le point
  • définir ses critères
  • découvrir des alternatives
  • faire évoluer ses pratiques
  • évaluer

tableau récapitulatif des cartes numériques éthiques classées par objectifs
 tableau récapitulatif des cartes numériques éthiques classées par objectifs

 

Une base de données de ressources libres sur le thème du Numérique éthique

Lors de la conception des cartes Numérique éthique, nous avons collecté beaucoup de ressources et de contenus de grande qualité sur le sujet. Nous avons mis à jour et catégorisé cette base de ressources afin de vous aider à trouver des contenus pertinents pour enrichir vos ateliers ou vos formations.

base de données de ressources
base de données de ressources

 

Pour cela, vous pouvez filtrer les ressources par objectifs précédemment cités (prendre conscience des enjeux, faire le point,…) par l’un des critères du set (intimité numérique, accessibilité, transparences algorithme…).

tri des ressources par critères éthiques
tri des ressources par critères éthiques

 

Tableau récapitulatif des Usages et sous-usages Numérique Éthique

Dans Numérique éthique, nous avons un parti pris : rien ne sert de remplacer un outil non-éthique par un outil éthique si l’usage demeure problématique. Outils et usages sont intrinsèquement reliés, alors quitte à changer d’outil autant profiter de ce moment pour prendre du recul sur ses usages.

Les cartes ingrédients catégorie #usages, servent à cela : se poser des questions sur ses pratiques et ses besoins avant de tester et éventuellement d’adopter de nouveaux outils.

 

carte ingrédient usage audio et visio conference

Pour chaque usage, il y a plusieurs propositions de sous-usages plus précis et à chaque fois, un lien vers un outil ou un tutoriel.

proposition d’usages et d’outils

 

Si les cartes sont utiles pour travailler avec un groupe, ce tableau destiné lui aussi aux animateur·ice·s et les formateur·ice·s, offre un panorama complet de l’ensemble des propositions d’alternatives éthiques classées en 20 familles d’usages (correspondant aux 20 cartes INGRÉDIENTS #usages).

 

tableau récapitulatif de l’ensemble des usages et sous usages (et des outils).

 

Inspirés de la base d’alternative proposée initialement par Degooglisons Internet, nous l’avons enrichie pour montrer les nombreux usages et outils existants en proposant à chaque fois une alternative éthique.

Au total ce sont plus de 130 propositions d’usages et d’outils dans lesquelles vous pouvez piocher pour transformer vos usages personnels ou enrichir vos ateliers et formations.

Des remix et des tutos

Ce qui est chouette avec le libre, c’est que d’autres peuvent s’emparer de votre travail pour leur propre besoin et inventer de nouvelles choses ! Depuis la sortie des cartes, nous avons récolté plusieurs retours d’usages dans différents contextes et nous les avons postés dans la section mode d’emploi sous forme succincte afin de montrer d’autres usages possibles.

Formation de conseiller-es numériques – Julie Brillet

Une activité pour faire réfléchir de futurs conseillers numériques aux enjeux éthiques et leur faire découvrir des outils/usages plus éthiques.

Animation par des étudiants d’un atelier sur les « Questions éthiques autour du Web » – Stéphane Crozat :

L’objectif de cette activité est de faire animer des petits ateliers par des étudiant·e·s à propos de questions éthiques autour du numérique en général et du Web en particulier.

Animation d’un atelier «usages numériques et réflexivité des étudiant·e·s» – Gabriel Trouvé

Une amélioration de l’éthic-o-test expérimentée pour un Atelier usages numériques et réflexivité des étudiants : comment développer un esprit critique et porter les enjeux éthiques des usages numériques auprès des étudiant·e·s ?

Animation d’un atelier de sensibilisation au Numérique éthique dans un contexte de recherche en éducation et numérique – Mathieu Payn

Dans ce format simple, les participant·e·s sont amené·e·s à découvrir les cartes et à les utiliser pour débattre de leurs intérêts et priorités.

Animation d’un atelier “Outils collaboratifs et travail en équipe” pour des professionnels de l’action sociale et médico-sociale – Morgane Quilliou-Rioual

Dans cet atelier, des cartes recettes et ingrédients ont été utilisées pour faire prendre du recul sur les outils, les usages et les enjeux éthiques à des professionnels de l’action sociale et médico-sociale ayant des fonctions de coordination ou en passe de les avoir.

Des retours sur la méthode et la stratégie

Ce qui est intéressant c’est que dans la plupart de ces ressources, les auteur·ice·s partagent non seulement la recette (le déroulé), mais aussi une analyse réflexive sur ce qui a marché ou serait à améliorer. ce qui est au moins aussi intéressant que le déroulé.

Un commun pédagogique qui peut être enrichi

En concevant numérique éthique, nous avons essayé de le penser comme un commun pédagogique polyvalent, une base solide qui peut être enrichie et personnalisée selon les contextes.

Nous sommes très intéressés de voir comment les cartes sont utilisées dans différents contextes et nous aimerions beaucoup que demain il existe des recettes annexes adaptées à différents publics (enfants, ados, adultes, …) ou contextes (professionnels du numérique, de la médiation, de la formation, associations, centre sociaux, collectivités…)

Des formations pour cheminer (ou aider à cheminer) vers un Numérique éthique

5 ans après la sortie de Faire Ensemble et 2 ans après la sortie de Numérique Éthique, nous avons remis à plat notre offre de formations.

Formation et accompagnement à distance : Pour l’instant nous proposons un format unique de mini formation/accompagnement d’une heure. D’un temps de “simple décoinçage” à du temps de conseil sur un sujet très spécifique, ce format est polyvalent et s’adapte aux différents besoins. Nous sommes en train de réfléchir à proposer une offre d’accompagnement sur plusieurs mois.

Formations en présence : En tant que formateur.ice·s, nous avons à cœur de proposer des moments de formations qui développent le pouvoir d’agir des individus et des organisations, favorisent les actions concrètes et l’autonomisation, sans créer de dépendances. Nous souhaitons que nos formations, comme nos conceptions et animations d’évènements, contribuent à un changement positif en remettant du sens dans toutes vos actions.

En pratique, pour les formations, cela implique que :

  • l’apprentissage se fait aussi par les pairs (pas seulement via le formateur.ice),
  • nous pratiquons une mise en action sur du concret (pas juste théorique),
  • nous apprenons en manipulant un support physique qui permet l’échange et le partage des connaissances, à destination de tous les âges,
  • nous utilisons le visuel, et le mouvement (pas de journée complète en position assise) et cela mobilise tous les styles d’apprentissage, visuels auditifs, kinesthésiques.

Nous proposons maintenant deux formations en présence :

niveau 1 – Cheminer vers des outils et des usages numériques éthiques

niveau 2 – Accompagner des collectifs dans leur réflexion autour de l’éthique du numérique.

La première formation s’adresse à des collectifs souhaitant évoluer vers des pratiques plus éthiques en utilisant les cartes, tandis que la seconde s’adresse plus à des professionnels de la transition numérique qui souhaite mieux prendre en main les cartes pour les utiliser dans leurs accompagnements.

Et bien sur, les formations pourront aussi servir à co-créer des communs complémentaires 😉

Prochaines idées et envies

Nous sommes à l’écoute de la communauté, des besoins, mais nous faisons attention à ne pas tomber dans la démesure et dans la course en avant. Nous essayons donc prendre soin de la ressource, de nous, et faire les choses pas à pas, ce qui n’est pas toujours facile. Pour autant nous aimons partager nos envies, car elles peuvent résonner avec celles d’autres personnes.

Rendre les cartes interopérables avec le référentiel CRCN/PIX

Pix est le service public en ligne pour évaluer, développer, et certifier ses compétences numériques. Ce référentiel français pour l’évaluation des compétences numériques est lui-même basé sur le référentiel européen DigComp.

Notre outil pouvant être utilisé pour de la formation ou de la médiation numérique, nous sommes en train de réfléchir à une intégration entre ce référentiel et nos outils.

Rendre interopérable le référentiel PIX avec les Métacartes pourrait faciliter l’appropriation des Métacartes par les formateur·ice·s, mais aussi, peut-être, mettre plus de réflexion éthique dans les parcours proposés par PIX.

Traduire les contenus Numérique éthique en anglais

Nous avons présenté (à distance) les Métacartes Numérique éthique lors de LibrePlanet, la conférence annuelle de la Free Software Foundation. Le projet a suscité intérêt et plusieurs participants ont manifesté leur volonté de participer à une traduction en anglais du contenu des cartes si un jour nous allions dans ce sens. Faute de temps et soucieux de stabiliser nos travaux actuels, nous n’irons pas dans cette direction pour l’instant, mais l’idée reste et nous espérons pouvoir y travailler quand les conditions seront favorables.

Metacartes: a free/libre toolbox to chart the course to an ethical digital technology :

Concevoir des fresques éthiques du numérique

La fresque du numérique et les autres fresques ont eu beaucoup de succès ces dernières années. Pourtant si la méthode d’animation participative présente un certain intérêt, plusieurs choses nous ennuient/déplaisent. Malgré le nom fresque la dimension dessinée est minimaliste, l’atelier représente un “jeu fermé” (il y a un nombre limité de “bonnes réponses” détenues par les animateur·ice·s), la méthode n’est pas sous licence libre, le format consacre beaucoup de temps à la prise de conscience qui peut être très anxiogène et les solutions de petits gestes présentées occultent les enjeux systémiques et politiques et réduisent notre pouvoir d’agir. À la place nous proposons d’inventer une/des alter (anti?) fresque(s) qui pourraient être animées/personnalisées/remixées sur le numérique éthique en général ou certains sujets plus ciblés.

L’occasion de travailler avec des copain.e.s et d’apprendre à mieux se connaître, coopération entre Mélanie et Lilian de Métacartes et Romain et Julie de L’établi numérique.

Nous avons ainsi testé notre premier prototype sur le thème de l’hébergement web éthique avec un premier atelier test animé par Romain et Lilian lors du camp CHATONS 2023.

Organiser des ateliers thématiques d’échanges de pratiques :

Nous aimerions organiser des ateliers d’échanges de pratiques (à distance) autour de Numérique éthique pour différents contextes (médiateurs, pour les enseignants, centre sociaux, pour les collectivités, pour les professionnels de l’action sociale, …) ou publics (enfants, ados, adultes, …). Ces ateliers pourraient servir à partager des pratiques, mais aussi les documenter pour enrichir la base de ressources communes.

Animer des discussions et réflexions sur les questions éthiques

Une autre de nos envies serait d’animer ou de contribuer à l’organisation de discussion sur les questions éthiques. Par exemple poser des questions comme « Le Libre est il éthique ? ». Le libre des origines répondait à un certain besoin éthique. Mais aujourd’hui où en est on ? et où veut-on aller ? Nous n’avons pas la réponse, mais nous avons des questions et nous pensons qu’il est extrêmement important de les explorer collectivement en utilisant un format participatif qui favorise l’expression de toustes.

Ou encore organiser le « procès de chatGPT » comme un prétexte pour créer des espaces de discussion sur les enjeux de l’IA, sujet sur lequel il serait essentiel de rendre intelligibles les enjeux pour avoir un vrai débat de société. Ça pourrait être un atelier d’échange basé sur des cartes ou bien une conférence gesticulée, peu importe, mais il est urgent d’avoir des discussions là-dessus car cette technologie va bouleverser nos sociétés et risque de faire beaucoup de dommages si nous ne nous posons pas de vraies questions sur son usage.

