Changer le monde, un octet à la fois

Cette année, comme les précédentes, Framasoft fait appel à votre générosité afin de poursuivre ses actions.

Depuis 14 ans : promouvoir le logiciel libre et la culture libre

L’association Framasoft a 14 ans. Durant nos 10 premières années d’existence, nous avons créé l’annuaire francophone de référence des logiciels libres, ouvert une maison d’édition ne publiant que des ouvrages sous licences libres, répondu à d’innombrables questions autour du libre, participé à plusieurs centaines d’événements en France ou à l’étranger, promu le logiciel libre sur DVD puis clé USB, accompagné la compréhension de la culture libre, ou plutôt des cultures libres, au travers de ce blog, traduit plus de 1 000 articles ainsi que plusieurs ouvrages, des conférences, et bien d’autres choses encore !

Depuis 4 ans, décentraliser Internet

En 2014, l’association prenait un virage en tentant de sensibiliser non seulement à la question du libre, mais aussi à celle de la problématique de la centralisation d’Internet. En déconstruisant les types de dominations exercées par les GAFAM (dominations technique, économique, mais aussi politique et culturelle), nous avons pendant plusieurs années donné à voir en quoi l’hyperpuissance de ces acteurs mettait en place une forme de féodalité.

Et comme montrer du doigt n’a jamais mené très loin, il a bien fallu initier un chemin en prouvant que le logiciel libre était une réponse crédible pour s’émanciper des chaînes de Google, Facebook & co. En 3 ans, nous avons donc agencé plus de 30 services alternatifs, libres, éthiques, décentralisables et solidaires. Aujourd’hui, ces services accueillent 400 000 personnes chaque mois. Sans vous espionner. Sans revendre vos données. Sans publicité. Sans business plan de croissance perpétuelle.

Parfois, Framasoft se met au vert. Parce qu’il y a un monde par-delà les ordinateurs…

 

 

Mais Framasoft, c’est une bande de potes, pas la #startupnation. Et nous ne souhaitions pas devenir le « Google du libre ». Nous avons donc en 2016 impulsé le collectif CHATONS, afin d’assurer la résilience de notre démarche, mais aussi afin de « laisser de l’espace » aux expérimentations, aux bricolages, à l’inventivité, à l’enthousiasme, aux avis divergents du nôtre. Aujourd’hui, une soixantaine de chatons vivent leurs vies, à leurs rythmes, en totale indépendance.

Il y a un an : penser au-delà du code libre

Il y a un an, nous poursuivions notre virage en faisant 3 constats :

  1. L’open source se porte fort bien. Mais le logiciel libre (c-à-d. opensource + valeurs éthiques) lui, souffre d’un manque de contributions exogènes.
  2. Dégoogliser ne suffit pas ! Le logiciel libre n’est pas une fin en soi, mais un moyen (nécessaire, mais pas suffisant) de transformation de la société.
  3. Il existe un ensemble de structures et de personnes partageant nos valeurs, susceptibles d’avoir besoin d’outils pour faire advenir le type de monde dont nous rêvons. C’est avec elles qu’il nous faut travailler en priorité.

Est-ce une victoire pour les valeurs du Libre que d’équiper un appareil tel que le drone militaire MQ-8C Fire Scout ?
Nous ne le pensons pas.
Cliché
Domaine public – Wikimedia

 

Face à ces constats, notre feuille de route Contributopia vise à proposer des solutions. Sur 3 ans (on aime bien les plans triennaux), Framasoft porte l’ambition de participer à infléchir la situation.

D’une part en mettant la lumière sur la faiblesse des contributions, et en tentant d’y apporter différentes réponses. Par exemple en abaissant la barrière à la contribution. Ou, autre exemple, en généralisant les pratiques d’ouvertures à des communautés non-dev.

D’autre part, en mettant en place des projets qui ne soient pas uniquement des alternatives à des services de GAFAM (aux moyens disproportionnés), mais bien des projets engagés, militants, qui seront des outils au service de celles et ceux qui veulent changer le monde. Nous sommes en effet convaincu·es qu’un monde où le logiciel libre serait omniprésent, mais où le réchauffement climatique, la casse sociale, l’effondrement, la précarité continueraient à nous entraîner dans leur spirale mortifère n’aurait aucun sens pour nous. Nous aimons le logiciel libre, mais nous aimons encore plus les êtres humains. Et nous voulons agir dans un monde où notre lutte pour le libre et les communs est en cohérence avec nos aspirations pour un monde plus juste et durable.

Aujourd’hui : publier Peertube et nouer des alliances

Aujourd’hui, l’association Framasoft n’est pas peu fière d’annoncer la publication de la version 1.0 de PeerTube, notre alternative libre et fédérée à YouTube. Si vous souhaitez en savoir plus sur PeerTube, ça tombe bien : nous venons de publier un article complet à ce sujet !

Ce n’est pas la première fois que Framasoft se retrouve en position d’éditeur de logiciel libre, mais c’est la première fois que nous publions un logiciel d’une telle ambition (et d’une telle complexité). Pour cela, nous avons fait le pari l’an passé d’embaucher à temps plein son développeur, afin d’accompagner PeerTube de sa version alpha (octobre 2017) à sa version bêta (mars 2018), puis à sa version 1.0 (octobre 2018).

Le crowdfunding effectué cet été comportait un palier qui nous engageait à poursuivre le contrat de Chocobozzz, le développeur de PeerTube, afin de vous assurer que le développement ne s’arrêterait pas à une version 1.0 forcément perfectible. Ce palier n’a malheureusement pas été atteint, ce qui projetait un flou sur l’avenir de PeerTube à la fin du contrat de Chocobozzz.

Garder sa singularité tout en étant relié aux autres, c’est ça la force de la fédération PeerTube.
Notre article complet sur PeerTube

 

Nous avons cependant une excellente nouvelle à vous annoncer ! Bien que le palier du crowdfunding n’ait pas été atteint, l’association Framasoft a fait le choix d’embaucher définitivement Chocobozzz (en CDI) afin de pérenniser PeerTube et de lui donner le temps et les moyens de construire une communauté solide et autonome. Cela représente un investissement non négligeable pour notre association, mais nous croyons fermement non seulement dans le logiciel PeerTube, mais aussi et surtout dans les valeurs qu’il porte (liberté, décentralisation, fédération, émancipation, indépendance). Sans parler des compétences de Chocobozzz lui-même qui apporte son savoir-faire à l’équipe technique dans d’autres domaines.

Nous espérons que vos dons viendront confirmer que vous approuvez notre choix.

D’ici la fin de l’année, annoncer de nouveaux projets… et une campagne de don

Comme vous l’aurez noté (ou pas encore !), nous avons complètement modifié notre page d’accueil « framasoft.org ». D’une page portail plutôt institutionnelle, décrivant assez exhaustivement « Qu’est-ce que Framasoft ? », nous l’avons recentrée sur « Que fait Framasoft ? » mettant en lumière quelques éléments clefs. En effet, l’association porte plus d’une cinquantaine de projets en parallèle et présenter d’emblée la Framagalaxie nous semblait moins pertinent que de « donner à voir » des actions choisies, tout en laissant la possibilité de tirer le fil pour découvrir l’intégralité de nos actions.

Nous y rappelons brièvement que Framasoft n’est pas une multinationale, mais une micro-association de 35 membres et 8 salarié⋅es (bientôt 9 : il reste quelques jours pour candidater !). Que nous sommes à l’origine de la campagne « Dégooglisons Internet » (plus de 30 services en ligne)… Mais pas seulement ! Certain⋅es découvriront peut-être l’existence de notre maison d’édition Framabook, ou de notre projet historique Framalibre. Nous y mettons en avant LE projet phare de cette année 2018 : PeerTube. D’autres projets à court terme sont annoncés sur cette page (en mode teasing), s’intégrant dans notre feuille de route Contributopia.

Framasoft n’est pas une multinationale, mais une micro-association

Enfin, nous vous invitons à faire un don pour soutenir ces actions. Car c’est aussi l’occasion de rappeler que l’association ne vit quasiment que de vos dons ! Ce choix fort, volontaire et assumé, nous insuffle notre plus grande force : notre indépendance. Que cela soit dans le choix des projets, dans le calendrier de nos actions, dans la sélection de nos partenaires, dans nos prises de paroles et avis publics, nous sommes indépendant⋅es, libres, et non-soumis⋅es à certaines conventions que nous imposerait le système de subventions ou de copinage avec les ministères ou toute autre institution.

Ce sont des milliers de donatrices et donateurs qui valident nos actions par leur soutien financier. Ce qu’on a fait vous a plu ? Vous pensez que nous allons dans le bon sens ? Alors, si vous en avez l’envie et les moyens, nous vous invitons à faire un don. C’est par ce geste que nous serons en mesure de verser les salaires des salarié⋅es de l’association, de payer les serveurs qui hébergent vos services préférés ou de continuer à intervenir dans des lieux ou devant des publics qui ont peu de moyens financiers (nous intervenons plus volontiers en MJC que devant l’Assemblée Nationale, et c’est un choix assumé). Rappelons que nos comptes sont publics et validés par un commissaire aux comptes indépendant.

En 2019, proposer des outils pour la société de contribution

Fin 2018, nous vous parlerons du projet phare que nous souhaitons développer pendant l’année 2019, dont le nom de code est Mobilizon. Au départ pensé comme une simple alternative à Meetup.com (ou aux événements Facebook, si vous préférez), nous avons aujourd’hui la volonté d’emmener ce logiciel bien plus loin afin d’en faire un véritable outil de mobilisation destiné à celles et ceux qui voudraient se bouger pour changer le monde, et s’organiser à 2 ou à 100 000, sans passer par des systèmes certes efficaces, mais aussi lourds, centralisés, et peu respectueux de la vie privée (oui, on parle de Facebook, là).

Évidemment, ce logiciel sera libre, mais aussi fédéré (comme Mastodon ou PeerTube), afin d’éviter de faire d’une structure (Framasoft ou autre), un point d’accès central, et donc de faiblesse potentielle du système. Nous vous donnerons plus de nouvelles dans quelques semaines, restez à l’écoute !

Éviter de faire d’une structure (Framasoft ou autre), un point d’accès central

D’autres projets sont prévus pour 2019 :

  • la sortie du (apparemment très attendu) Framapétitions ;
  • la publication progressive du MOOC CHATONS (cours en ligne gratuit et ouvert à toutes et tous), en partenariat avec la Ligue de l’Enseignement et bien d’autres. Ce MOOC, nous l’espérons, permettra à celles et ceux qui le souhaitent, de comprendre les problématiques de la concentration des acteurs sur Internet, et donc les enjeux de la décentralisation. Mais il donnera aussi de précieuses informations en termes d’organisation (création d’une association, modèle économique, gestion des usager⋅es, gestion communautaire, …) ainsi qu’en termes techniques (quelle infrastructure technique ? Comment la sécuriser ? Comment gérer les sauvegardes, etc.) ;
  • évidemment, bien d’autres projets en ligne (on ne va pas tout vous révéler maintenant, mais notre feuille de route donne déjà de bons indices)

Bref, on ne va pas chômer !

Dans les années à venir : se dédier à toujours plus d’éducation populaire, et des alliances

Nous avions coutume de présenter Framasoft comme « un réseau à géométrie variable ». Il est certain en tout cas que l’association est en perpétuelle mutation. Nous aimons le statut associatif (la loi de 1901 nous paraît l’une des plus belles au monde, rien que ça !), et nous avons fait le choix de rester en mode « association de potes » et de refuser — en tout cas jusqu’à nouvel ordre — une transformation en entreprise/SCOP/SCIC ou autre. Mais même si nous avons choisi de ne pas être des super-héro⋅ïnes et de garder l’association à une taille raisonnable (moins de 10 salarié⋅es), cela ne signifie pas pour autant que nous ne pouvons pas faire plus !

La seconde année de Contributopia
Illustration de David Revoy – Licence : CC-By 4.0

 

 

Pour cela, de la même façon que nous proposons de mettre nos outils « au service de celles et ceux qui veulent changer le monde », nous sommes en train de créer des ponts avec de nombreuses structures qui n’ont pas de rapport direct avec le libre, mais avec lesquelles nous partageons un certain nombre de valeurs et d’objectifs.

Ainsi, même si leurs objets de militantisme ou leurs moyens d’actions ne sont pas les mêmes, nous aspirons à mettre les projets, ressources et compétences de Framasoft au service d’associations œuvrant dans des milieux aussi divers que ceux de : l’éducation à l’environnement, l’économie sociale et solidaire et écologique, la transition citoyenne, les discriminations et oppressions, la précarité, le journalisme citoyen, la défense des libertés fondamentales, etc. Bref, mettre nos compétences au service de celles et ceux qui luttent pour un monde plus juste et plus durable, afin qu’ils et elles puissent le faire avec des outils cohérents avec leurs valeurs et modulables selon leurs besoins.

Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin. Nous pensons que le temps est venu de faire ensemble.

