Google Art Project : Une petite note discordante dans un concert de louanges

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Antonio Pollaiuolo - Public DomainGoogle vient de sortir un énième nouveau projet  : Google Art Project.

Il est ainsi décrit dans cette dépêche AFP  : «  Google a lancé une plate-forme permettant aux amateurs d’art de se promener virtuellement dans 17 des plus grands musées du monde, dont le MoMA de New York et le Château de Versailles, grâce à sa technologie Street View, familier des utilisateurs du site de cartes Google Maps  ».

La présentation vidéo de Google est spectaculaire et la visite virtuelle l’est tout autant. Ce qui m’a le plus impressionné c’est le fait que chaque musée offre l’une de ses œuvres à une précision numérique hors du commun (7 milliards de pixels  !). Regardez un peu ce que cela donne dans le détail pour La Naissance de Vénus de Boticceli.

Faites un zoom sur son visage et vous serez peut-être comme moi saisi par une certaine émotion. Et si j’ai pris cet exemple ce que j’étais encore récemment devant le vrai tableau à Florence. L’émotion est tout autre, sans commune mesure, elle est bien plus intense évidemment, mais pouvoir regarder à la loupe un tel chef-d’œuvre n’est pas sans intérêt[1].

On a alors vu toute la presse, petit et grande, s’enthousiasmer sur ce nouveau service gratuit (cela allait sans dire avec Google). J’ai ainsi pu comptabiliser plus d’une centaine d’articles dans… Google Actualités (sic, on n’en sort pas  !), et jamais je n’y ai lu la moindre critique.

La seule question que l’on se pose éventuellement est de se demander furtivement si un tel projet peut se substituer à la visite réelle. Et la réponse, aussi bien du côté Google que du côté musées, est au contraire que cela stimule la curiosité et amplifie le désir de venir. Un peu comme la vitrine d’un magasin vous donne envie de rentrer en somme. Et puis pour ceux qui ne peuvent vraiment pas y aller comme les enfants d’Afrique ou d’Amérique Latine, c’est toujours bien mieux que rien.

Personne n’est donc venu apporter un seul bémol. On aurait pu souligner que c’est encore et toujours du Google, qui de projets sympas en projets sympas, commence à atteindre une taille intrinsèquement monstrueuse. On aurait pu regretter que pour pouvoir bénéficier d’un parcours individualisé et former ses propres collections il faille évidemment un compte Google (c’est gratuit mais c’est bien là le prix à payer à Google). Plus subtil mais pas moins important, on aurait pu se demander quelles étaient exactement les conditions juridiques des accords entre Google et les musées, notamment pour ce qui concerne l’épineuse question de la reproduction d’œuvres dans le domaine public (d’ailleurs on voit déjà fleurir dans Wikimedia Commons des reproductions d’œuvres directement issues des reproductions de Google Art Project  !).

Personne, sauf peut-être Adrienne Alix, présidente de Wikimedia France, qui a publié sur son blog personnel sa «  vision critique  » du projet, dans un billet que nous avons reproduit ci-dessous parce que nous partageons sa perplexité.

«  Les wikimédiens passent énormément de temps à prendre de belles photographies de ces œuvres pour les mettre librement à disposition sur Wikimedia Commons et permettre à tous de les réutiliser. Il est souvent difficile de faire admettre aux musées qu’il est bon de permettre cette très large diffusion de la culture. Les choses changent peu à peu, le dialogue s’engage ces derniers temps, et c’est une très bonne chose (…) Quelle est ma crainte  ? Que ces musées qui commencent timidement à ouvrir leurs portes et se lancent avec nous en faisant confiance, en prenant le pari de la diffusion libre de contenus dans le domaine public, se replient sur une solution verrouillée comme celle proposée par Google Art Project, où l’internaute ne peut absolument pas réutiliser les œuvres ainsi montrées. On visite, on ne touche pas. On ne s’approprie pas. On est spectateur, et c’est tout. Je crains que par envie de contrôle de l’utilisation des reproductions d’œuvres conservées dans les musées, la notion de domaine public recule.  »

Vous trouverez par ailleurs en annexe, un petit clip vidéo montrant un photographe wikipédien à l’œuvre. Quand Google nous propose une visite virtuelle clinquante mais balisée et pour tout dire un brin étouffante, Wikipédia donne envie d’arpenter le vaste monde et d’en garder traces au bénéfice de tous.

