2011 : année Mozilla Firefox ou année Google Chrome ?

Laihiu - CC byEn mai dernier, nous publiions un billet au titre ravageur : Google Chrome m’a tuer ou le probable déclin de Firefox si nous n’y faisons rien.

De nouveaux chiffres sont arrivés depuis dans le monde des navigateurs. Et si l’on peut légitimement faire la fête et se réjouir de voir Firefox dépasser aujourd’hui Internet Explorer en Europe, on constate comme prévu qu’un nouvel invité est arrivé et qu’il est particulièrement glouton.

Entre les deux, le coeur de Glyn Moody ne balance pas et il sait, tout comme nous, où placer sa confiance. Encore faudrait-il que, techniquement parlant, Firefox ne se laisse pas trop distancer et c’est aussi pourquoi la sortie de la version 4 est tant attendue[1].

2011 : L’année de Firefox ou de Chrome ?

2011: The Year of Firefox – or of Chrome?

Glyn Moody – 4 janvier 2011 – ComputerWorld
(Traduction Framalang : Penguin et Barbidule)

Tout le monde sait qu’il y a les mensonges, les mensonges énormes et les statistiques concernant le Web. Mais ces dernières peuvent néanmoins vous donner une vague idée de la situation. C’est le cas des récents chiffres sur les parts de marché des navigateurs en Europe.

L’événement principal est immédiatement manifeste : comme le graphique le montre, la part de marché de Firefox a dépassé celle d’Internet Explorer, avec 38,11% contre 37,52% (même si les deux dernières décimales ne m’inspirent qu’une confiance limitée voire nulle).

Maintenant, il est vrai qu’il s’agit uniquement de l’Europe, qui a toujours été pionnière dans ce domaine, mais il faut tout de même savourer l’instant. Après tout, lorsque Mozilla puis Firefox furent lancés, peu leur donnaient des chances de réussir à renverser le géant Microsoft. Il n’y avait tout simplement pas de précédent pour un courageux nouvel arrivant, et encore moins un arrivant open source, de partir de zéro et d’arriver à supplanter une entreprise qui semblait inarrêtable sur ses marchés clés. Il est vrai qu’au niveau du serveur, Apache est devant Internet Information Server de Microsoft, mais Apache était arrivé en premier, et était donc celui à battre : la situation du côté du client était très différente.

Évidemment, ce n’est pas la seule chose que nous dit ce graphique. Firefox a en fait légèrement régressé l’année dernière, c’est surtout qu’Internet Explorer a reculé encore plus. Et cette baisse a presque entièrement bénéficié à Google Chrome, dont la part de marché est passée de 5,06% à 14,58% pendant cette période.

C’est vraiment étonnant à tout point de vue, et cela confirme l’ascension de Chrome au Panthéon des navigateurs. La question est évidemment de savoir si cette ascension vertigineuse va se poursuivre, et ce qui va arriver aux autres navigateurs.

Naturellement, cela dépendra beaucoup des fonctionnalités qu’auront les nouvelles versions de Firefox, et dans une moindre mesure, d’Internet Explorer, mais je ne vois pas de raisons qui empêcheraient Chrome de s’élever au-dessus des 20% à court terme. Cela veut dire bien entendu que les parts de marché de Firefox et d’Internet Explorer vont continuer à baisser. Mais comme je le notais il y a quelque temps, ce n’est pas vraiment un gros problème pour Firefox, alors que ça l’est pour Microsoft.

La raison est assez simple : Firefox n´a jamais eu pour objectif la domination du monde, il combattait pour créer un Web ouvert, où aucun navigateur n’occuperait une position dominante d’où il pourrait ignorer les standards ouverts et imposer à la place des standards de facto. C’est plus ou moins la situation actuelle, désormais, Internet Explorer devenant de plus en plus conforme aux standards, et, de façon étonnante, l’affichant avec fierté.

Avec l’ascension continue de Chrome jusqu’au point où les trois navigateurs auront plus ou moins la même part de marché, nous aurons une situation parfaite pour une compétition amicale à trois, ce qui est même mieux qu’une simple rivalité à deux. Je suis presque sûr que le Web va devenir de plus en plus ouvert grâce à cela (c’est dommage qu’il reste menacé par d’autres actions : ACTA, censure, etc.).

Mais cela ne veut pas dire que Firefox et Chrome ont les mêmes buts, et qu’il ne faut pas s’inquiéter des parts de marché de Firefox. Il est important de se rappeler pourquoi Google a créé Chrome, et pourquoi il a libéré le code. C’est simplement parce qu’il sait que libérer le code, et permettre à d’autres de construire par dessus, est le moyen le plus rapide de donner une place à un produit dans un marché concurrentiel. En faisant cela, il est vrai que Google promeut les standards ouverts et l’open source, mais seulement jusqu’à un certain point.

La différence principale est que Google voit l’open source comme un moyen de générer davantage de revenus, alors que Firefox voit les revenus générés par la barre de recherche comme un moyen de favoriser son travail de protection et d’amélioration d’un Web ouvert. Entre les deux, je sais où je préfère placer ma confiance pour l’avenir.

Notes

[1] Crédit photo : Laihiu (Creative Commons By)




La promiscuité sans fil des réseaux WiFi publics

David Goehring - CC-BySe connecter à un Wifi public dans un parc, une gare ou un café [1] pour accéder à Internet, c’est un peu comme passer par la salle d’attente du médecin avant une consultation. Dans les deux cas, vous avez confiance en votre destination [2], mais vous êtes au préalable enfermé dans un espace avec des étrangers, tous plus ou moins malades.

En effet, le WiFi d’un café vous connecte, comme la salle d’attente, avec votre entourage direct, sans que vous ayez rien demandé. Or, si votre dossier médical est confidentiel, il suffit de faire tomber ses papiers dans une salle d’attente pour que toutes les personnes présentes puissent les lire, et il suffit de se connecter (via un WiFi public) à un service qui n’utilise pas le protocole HTTPS pour que votre entourage connecté puisse s’immiscer dans votre session et votre intimité.

Les coupables ? Les sites conservant à votre place des éléments de votre vie privée d’une part, et proposant d’autre part et sans la protection du petit cadenas qui dénote de l’utilisation du protocole HTTPS, de « garder votre session ouverte » grâce à un cookie. Si vous y prenez garde, ce n’est pas le cas des services en ligne de votre banque.

Toutefois, si l’auteur est assez pessimiste dans son petit billet complémentaire (reproduit ici à la suite du premier) face aux moyens de protection à notre disposition, il existe plusieurs extensions Firefox pour limiter les risques sans trop se compliquer la vie, citons (sur les bons conseils de Goofy) HTTPS Everywhere, et Force-TSL. De plus, il me semble également assez simple de se connecter, où qu’on soit, d’abord à un VPN personnel, ou directement en SSH sur son serveur à soit (voir l’extension Foxyproxy de Firefox), pour surfer ensuite l’esprit tranquille et sans laisser de traces locales, comme si on était à la maison. D’ailleurs, votre WiFi chez vous, il est protégé comment ?

Quand le berger prévient les moutons à New York City

Herding Firesheep in New York City

Gary LosHuertos – 27 octobre 2010 – TechnologySufficientlyAdvanced.blogspot.com
Traduction Framalang : Goofy, Pablo, cheval_boiteux

On a beaucoup parlé de Firesheep ces derniers jours. Cette extension gratuite pour Firefox récolte pour vous les cookies qui sont envoyés depuis un réseau WiFi non protégé n’utilisant pas le protocole SSL. Vous la mettez en route, elle collecte les cookies de Facebook, Twitter et de 24 autres sites (par défaut). Ensuite, vous pouvez voler l’identité d’un compte et obtenir l’accès sous cette identité.

L’extension n’a rien de scandaleux en elle-même. Si vous êtes un développeur un peu compétent, vous savez depuis longtemps que cette faille existait, n’est-ce pas ? Mais quid du reste du monde ? Tous ces gens qui n’ont jamais entendu parler de cette nouvelle menace si facile d’accès, qui n’ont pas été alertés par leurs amis, qui ne regardent pas Engadget, ni Slashdot, ni ABC Pronews7 à Amarillo ?