Se relier à d’autres acteur·ice·s

Enfin une envie que nous avons depuis le début et qui demeure essentielle pour nous : se relier avec les autres acteur·ice·s qui œuvrent pour plus d’éthique, rendre visibles les initiatives qui vont dans ce sens à la fois dans le monde du numérique (Res numérica, l’établi numérique, libérons nos ordis, l’april, les CHATONS) mais aussi dans d’autres domaines afin casser les silos et rompre la tragédie du LSD (l’isolement entre différentes cultures comme les libristes, les solidaristes,les durabilistes, les artistes … qui ont des problèmes et des solutions différents et complémentaires, mais communiquent peu entre eux).

Rêver et agir dans un archipel de communs

Tout cela fait beaucoup. Nous sommes une petite structure (deux personnes à temps partiel) et nous ne souhaitons pas grossir, car au-delà d’une certaine taille il y a le risque de perdre le sens.

Mais nous aimons rêver et nous pensons qu’en partageant nos envies cela peut donner envie à d’autres de s’y relier et d’avancer sur ces sujets, que ce soit avec nous ou bien simplement de leur coté. Car, comme Framasoft nous croyons beaucoup à l’idée d’archipelisation, une coopération qui se nourrit de la diversité et des différences.

 




Logiciel libre et anarchisme

Par sa volonté de décentralisation, le logiciel libre est présenté comme porteur de valeurs anarchistes, et parfois vilipendé par certaines institutions pour cela. Mais pour autant que les méthodes de travail puissent être reliées à des pratiques libertaires, voire revendiquées comme telles, peut-on réellement considérer qu’il en adopte toutes les valeurs, les ambitions et le message politique ?

Framatophe vous propose ici de retracer un peu la façon dont les mouvements du logiciel libre et des mouvements anarchistes se sont côtoyés au fil des ans et, surtout, comment ils pourraient mieux apprendre l’un de l’autre.

Logiciel libre et anarchisme

À travers le monde et à travers l’histoire, les mouvements anarchistes ont toujours subi la surveillance des communications. Interdiction des discours publics et rassemblements, arrestations d’imprimeurs, interceptions téléphoniques, surveillance numérique. Lorsque je parle ici de mouvements anarchistes, je désigne plutôt tous les mouvements qui contiennent des valeurs libertaires. Bien au-delà des anciennes luttes productivistes des mouvements ouvriers, anarcho-syndicalistes et autres, le fait est qu’aujourd’hui énormément de luttes solidaires et pour la justice sociale ont au moins un aspect anarchiste sans pour autant qu’elles soient issues de mouvements anarchistes « historiques ». Et lorsqu’en vertu de ce « déjà-là » anarchiste qui les imprègne les sociétés font valoir leurs libertés et leurs souhaits en se structurant en organes collectifs, les États et les organes capitalistes renforcent leurs capacités autoritaires dont l’un des aspects reconnaissables est le contrôle des outils numériques.

Cela aboutit parfois à des mélanges qu’on trouverait cocasses s’ils ne démontraient pas en même temps la volonté d’organiser la confusion pour mieux dénigrer l’anarchisme. Par exemple cette analyse lamentable issue de l’École de Guerre Économique, au sujet de l’emploi du chiffrement des communications, qui confond anarchisme et crypto-anarchisme comme une seule « idéologie » dangereuse. Or il y a bien une différence entre prémunir les gens contre l’autoritarisme et le contrôle numérique et souhaiter l’avènement de nouvelles féodalités ultra-capitalistes au nom dévoyé de la liberté. Cette confusion est d’autant plus savamment orchestrée qu’elle cause des tragédies. En France, l’affaire dite du 8 décembre 20201, sorte de remake de l’affaire Tarnac, relate les gardes à vue et les poursuites abusives à l’encontre de personnes dont le fait d’avoir utilisé des protocoles de chiffrement et des logiciels libres est déclaré suspect et assimilable à un comportement dont le risque terroriste serait avéré – en plus d’avoir lu des livres d’auteurs anarchistes comme Blanqui et Kropotkine. Avec de tels fantasmes, il va falloir construire beaucoup de prisons.

caricature suggérant qu'à travers un ordinateur des services secrets "récupèrent" le cerveau éjecté d'un quidam qui est comme étranglé.
Die Hackerbibel, Chaos Computer Club, 1998, illlustration page 15

Le logiciel libre a pourtant acquis ses lettres de noblesses. Par exemple, si Internet fonctionne aujourd’hui, c’est grâce à une foule de logiciels libres. Ces derniers sont utilisés par la plupart des entreprises aujourd’hui et il n’y a guère de secteurs d’activités qui en soient exempts. En revanche, lorsqu’on considère l’ensemble des pratiques numériques basées sur l’utilisation de tels communs numériques, elles font très souvent passer les utilisateurs experts pour de dangereux hackers. Or, lorsque ces utilisations ont pour objectif de ne pas dépendre d’une multinationale pour produire des documents, de protéger l’intimité numérique sur Internet, de faire fonctionner des ordinateurs de manière optimale, ne sont-ce pas là des préoccupations tout à fait légitimes ? Ces projections établissent un lien, souvent péjoratif, entre logiciel libre, activité hacker et anarchisme. Et ce lien est postulé et mentionné depuis longtemps. Le seul fait de bricoler des logiciels et des machines est-il le seul rapport entre logiciel libre et anarchisme ? Que des idiots trouvent ce rapport suspect en fait-il pour autant une réalité tangible, un lien évident ?

Le logiciel libre comporte quatre libertés : celle d’utiliser comme bon nous semble le logiciel, celle de partager le code source tout en ayant accès à ce code, celle de le modifier, et celle de partager ces modifications. Tout cela est contractuellement formalisé par les licences libres et la première d’entre elles, la Licence Publique Générale, sert bien souvent de point de repère. L’accès ouvert au code combiné aux libertés d’usage et d’exploitation sont communément considérés comme les meilleurs exemples de construction de communs numériques et de gestion collective, et représentent les meilleures garanties contre l’exploitation déloyale des données personnelles (on peut toujours savoir et expertiser ce que fait le logiciel ou le service). Quelle belle idée que de concevoir le Libre comme la traduction concrète de principes anarchistes : la lutte contre l’accaparement du code, son partage collaboratif, l’autogestion de ce commun, l’horizontalité de la conception et de l’usage (par opposition à la verticalité d’un pouvoir arbitraire qui dirait seul ce que vous pouvez faire du code et, par extension, de la machine). Et tout cela pourrait être mis au service des mouvements anarchistes pour contrecarrer la surveillance des communications et le contrôle des populations, assurer la liberté d’expression, bref créer de nouveaux communs, avec des outils libres et une liberté de gestion.

Belle idée, partiellement concrétisée à maints endroits, mais qui recèle une grande part d’ombre. Sur les communs que composent les logiciels libres et toutes les œuvres libres (logiciels ou autres), prolifère tout un écosystème dont les buts sont en réalité malveillants. Il s’agit de l’accaparement de ces communs par des acteurs moins bien intentionnés et qui paradoxalement figurent parmi les plus importants contributeurs au code libre / open source. C’est que face à la liberté d’user et de partager, celle d’abuser et d’accaparer n’ont jamais été contraintes ni éliminées : les licences libres ne sont pas moralistes, pas plus qu’elles ne peuvent légitimer une quelconque autorité si ce n’est celle du contrat juridique qu’elles ne font que proposer. On verra que c’est là leur fragilité, nécessitant une identification claire des luttes dont ne peut se départir le mouvement du logiciel libre.

Collaboration sans pouvoir, contribution et partage : ce qui pourrait bien s’apparenter à de grands principes anarchistes fait-il pour autant des mouvements libristes des mouvements anarchistes et du logiciel libre un pur produit de l’anarchie ? Par exemple, est-il légitime que le système d’exploitation Android de Google-Alphabet soit basé sur un commun libre (le noyau Linux) tout en imposant un monopole et des contraintes d’usage, une surveillance des utilisateurs et une extraction lucrative des données personnelles ? En poussant un peu plus loin la réflexion, on constate que la création d’un objet technique et son usage ne sont pas censés véhiculer les mêmes valeurs. Pourtant nous verrons que c’est bien à l’anarchie que font référence certains acteurs du logiciel libre. Cette imprégnation trouve sa source principale dans le rejet de la propriété intellectuelle et du pouvoir qu’elle confère. Mais elle laisse néanmoins l’esprit anarchiste libriste recroquevillé dans la seule production technique, ouvrant la voie aux critiques, entre tentation libertarienne, techno-solutionnisme et mépris de classe. Sous certains aspects, l’éthique des hackers est en effet tout à fait fongible dans le néolibéralisme. Mais il y a pourtant un potentiel libertaire dans le libre, et il ne peut s’exprimer qu’à partir d’une convergence avec les luttes anticapitalistes existantes.

Des libertés fragiles

Avant d’entrer dans une discussion sur le rapport historique entre logiciel libre et anarchie, il faut expliquer le contexte dans lequel un tel rapport peut être analysé. Deux points de repère peuvent être envisagés. Le premier point de repère consiste à prendre en compte que logiciel libre et les licences libres proposent des développements et des usages qui sont seulement susceptibles de garantir nos libertés. Cette nuance a toute son importance. Le second point consiste à se demander, pour chaque outil numérique utilisé, dans quelle mesure il participe du capitalisme de surveillance, dans quelle mesure il ouvre une brèche dans nos libertés (en particulier la liberté d’expression), dans quelle mesure il peut devenir un outil de contrôle. C’est ce qui ouvre le débat de l’implication des mouvements libristes dans diverses luttes pour les libertés qui dépassent le seul logiciel en tant qu’objet technique, ou l’œuvre intellectuelle ou encore artistique placée sous licence libre.

Ce sont des techniques…

Il ne faut jamais perdre de vue que, en tant que supports de pensée, de communication et d’échanges, les logiciels (qu’ils soient libres ou non) les configurent en même temps2. C’est la question de l’aliénation qui nous renvoie aux anciennes conceptions du rapport production-machine. D’un point de vue marxiste, la technique est d’abord un moyen d’oppression aux mains des classes dominantes (l’activité travail dominée par les machines et perte ou éloignement du savoir technique). Le logiciel libre n’est pas exempt de causer cet effet de domination ne serait-ce parce que les rapports aux technologies sont rarement équilibrés. On a beau postuler l’horizontalité entre concepteur et utilisateur, ce dernier sera toujours dépendant, au moins sur le plan cognitif. Dans une économie contributive idéale du Libre, concepteurs et utilisateurs devraient avoir les mêmes compétences et le même degré de connaissance. Mais ce n’est généralement pas le cas et comme disait Lawrence Lessig, « Code is law »3.

Le point de vue de Simondon, lui, est tout aussi acceptable. En effet l’automatisation – autonomisation de la technique (émancipation par rapport au travail) suppose aussi une forme d’aliénation des possédants vis-à-vis de la technique4. Le capital permet la perpétuation de la technique dans le non-sens du travail et des comportements, leur algorithmisation, ce qui explique le rêve de l’usine automatisée, étendu à la consommation, au-delà du simple fait de se débarrasser des travailleurs (ou de la liberté des individus-consommateurs). Cependant la culture technique n’équivaut pas à la maîtrise de la technique (toujours subordonnée au capital). Censé nous livrer une culture technique émancipatrice à la fois du travail et du capital (la licence libre opposée à la propriété intellectuelle du « bien » de production qu’est le logiciel), le postulat libriste de l’équilibre entre l’utilisateur et le concepteur est dans les faits rarement accompli, à la fois parce que les connaissances et les compétences ne sont pas les mêmes (voir paragraphe précédent) mais aussi parce que le producteur lui-même dépend d’un système économique, social, technique, psychologique qui l’enferme dans un jeu de dépendances parfois pas si différentes de celles de l’utilisateur. L’équilibre peut alors être trouvé en créant des chaînes de confiance, c’est-à-dire des efforts collectifs de création de communs de la connaissance (formations, entraide, vulgarisation) et des communs productifs : des organisations à tendances coopératives et associatives capables de proposer des formules d’émancipation pour tous. Créer du Libre sans proposer de solutions collectives d’émancipation revient à démontrer que la liberté existe à des esclaves enchaînés tout en les rendant responsables de leurs entraves.