Google Art Project  : vision critique

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Adrienne Alix – 3 février 2011 – Compteurdedit
Licence Creative Commons By-Sa

Depuis deux jours, le web (et notamment le web «  culturel  », mais pas seulement) s’enthousiasme pour le dernier-né des projets développés par Google, Google Art Project.

Le principe est compréhensible facilement  : Google Art Project, sur le modèle de Google Street View, permet de visiter virtuellement des musées en offrant aux visiteurs une vue à 360°, un déplacement dans les salles. On peut aussi zoomer sur quelques œuvres photographiées avec une très haute résolution et pouvoir en apprécier tous les détails, certainement mieux que ce qu’on pourrait faire en visitant réellement le musée.

Et donc, tout le monde s’extasie devant ce nouveau projet, qui permet de se promener au musée Van Gogh d’Amsterdam, au château de Versailles, à l’Hermitage, à la National Gallery de Londres, etc. En effet c’est surprenant, intéressant, on peut s’amuser à se promener dans les musées.

En revanche, au-delà de l’aspect anecdotique et de l’enthousiasme à présent de rigueur à chaque sortie de projet Google, j’aimerais pointer quelques petits points, qui peuvent paraître pinailleurs, mais qui me semblent importants.

1- d’une part, la qualité n’est pas toujours là. Vous pouvez en effet vous promener dans le musée, mais ne comptez pas forcément pouvoir regarder chaque œuvre en détail. On est dans de la visite «  lointaine  », un zoom sur une œuvre donnera quelque chose de totalement flou. Les deux captures d’écran ci-dessous sont, je pense, éloquentes.

2- Google rajoute une jolie couche de droits sur les œuvres qui sont intégrées dans ces visites virtuelles. Une part énorme de ces œuvres est dans le domaine public. Pourtant, les conditions générales du site Google Art Project sont très claires  : cliquez sur le «  Learn more  » sur la page d’accueil. Vous verrez deux vidéos expliquant le fonctionnement du service, puis en descendant, une FAQ. Et cette FAQ est très claire  :

Are the images on the Art Project site copyright protected ?

Yes. The high resolution imagery of artworks featured on the art project site are owned by the museums, and these images are protected by copyright laws around the world. The Street View imagery is owned by Google. All of the imagery on this site is provided for the sole purpose of enabling you to use and enjoy the benefit of the art project site, in the manner permitted by Google’s Terms of Service.

The normal Google Terms of Service apply to your use of the entire site.

On y lit que les photos en haute résolution des œuvres d’art sont la propriété des musées et qu’elles sont protégées par le «  copyright  » partout dans le monde. Les images prises avec la technologie «  street view  » sont la propriété de Google. Les images sont fournies dans le seul but de nous faire profiter du Google Art Projetc. Et on nous renvoie vers les conditions générales de Google.

En gros, vous ne pouvez rien faire de ce service. Vous pouvez regarder, mais pas toucher.

3 – D’ailleurs vous ne pouvez techniquement pas faire grand chose de ces vues. Y compris les vues en très haute définition. Effectivement le niveau de détail est impressionnant, c’est vraiment une manière incroyable de regarder une œuvre. Mais après  ? Vous pouvez créer une collection. Soit, je décide de créer une collection. Pour cela il faut que je m’identifie avec mon compte google (donc si vous n’avez pas de compte google, c’est dommage pour vous, et si vous vous identifiez, cela fait encore une donnée sur vous, votre personnalité, que vous fournissez à Google. Une de plus). Je peux annoter l’œuvre (mettre un petit texte à côté, sauvegarder un zoom, etc). Que puis-je faire ensuite  ? Et bien, pas grand chose. Je peux partager sur Facebook, sur Twitter, sur Google Buzz ou par mail.
Mais en fait, je ne partage pas réellement l’œuvre, je partage un lien vers ma «  collection  ». C’est à dire que jamais, jamais je ne peux réutiliser cette œuvre en dehors du site.