Framasoft est une association d’éducation populaire (qui a soufflé « d’éducation politique » ?), et nous n’envisageons plus de promouvoir ou de faire du libre « dans le vide ». Il y a quelques années, nous évoquions l’impossibilité chronique et structurelle d’échanger de façon équilibrée avec les institutions publiques nationales. Cependant, en nous rapprochant de réseaux d’éducation populaire existants (certains ont plus de cent ans), nos positions libristes et commonistes ont été fort bien accueillies. À tel point qu’aujourd’hui nous avons de nombreux projets en cours avec ces réseaux, qui démultiplieront l’impact de nos actions, et qui permettront — nous l’espérons — que le milieu du logiciel libre ne reste pas réservé à une élite de personnes maîtrisant le code et sachant s’y retrouver dans la jungle des licences.

Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin. Nous pensons que le temps est venu de faire ensemble.

Nous avons besoin de vous !

Un des paris que nous faisons pour cette campagne est « d’informer sans sur-solliciter ». Et l’équilibre n’est pas forcément simple à trouver. Nous sommes en effet bien conscient⋅es qu’en ce moment, toutes les associations tendent la main et sollicitent votre générosité.

Nous ne souhaitons pas mettre en place de « dark patterns » que nous dénonçons par ailleurs. Nous pouvions jouer la carte de l’humour (si vous êtes détendu⋅es, vous êtes plus en capacité de faire des dons), celle de la gamification (si on met une jauge avec un objectif de dons, vous êtes plus enclin⋅es à participer), celle du chantage affectif (« Donnez, sinon… »), etc.

Le pari que nous prenons, que vous connaissiez Framasoft ou non, c’est qu’en prenant le temps de vous expliquer qui nous sommes, ce que nous avons fait, ce que nous sommes en train de faire, et là où nous voulons vous emmener, nous parlerons à votre entendement et non à vos pulsions. Vous pourrez ainsi choisir de façon éclairée si nos actions méritent d’être soutenues.

« Si tu veux construire un bateau, ne rassemble pas tes hommes et femmes pour leur donner des ordres, pour expliquer chaque détail, pour leur dire où trouver chaque chose. Si tu veux construire un bateau, fais naître dans le cœur de tes hommes et femmes le désir de la mer. » — Antoine de Saint-Exupéry

Nous espérons, à la lecture de cet article, vous avoir donné le désir de co-construire avec nous le Framasoft de demain, et que vous embarquerez avec nous.

 

Faire un don pour soutenir les actions de Framasoft

 

 




PeerTube 1.0 : the free/libre and federated video platform

At the end of 2014, the French non-profit association Framasoft started a crazy challenge: what if we de-google-ified the Internet?

[For French version of this article, see here]

Three years later, more than thirty alternative services to Google, Facebook, and others were available and released to the public. Based on free/libre software only, without advertising, respectful of privacy, maintained by a non-profit association and totally independent.

However, in the « missing » services, one important actor remained: YouTube. Because how one can produce or make available a YouTube alternative without, tomorrow, collapsing in the face of problems? Explosion of online storage space (which costs a fortune), explosion of bandwidth costs (which costs two fortunes!), moderation problems, etc.

A solution had to be found.

The origins of PeerTube

In October 2017, Framasoft has hired the PeerTube developer for a few months on a full-time basis. PeerTube was then only a personal project of a free/libre and federated video distribution platform, in alpha version. The promise was a beta version, usable by the most courageous, for March 2018. The particularity of PeerTube is that the software allows to connect several « instances » of PeerTube between them (thus forming a « federation »), allowing them to exchange information without the user having to change between websites.

By March 2018, the beta version was ready. The association (which lives only on donations) then took the financial risk of extending the developer’s contract, in order to be able to launch a version 1.0 in October 2018. Since Framasoft could not finance this development on its own, a crowdfunding was launched in May 2018 with different levels. 45 days later, the association had collected 53 100€ through 1 381 donations.

In October 2018, the Framasoft non-profit is proud to announce the release of version 1.0 of PeerTube!


Video introducing to PeerTube. For a video with English subtitles, click here.
Realisation : Association LILA (CC by-sa)

 

But then, what does this 1.0 version offer?

First of all, and to avoid misunderstandings, let us remind you that PeerTube is not a single centralized platform (as YouTube, Dailymotion or Vimeo can be), but a software that brings together many PeerTube instances (i.e. different installations of the PeerTube software, thematic or community based) within what is called a federation. You must therefore look for the PeerTube instance that suits you best to view or upload your videos or, failing that, set up your own PeerTube instance, on which you will have full rights.

PeerTube is not a single centralized platform, but a software

Basic functionalities

    • Peertube allows you to watch videos with WebTorrent, to prevent the saturation of the broadcast servers. If several people are watching the same video at the same time, they download small pieces of the video from your server, but also from the devices of other people who are watching the same video in the same time!
    • Federation between PeerTube instances. If the PeerTube instance A subscribes to the PeerTube instances B and C, from a search on A, you can find and watch videos of B and C, without leaving A.
    • The software has fairly detailed settings that allow the governance to be adjusted: each instance can be organized as it wishes. Thus, the instance administrator can define:
      • a disk space quota for each videographer;
      • the number of accepted accounts;
      • the role of users (administration, moderation, use, video upload).
    • PeerTube can run on a small server. For example, you can install it on a VPS-like hardware with two cores and 2GB of RAM. The storage space required obviously depends on the number of videos you want to host personally.
    • PeerTube has a stable and robust code, tested and proven on many systems, which makes it powerful. For example, a PeerTube page often loads much faster than a YouTube page.
    • Your videos can be automatically converted into different definitions (e. g. 240p, 720p or 1080p. or even 4K) to suit the speed and equipment of the visitors. This step is called transcoding.
    • A « Theater » mode as well as a « night » mode are available for better viewing comfort.
    • PeerTube does not spy on you or lock you up: indeed, the application does not collect personal information for commercial purposes, and above all PeerTube does not lock you in a « filter bubble ». In addition, it does not use a biased recommendation algorithm to keep you online indefinitely. It may be a detail (or a weakness) for you, but for us it is a strength that means a lot!
    • There isn’t – yet – any dedicated smartphone application. However, the web version of PeerTube works just as fast on smartphones and adapts perfectly to your device.
    • Visitors can comment on the videos. This feature can be disabled either by the instance administrators on any video or locally by the person who uploads the videos.
    • Since PeerTube uses the W3C standard ActivityPub exchange protocol, it is possible to interact with other software using the same protocol. For example, the PeerTube video platform can interact with the Mastodon social network, an alternative to Twitter. Thus, it is possible to « track » a PeerTube user from Mastodon, or even comment on a video directly from your Mastodon account.
PeerTube demo with Mastodon

 

  • A dedicated button allows you to support the author of a video. In this way, videographers can pick the financing method that suits them.
  • We may not have insisted on this point, but PeerTube is of course free/libre software🙂 This means that its source code (its recipe) is available and open to everyone. This means you can contribute to the code or, if you think the software is not going in the right direction, copy it and make the changes that suit your needs.

Functionalities financed through crowdfunding

    • Subtitling: possibility to add multiple language files (in.srt format) to provide subtitles for videos.
    • Instance redundancy: it is possible to « help » a designated instance by activating the redundancy of all or part of its videos (which will then be duplicated on your instance). Thus, if the linked instance is overloaded because too many people are watching the videos it hosts, your instance can support it by making its bandwidth available.
    • Import from other video platforms by simply copying and pasting: YouTube, Vimeo, Dailymotion, etc. On some platforms, the retrieval of the title, description or keywords is even automatic. It is of course also possible to import videos by direct link or from another PeerTube instance. Finally, PeerTube also allows import from .torrent files.
Importing a video in PeerTube

 

 

  • Several RSS feeds are available to you according to your needs: one for videos globally, another for those of a channel and one for comments on a video.
  • Peertube has become international and now speaks 13 languages including Chinese. Translations into other languages are in progress.
  • The search feature is more relevant. It takes into account certain typographical errors and provides filters.

Upcoming features

We have excellent news: although the third level of our crowdfunding wasn’t reached, Framasoft has decided to hire the PeerTube developer on a permanent contract in order to ensure the sustainability of the software development. Other functionalities are therefore planned for 2019.

  • A plugin system to customize Peertube. This is an essential development, as it will allow everyone to develop their own plugins to adapt PeerTube to their needs. For example, it will become possible to propose recommendation plugins with specific algorithms or completely different graphic themes.
  • We will probably develop a mobile application (or some motivated contributors will)
  • It will quickly be possible to improve the video import tool, so that you can « synchronize » your YouTube channel with your PeerTube channel (PeerTube will be able to check if new videos have been added and will automatically add them to your PeerTube account, including title and descriptions). In fact, this feature is already available for those who host their PeerTube instance and master the command line.
  • Statistics by instance or by account may be made available.
  • The improvement of moderation tools for big instances

To go further

It’s up to you! PeerTube belongs to you, take advantage of its possibilities. Submit quality videos (preferably under a free license, or for which you have the broadcasting rights or an explicit agreement) to one of the existing instances. Let your contacts and subscribed YouTubers know about PeerTube. And if you can, install your own instance to further expand the federated network!

Supporting Framasoft also means supporting PeerTube

PeerTube

Framasoft




PeerTube 1.0 : la plateforme de vidéos libre et fédérée

Ce qui nous fait du bien, chez Framasoft, c’est quand nous arrivons à tenir nos engagements. On a beau faire les marioles, se dire qu’on est dans l’associatif, que la pression n’est pas la même, tu parles !

[Short version of this article in English available here]

Après le financement participatif réussi du mois de juin 2018, nous avions fait la promesse de sortir la version 1 de Peertube en octobre 2018. Et alors, où en sommes-nous ? Le suspense est insoutenable.

Nous étions confiants. Le salaire du développeur principal, Chocobozzz, était assuré jusqu’à la fin de l’année, nous avions déjà recensé des contributions de qualité, nous avions fait un peu de bruit dans la presse… Cependant, nous avions aussi pris un engagement ferme vis-à-vis de nos donateur·ices, ainsi qu’auprès d’un large public international qui ne nous connaissait pas aussi bien que nos soutiens francophones habituels.

Ne vous faisons pas languir plus longtemps, cette version 1.0, elle est là, elle sort à l’heure dite et elle tient ses promesses, elle aussi. C’est l’occasion de dérouler pour vous un récapitulatif des épisodes précédents, ce qui vous évitera de farfouiller dans le blog pour retrouver vos petits. On sait que c’est pénible, on l’a fait. 🙂

C’est quoi, PeerTube ? Une révolte ? Non, Sire, une révolution

[Vidéo de présentation de PeerTube, en anglais, avec les sous-titres français, sur Framatube. Pour la vidéo avec les sous-titres en anglais, cliquez ici. Réalisation : Association LILA (CC by-sa)]

 

« Dégooglisons Internet ! » avons-nous crié partout pendant trois ans, sur l’air de « Delenda Carthago ! »

Ça, c’était une révolte. Un cri du cœur. Déjà un défi fou : proposer une alternative aux services des géants du web, les GAFAM et leurs petits copains (Twitter, par exemple). Un par un, les services étaient sortis, à un rythme insensé. Ils sont toujours là. Il faut les maintenir. Heureusement, les (désormais 60) CHATONS permettent de répartir un peu la charge. L’offre de mail mise de côté, il restait un gros morceau : proposer une alternative crédible au géant Youtube, rien que ça ! Pas facile de briser l’hégémonie des plateformes de diffusion vidéo !

Les fichiers vidéo sont lourds, c’est le principal inconvénient. Donc il faut de gros serveurs, beaucoup de bande passante, ce qui représente un coût astronomique, sans parler de l’administration technique de tout ça.
Non seulement impensable au regard de nos moyens, mais surtout complètement à l’opposé des principes du Libre : indépendance, décentralisation, partage. Pour répondre au défi financier, Youtube et ses clones utilisent toutes les ressources du capitalisme de surveillance : en captant l’attention des internautes dans des boucles sans fin, en profilant leurs goûts, en les assaillant de publicité, en leur proposant des recommandations parfois toxiques

C’est là que nous avons pris connaissance du logiciel (libre !) d’un jeune homme sympathique caché derrière le pseudo Chocobozzz, qui travaillait dans son coin à proposer une manière innovante de diffuser et visionner de la vidéo sur Internet.

Quand vous visionnez une vidéo, votre ordinateur participe à sa diffusion

PeerTube utilise les ressources du Web (WebRTC et BitTorrent, des technologies permettant le partage de diffusion, qui est un concept fondamental d’Internet) pour alléger la charge des sites qui hébergent du contenu. Avec un principe on ne peut plus simple : quand vous visionnez une vidéo, votre ordinateur participe à sa diffusion. Si beaucoup de personnes regardent la même vidéo, au lieu de tirer sur les ressources du serveur, on demande un petit effort à chaque machine et à chaque connexion. Les flux se répartissent, le réseau est optimisé. L’Internet comme il doit être. Comme il aurait dû le rester !

Pas besoin d’héberger tous les contenus que vous souhaitez diffuser : il suffit de se fédérer avec des instances amies qui proposent ces contenus pour les référencer sur sa propre instance. Sans dupliquer les fichiers. Et ça marche ! Quand les copains de Datagueule ont mis en ligne leur documentaire Démocratie, le logiciel a encaissé les milliers de visionnages sans broncher. Nous vous avons alors soumis l’idée d’embaucher Chocobozzz pour lui permettre de travailler sereinement à son projet, avec pour objectif de produire une version bêta du logiciel en mars 2018. Grâce à vos dons et à votre confiance, nous avons franchi cette première étape.