…Issues de la culture hacker

La culture hacker est un héritage à double tranchant. On a longtemps glorifié les communautés hackers des années 1960 et 1970 parce qu’elles sont à l’origine de l’aventure libératrice de l’ordinateur et des programmes hors du monde hiérarchisé de la Défense et de l’Université. Une sorte de « démocratisation » de la machine. Mais ce qu’on glorifie surtout c’est le mode de production informatique, celui qui a donné lieu aux grandes histoires des communautés qui partageaient la même éthique des libertés numériques et que Steven Lévy a largement popularisé en définissant les contours de cette « éthique hacker »5. Le projet GNU de R. M. Stallman, à l’origine dans les années 1980 de la Licence Publique Générale et de la formulation des libertés logicielles en droit, est surtout l’illustration d’une économie logicielle qui contraint la contribution (c’est la viralité de la licence copyleft) et promeut un mode de développement collectif. Ce qu’on retient aussi de la culture hacker, c’est la réaction aux notions de propriété intellectuelle et d’accaparement du code. On lui doit aussi le fait qu’Internet s’est construit sur des protocoles ouverts ou encore les concepts d’ouverture des formats. Pourtant l’état de l’économie logicielle et de l’Internet des plateformes montre qu’aujourd’hui nous sommes loin d’une éthique de la collaboration et du partage. Les enjeux de pouvoir existent toujours y compris dans les communautés libristes, lorsque par exemple des formats ou des protocoles sont imposés davantage par effet de nombre ou de mode que par consensus6.

 

dessin d'humour sur la couverture du magazine du Chaos Computer Club : un type à casquette à l'envers et en salopette se régale (langue tirée) devant un écran qui demande "qui est là" en allemand, une souris à antenne émet un biiiip sur son bureau. Un verre de coca avec une paille s'y trouve aussi de l'autre côté du clavier. Ordinateur de 1998 donc assez vintage aujourd'hui.
Die Hackerbibel, Chaos Computer Club, 1998, couverture

Comme le montre très bien Sébastien Broca7, l’éthique hacker n’est pas une simple utopie contrariée. Issue de la critique antihiérarchique des sixties, elle a aussi intégré le discours néomanagérial de l’accomplissement individuel qui voit le travail comme expression de soi, et non plus du collectif. Elle a aussi suivi les transformations sociales qu’a entraîné le capitalisme de la fin du XXe siècle qui a remodelé la critique artistique des sixties en solutionnisme technologique dont le fleuron est la Silicon Valley. C’est Fred Tuner qui l’écrit si bien dans un ouvrage de référence, Aux sources de l’utopie numérique : de la contre culture à la cyberculture8. Et pour paraphraser un article récent de ma plume à son propos9 : quelle ironie de voir comment les ordinateurs sont devenus synonymes d’émancipation sociale et de rapprochements entre les groupes sociaux, alors qu’ils sont en même temps devenus les instruments du capitalisme, du nouveau management et de la finance (ce que Detlef Hartmann appelait l’offensive technologique10), aussi bien que les instruments de la surveillance et de la « société du dossier ». C’est bien en tant que « menaces sur la vie privée » que les dépeignaient les premiers détracteurs des bases de données gouvernementales et des banques à l’instar d’Alan Westin11 au soir des années 1960. Tout s’est déroulé exactement comme si les signaux d’alerte ne s’étaient jamais déclenchés, alors que depuis plus de 50 ans de nombreuses lois entendent réguler l’appétit vorace des plateformes. Pourquoi ? Fred Turner y répond : parce que la priorité avait été choisie, celle de transformer le personal is political12 en idéologie néolibérale par le biais d’une philosophie hacker elle-même dévoyée au nom de la liberté et de l’accomplissement de soi.

Des communs mal compris et mal protégés

Ces communs sont mal compris parce qu’ils sont la plupart du temps invisibilisés. La majorité des serveurs sur Internet fonctionnent grâce à des logiciels libres, des protocoles parmi les plus courants sont des protocoles ouverts, des systèmes d’exploitation tels Android sont en fait construits sur un noyau Linux, etc. De tout cela, la plupart des utilisateurs n’ont cure… et c’est très bien. On ne peut pas attendre d’eux une parfaite connaissance des infrastructures numériques. Cela plonge néanmoins tout le monde dans un univers d’incompréhensions.

D’un côté, il y a l’ignorance du public (et bien souvent aussi des politiques publiques) du fait que la majeure partie des infrastructures numériques d’aujourd’hui reposent sur des communs, comme l’a montré N. Egbhal13. Ce fait crée deux effets pervers : le ticket d’entrée dans la « nouvelle économie », pour une start-up dont le modèle repose sur l’exploitation d’un système d’information logiciel, nécessite bien moins de ressources d’infrastructure que dans les années 1990 au point que la quasi-exclusivité de la valeur ajoutée repose sur l’exploitation de l’information et non la création logicielle. Il en résulte un appauvrissement des communs (on les exploite mais on ne les enrichit pas14) et un accroissement de l’économie de plateforme au détriment des infrastructures elles-mêmes : pour amoindrir encore les coûts, on s’en remet toujours plus aux entreprises monopolistes qui s’occupent de l’infrastructure matérielle (les câbles, les datacenter). D’un autre côté, il y a le fait que beaucoup d’organisations n’envisagent ces communs numériques qu’à l’aune de la rentabilité et de la compromission avec la propriété productive, ce qui a donné son grain à moudre à l’Open Source Initiative et sa postérité, reléguant les libristes dans la catégorie des doux utopistes. Mais l’utopie elle-même a ses limites : ce n’est pas parce qu’un service est rendu par des logiciels libres qu’il est sécurisé, durable ou protège pour autant les utilisateurs de l’exploitation lucrative de leurs données personnelles. Tout dépend de qui exploite ces communs. Cela relève en réalité du degré de confiance qu’on est capable de prêter aux personnes et aux organisations qui rendent le service possible.

Les licences libres elles-mêmes sont mal comprises, souvent vécues comme un abandon de l’œuvre et un manque à gagner tant les concepts de la « propriété intellectuelle » imprègnent jusqu’à la dernière fibre le tissu économique dans lequel nous sommes plus ou moins contraints d’opérer. Cela est valable pour les logiciels comme pour les productions intellectuelles de tous ordres, et cela empêche aussi le partage là où il pourrait être le plus bénéfique pour tous, par exemple dans le domaine de la recherche médicale.

Au lieu de cela, on assiste à un pillage des communs15, un phénomène bien identifié et qui connaît depuis les années 2000 une levée en force d’organisations de lutte contre ce pillage, qu’il s’agisse des biens communs matériels (comme l’eau, les ressources cultivables, le code génétique…) ou immatériels (l’art, la connaissance, les logiciels…). C’est la raison pour laquelle la décentralisation et l’autogestion deviennent bien plus que de simples possibilités à opposer à l’accaparement général des communs, mais elles sont aussi autant de voies à envisager par la jonction méthodologique et conceptuelle des organisations libristes, de l’économie solidaire et des mouvements durabilistes16.

Le libre et ses luttes, le besoin d’une convergence

Alors si le Libre n’est ni l’alpha ni l’oméga, si le mouvement pour le logiciel Libre a besoin de réviser sa copie pour mieux intégrer les modèles de développement solidaires et émancipateurs, c’est parce qu’on ne peut manifestement pas les décorréler de quatre autres luttes qui structurent ou devraient structurer les mouvements libristes aujourd’hui.

Une lutte pour imposer de nouveaux équilibres en droit

Les licences libres et leurs domaines d’application, en particulier dans les communs immatériels, ont besoin de compétences et d’alliances pour ne plus servir d’épouvantail, de libre-washing ou, pire, être détournés au profit d’une lucrativité de l’accès ouvert (comme c’est le cas dans le monde des revues scientifiques). Elles ont aussi besoin de compétences et d’alliances pour être mieux défendues : même si beaucoup de juristes s’en sont fait une spécialité, leur travail est rendu excessivement difficile tant le cadre du droit est rigide et fonctionne en référence au modèle économique dominant.

Une lutte pour imposer de nouveaux équilibres en économie

Pouvons-nous sciemment continuer à fermer les yeux sur l’usage d’une soi-disant éthique hacker au nom de la liberté économique sachant qu’une grande part des modèles économiques qui reposent sur des communs immatériels ont un intérêt public extrêmement faible en proportion des capacités d’exploitation lucrative et de la prolétarisation17 qu’ils entraînent. Cela explique par exemple que des multinationales telles Intel et IBM ou Google et Microsoft figurent parmi les grands contributeurs au Logiciel libre et open source18 : ils ont besoin de ces communs19. Et en même temps, on crée des inégalités sociales et économiques : l’exploitation de main-d’œuvre bon marché (comme les travailleurs du clic20) dont se gavent les entreprises du numérique repose elle aussi sur des infrastructures numériques libres et open source. Les communs numériques ne devraient plus être les supports de ce capitalisme21.

Une lutte pour un rééquilibrage infrastructurel

Parce que créer du code libre ne suffit pas, encore faut-il s’assurer de la protection des libertés que la licence implique. En particulier la liberté d’usage. À quoi sert un code libre si je ne peux l’utiliser que sur une plateforme non libre ? à quoi sert un protocole ouvert si son utilisation est accaparée par des systèmes d’information non libres ? À défaut de pouvoir rendre collectifs les câbles sous-marins (eux-mêmes soumis à des contraintes géopolitiques), il est toutefois possible de développer des protocoles et des logiciels dont la conception elle-même empêche ces effets d’accaparement. Dans une certaine mesure c’est ce qui a été réalisé avec les applications du Fediverse22. Ce dernier montre que la création logicielle n’est rien si les organisations libristes ne se mobilisent pas autour d’un projet commun et imaginent un monde numérique solidaire.

Une lutte contre les effets sociaux du capitalisme de surveillance

Qu’il s’agisse du conformisme des subjectivités engendré par l’extraction et l’exploitation des informations comportementales (ce qui dure depuis très longtemps23) ou du contrôle des populations rendu possible par ces mêmes infrastructures numériques dont la technopolice se sert (entre autres), les communautés libristes s’impliquent de plus en plus dans la lutte anti-surveillance et anti-autoritaire. C’est une tradition, assurément, mais ce qu’il manque cruellement encore, c’est la multiplication de points de contact avec les autres organisations impliquées dans les mêmes luttes et qui, bien souvent, se situent sur la question bien plus vaste des biens communs matériels. Combien d’organisations et de collectifs en lutte dans les domaines durabilistes comme l’écologie, le partage de l’eau, les enjeux climatiques, en sont encore à communiquer sur des services tels Whatsapp alors qu’il existe des canaux bien plus protégés24 ? Réciproquement combien d’associations libristes capables de déployer des solutions et de les vulgariser ne parlent jamais aux durabilistes ou autres ? Or, penser les organisations libristes sur un mode solidaire et anti-capitaliste revient à participer concrètement aux luttes en faveur des biens communs matériels, créer des alliances de compétences et de connaissances pour rendre ces luttes plus efficaces.

