Une France qui s’annonce terrifiante pour Internet et les libertés numériques

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Fabrice Epelboin nous révèle aujourd’hui que ReadWriteWeb met fin à ses éditions européennes, avec toutes les questions que cela pose quant au devenir et aux archives de la version française de RWW.

C’est le risque lorsque l’on dépend d’une maison mère américaine et que les articles n’ont jamais eu l’honneur d’une licence Creative Commons (sauf justement ce dernier billet où Epelboin à décidé de s’affranchir de la tutelle dans un dernier baroud d’honneur).

Notez bien que pareille mésaventure peut arriver à tous ceux qui placent du contenu sur Facebook, Twitter ou Google (autant dire à tous le monde). Puisque en vous inscrivant à ces services vous adhérez à des conditions dont il est bien stipulé qu’elles peuvent changer à tout moment si le propriétaire en décide ainsi. Par exemple si les actionnaires de ces sociétés décident d’en modifier le modèle économique CQFD.

Merci au passage à Fabrice Epelboin[1] et à RWW France pour la pertinence et la pugnacité de leurs informations, reportages et analyses (cf l’excellente compilation Chroniques de l’Infowar 2010 De l’Hadopi à Wikileaks à conserver au cas où). Nous n’étions pas de trop pour tenter d’apporter un autre son de cloche face à des institutions publiques et privées qui ont la fâcheuse tendance à prendre le Net et les nouvelles technologies par le mauvais bout de la lorgnette.

Mais ce qui m’a le plus marqué c’est la conclusion du billet. Un peu comme si l’auteur s’était lâché en livrant véritablement le fond de sa pensée. Et cette pensée est d’autant plus pro-fonde que le gus sait de quoi il parle  :

«  Les temps qui viennent en France sont terrifiants pour internet et les libertés numériques. Du point de vue des lois qui s’y appliquent, nous ne sommes plus, sur l’internet Français, dans une démocratie.

Avec quelques gus dans un garage, nous avons réussi a sensibiliser pas mal de monde à ce problème, mais force est de reconnaître que nous avons, au mieux, mis des bâtons dans les roues d’un char d’assaut qui écrase toutes les velléités de liberté sur internet, et veut le civiliser comme il a colonisé hier ceux qu’il qualifiait de sauvages.

Un autre monde est possible, mais en France, ça va prendre du temps. Une fois de plus, le pays va prendre un retard considérable en matière de numérique, au point que sa place dans le monde de demain est désormais totalement compromise, mais ça, même sans comprendre quoi que ce soit à la neutralité du net ou aux enjeux sociétaux d’Hadopi et de Loppsi, vous avez du vous en apercevoir.  »

Aux dernières nouvelles Fabrice Epelboin s’en irait rouler sa bosse en Tunisie. Parce qu’il souhaite désormais «  construire avec  » et non plus «  lutter contre  ».

Il reste une place dans l’avion  ?

7 Responses

  1. vvillenave

    Je suis navré de cette nouvelle, et je félicite Fabrice pour son travail de plusieurs années, qui se distinguait notamment par son intégrité intellectuelle et sa rigueur. À ce titre précisément, il me paraîtrait un peu rapide (voire potentiellement contre-productif) de voir en cette regrettable initiative de ReadWriteWeb USA, un acte de censure politique.

    Fabrice lui-même se refuse à porter une telle accusation en des termes explicites, et il a raison de rester prudent : il est manifeste qu’on est là face à des motivations purement économiques, dans un contexte difficile autant pour les uns (pays riches) que pour les autres (pays émergents). Confondre les volontés des gouvernants, des sociétés multinationales (et donc des gros annonceurs publicitaires), des ennemis en tous genre de la liberté d’expression sur le Web, dans un même « melting-pot » confus, inarticulé et paranoïde, serait la dernière chose dont nous aurions besoin en ce moment : au contraire, j’espère que, où qu’il aille, Fabrice continuera à nous gratifier d’analyses raisonnées, mesurées et efficaces. (Le connaissant de loin, il me semble qu’il serait le dernier à aller courir après des moulins à vent.)