Je me suis dit que j’allais faire passer le message et aider les béotiens après leur travail, puisqu’il y a un grand Starbucks tout près de chez moi. J’y suis allé, j’ai acheté un peu de nourriture malsaine, j’ai ouvert mon portable et lancé Firesheep. Moins d’une minute plus tard, j’avais cinq ou six identités disponibles dans le panneau latéral. Trois d’entre elles étaient sur Facebook.

Absolument rien de surprenant ; Firesheep n’est pas magique, et tous ceux qui vont au Starbucks savent qu’un tas de gens y mettent à jour leur statut Facebook sans faire attention, tout en sirotant leur café au lait. J’ai pensé que j’allais y passer un peu plus de temps, j’ai donc écouté un peu de musique, parlé à quelques amis, et le plus important (mais pas le plus simple) je n’ai navigué sur aucun site avec le protocole standard HTTP (et surtout pas sur Facebook évidemment).

Environ une demi-heure plus tard, j’avais récolté entre 20 et 40 identités. Puisque Facebook était de loin le service le plus représenté (et qu’il détient plus d’informations personnelles que Twitter) j’ai décidé d’envoyer aux utilisateurs des messages depuis leur propre compte, pour les avertir des risques auxquels ils s’exposaient. J’ai fait un modèle de message sympa qui précisait la localisation du Starbucks, la nature de la vulnérabilité, et comment y remédier. J’ai envoyé des messages aux 20 personnes autour de moi.

J’ai nettoyé le panneau latéral, retiré mes écouteurs, et j’ai attendu. J’ai entendu quelqu’un marmonner un juron pas très loin, et me suis demandé si mon message en était la cause. Pendant le quart d’heure suivant, je n’ai entendu strictement personne parler de ce qui venait se passer (pourtant ceux qui fréquentent les Starbucks ne sont le plus souvent pas du genre à tenir des conversations discrètes). Pourtant, j’ai pu vraiment constater une nette chute du nombre d’identités que je pouvais récolter quand j’ai relancé Firesheep.

C’était un soulagement — en voilà qui avaient compris le message. Avec un peu de chance, ils allaient alerter leurs amis, mettre à l’abri leur femme et leurs enfants. J’ai de nouveau nettoyé le panneau latéral, et après une vingtaine de minutes de conversations impromptues j’ai vu que cinq identités que j’avais déjà croisées étaient revenues dans mon troupeau.

C’était assez surprenant. Avaient-ils reçu le premier message ? Je me suis mis sur leur compte avec leurs identifiants, et en effet ils l’avaient reçu. L’un d’entre eux était même sur Amazon.com, site contre lequel j’avais mis en garde dans mon premier message. Je l’ai choisi pour première cible : j’ai ouvert sa page perso sur Amazon, j’ai repéré un truc sur lequel il avait récemment jeté un coup d’œil et lui ai envoyé un mot : « non, c’est pas sérieux » sur Facebook depuis son propre compte, avec un clin d’œil sur ses goûts musicaux.

J’ai encore une fois effacé les identités, attendu dix minutes, et lorsque j’ai à nouveau rassemblé mon troupeau avec Firesheep, il était parti. Mais il y en avait encore quatre qui restaient là. Peut-être, me suis-je dit, qu’ils ont cru que c’était un message d’avertissement automatique les ciblant au hasard (bien que j’aie mentionné leur localisation dans un rayon d’une trentaine de mètres). Donc, un dernier message était nécessaire.

J’ai bricolé un très court message (le premier était peut-être trop long ?) et je l’ai envoyé aux quatre, une fois encore avec leur propre compte :

« C’était vraiment pas une blague l’avertissement sur la sécurité. Je n’enverrai plus d’autre message après celui-ci –– à vous de prendre sérieusement en main votre propre sécurité. Vous êtes au Starbucks XYZ connecté de façon non sécurisée, et absolument n’importe qui peut accéder à votre compte avec l’outil approprié nécessaire (et disponible à tous). »

Vingt minutes ont passé, et tous les quatre utilisaient encore Facebook frénétiquement. Encore une fois, j’ai envisagé qu’ils auraient pu ne pas recevoir le message, mais en vérifiant leur compte j’ai vu qu’ils l’avaient bel et bien reçu.

Voilà ce qu’il y a de plus choquant à propos de la sécurité sur Internet : ce n’est pas que nous soyons tous scotchés sur un réseau global qui tient avec des bouts de sparadrap et laisse béants d’horribles failles de sécurité ; ce n’est pas non plus qu’un outil librement disponible puisse récolter des cookies d’authentification ; et ce n’est toujours pas qu’il y ait des gens pas du tout au courant de l’un ni de l’autre. Ce qui est absolument incompréhensible, c’est qu’après avoir été averti d’un danger (et sur son propre compte !) on puisse tranquillement ignorer l’avertissement, et reprendre le fil de ses activités.

Mais enfin j’ai tenu parole et n’ai pas envoyé d’autre message. J’ai rangé mon matériel, fait un petit tour dans le café, et reconnu plusieurs personnes auxquelles j’avais montré leur vulnérabilité. Je n’avais pas laissé d’indices sur ma propre identité, moins par crainte de rétorsion que parce que l’intrusion dans la vie privée est encore plus traumatisante quand elle est commise par un étranger complet, dont on n’a pas la moindre chance de découvrir l’identité.

En revenant chez moi, j’ai réfléchi à ce que cette expérience révélait de notre société. Peu importe le nombre de mesures de sécurité que nous procurons au monde entier, il y aura toujours des gens qui laisseront la porte ouverte, même s’ils ont été victimes d’une intrusion. Le maillon le plus faible de la sécurité c’est et ce sera toujours la décision de l’utilisateur.

De retour dans mon appartement, j’ai commencé à m’installer — et c’est le moment où je me suis rendu compte que pendant toute la soirée j’avais eu la braguette grande ouverte. La preuve par neuf finalement : nous nous baladons tous avec des vulnérabilités qu’il nous reste à découvrir.

Addendum

Herding Firesheep Addendum

Gary LosHuertos – 04 novembre 2010 – TechnologySufficientlyAdvanced.blogspot.com
Traduction Framalang : Siltaar, RaphaelH, Goofy

À la suite du billet précédent, je me suis dit qu’en voulant faire court j’avais omis quelques informations. Ceci sert donc d’addendum à mon précédent billet, et a été rédigé de la manière la plus courte possible.

Le message original envoyés aux clients était le suivant :

Comme vous utilisez Facebook sans chiffrement dans un Starbucks, votre compte a été compromis. Je ne suis qu’un amical client du Starbucks qui a souhaité vous prévenir de cette vulnérabilité.

Vous pouvez en apprendre davantage en cherchant des informations sur « Firesheep ». Il n’y a pas vraiment de solutions disponibles pour protéger votre compte Facebook lorsque vous êtes connectés à un réseau public, et je vous recommande donc simplement de ne pas vous y connecter lorsque vous êtes dans un Starbucks. Cette faille affecte également Twitter, Amazon.com, Google (mais pas Gmail), et quantité d’autres services.

Votre mot de passe n’a pas été compromis. Vous déconnecter de Facebook est tout ce que vous avez besoin de faire.

Pour préciser mes motivations, laisser un compte Facebook sans protection ne signifie pas seulement que quelqu’un peut regarder vos photos, vos coups de cœurs et messages. Un compte Facebook compromis donne à quelqu’un d’autre l’accès à votre identité, lui permettant de se faire passer pour vous auprès de vos amis, ruinant potentiellement des relations. S’il est possible de rattraper les choses ensuite, le temps et l’énergie que ça demande sont importants, surtout pour quelqu’un qui a beaucoup d’amis. Quelqu’un envoyant un faux message à l’un de vos amis n’est peut être pas un gros problème, mais un faux message envoyé à 500 de vos amis est déjà plus gênant. D’autant plus qu’il peut y avoir des collègues de travail, des membres de votre famille, ou des clients dans ces 500 personnes.