Le (mauvais) calcul anarchiste

Il y a toute une littérature qui traite du rapport entre librisme et anarchisme. Bien qu’elle ne soit pas toujours issue de recherches académiques, cela n’enlève rien à la pertinence et la profondeur des textes qui ont toujours le mérite d’identifier les valeurs communes tels l’anti-autoritarisme de l’éthique hacker, le copyleft conçu comme une lutte contre la propriété privée, le partage, ou encore les libertés d’usage. Et ces valeurs se retrouvent dans de nombreuses autres sphères inspirées du modèle libriste25 et toutes anticapitalistes. Pour autant, l’éthique hacker ou l’utopie « concrète » du logiciel libre, parce qu’elles sont d’abord et avant tout des formes de pratiques technologiques, ne portent pas per se ces valeurs. Comme je l’ai mentionné plus haut, l’éthique hacker et les utopies plus ou moins issues de la tradition hippie des années 1960 et 1970 sont aussi dépositaires du capitalisme techno-solutionniste exprimé, pour les besoins de la cause, par l’idéologie de la Silicon Valley.

C’est ce point de tension qui a tendance aujourd’hui à causer la diffusion d’une conception binaire du lien entre anarchisme et philosophie hacker. Elle repose sur l’idée selon laquelle c’est l’anarchisme américain qui donne une part fondatrice à la philosophie hacker et qui crée en quelque sorte une opposition interne entre une faction « de gauche » attachée aux combats contre la propriété et une faction « de droite » fongible dans le capitalisme dans la mesure où c’est l’efficacité dans l’innovation qui emporte le reste, c’est-à-dire un anarchisme réduit à être un mode d’organisation de la production et un faire-valoir d’une liberté de lucrativité « décomplexée ».

C’est caricatural, mais la première partie n’est pas inexacte. En effet, nous parlons pour l’essentiel d’un mouvement né aux États-Unis et, qui plus est, dans une période où s’est structurée la Nouvelle Gauche Américaine en phase avec des mouvements libertaires et/ou utopistes issus de la génération anti-guerre des années 1950. Simultanément, les ordinateurs mainframe ont commencé à être plus accessibles dans les milieux universitaires et les entreprises, favorisant la naissance des communautés hackers dans un mouvement d’apprentissage, de partage de connaissances et de pratiques. Par la suite ces communautés se structurèrent grâce aux communications numériques, en particulier Internet, et s’agrandirent avec l’apparition de la microinformatique.

Se reconnaissent-elles dans l’anarchisme ? Même si ses pratiques sont anarchistes, un collectif n’a nul besoin de se reconnaître en tant que tel. Il peut même ne pas en avoir conscience. C’est donc du côté des pratiques et in situ qu’il faut envisager les choses. Les communautés hacker sont issues d’une conjonction historique classique entre la cristallisation des idées hippies et libertaires et l’avènement des innovations techniques qui transforment alors radicalement l’économie (les systèmes d’information numériques). Cela crée par effet rétroactif des communautés qui génèrent elles-mêmes des objets techniques en se réappropriant ces innovations, et en changeant à leur tour le paysage économique en proposant d’autres innovations. On pense par exemple aux Bulletin Board Systems (par exemple le projet Community Memory, premier forum électronique géant et collaboratif), aux systèmes d’exploitation (comment Unix fut créé, ou comment Linux devint l’un des plus grands projets collaboratifs au monde), à des logiciels (le projet GNU), etc. Toutes ces pratiques remettent en cause la structure autoritaire (souvent académique) de l’accès aux machines, provoquent une démocratisation des usages informatiques, incarnent des systèmes de collaboration fondés sur le partage du code et des connaissances, permettent l’adoption de pratiques de prise de décision collective, souvent consensuelles. Couronnant le tout, l’apparition de la Licence Publique Générale initiée par Richard M. Stallman et Eben Moglen avec la Free Software Foundation propose une remise en question radicale de la propriété intellectuelle et du pouvoir qu’elle confère.

Le rapport avec l’anarchisme est de ce point de vue exprimé à maintes reprises dans l’histoire des communautés hacker. On y croise très souvent des références. Dans la biographie de Richard M. Stallman26, par exemple, le AI Lab qui devient le haut lieu de la « Commune Emacs », est décrit ainsi : « La culture hacker qui y régnait et sa politique d’anarchie allaient conférer au lieu l’aura d’éternel rebelle ». Plus loin dans le même livre, E. Moglen se remémore sa rencontre avec R. M. Stallman qu’il décrit comme la rencontre de deux anarchistes. Inversement, R. M. Stallman ne s’est jamais défini comme un anarchiste. Il va même jusqu’à soutenir que le logiciel libre est un mélange de communisme (au sens d’appropriation collective de la production), de capitalisme « éthique » (pouvoir en tirer des avantages lucratifs tant qu’on respecte les libertés des autres), et d’anarchisme (réduit à la liberté de contribuer ou non et d’user comme on veut)27.

Une approche fondée sur une enquête plus solide montre néanmoins que les principes anarchistes ne sont pas considérés comme de simples étiquettes dans les communautés hacker d’aujourd’hui. Menée au cœur des communautés libristes californiennnes, l’enquête de Michel Lallement dans L’âge du faire28 montre une typologie intéressante chez les hackers entre les « pur jus », parmi les plus anciens le plus souvent des hommes au charisme de leader ou de gourous et qui se réclament d’un certain radicalisme anarchiste (sur lequel je vais revenir plus loin) et la masse plus diffuse, plus ou moins concernée par l’aspect politique. Majoritaires sont cependant ceux qui ont tendance à la compromission, jusqu’au point où parfois le travail à l’intérieur de la communauté est valorisé dans l’exercice même de la réussite capitaliste à l’extérieur. J’irais même jusqu’à dire, pour en avoir côtoyé, que certains voient dans le hacking et l’éthique hacker une sorte d’exutoire de la vie professionnelle étouffée par l’économie capitaliste.

Sur l’aspect proprement américain, ce qui est surtout mis en avant, c’est l’opposition entre la bureaucratie (entendue au sens de l’action procédurière et autoritaire) et l’anarchisme. À l’image des anciennes communautés hacker calquées sur l’antique Homebrew Club, ce refus de l’autorité institutionnelle s’apparente surtout à une forme de potacherie corporatiste. Le point commun des communautés, néanmoins, consiste à s’interroger sur les process de prise de décision communautaire, en particulier la place faite au consensus : c’est l’efficacité qui est visée, c’est-à-dire la meilleure façon de donner corps à une délibération collective. C’est ce qui permet de regrouper Noisebridge, MetaLab ou le Chaos Computer Club. Certes, au point de vue du fonctionnement interne, on peut invoquer beaucoup de principes anarchistes. Une critique pointerait cependant que ces considérations restent justement internalistes. On sait que le consensus consolide le lien social, mais la technologie et les savoir-faire ont tendance à concentrer la communauté dans une sorte d’exclusion élective : diplômée, issue d’une classe sociale dominante et bourgeoise, en majorité masculine (bien que des efforts soient menés sur la question du genre).

Si nous restons sur le plan internaliste, on peut tenter de comprendre ce qu’est ce drôle d’anarchisme. Pour certains auteurs, il s’agit de se concentrer sur l’apparente opposition entre libre et open source, c’est-à-dire le rapport que les communautés hacker entretiennent avec le système économique capitaliste. On peut prendre pour repères les travaux de Christian Imhorst29 et Dale A. Bradley30. Pour suivre leur analyse il faut envisager l’anarchisme américain comme il se présentait à la fin des années 1970 et comment il a pu imprégner les hackers de l’époque. Le sous-entendu serait que cette imprégnation perdure jusqu’à aujourd’hui. Deux étapes dans la démonstration.

En premier lieu, la remise en cause de la propriété et de l’autorité est perçue comme un radicalisme beaucoup plus fortement qu’elle ne pouvait l’être en Europe au regard de l’héritage de Proudhon et de Bakhounine. Cela tient essentiellement au fait que la structuration du radicalisme américain s’est établie sur une réverbération du bipartisme américain. C’est ce qu’analyse bien en 1973 la chercheuse Marie-Christine Granjon au moment de l’éveil de la Nouvelle Gauche aux États-Unis : chasser les radicaux du paysage politique en particulier du paysage ouvrier dont on maintenait un niveau de vie (de consommation) juste assez élevé pour cela, de manière à « maintenir en place la structure monopolistique de l’économie sur laquelle repose le Welfare State — l’État des monopoles, des managers, des boss du monde syndical et de la politique —, pour protéger cette Amérique, terre de l’égalité, de la liberté et de la poursuite du bonheur, où les idéologies n’avaient plus de raison d’être, où les radicaux étaient voués à la marginalité et tolérés dans la mesure de leur inaction et de leur audience réduite »31. En d’autres termes, être radical c’est être contre l’État américain, donc soit contre le bien-être du peuple et ses libertés, soit le contraire (et chercher à le démontrer), mais en tout cas, contre l’État américain.

En second lieu, la dichotomie entre anarchisme de droite et anarchisme de gauche pourrait se résumer à la distinction entre libertariens et communautaires anticapitalistes. Ce n’est pas le cas. Mais c’est ainsi que posent les prémisses du problème C. Imhorst comme D. A. Bradley et avec eux beaucoup de ceux qui réduisent la distinction open-source / librisme. Sur ce point on reprend souvent la célèbre opposition entre les grandes figures des deux « camps », d’un côté R. M. Stallman, et de l’autre côté Eric S. Raymond, auteur de La Cathédrale et le bazar, évangéliste du marché libre ne retenant de la pensée hacker que l’efficacité de son organisation non hiérarchique. Cette lecture binaire de l’anarchisme américain, entre droite et gauche, est exprimée par David DeLeon en 1978 dans son livre The American as Anarchist32, assez critiqué pour son manque de rigueur à sa sortie, mais plusieurs fois réédité, et cité de nombreuses fois par C. Imhorst. Dans la perspective de DeLeon, l’anarchisme américain est essentiellement un radicalisme qui peut s’exprimer sur la droite de l’échiquier politique comme le libertarianisme, profondément capitaliste, individualiste-propriétariste et contre l’État, comme sur la gauche, profondément anticapitaliste, communautaire, contre la propriété et donc aussi contre l’État parce qu’il protège la propriété et reste une institution autoritaire. En écho, réduire le mouvement libriste « radical » à la figure de R. M. Stallman, et l’opposer au libertarianisme de E. S. Raymond, revient à nier toutes les nuances exprimées en quarante ans de débats et de nouveautés (prenons simplement l’exemple de l’apparition du mouvement Creative Commons).

Le but, ici, n’est pas tant de critiquer la simplicité de l’analyse, mais de remarquer une chose plus importante : si le mouvement hacker est perçu comme un radicalisme aux États-Unis dès son émergence, c’est parce qu’à cette même époque (et c’est pourquoi j’ai cité deux références de l’analyse politique des années 1970) le radicalisme est conçu hors du champ politique bipartite, contre l’État, et donc renvoyé à l’anarchisme. En retour, les caractéristiques de l’anarchisme américain offrent un choix aux hackers. Ce même choix qui est exprimé par Fred Turner dans son analyse historique : comment articuler les utopies hippies de la Nouvelle Gauche avec la technologie d’un côté, et le rendement capitaliste de l’autre. Si on est libertarien, le choix est vite effectué : l’efficacité de l’organisation anarchiste dans une communauté permet de s’affranchir de nombreux cadres vécus comme des freins à l’innovation et dans la mesure où l’individualisme peut passer pour un accomplissement de soi dans la réussite économique, la propriété n’a aucune raison d’être opposée au partage du code et ce partage n’a pas lieu de primer sur la lucrativité.