    Cette triste histoire, au demeurant, est aussi l’illustration de la faiblesse du paradigme « pure player » en tant que modèle entrepreneurial et économique. Là où des associations telles que Framasoft parviennent (certes à grand peine et au prix de beaucoup de sacrifices) à se maintenir, une entreprise de presse/marketing/information en tout genre est à la merci du moindre aléa financier… Au risque soit de couler, soit au contraire d’aller draguer le chaland à coup de racolage putassier et mercantile. Au moins, nous avons la consolation de pouvoir nous dire que tel n’aura pas été le destin de ReadWriteWeb France.

  2. Tanéléo

    Je n’ai jamais vraiment accroché à RWWfr. Je trouvais au contraire que les articles manquaient de rigueur et de profondeur. Mais il y avait une base de travail souvent intéressante. Je suppose que c’est une opinion personnelle. Par exemple, et même si ce n’était pas le même travail, j’ai été beaucoup plus contrarié quand Astrid Girardeau a décidé d’arrêter de publier.

    Pour ce qui est de la perte des données, du pseudo «muselage» de l’Internet, j’en ai déjà parlé longuement, donc je renvoie le lecteur à ce que j’ai écrit :

    – pour la perte des données : http://www.taneleo.com/node/49 et http://www.taneleo.com/node/35
    – pour la Révolution Internet : http://www.taneleo.com/node/17 et http://www.taneleo.com/node/16

    Il ne faut trop s’en faire pour l’Internet en France. La politique actuelle, c’est quand même beaucoup de bruit pour souvent pas grand chose. Énormément d’effets d’annonces, suivis de rien ou alors ces effets se retrouvent bloqués par nos institutions (Conseil Constitutionnel, etc…), des lois inapplicables ou alors sans décret d’application, ou encore qui concernent presque personne ou quelques rares cas. Nous sommes plus souvent dans l’apparence, une utilisation de la représentation du monde ou de l’imaginaire collectif, que sur une politique de fond et savante. Ceux sont les médias qui nous donnent à croire ce dernier point.

    Il y a peut-être une incompréhension sur ce qu’est la Révolution Internet : elle est le simple fait d’avoir accès à l’information et à la parole publique. Pour le reste, le temps fera son oeuvre. La Révolution Internet est une révolution lente et profonde, pas une succession d’attaques frontales sur un court terme.

    Le contre-pouvoir des médias et de l’Internet réside simplement dans leur existence et dans leur essence, pas dans telles ou telles utilisations.

    Puis, il faut cesser d’avoir cette approche paranoïaque de la réalité, il y a bien plus souvent des effets de bords qu’une réelle volonté de nuisance. Les intérêts des uns ne faisant pas toujours les intérêts des autres.

  3. frilouz

    Un peu ambigüe cette situation :
    D’un côté, Philippe dénonce, en partie à juste titre, l’attitude de l’état français vis à vis d’Internet, et d’un autre, il est victime semble-t-il de la censure de sa maison mère, pour qui le militantisme trop clairement affiché du site français portrait préjudice à la politique publicitaire de la maison. Ce n’est pas LOPPSI qui a « tuer » RWWfr, c’est la logique commerciale qui veut qu’on brosse les annonceurs dans le sens du poil.

  4. RilaX

    Je ne suis pas tout à fait d’accord avec Tanéléo sur la capacité réelle de nuisance de notre actuel gouvernement envers le net.
    Il y a certes l’aspect qui ne débouche sur rien de vraiment grave contrairement aux effets d’annonces; mais il y a aussi l’exact inverse. Je pense par exemple à toutes ces taxes qui handicapent les start up française aux profits de sociétés américaines. De même que pour certaines lois qui ne concernent que ce que le gvt est capable de toucher : les entreprise françaises.

  5. chaudière bois

    Pas trop d’inquiétude !!!. En france actuellement et avant aussi , c’est quand même beaucoup de bruit pour souvent pas grand chose. Énormément d’effets d’annonces, suivis de rien ou alors ces effets se retrouvent bloqués par nos institutions (Conseil Constitutionnel, etc…), des lois inapplicables ou alors sans décret d’application, ou encore qui concernent presque personne ou quelques cas exceptionnel.