Concernant la légalité de mes actions : ça n’était pas l’objet de mon article. On peut toujours spéculer sur fait que je finisse en prison, mais c’est hors sujet par rapport à ce dont je parle dans mon billet : les sites non protégés comme Facebook et Twitter sont dangereux pour leurs utilisateurs. Il semble plus intéressant de consacrer son énergie à faire passer le mot plutôt que de troller sur mon éventuelle incarcération.

Enfin concernant ce que les utilisateurs peuvent faire, la meilleure réponse à l’heure actuelle est : rien. Ne vous connectez pas aux réseaux non protégés pour utiliser ces sites web, ou bien utilisez une application qui n’utilise pas d’authentification par cookie non protégée (pour ce que j’en sais, l’application Facebook pour iPhone ne le ferait pas). Assurez-vous que votre réseau WiFi domestique est chiffré en WPA, voire en WPA2 (le WEP est trivialement déchiffrable). Si vous utilisez Facebook au travail sur une connection sans-fil, vérifiez le chiffrement du réseau. La faille de sécurité ne vient pas seulement de Firesheep, elle vient du manque de protection des connexions. La menace la plus grande vient des outils automatisés qui existent depuis des années [3].

Notes

[1] Crédit : CarbonNYC David Goehring Creative Commons By

[2] Et le sujet ici, n’est pas savoir si cette confiance est bien placée…

[3] Voir la magie des Google Cars expliquées par PCINpact ou ZDNet par exemple…




Seabird : Un concept communautaire de téléphone portable

Mozilla CC-byEt si, en se regroupant pour partager nos rêves, nous tentions de faire émerger de cette tornade d’idées un nouveau concept de téléphone ? C’est l’expérience quelque peu décalée et pour le moins surprenante qu’a tentée Mozilla [1], au travers de ses Mozilla Labs.

Et qu’ont-ils inventés tous ensemble, un téléphone à glissière qui claque comme dans Matrix ? Un frigo satellitaire à antenne comme dans les séries américaines ? Un netbook avec clé 3G, webcam et Ekiga pour la voix sur IP ? Un N900 qui téléphone ? Un autre iPhone dépassé qui emprisonne ?

Quel serait le mieux que l’on puisse produire aujourd’hui ? Quelque chose à la fois contemporain dans sa plausibilité technique et avant-gardiste dans les fonctionnalités qu’il offre…

Et bien si l’OPLC a révolutionné le marché des ordinateurs portables en provocant la déferlante des netbooks, il nous reste à espérer que le Mozilla Seabird fera autant de vagues dans le secteur des téléphones mobiles !

À n’en pas douter, lire des livres libres sur cette incroyable (mais crédible) machine serait un plaisir, partageable !

C’est pourquoi, en tant que technophile, je n’ai pu résister au plaisir de partager avec vous mon enthousiasme pour ce petit concentré de bonnes idées, qui a suscité plus d’un millier de commentaires (au moment de la rédaction de ce billet) sur le blog original, et fut salué par plus de 25 journaux et sites en langue anglaise spécialisés dans les hautes technologies [2].

Concept Series : Seabird – Un concept communautaire de téléphone portable

Concept Series: Seabird – A Community-driven Mobile Phone Concept

Pascal Finette – 23 septembre 2010 – MozillaLabs.com
Traduction Framalang : Cheval_Boiteux, DonRico, @PierreTravers, Goofy, Siltaar et Zitor

Depuis que les Mozilla Labs ont lancé les Concept Series avec un appel à participation, des milliers de personnes nous ont rejoints, ont partagé leurs idées et développé des concepts autour de Firefox, des projets Mozilla et du Web ouvert dans son ensemble.

En réponse à notre appel ouvert du début 2009, Billy May a produit un concept de « Téléphone conçu pour le Web ouvert ». En travaillant directement à partir des retours de la communauté, Billy a depuis terminé son exploration avec son concept « Seabird ».

Le compte rendu suivant a été rédigé par Billy May et explore ce à quoi un téléphone Web ouvert pourrait ressembler :

Description générale

Le Mozilla Seabird, qui fait partie des Concept Series des Mozilla Labs, est une expérimentation portant sur les manières dont les utilisateurs pourraient interagir avec les contenus de leur téléphone mobile à mesure que les appareils et la technologie gagnent en performances. S’appuyant sur des idées fournies par la communauté Mozilla via le blog du projet, l’accent a rapidement été mis sur les limitations des interactions physiques. Alors que la connectivité, la puissance des processeurs mobiles et le développement des plateformes rattrapent ceux des ordinateurs de bureau, le manque de moyens disponibles pour saisir efficacement du contenu se fait de plus en plus sentir.

Mozilla CC-by

Interaction

Le Seabird présente donc quelques façons dont l’interaction utilisateur/appareil pourrait évoluer grâce aux innovations que connaît le secteur, conduites par les avancées en matière de projecteurs et de capture de mouvements. Premièrement, le Seabird montre comment une clé (un dongle) à usage multiple pourrait améliorer l’interface tactile encombrée en offrant plus de précision et une manipulation directe du contenu dans un espace en 3D.

Mozilla CC-by

Pico Projecteur

Avec des fabricants de téléphones portables comme Samsung, LG et Motorola qui se dirigent vers des applications d’affichage conçues pour les projecteurs, la technologie laisse le champ libre à l’extension de la surface offerte à l’utilisateur pour l’interaction et la saisie. Sur une surface plane, le Seabird permet une interaction d’une qualité équivalente à celle d’un netbook, en utilisant la distortion angulaire du projecteur pour fournir une interface plutôt que du contenu. Avec une station d’accueil, chaque projecteur peut travailler indépendamment et fournir ainsi un confort d’utilisation égal à celui d’un ordinateur portable.

Mozilla CC-by

Design

La conception de l’aspect visuel s’appuie sur des formes aérodynamiques, aviaires et résolument féminines. En position debout, le Seabird renvoie une impression d’équilibre, tandis que sa façon d’épouser les courbes de la main rend celui-ci compatible avec le désir qu’a l’utilisateur de maîtriser l’objet numérique. La courbure du dos joue également un rôle fonctionnel, car elle surélève les éléments de la lentille du projecteur quand le Seabird est posé à plat.

Mozilla CC-by

Seabird est une expérimentation gérée par la communauté et ne signifie pas que Mozilla envisage la production d’un système d’exploitation ou de matériel.

Mozilla CC-by

FAQ

Qui est à l’origine du projet ?

Seabird a été créé par Billy May, un membre de la communauté Mozilla Labs qui, au début de l’année 2009, a jeté une première ébauche de ce à quoi pourrait ressembler un téléphone mobile pour le Web Ouvert. Seabird est la suite du projet initial de Billy, auquel il a intégré les retours de la communauté étendue. Pour en apprendre plus sur Billy May, visitez sa page personnelle.

En quoi cela est-il lié à Mozilla et Mozilla Labs ?

Billy est un membre de la communauté Mozilla Labs et a créé Seabird sur son temps libre. Seabird n’est pas un projet de Mozilla Labs mais appartient aux Concept Series de Mozilla Labs. Les Concept Series fournissent à la communauté un espace pour créer et collaborer à des projets qui repoussent les frontières du Web et du navigateur.

La société Mozilla a-t-elle le projet de produire un téléphone portable ?

Non. Mozilla produit Firefox Mobile, le célèbre navigateur pour les systèmes de téléphonie mobile comme Nokia Maemo et Android. Vous pouvez en apprendre davantage sur Mozilla Firefox Mobile à cette adresse [3].

Notes

[1] Crédit photo : Mozilla Creative Commons Paternité

[2] En attendant que nous maîtrisions Universal Subtitles, je vous encourage également à visionner la vidéo en anglais présente sur le blog d’origine, elle sera très bien agrémentée par les textes traduits ici même.

[3] Le lien d’origine sans version française : http://www.mozilla.com/en-US/mobile/




Firefox 4, Google Chrome et l’évolution du Web par Chris Blizzard de Mozilla

Keven Law - CC by-saQue les fans de la première heure se rassurent : la version 4 du célèbre navigateur au panda roux – dont la sortie devrait intervenir d’ici la fin de l’année – promet de recoller au peloton !