Considérer le mouvement pour le logiciel libre comme un mouvement radical est une manière d’exacerber deux positions antagonistes qui partent des mêmes principes libertaires et qui aboutissent à deux camps, les partageux qui ne font aucun compromis et les ultra-libéraux prêts à tous les compromis avec le capitalisme. On peut néanmoins suivre D. A. Bradley sur un point : le logiciel libre propose à minima la réorganisation d’une composante du capitalisme qu’est l’économie numérique. Si on conçoit que la technologie n’est autre que le support de la domination capitaliste, penser le Libre comme un radicalisme reviendrait en fait à une contradiction, celle de vouloir lutter contre les méfaits de la technologie par la technologie, une sorte de primitivisme qui s’accommoderait d’une éthique censée rendre plus supportable le techno-capitalisme. Or, les technologies ne sont pas intrinsèquement oppressives. Par exemple, les technologies de communication numérique, surtout lorsqu’elles sont libres, permettent la médiatisation sociale tout en favorisant l’appropriation collective de l’expression médiatisée. Leurs licences libres, leurs libertés d’usages, ne rendent pas ces technologies suffisantes, mais elles facilitent l’auto-gestion et l’émergence de collectifs émancipateurs : ouvrir une instance Mastodon, utiliser un système de messagerie sécurisée, relayer les informations anonymisées de camarades qui subissent l’oppression politique, etc.

L’anarchisme… productiviste, sérieusement ?

Le Libre n’est pas un existentialisme, pas plus que l’anarchisme ne devrait l’être. Il ne s’agit pas d’opposer des modes de vie où le Libre serait un retour idéaliste vers l’absence de technologie oppressive. Les technologies sont toujours les enfants du couple pouvoir-connaissance, mais comme disait Murray Bookchin, si on les confond avec le capitalisme pour en dénoncer le caractère oppresseur, cela revient à «  masquer les relations sociales spécifiques, seules à même d’expliquer pourquoi certains en viennent à exploiter d’autres ou à les dominer hiérarchiquement ». Il ajoutait, à propos de cette manière de voir : « en laissant dans l’ombre l’accumulation du capital et l’exploitation du travail, qui sont pourtant la cause tant de la croissance que des destructions environnementales, elle ne fait ainsi que leur faciliter la tâche. » 33

Le rapport entre le libre et l’anarchisme devrait donc s’envisager sur un autre plan que l’opposition interne entre capitalistes et communistes et/ou libertaires (et/ou commonists), d’autant plus que ce type de brouillage n’a jusqu’à présent fait qu’accréditer les arguments en faveur de la privatisation logicielle aux yeux de la majorité des acteurs de l’économie numérique34. Ce rapport devrait plutôt s’envisager du point de vue émancipateur ou non par rapport au capitalisme. De ce point de vue, exit les libertariens. Mais alors, comme nous avons vu que pour l’essentiel l’anarchisme libriste est un mode de production efficace dans une économie contributive (qui devrait être néanmoins plus équilibrée), a-t-il quelque chose de plus ?

Nous pouvons partir d’un autre texte célèbre chez les libristes, celui d’Eben Moglen, fondateur du Software Freedom Law Center, qui intitulait puissamment son article : « L’anarchisme triomphant : le logiciel libre et la mort du copyright »35. Selon lui, le logiciel conçu comme une propriété crée un rapport de force dont il est extrêmement difficile de sortir avec les seules bonnes intentions des licences libres. E. Moglen prend l’exemple du très long combat contre la mainmise de Microsoft sur les ordinateurs neufs grâce à la vente liée, et nous n’en sommes pas complètement sortis. Aujourd’hui, nous pourrions prendre bien d’autres exemples qui, tous, sont le fait d’alliances mondialisées et de consortiums sur-financiarisés de fabricants de matériel et de fournisseurs de services. Il faut donc opposer à cette situation une nouvelle manière d’envisager la production et la créativité.

Code source et commentaires désignent le couple entre fonctionnalité et expressivité des programmes. En tant que tels, ils peuvent être considérés comme autant de preuves que le travail intellectuel nécessaire à l’élaboration d’un programme n’est pas uniquement le fait de travailler sur des algorithmes mais aussi en inventer les propriétés. Dès lors, on peut comprendre que le copyright puisse s’appliquer à plein. Dès l’instant que les ordinateurs ont cessé d’être des machines centrales aux coûts extrêmement élevés, et que pour les faire fonctionner les logiciels ont cessé d’être donnés (car le coût marginal de la création logicielle était faible en comparaison du coût de fabrication d’une grosse machine), l’ordinateur personnel a multiplié mécaniquement le besoin de réaliser des plus-values sur le logiciel et enfermé ce dernier dans une logique de copyright. Seulement voilà : lorsqu’une entreprise (par exemple Microsoft) exerce un monopole sur le logiciel, bien qu’elle puisse embaucher des centaines de développeurs, elle ne sera jamais en mesure d’adapter, tester à grande échelle, proposer des variations de son logiciel en quantités suffisantes pour qu’il puisse correspondre aux besoins qui, eux, ont tendance à se multiplier au fur et à mesure que les ordinateurs pénètrent dans les pratiques sociales et que la société devient un maillage en réseau. Si bien que la qualité et la flexibilité des logiciels privateurs n’est jamais au rendez-vous. Si ce défaut de qualité passe souvent inaperçu, c’est aux yeux de l’immense majorité des utilisateurs qui ne sont pas techniciens, et pour lesquels les monopoles créent des cages d’assistanat et les empêche (par la technique du FUD) d’y regarder de plus près. Après tout, chacun peut se contenter du produit et laisser de côté des défauts dont il peut toujours (essayer de) s’accommoder.

En somme, les utilisateurs ont été sciemment écartés du processus de production logicielle. Alors qu’à l’époque plus ancienne des gros ordinateurs, on adaptait les logiciels aux besoins et usages, et on pouvait les échanger et les améliorer en partant de leur utilisation. Or, l’histoire des sciences et des technologies nous apprend que l’avancement des sciences et technologies dépendent d’apprentissages par la pratique, d’appropriations collectives de l’existant, d’innovation par incrémentation et implications communautaires (c’est ce qu’ont montré David Edgerton36 et Clifford Conner37). En ce sens, le modèle économique des monopoles du logiciel marche contre l’histoire.

 

mème en deux images. dans la première, le logiciel libre tend les bras vers l'autogestion des communs, dans la deuxième qui dézoome la première, on voit qu'un gros personnage "les géants du web" retient fermement le logiciel libre qui ne peut atteindre l'autogestion des communs

C’est de ce point de vue que le logiciel libre peut être envisagé non seulement comme la production d’un mouvement de résistance38, mais aussi comme un mode de production conçu avant tout comme une réaction à la logique marchande, devant lutter sans cesse contre la « plasticité du capitalisme » (au sens de F. Braudel39), avec des résultats plus ou moins tangibles. Même si la question de l’écriture collective du code source mériterait d’être mieux analysée pour ses valeurs performatives intrinsèques40.

Comme le dit Eben Moglen racontant le projet GNU de R. M. Stallman : le logiciel libre pouvait « devenir un projet auto-organisé, dans lequel aucune innovation ne serait perdue à travers l’exercice des droits de propriété ». Depuis le milieu des années 1980 jusqu’à la fin des années 1990, non seulement des logiciels ont été produits de manière collective en dehors du copyright, mais en plus de cela, des systèmes d’exploitation comme GNU Linux aux logiciels de serveurs et à la bureautique, leur reconnaissance par l’industrie elle-même (normes et standards) s’est imposée à une échelle si vaste que le logiciel libre a bel et bien gagné la course dans un monde où la concurrence était faussée si l’on jouait avec les mêmes cartes du copyright.

C’est ce qui fait dire à Eben Moglen que « lorsqu’il est question de faire de bons logiciels, l’anarchisme gagne ». Il oppose deux choses à l’industrie copyrightée du logiciel :

  • les faits : le logiciel libre est partout, il n’est pas une utopie,
  • le mode de production : l’anarchisme est selon lui la meilleure « organisation » de la production.

Reste à voir comment il conçoit l’anarchisme. Il faut confronter ici deux pensées qui sont contemporaines, celle d’Eben Moglen et celle de Murray Bookchin. Le second écrit en 1995 que le mot « anarchisme » allait bientôt être employé comme catégorie d’action bourgeoise41 :

«  les objectifs révolutionnaires et sociaux de l’anarchisme souffrent d’une telle dégradation que le mot « anarchie » fera bientôt partie intégrante du vocabulaire chic bourgeois du siècle à venir : une chose quelque peu polissonne, rebelle, insouciante, mais délicieusement inoffensive ».

Bookchin écrivait aussi « Ainsi, chez nombre d’anarchistes autoproclamés, le capitalisme disparaît, remplacé par une « société industrielle » abstraite. »

Mais d’un autre côté, à peine six ans plus tard, il y a cette volonté d’E. Moglen d’utiliser ce mot et d’entrer en confrontation assez directe avec ce que M. Bookchin disait de la tendance new age férue d’individualisme et de primitivisme et qui n’avait plus de rien de socialiste. En fin de compte, si on conçoit avec E. Moglen l’anarchisme comme un mode de production du logiciel libre, alors on fait aussi une jonction entre la lutte contre le modèle du monopole et du copyright et la volonté de produire des biens numériques, à commencer par des logiciels, tout en changeant assez radicalement l’organisation sociale de la production contre une machinerie industrielle. Et cette lutte n’a alors plus rien d’abstrait. La critique de M. Bookchin, était motivée par le fait que l’anarchisme s’est transformé des années 1970 aux années 1990 et a fini par dévoyer complètement les théories classiques de l’anarchisme au profit d’une culture individualiste et d’un accomplissement de soi exclusif. Le logiciel libre, de ce point de vue, pourrait avoir le mérite de resituer l’action anarchiste dans un contexte industriel (la production de logiciels) et social (les équilibres de conception et d’usage entre utilisateurs et concepteurs).

Et l’État dans tout cela ? est-il évacué de l’équation ? Ces dernières décennies sont teintées d’un néolibéralisme qui façonne les institutions et le droit de manière à créer un espace marchand où les êtres humains sont transformés en agents compétitifs. La production communautaire de logiciel libre ne serait-elle qu’un enfermement dans une plasticité capitaliste telle qu’elle intègre elle-même le mode de production anarchiste du libre dans une compétition dont le grand gagnant est toujours celui qui réussit à piller le mieux les communs ainsi produits ? Car si c’est le cas, alors M. Bookchin avait en partie raison : l’anarchisme n’a jamais pu résoudre la tension entre autonomie individuelle et liberté sociale autrement qu’en se contentant de s’opposer à l’autorité et à l’État, ce qu’on retrouve dans la reductio de l’anarchisme des libertariens – et contre cela M. Bookchin propose un tout autre programme, municipaliste et environnementaliste. Or, si on suit E. Moglen, on ne perçoit certes pas d’opposition frontale contre l’État, mais dans un contexte néolibéral, les monopoles industriels ne peuvent-ils pas être considérés comme les nouvelles figures d’opposition d’autorité et de pouvoir ?

