#SpanishRevolution ? Traduction 1.1 du Manifeste « Democracia Real Ya »

Classé dans : Mouvement libriste | 11

Temps de lecture 6 min

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Fito Senabre - CC by-sa«  Nous ne sommes pas contre le système, c’est le système qui est contre nous  !  »

«  Si vous nous empêchez de rêver, nous vous empêcherons de dormir  !  »

C’est avec de tels slogans que de nombreux espagnols contestent et occupent l’espace public depuis près d’une semaine, en utilisant massivement le réseau pour se coordonner.

Pas de mots d’ordre, pas de revendications précises, pas de leaders, pas d’idéologie (sauf à considérer que le petit livre de Stéphane Hessel Indignez-vous  ! puisse servir de référence commune), c’est un mouvement qui déconcerte et qui n’a pas eu encore beaucoup d’écho chez nous, affaire DSK oblige.

Mais qui sait si il ne fera pas tâche d’huile en France et en Europe car, pour le coup, vérité (notamment économique) en deçà des Pyrénées est la même au delà, modulo le fait que tous les pays n’ont pas encore un taux de chômage de sa jeunesse à… 40 %  !

Pour en savoir plus il y a l’article Wikipédia à suivre au jour le jour (si possible en langue originale). Il y a aussi cette excellente traduction d’Owni  : Comprendre le révolution espagnole[1].

«  Quelque chose de grand est en train de se passer ici  », nous dit-on dans ce billet. On y apprend également que l’un des éléments déclencheurs du mouvement fut le passage d’une loi présentant de forte similitudes avec notre Hadopi et notre Loppsi (la Ley Sinde). Une loi qui fit l’objet d’un pacte entre les trois grands partis coalisés (PSOE, PP et CiU) et qui, no comment, donna l’impression à une majorité d’internautes qu’elle était un cadeau fait aux groupes de pression au détriment des citoyens.

Certains n’y verront peut-être qu’un apéro Facebook amélioré, d’autres au contraire évoquent déjà la contagion du printemps arabe au sein même de nos démocraties (ou de ce qu’il en reste).

Nous verrons bien… Mais en attendant nous vous proposons ci-dessous la traduction française du manifeste de l’un des fers de lance du mouvement, le collectif «  Democracia Real Ya  !  », «  une vraie démocratie, maintenant  !  ».

Remarque  : On peut considérer cette traduction comme la version 1.1 de celle que l’on peut trouver actuellement sur Internet et qui était, à nos yeux, nettement perfectible, étant entendu que vous pouvez continuer à proposer des améliorations en vue d’une version 1.2 :-)

Manifeste de «  Democracia Real Ya  !  »

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Nous sommes des personnes simples et ordinaires. Nous sommes comme toi. Des gens qui se lèvent chaque matin pour étudier, pour travailler ou pour chercher du boulot  ; des gens qui ont une famille et des amis. Des gens qui travaillent dur tous les jours pour vivre et offrir un meilleur futur à ceux qui les entourent.

Parmi nous, cer­tains se consi­dè­rent pro­gres­sis­tes, d’autres plutôt conser­va­teurs. Certains sont croyants, d’autres pas. Certains ont des idéo­lo­gies affirmées, d’autres sont apo­li­ti­ques. Mais nous sommes tous préoc­cupés et indi­gnés par la situa­tion poli­ti­que, économique et sociale actuelle. Par la cor­rup­tion des poli­ti­ciens, des patrons, des ban­quiers… qui nous laissent impuissants et sans voix.

Cette situa­tion nous fait souffrir au quotidien  ; mais si nous nous unissons nous pouvons la modifier. C’est le moment de nous mettre en marche pour bâtir ensemble une société meilleure. Pour ce faire, nous sou­te­nons fermement que  :