Nous avons entre-temps peaufiné notre nouvelle feuille de route Contributopia, dans laquelle PeerTube s’inscrivait parfaitement. Avec la recommandation du protocole ActivityPub par le W3C, qui renforçait le principe de fédération déjà initié par des logiciels sociaux (comme Mastodon), PeerTube est même devenu une brique majeure de Contributopia. Heureusement, la fédération, c’est facile à expliquer, parce que tout le monde l’utilise déjà : on a tou⋅tes des adresses mails, fournies par des tas de serveurs différents, et pourtant on arrive à s’écrire ! Avec PeerTube, lorsque plusieurs instances sont fédérées, il est possible de faire des recherches sur toutes ces instances, sans quitter celle sur laquelle vous êtes, ou de commenter des vidéos d’une instance distante sans avoir besoin de vous créer un compte dessus.

L’étape suivante allait de soi : continuer. La communication autour de PeerTube, via nos réseaux habituels, nous avait déjà permis d’attirer les contributions, des vidéastes avaient manifesté leur intérêt, les forums bruissaient de questions.

C’est pourquoi, rompant avec nos usages habituels, bousculant notre tempo, nous avons décidé de pousser les feux en prenant définitivement le rôle d’éditeur du logiciel de Chocobozzz, avec son accord, évidemment. Et surtout en soumettant une demande de financement participatif à l’international, en anglais, pour pérenniser son embauche, sans forcément vous solliciter à nouveau directement (mais on sait qu’une partie d’entre vous a tenu à participer quand même, et ça fait chaud au cœur, vraiment).

Cette fois encore, ce fut un joli succès, alors que franchement on n’en menait pas large, et voilà ce qui nous amène à cette version 1.0.

Mais alors, elle embarque quoi, cette version 1.0 ?

Avant tout, et pour éviter les mécompréhensions, rappelons que PeerTube n’est pas une seule plateforme centralisée (comme peuvent l’être YouTube, Dailymotion ou Viméo), mais un logiciel permettant de rassembler de nombreuses instances PeerTube (c’est-à-dire différentes installations du logiciel PeerTube, thématiques ou communautaires) au sein de ce que l’on appelle une fédération. Il vous faut donc chercher l’instance PeerTube qui vous convient pour visionner ou mettre en ligne vos vidéos ou, à défaut, mettre en place votre propre instance PeerTube, sur lequel vous aurez tous les droits.

PeerTube n’est pas une seule plateforme centralisée, mais un logiciel

Fonctionnalités de base

  • Peertube permet de regarder des vidéos avec WebTorrent, pour ne pas saturer les serveurs de diffusion. Si plusieurs personnes regardent la même vidéo, elles téléchargent de petits morceaux de la vidéo depuis votre serveur, mais aussi depuis les machines des autres personnes qui regardent la même vidéo !
  • Fédération entre instances PeerTube. Si l’instance PeerTube A s’abonne aux instances PeerTube B et C, depuis une recherche sur A, on peut trouver et visionner les vidéos de B et C, sans quitter A.
  • Le logiciel dispose de réglages assez fins qui permettent d’ajuster la gouvernance : chaque instance s’organise comme elle le souhaite. Ainsi, l’administrateur·ice de l’instance peut définir :
    • un quota d’espace disque pour chaque vidéaste ;
    • le nombre de comptes acceptés ;
    • le rôle des utilisateur·ices (administration, modération, utilisation, upload de vidéos).
  • PeerTube peut fonctionner sur un petit serveur. Vous pouvez par exemple l’installer sur un matériel type VPS ayant deux cœurs et 2Go de RAM. L’espace de stockage requis dépend évidemment du nombre de vidéos que vous souhaitez héberger personnellement.
  • PeerTube dispose d’un code stable et robuste, testé et éprouvé sur de nombreux systèmes, ce qui le rend performant. Ainsi, une page PeerTube se charge souvent bien plus vite qu’une page YouTube.
  • Vos vidéos peuvent être automatiquement converties dans différentes définitions (par exemple 240p, 720p ou 1080p. voire le 4K) pour s’adapter au débit et matériel des visiteur·euses. Cette étape s’appelle le transcodage.
  • Un mode «Théâtre» ainsi qu’un mode «nuit» sont disponibles pour un meilleur confort de visionnage.
  • PeerTube ne vous espionne pas et ne vous enferme pas : en effet, l’application ne collecte pas d’informations personnelles à des fins d’exploitation commerciale, et surtout PeerTube ne vous enferme pas dans une « bulle de filtre ». Par ailleurs, il n’utilise pas d’algorithme de recommandation biaisé pour vous faire rester indéfiniment en ligne. C’est peut-être un détail (ou une faiblesse) pour vous, mais pour nous c’est une force qui veut dire beaucoup !
  • Il n’existe pas – encore – d’application smartphone dédiée. Cependant, la version web de PeerTube fonctionne rapidement sur smartphone et s’adapte parfaitement à votre appareil.
  • Les visiteur⋅euses peuvent commenter les vidéos. Cette fonctionnalité peut être désactivée soit par l’administrateur·ice de l’instance sur n’importe quelle vidéo, soit localement par la personne qui met en ligne les vidéos.
  • PeerTube utilisant le protocole d’échanges ActivityPub, il est possible d’interagir avec d’autres logiciels utilisant ce même protocole. Par exemple, la plateforme de vidéo PeerTube peut interagir avec le réseau social Mastodon, alternative à Twitter. Ainsi, il est possible de « suivre » un utilisateur PeerTube depuis Mastodon, ou même de commenter une vidéo directement depuis votre compte Mastodon.
  • Un bouton permet d’apporter votre soutien à l’auteur d’une vidéo. Ainsi, les vidéastes peuvent mettre en place le mode de financement qui leur convient.
  • Nous n’avons peut-être pas insisté sur ce point, mais PeerTube est bien évidemment un logiciel libre 🙂 Cela signifie que son code source (sa recette de cuisine) est disponible et ouverte à tou⋅tes. Ainsi, vous pouvez contribuer au code ou, si vous pensez que le logiciel ne va pas dans la bonne direction, le copier et y apporter les modifications qui correspondent à vos besoins.

Image du crowdfunding réussi ayant financé une large partie des fonctionnalités les plus attendues.

Fonctionnalités financées par le crowdfunding

  • Le sous-titrage : possibilité d’ajouter de multiples fichiers de langue (au format .srt) pour proposer les sous-titrages des vidéos.
  • La redondance d’instance : il est possible « d’aider » une instance désignée en activant la redondance de tout ou partie de ses vidéos (qui seront alors dupliquées sur votre instance). Ainsi, si l’instance liée est surchargée parce que trop de monde regarde les vidéos qu’elle héberge, votre instance pourra la soutenir en mettant sa bande passante à disposition.
  • L’import depuis d’autres plateformes vidéo par simple copier-coller : YouTube, Viméo, Dailymotion, etc. Depuis certaines plateformes, la récupération du titre, de la description ou des mots clés est même automatique. Il est bien entendu possible d’importer aussi des vidéos par lien direct ou depuis une autre instance PeerTube. Enfin, PeerTube permet aussi l’import depuis les fichiers .torrent.
  • Plusieurs flux RSS s’offrent à vous selon vos besoins : un pour les vidéos de manière globale, un autre pour celles d’une chaîne et un dernier pour les commentaires d’une vidéo.
  • Peertube s’est internationalisé et parle maintenant 13 langues dont le chinois. Des traductions vers d’autres langues sont en cours.
  • La recherche est plus pertinente. Elle prend en compte certaines fautes de frappe et propose l’utilisation de filtres.

Fonctionnalités à venir

Nous avons une excellente nouvelle : bien que le troisième palier du crowdfunding n’ait pas été atteint, Framasoft a décidé d’embaucher Chocobozzz en CDI afin de pérenniser le développement de Peertube. D’autres fonctionnalités sont donc prévues au cours de l’année 2019.

  • Un système de plugins pour personnaliser Peertube. Il s’agit là d’un développement essentiel, car il permettra à chacun⋅e de développer ses propres plugins pour adapter PeerTube à ses besoins. Par exemple il deviendra possible de proposer des plugins de recommandations avec des algorithmes spécifiques ou des thèmes graphiques complètement différents.
  • Nous développerons éventuellement une application mobile (ou bien des contributeur⋅ices motivé⋅e⋅s le feront)
  • Il sera rapidement possible d’améliorer l’outil d’importation de vidéos, de façon à pouvoir «synchroniser» votre chaîne YouTube avec votre chaîne PeerTube (PeerTube sera en capacité de vérifier si de nouvelles vidéos ont été ajoutées et pourra automatiquement les ajouter à votre compte PeerTube, titre et descriptions compris). Dans les faits, cette fonctionnalité fonctionne déjà pour celles et ceux qui hébergent leur instance PeerTube et maîtrisent la ligne de commande.
  • Des statistiques par instance ou par compte pourront être mises à disposition.
  • L’amélioration des outils de modération.
[Exemple de la fonction d’import de vidéo]

 

PeerTube répare Internet

La campagne « Dégooglisons Internet » était un cri, une réaction, un rejet. Rejet des GAFAM et de leur vision centralisatrice, fermée, toute tournée vers le fric et le contrôle. Lutter contre les GAFAM, c’est mener un combat disproportionné. Mais la prise de conscience est faite. Nous n’avons plus besoin de rabâcher notre couplet sur leur façon de nier nos libertés, de s’approprier nos données personnelles, de prendre le pouvoir dans nos vies. Et puis il faut dire qu’à force de scandales, ils nous ont bien aidés à accélérer dans l’opinion publique cette prise de conscience. Nous revendiquons fièrement notre participation à cette évolution des esprits, au milieu d’autres acteurs tout aussi importants (LQDN, la CNIL, l’APRIL, etc.). Il est temps maintenant de passer à autre chose.

 

https://framalab.org/gknd-creator/

 

Chez Framasoft, incorrigibles bavards que nous sommes, nous avons produit beaucoup d’écrits, et nous avons finalement, proportionnellement, assez peu de contenus vidéos à proposer, alors que c’est un média qui est devenu à la fois plus facile à élaborer et plus demandé par le public. Ce virage vers la vidéo nous a été confisqué par les plateformes centralisatrices, Youtube en tête. Elles ont installé un standard, une norme, avec des pratiques révoltantes comme la censure aveugle et l’appropriation des contenus.

Le principe de fédération impulsé par le protocole ActivityPub et les logiciels qui l’utilisent (Peertube, Mastodon, Funkwhale, PixelFed, Plume… la liste s’allonge chaque mois) est en train, ni plus ni moins, de corriger le tir, de (re)construire le futur d’Internet. Celui que nous appelons de nos vœux.

sketchnote d'un réseau fédéré avec ActivityPub
La fédération, avec ActivityPub, c’est s’allier aux autres sans perdre son identité

 

Oui, cette fois, c’est une révolution. Avec Contributopia, nous annonçons une étape de construction, basée sur le partage, les communs, l’éducation populaire.

Nous avons aussi pris conscience, en avançant, que nous ne pouvions plus nier la dimension politique de cette vision. Alors quand on dit «politique», on convoque l’étymologie du mot, hein. C’est pas demain qu’on verra Pyg, notre délégué général, à l’Assemblée Nationale. Il n’empêche ! La culture du libre, ça va bien au-delà de l’hébergement d’agendas ou de l’ouverture d’un pad pour rédiger le présent article à plusieurs.

Nous travaillons, dans le cadre qui est le nôtre, à fournir des outils numériques aux utopistes qui, comme nous, pensent qu’il y a encore moyen de sauver les meubles. On se disait que ce n’était pas super vendeur, mais nous avons pu voir, lors de nos fréquentes interventions à droite et à gauche, que la démarche rencontrait de l’écho. Nous avons encore quelques jolies cartes à jouer pour la suite (même si pour certaines on ne sait pas encore comment ça se passera ^^), comme toujours dans la bonne humeur et le houblon doré.

Nous espérons que vous nous suivrez, encore, dans cette voie.

Longue vie à PeerTube.

L’équipe de Framasoft.

Pour aller plus loin

À vous de jouer ! PeerTube vous appartient, emparez-vous de ses possibilités. Déposez des vidéos de qualité (de préférence sous licence libre, ou pour laquelle vous avez les droits de diffusion ou un accord explicite) sur l’une des instances déjà existantes. Faites connaître PeerTube à vos contacts et aux YouTubeur⋅euses auxquels vous êtes abonné⋅e. Et si vous le pouvez, installez votre propre instance pour agrandir encore le réseau fédéré !




Et si on tenait compte des utilisateur·ices dans les projets libres ?

Eh oui, chez Framasoft, on n’a pas peur d’utiliser des titres (légèrement) provocateurs — certain·e⋅s diraient même pièges à clic — quand on a envie de vous parler de sujets que l’on juge vraiment importants.

Et aujourd’hui c’est… l’UX Design dans les projets libres !

« UX-kwa ? Un logiciel libre, c’est créer du code qui fonctionne sans bugs, lui mettre une licence libre et c’est bon, non ? »
Alors, oui, mais pas que. Du coup on va faire le point avec vous sur ce qu’est l’UX Design et pourquoi c’est important (surtout pour le libre).

Et pour ça, on va vous raconter une première expérimentation réalisée lors du Framacamp !

Framacamp : la colonie de vacances de Framasoft ?