Au temps pour ceux qui avaient vendu sa peau un peu trop rapidement : le panda[1] nouveau met l’accent sur les performances, à commencer par un nouveau moteur JavaScript qui, une fois optimisé, pourrait même lui permettre de prendre la tête de la course si l’on en croit Chris Blizzard (Director of Web Platform chez Mozilla[2]), dont nous vous proposons ici la traduction de l’interview qu’il a donnée récemment au site derStandard.at (une fois n’est pas coutume, cette traduction a été complétée de références à l’actualité récente avec l’aide de Paul Rouget, Technology Evangelist chez Mozilla).

S’il est difficile de ne pas céder à la mode du benchmarking, on peut toutefois s’interroger sur ce que l’on attend réellement d’un navigateur.

Revenons un instant en arrière : l’irruption de Firefox a permis de réveiller le Web en le libérant de l’hégémonie d’Internet Explorer qui, après avoir éradiqué à peu près toute concurrence sur le marché des navigateurs, n’a plus connu de développement pendant six ans (soit le temps qui sépare la version 6 de la version 7 du navigateur de Microsoft, qui avait même dissout l’équipe de développement dans cet intervalle). Firefox a réussi à propulser le Web vers de nouveaux horizons balisés de standards ouverts propices à l’innovation. Tant et si bien que de redoutables concurrents sont apparus comme Safari d’Apple et surtout Chrome de Google (voir à ce billet du Framablog) et que Microsoft est en train de mettre les bouchées doubles avec son IE 9 pour rattraper son retard.

Faut-il en conclure que Firefox, ayant accompli sa mission, est devenu inutile ?

Il faut en effet reconnaître que le Web ne s’est jamais aussi bien porté qu’aujourd’hui : les concepteurs de navigateurs se battent dorénavant tous pour implémenter les dernières versions des standards ouverts qui sont la base du Web (HTML5, CSS3) quand ils n’en sont tout simplement pas à l’origine. Et pour cela, nous pouvons tous remercier la fondation Mozilla à l’origine de Firefox.

Pourtant, le Web ne se limite pas à des applications riches et jolies devant s’exécuter le plus rapidement possible.

Les grands acteurs du Web, Mozilla mis à part, tirent leurs revenus de l’exploitation de vos données personnelles. La protection de la vie privée devient aujourd’hui un enjeu majeur pour l’utilisateur (qui doit encore en prendre conscience). Mozilla s’apprête à proposer des solutions novatrices dans ce domaine[3]. Qui d’autre que Mozilla, fondation à but non lucratif, a intérêt à rendre aux utilisateurs le contrôle de leurs données personnelles ? Personne. Et ce n’est pas parce que Apple ou Google (et peut-être un jour Facebook) sort un navigateur performant – fût-il libre (Chromium est la version libre de Google Chrome) – que l’utilisateur jouira des mêmes libertés que l’utilisateur de Firefox, navigateur libre développé par une fondation à but non lucratif.

Firefox 4 : Une génération d’avance en termes de vitesse

Firefox 4: One generation ahead of everyone else speedwise

Andreas Proschofsky – 19 août 2010 – derStandard.at
(Traduction Framalang : Don Rico, Siltaar, Goofy et Antistress)

Chris Blizzard de Mozilla nous parle de la concurrence de Google Chrome, de l’évolution du Web comme plateforme et des attentes que suscite le format WebM.

Ces dernières années Firefox a joué le rôle enviable de l’étoile montante dans le monde des navigateurs. Aujourd’hui, non seulement Google Chrome semble lui avoir volé la vedette mais il vient même lui tailler des croupières. Au cours du dernier GUADEC, Andreas Proschofsky a eu l’occasion de côtoyer Chris Blizzard, « Directeur de plateforme Web » chez Mozilla, et il a réalisé l’interview que vous allez lire, évoquant l’état actuel du marché des navigateurs, les progrès du Web comme plateforme et les améliorations qui arrivent avec Firefox 4+.

derStandard.at : Quand nous avons discuté l’année dernière, vous avez noté que, malgré la notoriété grandissante de Google Chrome, la plupart des développeurs présents dans les conférences techniques – comme le GUADEC – utilisent encore Firefox. Si je jette un coup d’œil autour de moi cette année, les choses semblent avoir considérablement changé : bon nombre de ces utilisateurs avant-gardistes semblent être passés à Chrome / Chromium. Est-ce que vous avez un problème sur ce créneau d’utilisateurs spécifique – mais influent ?

Chris Blizzard : En fait je pense que beaucoup de gens utilisent les deux maintenant, mais c’est vrai que c’est intéressant à voir. De mon point de vue de développeur Web je pense toujours que les outils de Firefox sont de loin supérieurs à ceux des autres.

Il est intéressant de noter que nous n’avons pas vu de changements significatifs dans les statistiques utilisateurs, même si Chrome marque des points importants sur ce segment. Il faut préciser que tous ces chiffres que l’on rapporte sont en réalité des statistiques d’usage et non du nombre d’utilisateurs, si bien que cette avant-garde – qui est grosse utilisatrice du Web – influence les statistiques plus que d’autres, ce qui peut faire croire que Chrome est utilisé par davantage de gens qu’en réalité. Nous avons connu le même effet dans les premiers temps de Firefox, à l’époque nous n’en avions pas conscience faute d’outils adéquats pour le mesurer.

Nous avons aussi effectué quelques recherches et découvert qu’un tas de gens semblent choisir leur navigateur suivant des fonctionnalités particulières. Par exemple beaucoup d’utilisateurs préfèrent retrouver leurs sites récemment visités dès l’ouverture de leur navigateur, donc ils utilisent Chrome. S’ils préfèrent démarrer avec une page vierge, ils utilisent plutôt Firefox. Je pense donc que ce que l’on commence à voir, c’est des gens différents qui veulent faire des choses différentes, et qui vont choisir leur navigateur selon leurs préférences. Et nous n’en sommes qu’au début.

Nous savons que nous ne pourrons pas satisfaire les désirs de tous et ce n’est d’ailleurs pas le but de notre organisation. Nous voulons faire en sorte que le Web devienne une plateforme et nous avons plutôt bien réussi sur ce point.

Google se lance maintenant dans un cycle de développement visant à offrir une nouvelle mise à jour stable toutes les six semaines, pour essayer de proposer des innovations plus rapidement aux utilisateurs. Mozilla, de son côté, publie au mieux une nouvelle version par an : cela n’est-il pas handicapant d’un point de vue marketing ?

Cela dépend du rythme que vous voulez adopter. Les gens de Chrome ont une approche un petit peu différente de la nôtre. Il va être intéressant de voir si d’autres utilisateurs que les avant-gardistes seront d’accord pour voir leur navigateur changer tous les mois et demi. Nous préférons prendre davantage de temps pour préparer les gens à des changements d’interface plus importants.

Pour autant nous ne modifions pas toujours le numéro de version pour les gros changements. Citons par exemple l’isolation des plugins que nous avons récemment ajoutée à la série 3.6.x, qui résulte d’un énorme travail et qui a grandement amélioré l’expérience des utilisateurs de Firefox.

À vrai dire, je suis quelque peu sceptique à l’idée d’un cycle de six semaines. Comment peut-on vraiment innover en un laps de temps si court ? Accélérer la cadence est néanmoins dans nos projets, il faut juste que nous trouvions celle qui nous convient.

Un des avantages d’un cycle de publication rapide, c’est que Google peut diffuser très vite des fonctionnalités comme le futur web-store de Chrome. Aimeriez-vous aussi proposer une plateforme de téléchargement d’applications Web chez Mozilla ?

En ce qui me concerne, je pense qu’un app-store pour le Web est une idée intéressante, car en gros cela rend les applications Web plus accessibles et fournit un modèle de monétisation. Mais pour bien faire, il faut tenir compte de nombreux autres paramètres, et c’est là-dessus que nous allons d’abord nous concentrer.