  • Les priorités de toute société développée doivent être l’égalité, le progrès, la solidarité, le libre accès à la culture, le développement durable et le bien-être des personnes.
  • Il existe des droits fondamentaux que la société a le devoir de garantir  : le droit au logement, au travail, à la culture, à la santé, à l’éducation, à l’engagement politique, à l’épanouissement personnel et le droit à l’accès aux biens nécessaires à une vie saine et heureuse.
  • Le fonctionnement actuel de notre système politique et gouvernemental ne répond pas à ces priorités et il devient un obstacle pour le progrès de l’humanité.
  • La démocratie, par essence, émane et appartient au peuple, mais, dans ce pays, la majorité de la classe politique ne lui prête pas attention. Le rôle des politiciens devrait être de faire entendre nos voix aux institutions, en facilitant la participation politique des citoyens grâce à des voies de démocratie directe pour le bénéfice de l’ensemble de la société. Et non celle de s’enrichir et prospérer à nos dépens, en se pliant aux exigences des pouvoirs économiques et s’accrochant au pouvoir par la dictature partitocratique du PPSOE[2].
  • La soif de pouvoir et son accumulation entre les mains de quelques-uns créent inégalités, tensions et injustices, ce qui mène à la violence et que nous refusons. Le modèle économique en vigueur, obsolète et antinaturel, coince le système social dans une spirale qui se consomme par elle-même en enrichissant une minorité et en plongeant les autres dans la pauvreté. Jusqu’à l’effondrement.
  • L’accumulation d’argent est la finalité du système, sans prendre en considération le bien-être de la société et de ceux qui la composent  ; gaspillant nos ressources, détruisant la planète, générant du chômage et des consommateurs frustrés.
  • Nous sommes les rouages d’une machine destinée à enrichir une minorité qui ne sait plus reconnaître nos besoins. Nous sommes des citoyens anonymes, mais sans nous rien ne serait possible car nous faisons tourner le monde.
  • Nous ne devons plus placer notre confiance en une économie qui ne tourne jamais à notre avantage. Il nous faut éliminer les abus et les carences que nous endurons tous.
  • Nous avons besoin d’une révolution éthique. L’argent ne doit plus être au dessus tout, mais simplement à notre service. Nous sommes des êtres humains, pas des marchandises. Je ne suis pas le produit de ce que j’achète, pourquoi je l’achète et à qui je l’achète.

Pour toutes ces raisons, je suis indigné(e).
Je crois que je peux changer les choses.
Je crois que je peux aider.
Je sais que tous ensemble nous le pouvons.
Il ne tient qu’à toi de nous rejoindre.

Notes

[1] Crédit photo  : Fito Senabre (Creative Commons By-Sa)

[2] Contraction des deux partis PP et PSOE, un peu comme si on disait UMPS chez nous.

11 Responses

  1. Benoît

    Bonjour,
    Le manifeste est écrit par << Des gens qui travaillent dur tous les jours pour vivre et offrir un meilleur futur à ceux qui les entourent. >>.
    Mais << les politiciens, les patrons, les banquiers >> sont pareils. La différence de résultat vient des moyens dont disposent les uns et les autres.

    << Les priorités de toute société développée doivent être l’égalité, le progrès, la solidarité, le libre accès à la culture, le développement durable et le bien-être des personnes >> :
    – je ne mets pas en priorité l’égalité. Si chacun progresse, c’est mieux, non ? Depuis 30 ans, les classes populaires en occident ont progressé en confort et en bien-être. Il reste des très riche mais rien ne sert de comparer.

    – Sur le sujet du libre accès à la culture, ça dépend de ce qu’est la culture : le rayon culture des magasins inclut souvent le jeux vidéo et les films ainsi que toutes les nouveautés littéraire (romans, essais, biographie…). Je ne vais pas me battre pour un accès libre à tout ce contenu. Par respect pour le travail et les choix de chacun. Au minimum, le copyright et les droits d’auteurs (et la propriété immatérielle) pourraient réduire leur porté : ça serait un premier pas en avant.
    L’accès à la connaissance (et à la capacité de raisonner) me semble un objectif bien plus honorable et attirant auquel je suis prêt à me rallier.

    Autre point pris au hasard dans le manifeste : Quand on voit la profusion d’achat de téléviseurs, consoles de jeux, vêtements à courte durée de vie, je pense que les termes << développement durable >>, << une économie qui ne tourne jamais à notre avantage >> et autres généralités ne sont guère compris par un grande partie du peuple.

    Voilà quelques critiques sur ce texte.

