Quand la bière aime être libre

Classé dans : Mouvement libriste | 9

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L’autre jour Obama, toujours malin en campagne, a fait soudainement irruption sur le site Reddit pour un AMA (Ask Me Anything) signifiant qu’on pouvait donc lui poser n’importe quelle question.

Et ceci fut fait puisqu’on lui demanda alors quelle était la recette de la fameuse bière de la Maison Blanche. Réponse de l’intéressé  : nous la publierons incessamment sous peu.

Chose promise, chose due.

L’occasion pour le site OpenSource.com d’aller plus loin et de s’amuser à contredire Richard Stallman himself dans un article que nous vous proposons traduit ci-dessous.

The Art Gallery of Knoxville - CC by-sa

La bière rassemble les gens  : d’Obama aux brasseurs, en passant par les communautés en ligne

Beer brings people together : Obama, homebrewers, and online communities

Casey Brown – 31 août 2012 – OpenSource.com
(Traduction  : Unagi, pwetosaurus, enso, Philippe, tanguy, Zii, Laurent, sheldon)

Dans ma citation préférée à propos du Libre (NdT : originellement «  de l’open source  »), Richard Stallman explique que «  Dans le logiciel libre il est question de liberté, pas d’argent. Pour comprendre cela, je vous invite à penser le libre (free) comme «  liberté d’expression  » (free speech) et non pas comme «  bière gratuite  » (free beer)  ».

Malgré tout, la semaine dernière, j’ai commencé à me poser la question de la validité de cette explication. En réalité, j’aurais pu dire que le logiciel libre est exactement comme la bière libre.

En effet, ces derniers jours, la plupart des discussions dans les commuautés open source concernaient la bière libre. Des Yeastie Boys à l’ale au miel du président Obama, la bière a été un sujet populaire (enfin, plus qu’habituellement).

Il s’avère que la communauté des brasseurs amateurs s’est construite sur les principes open source depuis déjà longtemps. D’après le site The Powerbase, «  L’idée de partager ses recettes de bières avec les autres n’est pas neuve. Les brasseurs amateurs font ça depuis, eh bien, toujours. La communauté des brasseurs amateurs a toujours été très favorable au partage et, pour bien des gens, échanger et améliorer des recettes est le coeur de l’activité.  »

Mercredi dernier, le brassage amateur open source a fait parler de lui. Dans un sujet où l’on pouvait lui demander n’importe quoi sur Reddit, le président Obama a répondu à 10 questions qui lui avaient été posées. Un des redditeurs lui demanda la recette de l’ale au miel brassée de la Maison Blanche. Le président répondit, «  Nous la divulguerons bientôt  ! Et croyez-moi par expérience, elle est savoureuse  !  »

Bien sûr, la communauté open source s’excite chaque fois que la Maison Blanche décide de passer un projet en open source. Que ce soit leur plateforme de pétition «  Nous le peuple  » ou leur recette de bière préférée. Même si c’est juste une recette de bière, c’est un pas certain vers l’ouverture. La session «  question / réponse  » a été si populaire que cela «  a mis le site à genoux  », reporte CNET.

La Digital IPA (Idian Pale Ale) des Yeastie Boys revenait également régulièrement dans les conversations des communautés open source ces derniers jours. Pour décrire leur bière, le site internet des Yeastie Boys disait  : «  De la même manière que numérique se rapporte à des zéros et des uns, le concept de IPA se rapporte aux malts et aux houblons  ».

Cette bière se démarque des autres car les Yeastie Boys ont intelligement apposé des QR codes donnant accès à la recette sur les bouteilles, de manière à ce que l’on puisse tenter de la brasser soi-même. Ces codes proposent aussi des liens vers différentes formes de médias sociaux, permettant aux amateurs de partager facilement leurs recettes modifiées.

Certaines personnes publient même leurs recettes de bières sous licence Creative Commons. Free Beer publie ses recettes sous la licence CC Attribution-ShareAlike 2.5 et explique que tout le monde est libre d’utiliser la recette et de gagner de l’argent avec, mais avec l’obligation de publier la recette sous la même licence et de citer la source originale. Leur site vous permet de télécharger une étiquette Free Beer à afficher sur vos bouteilles, et dispose d’un blog avec les photos des bouteilles à travers le monde.

Même chez Red Hat, la communauté open source de brasseurs amateurs prospère. Nous avons une liste de diffusion qui leur est entièrement dédiée et qui contient des sujets traitant de recettes et d’astuces. Occasionnellement ils apportent même leurs créations au bureau pour une dégustation.

Alors peut-être est-il temps pour M. Stallman de mettre à jour sa citation. Qu’y changeriez-vous  ? Et l’un d’entre vous a-t-il jamais tenté de brasser lui-même sa bière  ? Nous aimerions avoir des retours d’expériences et des recettes. Mais plus important encore, nous aimerions pouvoir toutes les goûter. Vous savez comment nous contacter…

Crédit photo  : The Art Gallery of Knoxville (Creative Commons By-Sa)

9 Responses

  1. vvillenave

    « s’amuser à contredire Richard Stallman » ? En anglais peut-être, mais en traduisant ici « free beer » par « bière Libre », l’équipe Framalang a paradoxalement confirmé, validé et démontré le propos de rms… 🙂

  2. Galuel

    vvillenave a en effet parfaitement résumé la racine de l’incompréhension. Elle vient du fait que l’anglais utilise le même mot pour « libre » et « gratuit » ce qui en effet est très différent et c’est pourquoi ce problème fait « pshiit » en Français…

    Libre ne signifie pas gratuit. C’est le sens de l’assertion Stallmanienne.