Donc si par exemple je suis professeur d’histoire ou d’histoire de l’art, je suis obligée de faire entrer mes élèves sur ce site pour leur montrer l’œuvre, je ne peux pas la réutiliser à l’intérieur de mon propre cours, en l’intégrant totalement. Ni pour un exposé. Je ne peux pas télécharger l’œuvre. Qui pourtant est, dans l’immense majorité des cas, dans le domaine public. Il faut donc croire que la photographie en très haute résolution rajoute une couche de droits sur cette photo, ce qui pourrait se défendre, pourquoi pas, mais aujourd’hui ça n’est pas quelque chose d’évident juridiquement.


Vous me direz qu’après tout, cela résulte de partenariats entre des musées et Google, ils prennent les conditions qu’ils veulent, c’est leur problème, on a déjà de la chance de voir tout cela. Ok. Mais ce n’est pas la conception de partage de la culture que je défends.

Je me permettrai de rappeler que, en tant que wikimédienne, et défendant la diffusion libre de la culture, je suis attachée à la notion de «  domaine public  ». Au fait que, passé 70 ans après la mort d’un auteur, en France et dans une très grande partie du monde, une œuvre est réputée être dans le domaine public. Et donc sa diffusion peut être totalement libre. Sa réutilisation aussi, son partage, etc.

Les wikimédiens passent énormément de temps à prendre de belles photographies de ces œuvres pour les mettre librement à disposition sur Wikimedia Commons et permettre à tous de les réutiliser. Il est souvent difficile de faire admettre aux musées qu’il est bon de permettre cette très large diffusion de la culture. Les choses changent peu à peu, le dialogue s’engage ces derniers temps, et c’est une très bonne chose. Nos points d’achoppement avec les musées tiennent souvent à la crainte de «  mauvaise utilisation  » des œuvres, le domaine public leur fait peur parce qu’ils perdent totalement le contrôle sur ces œuvres (notamment la réutilisation commerciale). Ils discutent cependant avec nous parce qu’ils ont conscience qu’il est impensable aujourd’hui de ne pas diffuser ses œuvres sur internet, et Wikipédia est tout de même une voie royale de diffusion, par le trafic énorme drainé dans le monde entier (pour rappel, plus de 16 millions de visiteurs unique par mois en France, soit le 6e site fréquenté).

Quelle est ma crainte  ? Que ces musées qui commencent timidement à ouvrir leurs portes et se lancent avec nous en faisant confiance, en prenant le pari de la diffusion libre de contenus dans le domaine public, se replient sur une solution verrouillée comme celle proposée par Google Art Project, où l’internaute ne peut absolument pas réutiliser les œuvres ainsi montrées. On visite, on ne touche pas. On ne s’approprie pas. On est spectateur, et c’est tout. Je crains que par envie de contrôle de l’utilisation des reproductions d’œuvres conservées dans les musées, la notion de domaine public recule.

Alors certes, la technologie est intéressante, le buzz est légitime, l’expérience de visite est plaisante. Mais au-delà de cela, est-ce vraiment une vision moderne et «  2.0  » du patrimoine qui est donnée ici  ? Je ne le pense pas. J’ai même une furieuse impression de me retrouver dans un CD-ROM d’il y a 10 ans, ou dans le musée de grand-papa.

Pour terminer, je vous invite à aller vous promener sur Wikimedia Commons, dans les catégories concernant ces mêmes musées. C’est moins glamour, pas toujours en très haute résolution, mais vous pouvez télécharger, réutiliser, diffuser comme vous voulez, vous êtes libres…

Au cas où il serait nécessaire de le préciser  : je m’exprime ici en mon nom personnel, et uniquement en mon nom personnel. Les opinions que je peux exprimer n’engagent en rien l’association Wikimédia France, qui dispose de ses propres canaux de communication.

Annexe  : Vidéo promotionnelle pour Wiki loves monuments

Réalisée par Fanny Schertzer et Ludovic Péron (que l’on a déjà pu voir par ailleurs dans cet excellent reportage).

