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Ce n’est pas la première fois que nous vous proposons un témoignage raz-le-bol de Facebook qui joint la théorie à la pratique en décidant de quitter réellement le célèbre réseau social.
Après « la maman », voici « le musicien »… Et si ces deux cas isolés anticipaient un futur (et salutaire) mouvement de fond ?
Le constat va croissant, nombreux sont désormais les gens autour de moi qui n’aiment pas (ou plus) Facebook. L’attrait de la nouveauté envolé, les changement soudain de paramétrage qui désorientent et menacent notre vie privée, le temps passé dessus au détriment de « la vraie vie » (avec des morceaux de vrai(e)s ami(e)s dedans)… nombreuses sont les raisons qui font que la « douce saveur » du début a un arrière-gout de plus en plus amer.
Mais, contrairement à nos deux courageux, la grande majorité y reste pourtant, par habitude ou « parce que, vous comprenez, tout le monde est dessus ».
La parallèle est discutable mais ça me fait penser à tous ces utilisateurs, passés ou présents, enchaînés à leur système d’exploitation Windows. On finit par haïr Microsoft mais on en redemande quand même. Et cela porte un nom : addiction.
Facebook est le Windows de notre époque et il n’a toujours pas trouvé son GNU/Linux (puisqu’en l’occurrence notre musicien ne s’en va malheureusement pas beaucoup plus loin en choisissant Google+).
Facebook en voie de devenir le prochain MySpace ?
Is Facebook becoming the next MySpace ?
Christian Grobmeier – 31 octobre 2012 – Blog personnel
(Traduction : lgnap, tiossanne, Yuston, ehsavoie, Yann, Gatitac, unnamed4, Naar, Damien, Maxauvy, Paul, Simon Villeneuve, 3josh)
Je suis musicien amateur. Bon, entre Time & Bill et d’autres projets me prenant tout mon temps, je suis actuellement un musicien « en pause », mais en 2005, j’étais plutôt actif et je me souviens que nous voulions sortir notre prochain CD. Tous mes amis musiciens étaient sur MySpace et nous parlaient de la pub efficace qu’ils pouvaient y faire. J’ai toujours trouvé le site laid, mais il y avait tellement de monde dessus que je m’y suis inscrit à mon tour, j’y ai déposé nos chansons et j’ai fait l’effort de construire un réseau. Ça a bien fonctionné pendant un moment. Ensuite, il est apparu qu’il y avait plus de musiciens que d’auditeurs sur le site. J’ai reçu des tonnes de messages comme « Écoute mon nouveau titre » ou « Viens à notre concert ». Les commentaires sur notre page ressemblaient à un grand mur couvert de pubs collées par d’autres musiciens. Parfois, parmi tous ces messages, on pouvait voir des femmes nues proposant leurs services. J’ai fini par fermer les commentaires. Puis MySpace a commencé à « faire mieux » (NdT : nouveau slogan du site). Ça a échoué, le site est simplement devenu plus lent, laid et inutilisable. Finalement, j’en suis parti et me suis préoccupé uniquement de notre site web. MySpace était un vrai bazar et n’avait plus aucune utilité.
Ensuite, tout le monde est passé à Facebook. J’y ai jeté un œil, sans être emballé. Il était difficile d’y mettre de la musique. Il y avait un côté restrictif et j’ai vraiment détesté l’interface utilisateur, mais bon, là encore tout le monde s’y est inscrit, et j’en ai donc fait de même. J’ai trouvé quelques applications tierces qui permettaient à mes visiteurs d’écouter ma musique. Tout allait bien. Après quelques temps, j’y ai même retrouvé avec émotion de vieux amis. Tout semblait aller pour le mieux.
C’est alors que les jeux sont arrivés. Tout à coup, ce fut le bazar. Eh, je ne veux pas gagner d’or, tuer des dragons ou cultiver des salades. Je suis juste là pour discuter avec des amis et échanger avec les fans de notre groupe. Cela empira au point de vouloir quitter Facebook lorsque j’ai découvert FBPurity. Et les choses s’arrangèrent. Quand j’ai découvert comment faire pour que Facebook arrête de m’envoyer des e-mails « Veux-tu jouer à ce jeu super ? », tout est rentré à nouveau en ordre, apparemment.
J’ai pendant longtemps ignoré toutes les discussions sur la confidentalité des données. Je ne publie rien de sensible sur Facebook. Les photos téléversées sont du tout-venant. Je ne réponds pas à toutes les questions que Facebook me pose. Ainsi, j’ai pu vivre avec le fait que Facebook fasait des choses vraiment étranges avec mon profil. À un moment, des clients m’ont ajouté à leur liste d’amis, j’ai donc dû devenir plus prudent avec mon profil. Il est probablement étrange pour mes clients de lire sur mon mur les invitations de ma maman à récolter de la salade sur Farmville, mais bon, ils doivent faire avec.