Quels éléments manque-t-il encore pour concevoir un bon web-store ?

Les performances Javascript sont très importantes, mais nous touchons au but, car nous sommes en passe d’obtenir les mêmes performances que les applications exécutées nativement. Vient ensuite le webGL pour les applications en 3D, et nous devons aussi régler la question du stockage de données hors-connexion qui est loin d’être abouti pour le moment. Il faut aussi accorder une grande importance à la sécurité, question sur laquelle nous sommes justement en train de travailler. Par exemple, grâce à la fonctionnalité ForceHTTPS, un site Web pourra dire à un navigateur de ne communiquer avec lui que par données chiffrées, ce qui préviendra certains types d’attaques. Nous nous penchons aussi sur la politique de sécurité des contenus, ce qui sera très utile pour lutter contre une catégorie entière d’attaques type cross-site scripting (NdT : citons par exemple la fonctionnalité X-FRAME récemment introduite contre le clickjacking).

Dans les tests de performances Javascript récents, Firefox semble avoir dégringolé dans le bas du classement, et se place même derrière Internet Explorer 9. N’arrivez-vous plus à suivre ?

Firefox 4 apportera de nombreuses améliorations dans ce domaine-là aussi, mais elles ne sont pas encore intégrées à nos versions de développement. Nous avons constaté que, lorsque notre Tracing-Engine (NdT : moteur basé sur la technologie du tracé) est utilisé, nous sommes plus rapides que tous les autres. Nous ne sommes à la traîne que dans les cas où cette technologie ne peut être exploitée. Nous travaillons donc à améliorer les performances de base de notre moteur JavaScript, qui, combinées à l’optimisation JIT Tracing , nous donneront une génération d’avance sur tout le monde (NdT : Jägermonkey, le résultat de ce travail, vient d’être intégré à la version de développement de Firefox 4).

La vérité c’est que la marge d’amélioration est encore énorme. La génération actuelle des moteurs Javascript a atteint un palier : en pourcentage, les différences que nous constatons entre les différents navigateurs sont infimes. En outre, les tests de performance ne sont plus d’une grande utilité, car, pour la plupart, ces chiffres ne sont plus influencés par les performances Javascript réelles. Voici un exemple des conséquences négatives des tests de performance : nous avons dû fournir des efforts particuliers sur l’optimisation du calcul de décalage horaire car cela influe négativement certains tests de performance, mais ça n’améliore pas réellement les performances Javascript. Sunspider est affecté par ces problèmes et V8 contient aussi du code bancal, il est donc difficile de trouver de bons tests de performance (NdT : Mozilla vient de lancer Kraken, un test censé mesurer les performances JavaScript en situation réelle).

Firefox 4 va utiliser l’accélération matérielle grâce à Direct2D et à DirectWrite sous Windows. Des fonctionnalités similaires sont-elles prévues pour Linux et Mac OS X ?

Dans la limite des outils qui sont disponibles, oui. Nous essayons de procurer aux utilisateurs la meilleure expérience possible sur chaque plateforme. Pour Windows Vista et 7 nous constatons d’immenses améliorations lorsque le navigateur doit réaliser des tâches graphiques intensives. Sur OS X, par exemple, nous prenons en charge l’OpenGL pour la composition d’images, et nous faisons de même sous Linux. Mais en général les API dont nous disposons sous Windows sont meilleures et plus riches que sur les autres plateformes. Sous Linux, Cairo et Pixman étaient censées être rapides, mais hélas l’infrastructure sur lesquelles elles reposent n’a jamais vraiment atteint la vélocité désirée. Sur OS X, Firefox est assez rapide, mais pour l’instant Direct2D confère l’avantage à la version Windows (NdT : plus d’informations sur cet article de Paul Rouget).

L’isolation des plugins devait n’être que la première étape d’un Firefox multi-processus, avec un processus séparé pour chaque onglet. C’est un des gros morceaux du cahier des charges de Firefox 4. C’est toujours prévu ?

Bien sûr, mais pas pour Firefox 4. Ce sera sans doute disponible pour la version mobile avant la version desktop. C’est intéressant de constater que c’est plus facile sur cette plateforme.

Il y a peu, vous avez endossé le rôle de « Directeur de plateforme Web » chez Mozilla. En quoi cela affecte-il vos responsabilités quotidiennes ?

Auparavant, je me chargeais essentiellement de diriger les groupes d’évangélisation et de communication, mais j’ai fini par travailler de plus en plus sur les questions de plateforme Web – réfléchir à l’avenir du Web, discuter régulièrement avec les autres concepteurs de navigateurs. Tout cela a pris une telle importance que j’ai décidé de m’y consacrer à plein temps.

Par exemple, je viens de participer à une réunion de l’IETF, où nous avons eu des discussions très riches sur le http, les websockets, et aussi sur les codecs. Ils sont en train de mettre au point un codec audio de nouvelle génération pour les communications en temps réel et s’appuient sur l’IETF pour les spécifications. En gros, c’est une combinaison de techniques existantes, et l’accent est mis sur une latence très basse, un domaine où le Vorbis ou le MP3 sont mauvais. Ce travail s’effectue en collaboration avec Skype.

Une des grosses annonces de ces derniers mois concernait la création du WebM comme nouveau format vidéo ouvert basé sur le VP8 et Vorbis. Pensez-vous que ses chances de réussites soient meilleures que celles de Theora ?

Oui, pour des raisons de qualité. Quelques explications : il est bon de savoir que lorsqu’on utilise le H.264, on doit en gros choisir un des trois profils que propose ce codec. En général, les sites vidéos doivent offrir la version basique car c’est la seule prise en compte par l’iPhone, notamment dans ses anciennes versions qui sont utilisées par des dizaines de millions de personnes. Donc, si l’on compare les formats vidéo, il faut comparer le VP8 au H.264 « basique », et ce n’est pas qu’une manœuvre réthorique, c’est la réalité pour tous les services. J’ai discuté avec les gens de YouTube, par exemple : ils ont essayé d’utiliser un autre profil du H.264, mais ils ont dû revenir au « basique » à cause du manque de prise en charge. Sur cette base, la question de la qualité n’a plus lieu d’être, et le VP8 est tout à fait compétitif.

Si l’on parle de l’implémentation de la balise vidéo HTML5, il faut aussi prendre en compte l’évolution du marché. Si l’on envisage un monde où la vidéo HTML5 est répandue dans la majorité des navigateurs – par-là je pense à une proportion de 80%, ce qui devrait être le cas d’ici deux ans –, il faut compter avec les tendances et les changements dans les parts de marché des systèmes d’exploitation. On se rend alors compte qu’on se retrouve avec un marché segmenté. Ceux qui voudront diffuser de la vidéo devront prendre en charge à la fois H.264 et WebM. Sur le long terme, je suis certain que les codecs libres sont en meilleure posture, surtout si l’on prend en considération les tendances à venir comme les communications en temps réel ou les plateformes mobiles, où WebM est très performant – ou va l’être grâce à des partenariats avec des constructeurs de matériel.


Firefox 4 va permettre de construire des extensions « poids plume » sous forme de Jetpacks. Quand vont-ils remplacer la génération actuelle d’extensions ?

Les Jetpacks ne sont pas conçus pour remplacer les extensions XUL. Firefox est une plateforme que l’on peut étoffer à l’envi grâce à une large palette d’interfaces. On peut aussi modifier beaucoup de choses dans les paramètres mêmes de Firefox, ce qu’aucun autre navigateur ne permet. Comme projet, c’est extraordinaire : une grand part de nos innovations sont arrivées par les extensions avant d’intégrer directement le navigateur.

Pour nous, les Jetpacks sont grosso modo un équivalent des extensions pour Chrome, qui offrent beaucoup moins de possibilités que nos extensions XUL classiques. Ils seront néanmoins beaucoup plus faciles à réaliser. Nous allons fournir un éditeur en ligne qui facilitera leur développement. Ces Jetpacks seront aussi plus faciles à tester, et l’on pourra les installer sans avoir à redémarrer le navigateur. Ce qui est d’ailleurs déjà possible avec certaines extensions XUL dans Firefox 4, à condition que cela soit signalé et que l’extensions soit codée avec soin.