—> La vidéo au format webm

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Notes

[1] Illustration  : Portrait de jeune femme, Antonio Polaiolo, fin XVe siècle, MoMatélécharger librement…)

20 Responses

  1. Keops

    C’est vrai qu’il serait bien que le partage se fasse plus librement, qu’on puisse réutiliser les photos (sans bien évidemment manquer au respect du droit d’auteur). Mais c’est déjà une très grande avancée culturelle, et pour ma part je pense que les musées ont compris que plus ils seront visités virtuellement, plus ils seront visités physiquement (un peu comme les films qu’on télécharge et qui font d’autant plus de gros cartons au cinéma, comme Bienvenue Chez Les Ch’tit que tout le monde a vu en HD 1080p deux semaines avant sa sortie au cinéma).
    Laissons faire le temps, les acteurs du Libre n’auront même pas à insister pour que ces œuvres soient un jour plus faciles à partager, les musées s’en rendront compte tout seuls et partageront avec des licences plus souples leur merveilleux contenu, pour que tout le monde soit gagnant, les artistes (encore en vie, ça va de soit ^^), les visiteurs, et les musées eux-même.

  2. Syl

    C’est intéressant de faire le parallèle entre le modèle Google et Wikipédia ici. C’est beau, c’est joli mais c’est fermé, et encore plus fermé si on n’a pas de compte Google – Question con : avec tous ces projets, qui n’a pas de compte Google aujourd’hui ?

    Ici Google ne s’inspire pas de l’open source mais d’Apple.

    Pour les journalistes, c’est pareil. Ils n’ont pas la culture libre dans la tête lorsqu’arrive une telle nouveauté (esprit critique, liberté, droits d’auteur, biens communs…). Ils ont Apple dans la tête (nouveauté pour nouveauté, techno-idolâtre, design, ergonomie, gratuité, poudre aux yeux…).

    Ce qui est curieux c’est que même des sites plutôt proches du Libre passent à côté.

    Korben : http://www.korben.info/google-art-p
    « Bonne initiative non ? Je trouve ça génial pour tous les amateurs d’arts, les étudiants ou les simples curieux comme moi… »

    Numerama : http://www.numerama.com/magazine/17
    « Google offre aussi la possibilité de composer sa propre collection d’œuvres. Il suffit de s’identifier avec son compte. »

    Pour Numerama, c’est devenu désormais normal d’écrire qu’il suffit de s’identifier avec son compte Google !

  3. mit

    Syl
    >- Question con : avec tous ces projets, qui n’a pas de compte Google aujourd’hui ?

    Ma pomme. J’avais tenté d’en ouvrir un y a un an ou deux, il demandait mon numéro de téléphone portable pour envoyer un SMS de confirmation.

  4. Adrienne

    Keops : ta vision est… un peu bisounours, si je peux me permettre 😉
    Pour discuter très régulièrement avec les musées etc, je dirais que oui, ils commencent à comprendre que plus de visibilité sur internet = plus de visibilité tout court, donc plus de visites. Et les résultats des premiers partenariats entre le mouvement Wikimédia et les institutions culturelles sont encourageants en ce sens.

    *Mais* nous butons encore sur un point majeur : les conditions de distribution et de réutilisation des oeuvres. Les musées ont une certaine pression de la part du gouvernement (je devrais dire « des gouvernements », parce que ça n’est pas nouveau d’hier) d’autofinancement. Autofinancement qui passe par les entrées, mais aussi par la monétisation de tout ce qui peut être monétisé. Donc aussi les souvenirs, cartes postales, affiches etc.

    Ils ont donc du mal à accepter qu’on puisse mettre sur Wikimedia Commons des contenus qui seront ostensiblement présentés comme dans le domaine public ou sous licence libre, donc librement réutilisables… y compris pour des réutilisations commerciales. C’est plus simple de tout garder chez soi, pour éventuellement en tirer un revenu, sans s’apesantir sur la question des droits applicables aux oeuvres.

    Et c’est là où je m’inquiétais dans mon billet : on arrive, petit à petit, à travailler avec eux sur la notion de domaine public, à les rassurer, à montrer que le partage est plus bénéfique que le verrouillage, et paf, voilà Google qui arrive avec son approche « à la Apple », comme dit Syl. De quoi avoir visibilité internet + verrouillage, le pied, non ?