Il y a deux évènements annuels très très importants pour Framasoft :

  • l’Assemblée Générale de l’association (AG), où on va faire les bilans moraux et financiers, ainsi que définir les actions et les campagnes à venir,
  • et le Framacamp !

Le Framacamp, c’est l’occasion pour les salarié·es et les membres de l’asso de se réunir de manière conviviale pour se rencontrer, tisser des liens, boire des coups, délirer et surtout débattre, faire avancer les projets et expérimenter.

Au cours du Framacamp, Maïtané a proposé un atelier « Méthodes UX » pour présenter 4 méthodes utilisées par les UX designers et les faire tester aux développeur·ses sur place.

Alors déjà, c’est quoi l’UX Design ? UX Design, ça veut dire User Experience Design en anglais, ce qui revient à Design de l’Expérience Utilisateur·ice en français. C’est une discipline qui a pour objectif de prendre en compte les besoins, les attentes et les usages des utilisateur·ices visé·es pour proposer un service ou outil qui leur convient le plus possible et leur proposer une expérience positive. C’est donc très loin de « juste » réaliser des maquettes graphiques !

Pourquoi parler d’UX avec des devs ? Parce que tout le monde est convaincu chez Framasoft que le logiciel libre c’est bien, mais s’il est utilisé par un maximum de personnes c’est quand même mieux. Et il n’y a pas moyen de demander aux utilisateur·ices d’utiliser des logiciels qui ne sont pas correctement conçus, ou qui ne prennent pas en compte leurs besoins.

C’est un peu ça. L’UX, c’est créer des logiciels :

  • utiles (car ils apportent de la valeur aux utilisateur·ices) ;
  • utilisables (car ils peuvent être utilisés sans provoquer (trop) de frustration) ;
  • et utilisés (car du coup les utilisateur·ices ont envie de… les utiliser !).

 

Du coup, pour comprendre ce qui se passe dans la tête des utilisateur·ices, les UX designers ont tout un panel de méthodes et de techniques. Au cours de cet atelier « Méthodes UX », nous en avons testé quatre :

  • Le test des 5 secondes
  • L’AttrakDiff
  • Les courbes d’évaluation UX
  • Les tests utilisateur·ices.

Il existe évidemment un très grand nombre de méthodes, selon les étapes du projet, les objectifs visés, le nombre de participant·es (présent·es ou à distance), etc. Si vous souhaitez en découvrir d’autres, nous vous conseillons l’excellent ouvrage Méthodes de Design UX : 30 méthodes fondamentales pour concevoir et évaluer les systèmes interactifs, de Carine Lallemand et Guillaume Gronier.

 

Les méthodes de cet atelier ont notamment été choisies en s’inspirant de l’atelier qu’ils ont donné ensemble à ParisWeb 2015.
Il s’agit de méthodes plutôt simples à comprendre et complémentaires pour prendre le pouls de son projet du point de vue de l’expérience utilisateur.

Note anti-troll : les participant·es étaient quasi exclusivement des membres de Framasoft, donc pas vraiment représentatif·ves du public réel des outils testés, nous en sommes bien conscient·es. En temps normal, on aurait dû composer un panel réaliste de participant·es mais on n’avait pas d’autres cobayes sous la main !

Le test des 5 secondes

Pour tester quoi ?

La première impression qu’ont les utilisateur·ices en voyant une interface.

Comment on fait ?

On montre un écran d’une interface (logiciel, application mobile, site web, …) pendant 5 secondes, puis on pose quatre questions, qui permettent de connaître les a prioris des utilisateur·ices lorsqu’ils découvrent l’interface, et ce qu’ils en retiennent. Pratique si vous voulez savoir si votre interface est compréhensible au premier abord.

Cas pratique

Maïtané nous a fait essayer cette méthode sur une maquette d’interface de création de pads collaboratifs.

Maquette de l’interface de création de pads collaboratifs du Mouvement Colibris — Chez Framasoft, on propose le même service via https://framapad.org

 

Nous avons donc eu 5 secondes de visualisation de la page avant de pouvoir répondre aux questions.

Et là… révélation ! Sur la troisième question (définir les objectifs du système), on s’est aperçu qu’une des fonctionnalités n’était pas claire pour tout le monde.

Et donc, en à peu près 3 minutes de test, sur un groupe d’à peine 10 personnes, nous avions déjà relevé un problème d’ergonomie suscitant de l’incompréhension chez plusieurs d’entre nous, malgré l’interface très simplifiée. Pas mal pour un début !

Et si vous avez plusieurs prototypes, cette méthode peut permettre de soumettre chacun à un groupe différent pour comparer les résultats :

Les trois visuels ont été réalisés par Kristof Dreano, graphiste des Colibris, et sont disponibles sous licence Creative Commons BY SA.

L’AttrakDiff

Pour tester quoi ?

Pour analyser quantitativement l’expérience utilisateur, suivant ses qualités pragmatiques (j’ai l’impression que le produit me permet de réaliser ma tâche facilement) et hédoniques (j’ai envie de l’utiliser, ça me fait plaisir de l’utiliser)

Comment on fait ?

L’AttrakDiff est un questionnaire standardisé, il y a donc « juste » à récupérer la grille de questions, la grille d’analyse  et hop ça fait des Chocapics !

 

 

 

Un exemple de rendu final :

Source : UXmind.eu

Cas pratique

Pour l’atelier lors du Framacamp, on a pris le cas de Framadate avec une grille de questions plus réduite que celle normalement utilisée. Après un rapide dépouillement des résultats, on découvre sans trop de surprise que Framadate est un outil très « orienté tâche », c’est à dire fonctionnel et pragmatique mais qu’il lui manque un aspect attractif et procurant une expérience plus positive. Une tendance courante du libre ?

Les courbes d’évaluation de l’expérience utilisateur·ice

Pour tester quoi ?

Les courbes vont représenter, au cours du temps, les ressentis des utilisateur·ices sur différents points (que se soit l’expérience utilisateur·ice générale, son attractivité, sa facilité d’usage, …), ce qui permet d’avoir une vision sur la durée des différentes améliorations et détériorations !

Comment on fait ?

On demande à l’utilisateur·ice de tracer une courbe, en mettant en abscisse sa relation envers le produit (de « très positive » à « très négative ») et en ordonnée le temps. Dans l’idéal, elle place à certains endroits les événements marquants de son expérience, pour que l’on sache à quoi est dû un changement de direction de la courbe.

Cas pratique

Vous pouvez le faire chez vous, là, tout de suite ! Un papier, un crayon, et vous pouvez noter l’évolution dans le temps de votre rapport à Twitter par exemple ! Ce qui est assez marrant à voir, c’est la dégringolade de l’adhésion à Twitter lorsque Mastodon est apparu, mais vu le public testé ce n’était pas très étonnant. 😉

Le meilleur pour la fin : les tests utilisateur·ices !

Pour tester quoi ?

Ben, ce que tu veux, en fait !

Comment on fait ?

On demande à l’utilisateur·ice de réaliser une « mission » qui est cohérente avec sa potentielle utilisation du logiciel. L’idéal c’est de le-la laisser assez libre, pour observer de quelle façon iel va remplir sa mission (on peut être surpris !). Ensuite, on lui demande de bien vocaliser ce qu’iel fait, pour qu’on puisse suivre son schéma de pensée.
Du côté des développeurs·euses, il est très important de ne pas intervenir au cours du test. Même si ça vous démange « mais le bouton est juste là ! »  et qu’on a très très envie de le montrer à l’utilisateur·ice. Le mieux à faire c’est de prendre des notes sur papier et de débriefer à la fin du test, une fois la mission remplie (ou son échec constaté).

Cas pratique

C’est le moment de laisser les développeurs en parler 😉

Et les développeurs, ils en ont pensé quoi ?

Interviewés : Luc, Thomas, Florian, Benjamin, Marien.

Salut à tous ! Pour commencer, vous pourriez vous présenter rapidement ainsi que vos projets ?

Florian : Salut ! Ici Florian aka mrflos, développeur web du mouvement Colibris, une association d’éducation populaire qui inspire, relie et soutient des personnes qui se mobilisent pour la construction d’une société plus écologique et plus humaine. Afin d’outiller nos membres avec des logiciels et services libres en adéquation avec nos valeurs, nous avons rejoint le collectif des CHATONS et nous proposons la plateforme https://colibris-outilslibres.org à toutes et tous.

Je suis par ailleurs co-auteur et principal mainteneur de https://yeswiki.net , un wiki ouvert et simple, avec des possibilités de base de données avec des restitutions variées (trombinoscope, cartes, agenda…)

Thomas : Salut ! Je suis Thomas alias tcit, développeur web au sein de Framasoft, une association promouvant les logiciels libres et plus largement l’univers libre. Nous avons dernièrement lancé une campagne Contributopia qui vise notamment à concevoir autrement des outils numériques. En dehors d’être responsable d’une bonne partie des outils Framasoft, dont certains ont été créés ou largement améliorés, j’ai aussi été mainteneur des logiciels wallabag (un service de lecture différée) et Nextcloud (une alternative à Dropbox et Google Drive).

Benjamin : Hello ! Ici Benjamin (ou encore bnjbvr), ingénieur logiciel chez Mozilla sur la machine virtuelle JavaScript / WebAssembly qui tourne dans le célèbre Firefox. Sur mon temps libre, je suis un peu membre de Framasoft où j’essaie d’organiser des ateliers de contribution au logiciel libre ouverts à tou.te.s, au sens large, en essayant d’attirer des personnes qui n’y connaissent pas grand chose. Je développe également Kresus, une application web de gestion de finances personnelles libre et auto-hébergeable, pour pouvoir comprendre comment notre argent est dépensé, comme une alternative aux apps Bankin ou Linxo.

Marien : Salut, pour ma part je suis Marien (alias, hum… Marien), ingénieur dans une boite qui s’appelle Sogilis et où je fais beaucoup de choses, mais notamment du développement d’applications web sur mesure. Je suis aussi membre de Framasoft : j’y maintiens Framaboard et je passe un peu de temps à consigner tout ce qu’il se passe au sein de l’asso dans notre wiki. Je réfléchis aussi à comment décloisonner les développeurs du Libre des sujets techniques (cet atelier tombait donc à pic !). Enfin, je développe Lessy, un logiciel de gestion de temps et j’ai été le développeur principal de FreshRSS, un agrégateur d’actualités, qui est depuis passé dans les mains d’une communauté active.

Luc : もしもし! (oui, Luc se met au Japonais, il a sûrement écrit un truc très chouette mais on n’a rien pané — NDLR)

Moi c’est Luc, alias (frama)sky, adminSys de Framasoft, et développeur aussi. J’ai notamment écrit Lstu, Lutim, Lufi et Dolomon, qui sont utilisés chez Framasoft sous les noms Framalink, Framapic, Framadrop et Framaclic.

 

L’UX, ça te parlait avant l’atelier ? C’était quoi pour toi ?

Florian : Comme je ne suis pas un très bon développeur, je compense en essayant de piocher dans les gros sites, des idées d’interfaces efficaces. Je me suis vite rendu compte que cela allait au delà de l’interface, et que c’était la convivialité de l’outil et l’expérience dans sa globalité qui faisait qu’on l’adoptait.

Pour moi, l’expérience utilisateur est primordiale, car si le but est d’amener nos utilisateurs à contribuer, il faut leur faciliter la tâche, et la moindre expérience négative peut facilement démotiver. D’ailleurs assez souvent les utilisateurs ne reprochent pas le manque de fonctionnalités d’un logiciel libre par rapport à son concurrent non libre, mais le fait qu’il soit plus difficile à utiliser (ou moins ergonomique).

Thomas : De même, la prise en compte de l’aspect convivial lors de mes développements se résumait à piocher des bonnes idées ici et là, suivre quelques pistes d’amélioration pour que certains aspects soient plus accessibles et des actions plus faciles à réaliser. J’avais largement conscience des manques que j’avais sur ces points.

Benjamin : J’ai eu l’occasion de discuter avec des designers, notamment parce que l’équipe de Kresus désirait avoir un nouveau logo. Alors que je pensais qu’il allait s’agir simplement de choix esthétiques, nous nous sommes retrouvés à parler d’aspects de bien plus haut niveau, comme les émotions que l’on voulait transmettre, ou les principes que devait respecter l’application. Même si ça relève du design, ces aspects se transposent également très bien à l’UX, et cette discussion a été le point de départ d’une réflexion plus globale pour re-prioriser certaines fonctionnalités et certains manques de Kresus. Par ailleurs, certains retours de personnes expérimentées en UX design nous avaient bien résumés l’intérêt de l’UX : un élément d’interface ou une action peu claire ou compliquée, c’est une incompréhension ; et une incompréhension, c’est une question au mieux (donc du support à effectuer), un blocage au pire (donc un.e utilisateur.ice perdu.e). Ce discours m’a marqué et incité à me plonger encore plus dans le sujet.