La confidentialité des données — est-ce vraiment un problème ? Parce que j’ai appris que la majeure partie du contenu sur Facebook est de la vraie foutaise. « Aïe, je me suis cassé un orteil » est l’un des messages les plus intéressants. Parfois, quelqu’un a un bébé, et si c’est un vieil ami, je le sais déjà. Si c’est une personne dont je n’ai pas entendu parler depuis des années, ce n’est pas aussi amusant que de lire les bêtises d’un autre ami dans un bar. Alors, quelles sont les « données importantes » dont nous nous préoccupons tous ? Si ce ne sont pas les absurdités que nous écrivons, c’est probablement lorsque nous cliquons sur « J’aime », parce que Facebook sait alors que nous aimons Coca-Cola et qu’il peut vendre notre profil client à n’importe qui.
Néanmoins, je peux accepter qu’ils vendent mes données pour me fournir un service apte à promouvoir mon groupe et garder contact avec avec mon réseau de relations, même si l’interface est toujours un cauchemar. Depuis le lancement de Google+, Facebook est devenu encore plus bordélique. Par exemple, il me faut toujours un temps fou pour ajouter des évènements à une page qui m’intéresse pour un ami.
Maintenant, qu’est-ce qu’on nous propose ? Des pubs partout,me forçant à utiliser AdBlock+ (j’y suis passé). Du contenu bien souvent sans intérêt et trop chronophage, je suis bien assez occupé comme ça. Mon profil est vendu à des inconnus. Ah, et au fait, j’oubliais : Facebook modifie pas mal de choses sans notification préalable.
Par exemple, vous ne pouvez plus cibler tous les fans de votre page lorsque vous postez un nouveau contenu. C’est vrai, Facebook me conseille maintenant de payer pour cela. Voici un billet intéressant à ce sujet qui décrit la situation. Après tout, il faut bien compenser la chute des actions en bourse…
À présent, Facebook a largement dépassé la moisissure qu’était Myspace. Non, je ne paierai pas pour ça, et je vais cesser de poster du contenu. Pourquoi continuerais-je à en poster si personne ne le lit ? Pourquoi paierais-je pour discuter de choses futiles et anodines avec mes amis ? Le téléphone est bien moins cher ! Pourquoi paierais-je pour la présence de mon groupe sur cette plateforme alors qu’il ne génère aucun revenu actuellement ?
Il en va souvent ainsi j’imagine, parfois, les grands réseaux sociaux oublient que les utilisateurs ne sont pas que des machines à fric, et aussi qu’ils peuvent partir. Je compte d’ailleurs quitter Facebook au profit de Google+. J’y poste déjà le contenu de tous mes blogs, si vous souhaitez me suivre. J’aime beaucoup son interface. ses bulles, ses cercles et son tchat vidéo. On y trouve du contenu de meilleure qualité que sur Facebook, et beaucoup de spécialistes sur un sujet donné.
Ce qui fait que Twitter et G+ sont désormais mes principaux canaux de communication. Du moins, jusqu’à ce qu’ils empirent. Twitter fait déjà des choses étranges, comme avec ses nouvelles modifications plus restrictives de l’API. Voyons ce que le futur nous réserve.
Enfin, je crois fermement qu’un jour, il y aura un réseau social décentralisé fondé sur des outils open source.
Adieu Facebook. Tu ne me manques pas.
Crédit photo : Phphoto2010 (Creative Commons By-Nd)
qwerty
Allez, Movim et consort, courage ! Vous aurez bientôt le public. La route est longue mais elle est libre !
tuxmouraille
cebook Bonsoir,
Je réagit avant de finir de lire de billet.
Je ne croit pas que la fin de Facebook viendra des utilisateurs, ou pas directement.
La fin de Facebook a commencé depuis son entrée en bourse; Facebook n’a pas de modèle économique, c’est ce qui explique la chute de son action.
La revenue publicitaire de son pas suffisant, la vente des données personnel des utilisateurs est quasi-impossible et la motétisation de l’accès ne fera que faire fuir les utilisateurs.
Si Facebook ne changé pas sans arrêt son interface et son fonctionnement, il aurait était plus facile de rendre les utilisateurs dépendant du service, et alors de faire payer l’accès.
Une solution qui sera certainement mise en place est de faire payer certain services, voir même l’anonymat des données personnelles.
Ploum
C’est marrant parce que je postais hier en arrivant exactement à la même conclusion : http://ploum.net/post/flux-total
Si l’on passe outre la décentralisation, Google+ est vraiment un outil qui s’approche de plus en plus de la perfection.
Par contre, c’est amusant mais il semblerait que G+ ne soit pas intuitif à première vue. Les gens n’arrivent pas à comprendre le concept que tu vois des choses dont la portée est limitée à tes cercles. Ils ont l’impression que tout est public.
Mais oui, il devient vraiment urgent de décentraliser tout cela.
shokin
Vous comprenez… cette perte d’authenticité. Avec la monnaie, le droit, la technique et le réseau, généralisés, voulus comme universels. C’est l’universalisation qui tue l’authenticité.