    Ceci dit, pour en avoir rapidement parlé avec une des parties prenantes françaises de ce projet, pour certains musées ayant participé, l’idée est d’aller partout où est l’internaute, donc sur Google autant que Youtube, Wikipédia ou Facebook. Avec des « expériences » différentes à chaque fois pour l’internaute. Bon, si c’est ça, je le comprends.

    Reste quand même la question des droits avec la surcouche Google, mais c’est une autre histoire 🙂

  5. nini

    ..non plus !
    en plus d’avoir à y faire la chasse dans les iceweasel et autres firefox 🙂

  6. aKa

    Je ne sais pas si cet article y a participé – je penche pour le oui 🙂 – mais coup sur coup aujourd’hui, Les Ecrans et Numerama se mettent eux aussi à se montrer critique en évoquant le blog d’Adrienne :

    – Google Art Project : un musée pas si ouvert
    http://www.ecrans.fr/Google-Art-Pro

    – Google Art Project piraté pour le bien de la culture libre
    http://www.numerama.com/magazine/17

  7. vulcain

    Dommage, il manque les 2 photos dans l’article (on les voit dans l’article original), j’imagine que c’est une histoire de licence, mais pourquoi ne pas mettre de lien url ?

  8. Adrienne

    @Aka : je penche pour le oui aussi, même si le billet avait déjà pas mal tourné sur twitter vendredi 🙂
    Bravo Framasoft encore une fois…

    @Vulcain : je ne sais pas si c’est une question de licence (je ne me suis pas embarrassée de licences pour une copie d’écran utilisée, disons, comme un droit de courte citation 🙂 )
    S’il y a besoin que je fournisse les captures, je le fais sans souci.

  9. aKa

    @toto : Parce que c’est à cause de « l’horrible » choix d’Adrienne d’être sur OverBlog qui phagocyte les liens sortants en les proposant dans son propre cadre 🙂

    Merci, c’est corrigé.

  10. toto

    @aKa : C’est moi qui vous remercie pour ces explications.

  11. Philippe

    J’ai l’impression que d’ici pas longtemps tout va se retrouver sur Wikimedia Commons. Je viens de tomber sur ce billet de Numerama :
    http://www.numerama.com/magazine/18
    qui annonce l’existence d’un script permettant de télécharger les œuvres de Google Art Project. Toutes les explications sont à cette adresse :
    http://blogs.kd2.org/bohwaz/?2011/0

    C’est d’une simplicité étonnante, ça tourne sous Linux et ça fonctionne parfaitement.

  12. Adrienne

    Une grande partie des œuvres en très haute définition est en effet déjà sur Commons, mais pas avec cette technique. Elles sont récupérées grâce à un script qui découpe les images en zoom très important, les importe et les recompose après. Technique déjà éprouvée il y a quelques temps avec la National Portrait Gallery de Londres.

    À voir ici : http://commons.wikimedia.org/wiki/C
    Avec les explications chez Écrans : http://www.ecrans.fr/Google-Art-Pro

    Chez les wikimédiens cette initiative, faite par des wikimédiens, est prise plus ou moins bien : on peut considérer que ce genre d’actions un peu « punchy » nuise aux relations qu’on est en train de monter avec les musées. Pour ma part, je ne sais pas trop quoi en penser. Quand j’y réfléchis je me dis qu’on doit réussir à garder l’équilibre entre actions « militantes » comme celle-ci et actions plus « diplomates » et institutionnelles. Montrer qu’on est capables de discuter mais qu’on reste fermes sur les bases du domaine public.

    Bref tout ça n’est pas toujours évident 🙂

  13. Quentin

    Tout le monde s’est émerveillé que la dernière expo Monet à Paris batte tous les records d’affluence pour presque un million de visiteurs.

    IMHO c’est avec le même état d’esprit que Google nous propose son nouveau projet. Pour que le plus de monde possible puisse entrer, au moins virtuellement, dans les plus grands et beaux musées du Village Global.

    Mais, je sais pourquoi, je suis pas totalement certain que la « culture » soit gagnante dans toute cette histoire.

    C’est peut-être aussi parce que le monde de la consommation et du marketing nous a totalement submergé qu’on sent confusément le besoin d’aller au musée, comme si l’espace d’un instant on se sentait un peu moins vide ici qu’ailleurs.