    Benoît

  2. popart

    prolétaires de tous les pays, unissez-vous!
    tiens, j’ai déjà entendu ça, moi…

  3. winael

    @popart

    Sauf qu’ici ce n’est plus la révolte du prolétariat, mais la révolte de citoyens se battant pour un retour à une véritable démocratie, le pouvoir du Peuple pour et par le Peuple, et par Peuple comprendre l’intégralité des citoyens sans discrimination quelconques. Que nos élus comprennent qu’ils ne sont pas au dessus du Peuple mais de simple représentant à qui ils doivent des compte

    Cordialement,

  4. jbar

    http://open-udc.org recherche des développeurs

    Open-udc est le genre de projet qui pourra résoudre pas mal de problème, L’idée principale et de faire mieux que bitcoin (et que l’ISO 20022), et de standardiser aussi les protocoles d’échange.

    Le principe est assez simple et s’appuie sur OpenPGP (RFC4880) :
    – Les identités et les humains (cf. dividende universel) sont validés par la toile de confiance OpenPGP
    – Une transaction consiste à signer la chaîne de signature associé des unités de monnaies.
    – Toutes les unités de monnaies sont stockées sur le réseau (« dans le cloud » pour faire « in » ; décentralisé de préférence).

    NB: c’est un système 100% monnaie, et la création monétaire (il faut bien imprimer des billets) et répartit entre tous les humains du système.

  5. cricri

    @benoit « Quand on voit la profusion d’achat de téléviseurs … » Je mettrai certains objets de coté car ils participent au mouvement comme les smartphones , les ordinateurs , les box , le wifi etc …
    L’achat des écran plats est poussé par la disparition des fréquences analogiques , le coût du M² en ville et le coût du Watt électrique . De plus , certains écrans servent aussi d’écran pour un ordinateur, connectés , ils permettent d’accéder à twitter, skype , facebook, youtube … Bien sur , il y a toujours des beaufs qui les achètent pour les matchs de foot et pour en montrer à son voisin !
    Personnellement, je mange uniquement Bio et j’achète des textiles Bio/equitables mais j’achète le dernier smartphone Android car j’y passe plus de trois heures par jour pour communiquer !
    Cricri

  6. corto_lu

    je trouve la « traduction » PPSOE –> UMPS un peu malheureuse vu que cette dernière expression est depuis peu très souvent utilisée par le FN; les contextes dans lesquels PPSOE et UMPS sont prononcés me semblent fondamentalement différents

  7. Monique

    Ce manifeste existe-t-il sous forme de « pétition » qu’on pourrait faire tourner à travers le monde ?

  8. tala

    Certains des commentaires ci-dessus m’inquiètent un peu.
    Entre l’égalité mise entre parenthèses sous prétexte que les catégories populaires se partagent quelques miettes,
    la vision du « Peuple » mythique, un et indivisible, camouflant les conflits d’intérêts (par exemple entre les actionnaires et les travailleurs),
    l’idolâtrie toute « bobo » envers des gadgets technologiques dispendieux en ressources et en énergies … le moins qu’on puisse dire c’est qu’on est pas sortie de l’auberge !

    Bon courage aux « indignés » espagnols.

    Pour ceux qui voudraient secouer le cocotier de ce côté-ci des pyrénées (sans négliger les différences de contexte), un mouvement analogue se dessine chez nous aussi. Vous pouvez jeter un coup d’œil ici : http://reelledemocratie.com/.

    Mettons-en un coup, peut-être nos sociétés prendrons une direction différente, taxant plus le peuple des hauts-revenus et des revenus financiers, et rendant un peu d’autonomie et de dignité aux peuples des travailleurs modestes, chômeurs, petits retraités …

    j’espère de mon côté qu’on en profitera aussi pour relativiser un peu l’individualisme forcené qui nous mène à l’impasse (logements individuels envahissant les terres agricoles, comportements consommateurs accompagnant la dépréciation des services publics, …)

  9. Toine

    Est-ce que ça serait possible d’avoir la version originale du texte, en castillan ?
    Parce que sur le site DRY, c’est la seule qui ne soit pas disponible.

  10. popart

    @Toine

    Curieusement il est absent du site officiel mais on le trouve là http://berthoalain.wordpress.com/20… (« Site géré par Alain Bertho, professeur d’anthropologie à l’Université de Paris8-Saint-Denis ». )

    Le lien figure d’ailleurs plus haut dans le billet…