Au marché, quand on pouvait négocier – avec ou sans l’intermédiaire de quelque monnaie – il y avait cette authenticité liée au bien que l’on convoitait ou offrait. Désormais, un prix est un prix, ni plus ni moins. Tout doit être monnayé, même pas le droit à la gratuité ou au bénévolat. Tout « doit » être comptabilisé. Monnaie généralisée…
Avec le droit, c’est pareil… le conflit est résolu avant même que nous en ayons conscience. On ne peut même plus le résoudre « entre nous », comme nous voulons. C’est cette illusion de justice, de croyance en un monde juste (cf. psychologie sociale sur http://www.startpage.com ).
Avec la technique, de même, on privilégie la technique « la plus efficace » au détriment du choix d’opter pour une autre technique, et de la diversité des outils utilisés. Les dangers de l’utilitarisme (voir ausi Jacques Ellul).
Avec les réseaux, c’est encore de même. Quand on s’expose sur un réseau (genre « unsafe book »), on contrôle encore moins le groupe de destinataires (récepteurs) à qui notre message s’adresse. Sans compter encore l’effet Palo Alto : http://uriic.uqat.ca/cours/Module1/… .
L’universalisation d’un être, d’une croyance, d’un savoir, d’une méthode, d’une morale, d’un produit ou de toute autre chose est l’entretien d’un certain monopole (ce qui est universalisé jouit du monopole, dont on voudrait se libérer).
Et de rajouter ce que je disais sur le web en général : une information provisoire n’est pas faite pour être durable. ça paraît trivial, dit comme ça. Les informations changeantes doivent être mises à jour, sous peine de devenir obsolètes (obsolescence inévitable de l’information). Par conséquent, plus vous émettez d’informations provisoires sur un média durable (le web), plus vous perdrez votre temps :
– soit à émettre des informations que vous ne mettrez pas à jour, et qui deviendront alors obsolètes (vous changez, vous êtes la réalité, toujours automatiquement mise à jour à elle-même),
– doit à émettre des informations que vous mettrez à jour, mais quelle chronophagie ! Comme la télé, ça vous bouffe votre temps de cerveau disponible.
osef
> Mais, contrairement à nos deux courageux, la grande majorité y reste pourtant, par habitude ou « parce que, vous comprenez, tout le monde est dessus ».
Euh, tu parles de Touitère là ? Oups ! Pas taper c’est Halloween 😉
LOD
« Enfin, je crois fermement qu’un jour, il y aura un réseau social décentralisé fondé sur des outils open source. »
Depuis des mois oui, G+ a copié d’ailleurs son interface-graphique !
https://diasp.org/
Ploum
LOD > Seul les personnes n’ayant pas la moindre connaissance en interface utilisateur peuvent dire cela. Diaspora est un projet qui, de bout en bout, n’a pas été géré. La seule « idée » que Diaspora a eu a été l’asymétrie des relations. Mais même ça ça n’a pas été implémenté correctement (le « machin partage avec vous », complètement incompréhensible).
Est-ce que G+ a récupéré une seule idée de Diaspora ? Je ne pense pas. On pourrait discuter sur le côté asymétrique (mais qui était déjà présent dans Twitter) et les aspects qui sont plus ou moins semblables aux cercles. Est-ce que G+ aurait eu cette idée sans Diaspora ? Je pense que oui.
Mais de toutes façons, en tant que libristes, je suis contre les brevets et l’idée de « propriété d’une idée ». G+ a fait une bonne chose là où Diaspora n’a pas réussi. Ceci dit, Diaspora peut encore rebondir et je le souhaite de tout cœur : http://geexxx.fr/2012/10/31/diaspor…
François
Hé dites :
« Facebook est le Windows de notre époque et il n’a toujours pas trouvé son GNU/Linux »
Vous connaissez status.net chez frama ?
On peut même installer son instance chez soit toussa.
Je fais certainement fausse route, mais des fois je comprends pas le chemin pris par frama.
Simon Tripnaux
Et pour ma part j’ajouterais aussi Sharetronix qui est vraiment pas mal du tout …
ED
Status.net ou sharetronix c’est bien beau (j’ai installé et essayé les deux) mais sans « amis » inscrit à quoi ça sert !? Sauf si tu peux utiliser ton compte facebook pour t’inscrire sur ton super script open-source… et nous voilà dans le paradigme… car que ce soit facebook ou G+ on se méfie avec raison d’offrir un profile numérique unique qui nous représente dans la vie…
Mais en fait moi ce qui me dérange le plus dans facebook c’est plus les débilités de mes sois-disant amis…. en fait mes vrais amis ne sont pas sur facebook, en tout cas c’est pas eux qui « aime » ou « commente » ou « publie » le plus et qui me polluent mon espace de partage…
Quand à diaspora alors là désolé mais rien que le nom me donne des boutons…
sab
j’ai viré facebook depuis quelques mois et bizarrement, je me sens… revivre!!!