Notes

[1] Crédit photo : Keven Law (Creative Commons By-Sa)

[2] Chris Blizzard a déjà fait l’objet d’une traduction sur le Framablog : De l’honnêteté intellectuelle et du HTML5.

[3] Lire à ce propos Comment Firefox peut améliorer le respect de la vie privée en ligne, privacy-related changes coming to CSS :visited et Account Manager coming to Firefox.




Geektionnerd : Floss, on dirait un nom de Pokémon

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Geektionnerd : Firefox is back et si t’es pas content va t’faire enchromer

Cf ce billet mais surtout les commentaires de ce billet : Google Chrome m’a tuer ou le probable déclin de Firefox si nous n’y faisons rien.

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Geektionnerd - Simon Gee Giraudot - CC by-sa

Crédit : Simon Gee Giraudot (Creative Commons By-Sa)




Comment Firefox peut améliorer le respect de la vie privée en ligne

Voici comment se termine cette nouvelle traduction de Jenny Boriss, qui s’occupe de l’expérience utilisateur de Firefox chez Mozilla :

« Notre objectif pour Firefox 4.0 est de conférer aux utilisateurs davantage de contrôle sur leurs données, à la fois en leur passant à proprement parler les commandes et, plus important encore, en faisant en sorte que la vie privée et l’anonymat soient respectés par défaut sans casser les fonctionnalités du Web. J’espère vraiment que le simple fait d’indiquer à quelles données les sites ont accès sera positif pour le Web, en réduisant la fausse impression de sécurité que de nombreux sites essaient de donner à leurs utilisateurs. Cela permettra aussi de susciter une prise de conscience et de contrôler comment, où et quand les données sont partagées. »

Facebook et Google peuvent-ils en dire autant ?

Halte à l’invasion des cookies ! Comment Firefox peut améliorer le respect de la vie privée en ligne

Defeating the Cookie Monster: How Firefox can Improve Online Privacy

Jenny Boriss – 2 juin 2010 – Boriss’ Blog

(Traduction Framalang : Pandark, Berettonawak, Joan, Goofy et Don Rico)

À l’heure où nous déterminons les priorités pour les fonctionnalités et le développement de la prochaine version de notre navigateur, l’équipe de Firefox a analysé l’état du Web et recherché les domaines pour lesquels le contenu disponible en ligne a évolué plus vite que les fonctions du navigateur. L’un de ces domaines préoccupants est l’usage croissant des données privées de l’utilisateur, en particulier par la publicité. La transmission muette et permanente des données de l’utilisateur entre les sites et les annonceurs publicitaires est très dérangeante pour ceux qui s’intéressent au libre choix de l’utilisateur et à la transparence sur le Web.

Vie privée vs. Sécurité

Même s’ils sont liés, la vie privée et la sécurité sont des sujets distincts. Le terme Sécurité renvoie à la prévention des dommages matériels que peut subir l’utilisateur. Éviter le vol, la fraude, la perte d’informations… relève du domaine de la sécurité. Depuis des années, les navigateurs travaillent à l’amélioration de la sécurité, motivés par des dangers toujours plus sophistiqués : virus, programmes malveillants, et autres exploitations de failles.

Le respect de la vie privée est quant à lui un sujet plus vaste. Il concerne le contrôle qu’exercent les utilisateurs sur ce qu’ils révèlent d’eux-mêmes en ligne, que ces données puissent ou non être utilisées à de mauvais desseins. Tous les usagers d’Internet dévoilent des informations sur eux-mêmes sur certains sites, mais chacun maîtrise sa confidentialité s’il sait distinguer quelles informations partager ou non, et avec qui.

Firefox assure la confidentialité locale mais doit aussi assurer la confidentialité en ligne.

L’équipe de Firefox a déjà bien fait progresser les choses dans le domaine de la confidentialité locale, avec des fonctions comme le mode de navigation privée, la suppression de l’historique récent et l’option « Oublier ce site ». Ces fonctions permettent aux utilisateurs d’exercer un meilleur contrôle sur les circonstances où leurs données doivent être dévoilées ou bien cachées dans leur ordinateur. Cependant, des soucis de confidentialité plus sérieux apparaissent quand des données sont échangées sur un réseau.

Un problème majeur que pose le Web moderne est la possibilité pour les régies publicitaires de collecter les données privées des utilisateurs avec des cookies de sites tiers.

Les sites qui proposent une interaction riche récoltent en général des informations sur l’utilisateur. Le problème survient lorsque les utilisateurs sont d’accord pour partager leurs données avec des sites auxquels ils font confiance, alors que celles-ci sont partagées à leur insu avec d’autres sites et sociétés via des cookies de sites tiers. C’est un système de financement de plus en plus courant en ligne.

C’est en novembre 1999 que les États-Unis l’ont découvert, lorsque la Federal Trade Commission (NdT: Équivalent de la Direction de la concurrence et de la répression des fraudes) a mené une étude sur le profilage en ligne et montré que cela présentait des risques pour la vie privée des consommateurs. Cette pratique s’est développée, malgré quelques tentatives avortées de régulation de la Federal Trade Commission américaine, de l’Interactive Advertising Bureau du Canada (Bureau de la publicité interactive) et de l’Office of Fair Trading (Équiv. de la Direction de la concurrence et de la répression des fraudes) britannique.

Tout site que vous visitez peut contenir des publicités ou d’autres composants qui envoient des cookies de votre session de navigation sur le domaine auquel vous faites confiance vers un domaine publicitaire. Ces cookies de sites tiers peuvent être utilisés pour recouper les données d’un utilisateur entre plusieurs sites et plusieurs sessions, permettant ainsi de d’établir le profil des internautes et de traquer leurs habitudes. Ces données peuvent fournir à des sociétés toutes sortes d’informations telles que ce que vous achetez, ce que vous lisez, combien vous gagnez, si vous avez postulé pour un emploi, ou encore quels sites de rencontres vous préférez. L’une des conséquences visibles de ce partage des données est la présence de publicités ciblées en fonction d’informations et d’actions de l’utilisateur sur d’autres sites.

How Firefox can Improve Online Privacy

La capacité des publicitaires à obtenir et utiliser ces données constitue une infraction à la vie privée des utilisateurs, et ce pour plusieurs raisons :

  • La collecte des données est quasi impossible à détecter. La plupart des opérations de transmission de données s’effectuent en coulisse pendant une session de navigation, sans demander son avis à l’utilisateur ni le prévenir. En général, celui-ci ne découvre ce qui s’est passé qu’au moment où il se trouve face à des publicités ciblées (bien longtemps après le transfert des données).
  • Elle s’effectue sans le consentement de l’utilisateur. Même parmi les sites qui sont conscients que des tierces parties enregistrent des cookies depuis leur domaine, bien peu donnent aux utilisateurs le contrôle sur la façon dont leurs données sont partagées avec les régies publicitaires. Les sites qui procurent effectivement des options les formulent parfois de telle sorte qu’elles masquent leurs objectifs, comme par exemple « Souhaitez-vous que s’affichent des contenus en rapport avec votre utilisation ? » plutôt que « Voulez-vous que s’affichent des publicités en rapport avec vos données personnelles ? ».
  • Elle va à l’encontre de ce que l’utilisateur est raisonnablement en droit d’attendre concernant le respect de sa vie privée. Certains sites qui partagent les données de leurs utilisateurs en connaissance de cause se donnent une image trompeuse de responsabilité concernant ces données. Selon les cas, ils affichent des préférences d’utilisation impliquant un contrôle, assurant les utilisateurs que leurs données sont « sécurisées » ou proposant aux utilisateurs de lire une très longue charte de respect de la vie privée dans le but de dissimuler leurs véritables agissements. Bien sûr, le haut du tableau d’horreur est réservé aux sites qui modifient leur politique de confidentialité pour les rendre plus permissives une fois que les utilisateurs se sont déjà inscrits et ont déjà confié leurs données.
  • Il est pratiquement impossible de l’empêcher. Même si un utilisateur est très au fait des problèmes de respect de la vie privée, lit consciencieusement toutes les politiques de confidentialité, tient à jour ses préférences relatives aux données privées et évite les sites qui ne lui garantissent pas de confidentialité, il ne sera pas forcément en sécurité. Tout site auquel il a confié ses données est susceptible de les utiliser sans le lui demander, et des cookies tiers pourraient être enregistrés sur son ordinateur par des publicités ou des bogues à l’insu des responsables du site. Bon dieu, n’importe quel site pourrait extraire des informations qui identifient un utilisateur à partir de son empreinte numérique.
  • Elle est potentiellement embarrassante pour l’utilisateur. La transmission des données par des cookies tiers prend les informations fournies par l’utilisateur à un instant T et les dévoile à un autre moment. Alors que l’utilisateur peut être discret concernant les sites où il parcourt certains contenus, et même utiliser le mode de navigation privée pour que les éléments n’apparaissent pas dans l’historique, les régies publicitaires qui utilisent des cookies tiers peuvent dévoiler son comportement à des moments qui échappent à son contrôle.