Marien : J’ai la chance de travailler dans une boîte qui employait déjà une UX/UI designer lorsque je suis arrivé. Aujourd’hui j’ai deux autres supers collègues ergonomes et/ou UX designers avec qui je peux travailler et échanger (je recommande d’ailleurs leurs « ergogames » lors desquels j’ai appris et pu mettre des mots sur plein de concepts), j’étais donc déjà plutôt bien rodé avant cet atelier et persuadé des bienfaits de l’UX. Pour moi, toute l’importance de cette discipline est de remettre l’utilisateur·ice au centre des préoccupations du logiciel : on cherche avant tout à comprendre ses problèmes et ses besoins. Ça peut paraître idiot dit comme ça, mais bien souvent j’ai affaire à des utilisateurs qui expriment leurs problèmes à travers des solutions qu’ils ont eux-mêmes imaginés. Le problème c’est qu’ils ont toujours une connaissance limitée de ce qui peut se faire (et moi aussi !) La complexité consiste à faire abstraction de ces solutions pour essayer d’en imaginer une qui sera potentiellement mieux adaptée aux besoins exprimés bien souvent indirectement. C’est là tout le talent de l’UX designer. 🙂

Une autre chose que j’apprécie – et c’est assez contradictoire avec mon statut de développeur – c’est que ça nous fait redescendre de notre piédestal. Dans les projets de logiciels libres, le développeur est toujours celui qui imagine, décide et code ; ça ne fait pas de mal de se remettre en question parfois ! Et puis nous avons déjà suffisamment de responsabilités comme ça (« Code is Law » comme dirait l’autre), pas la peine de nous en rajouter.

Luc : Oui… et non. Oui, parce que je savais que ça existe, non parce que je n’avais pas le temps de me pencher dessus.

 

Est-ce que tu avais déjà appliqué ou envisagé d’appliquer des méthodes UX sur tes projets ? Est-ce que par exemple tu avais déjà fait des tests utilisateur·ices auparavant ?

Florian : Au sein des contributeurs YesWiki, certains avaient déjà fait des tests utilisateurs, mais moi-même, je n’avais pas eu l’occasion de tester. J’avais entendu parler d’une méthode rigolote, qui consiste à tester un site en étant complètement saoul pour voir si la navigation était facile ! Une version plus « sobriété heureuse » consisterait à juste plisser les yeux et voir si vous arrivez à naviguer sur votre site, ou sinon http://www.drunkuserexperience.com/?url=https%3A%2F%2Fframasoft.org .

Thomas : Il y a quelques mois je ne désirais rien de plus que des mockups tout faits que j’aurais juste à intégrer. Aujourd’hui j’ai compris qu’il est préférable d’avoir un processus d’accompagnement, de travail itératif en collaboration et en discutant avec quelqu’un ayant les compétences.

Les seuls tests utilisateurs que j’aie effectués dans le cadre de mon travail se résumaient à envoyer un aperçu quasiment achevé à des membres de l’association n’ayant pas ou peu de compétences techniques, mais je n’étais pas derrière eux pour obtenir d’autres retours que ceux qu’ils peuvent me faire eux-mêmes. En dehors de cela, zéro, nada.

Benjamin : Non, jamais, je partais donc d’une expérience totalement vierge.

Marien : Oui, mais c’est assez récent au final ! J’avais fait appel il y a un an à Marie-Cécile Paccard pour m’aider sur Lessy. L’expérience a été tout aussi déstabilisante qu’enrichissante : alors que je pensais qu’on parlerait de l’UX de l’application, on a parlé de beaucoup de choses en amont, notamment à quels problèmes je cherchais répondre et à qui je m’adressais. Au final, elle a appliqué les méthodes UX à l’idée du projet elle-même ! Pour ce qui est des tests utilisateurs, j’ai participé à une session mais en tant qu’utilisateur, je connaissais donc déjà le format mais pas l’angoisse de se faire « juger » son travail ! J’avais toutefois eu le sentiment que c’était un format lourd à mettre en place et j’ai été agréablement surpris de la manière dont ça s’est passé au Framacamp.

Luc : À chaque phase de tests des nouveaux services Framasoft, on avait des retours de la part des membres de l’asso, mais ça s’arrêtait là.

 

Qu’est-ce que tu as pensé des méthodes vues ? Une méthode favorite ?

Florian : Le panel des méthodes vues était très large et c’est difficile de donner une favorite, car elles sont complémentaires ! Comme elles sont toutes assez courtes, je recommanderais plutôt de les faire toutes pour avoir une idée globale. S’il fallait choisir, la méthode du test en 5 secondes est vraiment rapide à faire, l’expliquer et la faire ne prend pas plus de 5 minutes, douche comprise ! Après, les tests utilisateurs sont ceux qui amènent sans doute le plus de pistes concrètes d’évolution pour son projet car on voit de façon flagrante là où l’utilisateur a des difficultés.

Benjamin : Si l’on se concentre uniquement sur l’aspect UX, la méthode des 5 secondes me semble plus amusante qu’utile, parce qu’elle ne reflète pas le fait que les gens cherchent toujours un peu avant d’abandonner. Elle permet cependant de dégager un avis esthétique et une émotion de manière très pertinente, ce qui provoquera l’envie d’utiliser par la suite. Clairement, le test d’utilisation, effectué sur Kresus, a été le plus utile et le plus fructueux pour moi : malgré la frustration qui parfois s’installait, puisque j’avais envie de dire « mais non, c’est pas comme ça qu’il faut faire », ou encore de dire « tu as remarqué qu’il manquait telle fonctionnalité, tu es au moins la 100ème personne à me le dire », j’ai trouvé très intéressant le fait de tout garder pour moi, et de juste écouter les utilisateur.ice.s pour comprendre quels étaient leurs points bloquants et leurs interrogations.

Marien : Très clairement j’ai préféré les tests utilisateurs. Je rejoins pas mal Benjamin là-dessus, j’ai le sentiment que c’est ce qui a été le plus utile. Mais c’est aussi l’aspect humain que je trouve intéressant : cette posture tout d’abord d’écoute et d’observation silencieuse (ça empêche de tenter de se justifier !), puis l’échange qui suit après. Ça permet aussi aux différents protagonistes de se rencontrer et de mieux se comprendre. Toutefois, pour un logiciel Libre ça peut être compliqué à mettre en place par sa nature décentralisée. L’AttrakDiff est peut-être alors plus adapté tout en se rapprochant de ce que peut apporter les tests utilisateurs d’un point de vue retours UX. J’imagine assez bien utiliser la méthode des 5 secondes « à l’arrache » lors de différents évènements. Concernant les courbes d’évaluation, je ne connaissais pas du tout et j’ai trouvé le concept super intéressant même si j’imagine un peu moins quoi faire des résultats.

Thomas : Je rejoins les deux commentaires précédents pour dire que j’ai probablement considéré le test utilisateur comme le plus productif du point de vue d’un développeur. Cela permet de découvrir des utilisations complètement à l’opposé de ce que l’on peut imaginer, et ainsi sortir de sa bulle de filtre concernant la vision que l’on a de son projet. J’aime aussi également bien le test des 5 secondes, mais je l’ai trouvé particulièrement efficace surtout lorsqu’on imagine un utilisateur arriver sur un site web sans à priori dessus, pas forcément quelqu’un de très motivé voir obligé d’utiliser une application.

Luc : Tout comme les autres, le test utilisateur est sans doute le plus intéressant pour les développeurs. On a ainsi un retour rapide mais surtout concret sur les points de friction.

 

C’est quoi le ressenti pendant et après les tests utilisateur·ices, quand on observe un·e utilisateur·ice manipuler et faire des retours sur son projet adoré ?

Florian : Mon cas est particulier, car on testait des visuels fait par Kristof, le graphiste des Colibris, pour le test des 5 secondes, donc j’ai moins pris pour moi les retours. Par contre j’ai été testeur pour Luc et son projet dolomon.org, et c’était bien drôle, je l’ai vu rougir quand je n’ai pas cliqué sur le lien « comment ça marche » et directement m’empêtrer dans les fonctionnalités compliquées, mais je crois que je me suis comporté comme un utilisateur lambda ! 😉

Benjamin (en continu depuis la question précédente) : C’est extrêmement utile comme exercice, parce que chaque élément remarqué devient utilement concret et peut se transformer en un « ticket » ou un élément partiel de ticket, tout du moins. C’était aussi marrant de voir, lors du débriefing, chacun exposer les *problèmes* auxquels iels étaient confrontés, et d’y aller de sa *solution* pour les résoudre, sans connaître l’ensemble des contraintes du projet. 🙂

En tant que mainteneur d’un projet, cela m’a permis de rester humble auprès du travail restant à accomplir, et ne m’a pas atteint émotionnellement ou attristé, parce que je considère que tout est toujours améliorable, et la finalité commune (de cellui qui teste ou cellui qui observe) est d’améliorer le logiciel dans son ensemble, pour le rendre plus utilisable, donc plus utilisé. 🙂

En dehors de la sphère propre au logiciel Kresus, je me sens plus légitime et j’ai aussi beaucoup plus confiance en ma capacité à mener et assister à des tests utilisateurs, ce qui me sera utile lors de nos célèbres Contrib’Ateliers .

Marien : Le plus compliqué était sans doute de rester silencieux ! D’ailleurs j’ai posé une ou deux questions au début pour essayer de comprendre le ressenti de l’utilisatrice (mais j’ai vite arrêté parce que je sentais que ça pouvait influer sur son utilisation). Il y a une forme de frustration qui se développe au fur et à mesure que la personne observée cherche mais ne trouve pas (pour les deux tests effectués j’ai eu envie de dire « Tu n’as pas besoin de rechercher l’icône de flux RSS sur le site, l’outil le détecte pour toi ! ») Une chose amusante en revanche, c’était de se sentir par moment tout aussi perdu que la personne qui testait (« Bah tiens, pourquoi ça réagit comme ça ? », « Oh un bug… ah non c’est vrai, c’est le comportement « attendu » »). Au final on n’est pas seulement observateur de l’utilisateur·ice, mais aussi de sa propre application ! En sortie de cette expérience, j’ai été rassuré sur la facilité de mise en place, ça m’a vraiment réconcilié avec cette méthode UX. Hâte de réitérer l’expérience !

Luc : C’est dur pour moi de me taire… et de voir que les utilisateurs ne prennent pas le temps de lire les explications qu’on s’est fait c… suer à écrire !

 

Suite à l’atelier, est-ce que tu penses que tu vas essayer de mettre en place de l’UX ? Si on te trouve un·e UX Designer, tu l’accueilles les bras ouverts ?

Florian : Oui, bien sûr, c’est un retour précieux, et une science à part entière ! Vu le peu de moyens humains derrière un projet libre, on se retrouve souvent à être en même temps le graphiste, l’UX designer, le développeur et le chargé de comm. de ce projet libre, et souvent quand on touche à trop de choses simultanément, on ne fait pas tout bien. J’ai très envie d’approfondir le sujet, si possible accompagné, mais j’attends aussi de voir comment en tant que développeur, implémenter les améliorations d’UX, car les choses les plus simples ne sont pas toujours les plus faciles à coder ! Donc vive la complémentarité mais en ayant la curiosité de s’intéresser à ce que l’UX Designer apporte et réciproquement, histoire de s’enrichir entre designer et développeur et d’être réaliste sur ce que l’on peut faire ensemble !

Benjamin : Absolument ! Au titre de mon projet Kresus, je vais sûrement réitérer l’expérience, et nous serions ravis d’accueillir un.e UX designer pour nous aider à assurer un suivi de l’amélioration de l’UX dans le projet. Nous allons d’ailleurs revoir nos méthodes de contribution pour simplifier la découverte et la participation à ce projet. Par ailleurs, je vais très probablement réutiliser les méthodes vues ici lors des Contrib’Ateliers, pour pouvoir tester et faire tester d’autres projets qui ont bien besoin d’aide, en espérant que cela mène à des actions concrètes et un suivi de la part des auteur.ice.s.

Marien : Je ne vois pas trop comment répondre négativement à cette question après les réponses que j’ai données jusqu’ici. ^^

Oui, évidemment que j’en accueillerais un ou une ! Mais j’aimerais aussi réfléchir à comment faciliter une telle collaboration. Aujourd’hui les outils que nous avons à notre disposition ne sont pas adaptés (je ne vise absolument pas GitHub ou plus généralement les forges logicielles, ce serait mal me connaître). Et si, justement, on appliquait les méthodes UX pour réfléchir à un tel outil ? 😀

Thomas : De même, c’est évident qu’il faut que nous impliquions davantage des gens comme des UX designers prêts à participer dans nos projets libres. Et pour accueillir des gens qui ne sont pas développeurs, ce n’est pas uniquement une question de réfléchir à un processus pour l’entrée de nouveaux contributeurs, c’est peut-être penser dès le début à faire en sorte que les décideurs et responsables de projets ne soient pas uniquement des développeurs, que ces derniers ne soient pas toujours au centre du projet. C’est loin d’être facile dans le milieu du logiciel libre, mais je veux y croire. 🙂

Luc : Non, je souhaite continuer à faire des logiciels inaccessibles. Tout le monde sait bien que les logiciels tournent bien mieux sans utilisateurs pour déclencher des bugs ou poser des questions. 😛

 

Et la tradition Framasoft : un dernier mot pour la fin ?

Florian : Merci Framasoft de décloisonner le libre et d’ouvrir vers de nouveaux horizons avec des outils qui ont du sens et des valeurs et qui pourraient grâce à des apports dans des domaines comme l’UX, de plus en plus répondre aux besoins des usagers ! J’en profite aussi pour inviter des animateurs de réseaux, les techniciens, les citoyens engagés, et toutes les personnes de bonne volonté de venir participer au projet Contributopia, qui pourrait être un beau levier de changement sociétal et de convergence !