Pour ma part, je pense que qu’État et monopoles se contractent dans le capitalisme de surveillance, un Léviathan contre lequel il faut se confronter. Toute la question est de savoir à quelle société libertaire est censé nous mener le logiciel libre. J’ai bien l’impression que sur ce point les libristes old school qui s’autoproclament anarchistes se trompent : ce n’est pas parce que le mouvement du logiciel libre propose une auto-organisation de la production logicielle et culturelle, contre les monopoles mais avec une simple injonction à l’émancipation, que cela peut déboucher sur un ordre social libertaire.

Là où le logiciel libre pourrait se réclamer de l’anarchisme, c’est dans le fait qu’il propose une très forte opposition aux institutions sociales oppressives que sont les monopoles et l’État, mais seulement à partir du moment où on conçoit le mouvement du logiciel libre non comme un mode de production anarchiste, mais comme un moment qui préfigure42 un ordre social parce qu’il s’engage dans une lutte contre l’oppression tout en mettant en œuvre un mode de production alternatif, et qu’il constitue un modèle qui peut s’étendre à d’autres domaines d’activité (prenons l’exemple des semences paysannes). Et par conséquent il devient un modèle anarchiste.

Si on se contente de n’y voir qu’un mode de production, le soi-disant anarchisme du logiciel libre est voué à n’être qu’un modèle bourgeois (pour reprendre l’idée de M. Bookchin), c’est à dire dénué de projet de lutte sociale, et qui se contente d’améliorer le modèle économique capitaliste qui accapare les communs : il devient l’un des rouages de l’oppression, il n’est conçu que comme une utopie « bourgeoisement acceptable ». C’est-à-dire un statut duquel on ne sort pas ou bien les pieds devant, comme un mode de production que le néomanagement a bel et bien intégré. Or, s’il y a une lutte anarchiste à concevoir aujourd’hui, elle ne peut pas se contenter d’opposer un modèle de production à un autre, elle doit se confronter de manière globale au capitalisme, son mode de production mais aussi son mode d’exploitation sociale.

Les limites de l’anarchisme utopique du Libre ont été révélées depuis un moment déjà. L’Electronic Frontier Foundation (où Eben Moglen officie) le reconnaît implicitement dans un article de mai 2023 écrit par Cory Doctorow et publié par l’EFF 43 :

« Alors que les régulateurs et les législateurs réfléchissent à l’amélioration de l’internet pour les êtres humains, leur priorité absolue devrait être de redonner du pouvoir aux utilisateurs. La promesse d’Internet était de supprimer les barrières qui se dressaient sur notre chemin : la distance, bien sûr, mais aussi les barrières érigées par les grandes entreprises et les États oppressifs. Mais les entreprises ont pris pied dans cet environnement de barrières abaissées, se sont retournées et ont érigé de nouvelles barrières de leur côté. Des milliards d’entre nous se sont ainsi retrouvés piégés sur des plateformes que beaucoup d’entre nous n’aiment pas, mais qu’ils ne peuvent pas quitter. »

Il faut donc des alternatives parce que les acteurs qui avaient promis de rendre les réseaux plus ouverts (le Don’t be evil de Google) ont non seulement failli mais, en plus, déploient des stratégies juridiques et commerciales perverses pour coincer les utilisateurs sur leurs plateformes. Dès lors, on voit bien que le problème qui se pose n’est pas d’opposer un mode de production à un autre, mais de tenter de gagner les libertés que le capitalisme de surveillance contient et contraint. On voit aussi que depuis 2001, les problématiques se concentrent surtout sur les réseaux et le pouvoir des monopoles. Là, on commence à toucher sérieusement les questions anarchistes. Dès lors l’EFF propose deux principes pour re-créer un Internet « d’intérêt public » :

  • le chiffrement de bout en bout et la neutralité du Net,
  • contourner les grandes plateformes.

Faut-il pour autant, comme le propose Kristin Ross44, pratiquer une sorte d’évacuation générale et se replier, certes de manière constructive, sur des objets de lutte plus fondamentaux, au risque de ne concevoir de lutte pertinente que des luttes exclusives, presque limitées à la paysannerie et l’économie de subsistance ? Je ne suis pas d’accord. Oui, il faut composer avec l’existant mais dans les zones urbaines, les zones rurales comme dans le cyberespace on peut préfigurer des formes d’organisation autonomes et des espaces à défendre. Le repli individualiste ou collectiviste-exclusif n’est pas une posture anarchiste. Premièrement parce qu’elle n’agit pas concrètement pour les travailleurs, deuxièmement parce que cela revient à abandonner ceux qui ne peuvent pas pratiquer ce repli de subsistance au risque de ce qu’on reprochait déjà aux petits-bourgeois communautaires hippies des années 1970, et troisièmement enfin, parce que je ne souhaite pas vivre dans une économie de subsistance, je veux vivre dans l’abondance culturelle, scientifique et même technique et donc lutter pour un nouvel ordre social égalitaire général et pas réservé à ceux qui feraient un choix de retrait, individuel et (il faut le reconnaître) parfois courageux.

Alors, vers quel anarchisme se diriger ?

Le potentiel libertaire de la technologie

En 1971, Sam Dolgoff publie un article sans concession dans la petite revue Newyorkaise Libertarian Analysis. L’article fut ensuite tiré à part à plusieurs reprises si bien que, sous le titre The Relevance of Anarchism to Modern Society45, le texte figure parmi les must read de la fin des années 1970. Dolgoff y décrit l’état de l’anarchisme dans une société prise dans les contradictions de la contre-culture des années 1960, et dont les effets se rapportent à autant de conceptions erronées de l’anarchisme qui se cristallisent dans un « néo-anarchisme » bourgeois discutable. Ce contre quoi S. Dolgoff avance ses arguments est l’idée selon laquelle l’anarchisme « filière historique » serait dépassé étant donné la tendance mondiale vers la centralisation économique, fruit des récents développements des sciences et des techniques, une sorte de fin de l’histoire (avant l’heure de celle de Fukuyama en 1992) contre laquelle on ne pourrait rien. Le sous-entendu met en avant la contradiction entre le positivisme dont s’inspire pourtant l’anarchisme de Proudhon à Bakounine, c’est-à-dire le développement en soi émancipateur des sciences et des techniques (à condition d’une éducation populaire), et le fait que cet élan positiviste a produit une mondialisation capitaliste contre laquelle aucune alternative anarchiste n’a pu s’imposer. Le réflexe social qu’on retrouve dans le mouvement contre-culturel des années 1960 et 1970, associé à ce que S. Dolgoff nomme le néo-anarchisme (bourgeois)46 (et qui sera repris en partie par M. Bookchin plus tard), amène à penser l’anarchisme comme une réaction à cette contradiction et par conséquent un moment de critique de l’anarchisme classique qui n’envisagerait pas correctement la complexité sociale, c’est-à-dire la grande diversité des nuances entre compromission et radicalisme, dans les rapports modernes entre économie, sciences, technologies et société. Ce qui donne finalement un anarchisme réactionnaire en lieu et place d’un anarchisme constructif, c’est-à-dire une auto-organisation fédéraliste qui accepte ces nuances, en particulier lors de l’avènement d’une société des médias, du numérique et de leur mondialisation (en plus des inégalités entre les pays).

Or, S. Dolgoff oppose à cette idée pessimiste le fait que la pensée anarchiste a au contraire toujours pris en compte cette complexité. Cela revient à ne justement pas penser l’anarchisme comme une série d’alternatives simplistes au gouvernementalisme (le contrôle de la majorité par quelques-uns). Il ne suffit pas de s’opposer au gouvernementalisme pour être anarchiste. Et c’est pourtant ce que les libertariens vont finir par faire, de manière absurde. L’anarchisme, au contraire a toujours pris en compte le fait qu’une société anarchiste implique une adaptation des relations toujours changeantes entre une société et son environnement pour créer une dynamique qui recherche équilibre et harmonie indépendamment de tout autoritarisme. Dès lors les sciences et techniques ont toujours été des alliées possibles. Pour preuve, cybernétique et anarchisme ont toujours fait bon ménage, comme le montre T. Swann dans un article au sujet de Stafford Beer, le concepteur du projet Cybersyn au Chili sous la présidence S. Allende47 : un mécanisme de contrôle qui serait extérieur à la société implique l’autoritarisme et un contrôle toujours plus contraignant, alors qu’un mécanisme inclus dans un système auto-organisé implique une adaptation optimale au changement48. L’optimisation sociale implique la décentralisation, c’est ce qu’ont toujours pensé les anarchistes. En ce sens, les outils numériques sont des alliés possibles.

En 1986, quinze ans après son article de 1971, dans le premier numéro de la revue qu’il participe à fonder (la Libertarian Labor Review), S. Dolgoff publie un court article intitulé « Modern Technology and Anarchism »49. Il revient sur la question du lien entre l’anarchisme et les nouvelles technologies de communication et d’information qu’il a vu naître et s’imposer dans le mouvement d’automatisation de l’industrie et plus généralement dans la société. Les réseaux sont pour lui comme un pharmakon (au sens de B. Stiegler), ils organisent une dépossession par certains aspects mais en même temps peuvent être des instruments d’émancipation.

Cet article de 1986 est quelque peu redondant avec celui de 1971. On y retrouve d’ailleurs à certains endroits les mêmes phrases et les mêmes idées. Pour les principales : il y a un déjà-là anarchiste, et la société est un réseau cohérent de travail coopératif. Pour S. Dolgoff, la technologie moderne a résolu le problème de l’accès aux avantages de l’industrie moderne, mais ce faisant elle a aussi accru significativement la décentralisation dans les entreprises avec la multiplication de travailleurs hautement qualifiés capables de prendre des décisions aux bas niveaux des organisations. S. Dolgoff cite plusieurs auteurs qui ont fait ce constat. Ce dernier est certes largement terni par le fait que cette décentralisation fait écho à la mondialisation qui a transformé les anciennes villes industrielles en villes fantômes, mais cette mondialisation est aussi un moment que l’anarchie ne peut pas ne pas saisir. En effet, cette mise en réseau du monde est aussi une mise en réseau des personnes. Si les technologies modernes d’information, les ordinateurs et les réseaux, permettent d’éliminer la bureaucratie et abandonner une fois pour toutes la centralisation des décisions, alors les principes de coopération et du déjà-là anarchiste pourront se déployer. Faire circuler librement l’information est pour S. Dolgoff la condition nécessaire pour déployer tout le « potentiel libertaire de la technologie ». Mais là où il pouvait se montrer naïf quinze ans auparavant, il concède que les obstacles sont de taille et sont formés par :

« Une classe croissante de bureaucraties étatiques, locales, provinciales et nationales, de scientifiques, d’ingénieurs, de techniciens et d’autres professions, qui jouissent tous d’un niveau de vie bien supérieur à celui du travailleur moyen. Une classe dont le statut privilégié dépend de l’acceptation et du soutien du système social réactionnaire, qui renforce considérablement les variétés « démocratiques », « sociales » et « socialistes » du capitalisme. (…) Tous reprennent les slogans de l’autogestion et de la libre association, mais ils n’osent pas lever un doigt accusateur sur l’arc sacré de l’État. Ils ne montrent pas le moindre signe de compréhension du fait évident que l’élimination de l’abîme séparant les donneurs d’ordres des preneurs d’ordres – non seulement dans l’État mais à tous les niveaux – est la condition indispensable à la réalisation de l’autogestion et de la libre association : le cœur et l’âme même de la société libre. »

Peu d’années avant son décès, et après une longue carrière qui lui avait permis de prendre la mesure de l’automatisation de l’industrie et voir l’arrivée des ordinateurs dans les processus de production et de contrôle, Sam Dolgoff a bien saisi la contradiction entre le « potentiel libertaire de la technologie » et l’apparition d’une classe sociale qui, avec l’aide de l’État et forte de subventions, réussit le tour de force d’accaparer justement ce potentiel dans une démarche capitaliste tout en parant des meilleures intentions et des meilleurs slogans ce hold-hup sur le travail collectif et la coopération.