Que peut faire Firefox pour améliorer la gestion des données privées ?

  • 1. Offrir des réglages par défaut bien pensés pour les cookies de sites tiers
    Se contenter de désactiver les cookies tiers n’est pas la solution. Les cookies tiers sont indispensables pour légitimer les fonctions Web telles que les contenus embarqués, la gestion de sessions, les sites hybrides, etc. La plupart des sites bancaires ont besoin des cookies de sites tiers pour des fonctionnalités telles que le payement de factures. Le but ne devrait pas être de désactiver directement les cookies tiers, mais de gérer plus intelligemment quels comportements sont autorisés.
    Le groupe de travail HTTP State s’applique actuellement à créer une spécification définissant la manière dont les clients doivent se comporter concernant les cookies (voir ici les documents de travail). Dan Witte, responsable du module Cookie chez Mozilla, est en liaison étroite avec le groupe et travaille de son côté à définir un standard moderne pour les cookies. Son objectif est de tracer les grandes lignes que peut suivre Mozilla en restant fidèle à notre Manifeste pour protéger le choix de l’utilisateur sur le Web. Dan travaille déjà à une stratégie que pourrait suivre Firefox pour régler le problème en autorisant les cookies tiers mais seulement de façon temporaire. Son idée est de n’activer les cookies tiers que pour la durée d’ouverture d’un onglet. À la fermeture de l’onglet, les cookies sont supprimés – les régies publicitaires ne pourront alors plus suivre à la trace les utilisateurs d’un site à l’autre. Dan abordera bientôt tout cela sur son blog avec davantage de détails.

How Firefox can Improve Online Privacy

  • 2. Donner aux utilisateurs, via les préférences, un meilleur contrôle sur la manière dont les sites peuvent accéder à leurs informations privées
    Pour l’instant, Firefox donne aux utilisateurs un contrôle précis sur les multiples façons dont les sites peuvent accéder à leurs données. Tout ce que l’utilisateur doit faire, c’est modifier celles-ci dans chacun des panneaux de préférences qui affectent les privilèges des sites.
    Comme on peut le voir ci-dessus, l’interface actuelle de Firefox donne à chaque type de privilège – l’enregistrement des mots de passe, les cookies, etc. – une fenêtre de préférences distincte. Cette conception repose sur des considérations d’implémentation plutôt que sur le schéma mental de l’utilisateur, ce qui signifie qu’elle correspond au mode de développement et non à la manière dont les utilisateurs perçoivent l’action qu’ils veulent entreprendre. Avoir une fenêtre individuelle distincte pour chaque permission est cohérent du point de vue de l’implémentation, car chaque privilège de site est distinct dans le code.
    Pour l’utilisateur, en revanche, il est impossible de voir de quels privilèges dispose un site donné. Une meilleure présentation pourrait montrer les paramètres de contrôle regroupés par site plutôt que par technologie. Si un utilisateur décide de ne pas faire confiance au site X et refuse qu’il ait accès à quoi que ce soit, il serait plus efficace de contrôler tous les accès du site X au même endroit – et non dans 15 fenêtres différentes. Alex Faaborg a réalisé la maquette ci-dessous pour illustrer à quoi une interface utilisateur centrée sur les sites pourrait ressembler.
    Bien que l’ensemble des préférences aient besoin d’être améliorées, l’intégration d’un contrôle des données privées par site, comme Alex le montre ci-dessus pour Firefox 4.0, serait un grand pas en avant vers la reconquête du contrôle des données personnelles par les utilisateurs.

How Firefox can Improve Online Privacy

  • 3. Donner un meilleur contrôle de leurs données aux utilisateurs pendant la navigation
    Grâce à un panneau de préférences spécifique par site, les utilisateurs bénéficieraient d’un contrôle plus fin de ce qui est exposé de leur vie privée par le biais de la configuration de Firefox, certaines options et informations pourraient être accessibles pendant que l’utilisateur est en train de surfer. Si un site a par exemple accès à la position géographique, cela devrait être indiqué en permanence dans l’interface de Firefox. Si un site conserve un mot de passe, cela devrait être facile à modifier ou désactiver sans avoir à ouvrir le menu des préférences. Le bouton d’identité du site, qui fournit actuellement très peu d’informations, pourrait être amélioré pour informer des privilèges liés à ce site et permettre de les modifier.

Notre objectif pour Firefox 4.0 est de conférer aux utilisateurs davantage de contrôle sur leurs données, à la fois en leur passant à proprement parler les commandes et, plus important encore, en faisant en sorte que la vie privée et l’anonymat soient respectés par défaut sans casser les fonctionnalités du Web. J’espère vraiment que le simple fait d’indiquer à quelles données les sites ont accès sera positif pour le Web, en réduisant la fausse impression de sécurité que de nombreux sites essaient de donner à leurs utilisateurs. Cela permettra aussi de susciter une prise de conscience et de contrôler comment, où et quand les données sont partagées.




De l’honnêteté intellectuelle et du HTML5 – Christopher Blizzard (Mozilla)

Christopher Blizzard est évangéliste chez Mozilla (pour rappel, évangéliste n’est pas un gros mot). Il a récemment publié un billet coup de gueule sur son blog dont ZDNet et PC Inpact se sont faits l’écho.

Extrait de l’article Un évangéliste de Mozilla critique l’emprise marketing d’Apple et Google sur HTML5 de ZDNet :

Apple et Google seraient allés trop loin. Pour Christopher Blizzard, évangéliste Open Source chez Mozilla, les deux sociétés ont chacune à leur manière tiré la couverture de HTML5 à elles au détriment des autres acteurs qui contribuent à son développement, comme Mozilla. Première cible : Apple. La firme a mis en ligne sur son site des démonstrations des capacités de HTML5, CSS3 et javascript… réservées aux utilisateurs de Safari. Selon notre évangéliste, Apple donne du coup l’impression aux internautes d’être le seul à supporter ces standards en ajoutant « tous les navigateurs ne les supportent pas ».

Extrait de l’article HTML5 : Un évangéliste de Mozilla s’en prend à Apple et Google de PC Inpact :

Le HTML5 est devenu synonyme pour beaucoup de futur du Web. Au point qu’il est également devenu un argument marketing important pour plusieurs sociétés, dont Google, Apple ou encore Microsoft. Christopher Blizzard, évangéliste chez Mozilla, fulmine dans un billet sur son blog à propos de toutes les déformations que l’on peut lire ici et là.

Vous trouverez ce fameux billet traduit ci-dessous dans son intégralité.

Remarque : Les copies d’écran ont été également francisées par nos soins et ne sont donc pas directement issues du site d’Apple.