Benjamin : Merci Framasoft pour ce Framacamp, et merci beaucoup Maïtané pour nous avoir présenté et ouvert les yeux sur l’UX, dans la joie et la bonne humeur, sans m’avoir fait ressentir ce tristement classique blocage entre les développeur.euse.s et les designers. J’invite tout le monde à s’intéresser également à ces méthodes, ne serait-ce que pour en comprendre les enjeux, qui dépassent largement la simple facilité d’utilisation et l’aspect esthétique des choses. :3

Marien : Au final, comme dans tout projet, l’important c’est de se parler et de s’écouter. Ce Framacamp a été une formidable occasion de faire cela dans une ambiance détendue. Je suis vraiment ravi de pouvoir apporter ma patte au projet Contributopia qui se propose justement d’encourager et défendre tout ça. Je suis persuadé que nous sommes sur la bonne route (mais qu’est-ce qu’elle est longue !). Et merci aussi à Maïtané de nous avoir proposé cet atelier qui m’a permis (enfin) de mettre en pratique des choses qui traînaient dans ma tête depuis des mois.

Thomas : Merci aux membres de Framasoft et à tous les contributeurs pour leur bonne volonté toujours impressionnante. Merci à ceux qui animent des ateliers qui permettent de faire des énormes pas en avant à chaque fois. J’ai hâte de voir ce qu’on va tous faire ensemble !

Luc : Merci à tous ceux qui vont mettre en place des ateliers UX lors des prochains contrib’ateliers. 😁

À leur tour, les auteur·ices de cet article remercient chaleureusement Florian, Thomas, Benjamin, Marien et Luc pour le temps qu’ils ont bien voulu nous accorder pour répondre à nos questions. Merci également à Carine Lallemand pour nous avoir autorisé·es à utiliser les images d’illustration de l’AttrakDiff et des courbes d’évaluation UX.

Que vous soyez UX Designer (professionnel ou amateur) ou simple utilisateur·rice qui veut contribuer au logiciel libre et au libre, n’hésitez pas à venir à notre rencontre, soit sur Framacolibri ou lors d’un des Contrib’ateliers.  ;-).

 

 

Pour aller plus loin

  • Lallemand, Carine. Paris Web 2015. Atelier Évaluer l’UX : des méthodes simples mais efficaces !

Paris Web 2015 Atelier « Evaluer l’UX : des méthodes simples mais efficaces ! » from Carine Lallemand

 




Des métacartes « Dégooglisons Internet », Framasoft double vos dons ce jeudi 27 septembre

Cet été, à l’occasion de notre venue au Forum des Usages Coopératifs de Brest, Framasoft s’est vue remettre un prototype de jeu « Métacartes ». Prototype que nous avons pu immédiatement tester quelques jours plus tard lors des Rencontres Mondiales du Logiciel Libre, à Strasbourg, pour deux sessions d’animation : la première sur la situation et l’avenir des Groupes d’Utilisateurs de Logiciels Libres, et la seconde avec les membres du collectif CHATONS.

L’outil nous a paru intéressant et à soutenir. C’est pourquoi lorsque les concepteurs du projet nous ont contactés avec l’idée de produire des « Métacartes Dégooglisons Internet », nous n’avons pas hésité à répondre présents ! Nous pensons en effet qu’il pourrait être très utile (et efficace !) d’avoir un jeu de cartes – virtuelles, mais aussi physiques – permettant de présenter les nombreux services Dégooglisons Internet. Que le public puisse les « prendre en main » (littéralement !), les évaluer, les classer, en comparer les principales fonctionnalités, etc.

Nous leur avons proposé le soutien suivant : les dons effectués pendant toute la journée du jeudi 27 septembre seront doublés par Framasoft (dans la limite d’un don total de 800€ par Framasoft). Autrement dit, si le projet cumule — par exemple — 442€ de dons le 27 septembre, Framasoft fera un don de 442€ au projet.

Reste donc à vous présenter le projet Métacartes en détail, c’est pourquoi nous avons contacté Mélanie et Lilian, à l’origine de ce projet.

Prototype du jeu de Métacarte « Faire ensemble »
Prototype du jeu de Métacarte « Faire ensemble »

Bonjour Mélanie et Lilian, pouvez-vous vous présenter ?

Bonjour !

Mélanie Lacayrouze, je viens de l’enseignement après un passage par des labos de physique… Je suis facilitatrice graphique. En gros : je dessine sur les murs, et j’aide les gens à clarifier leur vision par le dessin ! Je suis aussi facilitatrice de projets collaboratifs.

Lilian Ricaud, j’ai moi aussi un parcours non linéaire ! Je suis facilitateur et formateur. J’accompagne les collectifs dans la mise en œuvre de stratégies de co-construction.

Vous avez lancé un financement participatif autour d’un projet : les Métacartes. Mais… c’est quoi des métacartes ?

Les métacartes, on peut les définir de plusieurs façons.

Physiquement, ce sont des cartes, en papier, reliées à une ressource en ligne via un QR code.

Chaque carte présente un outil ou un concept-clé, et elle est rédigée de manière à faire ressortir l’essentiel du sujet.

On peut donc les utiliser pour manipuler des concepts et des savoirs avec ses mains, tout en ayant la possibilité d’aller facilement chercher la ressource numérique pour aller approfondir.

Après la définition physique des métacartes, on peut donner une définition globale du projet : il s’agit d’un ensemble de cartes qui reliées entre elles forment des combinaisons. Et tout va se jouer dans la puissance de ces combinaisons.

Enfin, au-delà du format lui-même on peut aussi les voir comme un média avec une ligne éditoriale particulière.

Notre société actuelle est dominée par des pratiques mortifères et prédatrices (compétition, manipulation, espionnage…). Par opposition à ces pratiques mortifères, nous choisissons de mettre en valeur spécifiquement des outils ou connaissances « vivifiants », c’est à dire qui favorisent un changement positif et nourricier/nourrissant, respectueux des humains et des écosystèmes qui les portent.

Le tout premier jeu de cartes de Métacartes que nous lançons se nomme « Faire Ensemble » et propose des méthodes créatives et collaboratives pour améliorer les réunions et les rencontres.

Métacartes en situation

Pouvez-vous nous présenter un exemple pratique d’usage de ces cartes, une mise en situation ?

Prenons un⋅e facilitateur⋅rice qui veut construire la séquence d’un évènement avec le client.

Il faut définir d’abord les objectifs : se rencontrer, faire émerger des idées, produire une trace, prioriser les actions à venir, faire un bilan, …

Ensuite, pour chaque objectif, on parcourt le jeu de cartes, et on choisit un/plusieurs formats qui peuvent convenir.

Exemple de préparation d'une journée d'animation à l'aide de métacartes
Exemple de préparation d’une journée d’animation à l’aide de métacartes

 

Au besoin, on peut aller vers la ressource en ligne pour avoir plus de précisions ou bien faire son choix autrement (originalité, déjà pratiqué avec succès…).

Mais les métacartes ne s’adressent pas qu’aux pros de l’animation ! Prenons un groupe qui se retrouve pour un atelier ou une réunion. Ses membres peuvent parcourir ensemble le jeu et cela va les aider à réfléchir à leur objectif, et au format le plus adapté pour y arriver.

D’où vous est venue l’idée de ce projet ?

Lilian : j’avais commencé à faire une collection de méthodes collaboratives d’abord sur support numérique puis sur papier sous forme de cartes faites maison et je les ai utilisées dans ma pratique professionnelle plusieurs années. Puis début 2018, j’ai commencé à travailler avec Mélanie Lacayrouze sur un format plus complet : les métacartes. Nous avons fait plusieurs itérations, des interviews d’utilisateurs, des ateliers tests pour obtenir des retours et aboutir à la version que nous allons imprimer.

Il y a actuellement un « bonus » en cours : si le financement atteint 200%, vous produirez — en plus — des métacartes relatives au projet « Dégooglisons Internet ». En quoi cela consiste-il ?

On est tous les deux très sensibles aux enjeux du libre, et donc on suit depuis longtemps à la démarche de Framasoft. Nos contenus de formations sont tous sous licence Creative Commons BY-SA !
L’idée de dégoogliser Internet, on tente de l’appliquer dans nos cercles proches depuis plusieurs années.

En tant que formateurs dans le coopératif, nous voyons aussi des réticences à l’usage du numérique chez certains de nos publics. On pense qu’avoir un « jeu » de cartes papiers ça peut aider à vulgariser, à favoriser l’usage d’outils numériques collaboratifs libres.

Sur le contenu de ce jeu : ce n’est pas finalisé, pour l’instant, mais nous envisageons des cartes outils présentant les différents services avec un condensé compréhensible par le grand public.

On pourrait aussi ajouter quelques cartes concepts pour expliciter des incontournables libristes.

Sur la ressource en ligne nous pensons compléter avec des contenus de formation, tutos, eux mêmes sous licences libres, ainsi que des liens vers les différents CHATONS qui proposent le service. L’idée est de commencer simple, avec une ressource évolutive qui sera enrichie par la suite.

Dans tous les cas, le jeu sera conçu en collaboration avec Framasoft. Comme nos contenus respectifs sont libres, pas besoin de repartir de zéro, c’est la force du libre !

Ce jeu de cartes sera accessible et téléchargeable gratuitement et librement, à la fois les contenus et les modèles.

Sur les délais, pour l’instant nous sommes en train de finir le jeu métacartes du faire-ensemble pour une sortie en décembre; on travaillera sur le jeu « Dégooglisons Internet » début 2019 pour une sortie au début du printemps !

Les différents éléments d'une métacarte
Les différents éléments d’une métacarte

Merci ! Il est d’usage de laisser la possibilité aux personnes interviewées de se poser « La question qu’on ne leur a pas posée » (et d’y répondre, évidemment !). Alors, une dernière question ?

« Est ce que vous pensez que les cartes sont le nouveau livre ? »

Oui. Nous pensons que les livres ont été et resteront utiles. Cet assemblage de pages permet de mettre à plat par écrit un raisonnement sur un sujet pour pouvoir transmettre des idées à plein de gens même loin dans l’espace et le temps. Augmenté par le numérique le format livre permet de partager instantanément des connaissances à grande échelle.

Mais lorsqu’il s’agit de travailler sur un sujet complexe avec un outil linéaire comme un livre ou un pad, forcément, on est limité ! Pouvoir manipuler les cartes (comme des post-its…) permet de faire des combinaisons, des enchaînements, et de visualiser tout ça. C’est alors un moyen puissant.

Et puis rien n’empêche de saisir le tout en co-écrivant ensemble sur un pad pour le partager. Nous séquençons les outils et les usages pour en tirer le meilleur.

 

Pour soutenir le projet : https://fr.ulule.com/metacartes-faire-ensemble/

Rappel : les dons effectués pendant toute la journée du jeudi 27 septembre seront doublés par Framasoft (dans la limite d’un don total de 800€)




TRACES, le nouveau Framabook qui vous invite à vivre et mourir au temps des IA

Mourir en Picardie, ça vous dit ? Pour traverser l’étroit passage de vie à mort, suffit de s’exercer un peu en se concentrant sur ses meilleurs souvenirs. Pour les éprouver post-mortem indéfiniment. Drôle de deal…

Écouter les voix des disparus ? Il paraît qu’en les entraînant bien les IA vont déchiffrer les chuchotis obscurs des âmes enfin libérées.

Une cyber-prophétesse dont le culte s’effondre quand ses messages déraillent ? Rendez-vous à la cathédrale d’Amiens, au cœur de la Picardie libre, nouvel état indépendant.

Vous codez ? Super. Mais vous êtes plutôt deathhacker ou thanatoprogrammeur ? Votre réseau, c’est plutôt unsecure ou MedIA ?

Vous trouverez tout cela et bien d’autres choses qui vous mettront les neurones à la centrifugeuse dans l’univers de Traces, le roman de Stéphane Crozat publié aujourd’hui chez Framabook.

Mais d’abord, l’équipe de Framasoft a interviewé pour vous le coupable.

Salut Stéphane ! Quelques mots pour te présenter ?

Bonjour. Tu sais, les profs ne sont pas habitués à décliner des CV… Bon. Stéphane Crozat. 43 ans, né en Picardie. Vie maritale, un fils, une maman, un papa, deux sœurs. Situation professionnelle : enseigne l’informatique à des élèves ingénieurs très sympas. Fait de la recherche appliquée sur les relations entre documents numériques et pédagogie dans un labo de sciences humaines assez cool pour accepter des informaticiens. Membre de la communauté du logiciel libre Scenari. Membre du Chaton Picasoft. Loisirs : pratiquer le karaté, faire des jeux, voir ses potes, regarder des films de Clint Eastwood (ou de Sergio Leone avec Clint Eastwood), écouter des vieux Renaud, faire des réponses longues aux questions qu’on lui pose.

Bon d’après toi il parle de quoi ton roman ? Parce que chez Frama on n’est pas d’accord hein : anticipation, fable philosophique, dystopie « avec des intelligences artificielles et une grande assiette de soupe », j’en connais même qui ont parlé de « thriller cybernétique », faudrait savoir ! Si tu t’essayais à résumer le propos de ton livre, l’idée directrice ?