    Sauf que « aller dans le musée » se suffit à lui-même. On s’y sent souvent un peu mal à l’aise, parce que l’on manque de répères, d’informations, de clés pour comprendre l’oeuvre, l’artiste, le style, le contexte historique, etc. (tout ce que Wikipdia est capable de fournir en lisant ses articles et en suivant ses liens) mais l’essentiel c’est d’y avoir été, ce que l’on ne manquera surtout pas de dire sur Twitter.

    Google fait voir avant et donner envie de voir après. Mais ça n’est toujours en encore que la vue qui est sollicitée.

  14. sourinux

    Je partage tout à fait les préoccupations de l’auteur de l’article. Google est tellement sympa qu’on en oublie qu’il grossit à vue d’oeil et, devenant presque incontournable pour de nombreux usages (la facilité aidant), devient en même temps une menace pour les libertés, comme tout monopole peut l’être. N’oublions pas que nous n’avons aucun pouvoir de décision concernant les activités de Google, au contraire d’un projet libre géré par une communauté d’utilisateurs/contributeurs comme Wikipedia et reproductible à l’envie.

    Et bien sûr, il y a derrière cette nouveauté très « sympa » l’acceptation/validation d’un supposé droit de l’éditeur sur des œuvres tombées dans le domaine public, pratique me semble-t-il contraire au déjà très privateur Code de la « Propriété intellectuelle ». Et les organismes publics ne sont pas en reste qui, comme le fait bien remarquer Adrienne, sont poussés par le gouvernement à s’autofinancer. Le résultat est catastrophique pour l’usager qui, non content de payer ses impôts, doit encore potentiellement passer à la caisse pour obtenir l’accès aux données des services publics. Exemples: Météo France (prévisions à 7 jours), l’IGN, l’INSEE, et désormais même la Bibliothèque nationale de France qui, dans son portail d’ouvrages numérisés Gallica, exige, pour le téléchargement d’un ouvrage tombé dans le domaine public, la promesse de ne pas en faire de réutilisation commerciale, sauf à signer un accord de licence et à payer une redevance au prorata des ventes: http://www.bnf.fr/fr/collections_et

    Je pense qu’il est urgent de refuser et dénoncer cette tentative de privatisation de notre patrimoine commun.

  15. libre fan

    « Parce que c’est à cause de « l’horrible » choix d’Adrienne d’être sur OverBlog qui phagocyte les liens sortants en les proposant dans son propre cadre »

    Oui, je pense comme Aka, Adrienne. Tout en vous remerciant mille fois de votre billet, je me demande ce que vous faites sur Overblog qui nous met des menottes (et aux auteurs, des chaînes?). J’en ai parlé là-bas plus en détail: http://gazschiste.wordpress.com/201

    J’ai repris des extraits de votre texte dans mon billet: «Google Art Project: confiscation du domaine public» http://librefan.eu.org/node/467

  16. Adrienne

    Ah la la… Overblog.

    Bon, quand j’ai ouvert ce blog (2007 ? 2008 ?) je ne connaissais encore pas grand chose à tout ça, au libre etc. J’avais un blog historique (= où je racontais des trucs d’historienne) sur Blogspot, donc j’ai ouvert un autre blog sur une autre plate-forme facile pour la noob que je n’ai jamais cessé d’être, et c’est donc over-blog, sans doute par solidarité toulousaine 😉

    Reste qu’aujourd’hui j’aimerais bien en effet retrouver un peu de liberté et migrer tout cela autre part. Chaque chose en son temps, autant je sais à peu près écrire et aller convaincre des musées, autant migrer des blogs, j’ai un peu plus de mal à avoir envie d’y passer mes soirées 🙂

  17. Adrienne

    Oh c’est super gentil ça 🙂

    Avec un rythme délirant de publication de… 1 billet par an en moyenne, pas sûre que ça soit rentable 😉

    Je t’écris. Merci !

  18. libre fan

    Autrement, Adrienne, on est bien chez WordPress.com même si du point de vue du Libre, tout n’est pas parfait, le reste est parfait, à mon avis. Les débutants devraient s’y retrouver car il y a plein d’aide.(pas vérifié si toute l’aide est traduite en français).