De l’honnêteté intellectuelle et du HTML5

Intellectual honesty and html5

Christopher Blizzard – 4 juin 2010 – Blog personnel
(Traduction Framalang : Julien, Goofy, Joan et Don Rico)

Je vous préviens, le billet qui suit expose ce que tout le monde sait déjà dans le milieu des navigateurs, sans oser le dire tout haut. Il est grand temps que quelqu’un fasse tomber les masques. Il est dommage que la principale victime ici soit Apple, sachant que c’est Google qui est passé maître dans ce genre de stratégie, mais après tout, Apple s’est distingué de façon si outrancière et trompeuse qu’ils méritent une volée de bois vert. (Lors de sa conférence I/O, Google a réussi à faire passer son modèle d’applications natives et Chrome store pour du HTML5 – ils se sont surpassés. Mais j’en parlerai dans un autre billet, une prochaine fois.)

Commençons d’abord par la contradiction la plus flagrante. Voilà sur quoi on tombe :

HTML5 et les standards du Web

Comme c’est beau ! Ils sont le web, j’adore ça ! J’aurais pu l’écrire. J’aurais l’écrire.

Le titre gris foncé classique au-dessus du texte gris clair typique de chez Apple que tout le monde adore. Et le texte : les standards, les CSS, JavaScript, les web designers, les bisounours sous l’arc-en-ciel… Comment pourrait-on ne pas être d’accord ? Du point de vue marketing, c’est impeccable – message vague, sympathique, Apple aime le web, Apple vous aime.

Mais comment le prouvent-ils ?

Only Safari

Vous avez bien lu. Si vous ne naviguez pas avec Safari, allez vous faire foutre.

Au-delà des termes un peu vifs que j’emploie pour vous aider à comprendre de quoi il retourne, voici le message qu’il faut lire entre les lignes : si vous n’avez pas accès à Safari, vous ne devez pas avoir accès au HTML5. Attendez un peu… N’y a-t-il que Safari qui gère le HTML5 ?

Eh non, c’est le cas d’un tas d’autres navigateurs. Aujourd’hui, la majeure partie des internautes a accès à des standards comme le HTML5. D’ailleurs, puisque l’on parle d’HTML5, vous pourriez vous demander quel est le navigateur qui le prend le mieux en charge actuellement… Pas Safari. Ni Chrome. Un navigateur qui, se trouve-t-il, possède également une part de marché significative — j’ai nommé Firefox.

HTML5 et navigateurs

(Le meilleur site pour obtenir des informations utiles sur le sujet est un site que malheureusement peu de gens utilisent : caniuse.com — amoureusement maintenu par Alexis Deveria sur son temps libre.)

Bien sûr, le gros problème, c’est que HTML5 finit par vouloir dire un tas de choses, principalement grâce à Google. Au fond, ils ont enfourché ce cheval de bataille, l’ont fait avancer à la cravache, et se le sont approprié. (Ça et les performances – un message marketing simple et génial. J’apprécie, même si la malhonnêteté avec laquelle c’est réalisé me fait bouillir).

Et je suis convaincu que si Apple a pondu ce site, c’est parce qu’ils sont confrontés au même problème que nous. Le meilleur exemple qu’on puisse en donner, c’est la question que nous a posée récemment un candidat lors d’un entretien d’embauche : « Hé, vous comptez supporter le HTML5 un jour ? »

Tu te fous de moi ou quoi ? Voilà la preuve que le marketing, ça marche. Le fossé entre la perception de la réalité et la réalité telle qu’elle est vraiment est énorme.

Je suis certain c’est pareil chez Apple. Ils doivent se dire en interne « Flûte, tout le monde pense qu’on ne supporte pas HTML5, il faut qu’on prouve le contraire ! On va créer des tests ! Des démos ! La vérité éclatera enfin au grand jour et on nous percevra de nouveau comme les fers de lance du projet Webkit, lui aussi plein de bisounours et d’arcs-en-ciel ! ».

Et c’est comme ça qu’on se retrouve avec des sites de ce genre. Des sites qui passent complètement à côté de la vraie nature du web, de l’interopérabilité, des standards et du HTML5. Les démos qu’ils ont mis en ligne ne contiennent rien d’autre que des trucs bricolés par Apple, qui ne sont pas du HTML5, et qui entament à peine le processus de standardisation. Ça fait partie du CSS3 ? Plus ou moins, mais encore en plein développement et toujours en phase de feedback.

Soyons clairs. Si je suis sarcastique, c’est surtout pour attirer votre attention. Parce que c’est vraiment important. Et si vous ne deviez lire qu’un paragraphe, ce serait celui-ci :

La caractéristique la plus importante du HTML5, ce ne sont pas les nouveaux trucs comme la balise vidéo ou la balise canvas (que Safari comme Firefox ont intégrées depuis longtemps), c’est bel et bien de permettre une interopérabilité absolue. Même chez ces vieux raseurs de Microsoft, qui ont fait de leur mieux pour freiner le web pendant presque une décennie, on a compris ça : vous allez le voir en long et en large pendant leur campagne marketing pour IE9 (leur slogan est « balisage unique » – ouvrez l’œil, vous le verrez partout dans leur communication). C’est l’idée que des balises identiques, même si elles comportent des erreurs, auront un rendu en tout point semblable. HTML5 représente une bonne occasion pour les navigateurs Internet de travailler ensemble et de trouver un terrain d’entente.

Avant que l’on ne se méprenne sur mes propos, je précise que c’est une tout autre question que celle de l’innovation sur les navigateurs. Les standards font partie du processus, mais les standards suivent bien plus souvent qu’ils ne guident. Le HTML5 recèle un grand nombre de nouveautés qui ne proviennent pas d’IE, qui donne donc l’impression d’innover, mais chez Mozilla, on utilise la majeure partie du HTML5 comme on respire. Nous travaillons avec depuis des années. Aujourd’hui, ce qui nous intéresse le plus, c’est l’étape suivante.

Hélas, je crois qu’il est inévitable que les navigateurs s’affrontent sur le mieux-disant HTML5. Il est pourtant indispensable de s’interroger : quand quelqu’un commence à se vanter, quel est son véritable but ? Se trouve-t-on face à un test bidonné par le constructeur ? La démo d’une fonctionnalité qui va bien au-delà des standards existants ? (Elle a tout à fait sa place mais devrait être présentée pour ce qu’elle est !) Est-ce un test destiné à exhiber les bogues des autres navigateurs de façon articulée et constructive ? La personne qui conduit les tests sait-elle ce qu’elle fait, et tient-elle compte des commentaires constructifs ?

À l’évidence, Apple a pour objectif de crier sur les toits qu’ils adorent le web, mais leurs démos et le fait qu’on ne peut y accéder en utilisant un autre navigateur que le leur ne collent pas avec leur slogan. Il s’agit d’un manque flagrant d’honnêteté intellectuelle.

Puisque vous m’avez lu jusqu’ici, je vais vous faire une promesse. Je ne peux pas réparer les erreurs commises par le passé, mais je peux donner des idées pour bâtir un avenir meilleur. Moi qui suis en bonne partie à l’origine de la communication qui émane de Mozilla (même si ça risque de changer après ce billet !), voici à quoi je m’engage :

  • Je serai aussi honnête que possible pour expliquer ce que nous faisons, ce que cela implique pour les autres navigateurs et même pour le le nouvel enfant chéri du web, le HTML5.
  • Je ferai tout ce que je peux pour m’assurer que les démos que crée Mozilla fonctionnent sur autant de navigateurs que possible, même s’il faut leur proposer gentiment une solution de repli.
  • Les démos et les messages qui sont destinés à montrer des trucs qui ne sont conformes à aucun standard seront identifiés clairement comme tels.

Le HTML5 est un terrain miné, car tout le monde veut se l’attribuer, mais personne n’en est au même point sur sa prise en charge ni même sur sa définition. Je ne peux pas m’engager pour d’autres entreprises, mais je peux au moins annoncer comment moi je vais me comporter. Chez Mozilla, l’honnêteté intellectuelle n’est pas un vain mot, et c’est également le cas pour moi de façon personnelle. C’est pourquoi je pense que nous ne nous abaisserons jamais à de telles pratiques. Pour nous, le web et ses utilisateurs importent plus que n’importe quel standard ou navigateur particuliers. Et vous retrouverez cette philosophie dans mes billets et dans nos campagnes marketing.