Bon. Le titre c’est Traces, il y a une sorte de sous-titre sur la quatrième de couv’ : Vivre et mourir au temps des IA, et le site du livre s’appelle punkardie.fr, avec ça on a les mots-clés principaux, je vais partir de là. Le livre couvre un XXIe siècle dominé par une découverte concernant la vie après la mort (les « traces » du titre) et par la généralisation des IA. Et ça se passe pour l’essentiel dans une Picardie qui découvre un beau matin qu’elle est exclue de la France, et qui cherche à se réinventer pour ne pas disparaître.
Tous les personnages naissent et meurent plus ou moins avec ce siècle et ils essaient de s’en sortir au mieux pour pas trop mal vivre et pas trop mal mourir, et au passage essayer de rester libres.

Il y a deux brillantes informaticiennes qui consacrent leur vie (et leur mort) aux IA et aux traces. Il y a des personnages qui collaborent avec les géants de l’information, un peu naïvement comme le consultant Hector, d’autres plus cyniquement, comme le programmeur Alice.

Il y a aussi Bob et Charlie, qui sont un peu (et même beaucoup) paumés dans ce monde qu’ils subissent.

C’est donc plutôt un roman d’anticipation, avec des situations et des trajectoires qui peuvent nous faire réfléchir un peu sur notre monde actuel. Je prends donc avec plaisir le tag #philosophique. Mais j’espère que ça fera aussi un peu marrer, et en option un peu frissonner. Mais l’option n’est jamais obligatoire.

Avec ce roman, tu parles d’une région que tu connais bien, et tu lui imagines un avenir… particulier. Tu prends un pari sur le sens de l’humour des Picardes et des Picards ?

Le sens de l’humour l’emportera… C’est ce que je réponds à ma compagne quand elle me dit que mon fils risque de se faire jeter des cailloux à l’école ! Je plaisante. Note que les propos les plus durs à l’égard de la Picardie sont le fait de personnages (pas de l’auteur, hein, il y vit !) qui croient appartenir à une certaine élite. C’est assez facile si tu te penches depuis Paris — par exemple — de regarder la Picardie de haut :

Font des fautes de français, vont pas au théâtre, z-ont pas la 12G, même pas le tout-à-l’égout. Pis t’as vu comment y votent ?

C’est ce complexe de supériorité que je surjoue à travers les personnages qui ont des propos acerbes à l’égard des Picards. La Picardie libre, c’est une façon de dire : si on arrêtait de vouloir que tout le monde parle pareil, pense pareil, ait les mêmes ambitions ? Si on se lâchait un peu la grappe ? Si on arrêtait de vouloir dire à chacun comment il doit vivre ? C’est peut-être aussi l’espoir que les Picards d’ici et d’ailleurs essaient un jour autre chose que juste râler à chaque élection… Alors pourquoi pas cultiver des champs de cannabis, c’est plus sympa que de la betterave à sucre, non ? Bob Marley, c’est quand même plus classe que le Géant Vert !

C’est ton premier ouvrage de fiction, et tu y intègres énormément d’éléments de fond et de variétés de forme. Est-ce là un projet que tu portais en toi depuis longtemps ? Comment as-tu franchi le cap qui mène à la rédaction d’un roman ?

J’avais des bribes de textes qui traînaient dans des coins… et puis, il y a deux ans, en rentrant d’un week-end sur la côte Picarde avec ma compagne, je me suis lancé dans La Soupe. Un épisode que l’on retrouvera quelque part dans le roman. On avait déliré sur l’idée des derniers clients… Ensuite, j’ai ressorti certaines vieilles idées — comme l’indépendance forcée d’une région — et j’ai commencé à écrire quelques nouvelles, qui petit à petit se parlaient de plus en plus les unes les autres. Je me faisais vraiment plaisir, mes proches ont aimé ce que je sortais, alors, pendant six mois, un an, j’ai pris l’habitude d’écrire tous les jours et surtout les nuits. Je suivais des pistes différentes, c’est pour cela qu’il y a de la variété j’imagine. On peut aussi y voir ma déformation de chercheur en ingénierie documentaire qui aime faire travailler le fond et la forme, mon goût de la diversité, et sûrement encore l’influence de Damasio. Ensuite c’est le travail avec Framabook — gloire à Goofy — qui a conduit à un vrai roman.

Brrrr, ton roman est plutôt sombre, ça te va si on lui colle l’étiquette de dystopie ?

C’est sombre ? Dystopie ? Moi, je ne trouve pas tant que ça… Il y a quand même des pistes de sortie… Mais j’aime beaucoup les romans, films et chansons très tragiques, Le voyage au bout de la nuit, plus récemment La graine et le mulet par exemple ou l’univers désespéré de Damien Saez. Une façon d’équilibrer mon naturel très optimiste, je pense. Bref, peut-être que mon référentiel est décalé ! Après, je revendique, avec l’âge, un certain stoïcisme, j’aime bien l’idée qu’accepter le tragique du réel est au moins aussi important que de chercher à changer le monde.

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Description du fendoir picard sur le site https://www.boyaux-saucisses-epices-conserves.com/ : TOTALEMENT INDISPENSABLE ! notre FENDOIR PROFESSIONNEL INOX vous permettra l’abattage et la découpe propre, nette et efficace de vos Sangliers, Cervidés, Porcs et Bœufs.

 

Tu parles de l’évolution des géants de la communication et du numérique sur plusieurs décennies, est-ce que le cycle que tu présentes, à savoir concentration puis effondrement, est basé sur une intuition ? Ou c’est juste pour des raisons narratives ?

La concentration est là, c’est un fait admis aujourd’hui, tout comme ses risques et dérives. L’idée d’une concentration telle qu’un seul acteur subsisterait, c’est plutôt une façon d’exacerber le phénomène pour le pousser à un point-limite. Et dans ce cas, oui, j’imagine que l’on espère que ça ne durerait pas ? On est dans la servitude volontaire, on a en main les haches pour casser les monopoles, mais pour le moment on n’a pas encore assez mal pour s’en servir. Ça gratte juste. Donc, l’idée est purement narrative, c’est pour jouer avec, mais ce n’est pas forcément gratuit pour autant…

L’usage que tu présentes des Intelligences Artificielles est-il également basé sur des éléments tangibles, dont on pourrait deviner des traces dès aujourd’hui ?

J’ai été formé en info dans les années 90. L’IA, c’était le truc qui ne marchait pas. La recherche en IA était sympa parce que ça permettait d’explorer de nouvelles pistes, mais c’était de la SF. Ces dernières années on a vu un retournement tout à fait fascinant. Après, que les machines ressemblent aux robots d’Asimov et parlent comme Hal dans un avenir proche ou pas, elles ont déjà totalement envahi et transformé nos quotidiens, ça c’est un fait.

Il y a des potes qui m’expliquent que l’allumage automatique des phares en voiture, ils ne pourraient plus s’en passer. Tu imagines ? Les machines ont convaincu les humains qu’ils n’étaient pas assez autonomes pour savoir quand ils avaient besoin d’allumer la lumière ! Alors tu les imagines se passer d’un GPS ? Pour moi une IA c’est une machine qui allume tes phares à ta place. Pas besoin de réseau de neurones, ni d’ordinateur quantique.

Les premières traces des IA, c’est un silex, une houe. Un tire-bouchon c’est une intelligence artificielle. Retrouve-toi avec une bonne bouteille en rando quand t’as perdu ton couteau suisse et tu verras. Une voiture qui parle, ce n’est que l’évolution technique de la charrette. Mais je pense en effet qu’on vit le début d’un moment charnière. On s’en souviendra comme le moment où les hommes se sont mis à regarder leur portable plutôt que leur copine aux terrasses des cafés.

Jeune femme casque orange aux oreilles qui programme devant 4 écrans face à des baies vitrées donnant sur des buildings à l’arrière-plan
Photo par WOCinTech Chat (licence CC-BY-2.0)

 

Quels sont les auteurs qui t’ont le plus influencé ou peut-être inspiré pour l’écriture de ce roman ?

Bon, dans les récents, clairement c’est Damasio. Inspiré, je ne sais pas, transporté en tous cas par La horde de Contrevent, possible que j’aie picoré un peu de La zone du dehors pour ma Picardie libre — une sorte de fork — et qu’il y ait du Golgoth qui traîne dans certains de mes personnages… C’est pas sous licence libre, Damasio ? Ça devrait ! Alain, si tu m’entends…
Sinon dans les classiques, on va mettre Le voyage pour le style oral, Borges pour les nouvelles, et Nietzsche parce que ça inspire forcément des trucs. Il y aussi l’influence de mon contexte pro, comme Simondon sur le rapport à la technique.

Bon alors tu publies sous licence libre chez Framabook, tu crois que c’est comme ça que tu vas gagner de la thune ?

Carrément ! J’achèterai ma première TeslAlphabet parlante avec les dons en Ğ1 que je vais recevoir, tu verras.
Les gens croient que le libre c’est un truc d’anar de gauche à tendance humanitaire. Mais c’est une couverture, ça. Moi, j’ai choisi de publier sous licence libre, parce que je sais que c’est LE modèle économique du XXIe siècle, celui qui va bientôt tout rafler.

  • Étape 1, Framasoft. Tu crois que je ne vous vois pas venir ? Vous montez en puissance grave, pour le moment vous êtes encore sous les radars des économistes, mais d’ici quelques mois, ça va se voir, votre prévision de hausse budgétaire de plusieurs millions, votre projet de rachat de La Quadrature et des nœuds Tor, ça va pas passer inaperçu. Je sais pas d’où vient l’argent, je me suis laissé dire que vous aviez trouvé des bitcoins sur une clé USB russe ? Ou alors, vous avez un labo sur une plage ? Bref, framasoft.org va bientôt devenir le site visité en France, et quand les gens auront tout lu le Framablog, qu’ils seront addicts, ils se jetteront sur les Framabooks.

Mon IA me prévoit 95 000 exemplaires la première année. D’ailleurs, je sais que vous ne voulez pas trop en parler, mais je pense que les lecteurs ont le droit d’être au courant : Lulu risque d’être saturé rapidement, donc il faut quand même leur conseiller de commander leur exemplaire papier rapidos.

  • Bon, étape 2, mes potes. J’ai demandé à chacun d’aller voir son libraire préféré et de le convaincre de lire, puis vendre Traces. Tu me diras, t’as quoi dix potes ? D’abord j’en ai plus, et puis ça va faire boule de neige, quand mes étudiants s’y mettront ça va commencer à envoyer du lourd (non, il n’y aura pas de point en plus au partiel, mais un prof bien dans sa peau, c’est toujours un plus, pensez-y). Avec le bouche-à-oreille, on est à 1250 librairies touchées la première année, un petit 50 % quoi, avec un taux d’acceptation de 71 %. Toujours mon IA. Tu penses que je suis sectaire, tu te demandes : et si des gens qui ne sont pas mes potes ni mes élèves veulent contribuer ? Eh bien j’ai préparé une lettre sur le site du livre, ils peuvent l’imprimer et l’apporter à leur libraire préféré avec un exemplaire et ils feront partie de ce grand réseau de distribution informel, basé sur le plaisir de partager.
    Mais, c’est pas fini !
  • Étape 3, le site du livre donc : punkardie.fr. C’est là que se cristallise la vraie économie du XXIe siècle, l’économie du don. Fini les achats d’objet ou les conneries illimitées. Tout va bientôt être libre. Donc l’avenir c’est le don. Et là, comme je suis en avance de phase, c’est le pactole, un premier million dès 2020 (en Ğ1 bien sûr). Promis, je reverserai une part à Framasoft. Voilà, tout est orchestré. Alors ceux qui pensent que les libristes sont des Bisounours ou des punks à chien, ils vont devoir revoir un peu leur conception du monde. Les traders et les banquiers de demain, c’est nous !

image de couverture de Traces, le roman de Stéphane Crozat. Détail d’une sculpture grise métal, quelques zones rouges

Donc tu veux distribuer ton roman aussi via les libraires indépendants. C’est quoi cette histoire de lettre ?

Je sais que Framabook n’est pas très chaud pour travailler avec les libraires, parce que c’est beaucoup de contraintes et de boulot pour une faible diffusion. Mais j’aime bien les librairies. C’est je crois le seul magasin où j’aime me rendre et perdre du temps. Ne me propose pas d’aller acheter des fringues, j’attrape des boutons, mais aller à la librairie pour moi, c’est comme aller au cinéma. Ce n’est plus vraiment « utile » — home cinéma et liseuse électronique obligent — mais il y a une ambiance… Alors je me suis dit, si certains lecteurs et lectrices veulent essayer de convaincre leur libraire et que cette personne est assez chouette pour faire l’effort d’accepter, on peut essayer. Donc j’ai préparé une lettre qu’ils et elles peuvent donner en accompagnement d’un exemplaire et de leur petit argumentaire à eux. Imagine, si ça marche, ce serait quand même super classe ? Et puis, ça permettrait aussi de diffuser un peu des valeurs du libre… Et même si c’est pas sûr, c’est quand même peut-être…

Dans ton roman, on ne peut pas dire que tu sois tendre avec l’avenir du Libre. Est-ce une crainte, une façon de conjurer le sort ?