    Et c’est pourquoi, la rémunération des producteurs des valeurs libres et non-marchandes trouve une réponse via le Dividende Universel.

    http://www.framablog.org/index.php/

  3. remi tropel

    La question essentielle devrait plutôt se résumer ainsi, est-ce oui ou non une IPA, s’il s’agit d’une vulgaire Lager , alors « Mr President » manque de culture….de houblon bien entendu.

    Oui je sais , elle est facile…

  4. 314r

    Cette histoire de bière libre est une vaste fumisterie. L’auteur crie-t-il à la victoire de l’open source à chaque fois que sa mère ou sa grand-mère lui transmet une recette ? Les communautés de brasseurs amateurs existent depuis longtemps effectivement et constituent des espaces de partage et d’entraide, deux valeurs humaines communes qui n’ont rien de spécifiques au mouvement open source, à moins de le dénaturer complètement.

    Ce qui suscite à mon avis un engouement pour le brassage amateur est la redécouverte d’un savoir, la redécouverte qu’un produit que beaucoup pensaient être purement industriel est en fait issu d’une tradition artisanale, et qu’il est possible de se réapproprier ce savoir. Cette réappropriation est également ce qui a mené certains vers l’open source en matière de logiciel.
    En ça, le brassage amateur et l’open source font peut-être partis d’un mouvement commun, qui n’est pas réductible au seul label « open source ».

  5. Ginko

    @314r,

    >la redécouverte qu’un produit que beaucoup pensaient être purement industriel

    C’est qui, ce « beaucoup » ??? Référence needed !

    Nan parce que sérieux, tout le monde sait (sic !) que chaque région (jusqu’au trou du cul du monde le plus paumé – hors du monde musulman… et encore…) de la planète possède sa bière locale. A partir de là, penser que la production est uniquement industrielle relève d’une tournure de cerveau plutôt alambiquée AMHA… j’ai du apprendre la recette de la bière au collège en cours de bio lorsque l’on a abordé la fermentation (avec le fromage, hum, que de bonnes choses !).

    Bref, je ne sais pas qui redécouvre quoi, ni qui s’enthousiasme pour quoi, mais si tu es dans le vrai, alors je suis vraiment stupéfié par le niveau déplorable dans lequel a chu — choit ? — la France…

    Que l’on me dise que les mecs sont enthousiastes de se rincer la gueule avec de la binouse faite maison, je comprends. Mais la redécouverte de la tradition artisanale et toussa, c’est bon pour JP Pernaud et ses petits vieux, voire pour quelques représentants élus en mal d’audience… mais inutile de nous servir ce genre de discours ici !

    >Cette réappropriation est également ce qui a mené certains vers l’open source en matière de logiciel.

    Oui, la tradition artisanale, toussa 😉

    >En ça, le brassage amateur et l’open source font peut-être partis d’un mouvement commun, qui n’est pas réductible au seul label « open source ».

    Il s’agit précisément du crédo du Framablog (cf. le bandeau en haut de page).

  6. ttoine

    Pour ma part je trouve très sympa qu’un personnage comme Obama mette ces recettes de bière à la disposition de la communauté. Je dis ça, en dehors de tout côté com’ genre « je suis proche de vous, j’aime la bière et j’en fais moi-même » pour la campagne. En effet, peut-être que d’autres présidents auraient refusés, ou auraient mis un copyright, voire, essayé de la commercialiser en partenariat avec un brasseur industriel après son mandat. Comme quoi on peut être le président d’un des pires modèle de consommation et de capitalisme et rester « cool » et ouvert. Et ça, c’est bien.

    Plus sérieusement, peut-être qu’en anglais, on devrait désormais utiliser « open recipe beer » et « open source software », la notion de liberté étant un peu floue à cause du terme « free ».

  7. Dalz

    Et si finalement c’était juste la différence entre bien informationnel ou pas le problème ?
    Tu peux le copier ton logiciel, ta ligne de code, ton morceau de musique, le « consommer » n’en bouffe ni le travail qu’il a fallu, ni l’objet en tant que tel. Alors que le litre de bière, open source, libre, ou propriétaire que tu bois, une fois qu’il est bu, il n’y a que deux possibilités pour être partagé, suivant le degré d’alcoolisation du sujet.
    Et jusqu’à preuve du contraire, on ne parle pas de bière libre gratos, mais de bière open source / libre (là il ne peut pas y avoir de différences, sauf quant à l’éventuelle contamination de la licence de distribution des recettes) payante (sauf si tu as tes champs, tes grains, ton eau et que tu définis la gratuité au delà de la valeur travail)…a
    Mais globalement il me semble qu’on parle de libre pour une œuvre de l’esprit, pas un truc tangible, de fait, on pourrait parler de « recette de bière libre » et non de « bière libre », ce qui change beaucoup de choses finalement.

  8. 314r

    @ginkgo : je suis brasseur amateur, et quand j’en parle autour de moi, personne n’a idée du process. Tu es peut-être un cran au dessus, tant mieux pour toi. Malgré tout, j’ai l’impression que tu n’as pas bien compris mon commentaire. Quand je parle de réapropriation de savoirs, ce n’est pas en référence à Pernault mais plus exactement à Stiegler dont certains travaux ont été relayé ici. Et c’est pourquoi « servir ce discours ici » ne me semblait pas inapproprié.

    Quant au credo du framablog, s’il s’agit bien d’élargir au delà du simple concept d’open source, de le contextualiser en somme, c’est précisément ce que ne fait pas cet article un peu niais, d’où mon premier commentaire.