C’est pourquoi il est pertinent de parler d’idéologie concernant la Silicon Valley, et c’est d’ailleurs ce que Fred Turner avait bien vu50 :

« La promesse utopique de la Valley est la suivante : Venez ici, et construisez-y l’avenir avec d’autres individus partageant les mêmes idées. Immergez-vous dans le projet et ressortez-en en ayant sauvé l’avenir. »

Les nouvelles frontières sociales des utopistes de la Silicon Valley ont été une interprétation du potentiel libertaire de la technologie, faite de néo-communautarisme et de cette Nouvelle Gauche que S. Dolgoff critiquait dès 1971. Mais ces nouvelles frontières ont été transformées en mythe parce que la question est de savoir aujourd’hui qui décide de ces nouvelles frontières, qui décide de consommer les technologies de communication censées permettre à tous d’avoir accès à l’innovation. Qui décide qu’un téléphone à plus de 1000€ est la meilleure chose à avoir sur soi pour une meilleure intégration sociale ? Qui décide que la nouvelle frontière repose sur la circulation de berlines sur batteries en employant une main-d’œuvre bon marché ?

Ouvrir le Libre

Il est temps de réhabiliter la pensée de Sam Dolgoff. Le Libre n’est pas qu’un mode de production anarchiste, il peut être considéré comme un instrument de libération du potentiel libertaire de la technologie.

Scander haut et fort que les hackers sont des anarchistes ne veut rien dire, tant que le modèle organisationnel et économique ne sert pas à autre chose que de développer du code. Rester dans le positivisme hérité des anarchistes de la première moitié du XXe siècle a ce double effet : un sentiment de dépassement lorsqu’on considère combien le « progrès » technologique sert à nous oppresser, et un sentiment d’abandon parce que celleux qui sont en mesure de proposer des alternatives techniques d’émancipation ont tendance à le faire en vase clos et reproduisent, souvent inconsciemment, une forme de domination.

Ce double sentiment a des conséquences qui dépassent largement la question des logiciels. Il est toujours associé à la tendance toujours plus grande de l’État à accroître les inégalités sociales, associé aux conséquences climatiques du système économique dominant qui nous conduit au désastre écologique, associé à la répression toujours plus forte par l’autoritarisme des gouvernements qui défendent les intérêts des plus riches contre les travailleurs et contre tout le reste. Il en résulte alors un désarmement technologique des individus là où il faut se défendre. À défaut, les solutions envisagées ont toujours petit goût pathétique : des plaidoyers qui ne sont jamais écoutés et trouvent encore moins d’écho dans la représentation élective, ou des actions pacifiques réprimées dans la violence.

les quatre vieux dans un salon doré, plus ou moins grimés. L'un dit : "bon, à partir de là, tâchez d'avoir l'air con comme des bourgeois, il s'agit de pas se faire repérer"
Les Vieux Fourneaux, Lupanu et Cauuet, extrait de la BD

 

Le potentiel libertaire du logiciel libre a cette capacité de réarmement technologique des collectifs car nous évoluons dans une société de la communication où les outils que nous imposent les classes dominantes sont toujours autant d’outils de contrôle et de surveillance. Il a aussi cette capacité de réarmement conceptuel dans la mesure où notre seule chance de salut consiste à accroître et multiplier les communs, qu’ils soient numériques ou matériels. Or, la gestion collective de ces communs est un savoir-faire que les mouvements libristes possèdent et diffusent. Ils mettent en pratique de vieux concepts comme l’autogestion, mais savent aussi innover dans les pratiques coopératives, collaboratives et contributives.

Occupy Wall Street, Nuit Debout, et bien d’autres évènements du genre, ont été qualifiés de préfiguratifs parce qu’ils opposaient de nouveaux imaginaires et de nouvelles manières de penser le monde tout en mettant en pratique les concepts mêmes qu’ils proposaient. Mais ce spontanéisme a tendance à se montrer évanescent face à des concrétisations préfiguratives comme les ZAD, la Comuna de Oaxaca, le mouvement zapatiste, et des milliers d’autres concrétisations à travers le monde et dont la liste serait fastidieuse. Rien qu’en matière d’autogestion, il suffit de jeter un œil sur les 11 tomes (!) de l’encyclopédie de l’Association Autogestion (2019)51. Or, dans tous ces mouvements, on retrouve du logiciel libre, on retrouve des libristes, on retrouve des pratiques libristes. Et ce n’est que très rarement identifié et formalisé.

Que faire ? Peut-être commencer par s’accorder sur quelques points, surtout entre communautés libristes et communautés libertaires :

  1. Ce n’est pas parce qu’on est libriste qu’on est anarchiste, et l’éthique hacker n’est pas un marqueur d’anarchisme. De manière générale, mieux vaut se méfier de l’autoproclamation dans ce domaine, surtout si, en pratique, il s’agit de légitimer le pillage des communs. Par contre il y a beaucoup d’anarchistes libristes.
  2. Les pratiques anarchistes n’impliquent pas obligatoirement l’utilisation et/ou la création de logiciels libres ou d’autres productions libres des communs numériques. Le Libre n’a pas à s’imposer. Mais dans notre monde de communication, le Libre en tant qu’outil est un puissant moteur libertaire. Il permet aux libertaires de mettre en œuvre des actions de communication, de coopération et de stratégie.
  3. Proposer le logiciel libre ou les licences libres n’est pas un acte altruiste ni solidaire s’il n’est pas accompagné de discours ou d’actes émancipateurs. Il peut même créer l’inverse par excès, submersion de connaissances et finalement exclusion. Il faut travailler de plus en plus les conditions d’adoption de solutions techniques libres dans les collectifs, mieux partager les expériences, favoriser l’inclusion dans la décision d’adoption de telles ou telles techniques. Elles doivent apporter du sens à l’action (et nous revoici dans la réflexion déjà ancienne du rapport entre travailleurs et machines).
  4. Il vaut mieux privilégier l’émancipation non-numérique à la noyade techno-solutionniste qui résulte d’un manque de compétences et de connaissances.
  5. La solidarité doit être le pilier d’une éducation populaire au numérique. Cela ne concerne pas uniquement l’anarchisme. Mais un collectif ne peut pas seul effectuer une démarche critique sur ses usages numériques s’il n’a pas en même temps les moyens de les changer efficacement. Les collectifs doivent donc échanger et s’entraider sur ces points (combien de groupes anarchistes utilisent Facebook / Whatsapp pour s’organiser ? ce n’est pas par plaisir, sûr !).