D’abord, globalement, c’est pas un roman très tendre… Donc oui, il y a quand même beaucoup de second degré. Si vous êtes choqué à un moment, dites-vous que c’est du second degré ! Sur le libre, il y a quand même des résistances qui se maintiennent pendant la première moitié du roman, les réseaux anarchiques de Picardie ou les death hackers. Et puis tout de même, ensuite, c’est bien une communauté libre à l’échelle mondiale qui permet à Suzanne de mener à bien son projet. Après, que la route soit longue, c’est possible…

Tu penses déjà à la suite ou bien c’était un one-shot ? Peut-être que tes lecteurs et lectrices auront envie de voir se développer un personnage ou une période ?
Pour le moment, j’ai plutôt d’autres idées… On verra quand j’aurai des lecteurs et des lectrices !

Un dernier défi : ton mot de la fin en moins de 180 caractères…
Quelle poignée de secondes garderais-tu si tu devais les revivre pour l’éternité ?

  *   *   *   *

Les liens qui vont bien




Les logiciels libres meurent lentement sans contributions

Dans une récente conférence où il présentait Contributopia, le projet pluriannuel de Framasoft, sous son angle politique, Pierre-Yves Gosset s’attachait à déboulonner quelques mensonges avec lesquels se rassurent les libristes. Le nombre présumé des contributeurs et contributrices, en particulier, était ramené à sa juste proportion :

Bien sûr, tout le monde ne peut pas envoyer des commits de code, mais l’exemple est symptomatique : le Logiciel Libre c’est surtout des consommateurs et consommatrices.

C’est ce que souligne également Carl Chenet, plume invitée ci-dessous. Il pointe en particulier le risque sérieux d’étiolement voire de disparition pure et simple des équipes parfois minuscules qui maintiennent des FOSS (Free and Open Source Software, appellation œcuménique qui joint Les logiciels libres et open source). Il en appelle à une contribution minimale qui consisterait au moins à faire connaître les projets et encourager les créateurs à continuer. Chez Framasoft, nous sommes tout à fait en phase avec cet appel, voyez par exemple cet article sur le Contribution Camp qui propose quelques pistes pour « avancer ensemble vers la contribution ».


Logiciels libres et open source : le consumérisme passif tue la communauté
Par Carl CHENET

article aussi publié en anglais sur mon blog

En bref : ne soyez pas un consommateur passif de logiciels libres. Cela va tuer la communauté FOSS ou lui nuire. Contribuez de n’importe laquelle des manières décrites dans cet article, même la plus élémentaire, mais contribuez quotidiennement ou de façon très régulière.

petite photo de l’auteur de l’article, carl Che

Je suis ingénieur système depuis plus de 10 ans maintenant et je travaille presque exclusivement avec des systèmes GNU/Linux. Je suis aussi profondément impliqué dans la communauté des logiciels libres et open source (FOSS) depuis longtemps et je passe beaucoup de temps sur les réseaux sociaux (surtout Twitter et Mastodon ces jours-ci). Et certains comportements m’énervent toujours autant.

Le consommateur se croit plus intelligent et plus efficace que les autres

De nombreux professionnels de l’informatique qui utilisent les logiciels libres affichent un comportement de pure consommation dans leur relation avec les logiciels libres. Par exemple ils essaient souvent d’utiliser un logiciel dans un environnement très spécifique (version spécifique d’une distribution GNU/Linux, version spécifique d’un logiciel). Ils ne réussissent pas à l’utiliser dans cet environnement ? Ce logiciel est évidemment de la merde, il devrait fonctionner avec les paramètres par défaut, sinon il n’est pas convivial. La documentation est disponible ? Qui lit le doc ? J’ai besoin de réponses maintenant, je n’ai pas le temps de lire la documentation ! Et qui a écrit cette merde d’ailleurs ?

Si la réponse n’est pas le premier lien StackOverFlow de la première recherche Google, je laisse tomber cette merde. Mon temps est précieux donc je vais essayer un autre logiciel (et perdre 2 fois plus de temps) ou mieux le coder moi-même (100 fois plus de perte de temps) et de telle manière qu’il sera impossible de le réutiliser bien sûr.

Les consommateurs passifs n’envoient jamais un rapport de bogue. C’est une perte de temps, qui réclame des efforts. Qui a le temps de l’écrire sauf les pigeons ? Pas même un ping au mainteneur ou au développeur principal du projet (ils devraient savoir, ils ont écrit cette merde !) Ok, je l’ai appelé sur Twitter il y a 2 minutes. Les gens ne répondent pas en une minute ? Allez vous faire foutre, bande de losers juste bons à perdre votre temps ! Je m’en tape qu’il soit 2h du matin pour lui.

Ok, ok, ok, c’est bon, je vais écrire un rapport de bug si les ouin-ouins insistent : ÇA MARCHE PAS BOUGEZ-VOUS LE CUL BANDE DE CONNARDS, CORRIGEZ ÇA MAINTENANT !

Faire un don au développeur ou à la développeuse ? Pour quoi faire ?

Même avec des logiciels qu’ils aiment et utilisent tous les jours et qui fonctionnent parfaitement, avec des mises à jour régulières parfaites, la plupart des professionnels de l’informatique ont exactement ce même comportement de consommation passive.

Ça fait 5 ans que ce logiciel alimente toute l’informatique, ce qui aide l’entreprise à gagner beaucoup d’argent ? Tout à fait. Le développeur principal demande de l’argent / de la reconnaissance par le biais des réseaux sociaux ? Sale clodo ! Il a besoin d’argent ? Moi aussi ! Cette personne a-t-elle un Patreon ? On s’en fout ! Ce type me doit d’utiliser son logiciel, il me casse les pieds, il adore coder gratuitement de toute façon ce pigeon.

L’aider en achetant une licence professionnelle pour ce logiciel ? MDR pour quoi faire ? Mon patron va se marrer en entendant ça. Personne ne paie pour les logiciels (sauf les pigeons). C’est gratuit, comme dans bière gratuite bébé !

Je vais même lui demander de modifier la licence parce que je ne peux pas utiliser ce logiciel (qu’il maintient gratuitement le con) dans ma propre suite logicielle propriétaire. Il devrait me remercier de l’aider à développer son logiciel, ce futur Marc Zuckerberg. Je suis presque sûr qu’il a gagné masse de thunes de toute façon. Il en aura pas par moi, pas question.

Et bien sûr, ce comportement de consommation passive a des impacts négatifs sur l’écosystème des logiciels libres. Vraiment. Habituellement, après quelques années, le développeur principal abandonne le projet. À ce moment-là, vous pouvez généralement lire ce genre de commentaires furieux sur son blog ou dans les rapports de bug « Espèce de branleur t’as plus mis à jour ton logiciel depuis des années, feignant va, des gens sérieux l’utilisent, réponds ou je laisse des milliers de commentaires insultants ! J’ai tout misé sur ton code, tu devrais me remercier à genoux. Espèce de communiste branleur, j’enlèverais mon étoile sur ton repo Gihub/Gitlab si je l’avais mis en vedette. Mais bien sûr que non, je ne vais pas mettre en vedette tous les projets que j’utilise, qu’est-ce que tu crois ? Contribuer d’une façon ou d’une autre ? Allez, faut grandir un peu, et faire avec. La vie est dure. »

Promouvoir les projets que vous utilisez et interagir avec eux

Afin de ne pas ressembler aux tristes personnages décrits plus haut, merci d’aider les projets que vous utilisez. Si votre entreprise gagne de l’argent grâce aux FOSS et que vous êtes chef d’entreprise, financer ou bloquer du temps pour que vos développeurs donnent un coup de main pour au moins un projet que vous utilisez quotidiennement semble un objectif raisonnable et démontre une certaine compréhension de l’écosystème FOSS.

Si vous êtes un employé d’une entreprise utilisant des FOSS, une étape très importante est de faire savoir à votre chef ou votre patron que des parties de votre infrastructure mourront à court terme (quelques années) si vous n’aidez pas ce projet de quelque façon que ce soit.

99,9 % des projets FOSS sont des projets maintenus par une seule personne. Cette petite bibliothèque JavaScript que le frontend du site web de votre entreprise utilise ou ce petit script de sauvegarde de base de données dont tout le monde se fout mais qui vous a déjà sauvé la vie 2 fois.

Si l’argent n’entre pas en jeu dans votre utilisation des FOSS et si vous fournissez un service gratuit à d’autres personnes, faites savoir aussi largement que possible que vous utilisez des FOSS et n’hésitez pas à remercier certains projets de temps en temps. Le simple fait de dire aux personnes par le biais de Mastodon ou Twitter que vous utilisez leurs logiciels peut leur remonter sacrément le moral. Mettez en vedette leurs projets sur Gitlab ou Github pour leur faire savoir (ainsi qu’aux autres) que ce projet est utile.

Quelques manières de contribuer

Voici une liste d’excellents moyens de contribuer :

• Faites savoir aussi largement que possible via les réseaux sociaux que votre dernière mise à jour de tel ou tel logiciel s’est déroulée sans problèmes. Faites passer le mot autour de vous.
• Rédigez un billet de blog décrivant vos expériences et la valeur ajoutée que ce grand projet FOSS a apportée à votre entreprise ou à vos projets. Suivez les développeurs principaux de différents projets sur Mastodon ou Twitter et retweetez/likez/pouétez… leurs dernières nouvelles de temps en temps.
• Écrivez un commentaire de remerciement sur le blog du projet ou sur le blog du développeur principal. La lecture de votre commentaire sera un rayon de soleil dans la journée du développeur de ce projet.

Mettez une étoile au projet feed2toot sur Gitlab

Ne soyez plus un consommateur passif

Ne soyez plus un consommateur passif de logiciels libres et open source. Le niveau moyen nécessaire pour contribuer à un projet et les attentes des créateurs de logiciels libres et open source augmentent de jour en jour dans un monde où la complexité et les interactions s’accroissent rapidement. Il n’y a souvent qu’une toute petite équipe (d’une seule à 5 personnes) qui est au cœur du développement fondamental des FOSS.

copie d’écran twit de Chent où il parle de la dernière version d’elastic stack
Je parle tous les jours des FOSS sur mes comptes Twitter et Mastodon

 

Contribuez de n’importe quelle manière décrite dans cet article, même la plus élémentaire, mais contribuez quotidiennement ou de façon très régulière. Vous aurez ainsi une participation concrète et fournirez de bonnes vibrations et d’excellents apports aux projets FOSS. Vos contributions changeront vraiment les choses, encourageront et (re)motiveront les personnes impliquées. C’est bon pour vous, vous allez améliorer vos compétences, acquérir des connaissances sur la communauté FOSS et de la visibilité pour votre entreprise ou vos projets. Et c’est une bonne chose pour la communauté FOSS que d’avoir de plus en plus de personnes qui contribuent par n’importe quelle action positive.

À propos de l’auteur

Carl Chenet, passionné de logiciels libres, auteur du Courrier du hacker, la lettre d’information hebdomadaire résumant l’actualité francophone du Logiciel Libre et Open Source




La FIFA ne veut pas qu’on danse de joie devant sa télé

Le football déclenche en ce moment même de féroces passions, mais aussi la rapacité de la FIFA. Voici un fait-divers qui l’illustre, il est digne de figurer dans le célèbre Copyright Madness de Numerama… c’est à la fois drôle et consternant.

Danser devant sa télé ? Pas question, dit la FIFA 

Source : FIFA Is Not Okay With Dancing In Front of the TV

Traduction Framalang : wyatt, simon, goofy

Nous voilà en pleine Coupe du monde de foot. Ça veut dire qu’on marque des buts. Et chaque but marqué donne lieu à une célébration enthousiaste. Voici par exemple une compilation (lien vers YouTube) de fans de football aux États-Unis qui fêtent un but de la dernière minute pendant la Coupe du monde de 2010. Ah, que de souvenirs.

Eh bien pourtant, la FIFA ne semble pas aimer que les fans de foot fêtent les victoires devant leur écran de télé. Cet organisme vient d’envoyer une mise en demeure de retrait pour une vidéo de 5 secondes montrant un petit garçon qui danse de joie dans le salon familial.

On distingue à l’arrière-plan l’écran de télévision dont l’image a été floutée depuis

 

Suite à un but marqué pendant le match Angleterre-Tunisie, Kathryn Conn a mis en ligne une vidéo de 5 secondes de son fils de 7 ans qui fête le but. Mrs Conn a expliqué que son fils est un« fan absolu des Spurs et qu’il voue littéralement un culte à Harry Kane, donc il s’est mis à danser de joie dans le salon. Malheureusement, la danse s’est déroulée devant l’écran de télévision qui diffusait encore le match. Et s’il y a une chose avec laquelle la FIFA ne rigole pas du tout, c’est bien leur copyright.

Mrs Conn raconte que le lendemain matin au réveil elle s’est rendu compte que la vidéo avait été supprimée de Twitter accompagnée d’un avertissement indiquant que c’était dû à une demande de retrait relative au DMCA (Digital Millennium Copyright Act) venant de la FIFA, laquelle était apparemment très ennuyée qu’une image floue en arrière-plan d’une partie de football dans une vidéo de 5 secondes puisse influer sur l’audience de l’événement sportif le plus attendu à la télé britannique en 2018.

Hmmm. un gamin qui danse dans une brève vidéo avec du matériel sous copyright en arrière-plan ? Nous espérons que ça ne prendra pas 10 ans de procédure comme dans l’affaire du bébé dansant pour que la FIFA en tire la leçon. La FIFA devrait respecter le fair use (usage raisonnable et acceptable) et respecter ses propres fans aussi…