Notes


  1. La Quadrature du Net, « Affaire du 8 décembre : le chiffrement des communications assimilé à un comportement terroriste », 5 juin 2023, URL.↩︎
  2. On peut prendre un exemple trivial, celui du microblogage qui transforme la communication en flux d’information. Le fait de ne pouvoir s’exprimer qu’avec un nombre limité de caractère et de considérer l’outil comme le support d’un réseau social (où le dialogue est primordial), fait que les idées et les concepts ne peuvent que rarement être développés et discutés, ce qui transforme l’outil en support de partage d’opinions non développées, raccourcies, caricaturales. Ajoutons à cela le fait que, sur un système de microblogage commercial, les algorithmes visant à générer de la lucrativité attentionnelle, ce sont les contenus les poins pertinents pour la pensée et les plus pertinents pour le trafic qui sont mis en avant. Contrairement à ce qu’annoncent les plateformes commerciales de microblogage, ce dernier ne constitue absolument pas un support d’expression libre, au contraire il réduit la pensée à l’opinion (ou ne sert que de support d’annonces diverses). Un autre exemple concerne la « rédaction web » : avec la multiplication des sites d’information, la manière d’écrire un article pour le web est indissociable de l’optimisation du référencement. Le résultat est que depuis les années 2000 les contenus sont tous plus ou moins calibrés de manière identique et les outils rédactionnels sont configurés pour cela.↩︎
  3. Lawrence Lessig, « Code is Law – On Liberty in Cyberspace », Harvard Magazine, janvier 2000. Trad. Fr sur Framablog.org, 22 mai 2010.↩︎
  4. Aliénation de tout le monde en fait. « L’aliénation apparaît au moment où le travailleur n’est plus propriétaire de ses moyens de production, mais elle n’apparaît pas seulement à cause de cette rupture du lien de propriété. Elle apparaît aussi en dehors de tout rapport collectif aux moyens de production, au niveau proprement individuel, physiologique et psychologique (…) Nous voulons dire par là qu’il n’est pas besoin de supposer une dialectique du maître et de l’esclave pour rendre compte de l’existence d’une aliénation dans les classes possédantes ». G. Simondon, Du mode d’existence des objets techniques, Paris, Aubier, 1989, p. 118.↩︎
  5. Steven Levy, Hackers. Heroes of the Computer Revolution, New York, Dell Publishing, 1994. Steven Lévy, L’éthique des hackers, Paris, Globe, 2013.↩︎
  6. Ainsi on peut s’interroger sur la tendance du protocole ouvert ActivityPub (qui fait fonctionner Mastodon, par exemple) à couvrir de nombreuses applications du Fediverse sans qu’une discussion n’ait été réellement menée entre les collectifs sur une stratégie commune multiformats dans le Fediverse. Cela crée une brèche récemment exploitée par l’intention de Meta de vouloir intégrer le Fediverse avec Threads, au risque d’une stratégie de contention progressive des utilisateurs qui mettrait en danger l’utilisation même d’ActivityPub et par extension l’ensemble du Fediverse. On peut lire à ce sujet la tribune de La Quadrature du Net : « L’arrivée de Meta sur le Fédivers est-elle une bonne nouvelle ? », 09 août 2023, URL.↩︎
  7. Sébastien Broca, Utopie du logiciel libre. Lyon, Éditions le Passager clandestin, 2018.↩︎
  8. Fred Turner, Aux sources de l’utopie numérique : De la contre culture à la cyberculture. Stewart Brand, un homme d’influence, Caen, C&F Editions, 2012.↩︎
  9. Christophe Masutti, « Lire Fred Turner : de l’usage de l’histoire pour préfigurer demain », dans Retour d’Utopie. De l’influence du livre de Fred Turner, Caen, Les cahiers de C&F éditions 6, juin 2023, p. 70-82.↩︎
  10. Detlef Hartmann, Die Alternative: Leben als Sabotage – zur Krise der technologischen Gewalt, Tübingen: IVA-Verlag, 1981. Voir aussi Capulcu Kollektiv, DISRUPT ! – Widerstand gegen den technologischen Angriff, sept. 2017 (URL).↩︎
  11. Alan F. Westin, Privacy and Freedom, New York, Atheneum, 1967.↩︎
  12. C’est le ralliement des mouvements pour les droits et libertés individuels, le lien entre l’expérience personnelle (par exemple les inégalités de race ou de genre dont des individus pourraient faire l’expérience quotidienne) et les structures politiques et sociales qui sont à la source des problèmes et dont il fallait procéder à la remise en question.↩︎
  13. Nadia Eghbal, Sur quoi reposent nos infrastructures numériques ? : Le travail invisible des faiseurs du web. Marseille, OpenEdition Press, 2017. https://doi.org/10.4000/books.oep.1797.↩︎
  14. Dans le cas de communs numériques, qui sont des biens non rivaux, il peut être difficile de comprendre cette notion d’appauvrissement. Comme le montrent Pierre Dardot et Christian Laval dans leur livre Communs, pour un commun, la richesse dépend autant du processus contributif (l’activité collective qui consiste à en faire un commun) que du bien lui-même, même s’il peut être dupliqué à l’infini dans le cas des biens non rivaux. Prenons deux exemples : 1) pour un champ cultivé, si tout le monde se sert et en abuse et personne ne sème ni n’entretient et qu’il n’y a pas d’organisation collective pour coordonner les efforts et décider ensemble que faire du champ, ce dernier reste bien un commun mais il ne donne rien et va disparaître. 2) Pour un logiciel, si personne ne propose de mise à jour, si personne n’enrichit ou corrige régulièrement le code et s’il n’y a pas d’organisation des contributions, ce logiciel aura tendance à disparaître aussi. Voir Pierre Dardot et Christian Laval, Communs. Essai sur la révolution au XXIe siècle, Paris, La Découverte, 2014.↩︎
  15. Pierre Crétois (dir.), L’accaparement des biens communs, Paris, Presses universitaires de Paris Nanterre, 2022.↩︎
  16. On peut voir sur ce point le travail que réalise Laurent Marseault : https://cocotier.xyz/?ConfPompier.↩︎
  17. Au sens où l’entendait Bernard Stiegler, c’est-à-dire la privation d’un sujet de ses savoirs (savoir-faire, savoir-vivre, savoir concevoir et théoriser). Voir Bernard Stiegler, États de choc: bêtise et savoir au XXIe siècle, Paris, France, Mille et une nuits, 2012.↩︎
  18. On peut voir les statistiques sur l’Open Source Contributor Index : https://opensourceindex.io/.↩︎
  19. Simon Butler et al., « On Company Contributions to Community Open Source Software Projects », IEEE Transactions on Software Engineering, 47-7, 2021, p. 1381‑1401.↩︎
  20. Antonio A. Casilli, En attendant les robots: enquête sur le travail du clic, Paris, France, Éditions du Seuil, 2019.↩︎
  21. Et ils sont souvent les dindons de la farce. En Europe, la situation est équivoque. D’un côté, un espace est ouvert grâce aux dispositifs juridiques censés protéger l’économie européenne et les européens contre les effets des multinationales à l’encontre de la vie privée, au nom de la défense des consommateurs, et en faveur de la souveraineté numérique. Les logiciels libres y trouvent quelques débouchés pertinents auprès du public et des petites structures. Mais d’un autre côté, une grande part de la production libre et open source repose sur des individus et des petites entreprises, alors même que les gouvernements (et c’est particulièrement le cas en France) leur créent des conditions d’accès au marché très défavorables et privilégient les monopoles extra-européens par des jeux de partenariats entre ces derniers et les intégrateurs, largement subventionnés. Voir Jean-Paul Smets, « Confiance numérique ou autonomie, il faut choisir », in Annales des Mines, 23, La souveraineté numérique : dix ans de débat, et après ?, Paris, 2023., p. 30-38.↩︎
  22. Même si le protocole ActivityPub pourrait être suffisamment détourné ou influencé pour ne plus assurer l’interopérabilité nécessaire. La communauté du Fediverse doit pour cela s’opposer en masse à Thread, la solution que commence à imposer l’entreprise Meta (Facebook), dans l’optique de combler le manque à gagner que représente le Fediverse par rapport aux média sociaux privateurs.↩︎
  23. Christophe Masutti, « En passant par l’Arkansas. Ordinateurs, politique et marketing au tournant des années 1970 », Zilsel, 9-2, 2021, p. 29‑70.↩︎
  24. On peut se reporter à cette louable tentative issue de It’s Going Down, et que nous avons publiée sur le Framablog. Il s’agit d’un livret d’auto-défense en communication numérique pour les groupes anarchistes. Bien qu’offrant un panorama complet et efficace des modes de communications et rappelant le principe de base qui consiste en fait à les éviter pour privilégier les rencontres physiques, on voit tout de même qu’elle souffre d’un certain manque de clairvoyance sur les points d’achoppement techniques et complexes qu’il serait justement profitable de partager. Voir « Infrastructures numériques de communication pour les anarchistes (et tous les autres…) », Framablog, 14 avril 2023.↩︎
  25. Philippe Borrel, La bataille du Libre (documentaire), prod. Temps Noir, 2019, URL.↩︎
  26. Sam Williams, Richard Stallman et Christophe Masutti, Richard Stallman et la révolution du logiciel libre. Une biographie autorisée, 1re éd., Eyrolles, 2010.↩︎
  27. Richard Stallman (interview), « Is Free Software Anarchist? », vidéo sur Youtube.↩︎
  28. Michel Lallement, L’âge du faire: hacking, travail, anarchie, Paris, France, Éditions Points, 2018.↩︎
  29. Christian Imhorst, Die Anarchie der Hacker, Marburg, Tectum – Der Wissenschaftsverlag, 2011. Christian Imhorst, « Anarchie und Quellcode – Was hat die freie Software-Bewegung mit Anarchismus zu tun? », in Open Source Jahrbuch 2005, Berlin, 2005.↩︎
  30. Dale A. Bradley, « The Divergent Anarcho-utopian Discourses of the Open Source Software Movement », Canadian Journal of Communication, 30-4, 2006, p. 585‑612.↩︎
  31. Marie-Christine Granjon, « Les radicaux américains et le «système» », Raison présente, 28-1, 1973, p. 93‑112.↩︎
  32. David DeLeon, The American as Anarchist: Reflections on Indigenous Radicalism, Baltimore, Johns Hopkins University Press, 2019.↩︎
  33. Murray Bookchin, Changer sa vie sans changer le monde. L’anarchisme contemporain entre émancipation individuelle et révolution sociale, Marseille, Agone, 2019, pp. 61-63.↩︎
  34. En 2015, c’est ce qui a permis à Bill Gates de caricaturer, sans les citer, des personnes comme Joseph Stiglitz et d’autres partisans pour une réforme des brevets (pas seulement logiciels) en sortes de néocommunistes qui avanceraient masqués. Voir cet entretien, cet article de Libération, et cette « réponse » de R. M. Stallman.↩︎
  35. Eben Moglen, « L’anarchisme triomphant. Le logiciel libre et la mort du copyright », Multitudes, 5-2, 2001, p. 146‑183.↩︎
  36. David Edgerton, « De l’innovation aux usages. Dix thèses éclectiques sur l’histoire des techniques », Annales. Histoire, sciences sociales, 53-4, 1998, p. 815‑837.↩︎
  37. Clifford D. Conner, Histoire populaire des sciences, Montreuil, France, Éditions L’Échappée, 2011.↩︎
  38. Amaelle Guiton, Hackers: au cœur de la résistance numérique, Vauvert, France, Au diable Vauvert, 2013.↩︎
  39. « Le capitalisme est d’essence conjoncturelle. Aujourd’hui encore, une de ses grandes forces est sa facilité d’adaptation et de reconversion », Fernand Braudel, La dynamique du capitalisme, Paris, Flammarion, 2018.↩︎
  40. Stéphane Couture, « L’écriture collective du code source informatique. Le cas du commit comme acte d’écriture », Revue d’anthropologie des connaissances, 6, 1-1, 2012, p. 21‑42.↩︎
  41. Murray Bookchin, Changer sa vie sans changer le monde, op. cit., p. 12 et p. 10.↩︎
  42. Comme je l’ai écrit dans un précédent billet de blog, plusieurs auteurs donnent des définitions du concept de préfiguration. À commencer par David Graeber, pour qui la préfiguration est « l’idée selon laquelle la forme organisationnelle qu’adopte un groupe doit incarner le type de société qu’il veut créer ». Un peu plus de précision selon Darcy Leach pour qui la préfigurativité est « fondée sur la prémisse selon laquelle les fins qu’un mouvement social vise sont fondamentalement constituées par les moyens qu’il emploie, et que les mouvements doivent par conséquent faire de leur mieux pour incarner – ou “préfigurer” – le type de société qu’ils veulent voir advenir. ». David Graeber, Comme si nous étions déjà libres, Montréal, Canada, Lux éditeur, 2014. Darcy K. Leach, « Prefigurative Politics », in The Wiley-Blackwell Encyclopedia of Social and Political Movements, John Wiley & Sons, Ltd, 2013.↩︎
  43. Cory Doctorow, « As Platforms Decay, Let’s Put Users First », 09 mai 2023, URL.↩︎
  44. Kristin Ross, La forme-Commune. La lutte comme manière d’habiter, Paris, La Fabrique Editions, 2023.↩︎
  45. Sam Dolgoff, The relevance of anarchism to modern society, Troisième édition., Tucson, AZ, See Sharp Press, 2001.↩︎
  46. Sam Dolgoff, « Le Néo-anarchisme américain. Nouvelle gauche et gauche traditionnelle », Le Mouvement social, num. 83, 1973, p. 181‑99. « (…) intellectuels petits-bourgeois, des étudiants et des « hippies » qui constituaient l’essentiel de la nouvelle gauche ».↩︎
  47. Thomas Swann, « Towards an anarchist cybernetics: Stafford Beer, self-organisation and radical social movements | Ephemeral Journal », Ephemera. Theory and politics in organization, 18-3, 2018, p. 427‑456.↩︎
  48. En théorie du moins. Si on regarde de plus près l’histoire du projet Cybersyn, c’est par la force des choses que le système a aussi été utilisé comme un outil de contrôle, en particulier lorsque les tensions existaient entre les difficultés d’investissement locales et les rendements attendus au niveau national. En d’autres termes, il fallait aussi surveiller et contrôler les remontées des données, lorsqu’elles n’étaient pas en phase avec la planification. Cet aspect technocratique a vite édulcoré l’idée de la prise de décision collective locale et de la participation socialiste, et a fini par classer Cybersyn au rang des systèmes de surveillance. Hermann Schwember, qui était l’un des acteurs du projet est revenu sur ces questions l’année du coup d’État de Pinochet et peu de temps après. Hermann Schwember, « Convivialité et socialisme », Esprit, juil. 1973, vol. 426, p. 39-66. Hermann Schwember, « Cybernetics in Government: Experience With New Tools for Management in Chile 1971-1973 », In : Hartmut Bossel (dir.), Concepts and Tools of Computer Based Policy Analysis, Basel, Birkhäuser – Springer Basel AG, 1977, vol.1, p. 79-138. Pour une histoire complète, voir Eden Medina, Cybernetic Revolutionaries. Technology and Politics in Allende’s Chile, Boston, MIT Press, 2011. Et une section de mon ouvrage Christophe Masutti, Affaires privées. Aux sources du capitalisme de surveillance, Caen, C&F Éditions, 2020.↩︎
  49. Sam Dolgoff, « Modern Technology and Anarchism », Libertarian Labor Review, 1, 1986, p. 7‑12.↩︎
  50. Fred Turner, « Ne soyez pas malveillants. Utopies, frontières et brogrammers », Esprit, 434, mai 2019, URL.↩︎
  51. Association Autogestion, Autogestion. L’encyclopédie internationale, Paris, Syllepse, 2019, vol. 1-11.↩︎